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Demande de décision préjudicielle présentée par la Székesfehérvári Törvényszék (cour de Székesfehérvár, Hongrie) le 5 juin 2018 – Hochtief AG/Fővárosi Törvényszék

(Affaire C-362/18)

Langue de procédure : le hongrois

Juridiction de renvoi

Székesfehérvári Törvényszék

Parties dans la procédure au principal

Partie requérante : Hochtief AG

Partie défenderesse : Fővárosi Törvényszék

Questions préjudicielles

Faut-il interpréter les principes fondamentaux et règles du droit de l’Union (notamment l’article 4, paragraphe 3, TUE, et l’exigence d’une interprétation uniforme du droit), tels que la Cour les a interprétés notamment dans l’arrêt rendu dans l’affaire Köbler, en ce sens que la responsabilité de l’État en raison d’une décision contraire au droit de l’Union d’une juridiction statuant en dernier ressort peut être établie en se fondant uniquement sur le droit national ou sur des critères développés par le droit national ? Dans la négative, faut-il interpréter les principes fondamentaux et règles du droit de l’Union, notamment les trois critères dégagés par la Cour dans l’affaire Köbler à propos de la responsabilité de l’« État », en ce sens que la réalisation des conditions de la responsabilité de l’État membre en raison d’une violation du droit de l’Union par les juridictions dudit État membre doit être appréciée sur la base du droit national ?

Faut-il interpréter les règles et principes fondamentaux du droit de l’Union (notamment l’article 4, paragraphe 3, TUE, et l’exigence d’un recours effectif), en particulier les arrêts de la Cour relatifs à la responsabilité des États membres rendus, entre autres, dans les affaires Francovich, Brasserie du pêcheur et Köbler, en ce sens que l’autorité de la chose jugée de décisions contraires au droit de l’Union rendues par des juridictions statuant en dernier ressort exclut que la responsabilité de l’État membre puisse être établie ?

Faut-il interpréter les principes d’« effectivité » et d’équivalence prévus dans les directives 89/665/CEE 1 , 92/13/CEE 2 et 2007/66/CE 3 , ainsi que dans les arrêts Kühne & Heitz, Kapferer, Impresa Pizzarotti et Transportes Urbanos, en ce sens qu’une partie ne doit plus pouvoir se prévaloir, au stade de la procédure de révision, des constatations d’un arrêt de la Cour rendu à l’issue d’une procédure préjudicielle engagée dans la procédure principale par une juridiction de second degré, étant précisé que celles-ci n’ont pas été prises en compte dans la procédure principale, notamment dans le cas où la juridiction nationale statuant en dernier ressort a rejeté le pourvoi en cassation formé contre l’arrêt rendu dans la procédure principale au motif que la partie ne s’est pas prévalue en temps utile de l’arrêt de la Cour ?

Faut-il interpréter les directives visées à la question 3, ainsi que la jurisprudence de la Cour sur la question de l’ouverture de la révision, résultant notamment des arrêts Impresa Pizzarotti (C-213/13), Kapferer (C-234/04), Kühne & Heitz (C 453/00) et Transportes Urbanos y Servicios Generales (C-118/08), ainsi, également, que les principes dégagés par la Cour dans les affaires C-470/99, C-327/00 et C-241/06 à propos des délais du droit national appliqués dans des procédures de recours en matière de marchés publics, en ce sens que les juridictions nationales peuvent légalement opposer la forclusion à la partie qui, en seconde instance, se prévaut, d’une part, d’un arrêt de la Cour que la juridiction de seconde instance a obtenu dans le cadre de l’affaire pendante devant elle et, d’autre part, d’un arrêt de la Cour qui n’a été disponible dans la langue officielle de l’État membre qu’en seconde instance, puis rejeter, malgré cela, la demande de révision introduite par ladite partie sur la base des arrêts de la Cour invoqués par celle-ci, mais non pris en compte, et des faits qui sont pertinents en vertu desdits arrêts ?

Faut-il interpréter les directives susmentionnées, ainsi que la jurisprudence de la Cour résultant notamment des arrêts Impresa Pizzarotti (C-213/13), Kapferer (C-234/04), Kühne & Heitz (C-453/00) et Transportes Urbanos y Servicios Generales (C-118/08), en ce sens que les juridictions nationales peuvent légalement, alors même que la partie au litige cite l’arrêt [Kempter, C-2/06] – en vertu duquel une partie n’a pas l’obligation d’invoquer explicitement les arrêts de la Cour, la juridiction étant tenue de les appliquer d’office – ne pas tenir compte desdits arrêts en se prévalant du droit procédural national – au point de ne même pas mentionner cette circonstance dans la décision clôturant la procédure, pas plus que dans ses motifs – puis rejeter, malgré cela, la demande de révision introduite par ladite partie sur la base des arrêts de la Cour invoqués par celle-ci, mais non pris en compte, et des faits qui sont pertinents en vertu desdits arrêts ?

Faut-il interpréter la condition d’une « violation suffisamment caractérisée », dégagée dans les arrêts Köbler et Traghetti, comme n’étant pas remplie lorsque la juridiction statuant en dernier ressort passe entièrement sous silence une jurisprudence de la Cour bien établie et très précisément décrite – et que différents avis juridiques ont par ailleurs confortée – et, en contradiction manifeste avec celle-ci, rejette sans aucune motivation au regard du droit de l’Union une demande de révision sans, visiblement, n’avoir examiné ni même évoqué la nécessité d’un renvoi préjudiciel devant la Cour, alors même que cette nécessité a également été démontrée dans le moindre détail dans la jurisprudence pertinente de la Cour ? Compte tenu de l’arrêt rendu par la Cour dans l’affaire Cilfit e.a. (283/81), la juridiction nationale doit-elle fournir une motivation lorsqu’elle n’autorise pas la révision en s’écartant d’une interprétation de la Cour dotée d’un caractère contraignant et s’abstient, sans donner de motivation, de saisir la Cour d’une question préjudicielle à ce propos ?

Faut-il interpréter les principes de recours effectif et d’équivalence, au sens des articles 19 et 4, paragraphe 3, TUE, ainsi que la liberté d’établissement et de prestation de services consacrée à l’article 49 TFUE, ou encore la directive 93/37/CEE du Conseil portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, ainsi que les directives 89/665/CE, 92/13/CE et 2007/66/CE, en ce sens que ceux-ci permettent que les autorités et juridictions saisies rejettent systématiquement, au mépris manifeste du droit de l’Union applicable, les recours exercés par le requérant pour avoir été exclu de la procédure de marché public, étant précisé que ces recours exigent le cas échéant de rédiger de nombreux mémoires au prix d’un investissement important de temps et d’argent, sans oublier la participation à des audiences, et que, même s’il existe en théorie la possibilité d’établir la responsabilité en raison d’un dommage causé dans l’exercice d’une compétence juridictionnelle, la réglementation en cause empêche le requérant de pouvoir exiger de la juridiction réparation du préjudice qu’il a subi en raison des mesures illégales ?

Faut-il interpréter les principes qui ont été dégagés dans les arrêts Köbler, Traghetti et San Giorgio en ce sens que le dommage causé par le fait qu’une juridiction statuant en dernier ressort n’a, en contradiction avec la jurisprudence constante de la Cour, pas autorisé la révision demandée en temps utile par une partie et dans le cadre de laquelle ladite partie aurait pu exiger le remboursement des frais qui lui ont été occasionnés, n’est pas un dommage susceptible d’être indemnisé ?

Dès lors que le droit national commande d’autoriser la révision lorsque celle-ci est nécessaire pour rétablir la constitutionnalité en raison d’une nouvelle décision de la juridiction constitutionnelle, ne doit-il pas alors, en vertu du principe d’équivalence et de la jurisprudence « Transportes Urbanos y Servicios Generales », autoriser la révision dans les cas où un arrêt de la Cour rendu antérieurement dans une autre affaire, ainsi qu’un arrêt de la Cour obtenu dans l’affaire principale, de même que les faits qui sont pertinents en vertu desdits arrêts, ne sont pas pris en compte dans la procédure principale en raison des dispositions du droit national relatives aux délais de procédure ?

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1     Directive 89/665/CEE du Conseil, du 21 décembre 1989, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à l'application des procédures de recours en matière de passation des marchés publics de fournitures et de travaux ; JO 1989, L 395, p. 33.

2     Directive 92/13/CEE du Conseil, du 25 février 1992, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à l'application des règles communautaires sur les procédures de passation des marchés des entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications ; JO 1992, L 76, p. 14.

3     Directive 2007/66/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2007, modifiant les directives 89/665/CEE et 92/13/CEE du Conseil en ce qui concerne l’amélioration de l’efficacité des procédures de recours en matière de passation des marchés publics; JO 2007, L 335, p. 31.