Language of document : ECLI:EU:F:2011:101

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (première chambre)

5 juillet 2011 (*)

« Fonction publique – Agent contractuel – Conditions d’engagement – Aptitude physique – Visite médicale d’embauche – Protection des personnes physiques à l’égard du traitement de données à caractère personnel – Secret médical – Transfert de données médicales entre institutions – Droit au respect de la vie privée »

Dans l’affaire F‑46/09,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

V, candidate à un emploi d’agent contractuel au Parlement européen, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Mes É. Boigelot et S. Woog, avocats,

partie requérante,

soutenue par

Contrôleur européen de la protection des données, représenté par Mme M. V. Pérez Asinari et par M. H. Kranenborg, en qualité d’agents,

partie intervenante,

contre

Parlement européen, représenté par Mmes K. Zejdová et S. Seyr, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre),

composé de M. S. Gervasoni (rapporteur), président, M. H. Kreppel et Mme M. I. Rofes i Pujol, juges,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 8 mars 2011,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 octobre 2009, V a introduit le présent recours tendant, principalement, à l’annulation d’une part, de la décision du 19 décembre 2008 par laquelle le directeur de la gestion administrative du personnel du Parlement européen a retiré, pour cause d’inaptitude à l’embauche, l’offre d’emploi qui lui avait été présentée le 10 décembre 2008, et, d’autre part, de l’avis du médecin-conseil du Parlement du 18 décembre 2008, ainsi qu’à la réparation des préjudices qu’elle estime avoir subis.

 Cadre juridique

2        L’article 82, paragraphe 3, du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA ») dispose :

« Nul ne peut être engagé comme agent contractuel :

[…]

d)      s’il ne remplit les conditions d’aptitude physique requises pour l’exercice de ses fonctions ; [...] »

3        Aux termes de l’article 83 du RAA :

« Avant qu’il ne soit procédé à son engagement, l’agent contractuel est soumis à l’examen médical d’un médecin-conseil de l’institution, afin de permettre à celle-ci de s’assurer qu’il remplit les conditions exigées à l’article 82, paragraphe 3, [sous] d).

L’article 33, second alinéa, du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne] est applicable par analogie. »

4        L’article 33, second alinéa, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») prévoit :

« Lorsque l’examen médical prévu au premier alinéa a donné lieu à un avis médical négatif, le candidat peut demander, dans les vingt jours de la notification qui lui en est faite par l’institution, que son cas soit soumis à l’avis d’une commission médicale composée de trois médecins choisis par l’autorité investie du pouvoir de nomination parmi les médecins-conseils des institutions. Le médecin-conseil qui a émis le premier avis négatif est entendu par la commission médicale. Le candidat peut saisir la commission médicale de l’avis d’un médecin de son choix. Lorsque l’avis de la commission médicale confirme les conclusions de l’examen médical prévu au premier alinéa, les honoraires et frais accessoires sont supportés pour moitié par le candidat. »

5        L’article 15 de la décision du Bureau du Parlement, du 3 mai 2004, portant réglementation interne relative au recrutement des fonctionnaires et autres agents (ci-après la « réglementation interne ») dispose :

« L’agent contractuel est soumis avant qu’il ne soit procédé à son engagement à un examen médical conformément à l’article 83 du RAA. Le résultat de cet examen est valable pour un an, sauf indication contraire du médecin-conseil de l’[i]nstitution, qui peut, le cas échéant, en fixer une validité plus courte. »

6        Le manuel des procédures du service médical de la Commission européenne prévoit que, s’il n’y a pas de prise de fonctions, après la signature de l’aptitude ou de l’inaptitude, le dossier est classé aux archives après six mois.

7        L’article 1er, paragraphe 1, du règlement (CE) no 45/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2000, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires et à la libre circulation de ces données (JO 2001, L 8, p. 1) dispose :

« Les institutions et organes créés par les traités instituant [l’Union européenne] ou sur la base de ces traités, ci-après dénommés ‘institutions et organes [de l’Union]’, assurent, conformément au présent règlement, la protection des libertés et droits fondamentaux des personnes physiques, notamment de leur vie privée, à l’égard du traitement des données à caractère personnel et ne restreignent ni n’interdisent la libre circulation des données à caractère personnel entre eux ou vers des destinataires relevant de la législation nationale des États membres adoptée en application de la directive 95/46/CE. »

8        L’article 4 du règlement no 45/2001 prévoit :

« 1. Les données à caractère personnel doivent être :

a)      traitées loyalement et licitement ;

b)      collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes, et ne pas être traitées ultérieurement de manière incompatible avec ces finalités. Un traitement ultérieur à des fins historiques, statistiques ou scientifiques n’est pas réputé incompatible pour autant que le responsable du traitement prévoie des garanties appropriées, afin de veiller, en particulier, à ce que les données ne soient traitées pour aucune autre finalité et qu’elles ne soient pas utilisées à l’appui de dispositions ou décisions concernant une personne en particulier ;

c)      adéquates, pertinentes et non excessives au regard des finalités pour lesquelles elles sont collectées et pour lesquelles elles sont traitées ultérieurement ;

d)      exactes et, si nécessaire, mises à jour ; toutes les mesures raisonnables sont prises pour que les données inexactes ou incomplètes, au regard des finalités pour lesquelles elles sont collectées ou pour lesquelles elles sont traitées ultérieurement, soient effacées ou rectifiées ;

e)      conservées sous une forme permettant l’identification des personnes concernées pendant une durée n’excédant pas celle nécessaire à la réalisation des finalités pour lesquelles elles sont collectées ou pour lesquelles elles sont traitées ultérieurement. L’institution ou l’organe [de l’Union] prévoit, pour les données à caractère personnel qui doivent être conservées au-delà de la période précitée à des fins historiques, statistiques ou scientifiques, soit qu’elles ne seront conservées que sous une forme qui les rend anonymes, soit, si cela est impossible, qu’elles ne seront stockées qu’à condition que l’identité de la personne concernée soit cryptée. Les données ne doivent en tout cas pas être utilisées à des fins autres qu’historiques, statistiques ou scientifiques.

2. Il incombe au responsable du traitement d’assurer le respect du paragraphe 1. »

9        Aux termes de l’article 6 du règlement no 45/2001 :

« Sans préjudice des articles 4, 5 et 10 :

1) Les données à caractère personnel ne peuvent être traitées pour des finalités autres que celles pour lesquelles elles ont été collectées que si le changement de finalité est expressément autorisé par les règles internes de l’institution ou de l’organe [de l’Union].

[…] »

10      L’article 7 du règlement no 45/2001 prévoit :

« Sans préjudice des articles 4, 5, 6 et 10 :

1) Les données à caractère personnel ne peuvent faire l’objet de transferts entre institutions ou organes communautaires ou en leur sein que si elles sont nécessaires à l’exécution légitime de missions relevant de la compétence du destinataire.

[…] »

11      L’article 10 du règlement no 45/2001 dispose, en ses paragraphes 1 à 3 :

« 1. Le traitement des données à caractère personnel qui révèlent l’origine raciale ou ethnique, les opinions politiques, les convictions religieuses ou philosophiques, l’appartenance syndicale, ainsi que le traitement des données relatives à la santé ou à la vie sexuelle sont interdits.

2. Le paragraphe 1 ne s’applique pas lorsque :

a)      la personne concernée a donné son consentement explicite à un tel traitement, sauf lorsque les règles internes de l’institution ou de l’organe [de l’Union] prévoient que l’interdiction visée au paragraphe 1 ne peut être levée par le consentement de la personne concernée, ou

b)      le traitement est nécessaire afin de respecter les obligations et les droits spécifiques du responsable du traitement en matière de droit du travail, dans la mesure où il est autorisé par les traités instituant [l’Union européenne] ou d’autres actes législatifs adoptés sur la base de ces traités ou, si cela s’avère nécessaire, dans la mesure où il est accepté par le contrôleur européen de la protection des données, moyennant des garanties adéquates […]

3. Le paragraphe 1 ne s’applique pas lorsque le traitement des données est nécessaire aux fins de la médecine préventive, des diagnostics médicaux, de l’administration de soins ou de traitements ou de la gestion de services de santé et que le traitement de ces données est effectué par un praticien de la santé soumis au secret professionnel ou par une autre personne également soumise à une obligation de secret équivalente. »

 Faits à l’origine du litige

12      Entre février 1997 et mars 2006, la requérante a travaillé dans plusieurs services de la Commission en tant qu’agent auxiliaire ou en tant qu’intérimaire, pendant une période totale d’environ trois ans. Elle a notamment exercé en dernier lieu, par intérim, des fonctions d’assistante au sein de l’unité « Enquêtes en commun avec d’autres organismes » de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), de septembre 2005 à mars 2006.

13      Par note du 27 février 2006, la requérante a été informée de sa réussite aux tests de sélection d’agents contractuels, dits CAST 25, pour les 25 États membres dans le domaine du secrétariat. Son nom a, en conséquence, été inscrit dans la base finale de l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) des candidats ayant réussi, dont la validité était de trois ans.

14      En juin 2006, deux directions générales de la Commission ont manifesté le souhait de recruter la requérante.

15      La requérante a été convoquée à un examen médical en vue d’apprécier son aptitude à l’exercice de ses fonctions, conformément à l’article 83 du RAA.

16      Le 26 juin 2006, l’examen médical d’embauche s’est tenu dans les locaux du service médical de la Commission à Bruxelles (Belgique) et la requérante a été reçue par le docteur K.

17      Le 29 juin 2006, la requérante a adressé un courriel à M. F., chef du service médical de la Commission, pour se plaindre du comportement inapproprié qu’aurait eu le docteur K. à son égard lors de l’examen médical d’embauche du 26 juin 2006.

18      M. F. a instruit cette plainte en juillet 2006, d’une part, en entendant le docteur K., qui a réfuté les faits qui lui étaient reprochés, et, d’autre part, en recevant la requérante.

19      À l’issue de cette instruction, malgré l’absence de preuve concernant les faits reprochés au docteur K., il a été décidé de confier le traitement du dossier de la requérante à un autre médecin.

20      Le 26 septembre 2006, le médecin-conseil de la Commission a émis un avis médical d’inaptitude physique de la requérante.

21      Par lettre du 9 novembre 2006, Mme S., directrice au sein de la direction générale (DG) « Personnel et administration », a informé la requérante qu’elle ne remplissait pas alors les conditions d’aptitude physique requises pour l’exercice de ses fonctions et qu’il lui était possible de demander, dans un délai de 20 jours, conformément à l’article 33, second alinéa, du statut, que son cas soit soumis à l’avis d’une commission médicale.

22      Par lettre du 18 novembre 2006, la requérante a demandé que son cas soit soumis à l’avis d’une commission médicale.

23      Dans son avis du 17 avril 2007, adopté d’un commun accord par ses trois membres, la commission médicale a indiqué, après avoir examiné l’ensemble des pièces du dossier de l’intéressée et sollicité une expertise psychiatrique, qu’elle était « d’avis que [la requérante] ne [possédait] pas les aptitudes requises pour l’exercice de ses fonctions ». Il était précisé, à la fin de l’avis, que « le fondement médical des conclusions [était] transmis sous secret médical [au service médical de la Commission] ».

24      Par lettre du 15 mai 2007, la Commission a informé la requérante que, « [s]elon l’avis de la commission [dont copie était annexée à la lettre], [elle] ne rempliss[ait] pas les conditions d’aptitude physique requises pour l’exercice de [ses] fonctions ». Il était mentionné dans cette lettre que « [l]e fondement médical des conclusions [avait] été transmis sous secret médical au [c]hef du [s]ervice médical de la Commission à Bruxelles, qui l’[avait] versé [au] dossier médical [de la requérante] ».

25      Le 9 mai 2007, la requérante a présenté une réclamation contre cette décision.

26      Par décision du 12 juillet 2007, la Commission a rejeté la réclamation.

27      Le 4 mars 2008, la requérante a introduit un recours notamment contre la décision du 15 mai 2007, sous la référence F‑33/08. Par arrêt du 21 octobre 2009, le Tribunal a rejeté ce recours. Le Tribunal de l’Union européenne, saisi d’un pourvoi, a confirmé ce rejet, par arrêt du 15 juin 2011 (V/Commission, T‑510/09 P).

28      Après que le service médical du Parlement, par une note du 9 décembre 2008, a demandé la communication du dossier médical de la requérante aux services de la Commission, le Parlement a présenté, par lettre du 10 décembre 2008, une offre d’emploi à la requérante en qualité d’agent contractuel, pour un emploi relevant du groupe de fonctions II au secrétariat général, pour la période allant du 2 février au 2 août 2009. Dans cette lettre, il était précisé que cette offre était faite sous réserve du respect des conditions d’engagement prévues à l’article 82 du RAA et du résultat positif de l’examen médical d’embauche. La requérante était également invitée à faire parvenir par télécopie, dans un délai maximum de deux semaines, les documents nécessaires, en particulier une copie certifiée conforme à l’original des certificats de tous ses employeurs précédents. Par courriel du même jour, la personne responsable de la gestion du dossier de recrutement de la requérante a, notamment, informé celle-ci des modalités de l’examen médical d’embauche et l’a invitée à apporter une photo d’identité « pour la constitution de [son] dossier médical ».

29      Par courriel du 10 décembre 2008, la requérante a accepté l’offre d’emploi du Parlement. Par un autre courriel du même jour, elle a informé le Parlement qu’il lui était impossible de communiquer par télécopie les documents demandés dans un délai de quinze jours, en raison d’un déplacement à l’étranger et que, compte tenu de la période de Noël, elle souhaitait obtenir un délai jusqu’en janvier.

30      Par lettre du 10 décembre 2008, la requérante a été convoquée le 7 janvier 2009 pour l’examen médical d’embauche. Cette lettre comportait, en bas de page, le nom des six médecins membres du service médical du Parlement à Bruxelles. La lettre était signée par le docteur B. Parmi les six médecins mentionnés figurait le docteur K., qui avait effectué la visite médicale d’embauche du 26 juin 2006 de la requérante à la Commission et dont le comportement avait été contesté par la requérante.

31      Par courriel du 11 décembre 2008, la personne responsable de la gestion du dossier de la requérante a répondu à cette dernière qu’elle pouvait sans problème communiquer les documents demandés en janvier, le recrutement étant prévu pour le 2 février 2009.

32      Le 12 décembre 2008, la requérante s’est, de sa propre initiative, présentée à la clinique du Parc Léopold à Bruxelles afin de réaliser des analyses de sang.

33      Le 12 décembre 2008, le service médical du Parlement a reçu copie du dossier médical d’embauche de la requérante, dont l’original avait été conservé aux archives de la Commission après le refus d’embauche de l’intéressée par cette institution.

34      Par avis du 18 décembre 2008, le médecin-conseil du Parlement a, après avoir consulté les éléments communiqués par la Commission, conclu à l’inaptitude physique de la requérante à l’exercice de « toutes les fonctions dans toutes les [i]nstitutions européennes ». Cet avis est intitulé « Résultat de l’examen médical du 26 [juin] 2006 réalisé à la Commission à Bruxelles » et fondé sur le constat que la requérante a été reconnue inapte le 26 septembre 2006 par le médecin-conseil de la Commission, inaptitude confirmée le 17 avril 2007 par la commission médicale de recours et « encore valable actuellement pour toutes les fonctions dans toutes les institutions européennes ».

35      Par lettre du 19 décembre 2008, le Parlement a informé la requérante de l’avis d’inaptitude susmentionné du 18 décembre 2008 et retiré l’offre d’emploi qui lui avait été présentée le 10 décembre 2008 (ci-après la « décision litigieuse »). Dans cette lettre, en premier lieu, le Parlement rappelait l’obligation qui aurait pesé sur la requérante de l’informer de toute autre visite médicale d’embauche réalisée par le passé auprès d’une autre institution afin de faciliter la procédure de recrutement et de permettre le transfert du dossier médical détenu par l’institution en cause. En second lieu, le Parlement indiquait qu’il avait obtenu le transfert du dossier médical de la requérante détenu par la Commission, après avoir appris, en consultant la base de données CAST, que l’intéressée avait travaillé auparavant pour ladite institution.

36      Par lettre du 5 janvier 2009, la requérante a, sur le fondement de l’article 90, paragraphe 2, du statut, formé une réclamation contre la décision litigieuse. Le Parlement soutient, sans être contredit, que la réclamation lui est parvenue le 7 janvier 2009.

37      Par courriels des 26 janvier et 13 mars 2009, la requérante a complété la réclamation. En outre, elle a sollicité la communication des résultats des prises de sang effectuées le 12 décembre 2008 à la clinique du Parc Léopold et le 26 juin 2006 par le service médical de la Commission et a accusé le docteur K. d’avoir falsifié les résultats de ces analyses médicales.

38      Le 18 février 2009, la requérante a fait procéder à une nouvelle analyse de sang faisant apparaître, selon les sources qu’elle cite, « une différence remarquable et à première vue difficile à expliquer avec les résultats des analyses de sang du 12 décembre 2008 ».

39      Par lettre du 30 avril 2009, le Parlement a informé la requérante qu’il rejetait les accusations selon lesquelles le docteur K. aurait falsifié les résultats des analyses de sang susmentionnées.

40      Une décision implicite de rejet de la réclamation est née le 7 mai 2009.

41      Par lettre du 12 mai 2009, le Parlement a communiqué les résultats des analyses de sang à la requérante.

42      Par lettre du 24 juin 2009, notifiée à la requérante le 2 juillet 2009, le secrétaire général du Parlement a explicitement rejeté la réclamation.

 Conclusions des parties et procédure

43      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        ordonner au Parlement, avant dire-droit, d’une part, de retirer de son dossier médical les résultats des analyses de sang réalisées le 12 décembre 2008 à la clinique du Parc Léopold pour cause de falsification par le docteur K., et, d’autre part, de retirer, remplacer ou corriger dans son dossier médical, les fausses réponses qu’elle a données sous la pression du docteur K., lors de la visite médicale d’embauche à la Commission ;

–        annuler la décision litigieuse ;

–        annuler l’avis du médecin-conseil du 18 décembre 2008 ;

–        enjoindre au Parlement d’organiser une réelle visite d’embauche qui soit non discriminatoire et de rouvrir l’emploi qui lui avait été proposé à la DG « Communication » du Parlement ;

–        condamner le Parlement à lui verser la somme de 70 000 euros au titre des préjudices moral et matériel allégués, ladite somme étant assortie des intérêts moratoires ;

–        condamner le Parlement aux dépens.

44      Le Parlement demande au Tribunal de :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux entiers dépens.

45      Par lettre du 12 février 2010, portant mesure d’organisation de la procédure, le Tribunal a demandé au Parlement de produire la décision du Bureau du Parlement du 3 mai 2004, portant réglementation interne relative au recrutement des fonctionnaires et autres agents. Le Parlement a déféré à cette demande.

46      Par lettre du 12 avril 2010, le Tribunal a adopté une mesure d’instruction, en application de l’article 58, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement de procédure, par laquelle il a demandé à la Commission de préciser notamment quelles étaient les règles internes à cette institution applicables en matière de transfert de données à caractère médical vers une autre institution et dans quelles circonstances factuelles s’était produit le transfert des données médicales de V au Parlement. Par lettre du 23 avril 2010, la Commission a déféré à cette mesure.

47      Par lettre du 12 avril 2010, le Tribunal a invité le Parlement, d’une part, dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure, à préciser les circonstances factuelles dans lesquelles a eu lieu le transfert des données médicales de la requérante vers lui, d’autre part, conformément à l’article 111, paragraphe 1, du règlement de procédure, à présenter ses observations sur l’opportunité d’inviter le Contrôleur européen de la protection des données (CEPD) à intervenir dans la procédure. Par lettre du 23 avril 2010, le Parlement a déféré à la mesure d’organisation de la procédure et informé le Tribunal qu’il n’avait pas d’observations à émettre sur l’opportunité d’inviter le CEPD à intervenir dans la procédure.

48      Par lettre du 12 avril 2010, le Tribunal a invité la requérante, conformément à l’article 111, paragraphe 1, du règlement de procédure, à présenter ses observations sur l’opportunité d’inviter le CEPD à intervenir dans la procédure. Par lettre du 23 avril 2010, la requérante a répondu qu’une telle invitation à intervenir lui paraissait opportune.

49      Le Tribunal a estimé qu’il n’y avait pas lieu d’inviter la Commission à intervenir dans le présent litige, cette institution ayant apporté au Tribunal, dans le cadre de la mesure d’instruction susmentionnée, les compléments d’information nécessaires au dossier. En outre, dans le présent litige, les droits de la Commission ne sont pas susceptibles d’être directement lésés, aucun acte de cette institution n’étant visé par les conclusions du recours.

50      Par courriel du 23 avril 2010, la requérante a fait savoir au Tribunal qu’elle avait suspendu le mandat de son avocat jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la demande de dessaisissement du Tribunal qu’elle avait adressée à la Cour de justice de l’Union européenne.

51      Après un échange de lettres et de courriels entre le Tribunal et la requérante, notamment une lettre du greffier du 21 mai 2010 et une lettre du président du Tribunal du 10 juin 2010, la requérante a, par lettre du 15 juin 2010 adressée au président du Tribunal, confirmé qu’elle maintenait son recours devant le Tribunal et le mandat de représentation qu’elle avait donné à Me Boigelot dans la présente affaire. Cette lettre, émanant de la requérante, n’a pas été versée au dossier. Par lettre du 1er juillet 2010, Me Boigelot a confirmé qu’il était toujours mandaté par la requérante dans cette affaire. À cette lettre était annexée la lettre du 15 juin 2010 de la requérante.

52      Par lettre du 8 juillet 2010, le Tribunal a invité le CEPD à lui indiquer s’il souhaitait intervenir dans le présent litige. Dans cette lettre, le Tribunal soulignait notamment que la requérante invoquait la violation des articles 6 et 7 du règlement no 45/2001.

53      Par lettre du 31 août 2010, le CEPD a répondu qu’il souhaitait intervenir dans la présente affaire, au soutien des conclusions de la partie requérante.

54      Par lettre du 16 septembre 2010, le Tribunal a invité les parties, conformément à l’article 111, paragraphe 2, du règlement de procédure, à lui indiquer, le cas échéant, les pièces qu’elles estiment secrètes ou confidentielles et que, en conséquence, elles ne désirent pas voir communiquées à l’intervenant. Par lettre du 20 septembre 2010, le Parlement a répondu au Tribunal qu’aucune pièce versée au dossier n’était secrète ou confidentielle. Par lettre du 24 septembre 2010, la requérante a demandé le traitement confidentiel de ses données à caractère personnel dans tout acte de procédure de la présente affaire, afin d’éviter toute possibilité d’identification, et elle a envoyé au Tribunal une version non confidentielle de la requête.

55      Les parties ont été informées par lettre du 11 octobre 2010 que le Tribunal avait accordé le traitement confidentiel demandé par la requérante. Le Parlement a été invité à transmettre au Tribunal une version non confidentielle du mémoire en défense et de la lettre du 23 avril 2010 par laquelle il avait indiqué, notamment, qu’il n’avait pas d’observations à émettre sur l’opportunité d’une intervention du CEPD dans la procédure. Le Parlement a déféré à cette demande.

56      Par ordonnance du 10 novembre 2010, l’intervention du CEPD a été admise.

57      Le 10 janvier 2011, le CEPD a produit son mémoire en intervention. Il précise dans ce mémoire qu’il n’intervient au soutien des conclusions de la requérante que dans la mesure où celle-ci soutient que la conduite du service médical du Parlement était contraire aux règles de protection des données.

58      Par lettres du 3 février 2011, les parties ont présenté leurs observations sur ce mémoire.

 En droit

1.      Sur les conclusions aux fins d’annulation de l’avis du médecin-conseil du 18 décembre 2008

59      Il est de jurisprudence constante que constituent des actes ou décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation les seules mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celui-ci (arrêt du Tribunal de première instance du 15 juin 1994, Pérez Jiménez/Commission, T‑6/93, point 34). Lorsqu’il s’agit d’actes ou de décisions dont l’élaboration s’effectue en plusieurs phases, notamment au terme d’une procédure interne, ne sont susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation, en principe, que les mesures qui fixent définitivement la position de l’institution au terme de cette procédure, à l’exclusion des mesures intermédiaires dont l’objectif est de préparer la décision finale (voir notamment, en ce qui concerne un avis de la commission médicale, arrêt du Tribunal de première instance du 11 avril 2006, Angeletti/Commission, T‑394/03, point 36 ; en ce qui concerne un avis de la commission d’invalidité, arrêt du Tribunal de la fonction publique du 4 novembre 2008, Marcuccio/Commission, F‑41/06, points 53 et 54).

60      L’avis du médecin-conseil du 18 décembre 2008 constitue un acte préparatoire de la décision litigieuse et la requérante n’est, par suite, pas recevable à le contester directement. Il s’ensuit que les conclusions dirigées contre cet avis doivent être rejetées comme irrecevables.

2.      Sur les conclusions tendant à ce que le Tribunal ordonne certaines mesures

61      La requérante demande au Tribunal d’ordonner au Parlement, d’une part, de retirer de son dossier médical les résultats des analyses de sang réalisées le 12 décembre 2008, et, d’autre part, de retirer de son dossier médical ou de remplacer ou corriger les fausses réponses qu’elle a données sous la pression du docteur K., lors de la visite médicale d’embauche à la Commission. La requérante sollicite également du Tribunal qu’il ordonne au Parlement d’organiser une visite médicale d’embauche et de rouvrir l’emploi qui lui avait été proposé à la DG « Communication » du Parlement.

62      De telles demandes sont, comme le fait valoir le Parlement, des conclusions aux fins d’injonction.

63      Or, il est de jurisprudence constante que le juge de l’Union est incompétent pour adresser des injonctions aux institutions (arrêt de la Cour du 21 novembre 1989, Becker et Starquit/Parlement, C‑41/88 et C‑178/88, publication sommaire, point 6 ; arrêts du Tribunal de première instance du 9 juin 1994, X/Commission, T‑94/92, point 33 ; du 9 juin 1998, Chesi e.a./Conseil, T‑172/95, point 33, et du 15 décembre 1999, Latino/Commission, T‑300/97, point 28, et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal de la fonction publique du 7 novembre 2007, Hinderyckx/Conseil, F‑57/06, point 65).

64      Par conséquent, les conclusions susmentionnées ne peuvent qu’être rejetées comme irrecevables.

3.      Sur les conclusions aux fins d’annulation de la décision litigieuse

65      La requérante soulève en substance quatre moyens :

–        le premier, tiré du caractère irrégulier de l’avis du médecin-conseil du Parlement, émis sur la base de documents émanant du service médical de la Commission remontant à plus de deux ans et sans examen clinique et psychologique préalable de l’intéressée ;

–        le deuxième, tiré de la méconnaissance de la procédure prévue par l’article 33, second alinéa, du statut et du principe du respect des droits de la défense, en tant que la décision litigieuse a été adoptée sans que la requérante ait été mise à même de saisir au préalable la commission médicale d’appel ;

–        le troisième, tiré de la méconnaissance du principe de respect de la vie privée et des dispositions des articles 6 et 7 du règlement no 45/2001 ;

–        le quatrième, tiré de l’existence d’un harcèlement moral.

 Sur le premier moyen, tiré du caractère irrégulier de l’avis du médecin-conseil

 Arguments des parties

66      La requérante soutient que l’avis du médecin-conseil, sur la base duquel a été adoptée la décision litigieuse, a été émis dans des conditions irrégulières. En effet, le médecin-conseil aurait rendu son avis sans examen médical de la requérante et sur la base exclusive d’un dossier médical ancien, émanant du service médical de la Commission, dont les informations dataient de plus de deux ans et qui a été contesté dans l’affaire F‑33/08. Or, le juge de l’Union considérerait que la visite médicale d’embauche doit, sous peine d’être parfaitement inutile, comporter nécessairement un examen clinique. En outre, selon la réglementation de la Commission, un avis d’aptitude aurait une durée de validité limitée à six mois.

67      Le Parlement ne conteste pas que la requérante n’a pas été soumise à un examen clinique par son médecin-conseil. Toutefois, en l’espèce, il estime que son médecin-conseil n’était pas tenu de réaliser un tel examen.

68      En premier lieu, à titre liminaire, le Parlement souligne que la décision d’inaptitude adoptée par la Commission à l’égard de la requérante a été jugée légale par le Tribunal, dans son arrêt du 21 octobre 2009 (V/Commission, précité). La décision litigieuse et l’avis du médecin-conseil seraient donc fondés sur une décision que la Commission a adoptée en toute légalité.

69      En deuxième lieu, le Parlement soutient que l’opportunité de procéder ou non à un examen clinique du candidat à l’embauche est une question purement médicale qui ne peut faire l’objet d’un contrôle du juge. Il rappelle à cet égard, par analogie, la jurisprudence du juge de l’Union s’agissant de l’opportunité pour la commission d’invalidité de procéder à un examen médical du fonctionnaire.

70      En troisième lieu, le Parlement fait valoir que son médecin-conseil aurait été en possession du dossier médical de la requérante transmis par la Commission, dossier qui comprenait les résultats de plusieurs examens cliniques et expertises complémentaires. Or, les informations contenues dans ce dossier auraient été suffisamment récentes et pertinentes pour lui permettre d’émettre son avis, compte tenu du caractère chronique et durable de la pathologie de la requérante.

71      En quatrième lieu, le Parlement écarte l’argument tiré du manuel des procédures du service médical de la Commission, texte qui ne serait pas applicable au Parlement. La seule règle interne prévue par le Parlement concernant la validité d’un examen d’embauche serait constituée par l’article 15 de la réglementation interne, lequel prévoit une durée de validité d’un an des avis d’aptitude. Or, cette règle ne serait applicable qu’aux avis positifs et ne pourrait s’opposer à ce que le médecin-conseil du Parlement, pour rendre l’avis en litige, se réfère à un avis d’inaptitude d’un médecin-conseil de la Commission émis plus d’un an auparavant.

 Appréciation du Tribunal

72      Si le juge de l’Union ne peut, dans le cadre du contrôle de légalité d’un refus de recrutement motivé par une inaptitude physique, substituer sa propre appréciation à un avis d’ordre spécifiquement médical, il lui appartient toutefois de vérifier si la procédure de recrutement s’est déroulée légalement et, plus particulièrement, d’examiner si le refus de recrutement repose sur un avis médical motivé, établissant un lien compréhensible entre les constatations médicales qu’il comporte et la conclusion à laquelle il arrive (arrêt du Tribunal de première instance du 14 avril 1994, A/Commission, T‑10/93, point 61).

73      Il est possible, pour le médecin-conseil d’une institution, de fonder son avis d’inaptitude physique non seulement sur l’existence de troubles physiques ou psychiques actuels, mais encore sur un pronostic, médicalement fondé, de troubles futurs, susceptibles de mettre en cause, dans un avenir prévisible, l’accomplissement normal des fonctions envisagées (arrêt A/Commission, précité, point 62).

74      En outre, il y a lieu de rappeler que, dans les cas où une institution de l’Union dispose d’un large pouvoir d’appréciation, le contrôle du respect des garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union dans les procédures administratives revêt une importance fondamentale. Le juge de l’Union a eu l’occasion de préciser que parmi ces garanties figurent notamment pour l’institution compétente l’obligation d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce et celle de motiver sa décision de façon suffisante (voir arrêts de la Cour du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, point 14 ; du 7 mai 1992, Pesquerias De Bermeo et Naviera Laida/Commission, C‑258/90 et C‑259/90, point 26, du 22 novembre 2007, Espagne/Lenzing, C‑525/04 P, point 58 ; arrêt du Tribunal de première instance du 8 septembre 2009, ETF/Landgren, T‑404/06 P, point 163).

75      En l’espèce, il ressort des termes mêmes de l’avis du 18 décembre 2008 que le médecin-conseil du Parlement, pour émettre cet avis, s’est fondé exclusivement sur des données médicales recueillies par la Commission en 2006 et 2007, plus d’un an et demi auparavant, dans le cadre d’une autre procédure médicale d’embauche. Le Parlement ne conteste d’ailleurs pas que ces données médicales aient été obtenues par la Commission plus d’un an et demi avant l’avis d’inaptitude du médecin-conseil du Parlement émis le 18 décembre 2008.

76      Or, il y a lieu de relever, d’abord, que l’article 15 de la réglementation interne, règle de conduite que le Parlement s’est imposé à lui-même et dont il ne peut s’écarter sans préciser les raisons qui l’y ont amené, limite de manière générale à un an la durée de validité du résultat d’un examen médical réalisé dans le cadre des dispositions de l’article 83 du RAA. Ainsi, eu égard à cette disposition, le Parlement aurait dû, à tout le moins, douter de la validité des données recueillies auprès de la Commission, dès lors qu’il n’aurait pu les considérer comme valides plus d’un an après l’examen d’embauche, si celles-ci avaient été obtenues au cours d’une procédure d’embauche conduite par lui-même.

77      Ensuite, il a été jugé que l’examen médical d’embauche doit, sous peine d’être parfaitement inutile, comporter nécessairement un examen clinique et, le cas échéant, les tests biologiques complémentaires ordonnés par le médecin-conseil (arrêt A/Commission, précité, points 49 à 51).

78      Enfin, il résulte de la jurisprudence précitée aux points 73 et 74 qu’un avis d’inaptitude, pour être régulier, doit constater des troubles actuels ou futurs et être fondé sur des éléments pertinents.

79      Certes, le Parlement fait valoir, en s’appuyant sur la jurisprudence en matière de constatation de l’origine professionnelle d’une invalidité, que la question de savoir si, dans des circonstances données, il convient d’effectuer un examen clinique de la personne concernée relève du pouvoir d’appréciation qui est conféré aux membres de la commission d’invalidité (arrêt du Tribunal de première instance du 23 novembre 2004, O/Commission, T‑376/02, point 44).

80      Toutefois, cette jurisprudence est relative aux limites du contrôle juridictionnel sur les appréciations purement médicales et ne saurait justifier que le médecin-conseil s’exonère de l’obligation, prévue à l’article 83 du RAA, d’effectuer un examen médical afin de s’assurer lui-même de l’aptitude de l’intéressé à l’exercice de ses fonctions.

81      En outre, le pouvoir d’appréciation en matière médicale reconnu au médecin n’interdit pas au juge, d’une part, de vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, et, d’autre part, de contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être pris en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (voir en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 12 mai 2004, Hecq/Commission, T‑191/01, point 63).

82      Ainsi, en l’espèce, eu égard à l’ancienneté des données médicales communiquées par la Commission, à l’évolution possible de ces données entre-temps, le médecin-conseil ne disposait pas de tous les éléments pertinents sur l’état de santé de la requérante lorsqu’il a émis son avis d’inaptitude.

83      L’argument du Parlement, tiré de la pathologie ayant motivé le constat d’inaptitude de la requérante par la Commission en 2007, ne peut qu’être écarté. En effet, il a été jugé que des troubles mentaux, par nature évolutifs, ne pouvaient justifier que la personne qui en souffre soit définitivement exclue du service, l’administration ayant l’obligation d’assurer un réexamen périodique de l’intéressé à des intervalles raisonnables (voir, à propos de la mise en congé de maladie d’office d’un fonctionnaire, arrêt du Tribunal de la fonction publique du 13 décembre 2006, de Brito Sequeira Carvalho/Commission, F‑17/05, points 129 et 130, confirmés par l’arrêt du Tribunal de première instance du 5 octobre 2009, de Brito Sequeira Carvalho/Commission, T‑40/07 P, et Commission/de Brito Sequeira Carvalho, T‑62/07 P, points 231 à 240).

84      Quant à la circonstance que la décision d’inaptitude de la requérante adoptée par la Commission en 2007 a été jugée légale par le Tribunal, elle est sans incidence sur l’appréciation du bien-fondé du présent moyen, compte tenu des considérations développées aux points qui précèdent.

85      De surcroît, lors de l’audience, en réponse à des questions du Tribunal, les agents du Parlement ont indiqué que, en raison du secret médical, ils n’avaient, pas davantage que l’autorité investie du pouvoir de nomination lorsqu’elle a statué sur la réclamation de la requérante, eu accès aux pièces sur la base desquelles le médecin-conseil du Parlement a émis son avis d’inaptitude. Ils n’ont donc pu préciser au Tribunal quelle était la nature de ces pièces ni confirmer que le dossier transféré de la Commission au Parlement permettait d’éclairer complètement le médecin-conseil du Parlement sur le contexte particulier de la procédure médicale d’embauche conduite à la Commission et sur le fait que la requérante avait, dans le passé, été engagée à plusieurs reprises, par la Commission. De même, l’autorité compétente du Parlement n’a pas été en mesure de vérifier si l’avis du médecin-conseil reposait sur l’ensemble des données pertinentes.

86      Enfin, le Tribunal constate que le médecin-conseil du Parlement a émis un avis exprimé en termes catégoriques et généraux, sans avoir examiné la requérante, alors que dans le cadre de la procédure médicale d’embauche à la Commission, les experts désignés par la commission médicale avaient exprimé un avis plus nuancé.

87      En conséquence, le moyen tiré du caractère irrégulier de l’avis du médecin-conseil doit être accueilli.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la méconnaissance de l’article 33, second alinéa, du statut

 Arguments des parties

88      La requérante fait valoir que le Parlement a méconnu les dispositions de l’article 33 du statut et le principe du respect des droits de la défense. En effet, la décision litigieuse aurait été adoptée avant même que la requérante ait pu saisir la commission médicale d’appel prévue par ces dispositions.

89      Le Parlement soutient, en premier lieu, que la décision litigieuse précisait à la requérante qu’elle disposait de la possibilité, si elle l’estimait opportun, de saisir la commission médicale pour contester l’avis du médecin-conseil, faculté dont elle n’aurait pas usé.

90      En second lieu, le Parlement précise les raisons pour lesquelles la décision litigieuse a été adoptée immédiatement. D’abord, en n’informant pas le service médical des examens médicaux qu’elle avait passés à la Commission, la requérante aurait rompu le lien de confiance avec l’institution. Ensuite, il estime que l’emploi proposé à la requérante devait être pourvu rapidement afin de faire face à l’absence d’une fonctionnaire bénéficiant d’un congé de maternité. Enfin, si l’avis du médecin-conseil avait été remis en cause par la commission médicale, le Parlement fait valoir qu’eu égard à la nature de l’emploi proposé, il aurait pu proposer à la requérante un emploi équivalent.

 Appréciation du Tribunal

91      Il résulte des dispositions combinées des articles 82 et 83 du RAA qu’un candidat à un emploi d’agent contractuel est soumis à l’examen médical du médecin-conseil de l’institution avant qu’il ne soit procédé à son engagement, afin de vérifier s’il remplit les conditions d’aptitude physique requises pour l’exercice des fonctions proposées.

92      L’article 33, second alinéa, du statut, applicable par analogie aux agents contractuels, prévoit une procédure interne d’appel contre l’avis négatif émis par le médecin-conseil de l’institution.

93      Il a été jugé qu’en instituant, à l’article 33, second alinéa, du statut, une commission médicale d’appel, le législateur a eu pour objectif d’établir une garantie supplémentaire pour les candidats et d’améliorer ainsi la protection de leurs droits (arrêt A/Commission, précité, point 23). Cette garantie, qui se rattache au principe du respect des droits de la défense (arrêt du Tribunal de la fonction publique du 13 décembre 2007, N/Commission, F‑95/05, points 69 et 76), constitue une formalité substantielle.

94      Cette garantie doit, en outre, être nécessairement respectée avant l’adoption de la décision de refus de recrutement, et non à un stade ultérieur, car elle perdrait alors sa raison d’être, à savoir celle de garantir les droits de la défense des candidats au recrutement (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 8 juillet 1999, Hercules Chemicals/Commission, C‑51/92 P, points 75 à 78 ; arrêt du Tribunal de première instance du 8 juillet 2008, Franchet et Byk/Commission, T‑48/05, point 151). Le libellé de l’article 33, second alinéa, du statut est clair à cet égard : le candidat à l’embauche dispose, pour saisir la commission médicale, d’un délai de vingt jours qui court à compter, non pas de la notification de la décision de refus d’embauche, mais de la notification de l’avis du médecin-conseil.

95      En l’espèce, il est constant que le Parlement a adopté la décision litigieuse sans avoir au préalable permis à la requérante de saisir la commission médicale d’appel. Certes, le Parlement a informé l’intéressée, lors de la notification de la décision litigieuse, de cette possibilité. Toutefois, cette circonstance est sans influence sur l’irrégularité constatée, ladite décision ayant déjà été prise avant que la requérante ait été mise à même de saisir la commission médicale d’appel, dans le délai de vingt jours suivant la notification de l’avis du médecin-conseil.

96      Enfin, le Parlement, pour justifier la méconnaissance des dispositions de l’article 33 du statut, fait valoir qu’il devait, dans l’intérêt du service, recruter rapidement un agent pour remplacer une fonctionnaire bénéficiant d’un congé de maternité et qu’en conséquence, il ne pouvait attendre, avant d’adopter la décision litigieuse, l’expiration du délai de 20 jours prévu par les dispositions de l’article 33 du statut et, en cas de saisine de la commission médicale, l’avis de cette dernière.

97      Toutefois, un tel motif ne pouvait justifier légalement que le Parlement s’affranchisse des obligations procédurales énoncées par l’article 33 du statut. En tout état de cause, le départ d’une fonctionnaire en congé de maternité ne présente pas un caractère exceptionnel et il appartenait au Parlement soit de pourvoir au remplacement de la personne en congé de maternité par un autre agent contractuel, soit d’engager le processus de recrutement suffisamment tôt afin de pouvoir respecter la formalité substantielle prévue par l’article 33, second alinéa, du statut. En l’espèce, en toute hypothèse, compte tenu du délai séparant l’avis du médecin-conseil de la date prévue pour le recrutement, fixée au 2 février 2009, il n’était a priori pas impossible de solliciter l’avis de la commission médicale.

98      Il est de jurisprudence constante que la méconnaissance d’une règle procédurale, notamment le principe du respect des droits de la défense, n’est de nature à entraîner l’annulation de la décision que dans la mesure où cette violation a eu une incidence sur le contenu de la décision finale. Or, tel est le cas dans le présent litige, dès lors qu’il n’est pas exclu que la commission médicale d’appel, disposant de tous les éléments pertinents sur l’état de santé de la requérante lors de l’adoption de la décision litigieuse, aurait pu émettre un avis différent de celui du médecin-conseil ou mettre en doute la possibilité de se fonder sur des données médicales obtenues plus d’un an et demi auparavant par la Commission.

99      Il s’ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 33, second alinéa, du statut, doit lui aussi être accueilli.

 Sur le troisième moyen tiré de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée et des articles 6 et 7 du règlement no 45/2001

 Arguments des parties

100    La requérante estime que le Parlement a violé le droit au respect de la vie privée et les règles relatives à la protection des données à caractère personnel, en particulier les règles relatives au transfert de son dossier médical. Le médecin-conseil du Parlement aurait émis son avis en se fondant sur des documents émanant de la Commission. Or, d’une part, ces documents auraient dû être classés aux archives de la Commission, en vertu du manuel des procédures du service médical de cette institution, et ne plus constituer des pièces d’un dossier médical, la requérante n’exerçant aucune fonction à la Commission. D’autre part, les articles 6 et 7 du règlement no 45/2001 interdiraient le transfert de données à caractère médical intéressant la requérante de la Commission au Parlement. En effet, les données médicales détenues par la Commission auraient été collectées exclusivement en vue de procéder au recrutement de la requérante dans les services de cette institution. En outre, la mission du médecin-conseil du Parlement serait de procéder à une visite médicale d’embauche et non d’enquêter sur le passé médical de la requérante.

101    Selon le Parlement, la décision litigieuse ne méconnaîtrait nullement les règles relatives à la protection des données à caractère personnel. En effet, l’article 7 du règlement no 45/2001 prévoirait que les transferts de données à caractère personnel entre institutions sont possibles s’ils sont nécessaires à l’exécution légitime de missions relevant de la compétence du destinataire. Or, le transfert litigieux aurait été effectué dans le but de permettre au Parlement de réaliser une de ses missions, le contrôle de l’aptitude physique d’un candidat à l’embauche. En outre, ce transfert aurait été justifié par le souci d’éviter des examens médicaux inutiles et de permettre à l’administration d’avoir des informations complètes.

102    Le CEPD estime que le transfert et l’utilisation ultérieure des données à caractère médical recueillies en 2006 et 2007 sur l’état de santé de la requérante ont méconnu le règlement no 45/2001. Il précise, à titre liminaire, que ces données ne font pas partie du dossier médical de la requérante en tant qu’ancien agent temporaire et ancien agent contractuel de la Commission et que la question de la licéité de leur transfert ne se pose pas de la même manière que celle du transfert entre institutions d’un dossier médical d’une personne employée par une institution. Le manuel des procédures du service médical de la Commission n’indiquerait pas pour quelles finalités les données médicales recueillies dans le cadre d’une procédure de recrutement sont conservées dans les archives au-delà de six mois ni les conditions dans lesquelles ces données sont accessibles. Le CEPD rappelle que, dans deux avis adoptés en 2007 et 2008, il a recommandé respectivement au Parlement et à la Commission que, pour les candidats déclarés physiquement inaptes à l’embauche, les données médicales collectées dans le cadre de la procédure de recrutement ne soient conservées que pendant une période limitée, qui pourrait correspondre à la période pendant laquelle il est possible de contester les données ou la décision prise sur la base de celles-ci.

103    Le CEPD souligne que le transfert de données à caractère personnel entre institutions est régi principalement par l’article 7 du règlement no 45/2001, mais sans préjudice des articles 4, 5, 6 et 10 dudit règlement. Le respect de l’article 7 du règlement no 45/2001 ne rendrait donc pas le transfert et l’utilisation ultérieure des données conformes à ce règlement dans son ensemble, contrairement à ce que semble soutenir le Parlement, qui limite son mémoire en défense audit article 7. Le CEPD rappelle que, en vertu de l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 45/2001, le traitement de catégories particulières de données, telles les données à caractère médical, est interdit et que la protection de ces données revêt, pour la Cour européenne des droits de l’homme, une importance fondamentale pour l’exercice du droit au respect à la vie privée et à la vie de famille, garanti par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »). La requérante n’ayant pas donné son consentement au traitement des données litigieuses, l’exception prévue à l’article 10, paragraphe 2, sous a), du règlement no 45/2001 ne serait pas applicable. En outre, le Parlement n’aurait pas démontré que le transfert de ces données, bien que légitime au regard de l’article 7 du règlement no 45/2001, était réellement nécessaire afin de respecter ses droits et obligations en matière de droit du travail, au sens de la deuxième exception, énoncée à l’article 10, paragraphe 2, sous b), dudit règlement. Le Parlement aurait en effet pu obtenir cette information d’une autre manière, moins attentatoire à la vie privée, par exemple en demandant à la requérante de fournir cette information ou en faisant réaliser un examen médical par ses services. Le CEPD précise à cet égard que, dans son avis de 2007 susmentionné, il avait recommandé au Parlement de supprimer du formulaire d’examen médical préalable à l’embauche les questions demandant au candidat s’il avait déjà été refusé à un poste pour des raisons médicales ou s’il avait consulté un neurologue, un psychiatre, un psychanalyste ou un psychothérapeute. Le Parlement aurait suivi cette recommandation.

104    Par ailleurs, le CEPD soutient que, au moment où le Parlement a reçu du service médical de la Commission les données médicales concernant la requérante, ces données n’étaient plus détenues pour leur finalité initiale, à savoir l’examen de l’aptitude médicale de la requérante aux fins d’occuper un emploi à la Commission. En outre, ces données auraient été versées aux archives de la Commission, le délai de six mois visé par le manuel des procédures du service médical de la Commission s’étant écoulé depuis la décision d’inaptitude. Le transfert et l’utilisation de ces données seraient donc intervenus en violation de l’article 4, paragraphe 1, sous b) et e), du règlement no 45/2001. En outre, le changement de finalité du traitement de ces données ne pourrait être justifié sur la base de l’article 6 de ce règlement. Par ailleurs, le Parlement, auteur de la demande de transfert, aurait été, conjointement avec la Commission, tenu de veiller à ce que l’ensemble du transfert soit légitime.

105    Enfin, le CEPD précise que, même à supposer que la requérante ait délibérément omis d’informer le Parlement d’examens médicaux précédents, cette circonstance serait sans incidence sur le droit à la protection de ses données que l’intéressée tire du règlement no 45/2001.

106    Dans ses observations sur le mémoire en intervention, la requérante déclare se rallier entièrement à l’analyse du CEPD selon laquelle l’article 4, paragraphe 1, sous b) et e), et l’article 10, paragraphe 2, sous b), du règlement no 45/2001 ont été méconnus par le Parlement. Le constat que le transfert de données médicales ne répondait pas à une réelle nécessité, au sens de l’article 10, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, s’appliquerait pour les mêmes raisons en ce qui concerne l’article 7, paragraphe 1, du même texte, dernière disposition qui aurait également été violée, le transfert litigieux ne pouvant être considéré comme nécessaire à l’exécution légitime des missions du Parlement. Cette institution aurait méconnu le principe de limitation des finalités, d’exactitude et de mise à jour des données ainsi que les règles de conservation de celles-ci, et donc manqué au respect de l’article 4, paragraphe 1, sous b), d) et e), du règlement no 45/2001.

107    Le Parlement, dans ses observations sur le mémoire en intervention, souligne que le traitement des données personnelles de la requérante était nécessaire afin de respecter les obligations de l’institution dans le domaine du droit du travail, à savoir vérifier l’aptitude physique de la requérante à l’exercice de ses fonctions, comme le prévoient l’article 83 du RAA et l’article 33 du statut. Le traitement de ces données serait donc licite au regard de l’article 10, paragraphe 2, sous b), du règlement no 45/2001. De même, le traitement de ces données par les seuls membres du service médical du Parlement, soumis au secret professionnel, aux fins du diagnostic médical d’aptitude au travail par le médecin-conseil, serait nécessaire et donc légitime au sens de l’article 10, paragraphe 3, dudit règlement. Ce traitement participerait également de l’exercice légitime de l’autorité publique et serait donc licite au regard de l’article 5, sous a), de ce règlement.

108    En ce qui concerne le transfert des données, le Parlement soutient qu’il était nécessaire à l’exécution légitime des missions de l’institution. En effet, le Parlement n’aurait pu accomplir ses missions sans ce transfert : d’une part, la requérante n’aurait pas informé le service médical du Parlement, le jour où elle a pris contact avec celui-ci, du fait qu’elle avait passé une visite médicale auparavant dans une autre institution ; d’autre part, la pratique du Parlement consistant à demander le transfert du dossier médical d’embauche d’un candidat dans le cas où l’intéressé a déjà passé un examen d’embauche auprès d’une autre institution serait dans l’intérêt de l’institution comme de la personne concernée, en permettant d’éviter de renouveler certaines examens médicaux. La possibilité, évoquée par le CEPD, de réaliser un nouvel examen médical au Parlement, relèverait d’une appréciation purement médicale, laissée à l’initiative du médecin compétent, sur la base du dossier transféré.

109    En ce qui concerne la qualité des données, le Parlement estime n’avoir pas méconnu l’article 4, paragraphe 1, sous b) et e), du règlement no 45/2001. Il estime qu’elles ont été collectées pour une finalité déterminée, à savoir la vérification de l’aptitude physique de la requérante à l’exercice de fonctions au service de l’Union, finalité explicite et légitime, dès lors qu’elle est prévue notamment à l’article 33 du statut, et que ces données ont été traitées ultérieurement pour la même finalité. L’examen d’embauche serait d’ailleurs effectué par toutes les institutions sur la même base juridique et se déroulerait dans les mêmes conditions. Les conditions d’aptitude à remplir seraient en général les mêmes dans toutes les institutions. Le transfert de données litigieux serait analogue à celui du dossier médical d’un fonctionnaire transféré vers une autre institution, considéré comme légitime par le CEPD dans son avis du 14 juin 2007. En outre, les données collectées par la Commission n’auraient pas été conservées pendant une période excédant celle nécessaire à la réalisation des finalités de la collecte et du traitement. Le CEPD aurait reconnu expressément, dans ses « Orientations concernant les opérations de traitement des données en matière de recrutement de personnel », datant d’octobre 2008, que les données à caractère personnel des candidats non retenus pouvaient être conservées pendant deux ans après la fin de la procédure, délai qui, en l’espèce, n’aurait pas été dépassé. Enfin, le délai d’un an prévu par l’article 15 de la réglementation interne du Parlement ne viserait que la validité d’un examen.

 Appréciation du Tribunal

–       En ce qui concerne la première branche du moyen, tirée de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée

110    Les parties ont insisté dans leurs écrits et lors de l’audience sur la seconde branche du moyen, relative à la violation des articles 6 et 7 du règlement no 45/2001. L’intervention du CEPD a contribué à focaliser les débats sur cette seconde branche. Le Tribunal estime néanmoins que la première branche du moyen, tirée de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée, est articulée avec suffisamment de précision aux points 14.1 et 16.12 du recours, développés par la suite lors de l’audience, pour faire l’objet d’une réponse distincte.

111    Selon la jurisprudence de la Cour, le droit au respect de la vie privée, consacré par l’article 8 de la CEDH et qui découle des traditions constitutionnelles communes aux États membres, constitue l’un des droits fondamentaux protégés par l’ordre juridique de l’Union. Il comporte notamment le droit d’une personne de tenir son état de santé secret (voir, notamment, arrêt de la Cour du 5 octobre 1994, X/Commission, C‑404/92 P, point 17 ; voir également Cour eur. D. H., arrêts Z c. Finlande du 25 février 1997, Recueil des arrêts et décisions 1997‑I, § 71, et S. et Marper c. Royaume-Uni du 4 décembre 2008, no 30562/04 et no 30566/04, § 66).

112    Le transfert à un tiers, y compris vers une autre institution, de données à caractère personnel relatives à l’état de santé d’une personne collectées par une institution, constitue en soi une ingérence dans la vie privée de la personne concernée, quelle que soit l’utilisation ultérieure des informations ainsi communiquées (voir par analogie, arrêt de la Cour du 20 mai 2003, Österreichischer Rundfunk e.a., C‑465/00, C‑138/01 et C‑139/01, points 73 à 75).

113    Toutefois, il a été jugé que des restrictions peuvent être apportées aux droits fondamentaux, à condition qu’elles répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général et qu’elles ne constituent pas, au regard du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même du droit protégé (arrêt du 5 octobre 1994, X/Commission, précité, point 18). À cet égard, l’article 8, paragraphe 2, de la CEDH est à prendre comme point de référence. Aux termes de cette disposition, l’ingérence d’une autorité publique dans la vie privée peut être justifiée pour autant i) qu’elle soit « prévue par la loi », ii) qu’elle poursuive un ou plusieurs des objectifs – limitativement énoncés – et iii) qu’elle soit « nécessaire » pour atteindre ce ou ces objectifs.

114    Il convient donc d’examiner, au cas d’espèce, si le transfert de données à caractère médical d’une institution à une autre pour faciliter le travail du médecin-conseil, dans le cadre d’une visite médicale d’embauche, peut être considéré comme légal au regard des trois conditions susmentionnées.

115    En premier lieu, s’agissant de la première condition, les dispositions du règlement no 45/2001 permettent de regarder le transfert de données à caractère personnel d’une institution à une autre comme étant « prévu par la loi ».

116    En effet, les dispositions de l’article 7 du règlement no 45/2001 encadrent ce type de traitement de données à caractère personnel.

117    Toutefois, la question se pose de savoir si cet article est libellé avec suffisamment de précision pour permettre aux destinataires de la loi de régler leur conduite et répond ainsi à l’exigence de prévisibilité dégagée par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (voir, notamment, Cour eur. D. H., arrêt Rekvényi c. Hongrie du 20 mai 1999, Recueil des arrêts et décisions, 1999‑III, § 34). En effet, l’article 7 du règlement no 45/2001 prévoit dans des termes très généraux que les transferts de données entre institutions ne sont possibles que si les données communiquées « sont nécessaires à l’exécution légitime de missions relevant de la compétence du destinataire ».

118    En outre, l’article 6 du règlement no 45/2001 prévoit expressément que les « données à caractère personnel ne peuvent être traitées pour des finalités autres que celles pour lesquelles elles ont été collectées que si le changement de finalité est expressément autorisé par les règles internes de l’institution ou de l’organe communautaire ».

119    Or, force est de constater que le Parlement n’a nullement invoqué qu’il existerait une quelconque règle écrite prévoyant le transfert de données à caractère médical entre les institutions ou un échange d’informations à caractère médical entre les services médicaux des institutions concernant, non pas des personnes en fonction dans ces institutions, mais des candidats à l’embauche.

120    En deuxième lieu, le Parlement soutient que le transfert de données médicales d’une institution à une autre a pour objectif de permettre de vérifier qu’un candidat remplit les conditions d’aptitude physique à l’exercice des fonctions qui lui sont offertes et qu’en cas de recrutement, il pourra effectivement exercer lesdites fonctions. À cet égard, la Cour a jugé que la réalisation d’un examen d’embauche sert un intérêt légitime des institutions de l’Union (arrêt du 5 octobre 1994, X/Commission, précité, point 20). Ainsi, l’objectif avancé est susceptible de justifier, au sens de l’article 8, paragraphe 2 de la CEDH, une ingérence dans le droit au respect de la vie privée.

121    En troisième lieu, il convient de vérifier si l’ingérence en cause est nécessaire, dans une société démocratique, pour atteindre le but légitime poursuivi.

122    Selon la Cour européenne des droits de l’homme, une ingérence est considérée comme nécessaire dans une société démocratique pour atteindre un but légitime si elle répond à un besoin social impérieux et, en particulier, si elle est proportionnée au but légitime poursuivi et si les motifs invoqués par les autorités nationales pour la justifier apparaissent pertinents et suffisants. Les autorités nationales jouissent d’une certaine marge d’appréciation en la matière. Toutefois, l’étendue de cette marge est variable et dépend d’un certain nombre de facteurs, dont la nature du droit en cause garanti par la CEDH, son importance pour la personne concernée, la nature de l’ingérence et la finalité de celle-ci. Cette marge est d’autant plus restreinte que le droit en cause est important pour garantir à l’individu la jouissance effective des droits fondamentaux ou d’ordre « intime » qui lui sont reconnus. Lorsqu’un aspect particulièrement important de l’existence ou de l’identité d’un individu se trouve en jeu, la marge laissée à l’État est restreinte (Cour eur. D. H., arrêt Evans c. Royaume-Uni du 10 avril 2007, no 6339/05, § 77).

123    En l’espèce, ainsi, qu’il a été dit précédemment, la protection des données à caractère personnel joue un rôle fondamental pour l’exercice du droit au respect de la vie privée et familiale consacré par l’article 8 de la CEDH. Le respect du caractère confidentiel des informations sur la santé constitue l’un des droits fondamentaux protégés par l’ordre juridique de l’Union (voir arrêts de la Cour du 8 avril 1992, Commission/Allemagne, C‑62/90, point 23, et du 5 octobre 1994, X/Commission, précité, point 17). Ce principe est capital non seulement pour protéger la vie privée des malades mais également pour préserver leur confiance dans le corps médical et les services de santé en général (Cour eur. D. H., arrêt Z c. Finlande, précité, § 95). Compte tenu du caractère extrêmement intime et sensible des données à caractère médical, la possibilité de pouvoir transférer ou communiquer de telles informations à un tiers, même s’il s’agit d’une autre institution ou d’un autre organe de l’Union, sans le consentement de la personne concernée, appelle un examen particulièrement rigoureux (voir par analogie, Cour eur. D. H., arrêts précités, Z c. Finlande, § 95, et S. et Marper c. Royaume-Uni, § 103). Le règlement no 45/2001 dispose à cet égard, à son article 10, paragraphe 1, que le traitement de données à caractère médical est interdit, en principe, sous réserve de dérogations énoncées au paragraphe 2 dudit article.

124    Il convient donc de mettre en balance l’intérêt du Parlement à s’assurer qu’il recrute une personne apte à exercer les fonctions qui vont lui être confiées et la gravité de l’atteinte au droit de la personne concernée au respect de sa vie privée.

125    Or, en l’espèce, le Tribunal estime que si l’examen d’embauche sert l’intérêt légitime des institutions de l’Union, qui doivent être en mesure d’accomplir leur mission, cet intérêt ne justifie pas que l’on procède à un transfert de données médicales d’une institution à une autre sans le consentement de l’intéressée (voir, par analogie, arrêt du 5 octobre 1994, X/Commission, précité, point 20). En effet, il y a d’abord lieu de relever que, ainsi qu’il a été dit précédemment, les données médicales constituent des données particulièrement sensibles. Ensuite, ces données ont été collectées près de deux ans auparavant, dans un but bien défini, par une institution avec laquelle la requérante n’a, suite à la procédure de vérification de l’aptitude médicale à l’embauche, pas eu de relation de travail. Enfin, le Parlement aurait pu satisfaire à sa mission dans des conditions moins attentatoires aux droits fondamentaux de la requérante. Il aurait ainsi pu procéder à l’examen médical qui était fixé au 7 janvier 2009, diligenter éventuellement de nouveaux examens médicaux ou demander l’autorisation de la requérante d’obtenir le transfert des données médicales en litige, ou encore se fonder sur les informations que la requérante s’était engagée à lui faire parvenir en janvier 2009.

126    Contrairement à ce que soutient le Parlement, la décision par laquelle son médecin-conseil a sollicité le transfert des données collectées par la Commission n’est pas un acte de portée purement médicale qui serait soustrait au contrôle du juge. En effet, le transfert a été sollicité avant même que le médecin-conseil ait examiné la requérante et avant même que celle-ci ait communiqué au service médical les informations qui lui avaient été demandées.

127    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’avis du médecin-conseil a été émis en méconnaissance du droit au respect de la vie privée de la requérante et que la décision litigieuse est, par suite, également entachée d’illégalité pour cette raison. Dès lors, la première branche du moyen doit être accueillie.

–       En ce qui concerne la deuxième branche du moyen, tirée de la méconnaissance des articles 6 et 7 du règlement no 45/2001

128    À titre liminaire, il convient de rappeler que l’article 1er du règlement no 45/2001 prévoit explicitement que les institutions et organes de l’Union assurent, conformément audit règlement, la protection des libertés et droits fondamentaux des personnes physiques. Aussi, les dispositions de ce règlement ne peuvent être interprétées comme pouvant légitimer une atteinte au droit au respect de la vie privée tel qu’il est garanti par l’article 8 de la CEDH (voir arrêt Österreichischer Rundfunk e.a., précité, point 91).

129    Il résulte de l’article 7 du règlement no 45/2001 qu’une institution ou un organe de l’Union peut transférer à une autre institution ou à un autre organe de l’Union des données à caractère personnel, si elles sont nécessaires à l’exécution légitime de missions relevant de la compétence de l’institution ou de l’organe de l’Union destinataire.

130    En l’occurrence, il ne saurait être contesté que la vérification de l’aptitude physique à l’embauche de la requérante par les services du Parlement participe de l’exécution légitime des missions de cette institution.

131    Toutefois, ainsi que le fait valoir à juste titre le CEPD dans son mémoire en intervention, cette constatation ne permet pas, à elle seule, d’établir que le transfert litigieux des données médicales de la requérante serait conforme aux dispositions du règlement no 45/2001. En effet, d’une part, le transfert doit être « nécessaire » à l’exécution légitime des missions de l’institution. Dans le présent litige, il doit donc être établi que le transfert était indispensable à l’appréciation de l’aptitude physique de la requérante par les services du Parlement. D’autre part, l’article 7 dudit règlement prévoit expressément qu’il s’applique « sans préjudice des articles 4, 5, 6 et 10 » du même texte.

132    Pour répondre au grief de la requérante tiré de la violation du règlement, notamment de son article 7, il convient donc d’examiner si ce transfert a été effectué dans le respect de l’exigence de nécessité énoncée par cet article et conformément aux dispositions auxquelles cet article renvoie, en particulier l’article 6 du règlement. Dans le présent litige, il y a lieu de s’attacher d’abord à l’examen des articles 4, 6 et 10 du règlement no 45/2001, dont la méconnaissance a été alléguée par la requérante, avant d’examiner si l’exigence de nécessité du transfert, visée à l’article 7 du même règlement, peut être regardée comme remplie.

133    En premier lieu, en ce qui concerne les articles 4 et 6 du règlement no 45/2001, il convient de relever qu’en vertu de l’article 4, paragraphe 1, de ce règlement, les données à caractère personnel doivent être traitées loyalement et licitement et collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes, et ne pas être traitées ultérieurement de manière incompatible avec ces finalités. En outre, l’article 6 dudit règlement prévoit que les données à caractère personnel ne peuvent être traitées pour des finalités autres que celles pour lesquelles elles ont été collectées que si le changement de finalité est expressément autorisé par les règles internes de l’institution ou de l’organe de l’Union.

134    En l’espèce, ainsi que le soutiennent à juste titre la requérante et le CEPD, il est constant que les données médicales collectées par la Commission au sujet de la requérante, dans le cadre de la visite médicale d’embauche prévue par les dispositions de l’article 83 du RAA, avaient pour finalité exclusive de permettre de déterminer si l’intéressée était, au moment de son recrutement, apte physiquement à exercer ses fonctions dans les services de la Commission.

135    Or, il y a lieu de noter, d’une part, que le traitement ultérieur de ces données médicales afin de contrôler l’aptitude de la requérante à exercer en décembre 2008 des fonctions au sein du Parlement constitue une autre finalité que celle pour laquelle ces données ont été initialement collectées. Le Parlement ne peut valablement invoquer à cet égard la circonstance que les examens médicaux réalisés par toutes les institutions reposeraient sur la même base juridique, s’effectueraient selon les mêmes modalités et reposeraient sur des critères identiques d’aptitude. En effet, le juge de l’Union a souligné dans plusieurs de ses arrêts l’importance de l’autonomie de chaque institution en qualité d’employeur, en écartant des arguments tirés de l’unicité de la fonction publique de l’Union. Il a ainsi été jugé que des fonctionnaires recrutés par une institution ne pouvaient revendiquer le même classement que celui accordé à des fonctionnaires d’une autre institution, alors même que l’ensemble de ces fonctionnaires étaient lauréats d’un même concours (arrêt du Tribunal de la fonction publique du 9 décembre 2010, Liljeberg e.a./Commission, F‑83/05, point 58). De même, si, selon le principe d’unicité de la fonction publique, tel qu’il est énoncé à l’article 9, paragraphe 3, du traité d’Amsterdam, tous les fonctionnaires de toutes les institutions de l’Union sont soumis à un statut unique, un tel principe n’implique pas que les institutions doivent user à l’identique du pouvoir d’appréciation qui leur a été reconnu par le statut alors que, au contraire, dans la gestion de leur personnel, ces dernières jouissent d’un « principe d’autonomie », pour reprendre les termes utilisés par le Tribunal de première instance des Communautés européennes dans son arrêt du 16 septembre 1997, Gimenez/Comité des régions (T‑220/95, point 72).

136    D’autre part, alors qu’en vertu de l’article 6 du règlement no 45/2001, un changement de la finalité de la collecte de données doit être expressément prévu par une règle interne de l’institution, il ressort des écrits et de l’audience que le changement de la finalité pour laquelle les données médicales de la requérante ont été recueillies en 2006 et 2007 par la Commission n’est prévu par aucun texte qu’aurait adopté cette institution ou le Parlement. Le transfert de telles données entre les institutions concernées ne repose que sur une simple pratique, dont les candidats à l’embauche ne sont nullement informés. En outre, le CEPD a soutenu à l’audience sans être contredit que la pratique du Parlement consistant à solliciter le transfert de données médicales relatives à des candidats à l’embauche ne lui avait pas été notifiée, alors qu’une telle notification est prescrite par l’article 27 du règlement no 45/2001. En ce qui concerne la Commission, le CEPD précise que, dans un avis du 10 septembre 2007, rendu dans le cadre de son contrôle préalable du dossier de cette institution intitulé « Gestion des activités du service médical - Bruxelles-Luxembourg - notamment via l’application informatique SERMED », il a examiné exclusivement la compatibilité avec les dispositions du règlement no 45/2001 de transferts de données médicales, dans des cas exceptionnels, au service juridique de la Commission, au Tribunal ou au Médiateur européen à sa demande. En revanche, le CEPD ne s’est nullement interrogé, dans cet avis, sur le transfert de données médicales collectées par une institution, à l’occasion d’une visite médicale d’embauche, vers une autre institution ou un autre organe de l’Union, le délégué à la protection des données de la Commission n’ayant pas déclaré ce type de transfert de données. Le CEPD souligne qu’il a, dans cet avis, recommandé à la Commission que, pour les candidats déclarés physiquement inaptes à l’embauche, les données médicales collectées dans le cadre de la procédure de recrutement ne soient conservées que pendant une période limitée, qui pourrait correspondre à la période pendant laquelle il est possible de contester les données ou la décision prise sur la base de celles-ci. Il était ainsi légitime pour la Commission de conserver les données recueillies en 2006 et 2007 concernant l’état de santé de la requérante mais pour le seul suivi des contentieux formés par celle-ci devant les juridictions de l’Union dans les affaires F‑33/08 et T‑510/09 P, consécutifs au refus de la Commission de l’engager.

137    En deuxième lieu, en ce qui concerne l’article 10 du règlement no 45/2001, il doit être souligné qu’en vertu du paragraphe 1 de cet article, le traitement des données médicales est, en principe, interdit. Le paragraphe 2 dudit article 10 prévoit notamment que le paragraphe 1 ne s’applique pas si la personne concernée donne son consentement au traitement ou si le traitement est nécessaire afin de respecter les obligations et les droits spécifiques du responsable du traitement en matière de droit du travail.

138    Or, d’une part, il est constant que la requérante n’a pas donné son consentement au transfert de la Commission au Parlement des données médicales la concernant.

139    D’autre part, s’il est vrai que le transfert litigieux a été réalisé afin de mettre le Parlement en mesure de vérifier l’aptitude physique de la requérante à l’exercice de ses fonctions dans cette institution, obligation qui découle des articles 82 et 83 du RAA et qui peut être analysée comme une « obligation en matière de droit du travail », au sens de l’article 10, paragraphe 2, sous b), du règlement no 45/2001, il n’est pas établi que ce transfert était « nécessaire » afin de respecter cette obligation. Ainsi que le souligne le CEPD et qu’il a été dit au point 125, d’autres mesures moins attentatoires à la vie privée étaient envisageables, permettant au Parlement d’assurer la pleine application des articles 82 et 83 du RAA. Le Parlement aurait pu notamment, avant de demander à la Commission de lui transférer ces données, inviter la requérante à fournir certaines informations sur ses antécédents médicaux et faire réaliser les examens médicaux nécessaires par ses propres services. En outre, le caractère relativement ancien des données transférées, recueillies en 2006 et 2007, plus d’un an et demi avant la décision litigieuse, ne plaide pas en faveur de la thèse du Parlement, selon laquelle ce transfert aurait été nécessaire.

140    Ainsi que le fait valoir à bon droit la requérante, le Parlement ne peut davantage prétendre que le transfert litigieux aurait pour base légale l’article 10, paragraphe 3, du règlement no 45/2001. En effet, si cet article habilite les membres du service médical d’une institution à traiter les données nécessaires au diagnostic médical d’aptitude d’une personne à l’exercice de ses fonctions, il n’a ni pour objet ni pour effet d’autoriser un transfert de données médicales tel que celui qui est contesté dans le présent litige, fût-il réalisé entre les membres des services médicaux respectifs des deux institutions concernées.

141    En troisième lieu, s’agissant de l’article 7 du règlement no 45/2001, force est de relever, comme le soutient à juste titre la requérante, qu’un transfert qui n’est pas considéré comme nécessaire au sens de l’article 10 du règlement ne peut l’être davantage au sens de l’article 7 du même texte, la même mission concernée, à savoir l’examen de l’aptitude physique à l’embauche de la requérante, étant en cause.

142    Il résulte de ce qui précède qu’eu égard à la nature particulièrement sensible des données médicales de la requérante et aux conditions dans lesquelles elles ont été obtenues, le Tribunal estime que le Parlement, en traitant ces données, n’a pas exécuté légitimement la mission qui lui est confiée en vertu des dispositions des articles 82 et 83 du RAA. Il lui appartenait, pour ce faire, de demander l’accord de la requérante sur le transfert des données ou de réaliser des examens médicaux spécifiques et non de se fonder, sans autorisation préalable de l’intéressée, sur des données médicales recueillies dans le cadre d’une autre procédure par une autre institution.

143    Dès lors, la requérante est fondée à soutenir que le médecin-conseil du Parlement, en demandant à la Commission le transfert de ces données médicales, a méconnu les dispositions des articles 6 et 7 du règlement no 45/2001 et, en se fondant sur ces données, a émis un avis irrégulier sur son aptitude physique. La seconde branche du moyen doit en conséquence être accueillie.

144    Le Parlement fait valoir toutefois dans ses écritures que la décision litigieuse serait fondée non seulement sur l’inaptitude physique mais également sur la rupture du lien de confiance.

145    Il appartient donc au Tribunal de vérifier si ce second motif était effectivement invoqué et s’il est de nature à justifier la décision litigieuse.

146    Or, si le Parlement, dans la décision litigieuse et dans la décision de rejet de la réclamation, fait état de la circonstance que la requérante n’aurait pas respecté l’obligation qui se serait imposée à elle de déclarer qu’elle avait passé une visite médicale auparavant dans une autre institution européenne, il n’en tire pas directement de conséquence juridique, ces décisions étant juridiquement fondées sur le seul constat que la requérante ne remplissait pas la condition d’aptitude physique à l’exercice de ses fonctions. Ainsi, contrairement à ce que soutient le Parlement, la décision litigieuse n’est-elle pas fondée sur la rupture du lien de confiance.

147    Si le Parlement, par son argumentation, entend présenter devant le juge une substitution de motifs, il y a lieu de relever que l’invocation d’un motif en cours d’instance qui aurait pu légalement justifier la décision litigieuse n’est pas de nature à faire obstacle à l’annulation de ladite décision (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 10 décembre 2003, Tomarchio/Commission, T‑173/02, point 86, et du 15 mars 2006, Leite Mateus/Commission, T‑10/04, point 43), sauf en cas de compétence liée de l’administration en la matière.

148    Or, en l’espèce, le Parlement ne peut prétendre qu’il aurait été dans une telle situation de compétence liée, dès lors qu’il dispose, s’agissant du motif relatif à la rupture du lien de confiance, d’une large marge d’appréciation (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de la fonction publique du 15 décembre 2010, Angulo Sánchez/Conseil, F‑67/09, points 76 à 78).

149    En outre, en tout état de cause, à la date de la décision litigieuse, le Parlement n’était pas en mesure d’affirmer que la requérante avait délibérément omis de lui communiquer qu’elle avait travaillé pour la Commission ou qu’elle avait déjà passé un examen médical auprès d’une autre institution. Il ressort en effet des points 29 et 31 du présent arrêt que la requérante et l’administration s’étaient accordées pour que l’intéressée adresse au Parlement en janvier 2009 les documents nécessaires à la constitution du dossier de recrutement. Il n’était donc pas exclu que la requérante porte ces informations à la connaissance du Parlement avant sa prise de fonctions ou à l’occasion de l’examen médical auquel elle avait été convoquée, lequel devait avoir lieu le 7 janvier 2009.

150    Il s’ensuit, sans qu’il soit besoin d’examiner le dernier moyen du recours, tiré de l’existence d’un harcèlement moral, que la décision litigieuse doit être annulée.

4.     Sur les conclusions indemnitaires

 Arguments des parties

151    La requérante soutient que les irrégularités de la procédure médicale d’embauche commises constituent des fautes de nature à engager la responsabilité du Parlement, dès lors, d’une part, qu’elles lui ont causé un préjudice matériel et un préjudice moral, et, d’autre part, qu’elles sont en lien direct avec les préjudices dont elle se prévaut.

152    S’agissant du préjudice matériel, la requérante fait valoir que les fautes commises par le Parlement lui auraient fait perdre une chance très sérieuse d’occuper un emploi à pourvoir au sein du Parlement, emploi qu’elle aurait pu avoir des chances d’occuper pour une durée indéterminée. Aussi demande-t-elle une indemnité correspondant à 95 % de la différence entre la rémunération qu’elle aurait dû percevoir pendant la période allant du 2 février au 2 août 2009 et les indemnités chômage qu’elle a effectivement perçues au titre de cette période. Elle demande à cet égard une indemnité « provisionnelle » de 50 000 euros.

153    S’agissant du préjudice moral, la requérante demande la somme de 20 000 euros, eu égard au sentiment d’injustice qu’elle a éprouvé en raison du blocage de son recrutement au Parlement et des nombreuses illégalités commises, notamment la méconnaissance du droit au respect de sa vie privée.

154    Le Parlement fait valoir que les conclusions indemnitaires doivent être rejetées. En effet, la requérante n’aurait pas établi l’existence d’une faute.

155    En outre, concernant le préjudice matériel, le Parlement estime, d’une part, que ce dernier n’est pas réel et certain, dès lorsqu’il n’est pas établi que la requérante aurait été recrutée si l’examen médical avait été effectué sans les données médicales transférées par la Commission. D’autre part, le Parlement considère que ce préjudice a été surévalué et ne peut en aucune manière correspondre à la somme de 50 000 euros. Selon le Parlement, la rémunération que la requérante aurait pu percevoir pendant la période allant du 2 février au 2 août 2009 se serait élevée au maximum à la somme de 15 600,60 euros. En outre, il aurait fallu soustraire de cette somme les allocations de chômage perçues au titre de la même période. Enfin, la somme ainsi obtenue devrait être pondérée d’un coefficient réducteur afin de tenir compte du fait que la chance de la requérante d’être recrutée était faible.

156    S’agissant du préjudice moral, le Parlement soutient que la requérante n’établit pas suffisamment en quoi ce préjudice consisterait et rappelle la jurisprudence constante selon laquelle l’annulation de la décision attaquée constitue en principe une réparation adéquate et suffisante du préjudice moral subi.

 Appréciation du Tribunal

157    Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité de l’administration suppose la réunion d’un ensemble de conditions en ce qui concerne l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement et le préjudice invoqué (arrêts de la Cour du 1er juin 1994, Commission/Brazzelli Lualdi e.a., C‑136/92 P, point 42, et du 21 février 2008, Commission/Girardot, C‑348/06 P, point 52). Ces trois conditions sont cumulatives. L’absence de l’une d’entre elles suffit pour rejeter des conclusions indemnitaires.

158    S’agissant du lien de causalité, il faut en principe que le requérant apporte la preuve d’une relation directe et certaine de cause à effet entre la faute commise par l’institution et le préjudice invoqué (arrêt du Tribunal de première instance du 28 septembre 1999, Hautem/BEI, T‑140/97, point 85).

159    Toutefois, le degré de certitude du lien de causalité exigé par la jurisprudence est atteint lorsque l’illégalité commise par une institution de l’Union a, de façon certaine, privé une personne non pas nécessairement d’un recrutement, dont l’intéressé ne pourra jamais prouver qu’il y avait droit, mais d’une chance sérieuse d’être recruté comme fonctionnaire ou agent, avec comme conséquence pour l’intéressé un préjudice matériel consistant en une perte de revenus. Lorsqu’il apparaît éminemment probable, dans les circonstances de l’espèce, que le respect de la légalité aurait conduit l’institution concernée à procéder au recrutement de l’agent, l’incertitude théorique qui demeure quant à l’issue qu’aurait eue une procédure régulièrement conduite ne saurait faire obstacle à la réparation du préjudice matériel réel qu’a subi l’intéressé en voyant sa candidature non retenue à l’emploi qu’il aurait eu toutes les chances de se voir attribuer (arrêt du Tribunal de première instance du 5 octobre 2004, Sanders e.a./Commission, T‑45/01, point 150 ; arrêt du Tribunal de la fonction publique du 22 octobre 2008, Tzirani/Commission, F‑46/07, point 218).

160    Concernant le préjudice matériel, la requérante est fondée à soutenir que sans l’illégalité commise par le Parlement, dont le médecin-conseil s’est basé sur des données médicales non actuelles et ne s’est pas livré lui-même à l’examen médical d’aptitude prévu par le RAA, elle avait des chances sérieuses d’être recrutée.

161    En effet, d’abord, le Parlement avait déjà fait connaître à la requérante qu’elle était recrutée. La décision d’embauche n’était donc pas purement éventuelle mais effective, et l’engagement de la requérante n’était subordonné qu’à la reconnaissance de l’aptitude physique de celle-ci à l’exercice de ses fonctions.

162    Ensuite, contrairement à ce que le Parlement prétend, il n’est pas établi que, dans l’hypothèse où la visite médicale d’embauche se serait déroulée régulièrement, au vu des seules informations qu’auraient recueillies le service médical du Parlement sur l’état de santé de la requérante en janvier 2009, l’intéressée n’aurait pas été recrutée. En effet, les données médicales qui avaient justifié le refus de recrutement de la requérante par la Commission en 2007 pouvaient avoir évolué et auraient pu justifier la reconnaissance de l’aptitude de celle-ci à l’embauche par les services du Parlement.

163    Enfin, il ne saurait être exigé d’une personne candidate à l’embauche qu’elle révèle à son futur employeur tous ses antécédents médicaux. Ainsi que la Cour de justice l’a jugé, le droit au respect de la vie privée, consacré par l’article 8 de la CEDH et qui découle des traditions constitutionnelles communes aux États membres, constitue l’un des droits fondamentaux protégés par l’ordre juridique de l’Union (voir arrêt Commission/Allemagne, précité, point 23). Il comporte notamment le droit d’une personne de tenir son état de santé secret (arrêt de la Cour du 5 octobre 1994, X/Commission, précité, point 17).

164    Certes, l’employeur peut effectuer les examens permettant d’apprécier l’aptitude physique de la personne qu’il recrute et si celle-ci, comme elle en a le droit, refuse de se prêter à de tels examens, l’employeur peut tirer les conséquences qu’il estime appropriées d’un tel refus, en ne supportant pas le risque d’embaucher l’intéressée (voir, en ce sens, arrêt du 5 octobre 1994, X/Commission, précité, points 20 et 21).

165    Toutefois, en l’espèce, il n’est pas certain que, en l’absence des informations qu’il a obtenues auprès du service médical de la Commission, le Parlement aurait été conduit à avoir des doutes sur l’état de santé de la requérante et à effectuer des examens approfondis, sachant, par ailleurs, que celle-ci ne s’était vu proposer qu’un contrat de courte durée. Même à supposer que la requérante, comme elle semble le soutenir, ait indiqué au Parlement, dans le cadre de la visite médicale qui aurait dû avoir lieu en janvier 2009, qu’elle avait souffert de certaines affections justifiant la consultation de psychiatres, il n’est pas sûr qu’une telle information aurait conduit l’institution à rejeter la candidature de l’intéressée. Si la seule connaissance de troubles autres que physiologiques devait justifier d’emblée un refus d’embauche par l’employeur, il en résulterait de sérieuses difficultés d’accès à l’emploi pour de nombreuses personnes ayant, dans le passé, même pour de courtes périodes, subi de tels troubles.

166    Le Tribunal estime, dans ces conditions, que la requérante a été privée d’une chance réelle d’être recrutée à durée déterminée, et que cette perte de chance peut être évaluée ex aequo et bono, au vu de l’ensemble des éléments dont dispose le Tribunal, à 50 % (voir, par analogie, arrêt du Tribunal de première instance du 6 juin 2006, Girardot/Commission, T‑10/02, points 118 et 119). Compte tenu de la rémunération que la requérante aurait pu percevoir pour la période de son engagement en qualité d’agent contractuel, évaluée par le Parlement à 15 600,60 euros, et des revenus perçus par l’intéressée au cours de la période en cause, pendant laquelle la requérante a obtenu le bénéfice d’indemnités de chômage d’environ 960 euros par mois, et en l’absence de tout élément permettant de considérer que l’engagement de la requérante aurait pu être prolongé au-delà de six mois, il y a lieu, ex aequo et bono, de condamner le Parlement à verser à la requérante la somme de 5 000 euros au titre du préjudice matériel.

167    S’agissant du préjudice moral, il y a lieu de rappeler que l’annulation de l’acte attaqué peut constituer, en elle-même, une réparation adéquate et, en principe, suffisante de ce préjudice (arrêts du Tribunal de première instance du 26 janvier 1995, Pierrat/Cour de justice, T‑60/94, point 62, et du 21 janvier 2004, Robinson/Parlement, T‑328/01, point 79 ; arrêt du Tribunal de la fonction publique du 13 décembre 2007, Sundholm/Commission, F‑42/06, point 44).

168    Toutefois, le juge de l’Union a admis certaines exceptions à cette règle.

169    En premier lieu, l’annulation de l’acte illégal de l’administration ne peut constituer une pleine réparation du préjudice moral si cet acte comporte une appréciation des capacités ou du comportement de l’intéressé susceptible de le blesser (voir arrêt de la Cour du 7 février 1990, Culin/Commission, C‑343/87, points 25 à 29 ; arrêt Pierrat/Cour de justice, précité, point 62).

170    Or, en l’espèce, les appréciations portées par le Parlement sur l’attitude de la requérante, dans la décision litigieuse et dans la réponse à la réclamation, peuvent être considérées, dans une certaine mesure, comme blessantes pour celle-ci. En effet, le Parlement lui reproche explicitement d’avoir volontairement omis de lui déclarer qu’elle avait déjà fait l’objet d’une visite médicale d’embauche à la Commission et, par là même, d’avoir méconnu ses obligations. En se prononçant en ces termes, le Parlement a ouvertement mis en cause la bonne foi de la requérante, alors que cette dernière, d’une part, avait informé le Parlement de son expérience professionnelle dans les services de la Commission, et, d’autre part, aurait pu, à l’occasion d’un examen médical, communiquer ces informations et leur contexte. De cette façon, les appréciations du Parlement, exprimées dans une décision déjà qualifiée d’illégale ci-dessus, ont directement causé un préjudice moral à la requérante (arrêt du Tribunal de première instance du 23 mars 2000, Rudolph/Commission, T‑197/98, point 98).

171    En deuxième lieu, l’annulation de l’acte illégal de l’administration ne peut constituer une pleine réparation du préjudice moral subi, lorsque l’illégalité commise est d’une gravité particulière (arrêt du Tribunal de première instance du 30 septembre 2004, Ferrer de Moncada/Commission, T‑16/03, point 68 ; arrêt du Tribunal de la fonction publique du 7 juillet 2009, Bernard/Europol, F‑99/07 et F‑45/08, point 106).

172    Or, en l’occurrence, les différentes illégalités commises par le Parlement, en particulier la méconnaissance du droit au respect de la vie privée et du règlement no 45/2001, présentent un degré particulier de gravité justifiant l’octroi d’une indemnité au titre du préjudice moral.

173    En troisième lieu, il a été jugé que l’annulation d’un acte, lorsqu’elle est privée de tout effet utile, ne pouvait constituer en elle-même la réparation adéquate et suffisante de tout préjudice moral causé par l’acte annulé (arrêt Tzirani/Commission, précité, point 223).

174    En l’espèce, même s’il est encore possible d’adopter des mesures permettant de corriger les illégalités commises, par exemple en réalisant un nouvel examen médical de la requérante, l’annulation de la décision litigieuse risque d’être privée de tout effet concret. En effet, les éléments relatifs à la santé de la requérante dont le Parlement a pris irrégulièrement connaissance sont susceptibles de fonder des doutes rendant difficile une analyse objective de l’état de santé de l’intéressée par le service médical de cette institution et il est, en tout état de cause, peu probable que le Parlement envisage de recruter la requérante, avec laquelle il n’a jamais eu de lien d’emploi, en qualité d’agent contractuel dans ses services.

175    Ainsi, le préjudice moral de la requérante n’est pas entièrement réparé par l’annulation de la décision litigieuse. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice, au regard notamment de la gravité des illégalités constatées et de leurs conséquences, en l’évaluant à la somme de 20 000 euros.

176    Il résulte de tout ce qui précède que le Parlement est condamné à verser à la requérante la somme de 25 000 euros, au titre des préjudices matériel et moral subis, tous intérêts compris.

 Sur les dépens

177    Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

178    Aux termes de l’article 89, paragraphe 2, du règlement de procédure, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

179    En l’espèce, le recours ayant été pour l’essentiel accueilli, il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en décidant que le Parlement supporte ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la requérante.

180    Conformément à l’article 89, paragraphe 4, du règlement de procédure, l’intervenant supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision du 19 décembre 2008 par laquelle le Parlement européen a retiré l’offre d’emploi qu’il avait proposée à V est annulée.

2)      Le Parlement européen est condamné à verser à V la somme de 25 000 euros.

3)      Le recours est rejeté pour le surplus.

4)      Le Parlement européen supporte, outre ses propres dépens, les dépens de la requérante.

5)      Le Contrôleur européen de la protection des données, partie intervenante, supporte ses propres dépens.

Gervasoni

Kreppel

Rofes i Pujol

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 juillet 2011.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       S. Gervasoni


* Langue de procédure : le français.