Language of document : ECLI:EU:C:2012:790

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 13 décembre 2012 (1)

Affaire C‑512/10

Commission européenne

contre

République de Pologne

«Recours en manquement – Directive 91/440/CEE – Développement de chemins de fer communautaires – Directive 2001/14/CE – Répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire – Article 6, paragraphe 3, et annexe II de la directive 91/440 – Articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14 – Gestionnaire de l’infrastructure – Indépendance organisationnelle et décisionnelle – Structure de holding – Article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 2001/14 – Absence persistante d’équilibre financier – Articles 6, paragraphe 1, et 7, paragraphes 3 et 4, de la directive 91/440 – Absence de mesures d’incitation du gestionnaire de l’infrastructure –Articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 – Calcul de la redevance pour l’accès minimal»





I –    Introduction

1.        Par son recours en manquement, la Commission européenne demande à la Cour de constater que la République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphe 3, et de l’annexe II de la directive 91/440/CEE (2), telle que modifiée par la directive 2007/58/CE (3) (ci‑après la «directive 91/440»), des articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14/CE (4) (ci‑après la «directive 2001/14»), de l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 2001/14, de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphes 3 et 4, de la directive 91/440, ainsi que des articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14. La République de Pologne conclut au rejet du recours introduit par la Commission.

2.        La présente affaire s’inscrit dans une série de recours en manquement (5), introduits par la Commission en 2010 et en 2011 et portant sur l’application par les États membres des directives 91/440 et 2001/14, dont l’objet principal est d’assurer l’accès équitable et non discriminatoire des entreprises ferroviaires à l’infrastructure, à savoir au réseau ferroviaire. Ces recours sont inédits car ils offrent à la Cour la possibilité d’examiner pour la première fois la libéralisation des chemins de fer dans l’Union européenne et, notamment, d’interpréter ce qu’il est convenu d’appeler le «premier paquet ferroviaire».

3.        J’ai déjà présenté, le 6 septembre 2012, mes conclusions dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Portugal, précité, ainsi que dans les affaires précitées Commission/Hongrie; Commission/Espagne; Commission/Autriche, et Commission/Allemagne. En sus des présentes conclusions, je présente aujourd’hui mes conclusions dans les affaires précitées Commission/République tchèque; Commission/France; Commission/Slovénie, et Commission/Luxembourg. Dans la mesure où la présente affaire porte sur des griefs analogues à ceux que j’ai déjà eu l’occasion d’analyser dans les conclusions susvisées, je me limiterai à faire référence aux points pertinents de celles-ci, sans, toutefois, reprendre dans son intégralité l’argumentation y figurant.

II – Le cadre juridique

A –    La réglementation de l’Union

1.      La directive 91/440

4.        L’article 6, paragraphes 1 à 3, de la directive 91/440 dispose:

«1.      Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer la tenue et la publication de comptes de profits et pertes séparés et de bilans séparés, d’une part, pour les activités relatives à la fourniture de services de transport par des entreprises ferroviaires et, d’autre part, pour celles relatives à la gestion de l’infrastructure ferroviaire. Les aides publiques versées à l’une de ces deux activités ne peuvent pas être transférées à l’autre.

Les comptes relatifs aux deux activités sont tenus de façon à refléter cette interdiction.

2.      Les États membres peuvent, en outre, prévoir que cette séparation comporte des divisions organiques distinctes au sein d’une même entreprise ou que la gestion de l’infrastructure est assurée par une entité distincte.

3.      Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer que les fonctions essentielles en vue de garantir un accès équitable et non discriminatoire à l’infrastructure, qui sont énumérées à l’annexe II, sont confiées à des instances ou entreprises qui ne sont pas elles‑mêmes fournisseurs de services de transport ferroviaire. Quelles que soient les structures organisationnelles, cet objectif doit être atteint d’une manière probante.

Les États membres peuvent, toutefois, confier aux entreprises ferroviaires ou à toute autre entité la perception des redevances et la responsabilité de la gestion des infrastructures, par exemple, tels que, l’entretien et le financement.»

5.        L’annexe II de la directive 91/440 énumère les fonctions essentielles visées à l’article 6, paragraphe 3, de celle‑ci:

–        préparation et adoption des décisions concernant la délivrance de licences aux entreprises ferroviaires, y compris l’octroi de licences individuelles;

–        adoption des décisions concernant la répartition des sillons, y compris la définition et l’évaluation de la disponibilité, ainsi que l’attribution de sillons individuels;

–        adoption des décisions concernant la tarification de l’infrastructure, et

–        contrôle du respect des obligations de service public requises pour la fourniture de certains services.

6.        L’article 7, paragraphes 3 et 4, de la directive 91/440, prévoit:

«3.      Les États membres peuvent, en outre, octroyer au gestionnaire de l’infrastructure, dans le respect des articles 73, 87 et 88 du traité, un financement suffisant en rapport avec les tâches, la dimension et les besoins financiers, notamment pour couvrir des investissements nouveaux.

4.      Dans le cadre de la politique générale arrêtée par l’État, le gestionnaire de l’infrastructure établit un plan d’entreprise incluant des programmes d’investissement et de financement. Le but de ce plan est d’assurer une exploitation et un développement optimaux et efficaces de l’infrastructure, tout en permettant d’atteindre l’équilibre financier et en prévoyant les moyens nécessaires pour réaliser ces objectifs.»

2.      La directive 2001/14

7.        Les considérants 11 et 16 de la directive 2001/14 énoncent:

«Il y a lieu que les systèmes de tarification et de répartition des capacités assurent à toutes les entreprises un accès égal et non discriminatoire et s’efforcent, dans la mesure du possible, de répondre aux besoins de tous les utilisateurs et de tous les types de trafic, et ce de manière équitable et non discriminatoire.

[…]

Il y a lieu que les systèmes de tarification et de répartition des capacités permettent une concurrence équitable dans la fourniture de services ferroviaires.»

8.        L’article 4, paragraphe 2, de ladite directive dispose:

«Si le gestionnaire de l’infrastructure n’est pas indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel ou décisionnel, les fonctions décrites dans le présent chapitre, autres que celles de recouvrement des redevances, sont assumées par un organisme de tarification qui est indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.»

9.        Selon l’article 6 de la directive 2001/14:

«1.      Les États membres définissent les conditions appropriées, comprenant, le cas échéant, des paiements ex ante, pour que les comptes du gestionnaire de l’infrastructure, dans des conditions normales d’activité et par rapport à une période raisonnable, présentent au moins un équilibre entre, d’une part, les recettes tirées des redevances d’utilisation de l’infrastructure, les excédents dégagés d’autres activités commerciales et le financement par l’État et, d’autre part, les dépenses d’infrastructure.

[…]

2.      Le gestionnaire de l’infrastructure est, tout en respectant les exigences en matière de sécurité, et en maintenant et en améliorant la qualité de service de l’infrastructure, encouragé par des mesures d’incitation à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès.

3.      Les États membres veillent à ce que la disposition prévue au paragraphe 2 soit mise en œuvre soit dans le cadre d’un contrat conclu, pour une durée minimale de trois ans, entre l’autorité compétente et le gestionnaire de l’infrastructure et prévoyant le financement par l’État, soit par l’établissement de mesures réglementaires appropriées, prévoyant les pouvoirs nécessaires.

[...]»

10.      L’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14 dispose:

«Sans préjudice des dispositions des paragraphes 4 ou 5 ou de l’article 8, les redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services sont égales au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire.»

11.      L’article 8, paragraphe 1, de ladite directive est ainsi rédigé:

«Un État membre peut, afin de procéder au recouvrement total des coûts encourus par le gestionnaire de l’infrastructure et, si le marché s’y prête, percevoir des majorations sur la base de principes efficaces, transparents et non discriminatoires, tout en garantissant une compétitivité optimale, en particulier pour le transport ferroviaire international de marchandises. Le système de tarification respecte les gains de productivité réalisés par les entreprises ferroviaires.

Le niveau des redevances ne doit cependant pas exclure l’utilisation des infrastructures par des segments de marché qui peuvent au moins acquitter le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, plus un taux de rentabilité si le marché s’y prête.»

12.      Aux termes de l’article 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14:

«Si le gestionnaire de l’infrastructure n’est pas indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel ou décisionnel, les fonctions visées au paragraphe 1 et décrites au présent chapitre sont assumées par un organisme de répartition qui est indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.»

B –    La réglementation polonaise

1.      La loi du 8 septembre 2000

13.      L’article 15 de la loi sur la vente, la restructuration et la privatisation de l’entreprise publique Polskie Koleje Państwowe (ustawa z dnia 8 września 2000 r. o komercjalizacji, restrukturyzacji i prywatyzacji przedsiębiorstwa państwowego «Polskie Koleje Państwowe»), du 8 septembre 2000 (6), telle que modifiée (ci‑après la «loi du 8 septembre 2000»), dispose:

«1.      PKP SA crée une société par actions chargée de gérer les lignes ferroviaires, active sous le nom ‘PKP Polskie Linie Kolejowe Spółka Akcyjna’, dénommée ci‑après ‘PLK SA’.

2.      PLK SA, à compter du jour de son inscription au registre du commerce, assume les droits et obligations de PKP SA dans le domaine de la gestion des lignes ferroviaires, au sens de la loi visée à l’article 14, paragraphe 2, point 2.

2 bis. Aussi longtemps que PLK SA bénéficiera de crédits publics pour financer ses investissements dans l’infrastructure, les actions de cette société ne donneront droit à aucun dividende.

3.      La gestion des lignes ferroviaires par PLK SA englobe aussi les missions visées à l’article 49, paragraphe 1, de la loi du 27 juin 1997 sur le transport ferroviaire, remplies par les gardes‑voies, intégrés dans la structure organisationnelle de PLK SA.

4.      PLK SA devient le gestionnaire des lignes au sens de la loi visée à l’article 14, paragraphe 2, point 2.

4 bis. PLK SA gère les lignes ferroviaires et les autres infrastructures ferroviaires, définies dans la [loi sur le transport ferroviaire (ustawa z dnia 28 marca 2003 r. o transporcie kolejowym), du 28 mars 2003 (7), telle que modifiée (ci‑après la ‘loi sur le transport ferroviaire’)], à l’exception des immeubles et constructions affectés au transport de passagers et de marchandises ainsi que des terrains occupés par lesdits immeubles et constructions.

4 ter. L’exception visée au paragraphe 4 bis ne couvre pas les constructions situées sur les terrains faisant partie intégrante de lignes ferroviaires.

5.      Le ministre chargé des Transports approuve les statuts de PLK SA et les modifications apportées à ceux ci.

6.      L’assemblée générale de PLK SA nomme les membres du conseil de surveillance de PLK SA parmi les personnes proposées à cet effet par le ministre chargé des Transports. Le nombre des membres du conseil de surveillance de PLK SA est fixé dans les statuts.

7.      Les dépenses du budget de l’État consacrées lors d’un exercice particulier au financement des lignes ferroviaires d’intérêt national augmentent le capital émis par PLK SA; les actions correspondant à l’accroissement du capital sont détenues par le Trésor public, représenté par le ministre chargé des Transports.

8.      Les actions de PLK SA détenues par PKP SA et par le Trésor public ne peuvent pas être vendues, sans préjudice du paragraphe 8 bis.

8 bis. Les actions de PLK SA détenues par PKP SA ne peuvent être vendues qu’au Trésor public.

9.      En cas de privatisation ou de liquidation de PKP SA, les actions de PLK SA détenues par PKP SA sont reprises par le Trésor public, représenté par le ministre chargé des Transports. En cas de privatisation de PKP SA intervient une réduction du capital social de PKP SA par l’annulation d’un nombre d’actions d’une valeur équivalant à la valeur nominale des actions de PLK SA reprises par le Trésor public.»

2.      La loi sur le transport ferroviaire

14.      L’article 5, paragraphes 1 à 3, de la loi sur le transport ferroviaire (ustawa z dnia 28 marca 2003 r. o transporcie kolejowym (8), telle que modifiée, ci‑après la «loi sur le transport ferroviaire») dispose:

«1.      La gestion de l’infrastructure ferroviaire consiste à:

1)      construire et entretenir l’infrastructure ferroviaire;

2)      exploiter les trains sur les lignes de chemin de fer;

3)      maintenir l’infrastructure ferroviaire dans un état qui garantit une exploitation des trains en toute sécurité;

4)      la mise à disposition des sillons pour la circulation des trains sur les lignes ferroviaires et les prestations de services y étant liées;

5)      la gestion des biens immobiliers faisant partie de l’infrastructure ferroviaire.

2.      Le gestionnaire de l’infrastructure, ci‑après le ‘gestionnaire’, gère l’infrastructure ferroviaire et garantit son développement ainsi que sa modernisation.

3.      Le gestionnaire n’est pas habilité à exploiter des services de transport ferroviaire, à l’exclusion de tels services technologiques effectués pour ses propres besoins, sous réserve du paragraphe 4.»

15.      Aux termes de l’article 13, paragraphe 1, de cette loi:

«Le président de l’Office des transports ferroviaires, ci‑après ‘le président de l’OTF’, est compétent en matière de régulation du transport ferroviaire pour:

1)      approuver et coordonner les redevances d’utilisation des sillons octroyés, en vérifiant leur conformité aux règles de fixation de ces redevances;

[…]

3)      contrôler que les gestionnaires respectent l’égalité de traitement de tous les transporteurs ferroviaires, en particulier en matière de traitement des demandes d’attribution de sillons et de fixation de redevances;

4)      contrôler si le gestionnaire a correctement fixé les redevances de base d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire et les redevances supplémentaires de prestations de services;

5)      examiner les recours des transporteurs ferroviaires relatifs:

[…]

b)      à l’octroi des sillons et aux redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire […]».

16.      L’article 14, paragraphe 1, de la loi sur le transport ferroviaire prévoit:

«Le président de l’OTF ordonne, par voie de décision, l’élimination de toute irrégularité dans le délai imparti en cas de violation des dispositions relatives aux obligations des gestionnaires, des transporteurs ferroviaires ainsi que des utilisateurs d’embranchements ferroviaires, en matière de sécurité du transport ferroviaire [...]»

17.      Aux termes de l’article 33, paragraphes 1 à 8, de cette loi:

«1.      Le gestionnaire fixe le montant des redevances dues pour l’utilisation de l’infrastructure par les transporteurs ferroviaires.

2.      La redevance de base pour l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire est fixée en prenant en considération le coût, supporté par le gestionnaire, directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire.

3.      La redevance d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire se compose de la redevance de base et des redevances complémentaires.

3 bis. Dans le cadre de la redevance de base, le gestionnaire applique une redevance distincte pour

1)      l’accès minimal à l’infrastructure ferroviaire englobant les services visés dans la partie I, paragraphe 1, de l’annexe de la loi;

2)      l’accès aux installations liées à l’entretien des trains englobant les services visés dans la partie I, paragraphe 2, de l’annexe de la loi.

4.      La redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure ferroviaire est calculée comme étant le produit des mouvements de trains et des taux unitaires fixés selon la catégorie de la ligne ferroviaire et le type de train, et cela séparément pour le transport de passagers et de marchandises.

4 bis. Le gestionnaire peut appliquer un taux unitaire minimal de redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure ferroviaire. Le taux minimal s’applique selon des modalités équivalentes à tous les transporteurs ferroviaires de passagers pour l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire liée aux activités exécutées conformément au contrat de service public.

[…]

4 quater. La redevance de base d’accès aux équipements liés à l’entretien des trains est calculée comme étant le produit des services commandés et des taux unitaires correspondants, dont le montant varie en fonction du type de services visés dans la partie I, paragraphe 2, de l’annexe de la loi.

5.      Le taux unitaire de la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure ferroviaire est fixé par train, pour un kilomètre de déplacement.

5 bis. Le gestionnaire, pour fixer les taux unitaires de la redevance de base, soustrait du montant prévu des frais de mise à disposition de l’infrastructure ferroviaire aux transporteurs ferroviaires la subvention prévue pour la rénovation et l’entretien de l’infrastructure qui provient du budget de l’État ou des collectivités locales et les ressources prévues provenant du Fonds du rail.

[…]

5 quater. L’augmentation des taux unitaires de la redevance de base pour les transports ferroviaires de personnes effectués en vertu d’un contrat de services publics, au cours de la période de validité des horaires au sens de l’article 30, paragraphe 5, ne saurait dépasser le niveau d’indice d’inflation prévu dans le projet de loi budgétaire de l’année pertinente.

6.      Le gestionnaire est tenu de rendre publics, selon la pratique en vigueur, le montant et les types de taux de la redevance de base et des redevances supplémentaires, en distinguant le transport de passagers du transport de biens.

7.      Les taux unitaires de la redevance de base et des redevances supplémentaires, hors les redevances d’utilisation du courant de traction, sont transmis accompagnés des calculs de leur montant, au président de l’OTF.

8.      Le président de l’OTF approuve les taux, dans le délai de 30 jours à compter de leur réception, ou refuse de les approuver s’il constate des infractions aux règles visées aux paragraphes 2 à 6, à l’article 34 ou à l’article 35.»

18.      L’article 38 bis, paragraphes 1 et 2, de la loi sur le transport ferroviaire dispose:

«1.      Le ministre chargé des Transports peut cofinancer à partir du budget de l’État ou du Fonds du rail les frais de rénovation et d’entretien de l’infrastructure ferroviaire, afin de réduire les frais et le montant des redevances d’utilisation, si l’infrastructure est mise à disposition par le gestionnaire conformément aux principes définis dans la loi.

2.      La mission visée au paragraphe 1 est réalisée sur la base d’un contrat conclu entre le ministre chargé des Transports et le gestionnaire pour une période supérieure ou égale à 3 ans.»

3.      La loi relative à la lutte contre la concurrence déloyale

19.      L’article 3 de la loi relative à la lutte contre la concurrence déloyale (ustawa o zwalczaniu nieuczciwej konkurencji), du 16 avril 1993 (9), telle que modifiée, prévoit:

«1.      Tout agissement contraire au droit ou aux bonnes mœurs qui menace ou viole les intérêts d’un autre entrepreneur ou client constitue un acte de concurrence déloyale.

2.      Constituent notamment des actes de concurrence déloyale: […] la violation de secrets d’affaires, l’incitation à la résiliation ou à l’inexécution d’un contrat, […] la calomnie ou l’éloge déloyale, l’entrave à l’accès au marché, la corruption d’une personne exerçant des fonctions publiques […]»

4.      Le code du travail

20.      L’article 100 de la loi portant code du travail (ustawa z dnia 26 czerwca 1974 r. Kodeks pracy) (10), du 26 juin 1974, telle que modifiée, dispose:

«[...]

§2.      L’employé est tenu notamment:

[…]

4)      de veiller aux intérêts de l’établissement, protéger ses biens et respecter la confidentialité des informations dont la divulgation serait susceptible d’exposer l’employeur à un préjudice,

5)      de respecter la confidentialité telle que définie dans les dispositions particulières,

[…]»

III – La procédure précontentieuse et la procédure devant la Cour

21.      Le 10 mai 2007, les services de la Commission ont adressé un questionnaire aux autorités polonaises en vue de vérifier la transposition par la République de Pologne des directives du premier paquet ferroviaire. Celles‑ci y ont répondu le 5 juillet 2007.

22.      Le 26 juin 2008, la Commission a, sur la base des informations communiquées par la République de Pologne, mis cet État membre en demeure de se conformer aux directives du premier paquet ferroviaire. Les principales irrégularités mises en évidence concernaient le manque d’indépendance de l’entité exerçant les fonctions essentielles au sens de l’annexe II de la directive 91/440 et la perception des redevances d’accès à l’infrastructure au sens de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, lu en combinaison avec l’article 30, paragraphe 3, de cette directive. Le 26 août 2008, la République de Pologne a répondu à la mise en demeure de la Commission.

23.      Le 9 octobre 2009, la Commission a adressé à la République de Pologne un avis motivé lui faisant grief de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour garantir l’indépendance du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire à l’égard des transporteurs ferroviaires ainsi que pour garantir le respect des dispositions de l’article 7, paragraphes 3 et 4, de la directive 91/440, de l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 2001/14, de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphes 3 et 4, de la directive 91/440, et des articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14. Le 9 décembre 2009, la République de Pologne a répondu audit avis motivé et a contesté les manquements reprochés par la Commission.

24.      Dans ces conditions, la Commission a introduit le présent recours en manquement le 26 octobre 2010.

25.      Par ordonnance du président de la Cour du 13 avril 2011, la République tchèque et la République italienne ont été admises à intervenir au soutien des conclusions de la République de Pologne.

26.      La Commission, la République de Pologne ainsi que la République tchèque étaient représentées lors de l’audience qui s’est tenue le 20 septembre 2012.

IV – Analyse du recours en manquement

A –    Sur le premier grief, tiré du manque d’indépendance du gestionnaire de l’infrastructure

1.      Argumentation des parties

27.      Selon la Commission, il convient d’interpréter l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440 en ce sens que les fonctions essentielles exercées par le gestionnaire de l’infrastructure doivent être assurées par une entité indépendante des entreprises ferroviaires non seulement sur le plan juridique, mais également sur le plan écconomique. Lorsque les fonctions essentielles sont exercées par une société dépendant d’une holding à laquelle appartiennent des fournisseurs de services de transport ferroviaire, ladite société ferait partie de la même «entreprise» que les fournisseurs en question, à moins qu’il ne soit démontré que ladite société est libre d’agir indépendamment d’eux.

28.      Selon la Commission, l’exercice des fonctions essentielles par une société dépendant d’une holding ferroviaire peut être conforme aux exigences d’indépendance définies à l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440, ainsi qu’aux articles 4, paragraphe 2, 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14, à condition qu’il existe des mécanismes garantissant une véritable autonomie décisionnelle de ladite société par rapport à la holding et que la holding ne soit pas en mesure de contrôler les décisions de ladite société.

29.      À cet égard, la Commission indique qu’elle a présenté, à l’annexe 5 du document de travail SEC(2006) 530 des services de la Commission, annexée au rapport sur la mise en œuvre du premier paquet ferroviaire (11) [ci‑après l’«annexe 5 du document de travail SEC(2006) 530»], des critères en vertu desquels elle appréciera l’indépendance des gestionnaires de l’infrastructure intégrés à des holdings ferroviaires nationales.

30.      Or, la République de Pologne n’aurait pas prévu de mécanismes efficaces afin de garantir l’indépendance organisationnelle et décisionnelle du gestionnaire de l’infrastructure exerçant les fonctions essentielles.

31.      La République de Pologne, quant à elle, reproche de manière générale à la Commission de n’avoir ni procédé à l’analyse des dispositions du droit national, ni démontré que celles‑ci ne garantissent pas une indépendance suffisante afin d’assurer un accès égal et non discriminatoire à l’infrastructure conformément à l’objectif poursuivi par la directive 91/440.

32.      La République de Pologne soutient en particulier que l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440, qui n’interdirait pas à l’entité à laquelle ont été confiées les fonctions essentielles de faire partie d’une holding telle que le groupe PKP, exige uniquement que l’objectif d’accès égal et non discriminatoire à l’infrastructure soit atteint. Or, la Commission n’aurait présenté aucun argument de fait ou de droit indiquant que cet objectif n’a pas été atteint en Pologne.

33.      S’agissant des articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14, la République de Pologne fait valoir que ces dispositions évoquent l’indépendance juridique, organisationnelle et décisionnelle du gestionnaire, sans toutefois définir ces notions ni mentionner l’indépendance économique. Selon cet État membre, ces notions doivent être interprétées au regard de l’objectif de ladite directive, lequel serait pleinement réalisé par la République de Pologne.

34.      S’agissant de l’annexe 5 du document de travail SEC(2006) 530, la République de Pologne observe que ce document a été publié de nombreuses années après la publication de la directive 91/440 et l’expiration du délai de transposition de celle‑ci, ainsi que trois ans après l’expiration du délai de transposition de la directive 2001/14.

35.      En ce qui concerne la situation du gestionnaire de l’infrastructure, PLK SA, la République de Pologne conteste l’argumentation de la Commission selon laquelle celui‑ci ne serait pas indépendant au sens de l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440.

36.      Dans son mémoire en intervention, la République italienne soutient que l’objectif consistant à assurer que les fonctions essentielles soient confiées à des instances ou à des entreprises qui ne sont pas elles‑mêmes fournisseurs de services de transport ferroviaire est manifestement réalisé dans le cadre du modèle organisationnel de la holding, étant donné que lesdites fonctions sont attribuées à une société distincte, exerçant uniquement une activité de gestion d’infrastructure et, comme telle, ne fournissant pas elle‑même de services de transport ferroviaire. Une fois cette exigence satisfaite, les États membres resteraient libres – dans le cadre du pouvoir d’appréciation que leur reconnaît la directive et conformément au principe de subsidiarité – d’autoriser les groupes ferroviaires nationaux à se structurer selon les modalités qu’ils considèrent les plus adéquates, et donc également en adoptant des structures de groupe chapeautées par une holding commune.

37.      Dans son mémoire en réponse au mémoire en intervention de la République italienne, la Commission rétorque que le fait de confier les fonctions essentielles à des instances ou à des entreprises qui ne fournissent pas elles‑mêmes des services de transport ferroviaire n’est pas en soi l’objectif de l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440, mais sert à assurer que soit garanti un accès équitable et non discriminatoire à l’infrastructure. Séparer uniquement d’un point de vue juridique l’organisme exerçant des fonctions essentielles des entreprises ferroviaires, c’est‑à‑dire créer, dans le cadre de la holding, une société séparée des entreprises ferroviaires à laquelle l’on confie l’exercice des fonctions essentielles, ne serait pas suffisant pour garantir un accès équitable et non discriminatoire à l’infrastructure ferroviaire de tous les organismes concernés en dehors de la holding. Aussi, en cas de holding, la création de mécanismes garantissant l’indépendance décisionnelle de cet organisme par rapport aux autres sociétés de la holding (entreprises ferroviaires et leur société mère) serait d’une importance capitale.

2.      Examen du premier grief

38.      Ainsi que je l’ai déjà exposé dans mes conclusions dans l’affaire Commission/Autriche (12), les dispositions de l’article 6, paragraphe 3, et de l’annexe II de la directive 91/440 ainsi que des articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14, prévoyant une obligation d’indépendance de l’organisme chargé des fonctions essentielles, ne sauraient fonder une interprétation selon laquelle les États membres ayant opté pour le modèle de la société holding seraient tenus d’adopter des mesures législatives, réglementaires ou conventionnelles correspondant à l’interprétation retenue par la Commission dans l’annexe 5 du document de travail SEC(2006) 530.

39.      Par conséquent, dans le cadre d’un recours en manquement relatif à une transposition erronée ou incomplète des dispositions susvisées de la directive 2001/14, il ne saurait être reproché à la République de Pologne de ne pas avoir adopté de règles particulières:

–        interdisant aux membres du directoire ou du conseil de surveillance, aux membres des organes dirigeants ou aux collaborateurs de PKP SA, d’entreprises dépendant de celle‑ci ou d’entreprises de transport ferroviaire, d’exercer des fonctions au sein du directoire ou du conseil de surveillance de PLK SA, à la fois pendant l’exercice de leur mandat et pendant une période suffisamment longue après la fin de celui‑ci; il en va de même pour les personnes occupant des fonctions identiques au sein de PLK SA et entretenant des liens analogues avec d’autres sociétés du groupe;

–        créant des mécanismes propres à garantir l’indépendance mutuelle des entités assurant le transport ferroviaire et la gestion de l’infrastructure;

–        prévoyant des mécanismes de protection d’accès aux systèmes informatiques en vue d’assurer l’indépendance de l’entité chargée des fonctions essentielles dans l’exercice desdites fonctions, et

–        introduisant des restrictions applicables aux communications entre le personnel de l’entité chargée des fonctions essentielles et les autres entités sous le contrôle de la holding.

40.      Force est de constater que le grief de la Commission est tiré non pas d’une application erronée de la directive 91/440 et de la directive 2001/14, mais plutôt d’une transposition incomplète desdits actes du droit de l’Union. De surcroît, la Commission n’a pas fourni de preuves concrètes qui démontreraient que l’exigence d’indépendance de l’entité chargée des fonctions essentielles n’est pas suivie en pratique.

41.      Le fait que, actuellement, certaines personnes siègent en même temps dans les organes de PKP SA et de transporteurs ferroviaires, mais qu’une telle situation n’existe pas à l’égard de PLK SA plaide, à mon avis, en faveur de la position de la République de Pologne selon laquelle le Trésor public polonais veille à assurer l’indépendance du gestionnaire de l’infrastructure dans le cadre des décisions de nomination au sein des organes du groupe PKP. Il convient d’ajouter que le Trésor public possède 100 % des actions de PKP SA, la société mère du groupe, et que le ministre chargé des Transports présente à l’assemblée générale de PLK SA la liste de ses candidats au conseil de surveillance. Or, ces modèles de gouvernance contredisent le soupçon selon lequel PKP SA en tant que société mère puisse, par le contrôle de la direction de PLK SA, compromettre l’indépendance du gestionnaire de l’infrastructure.

42.      S’agissant des allégations de la Commission relatives à l’inapplicabilité et à la prétendue inefficacité, d’une part, de la loi relative à la lutte contre la concurrence déloyale au sein des groupes de sociétés et, d’autre part, de l’article 100 du code du travail, aux fins de la protection de l’indépendance du gestionnaire de l’infrastructure, je considère que la Commission n’est pas parvenue à établir que les explications de la République de Pologne sont erronées à cet égard.

43.      De surcroît, à l’instar du raisonnement que j’ai suivi dans l’affaire Commission/Autriche, il ne me semble pas cohérent, en l’espèce, d’exiger d’un État membre, comme le fait la Commission, qu’il adopte des règles supplémentaires si les sujets concernés ne respectent pas, ex hypothesi, les obligations juridiques existantes découlant de la législation générale adoptée par l’État membre aux fins de la protection de l’indépendance de la filiale (13). Or, un recours en manquement ne saurait se fonder sur une simple hypothèse selon laquelle les cadres et la direction du gestionnaire de l’infrastructure seraient susceptibles de manquer aux dispositions légales, ce qui engendrerait dans le chef de l’État membre concerné l’obligation d’adopter des règles particulières plus détaillées.

44.      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour d’écarter le premier grief de la Commission.

B –    Sur le deuxième grief, tiré d’une absence persistante d’équilibre financier

1.      Argumentation des parties

45.      La Commission reproche à la République de Pologne de ne pas avoir pris les mesures propres à assurer en temps utile l’équilibre financier du gestionnaire de l’infrastructure, à savoir PLK SA. Cette omission serait donc constitutive d’une violation des obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphes 3 et 4, de la directive 91/440. La Commission précise à cet égard qu’il découlerait de la réponse du gouvernement polonais à l’avis motivé que les dépenses et les recettes ne seront en équilibre qu’en 2012.

46.      La République de Pologne soutient que l’équilibre financier du gestionnaire de l’infrastructure est atteint si l’on tient compte du résultat d’exploitation avant la déduction des amortissements. Or, il ne résulterait nullement de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14 que l’équilibre financier doive être atteint en intégrant les coûts d’amortissement, et notamment ceux des lignes ferroviaires qui sont ou seront à l’avenir liquidées, de sorte que les coûts de leur éventuelle rénovation n’ont pas été pris en compte lors de la fixation des redevances d’accès à l’infrastructure.

2.      Examen du deuxième grief

47.      Je rappelle, tout d’abord, que le présent grief de la Commission correspond grosso modo à la même problématique que celle traitée dans le cadre du deuxième grief dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Portugal (14).

48.      Dans cette affaire Commission/Portugal, le grief de la Commission était cependant tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 91/440 et de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14 résultant de l’absence d’adoption par la République portugaise des mesures nécessaires afin de se conformer aux obligations visées auxdits articles. Lesdites dispositions imposent aux États membres de définir les conditions appropriées pour garantir que les comptes du gestionnaire d’infrastructure soient en équilibre. Ainsi que je l’ai exposé dans mes conclusions dans cette affaire (15), il ressortait clairement des explications fournies par le gouvernement portugais en réponse au deuxième grief de la Commission que, en dépit des obligations prévues dans la législation nationale à cet effet, la République portugaise n’avait pas pris les mesures nécessaires afin de se conformer aux obligations visées à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 91/440 et à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14 à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé.

49.      En revanche, dans la présente affaire, la République de Pologne affirme avoir fourni au gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire des financements suffisants d’un montant croissant, le déséquilibre comptable relevé par la Commission s’expliquant par les coûts d’amortissement des infrastructures, notamment des lignes à liquider. La République de Pologne défend donc une interprétation de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14 selon laquelle ladite disposition imposerait à l’État membre non pas d’atteindre un équilibre des comptes de profits et pertes, mais seulement de fournir le financement nécessaire afin que le résultat d’exploitation avant la déduction des amortissements soit à l’équilibre.

50.      C’est donc l’interprétation de cette dernière disposition qui se trouve au cœur du débat. En effet, premièrement, la Commission ne nie pas que la République de Pologne a fourni un financement en vue d’améliorer la situation économique et financière du gestionnaire de l’infrastructure et pris des mesures à cet effet. Toutefois, la Commission affirme que ledit financement n’a pas été suffisant au regard des mesures visant à remédier durablement aux causes du déséquilibre financier, telles que la suppression de la partie des liaisons ferroviaires non rentables.

51.      Deuxièmement, il convient de relever que, dans le cadre de la refonte du premier paquet ferroviaire, proposée par la Commission en 2010 (16), la Commission envisage de fusionner les paragraphes 3 et 4 de l’article 7 de la directive 91/440 en une nouvelle disposition correspondant au paragraphe 3 de l’article 8 du texte modifié. De plus, l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14 serait déplacé, en subissant quelques modifications, au paragraphe 4 dudit article 8 (17).

52.      Le projet d’article 8, paragraphe, 4, de la directive refondue, dans sa version arrêtée par le Parlement en deuxième lecture le 3 juillet 2012, se lit comme suit:

«Les États membres veillent à ce que les comptes de profits et pertes du gestionnaire de l’infrastructure, dans les conditions normales d’activité et par rapport à une période raisonnable qui ne dépasse une période de cinq ans, présentent au moins un équilibre entre, d’une part, les recettes tirées des redevances d’utilisation de l’infrastructure, les excédents dégagés d’autres activités commerciales, les revenus non remboursables de sources privées et le financement par l’État, y compris, le cas échéant, les avances de l’État, et, d’autre part, les dépenses d’infrastructure» (18).

53.      Il apparaît ainsi clairement que, si la disposition susmentionnée entrait en vigueur, c’est bien le compte de profits et pertes qui devrait se trouver à l’équilibre. En l’état actuel du droit de l’Union, il s’agit toutefois de savoir s’il en va d’ores et déjà ainsi en application des directives 2001/14 et 91/440. Indépendamment de la position qui pourrait être adoptée à cet égard, le libellé des dispositions en cause n’est pas sans ambiguïtés.

54.      Je constate, tout d’abord, que contrairement aux directives comptables de l’Union (voir, à titre d’exemple, la directive 78/660/CE) (19), qui utilisent les termes «coût», «charge», voire «frais» (mais pas «dépenses»), l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14 utilise la notion de «dépenses d’infrastructure» (20). Quand bien même il s’agirait d’un simple choix terminologique sans incidence majeure, cela montre en tout état de cause que la terminologie comptable retenue aux fins de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14 ne respecte pas rigoureusement la nomenclature unifiée.

55.      De plus, la notion de «paiements ex ante» (article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14), devenue, dans le cadre de la refonte, celle de «avances de l’État» (article 8, paragraphe 4, de la directive refondue), crée une incertitude quant à la portée de l’obligation incombant aux États membres en vertu de l’article 6, paragraphe 1, dès lors que l’équilibre du compte des profits et pertes ne dépend pas du moment du paiement de la somme en question. Le paiement d’une subvention étatique ex ante ou ex post n’affecte donc pas l’équilibre du compte des profits et pertes dans la mesure où l’aide en question doit être prise en compte au titre de l’année financière pour laquelle elle est octroyée indépendamment du moment de son versement (21). Pour cette raison, la lecture de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14, proposée par la République de Pologne, selon laquelle l’obligation d’équilibrer les comptes vise à protéger non pas l’équilibre comptable mais la liquidité du gestionnaire, n’apparaît pas dépourvue de tout fondement.

56.      Toutefois, en dépit de la valeur de ces arguments, je considère que l’obligation pesant sur l’État membre de «définir les conditions appropriées […] pour que les comptes du gestionnaire de l’infrastructure présentent au moins un équilibre» entre les recettes et les dépenses d’infrastructure doit être interprétée comme visant un équilibre comptable du compte de profits et pertes.

57.      Si une interprétation différente était retenue, la disposition en question n’aurait pas de champ d’application propre par rapport aux paragraphes 3 et 4 de l’article 7 de la directive 91/440 qui visent, d’une part, un financement étatique suffisant en rapport avec les tâches, la dimension et les besoins financiers du gestionnaire de l’infrastructure et, d’autre part, le devoir pour le gestionnaire de l’infrastructure d’établir un plan d’entreprise permettant d’atteindre l’équilibre financier dans le cadre de la politique générale arrêtée par l’État. Il apparaît ainsi que ces dernières dispositions ont pour objet de garantir la liquidité du gestionnaire de l’infrastructure, tandis que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14 vise, nonobstant ses imperfections rédactionnelles, l’équilibre comptable.

58.      Je relève, en outre, que les amortissements correspondent à la perte de valeur du stock du capital due à l’usure ou à l’obsolescence de l’infrastructure, telle qu’elle est inscrite au compte de profits et pertes sous la forme de coûts comptables annuels, en vue d’accroître le financement propre nécessaire aux investissements de remplacement à l’expiration de la période d’utilisation de l’infrastructure. Ainsi, selon l’article 35, paragraphe 1, sous b, de la directive 78/660, «[l]e prix d’acquisition ou le coût de revient des éléments de l’actif immobilisé dont l’utilisation est limitée dans le temps doit être diminué des corrections de valeur calculées de manière à amortir systématiquement la valeur de ces éléments pendant leur durée d’utilisation». L’inscription des amortissements des actifs constitue une obligation comptable sans laquelle les comptes annuels d’une société de capitaux telle que PLK SA ne sauraient donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière ainsi que des résultats de la société, conformément à l’article 2, paragraphe 3, de ladite directive.

59.      Il convient d’ajouter que la nécessité d’amortir la valeur des actifs ne dépend pas de la question de savoir si l’entreprise a l’intention de rénover un élément de l’actif immobilisé ou non. J’observe que le fait qu’une entreprise n’est pas en mesure de couvrir des amortissements à partir de ses actifs montre que ses activités n’ont pas de fondement viable et solide à long terme, puisqu’elle n’est pas capable de financer par ses propres recettes des investissements requis afin de remplacer ses actifs physiques existants à l’issue de leur période d’utilisation économique. Or, l’image fidèle d’une telle entreprise est celle d’une société en déséquilibre financier, même si elle n’a pas de problèmes de liquidité.

60.      Pour ces raisons, il convient de rejeter l’argumentation de la République de Pologne selon laquelle les comptes du gestionnaire de l’infrastructure seraient équilibrés en dépit du fait que le solde du compte de profits et pertes n’est pas au moins neutre, en raison de l’impact des amortissements. Un déséquilibre du compte de profits et pertes du gestionnaire de l’infrastructure n’est toutefois pas suffisant, à lui seul, pour conclure que l’État membre en question n’a pas rempli les obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14. En effet, pour parvenir à une telle conclusion, il conviendrait aussi d’établir, selon le libellé même de cette disposition, que le déséquilibre comptable se présente «dans des conditions normales d’activité» et «par rapport à une période raisonnable».

61.      La Commission fait valoir, à cet égard, que, si le gestionnaire de l’infrastructure accumule des pertes d’un niveau équivalent à celui indiqué par le gouvernement polonais dans sa réponse à la lettre de mise en demeure, il serait impossible d’atteindre l’équilibre financier visé par l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14. Selon la Commission, l’État membre en question n’aurait pas octroyé au gestionnaire de l’infrastructure un financement suffisant en rapport avec ses tâches, sa dimension et ses besoins financiers. Il convient de rappeler sur ce point qu’il découle de la réponse du gouvernement polonais à l’avis motivé que le gestionnaire enregistrera des pertes jusqu’en 2012.

62.      Selon les données figurant dans la requête, le déficit du gestionnaire est passé de 2 % en 2006 à 10 % (selon les prévisions) en 2009. Au cours de la même période, le financement par l’État a augmenté de 10,8 % à 19,3 % (selon les prévisions), alors que la couverture des coûts par les recettes tirées des redevances de l’accès à l’infrastructure a diminué parallèlement de 79,4 % en 2006 à 64,4 % en 2009 (selon les prévisions).

63.      La République de Pologne fait toutefois valoir qu’il est prévu que, en 2015, l’État couvrirait les dépenses liées à l’infrastructure à la hauteur de 37,5 %, ce qui entraînera, selon elle, une baisse sensible des taux de redevance pour les transporteurs ferroviaires.

64.      Dans son mémoire en duplique, la République de Pologne rappelle avoir présenté, dans sa réponse à l’avis motivé, le plan gouvernemental prévoyant l’augmentation du financement du gestionnaire de l’infrastructure, laquelle a pour objectif de parvenir à l’équilibre budgétaire en 2012. Par ailleurs, l’État membre en question envisage d’atteindre l’équilibre budgétaire également à l’étape de la planification des recettes et dépenses de PLK SA. Tout en indiquant que le résultat final dépendra de l’évolution, la République de Pologne précise que, en 2009, une chute des volumes de transport ferroviaire de marchandises de 17 % a été enregistrée par rapport à l’année précédente.

65.      À cet égard, j’observe que le libellé de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14 en vigueur ne comporte aucune précision aux fins de l’application du critère d’une «période raisonnable», laquelle, selon la refonte susmentionnée du premier paquet ferroviaire, ne saurait dépasser cinq ans. Il ressort du dossier que la République de Pologne a octroyé la première subvention de 340 millions de PLN à PLK SA en 2006, après que le gestionnaire eut entamé ses activités. La subvention étatique annuelle a été portée à 900 millions de PLN en 2010, pour atteindre 1 200 millions de PLN en 2012, année au cours de laquelle l’équilibre financier devrait être atteint. Enfin, au cours des années suivantes, ladite subvention doit augmenter de 100 millions de PLN chaque année.

66.      Selon les informations figurant dans le dossier, le réseau ferroviaire polonais est très dense, en mauvais état et, dans une large mesure, peu rentable. Ainsi que je l’ai relevé, la gestion indépendante de l’infrastructure ferroviaire n’a débuté que récemment, la première subvention étatique ayant été octroyée en 2006. Dans le même temps, malgré l’octroi répété de financements par l´État polonais au gestionnaire de l’infrastructure, les recettes de ce dernier ont diminué, en partie à cause de la crise économique majeure qu’affronte l’Union. La planification financière réalisée par l’État polonais prévoit néanmoins d’atteindre l’équilibre budgétaire en 2012.

67.      Compte tenu de ces éléments, et à la différence de la situation de la République portugaise ayant fait l’objet de mes conclusions dans l’affaire Commission/Portugal, précitée, il ne me paraît pas possible d’affirmer que la République de Pologne n’a pas défini les conditions appropriées pour que les comptes du gestionnaire de l’infrastructure, dans des conditions normales d’activité et par rapport à une période raisonnable, présentent au moins un équilibre entre les recettes et les dépenses d’infrastructure.

68.      Au vu de ces considérations, je propose à la Cour d’écarter le deuxième grief de la Commission.

C –    Sur le troisième grief, tiré de l’absence de mesures d’incitation du gestionnaire de l’infrastructure

1.      Argumentation des parties

69.      La Commission soutient que la République de Pologne, en ayant omis d’introduire, conformément à ce que prévoit l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 2001/14, un régime d’incitations propre à encourager le gestionnaire à diminuer les coûts et les redevances d’utilisation de l’infrastructure, a manqué aux obligations lui incombant en vertu de ces dispositions. La Commission fait valoir, en particulier, que l’article 38 bis de la loi sur le transport ferroviaire ne crée pas de régime d’incitations propre à encourager le gestionnaire à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès.

70.      À titre liminaire, la République de Pologne fait valoir que la directive 2001/14 prévoit l’obligation pour les États membres de prendre des mesures d’incitation en vue d’augmenter l’efficacité des gestionnaires, sans pour autant définir la nature desdites mesures. La République de Pologne fait néanmoins valoir que le ministre chargé des Transports décide chaque année conjointement avec PKP SA, contrôlée à 100 % par le Trésor public, d’attribuer des récompenses aux membres des conseils d’administration des sociétés dans le but d’augmenter l’efficacité du gestionnaire. La République de Pologne fait par ailleurs valoir que d’autres instruments de gouvernance d’entreprise sont utilisés à l’égard de PLK SA

71.      La République tchèque, quant à elle, soutient que l’exigence de mesures d’incitation à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès constitue l’objectif final de l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14, c’est‑à‑dire un état qui doit être atteint. Or, ainsi que le prévoirait explicitement cette disposition, il serait nécessaire de créer des conditions préalables à cet effet. Ainsi, l’État membre, lorsqu’il cherche à atteindre cet objectif, doit veiller à la sécurité, au maintien et à l’amélioration de la qualité du service de l’infrastructure.

72.      Selon la République tchèque, dans une situation où l’infrastructure est très mal entretenue, ces conditions ne sont pas réunies. Par conséquent, la conclusion d’un contrat entre l’État et le gestionnaire de l’infrastructure concernant le financement des coûts de réparation ou d’entretien de l’infrastructure est une mesure qui tend à atteindre l’objectif final fixé à l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14 et qui doit être considérée comme suffisante compte tenu des conditions concrètes de l’état de l’infrastructure.

73.      Dans sa réponse au mémoire en intervention de la République tchèque, la Commission soutient qu’une telle interprétation de l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14 est erronée. Selon elle, cette disposition ne fait pas dépendre l’obligation de prendre des mesures d’incitation de l’état de l’infrastructure ferroviaire. En effet, une telle obligation incombant à l’État membre existerait par elle‑même. Ainsi, la conclusion d’un accord entre l’État et le gestionnaire de l’infrastructure à propos du financement des frais de réparation et d’entretien de l’infrastructure qui ne comporterait pas de mesures incitant le gestionnaire à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès ne satisferait pas à l’obligation prévue par ladite disposition.

2.      Examen du troisième grief

74.      Je rappelle, tout d’abord, que le troisième grief de la Commission tiré de l’absence de mesures incitant le gestionnaire de l’infrastructure à limiter les coûts liés au service d’infrastructure ou le niveau des redevances d’accès est, en substance, identique au troisième grief dans l’affaire Commission/Allemagne, précitée (22). Pour cette raison, je renvoie au raisonnement juridique suivi dans lesdites conclusions.

75.      S’agissant de la réglementation polonaise et de sa mise en œuvre, il existe néanmoins des différences importantes par rapport à la situation qui prévaut en Allemagne. Par conséquent, ma conclusion selon laquelle il convient d’écarter le grief invoqué à l’encontre de la République fédérale d’Allemagne n’est pas automatiquement transposable au cas de la République de Pologne.

76.      Selon l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14, le gestionnaire de l’infrastructure est, tout en respectant les exigences en matière de sécurité et en maintenant et en améliorant la qualité de service de l’infrastructure, encouragé par des mesures d’incitation à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès. Contrairement à ce qui s’applique dans le cas de l’amélioration des performances du réseau ferroviaire conformément à l’article 11 de ladite directive, l’article 6, paragraphe 2, de celle‑ci n’exige pas que les mesures d’incitation forment un «système».

77.      Cependant, l’article 6, paragraphe 3, de la directive 2001/14 prévoit deux possibilités distinctes de mise en œuvre de l’obligation énoncée au paragraphe 2 dudit article. Il doit s’agir soit d’un accord pluriannuel conclu entre le gestionnaire de l’infrastructure et l’autorité compétente et prévoyant le financement par l’État, soit de l’établissement de mesures réglementaires appropriées, prévoyant les compétences nécessaires.

78.      Je constate, dans un premier temps, que l’article 38 bis, paragraphes 1 et 2, de la loi sur le transport ferroviaire paraît prévoir un cadre législatif adéquat pour la mise en œuvre des obligations découlant de l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 2001/14. En effet, lesdites dispositions définissent l’autorité compétente (à savoir le ministre chargé des Transports), l’outil disponible (à savoir le financement étatique), l’objectif (à savoir la réduction des frais et du montant des redevances d’utilisation) et la forme des mesures en cause (à savoir un contrat pluriannuel).

79.      Toutefois, les dispositions législatives susmentionnées ne me semblent pas suffisantes, à elles seules, pour transposer les obligations prévues à l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 2001/14. En effet, le mécanisme incitatif définissant le lien causal entre les objectifs économiques à atteindre par le gestionnaire de l’infrastructure et les mesures prises par le ministre chargé des Transports en matière de financement des frais de rénovation et d’entretien de l’infrastructure ferroviaire n’y est pas défini.

80.      De plus, il convient de préciser que lesdites dispositions nationales n’établissent pas non plus de mesures réglementaires appropriées, prévoyant les pouvoirs nécessaires afin que le gestionnaire de l’infrastructure rende compte de sa gestion à une autorité compétente, telle que le président de l’OFT, conformément à l’article 6, paragraphe 3, de la directive 2001/14. Or, il ne me semble pas contesté que le législateur polonais a opté, dans ce cadre, en faveur de la conclusion d’un contrat pluriannuel.

81.      La République de Pologne mentionne dans ses écritures plusieurs exemples de mesures qu’elle considère comme incitatives, à l’égard des membres du conseil d’administration et des directeurs du gestionnaire de l’infrastructure, afin d’augmenter l’efficacité de ce dernier. La République de Pologne mentionne aussi des instruments de gouvernance d’entreprise et de financement du gestionnaire de l’infrastructure.

82.      Néanmoins, il me semble acquis que la République de Pologne ne soutient pas que les mesures qu’elle décrit dans son mémoire en défense et dans sa duplique, à supposer même qu’elles puissent être considérées comme des mesures d’incitation, sont incluses dans un contrat pluriannuel de financement au sens de l’article 6, paragraphe 3, de la directive 2001/14. À cet égard, il convient d’opérer un rapprochement avec la convention de prestation et de financement (la «Leistungs- und Finanzierungsvereinbarung»), conclue entre la République fédérale d’Allemagne et DB Netz, laquelle définit un ensemble de mesures qui me semblent remplir les exigences visées aux paragraphes 2 et 3 de l’article 6 de la directive 2001/14 (23).

83.      Enfin, s’agissant des arguments de la République tchèque, il suffit de constater que les obligations des États membres prévues à l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 2001/14 ne dépendent pas de l’état de l’infrastructure. Cela étant, il va de soi que le choix des mesures d’incitation à adopter, et plus particulièrement les objectifs concrets poursuivis par l’État membre au travers de ces mesures, sont tributaires des exigences en matière de sécurité et du niveau de la qualité de service de l’infrastructure. Ainsi, dans l’application de l’article 6, paragraphes 2 et 3, de ladite directive, les États membres sont tenus de prendre en compte l’état de l’infrastructure, ce qui ne les exonère nullement de l’obligation soit de conclure des contrats pluriannuels du financement incluant des mesures d’incitation, soit d’établir un cadre réglementaire à cet effet.

84.      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je conclus qu’il y a lieu d’accueillir le troisième grief de la Commission.

D –    Sur le quatrième grief, tiré du calcul de la redevance pour l’accès minimal

1.      Argumentation des parties

85.      La Commission soutient que la République de Pologne n’a pas satisfait aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14. Elle soutient que la notion de «coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire» au sens de l’article 7, paragraphe 3, de ladite directive renvoie à celle du «coût marginal». Cette dernière correspond uniquement, de l’avis de la Commission, aux coûts engendrés par les mouvements effectifs de trains, et non aux coûts fixes qui couvrent, outre les coûts liés à l’exploitation ferroviaire, les frais généraux du fonctionnement de l’infrastructure devant être supportés même en l’absence de mouvements de trains.

86.      En outre, la Commission fait valoir que la République de Pologne a reconnu, dans sa réponse à l’avis motivé, que le niveau des taux unitaires de la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure dépendait des travaux prévus en matière d’exploitation, du coût prévu pour la fourniture de l’infrastructure ferroviaire dans le cadre de l’accès minimal et du financement prévu des réparations et de l’entretien de l’infrastructure ferroviaire. Or, de l’avis de la Commission, ces facteurs ne sont pas directement liés aux coûts directs résultant de l’exploitation, mais visent à récupérer l’ensemble des frais exposés par le gestionnaire.

87.      En ce qui concerne les possibilités de majoration des redevances sur la base de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14, la Commission fait valoir que les États membres sont tenus, ainsi qu’il ressortirait de la lecture combinée des premier et deuxième alinéas de cette disposition, de mettre en place un mécanisme de contrôle englobant tous les segments du marché des transporteurs ferroviaires et leurs capacités de paiement. Selon la Commission, la directive 2001/14 laisse aux États membres le soin de mettre en place un mécanisme identifiant la «résistance du marché» et de surveiller que l’on n’exclue pas certains secteurs du marché qui, jusqu’à présent, pouvaient s’acquitter de la redevance pour l’accès minimal à l’infrastructure. Or, la loi sur le transport ferroviaire n’établirait pas de mécanismes permettant de vérifier que tous les segments du marché appelés à couvrir les coûts directs ont la capacité de supporter une majoration des redevances destinée à récupérer les frais exposés par le gestionnaire de l’infrastructure (à savoir les coûts autres que directs).

88.      S’agissant, en premier lieu, du grief tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, la République de Pologne fait valoir que la loi sur le transport ferroviaire a été modifiée au cours de la procédure précontentieuse, conformément aux exigences de la Commission. En particulier, l’article 33 de la loi sur le transport ferroviaire disposerait que la redevance de base pour l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire est fixée en tenant compte du coût que le gestionnaire supporte directement à la suite des déplacements des trains réalisés par le transporteur ferroviaire.

89.      La République de Pologne conteste par ailleurs le grief de la Commission selon lequel, en vertu de la législation polonaise, les coûts directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire correspondraient aux coûts globaux d’entretien et aux coûts globaux d’exploitation. En réponse à l’allégation de la Commission selon laquelle la notion de «coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire» renvoie à celle de «coût marginal», la République de Pologne soutient que celle‑ci est dénuée de fondement. Cet État membre observe à cet égard que, dès lors que la directive 2001/14 ne donne pas de définition du «coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire», les États membres disposent d’une certaine liberté pour définir, dans le respect des objectifs de cette directive, les éléments constitutifs et en déduire le montant de la redevance d’accès.

90.      S’agissant, en second lieu, du grief tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14, la République de Pologne soutient que la Commission n’a pas expliqué sur quelle base, au regard des dispositions en vigueur en Pologne, elle a constaté que les coûts pris en compte pour calculer la redevance pour l’accès minimal étaient majorés du taux de rentabilité visé à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14.

91.      Pour sa part, la République tchèque, fait valoir, en ce qui concerne le grief de la Commission tiré d’une mauvaise transposition de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, qu’il ne ressort aucunement de cette disposition que seuls les coûts marginaux pourraient être qualifiés de «coût[s] directement imputable[s] à l’exploitation du service ferroviaire». Selon cet État membre, tant que ni la directive 2001/14, ni aucune autre disposition du droit de l’Union n’énumère les coûts correspondant à cette notion, le critère déterminant serait uniquement la question de savoir si l’on peut démontrer, pour de tels coûts, un rapport direct avec l’exploitation du service ferroviaire.

2.      Examen du quatrième grief

92.      Je relève d’abord que j’ai déjà eu l’occasion de me prononcer sur l’interprétation de l’expression «coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire» dans mes conclusions rendues dans l’affaire Commission/République tchèque (24). Par conséquent, dans le cadre de la réponse au présent grief de la Commission, je me bornerai à faire référence auxdites conclusions sans toutefois reprendre l’intégralité de l’argumentation y figurant.

93.      S’agissant de l’interprétation de la notion de «coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire», j’ai proposé à la Cour de considérer que, eu égard, d’une part, à l’imprécision de la directive 2001/14 et, d’autre part, à l’absence de définition précise de ladite notion ainsi que d’une disposition de droit de l’Union énumérant précisément les coûts ne relevant pas de ladite notion, les États membres jouissent d’une certaine marge d’appréciation économique aux fins de la transposition et de l’application de la notion en cause. Compte tenu de la nature extrêmement technique de cette problématique et des différentes études d’experts visant à établir une définition ainsi qu’une méthodologie communes au sein de l’Union, la Cour n’est pas en mesure de donner des précisions utiles à cet égard. En particulier, il me paraît vain d’essayer de préciser le sens juridique de cette notion du droit de l’Union, alors qu’il s’agit d’une notion de sciences économiques dont l’application soulève des difficultés pratiques considérables.

94.      Pour autant, même s’il ne me paraît pas possible de définir, par une énumération limitative, ce que vise ou non la notion de «coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire», il n’en demeure pas moins que les définitions utilisées à cet égard par les États membres peuvent, dans certains cas, inclure des coûts qui outrepassent manifestement les limites de la notion utilisée par la directive 2001/14. Dans le cadre d’une procédure en manquement, il convient donc de rechercher si la réglementation de l’État membre incriminé permet d’inclure dans le calcul des redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures ferroviaires des éléments qui ne sont manifestement pas directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire.

95.      En ce qui concerne donc la transposition de l’exigence visée à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, d’un montant de la redevance limité au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, la législation polonaise me semble inclure tous les éléments nécessaires pour que le gestionnaire de l’infrastructure et l’autorité de contrôle puissent fixer les redevances conformément à ladite exigence.

96.      Je rappelle, à cet égard, que, aux termes de l’article 33 de la loi sur le transport ferroviaire, la redevance de base pour l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire est fixée en prenant en considération le coût, supporté par le gestionnaire, directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire (paragraphe 2); la redevance d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire se compose de la redevance de base et des redevances complémentaires (paragraphe 3); dans le cadre de la redevance de base, le gestionnaire applique une redevance distincte pour l’accès minimal à l’infrastructure ferroviaire (25) (paragraphe 3 bis, point 1); la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure ferroviaire est déterminée comme étant le produit des mouvements de trains et des taux unitaires fixés selon la catégorie de la ligne ferroviaire et le type de train, et cela séparément pour le transport de passagers et de marchandises; le gestionnaire peut appliquer un taux unitaire minimal de redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure ferroviaire. Le taux minimal s’applique selon les modalités équivalentes à tous les transporteurs ferroviaires de passagers pour l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire liée aux activités exécutées conformément au contrat de service public (paragraphe 4 bis) (26); la redevance de base d’accès aux équipements liés à l’entretien des trains est calculée comme étant le produit des services commandés et des taux unitaires correspondants, dont le montant varie en fonction du type de services visés dans la partie I, paragraphe 2, de l’annexe de la loi sur le transport ferroviaire (paragraphe 4 quater) et le taux unitaire de la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure ferroviaire est fixé par train, pour un kilomètre de déplacement (paragraphe 5).

97.      Les règles législatives sont concrétisées par les dispositions plus détaillées figurant dans le règlement du ministre de l’Infrastructure relatif aux conditions d’accès (ci‑après «règlement du ministre») (27). Les dispositions prévues aux articles 6 et 7 dudit règlement définissent les modalités du calcul de la redevance de base visée à l’article 33, paragraphe 4, de la loi sur le transport ferroviaire et des taux unitaires de la redevance de base.

98.      De surcroît, selon l’article 8, paragraphe 1, points 1 à 4, du règlement du ministre, le gestionnaire de l’infrastructure tient compte, pour calculer les taux de mise à disposition de l’infrastructure ferroviaire, des coûts directs qui couvrent les coûts d’entretien, les coûts de gestion du trafic ferroviaire et l’amortissement. De plus, le gestionnaire tient aussi compte des coûts indirects de l’activité couvrant les frais raisonnables du gestionnaire de l’infrastructure autres que les coûts susmentionnés, des coûts financiers liés au remboursement des prêts que le gestionnaire a contractés pour développer et moderniser l’infrastructure mise à disposition et du travail d’exploitation défini pour les différentes catégories de lignes et trains. Selon l’article 10 dudit règlement, «le taux minimal visé à l’article 33, paragraphe 4 bis, de la loi [sur le transport ferroviaire] ne peut être inférieur à 75 % du taux fixé pour une catégorie de ligne ferroviaire déterminée et de l’ensemble de la masse brute du train».

99.      Ainsi que je l’ai relevé dans mes conclusions dans l’affaire Commission/République tchèque, précitée, l’approche de la Commission se caractérise par une interprétation trop restrictive de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14. En effet, les coûts liés à la signalisation, à la gestion du trafic, à la maintenance et aux réparations peuvent varier, au moins partiellement, en fonction du trafic et, par conséquent, être considérés comme directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire.

100. La réglementation polonaise de rang infralégislatif me semble, cependant, nécessairement conduire, aux fins de la détermination de la redevance perçue pour l’ensemble des prestations minimales et pour l’accès par le réseau aux infrastructures, à la prise en compte de coûts qui ne sauraient manifestement être considérés comme étant directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire.

101. Ainsi, les coûts d’entretien ou de gestion du trafic mentionnés à l’article 8 du règlement du ministre ne peuvent être considérés que partiellement comme directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire, parce qu’ils incluent des coûts de nature fixe que le gestionnaire doit supporter après la mise à la disposition au trafic d’un tronçon du réseau ferroviaire, même en l’absence de mouvements des trains. S’agissant des coûts financiers, également visés par ladite disposition, un tel rapport me semble totalement faire défaut. Il convient d’ajouter que le règlement du ministre permet d’inclure des amortissements dans le calcul de redevances d’accès, mais le gouvernement polonais a, dans le cadre du deuxième grief, affirmé que tel n’était pas le cas en pratique (28).

102. Ainsi, au vu de tout ce qui précède, je conclus qu’une infraction à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, par la République de Pologne peut être retenue.

103. En revanche, les griefs de la Commission tirés de la violation de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 ne sauraient être accueillis. En effet, l’État membre en cause conteste avoir fait usage de la possibilité ouverte par ladite disposition, laquelle permet de percevoir des majorations aux redevances d’accès. Or, je considère que la Commission n’est pas parvenue à réfuter cette allégation.

104. De surcroît, la directive 2001/14 n’impose pas aux États membres d’établir, par la voie législative ou réglementaire, une méthode spécifique afin de mesurer la «résistance du marché». Il est vrai que les États membres doivent adopter un cadre réglementaire approprié pour que le gestionnaire de l’infrastructure puisse, dans le cadre de l’autonomie de gestion, apprécier «s’il le marchée [se] prête» à une majoration des redevances en application de l’article 8, paragraphe 1, de ladite directive. Toutefois, comme je l’ai relevé dans mes conclusions dans l’affaire Commission/Allemagne, la même directive accorde au gestionnaire de l’infrastructure, en matière de tarification, un rôle qui implique des choix exigeant une marge d’appréciation notamment quant à la méthodologie à appliquer (29).

105.  Pour ces raisons, je considère que le quatrième grief de la Commission doit être accueilli dans la mesure où la République de Pologne a permis d’inclure dans le calcul des redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures des services des coûts qui ne peuvent pas être considérés comme les coûts directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire au sens de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14. Partant, je propose à la Cour d’écarter pour le surplus le quatrième grief de la Commission.

V –    Sur les dépens

106. En vertu de l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure de la Cour (30), si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. La Commission et la République de Pologne ayant chacune succombé sur plusieurs chefs, je propose que chaque partie supporte ses propres dépens.

107. Conformément à l’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure, la République tchèque et la République italienne, qui ont été admises à intervenir au présent litige, supporteront leurs propres dépens.

VI – Conclusion

108. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de statuer comme suit:

1)      La République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent

–        en vertu de l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001, concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire, telle que modifiée par la directive 2004/49/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, en n’ayant pas adopté des mesures encourageant les gestionnaires des infrastructures ferroviaires à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès, et

–        en vertu de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, telle que modifiée par la directive 2004/49, en permettant d’inclure au calcul des redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures des coûts qui ne peuvent pas être considérés comme les coûts directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission européenne, la République de Pologne, la République tchèque et la République italienne supportent leurs propres dépens.


1 – Langue originale: le français.


2 – Directive du Conseil du 29 juillet 1991 relative au développement de chemins de fer communautaires (JO L 237, p. 25).


3 – Directive du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 modifiant la directive 91/440/CEE du Conseil relative au développement de chemins de fer communautaires et la directive 2001/14/CE concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire (JO L 315, p. 44).


4 – Directive du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2001 concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité (JO L 75, p. 29), telle que modifiée Il y a lieu de noter que le titre de la directive 2001/14 a été modifié par l’article 30 de la directive 2004/49/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004 (JO L 164, p. 44). Elle s’intitule depuis lors «directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001, concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire».


5 – Il s’agit des arrêts du 25 octobre 2012, Commission/Portugal (C‑557/10), et du 8 novembre 2012, Commission/Grèce (C‑528/10), ainsi que des affaires Commission/Hongrie (C‑473/10); Commission/Espagne (C‑483/10); Commission/République tchèque (C‑545/10); Commission/Autriche (C‑555/10); Commission/Allemagne (C‑556/10); Commission/France (C‑625/10); Commission/Slovénie (C‑627/10); Commission/Italie (C‑369/11), et Commission/Luxembourg (C‑412/11), pendantes devant la Cour.


6 – Dz. U. de 2000, n° 84, position 948.


7 –      Dz. U. de 2007, n° 16, position 94.


8 – Dz. U de 2007, n° 16, position 94.


9 – Dz. U. de 2003, n° 153, position 1503.


10 – Dz. U. de 1998, n° 21, position 94.


11 – Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur la mise en œuvre du premier paquet ferroviaire [COM(2006) 189 final].


12 – Voir, en particulier, points 71 à 91 des conclusions dans l’affaire Commission/Autriche, précitée.


13 – Voir mes conclusions dans l’affaire Commission/Autriche, précitée (point 89).


14 – Précité (points 43 à 50 de l’arrêt).


15 – Voir mes conclusions dans ladite affaire (point 41).


16 – Voir proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant un espace ferroviaire unique européen [COM(2010) 475 final].


17 – Voir position du Parlement européen arrêtée en deuxième lecture le 3 juillet 2012 en vue de l’adoption de la directive 2012/.../UE du Parlement européen et du Conseil établissant un espace ferroviaire unique européen (refonte) (A7‑0196/2012), article 8 («Financement du gestionnaire de l’infrastructure») et annexe X (tableau de correspondance).


18 – Selon le considérant 14 de la refonte (document A7‑0196/2012), «[l]e compte de profits et pertes d’un gestionnaire de l’infrastructure devrait être en équilibre sur une période raisonnable qui, une fois définie, pourrait être dépassée dans des circonstances exceptionnelles telles qu’une détérioration majeure et soudaine de la situation économique d’un État membre affectant de manière importante le niveau du trafic sur son infrastructure ou le niveau de financement public disponible. Conformément aux règles comptables internationales, le montant des emprunts servant au financement des projets d’infrastructure n’apparaît pas dans le compte de profits et pertes». En revanche, les considérants de la directive 2001/14 ne précisent pas l’objectif poursuivi par le législateur à l’article 6, paragraphe 1, de cette directive.


19 – Voir quatrième directive du Conseil du 25 juillet 1978 fondée sur l’article 54, paragraphe 3, sous g), du traité et concernant les comptes annuels de certaines formes de sociétés (JO L 222, p. 11).


20 – Partant, il convient de noter que l’article 6 est intitulé «Coûts de l’infrastructure et comptabilité» et que l’article 6, paragraphe 1, deuxième alinéa, vise également les «coûts d’infrastructure». Ces remarques valent aussi, mutatis mutandis, pour la version en langue anglaise de l’article 6.


21 – Voir article 18 de la directive 78/660 sur les comptes de régularisation du bilan, s’agissant de l’affectation des charges ou produits concernant un exercice ultérieur.


22 – Voir, en particulier, points 93 à 104 de mes conclusions dans cette affaire.


23 – Voir, en ce sens, les points 90, 91, 97 et 98 de mes conclusions dans l’affaire Commission/Allemagne, précitée.


24 – Précitée (points 60 à 84).


25 – Ces services sont énumérés dans la partie I, paragraphe 1, de l’annexe de la loi sur le transport ferroviaire en des termes quasi identiques à ceux du point 1 de l’annexe II de la directive 2001/14.


26 – L’interprétation a contrario de l’article 33, paragraphe 4 bis, de la loi sur le transport ferroviaire, proposée par la Commission et contestée par l’État membre, selon laquelle le taux unitaire minimal de redevance ne s’applique qu’aux transporteurs et aux activités sur la base d’autres contrats que ceux de transport de passagers du service public, n’est pas la seule possible. Le libellé de la disposition peut aussi être interprété en ce sens que l’application du taux unitaire minimal est obligatoire pour le gestionnaire de l’infrastructure dans le cas des contrats de transport de passagers du service public, tout en constituant une simple faculté dans les autres cas.


27 – Règlement du ministre de l’Infrastructure relatif aux conditions d’accès et de l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire (Rozporządzenie Ministra Infrastruktury z dnia 27 lutego 2009 r. w sprawie warunków dostępu i korzystania z infrastruktury kolejowej), du 27 février 2009 (Dz. U. de 2009, n° 35, position 274).


28 – Quand bien même ils correspondent approximativement à l’usure physique et économique des actifs, les amortissements ne varient pas en fonction de l’exploitation réelle de l’infrastructure. En réalité, les amortissements sont déterminés non pas sur la base de l’usure réelle de l’infrastructure imputable au trafic, mais en fonction de règles comptables, de sorte qu’ils ne sont pas en soi directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire.


29 – Précitée (point 81).


30 – Il s’agit ici de l’acte entré en vigueur le 1er novembre 2012.