Language of document : ECLI:EU:T:2012:343

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

4 juillet 2012 (*)

« Médicaments à usage humain – Autorisation de mise sur le marché du médicament Orphacol – Lettre informant la requérante de l’intention de la Commission de refuser l’autorisation – Demande en carence – Prise de position de la Commission – Irrecevabilité – Demande en annulation – Adoption d’une nouvelle décision – Non-lieu à statuer » 

Dans l’affaire T‑12/12,

Laboratoires CTRS, établis à Boulogne-Billancourt (France), représentés par Mmes K. Bacon, barrister, M. Utges Manley et M. Barnden, solicitors,

partie requérante,

soutenus par

République tchèque, représentée par MM. M. Smolek et D. Hadroušek, en qualité d’agents,

par

République française, représentée par M. G. de Bergues, en qualité d’agent,

et par

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, représenté par Mme E. Jenkinson et M. S. Ossowski, puis par Mmes Jenkinson et H. Walker, en qualité d’agents, assistés de M. J. Holmes, barrister,

parties intervenantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. E. White et L. Banciella, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande visant à faire constater une carence de la Commission en ce que celle-ci se serait illégalement abstenue d’adopter une décision définitive quant à la demande d’autorisation de mise sur le marché du médicament Orphacol et, à titre subsidiaire, une demande d’annulation de la décision, prétendument contenue dans la lettre de la Commission du 5 décembre 2011, de ne pas accorder à la requérante ladite autorisation,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas, président, V. Vadapalas (rapporteur) et K. O’Higgins, juges,

greffier : M. N. Rosner, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 24 avril 2012,

rend le présent

Arrêt

 Faits, procédure et conclusions des parties

1        La requérante, les Laboratoires CTRS, a élaboré le médicament Orphacol, destiné à traiter deux rares, mais très sérieuses, affections hépatiques. À défaut de traitement approprié dans les premières semaines ou dans les premiers mois de la vie, ces maladies entraînent le décès.

2        Le 30 octobre 2009, la requérante a déposé une demande d’autorisation de mise sur le marché (ci-après « l’AMM ») de ce médicament, en vertu de la procédure prévue par le règlement (CE) n° 726/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments (JO L 136, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1901/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relatif aux médicaments à usage pédiatrique, modifiant le règlement (CEE) n° 1768/92, les directives 2001/20/CE et 2001/83/CE ainsi que le règlement n° 726/2004 (JO L 378, p. 1).

3        Le 16 décembre 2010, le comité des médicaments à usage humain, relevant de l’Agence européenne des médicaments (EMA), a émis un avis favorable, recommandant que soit accordée l’AMM audit médicament. Le 14 avril 2011, à la suite de précisions demandées par la Commission européenne, ledit comité a émis un avis révisé, également favorable.

4        Le 7 juillet 2011, la Commission a soumis au comité permanent des médicaments à usage humain (ci-après le « comité permanent ») un projet de décision refusant de délivrer à la requérante une AMM pour le médicament Orphacol. Selon les explications données en annexe audit projet de décision, en substance, d’une part, les conditions d’octroi d’une AMM au titre de l’article 10 bis de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (JO L 311, p. 67), telle que modifiée par la directive 2004/27/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, modifiant la directive 2001/83 (JO L 136, p. 34), n’étaient pas remplies. L’usage médical bien établi pendant une période de dix ans dans l’Union européenne, permettant au demandeur d’une AMM d’être dispensé de fournir les résultats des essais précliniques et cliniques, n’aurait pas été démontré et une documentation complète établissant l’efficacité et la sécurité de la substance active aurait fait défaut. Accorder une AMM pour l’Orphacol malgré ces deux défauts aurait entraîné alors un contournement du règlement n° 1901/2006. D’autre part, lorsqu’une AMM est demandée sur la base d’un usage médical bien établi au sens de l’article 10 bis de la directive 2001/83, la demande ne pourrait s’appuyer sur les « circonstances exceptionnelles » prévues par l’article 14, paragraphe 8, du règlement n° 726/2004.

5        Le 13 septembre 2011, le comité permanent a discuté du projet de décision de la Commission refusant l’AMM, mais n’a pas procédé à un vote et a repoussé la discussion à sa prochaine réunion.

6        Le 13 octobre 2011, le comité permanent a délivré un avis défavorable à l’encontre du projet de décision de la Commission refusant l’AMM.

7        Le 24 octobre 2011, la Commission a soumis au comité d’appel le projet de décision refusant l’AMM.

8        Le 8 novembre 2011, le comité d’appel a également émis un avis défavorable à l’égard du projet de décision de la Commission refusant l’AMM.

9        Le 11 novembre 2011, la requérante a adressé une lettre à M. D., membre de la Commission chargé des questions de santé et de politique des consommateurs, demandant que la Commission adopte une décision lui accordant une AMM pour l’Orphacol sans plus tarder.

10      Le 14 novembre 2011, la requérante a également envoyé une lettre à M. D., en complément de sa lettre précédente, ainsi qu’une lettre au président de la Commission, avec une copie de la lettre adressée le même jour à M. D.

11      Le 5 décembre 2011, M. D. a adressé une lettre à la requérante indiquant que, pour les raisons exposées en annexe au projet de décision refusant l’AMM, la Commission estimait que les conditions pour l’accorder n’étaient pas remplies.

12      Le même jour, la requérante a envoyé un courriel à M. D. lui demandant si elle obtiendrait davantage de réponse à ses lettres des 11 et 14 novembre 2011, et annonçant son intention de saisir le Tribunal du refus d’agir de la Commission dans les deux mois.

13      Le 19 décembre 2011, M. D. a répondu à ce courriel en indiquant qu’une AMM ne pouvait pas être octroyée pour les motifs exposés à l’annexe du projet de décision de la Commission refusant l’AMM, mais que la Commission ne pouvait pas non plus adopter une décision formelle refusant l’AMM en raison de l’avis défavorable émis par le comité d’appel.

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 janvier 2012, la requérante a introduit le présent recours.

15      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a introduit une demande de procédure accélérée au titre de l’article 76 bis du règlement de procédure du Tribunal.

16      Par décision du 8 février 2012, le Tribunal (cinquième chambre) a fait droit à cette demande.

17      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, a, le 12 mars 2012, invité la Commission à répondre à une question écrite avant l’audience. La Commission a répondu à cette question dans le délai imparti.

18      Respectivement les 28 mars, 4 et 6 avril 2012, la République tchèque, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et la République française ont demandé à être admis à intervenir au soutien des conclusions de la requérante. Ces demandes en intervention ont été signifiées aux parties, lesquelles ont fait part de leurs observations dans les délais impartis, à l’exception de la Commission concernant les deux dernières demandes. Il a été fait droit à ces demandes par ordonnance du président de la cinquième chambre du Tribunal du 18 avril 2012.

19      Le 20 avril 2012, Asklepion Pharmaceuticals a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission. Par ordonnance du président de la cinquième chambre du Tribunal du 23 avril 2012, cette demande a été rejetée.

20      Le 23 avril 2012, la Commission a informé le Tribunal que le comité permanent devait se réunir le 8 mai suivant pour discuter d’un nouveau projet de décision de la Commission refusant l’AMM pour le médicament Orphacol.

21      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 24 avril 2012.

22      Par lettre du greffe du Tribunal du 22 mai 2012, les parties ont été informées que l’arrêt devait être prononcé le 7 juin 2012.

23      Par lettre du 25 mai 2012, la Commission a informé le Tribunal qu’elle avait adopté, ce même jour, une décision refusant l’AMM pour le médicament Orphacol. Ladite décision indique que le comité permanent a examiné le nouveau projet de décision le 8 mai 2012, mais que celui-ci n’a pas émis d’avis.

24      Par ordonnance du 4 juin 2012, le Tribunal a décidé d’ordonner la réouverture de la procédure orale, conformément à l’article 62 du règlement de procédure, afin de permettre aux parties de prendre position sur cet élément nouveau.

25      Par lettre du greffe du Tribunal du même jour, les parties ont ainsi été invitées à déposer leurs observations quant aux conséquences à tirer de l’adoption de la décision de la Commission du 25 mai 2012.

26      Toutes les parties ont répondu dans les délais impartis, à l’exception de la République française.

27      Par décision du 19 juin 2012, le Tribunal a clos de nouveau la procédure orale.

28      La requérante, soutenue par la République tchèque, la République française et le Royaume-Uni, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater que la Commission s’est illégalement abstenue d’adopter une décision définitive quant à sa demande d’AMM pour le médicament Orphacol ;

–        à titre subsidiaire, annuler la décision de refus d’autorisation d’une AMM pour le médicament Orphacol contenue dans le courrier de la Commission du 5 décembre 2011 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

29      En réponse à la question posée par le Tribunal le 4 juin 2012, la requérante a exposé, par lettre du 14 juin suivant, qu’elle maintenait tant ladite demande en carence que ladite demande en annulation, formulée à titre subsidiaire.

30      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter la demande en carence comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondée ;

–        rejeter la demande en annulation comme irrecevable ou sans objet ;

–        condamner la requérante aux dépens.

31      En réponse à la question posée par le Tribunal le 4 juin 2012, la Commission a soutenu, par lettre du 15 juin suivant, que la demande en carence comme la demande en annulation étaient devenues sans objet.

 En droit

 Sur la demande en carence

32      Selon la requérante, étant donné que l’article 10, paragraphe 2, du règlement n° 726/2004 prévoit que la Commission arrête une décision définitive dans les quinze jours suivant la fin de la procédure d’examen prévue par le règlement (UE) n° 182/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 2011, établissant les règles et principes généraux relatifs aux modalités de contrôle par les États membres de l’exercice des compétences d’exécution par la Commission (JO L 55, p. 13), qui abroge la décision 1999/468/CE du Conseil, du 28 juin 1999, fixant les modalités de l’exercice des compétences d’exécution conférées à la Commission (JO L 184, p. 23), la Commission était dans l’obligation de prendre une décision définitive conforme à ladite procédure, c’est-à-dire une décision ayant reçu un avis positif, ou neutre, du comité permanent, ou un avis positif, ou neutre, du comité d’appel.

33      La requérante avance que, par sa lettre du 11 novembre 2011, elle a formellement demandé à la Commission d’agir à cet égard, conformément à l’article 265, paragraphe 2, TFUE, et que la période de deux mois prévue par cette disposition a expiré le 11 janvier 2012, date à laquelle la Commission n’a pas adopté de décision définitive en conformité avec la procédure d’examen.

34      La requérante ajoute que la lettre de M. D. du 5 décembre 2011, qui est une réponse à la demande formelle du 11 novembre 2011, n’est pas une décision rendue en conformité avec la procédure d’examen, ainsi que cela est requis par l’article 10, paragraphe 2, du règlement n° 726/2004, et ne peut donc pas être une décision définitive au sens de cette disposition. Sur la forme, ladite lettre ne pourrait « exprimer » une telle décision. Sur le fond, la position exprimée dans ladite lettre, c’est-à-dire le refus d’accorder l’AMM sur la base des raisons exprimées dans le projet de décision de refus de la Commission, lequel a été rejeté tant par le comité permanent que par le comité d’appel, serait interdite par le règlement n° 182/2011.

35      La Commission fait valoir, sans soulever formellement une exception d’irrecevabilité, que la demande en carence doit être déclarée irrecevable, en raison de l’absence de référence, dans la « correspondance » de la requérante, à l’article 265 TFUE.

36      La Commission soutient également que, contrairement à ce qu’affirme la requérante, elle n’a pas manqué à ses obligations en ne prenant pas de décision définitive. Elle aurait rempli ses obligations, conformément au règlement n° 726/2004, en adressant, le 7 juillet 2011, un projet de décision aux États membres et à la requérante, avec en annexe les explications quant aux raisons pour lesquelles elle a considéré qu’une AMM pour le médicament Orphacol devait être refusée. Le fait qu’elle n’a pas adopté de décision définitive dans les quinze jours suivant la fin de la procédure visée à l’article 87, paragraphe 3, du règlement n° 726/2004 tiendrait au fait qu’elle aurait identifié la nécessité d’obtenir plus de clarifications de la part de l’EMA. Ainsi, l’examen de la demande d’AMM serait toujours en cours et continuerait d’être mené conformément aux règlements nos 726/2004 et 182/2011.

37      La Commission relève enfin que, aux termes de l’article 265 TFUE, un recours en carence ne peut être formé que pour établir une « omission illégale ». Or, le fait qu’elle n’a pas accordé l’AMM demandée malgré la recommandation de l’EMA et l’avis défavorable du comité permanent quant au projet de décision de refus de la Commission ne serait pas illégal. Certaines des raisons pour lesquelles la Commission a considéré qu’accorder l’AMM demandée serait illégale seraient contenues dans l’annexe du projet de décision de refus de la Commission. Ces raisons seraient encore toutefois sujettes à révision.

38      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, aux termes de l’article 265, deuxième alinéa, TFUE, un recours en carence n’est recevable que si l’institution en cause a été préalablement invitée à agir. Cette mise en demeure de l’institution est une formalité essentielle et a pour effet, d’une part, de faire courir le délai de deux mois dans lequel l’institution est tenue de prendre position et, d’autre part, de délimiter le cadre dans lequel un recours pourra être introduit au cas où l’institution s’abstiendrait de prendre position. Bien que non soumise à une condition de forme particulière, il est, néanmoins, nécessaire que la mise en demeure soit suffisamment explicite et précise pour permettre à la Commission de connaître de manière concrète le contenu de la décision qu’il lui est demandé de prendre et faire ressortir qu’elle a pour objet de contraindre celle-ci à prendre parti (arrêt de la Cour du 10 juin 1986, Usinor/Commission, 81/85 et 119/85, Rec. p. 1777, point 15 ; ordonnance du Tribunal du 30 avril 1999, Pescados Congelados Jogamar/Commission, T‑311/97, Rec. p. II‑1407, point 35, et arrêt du Tribunal du 3 juin 1999, TF1/Commission, T‑17/96, Rec. p. II‑1757, point 41).

39      Or, il convient de constater que la requérante, par sa lettre adressée à M. D. le 11 novembre 2011, a demandé que la Commission adopte une décision octroyant l’AMM pour le médicament Orphacol sans retard supplémentaire.

40      Au regard des termes utilisés, force est de constater que cette lettre, lue dans son ensemble, était suffisamment explicite et précise pour permettre à la Commission de connaître de manière concrète le contenu de la décision que la requérante lui demandait de prendre et faisait ressortir qu’elle avait pour objet de la contraindre à prendre parti. Il y a donc lieu de considérer que la Commission a été invitée à agir conformément à l’article 265, deuxième alinéa, TFUE. Le fait, évoqué par la Commission, que cette lettre ne fasse pas référence expressément à cette dernière disposition est sans influence à cet égard, dès lors qu’une telle condition formelle n’est pas exigée par ladite disposition.

41      Par sa lettre du 5 décembre 2011, M. D. a répondu que, pour les raisons exposées en annexe au projet de décision de refus de la Commission, cette dernière considérait que les conditions d’autorisation d’une AMM n’étaient pas remplies dans le cas présent.

42      Ainsi, M. D. a très clairement indiqué que la Commission n’entendait pas accorder à la requérante l’AMM demandée (voir, en ce sens, ordonnance du président du Tribunal du 27 avril 2005, Makhteshim-Agan Holding e.a./Commission, T‑34/05 R, Rec. p. II‑1465, point 64).

43      Force est donc de constater que la lettre de M. D. du 5 décembre 2011 constitue une prise de position au sens de l’article 265, deuxième alinéa, TFUE mettant fin à la prétendue inaction de la Commission (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 11 mars 2002, Schlüsselverlag J. S. Moser e.a./Commission, T‑3/02, Rec. p. II‑1473, point 21).

44      À cet égard, d’une part, en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel ladite lettre ne pourrait « exprimer », par sa forme, la décision de refus de la Commission d’accorder l’AMM demandée, il convient de constater que le règlement n° 726/2004 n’impose à la Commission aucune forme particulière dans le cadre de la rédaction de la décision qu’elle doit prendre à la suite de l’avis émis par le comité d’appel.

45      D’autre part, l’argument de la requérante selon lequel la position exprimée dans la lettre du 5 décembre 2011 serait interdite par le règlement n° 182/2011 est une question relative à la légalité de la décision de refus contenue dans cette lettre d’accorder l’AMM demandée et ne saurait, dès lors, être examiné que dans le cadre de l’examen de la demande en annulation.

46      En conséquence, la lettre de M. D. du 5 décembre 2011 constituant une prise de position au sens de l’article 265, deuxième alinéa, TFUE, il y a lieu de déclarer la demande en carence irrecevable.

 Sur la demande en annulation

47      La requérante soutient que, si le Tribunal considère que la lettre de M. D. du 5 décembre 2011, seule ou prise avec la correspondance qui l’a suivie, constitue, par sa substance, une décision, le Tribunal doit annuler cette décision, qui est interdite par le règlement n° 182/2011 et qui doit également être annulée sur le fondement d’erreurs de droit fondamentales et/ou d’une insuffisance de motivation contraire à l’article 296 TFUE.

48      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, une demande en annulation intentée par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où la partie requérante a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué (voir ordonnance du Tribunal du 25 janvier 2012, Mastercard e.a./Conseil, T‑330/11, non publiée au Recueil, point 25, et la jurisprudence citée).

49      L’intérêt à agir d’une partie requérante doit, au vu de l’objet de la demande en annulation, exister au stade de l’introduction de celle-ci sous peine d’irrecevabilité (voir ordonnance Mastercard e.a./Conseil, précitée, point 26, et la jurisprudence citée).

50      En l’espèce, postérieurement à la lettre du 5 décembre 2011, laquelle porte décision de refus de l’AMM, la Commission a soumis au comité permanent un nouveau projet de décision refusant l’AMM demandée par la requérante. À l’issue de l’examen du 8 mai 2012, le comité permanent n’a pas émis d’avis et la Commission a adopté ledit projet le 25 mai 2012.

51      La présente demande en annulation étant dirigée contre la décision contenue dans la lettre du 5 décembre 2011, la requérante avait un intérêt à agir à la date de son introduction et celle-ci était recevable.

52      Cependant, l’intérêt à agir doit perdurer jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle sous peine de non-lieu à statuer, ce qui suppose que la demande soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intentée (voir ordonnance Mastercard e.a./Conseil, précitée, point 28, et la jurisprudence citée).

53      Si l’intérêt à agir de la partie requérante disparaît au cours de la procédure, une décision du Tribunal sur le fond ne saurait procurer aucun bénéfice à celui-ci (voir ordonnance Mastercard e.a./Conseil, précitée, point 29, et la jurisprudence citée).

54      Or, force est de constater que la décision du 25 mai 2012 procède au remplacement de la décision portant refus de l’AMM contenue dans la lettre du 5 décembre 2011.

55      Il convient donc de considérer qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le recours en ce qu’il vise à l’annulation de la décision contenue dans la lettre de la Commission du 5 décembre 2011, dans la mesure où la requérante n’a plus d’intérêt à agir contre celle-ci, du fait de l’adoption de la décision du 25 mai 2012, et dans la mesure où elle n’a pas demandé que lui soit accordée la possibilité d’adapter ses conclusions afin de demander l’annulation de la décision du 25 mai 2012.

56      L’argument de la requérante, avancé dans sa réponse au Tribunal du 14 juin 2012, selon lequel l’adoption de la décision du 25 mai 2012 ne signifierait pas que la décision contenue dans la lettre de la Commission du 5 décembre 2011 ne serait plus susceptible d’annulation, ne saurait remettre en cause les considérations précédentes. En effet, du fait de l’adoption, par la Commission, de la décision du 25 mai 2012, cette annulation ne serait pas susceptible de procurer un bénéfice à la requérante, dès lors que le refus d’AMM, qui fait grief à la requérante, subsisterait par le biais de cette décision.

57      Par suite, dans cette situation, il ne peut qu’être constaté qu’il n’y a plus lieu de statuer sur la demande en annulation formulée par la requérante à titre subsidiaire.

 Sur les dépens

58      Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, ou pour des motifs exceptionnels.

59      Par ailleurs, aux termes de l’article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure, en cas de non‑lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens.

60      En l’espèce, il convient de souligner que la Commission a adopté une décision de refus d’une AMM le 25 mai 2012, remplaçant ainsi la décision contenue dans la lettre du 5 décembre 2011. Il convient encore de souligner que la Commission a adopté ladite décision du 25 mai 2012 trois jours après avoir été informée par le greffe du Tribunal du prononcé de l’arrêt prévu pour le 7 juin 2012 (voir points 22 et 23 ci-dessus).

61      Dans ces conditions, eu égard aux circonstances exceptionnelles de la présente affaire, il convient de condamner la Commission à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la requérante.

62      Enfin, aux termes de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens.

63      Il y a donc lieu d’ordonner que la République tchèque, la République française et le Royaume-Uni supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      La demande en carence est rejetée comme irrecevable.

2)      Il n’y a plus lieu de statuer sur la demande en annulation formulée à titre subsidiaire.

3)      La Commission européenne est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux des Laboratoires CTRS.

4)      La République tchèque, la République française et le Royaume-Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord supporteront leurs propres dépens.

Papasavvas

Vadapalas

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 juillet 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.