Language of document : ECLI:EU:C:2009:465

Affaire C-5/08

Infopaq International A/S

contre

Danske Dagblades Forening

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Højesteret)

«Droits d'auteur — Société de l'information — Directive 2001/29/CE — Articles 2 et 5 — Œuvres littéraires et artistiques — Notion de 'reproduction' — Reproduction 'en partie' — Reproduction de courts extraits d'oeuvres littéraires — Articles de presse — Reproductions provisoires et transitoires — Procédé technique consistant en une numérisation par balayage des articles suivie d'une conversion en fichier texte, d'un traitement électronique de la reproduction, de la mise en mémoire d'une partie de cette reproduction et de son impression»

Sommaire de l'arrêt

1.        Rapprochement des législations — Droit d'auteur et droits voisins — Directive 2001/29 — Harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information — Droit de reproduction — Reproduction partielle — Notion

(Directive du Parlement européen et du Conseil 2001/29, art. 2, a))

2.        Rapprochement des législations — Droit d'auteur et droits voisins — Directive 2001/29 — Harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information — Droit de reproduction — Exceptions et limitations — Conditions — Caractère transitoire de l’acte de reproduction

(Directive du Parlement européen et du Conseil 2001/29, art. 5, § 1)

1.        Un acte effectué au cours d’un procédé d’acquisition de données, qui consiste à mettre en mémoire informatique un extrait d’une oeuvre protégée composé de onze mots ainsi qu’à imprimer cet extrait, est susceptible de relever de la notion de reproduction partielle au sens de l’article 2 de la directive 2001/29 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information si - ce qu’il appartient à la juridiction nationale de vérifier - les éléments ainsi repris sont l’expression de la création intellectuelle propre à leur auteur.

En effet, le droit d’auteur au sens de l’article 2, sous a), de la directive 2001/29 n’est susceptible de s’appliquer que par rapport à un objet qui est original en ce sens qu’il est une création intellectuelle propre à son auteur. En ce qui concerne les parties d’une oeuvre, elles sont protégées par le droit d’auteur dès lors qu’elles participent, comme telles, à l’originalité de l’oeuvre entière. Les différentes parties d’une oeuvre bénéficient ainsi d’une protection au titre de ladite disposition à condition qu’elles contiennent certains des éléments qui sont l’expression de la création intellectuelle propre à l’auteur de cette oeuvre. Compte tenu de l’exigence d’une interprétation large de la portée de la protection conférée par l’article 2 de ladite directive, il ne saurait être exclu que certaines phrases isolées, ou même certains membres de phrases du texte concerné, soient aptes à transmettre au lecteur l’originalité d’une publication telle qu’un article de presse, en lui communiquant un élément qui est, en soi, l’expression de la création intellectuelle propre à l’auteur de cet article. De telles phrases ou de tels membres de phrase sont donc susceptibles de faire l’objet de la protection prévue à l’article 2, sous a), de la directive.

(cf. points 37-39, 47-48, 51, disp. 1)

2.        L’acte d’impression d’un extrait composé de onze mots, qui est effectué au cours d’un procédé d’acquisition de données consistant en une numérisation par balayage des articles de presse suivie d’une conversion en fichier texte, d’un traitement électronique de la reproduction, de la mise en mémoire d’une partie de cette reproduction et de son impression, ne remplit pas la condition relative au caractère transitoire énoncée à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2001/29 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, et, partant, ce procédé ne peut être réalisé sans le consentement des titulaires des droits d’auteur concernés.

En effet, un acte ne peut être qualifié de «transitoire», au sens de la deuxième condition énoncée à ladite disposition, que si sa durée de vie est limitée à ce qui est nécessaire pour le bon fonctionnement du procédé technique concerné, étant entendu que ce procédé doit être automatisé de sorte qu’il supprime cet acte d’une manière automatique, sans intervention humaine, dès que sa fonction visant à permettre la réalisation d’un tel procédé est achevée. Cependant, par le dernier acte de reproduction du procédé d’acquisition de données en cause, une reproduction en dehors de la sphère informatique est réalisée, en procédant à une impression des fichiers contenant les extraits composés de onze mots et en reproduisant ainsi ces extraits sur un support en papier. Or, dès lors qu’elle est fixée sur un tel support matériel, cette reproduction ne disparaît que lors de la destruction de ce support. Par ailleurs, comme le procédé d’acquisition de données n’est pas, à l’évidence, susceptible de détruire lui-même un tel support, la suppression de ladite reproduction dépend de la seule volonté de l’utilisateur d’un tel procédé, dont il n’est nullement certain qu’il veuille s’en défaire, ce qui a pour conséquence que ladite reproduction risque de subsister pendant une période prolongée en fonction des besoins de l’utilisateur. Dans ces conditions, ledit dernier acte du procédé d’acquisition de données, au cours duquel les extraits composés de onze mots sont imprimés, ne constitue pas un acte transitoire au sens de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2001/29.

(cf. points 64, 67-70, 74, disp. 2)