Language of document : ECLI:EU:C:2011:840

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme Juliane Kokott

présentées le 15 décembre 2011 (1)

Affaire C‑368/10

Commission européenne

contre

Royaume des Pays-Bas

«Marchés publics — Produits biologiques — Commerce équitable — Produits respectueux de l’environnement et socialement responsables — Économie durable — Labels ‘Max Havelaar’ et ‘EKO’ — Principes de passation des marchés — Spécifications techniques — Caractéristiques environnementales — Aptitude et choix des participants — Capacités techniques et professionnelles — Critères d’attribution des marchés — Offre économiquement la plus avantageuse — Articles 2, 23, 26, 44, 48 et 53 de la directive 2004/18/CE»






Table des matières


I —   Introduction

II — Le cadre juridique

III — Les faits et la procédure précontentieuse

A —   La passation du marché

1.     La publication de l’avis de marché

2.     Le cahier des charges

3.     La note d’information

4.     L’attribution du marché

B —   Les labels visés dans les documents du marché

C —   La procédure précontentieuse

IV — Les conclusions des parties et la procédure devant la Cour

V —   Appréciation

A —   Sur le premier moyen du recours: la référence aux labels «Max Havelaar» et «EKO» dans les spécifications techniques relatives au café et au thé à fournir

1.     Sur la première branche du premier moyen: la référence au label «EKO» pour le café et le thé à fournir (article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18)

a)     Sur l’applicabilité de l’article 23 de la directive 2004/18

b)     Sur l’absence d’interdiction générale de se référer à des éco-labels dans le cadre de la définition des caractéristiques environnementales d’un produit

c)     Sur l’interdiction de prescrire un éco-label déterminé de façon contraignante

d)     Conclusion intermédiaire

2.     Sur la deuxième branche du premier moyen: la référence au label «Max Havelaar» pour le café et le thé à fournir (article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18)

a)     Sur l’applicabilité de l’article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18

b)     À titre subsidiaire: sur la compatibilité de la référence au label «Max Havelaar» avec la directive 2004/18

i)     Sur la disposition applicable: l’article 26 de la directive 2004/18

ii)   Examen de la référence au label «Max Havelaar» au regard de l’article 26 de la directive 2004/18

3.     Résumé du premier moyen

B —   Sur le troisième moyen: la référence faite dans les critères d’attribution aux labels «Max Havelaar» et «EKO» en ce qui concerne les ingrédients à fournir

1.     Observation liminaire

2.     Premier argument avancé au soutien du troisième moyen: la prétendue absence de tout lien entre l’objet du marché public et les deux labels

3.     Deuxième argument avancé au soutien du troisième moyen: le renvoi aux labels et non aux critères sur lesquels ceux-ci reposent

C —   Sur le deuxième moyen: la supposée référence à des achats durables et à un comportement socialement responsable à titre de critère d’aptitude

1.     Sur la première branche du deuxième moyen: des exigences prétendument illicites quant à la preuve des capacités techniques des soumissionnaires (dispositions combinées de l’article 48, paragraphe 1, de la directive 2004/18 et du paragraphe 2 dudit article)

2.     Sur la deuxième branche du deuxième moyen: la prétendue absence de lien entre les exigences d’aptitude des soumissionnaires et l’objet du marché (article 44, paragraphe 2, de la directive 2004/18)

3.     Sur la troisième branche du deuxième moyen: la prétendue violation de l’impératif général de transparence (article 2 de la directive 2004/18)

D —   Résumé

VI — Sur les dépens

VII — Conclusion


I –    Introduction

1.        Non seulement les consommateurs, mais aussi les entreprises et les autorités publiques accordent une importance croissante à une consommation durable. La question centrale qui se pose dans le cadre du présent recours en manquement est de savoir dans quelle mesure, dans des procédures de passation de marchés publics, les pouvoirs adjudicateurs peuvent soumettre l’attribution d’un marché à la condition que les produits à fournir soient respectueux de l’environnement et socialement responsables.

2.        Dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres organisée au cours de l’année 2008 en vue de la passation d’un marché public portant sur la fourniture et la gestion de distributeurs de café, une collectivité territoriale néerlandaise s’était référée aux labels «Max Havelaar» et «EKO». Elle entendait assurer ainsi que l’adjudicataire fournisse des produits «durables», se caractérisant notamment par le fait d’être respectueux de l’environnement et socialement responsables. La Commission européenne reproche à présent au Royaume des Pays-Bas que l’utilisation de ces deux labels et de diverses formulations employées dans les documents du marché étaient contraires aux prescriptions du droit de l’Union en matière de marchés publics.

3.        La question de savoir si et dans quelle mesure il est permis, dans des procédures de passation de marchés publics, de tenir compte d’aspects écologiques et sociaux et en particulier de se référer à des labels existant dans les domaines de l’environnement et du commerce équitable revêt une importance fondamentale pour le développement futur du droit des marchés publics. Elle place la Cour devant la difficile tâche de devoir trouver un juste équilibre entre les exigences du marché intérieur et des préoccupations environnementales et sociales, sans, cependant, négliger les exigences pratiques des procédures de passation des marchés publics. D’une part, il faut prévenir toute discrimination des soumissionnaires potentiels et tout cloisonnement des marchés. D’autre part, les pouvoirs adjudicateurs doivent être en mesure de se procurer des produits respectueux de l’environnement, biologiques et issus du commerce équitable sans que la charge administrative ne devienne excessive.

II – Le cadre juridique

4.        Le cadre juridique de la présente affaire est tracé par la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services (2).

5.        Sous le titre I de cette directive, intitulé «Définitions et principes généraux», l’article 2 énonce les «[p]rincipes de passation des marchés» suivants:

«Les pouvoirs adjudicateurs traitent les opérateurs économiques sur un pied d’égalité, de manière non discriminatoire et agissent avec transparence.»

6.        Parmi les «[r]ègles applicables aux marchés publics» énoncées au titre II de la directive 2004/18, le chapitre IV contient une série de «[r]ègles spécifiques concernant le cahier des charges et les documents du marché»; au sein dudit chapitre, l’article 23, en combinaison avec l’annexe VI, d’une part, et l’article 26, d’autre part, nous intéresseront plus particulièrement.

7.        Comme il ressort des dispositions combinées de l’article 23 et de l’annexe VI, point 1, sous b), de la directive 2004/18, on entend par «spécification technique», lorsqu’il s’agit de marchés publics de fournitures,

«une spécification figurant dans un document définissant les caractéristiques requises d’un produit […], telles que les niveaux de qualité, les niveaux de la performance environnementale, la conception pour tous les usages […] et l’évaluation de la conformité, de la propriété d’emploi, de l’utilisation du produit, sa sécurité ou ses dimensions, y compris les prescriptions applicables au produit en ce qui concerne la dénomination de vente, la terminologie, les symboles, les essais et méthodes d’essais, l’emballage, le marquage et l’étiquetage, les instructions d’utilisation, les processus et méthodes de production, ainsi que les procédures d’évaluation de la conformité».

8.        Sur la base de cette définition, l’article 23 de la directive 2004/18 réglemente les spécifications techniques comme suit (extraits):

«1.      Les spécifications techniques telles que définies au point 1 de l’annexe VI figurent dans les documents du marché, tels que les avis de marché, le cahier des charges ou les documents complémentaires. […]

2.      Les spécifications techniques doivent permettre l’accès égal des soumissionnaires et ne pas avoir pour effet de créer des obstacles injustifiés à l’ouverture des marchés publics à la concurrence.

3.      Sans préjudice des règles techniques nationales obligatoires, dans la mesure où elles sont compatibles avec le droit communautaire, les spécifications techniques sont formulées:

a)      soit par référence à des spécifications techniques définies à l’annexe VI […]. Chaque référence est accompagnée de la mention ‘ou équivalent’;

b)      soit en termes de performances ou d’exigences fonctionnelles; celles-ci peuvent inclure des caractéristiques environnementales. Elles doivent cependant être suffisamment précises pour permettre aux soumissionnaires de déterminer l’objet du marché et aux pouvoirs adjudicateurs d’attribuer le marché;

c)      soit en termes de performances ou d’exigences fonctionnelles visées au point b), en se référant, comme un moyen de présomption de conformité à ces performances ou à ces exigences fonctionnelles, aux spécifications citées au point a);

d)      soit par une référence aux spécifications visées au point a) pour certaines caractéristiques et aux performances ou exigences fonctionnelles visées au point b) pour d’autres caractéristiques.

[…]

6.      Lorsque les pouvoirs adjudicateurs prescrivent des caractéristiques environnementales en termes de performances ou d’exigences fonctionnelles, telles que visées au paragraphe 3, point b), ils peuvent utiliser les spécifications détaillées ou, si besoin est, des parties de celles-ci, telles que définies par les éco-labels européens, (pluri)nationaux, ou par tout autre éco-label pour autant:

–        qu’elles soient appropriées pour définir les caractéristiques des fournitures ou des prestations faisant l’objet du marché,

–        que les exigences du label soient développées sur la base d’une information scientifique,

–        que les éco-labels soient adoptés par un processus auquel toutes les parties concernées, telles que les organismes gouvernementaux, les consommateurs, les fabricants, les distributeurs et les organisations environnementales peuvent participer,

–        et qu’ils soient accessibles à toutes les parties intéressées.

Les pouvoirs adjudicateurs peuvent indiquer que les produits ou services munis de l’éco-label sont présumés satisfaire aux spécifications techniques définies dans le cahier des charges; ils doivent accepter tout autre moyen de preuve approprié, tel qu’un dossier technique du fabricant ou un rapport d’essai d’un organisme reconnu.

[…]

8.      À moins qu’elles ne soient justifiées par l’objet du marché, les spécifications techniques ne peuvent pas faire mention d’une fabrication ou d’une provenance déterminée ou d’un procédé particulier, ni faire référence à une marque, à un brevet ou à un type, à une origine ou à une production déterminée qui auraient pour effet de favoriser ou d’éliminer certaines entreprises ou certains produits. Cette mention ou référence est autorisée, à titre exceptionnel, dans le cas où une description suffisamment précise et intelligible de l’objet du marché n’est pas possible par application des paragraphes 3 et 4; une telle mention ou référence est accompagnée des termes ‘ou équivalent’.»

9.        L’article 26 de la directive 2004/18 précise en outre, en ce qui concerne les «[c]onditions d’exécution du marché»:

«Les pouvoirs adjudicateurs peuvent exiger des conditions particulières concernant l’exécution du marché pour autant qu’elles soient compatibles avec le droit communautaire et qu’elles soient indiquées dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges. Les conditions dans lesquelles un marché est exécuté peuvent notamment viser des considérations sociales et environnementales.»

10.      Les dispositions régissant le «[d]éroulement de la procédure» figurent au titre II, chapitre VII, de la directive 2004/18; parmi les dispositions de ce chapitre, les articles 44, 48 et 53 sont pertinents aux fins de la présente affaire.

11.      L’article 44 de la directive 2004/18 fait partie des dispositions générales relatives au déroulement de la procédure; intitulé «Vérification de l’aptitude et choix des participants, attribution des marchés», il énonce notamment:

«1.      L’attribution des marchés se fait […], après vérification de l’aptitude des opérateurs économiques […], effectuée par les pouvoirs adjudicateurs conformément aux critères relatifs à la capacité économique et financière, aux connaissances ou capacités professionnelles et techniques visés aux articles 47 à 52 […].

2.      Les pouvoirs adjudicateurs peuvent exiger des niveaux minimaux de capacités, conformément aux articles 47 et 48, auxquels les candidats et les soumissionnaires doivent satisfaire.

L’étendue des informations visées aux articles 47 et 48 ainsi que les niveaux minimaux de capacités exigés pour un marché déterminé doivent être liés et proportionnés à l’objet du marché.

Ces niveaux minimaux sont indiqués dans l’avis de marché.

[…]»

12.      L’article 48 de la directive 2004/18 contient des dispositions relatives aux «[c]apacités techniques et/ou professionnelles» des opérateurs économiques et rédigées comme suit (extraits):

«1.      Les capacités techniques et/ou professionnelles des opérateurs économiques sont évaluées et vérifiées conformément aux paragraphes 2 et 3.

2.      Les capacités techniques des opérateurs économiques peuvent être justifiées d’une ou de plusieurs des façons suivantes, selon la nature, la quantité ou l’importance, et l’utilisation des travaux, des fournitures ou des services:

[…]

c)      une description de l’équipement technique, des mesures employées par le fournisseur ou par le prestataire de services pour s’assurer de la qualité et des moyens d’étude et de recherche de son entreprise;

[…]

6.      Le pouvoir adjudicateur précise, dans l’avis ou dans l’invitation à soumissionner, celles des références visées au paragraphe 2 qu’il entend obtenir.»

13.      Enfin, l’article 53 de la directive 2004/18, intitulé «Critères d’attribution des marchés», énonce à son paragraphe 1 les règles suivantes:

«Sans préjudice des dispositions législatives, réglementaires ou administratives nationales relatives à la rémunération de certains services, les critères sur lesquels les pouvoirs adjudicateurs se fondent pour attribuer les marchés publics sont:

a)      soit, lorsque l’attribution se fait à l’offre économiquement la plus avantageuse du point de vue du pouvoir adjudicateur, divers critères liés à l’objet du marché public en question: par exemple, la qualité, le prix, la valeur technique, le caractère esthétique et fonctionnel, les caractéristiques environnementales, le coût d’utilisation, la rentabilité, le service après-vente et l’assistance technique, la date de livraison et le délai de livraison ou d’exécution;

b)      soit uniquement le prix le plus bas.»

III – Les faits et la procédure précontentieuse

A –    La passation du marché

14.      Au cours de l’année 2008, la province néerlandaise de Hollande-Septentrionale (Noord-Holland) a mis en œuvre une procédure d’appel d’offres en vue de la fourniture et de la gestion de distributeurs de café. Le contrat devait être conclu pour une durée de trois ans, avec la possibilité d’une reconduction pour une année supplémentaire.

1.      La publication de l’avis de marché

15.      L’avis de marché, publié le 16 août 2008 au Journal officiel de l’Union européenne (3), contenait, sous le titre «Description succincte du marché ou de l’achat/des achats», notamment le texte suivant:

«La province de [Hollande-Septentrionale] dispose d’un contrat pour la gestion des distributeurs de café. Ce contrat vient à expiration le 1er janvier 2009. La province souhaite conclure un nouveau contrat à partir du 1er janvier 2009 au moyen d’un appel d’offres européen. Un aspect important est que la province de [Hollande-Septentrionale] entend utiliser davantage de produits biologiques et issus du commerce équitable dans les distributeurs de café» (4).

16.      Sous la rubrique «L’exécution du marché [est-elle] soumise à d’autres conditions particulières», l’avis de marché contenait la précision «non» (5). Il était indiqué que le marché serait attribué à l’offre économiquement la plus avantageuse (6).

2.      Le cahier des charges

17.      Dans le cahier des charges (7), qui était adressé aux intéressés sur demande, il était notamment précisé que l’évaluation des offres se ferait au regard non seulement du prix, mais également de critères qualitatifs et environnementaux. À cet égard, il était souligné que la province de Hollande-Septentrionale entendait utiliser dans ses distributeurs de café davantage de produits biologiques et issus du commerce équitable.

18.      Le cahier des charges contenait tant les critères d’aptitude auxquels les soumissionnaires devaient satisfaire que les critères d’attribution permettant de juger de l’offre économiquement la plus avantageuse. Il était en outre précisé que seules les offres conformes aux critères d’aptitude seraient évaluées à la lumière des critères d’attribution.

19.      Au sein de la section 4.4 du cahier des charges, qui portait le titre «Exigences d’aptitude/exigences minimales», la sous-section 4.4.4, elle-même intitulée «Exigences de qualité», comprenait, entre autres, le passage suivant:

«Dans le cadre d’une politique d’achats durables et de responsabilité sociale des entreprises, la province de Hollande-Septentrionale exige que le fournisseur respecte les critères de durabilité des achats et de responsabilité sociale des entreprises. Comment remplissez-vous les critères de durabilité des achats et de responsabilité sociale des entreprises[?] Il convient en outre d’indiquer comment le fournisseur contribue à rendre le marché du café plus durable et à rendre la production de café écologiquement, socialement et économiquement responsable.»

Cette même exigence de qualité était en outre qualifiée dans la sous-section 4.4.6 du cahier des charges, intitulée «Synthèse [des] exigences minimales», de «critère knock-out».

20.      Au cahier des charges était joint, en tant qu’annexe A, un «programme d’exigences», que chaque soumissionnaire devait déclarer accepter. Ce programme comprenait à la fois des «exigences» et des «souhaits» du pouvoir adjudicateur, les premières consistant en des exigences minimales à remplir sous peine d’exclusion du soumissionnaire de la procédure d’adjudication, tandis que les seconds constituaient des critères d’attribution dont le respect par les différents soumissionnaires était évalué à l’aide d’un système de points.

21.      Au point 31 de ce programme d’exigences, l’«exigence» suivante était énoncée au sujet du café et du thé à fournir:

«La province de Hollande-Septentrionale recourt, pour les consommations de café et de thé, aux labels Max Havelaar et EKO.»

22.      Par ailleurs, était exprimé au point 35 du programme d’exigences le «souhait» suivant du pouvoir adjudicateur concernant les «ingrédients» (à savoir le sucre, le lait en poudre et le cacao) à fournir, souhait dont le respect pouvait être récompensé par jusqu’à quinze points:

«Les ingrédients doivent si possible satisfaire aux labels EKO et/ou Max Havelaar.»

23.      Selon le cahier des charges, la soumission d’offres comportant des variantes n’était pas autorisée. Les offres conditionnelles n’étaient pas davantage admises.

3.      La note d’information

24.      Les soumissionnaires potentiels avaient, selon le cahier des charges, la possibilité d’adresser des questions à la province de Hollande-Septentrionale en tant que pouvoir adjudicateur, auxquelles ils recevraient une réponse dans le cadre d’une note d’information. Cette note, accessible par Internet, ferait partie intégrante du cahier des charges et prévaudrait sur les autres parties de celui-ci.

25.      La province de Hollande-Septentrionale a effectivement publié le 9 septembre 2008 une telle note d’information, comprenant notamment deux réponses à des questions posées par des soumissionnaires potentiels au sujet des labels «Max Haavelar» et «EKO» visés dans le cahier des charges:

–        concernant le point 31 du programme d’exigences, à la question «Pouvons-nous considérer que, pour les labels indiqués, le suivant s’applique: ‘ou équivalent’[?]», la province répondait «Pour autant que les fondements sont comparables ou identiques» (point 11 de la note d’information);

–        au sujet du point 35 du programme d’exigences, à la question «Pouvons-nous considérer que, pour les labels indiqués, le suivant s’applique: ‘ou équivalent’[?]», la province a répondu que «[l]es ingrédients peuvent porter un label reposant sur les mêmes fondements» (point 12 de la note d’information).

4.      L’attribution du marché

26.      Selon un avis publié le 24 décembre 2008, c’est à l’entreprise néerlandaise Maas International BV, sise à Eindhoven (Pays-Bas), que le marché a été attribué à l’issue de la procédure de passation (8).

B –    Les labels visés dans les documents du marché

27.      Le label «Max Havelaar» (9) est, depuis 1988, octroyé par une fondation de droit civil néerlandais, la Stichting Max Havelaar. Les produits portant ce label ont été achetés, à des organisations constituées de petits producteurs de pays en voie de développement, au juste prix et dans des conditions équitables. L’octroi du label est soumis au respect de quatre critères: un prix minimum qui couvre les coûts de production, une majoration par rapport au prix du marché mondial, un préfinancement et l’existence de relations commerciales de longue durée entre l’importateur et les producteurs. La définition des normes, l’audit et la certification sont assurés par une organisation faîtière internationale, la Fairtraide Labelling Organisation (FLO) (10), sise à Bonn (Allemagne).

28.      Le label «EKO» est de même un label privé néerlandais. Il est octroyé depuis 1985 par une fondation de droit civil néerlandais, la Stichting Skal, à des produits composés à 95 %, au moins, d’ingrédients issus de l’agriculture biologique. La Stichting Skal exerce son activité en coordination avec le ministère néerlandais de l’Agriculture, du Patrimoine naturel et de la Pêche.

29.      Tant «Max Havelaar» qu’«EKO» ont été enregistrés en tant que marques communautaires par l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles).

C –    La procédure précontentieuse

30.      À la suite d’une plainte, la Commission a ouvert la présente procédure en manquement. Tant dans sa lettre de mise en demeure du 14 mai 2009 que dans son avis motivé du 29 octobre 2009, elle formulait en substance les mêmes griefs que ceux invoqués à présent à l’appui du présent recours. Elle reproche au Royaume des Pays-Bas que la procédure de passation du marché a violé la directive 2004/18.

31.      Tant dans sa réponse du 17 août 2009 à la lettre de mise en demeure que dans ses observations écrites du 31 décembre 2009 sur l’avis motivé, le Royaume des Pays-Bas conteste la réalité du manquement reproché (11).

IV – Les conclusions des parties et la procédure devant la Cour

32.      Par requête du 20 juillet 2010, parvenue au greffe de la Cour le 22 juillet 2010, la Commission a introduit un recours contre le Royaume des Pays-Bas au titre de l’article 258, deuxième alinéa, TFUE.

33.      La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

1)      constater que le Royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations lui incombant en vertu des dispositions citées ci-après de la directive 2004/18 du fait que, dans le cadre de la passation d’un marché public pour la fourniture et la gestion de distributeurs de café, publié sous le numéro 2008/S 158‑213630, le pouvoir adjudicateur

–        a prescrit dans les spécifications techniques les labels «Max Havelaar» et «EKO», ou du moins des labels fondés sur des critères comparables ou identiques, ce qui est contraire à l’article 23, paragraphes 6 et 8, de cette directive,

–        a utilisé, pour contrôler la capacité des opérateurs économiques, des critères et des preuves relatifs à la durabilité des achats et à la responsabilité sociale des entreprises, ce qui est contraire aux articles 48, paragraphes 1 et 2, et 44, paragraphe 2, et, en tout état de cause, à l’article 2 de ladite directive, et

–        s’est référé, pour formuler les critères d’attribution, aux labels «Max Havelaar» et/ou «EKO», ou du moins à des labels fondés sur les mêmes critères, ce qui est contraire à l’article 53, paragraphe 1, de la même directive;

2)      condamner le Royaume des Pays-Bas aux dépens.

34.      Le Royaume des Pays-Bas, quant à lui, conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

–        rejeter le recours, et

–        condamner la Commission aux dépens.

35.      Le recours de la Commission a donné lieu à un échange de mémoires écrits devant la Cour et à une audience de plaidoiries qui s’est tenue le 26 octobre 2011. Le Royaume de Danemark, qui avait été autorisé à intervenir au soutien des conclusions du Royaume des Pays-Bas par ordonnance du président de la Cour du 11 février 2011, n’a pas participé à la procédure et s’est désisté de sa demande d’intervention le 17 octobre 2011.

V –    Appréciation

36.      Le droit des marchés publics a, longtemps, réprouvé la poursuite d’objectifs de politique environnementale et sociale, ce qui s’est manifesté, entre autres, par l’emploi du mot-clé «objectifs étrangers au marché». Entre-temps, le principe a cependant été admis que les pouvoirs adjudicateurs peuvent tenir compte, lors de l’adjudication de marchés, d’aspects environnementaux et de politique sociale (12); ce principe, en tant que tel, n’est pas contesté par la Commission. Cela ressort, d’une part, de toutes ses communications sur ce sujet qui ont été publiées (13). D’autre part, la Commission a expressément reconnu dans le cadre de la présente procédure — y compris lors de l’audience — que les pouvoirs adjudicateurs étaient autorisés à passer des marchés publics ayant spécifiquement pour objet la fourniture de produits biologiques et issus du commerce équitable.

37.      Sur un plan plus pratique cependant, il est néanmoins extrêmement discuté dans quelles conditions et sous quelle forme les convictions environnementales et de politique sociale du pouvoir adjudicateur peuvent concrètement s’exprimer dans le cadre de la passation d’un marché public. La Commission considère que, en l’occurrence, il y a eu manquement à la directive 2004/18. Elle critique la démarche de la province de Hollande-Septentrionale à trois égards, consacrant dans sa requête un moyen distinct à chacun de ces trois aspects. Ces critères concernent avant tout la référence faite, dans les documents du marché, aux labels «Max Havelaar» et «EKO».

38.      Le Royaume des Pays-Bas ne nie pas que le marché public de fourniture en cause relève de la directive 2004/18, mais conteste que la province de Hollande-Septentrionale ait contrevenu à cette dernière.

A –    Sur le premier moyen du recours: la référence aux labels «Max Havelaar» et «EKO» dans les spécifications techniques relatives au café et au thé à fournir

39.      Dans le cadre du premier moyen de son recours, la Commission reproche au Royaume des Pays-Bas une violation de l’article 23, paragraphes 6 et 8, de la directive 2004/18, dispositions desquelles découle la manière dont les pouvoirs adjudicateurs peuvent définir les caractéristiques des produits objet du marché (dites «spécifications techniques»).

40.      Comme la Commission l’a précisé lors de l’audience, elle considère que la décision de la province de Hollande-Septentrionale d’acheter des produits biologiques et issus du commerce équitable (14) en tant que telle n’est pas contraire au droit de l’Union. La violation de l’article 23 de la directive 2004/18 qu’elle reproche au Royaume des Pays-Bas consisterait, au contraire, dans le fait que, pour définir les spécifications techniques du café et du thé à fournir, la province de Hollande-Septentrionale s’est référée aux labels «Max Havelaar» et «EKO» ou, à tout le moins, à des labels appliquant des critères comparables ou identiques.

41.      Concrètement, ce moyen vise le point 31 du programme d’exigences, auquel les soumissionnaires ont été informés, sous le qualificatif d’«exigence», de ce que la province de Hollande-Septentrionale «recour[ait]» aux labels «Max Havelaar» et «EKO» pour les consommations de café et de thé. Il convient de tenir également compte du point 11 de la note d’information, auquel le pouvoir adjudicateur a précisé qu’il accepterait également des labels «équivalents» «[p]our autant que les fondements soient comparables ou identiques».

42.      La première branche du premier moyen concerne le label «EKO» (sur ce point, voir section 1 ci-après), tandis que la seconde branche est afférente au label «Max Havelaar» (voir section 2 ci-après).

1.      Sur la première branche du premier moyen: la référence au label «EKO» pour le café et le thé à fournir (article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18)

43.      La première branche du premier moyen concerne le label «EKO», dont la Commission estime que sa mention au point 31 du programme d’exigences est contraire à l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18.

44.      Il convient d’observer à cet égard que les pouvoirs adjudicateurs ont toute liberté de décider eux-mêmes du produit qu’ils souhaitent acquérir. Lors de la définition des caractéristiques du produit, y compris de ses caractéristiques environnementales, ils doivent néanmoins respecter un certain nombre de règles du droit de l’Union qui visent à assurer la transparence des procédures de passation des marchés, l’absence de discrimination entre les soumissionnaires potentiels et l’absence d’obstacles injustifiés à l’ouverture des marchés publics à la concurrence. L’article 23 de la directive 2004/18 fait partie de ces règles.

a)      Sur l’applicabilité de l’article 23 de la directive 2004/18

45.      L’article 23 de la directive 2004/18 énonce des règles détaillées concernant l’utilisation, par les pouvoirs adjudicateurs, de spécifications techniques dans les documents du marché. Ainsi qu’il ressort de l’annexe VI, point 1, sous b), de ladite directive, il convient d’entendre par spécifications techniques des spécifications figurant dans un document définissant les caractéristiques requises d’un produit. L’annexe VI, point 1, sous b), de la directive 2004/18 cite à titre d’exemples de spécifications techniques, entre autres, les niveaux de la performance environnementale, les symboles, l’emballage, le marquage et l’étiquetage, ainsi que les processus et méthodes de production.

46.      La référence faite par un pouvoir adjudicateur à un éco-label tel que le label «EKO» répond, sans aucun doute, à cette définition de la spécification technique. En effet, ce label garantit une certaine méthode de production et renseigne sur certaines caractéristiques environnementales du café ou du thé en question.

47.      Partant, l’utilisation du label «EKO» dans le programme d’exigences de la province de Hollande-Septentrionale est à apprécier au regard de l’article 23 de la directive 2004/18.

b)      Sur l’absence d’interdiction générale de se référer à des éco-labels dans le cadre de la définition des caractéristiques environnementales d’un produit

48.      Conformément à l’article 23, paragraphe 3, sous b), de la directive 2004/18, les pouvoirs adjudicateurs peuvent prescrire des caractéristiques environnementales du produit à fournir en termes de performances ou d’exigences fonctionnelles. À cette fin, ils peuvent, selon l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18, utiliser les spécifications détaillées ou, si besoin est, des parties de celles-ci, telles que définies par les éco-labels européens, (pluri)nationaux, ou par tout autre éco-label.

49.      La Commission semble comprendre cette disposition en ce sens que, pour décrire leurs exigences envers les soumissionnaires potentiels, les pouvoirs adjudicateurs peuvent uniquement se référer à des spécifications concrètes — pour ainsi dire, la «documentation technique» —, alors que toute référence directe à des éco-labels leur est interdite.

50.      Contrairement à ce que soutient la Commission, une interdiction aussi catégorique de l’utilisation d’éco-labels ne ressort cependant pas du texte même de l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18, et ne semble pas non plus justifiée au regard de l’objectif de cette disposition et du contexte dans lequel elle s’inscrit.

51.      Il est vrai que l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18 met l’emphase sur les «spécifications détaillées» que les pouvoirs adjudicateurs sont censés utiliser pour décrire les caractéristiques environnementales des produits.

52.      Cela ne signifie toutefois pas nécessairement que les pouvoirs adjudicateurs doivent, dans les documents du marché, énoncer séparément chacune des spécifications faisant partie d’un éco-label. Au contraire, les pouvoirs adjudicateurs ont la possibilité de renvoyer dans les documents du marché, par une simple référence à des éco-labels, de manière globale à toutes les spécifications sur lesquelles ces labels sont fondés. C’est en ce sens qu’il convient de comprendre le fait que l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18 autorise les pouvoirs adjudicateurs à utiliser «les spécifications détaillées […] telles que définies par [des] éco-labels» pour décrire des caractéristiques environnementales.

53.      Selon le libellé clair de ladite disposition, ce type de renvoi global est autorisé non seulement s’agissant d’éco-labels «européens» — par exemple le «label écologique de l’UE» au sens du règlement (CE) no 1980/2000 (15) et du règlement (CE) no 66/2010 (16) —, mais aussi en ce qui concerne des éco-labels «nationaux», «plurinationaux» et «autres», pour autant qu’ils satisfassent aux critères énoncés aux quatre tirets de l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18 (17).

54.      Contrairement à ce que pense la Commission, un renvoi global à l’ensemble des spécifications sur lesquelles repose un éco-label est d’ailleurs tout à fait compatible avec le principe de transparence, qui fait partie des principes fondamentaux du droit européen des marchés publics (18).

55.      Le principe de transparence exige en effet uniquement de conférer à tous les soumissionnaires un «accès égal» aux spécifications techniques (article 23, paragraphe 2, de la directive 2004/18) et de préciser les caractéristiques environnementales du produit à fournir suffisamment pour permettre aux soumissionnaires «de déterminer l’objet du marché» [article 23, paragraphe 3, sous b), de la directive 2004/18] (19).

56.      Un renvoi global aux spécifications sur lesquelles repose un éco-label y suffit en règle générale parfaitement. En effet, d’un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent (20), il peut tout à fait être attendu qu’il connaisse les éco-labels utilisés sur le marché en cause ou, à tout le moins, s’informe auprès des organismes de certification de ces labels des critères appliqués par eux.

57.      En outre, lors de la définition des exigences auxquelles doivent se conformer les pouvoirs adjudicateurs, il convient de ne pas faire abstraction de la charge administrative qu’elles impliquent. Cette charge doit toujours être proportionnée aux objectifs poursuivis par le droit des marchés publics. S’il est possible de décrire les caractéristiques environnementales d’un produit avec une précision suffisante pour un soumissionnaire raisonnablement informé au moyen d’un simple renvoi global aux spécifications sur lesquelles repose un éco-label, alors ce serait faire preuve d’un formalisme excessif que d’exiger néanmoins du pouvoir adjudicateur qu’il fournisse la liste détaillée de toutes ces spécifications.

58.      Le dernier alinéa de l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18 montre par ailleurs également qu’il n’existe pas d’interdiction de principe de se référer directement à des éco-labels. Cette disposition autorise les pouvoirs adjudicateurs expressément à présumer que les produits ou services portant un éco-label déterminé satisfont aux spécifications techniques définies dans le cahier des charges. Cette disposition serait dépourvue de sens si les pouvoirs adjudicateurs étaient uniquement autorisés à énoncer individuellement les différentes spécifications, mais non à se référer à l’éco-label lui-même qui les sanctionne.

59.      La circonstance que, dans la présente affaire, la province de Hollande-Septentrionale se soit référée dans les documents du marché à un éco-label sans énumérer en détail les spécifications techniques sur lesquelles il repose ne constitue donc pas encore, à elle seule, une violation de l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18.

c)      Sur l’interdiction de prescrire un éco-label déterminé de façon contraignante

60.      Il reste cependant à examiner si la manière dont la province de Hollande-Septentrionale s’est dans la présente affaire référée, au point 31 du programme d’exigences, à l’éco-label «EKO» emporte violation de l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18.

61.      L’interprétation des faits par les parties diffère sur ce point. Tandis que la Commission considère qu’il était exigé de manière contraignante que le café et le thé à fournir portent le label «EKO», le Royaume des Pays-Bas soutient que la province de Hollande-Septentrionale avait uniquement voulu commander du café et du thé issus de l’agriculture biologique et que la référence au label «EKO» dans le programme d’exigences avait uniquement pour objet d’illustrer cette exigence.

62.      Le point de vue de la Commission peut se prévaloir des meilleurs arguments.

63.      Il est vrai que la province de Hollande-Septentrionale avait, tant dans la publication de son projet au Journal officiel de l’Union européenne que dans le cahier des charges, effectivement mis l’emphase sur son souhait d’utiliser davantage de produits issus de l’agriculture biologique et du commerce équitable dans ses distributeurs de café. Dans le programme d’exigences, elle précisait cependant dans la rubrique «exigences» qu’elle «recourait» à du café et à du thé portant le label «EKO». Dans le même temps, elle définissait le terme «exigence» en ce sens qu’il s’agissait de conditions minimales à remplir impérativement sous peine d’exclusion du soumissionnaire de la procédure d’adjudication (21).

64.      Les soumissionnaires potentiels, dont la compréhension est déterminante pour la lecture des conditions du marché (22), ne pouvaient comprendre tout cela qu’en ce sens qu’il leur était demandé de fournir du café et du thé portant le label «EKO» et qu’ils seraient exclus de la procédure de passation si leurs produits ne portaient pas précisément ce label-là.

65.      Ce type d’exigence contrevient au principe de non-discrimination et au principe d’ouverture des marchés publics à la concurrence (dispositions combinées des articles 23, paragraphe 2, et 2 de la directive 2004/18), dont le respect s’impose également dans le cadre de l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18. D’une part, en effet, des entreprises — en particulier des entreprises établies dans d’autres États membres — dont le café ou le thé portent un autre label que le label «EKO», utilisé aux Pays-Bas, sont désavantagées. D’autre part, des entreprises qui distribuent du café ou du thé issus de l’agriculture biologique sans bénéficier d’un label sont défavorisées.

66.      Ainsi, la province de Hollande-Septentrionale est allée au-delà des limites de ce que lui permettent les dispositions combinées de l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18 et du paragraphe 3, sous b), dudit article s’agissant de définir les caractéristiques environnementales des produits à fournir. Elle n’a pas simplement renvoyé globalement aux «spécifications détaillées» sur lesquelles repose le label «EKO» (article 23, paragraphe 6, premier alinéa, de la directive 2004/18) et elle ne s’est pas davantage limitée à énoncer la présomption que des produits portant le label «EKO» satisfont aux conditions du marché (article 23, paragraphe 6, dernier alinéa, de ladite directive). Au contraire, elle a prescrit de manière contraignante le label «EKO» en tant que tel, avec la conséquence que seuls pouvaient être fournis du café et du thé portant spécifiquement ce label, à l’exclusion de tout autre café ou thé.

67.      La circonstance que, interrogé à ce sujet, le pouvoir adjudicateur a ultérieurement accepté dans sa note d’information la précision «ou équivalent» en ce qui concerne les deux labels utilisés par lui pour du café et du thé ne change rien à ce fait.

68.      Il est vrai que l’emploi de la mention «ou équivalent» ne soulève pas d’objections de principe. En effet, le législateur de l’Union lui-même l’a — dans un autre contexte — expressément prévue [voir article 23, paragraphes 3, sous a), dernière phrase, et 8, de la directive 2004/18]. En particulier, contrairement à ce que pense la Commission, la précision «ou équivalent» ne saurait être rejetée au motif de l’insécurité juridique qu’elle engendre prétendument. Il est inhérent à tout marché public que le pouvoir adjudicateur doit apprécier la conformité des offres soumises aux conditions du marché et, le cas échéant, procéder à un contrôle d’équivalence (23).

69.      Comme la Commission l’expose cependant à juste titre, la clarification, au moyen de la précision «ou équivalent», n’a été apportée dans le cas présent que dans la note d’information, plusieurs semaines après la distribution du cahier des charges aux intéressés. Dans ces circonstances, il n’est pas à exclure que, entre-temps, l’un ou l’autre soumissionnaire potentiel ait renoncé à présenter une offre du fait des formulations plus restrictives figurant dans le cahier des charges, qui semblent indiquer que le label «EKO» est prescrit de façon impérative, sans le moindre contrôle d’équivalence.

70.      Le Royaume des Pays-Bas relève que la province de Hollande-Septentrionale a publié la note d’information précisant «ou équivalent» dans le délai prescrit à l’article 39, paragraphe 2, de la directive 2004/18, c’est-à-dire six jours au plus tard avant la date limite fixée pour la réception des offres.

71.      Cette objection est cependant dépourvue de pertinence. Le délai de six jours, en vertu de l’article 39, paragraphe 2, de la directive 2004/18, s’applique uniquement aux «renseignements complémentaires sur les cahiers de charges et sur les documents complémentaires» communiqués par le pouvoir adjudicateur, sur demande, aux soumissionnaires potentiels. Des renseignements de ce type peuvent, certes, clarifier certains points et fournir certaines informations. Il n’est en revanche pas possible de remédier ainsi à des vices juridiques fondamentaux affectant les conditions du marché. En effet, les documents du marché doivent répondre à toutes les exigences juridiques dès qu’ils sont mis à la disposition des soumissionnaires potentiels et il n’est pas possible d’y apporter des corrections sur des points essentiels quelques jours avant la date limite fixée pour la réception des offres.

d)      Conclusion intermédiaire

72.      En résumé, force est dès lors de constater qu’il y a bien eu violation de l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18 du fait que la province de Hollande-Septentrionale a prescrit de manière contraignante un éco-label déterminé — le label «EKO» — pour le café et le thé à fournir. Partant, le premier moyen de la Commission est bien fondé en sa première branche.

2.      Sur la deuxième branche du premier moyen: la référence au label «Max Havelaar» pour le café et le thé à fournir (article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18)

73.      La deuxième branche du premier moyen de la Commission est consacrée au label «Max Havelaar», dont l’utilisation au point 31 du programme d’exigences, complété par la suite par le point 11 de la note d’information, contrevient selon la Commission à l’article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18.

a)      Sur l’applicabilité de l’article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18

74.      Tout d’abord, il convient d’examiner si l’article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18 est même applicable à des faits tels que ceux en cause en l’espèce.

75.      La Commission semble vouloir répondre par l’affirmative à cette question déjà pour la raison que, au cours de la procédure, le Royaume des Pays-Bas a pris position sur le contenu de l’article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18. La Commission méconnaît toutefois que le Royaume des Pays-Bas ne s’est exprimé qu’à titre subsidiaire sur l’article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18, dont il continue de contester avec force qu’il soit applicable au label «Max Havelaar». Cependant, même à supposer que le Royaume des Pays-Bas se soit engagé sans la moindre réserve dans une discussion sur l’article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18, il incomberait à la Cour d’examiner néanmoins si cette disposition est applicable ou non. Il appartient en effet à la Cour de constater si le manquement reproché existe ou non, même si celui-ci n’est pas ou n’est plus contesté (24). Ainsi, la Cour ne saurait appliquer sciemment une disposition incorrecte, les parties fussent-elles d’accord sur son application (25). Comme l’avocat général Léger l’a formulé fort judicieusement, le juge n’est aucunement confiné à un rôle passif et ne peut pas être relégué à la fonction de «bouche des parties» (26).

76.      Comme tous les autres paragraphes de l’article 23 de la directive 2004/18, son paragraphe 8, en cause, concerne des spécifications techniques par lesquelles le pouvoir adjudicateur décrit l’objet du marché. Il convient par conséquent d’examiner si, par sa référence au label «Max Havelaar», la province de Hollande-Septentrionale a établi une spécification technique pour le café et le thé à fournir.

77.      Comme nous l’avons déjà mentionné, conformément à son annexe VI, point 1, sous b), il convient d’entendre par spécifications techniques, au sens de la directive 2004/18, des spécifications figurant dans un document décrivant les caractéristiques requises d’un produit. Il doit donc s’agir d’indications qui décrivent les propriétés d’un produit. Cette analyse se trouve confirmée par l’énumération faite à l’annexe VI, point 1, sous b), de la directive 2004/18: les exemples de spécifications techniques qui y sont cités concernent tous le produit lui-même, sa fabrication, son emballage et son utilisation.

78.      Le label «Max Havelaar», en revanche, s’intéresse non pas aux caractéristiques des produits, mais aux conditions commerciales accordées aux producteurs de produits agricoles dans les pays en voie de développement. Le label ne fournit aucune information sur les propriétés du produit, mais indique si les transactions dont il a fait l’objet étaient équitables, en particulier en ce qui concerne les prix et les conditions accordés aux agriculteurs concernés.

79.      Transposé à la présente affaire, cela signifie que le label «Max Havelaar» ne fournit aucune information sur les caractéristiques et sur le mode de production du café ou du thé à fournir — tels que son goût, sa teneur en caféine ou l’emploi de pesticides —, mais permet uniquement de tirer des déductions quant aux conditions dans lesquelles ce café ou ce thé ont été achetés à leurs producteurs. Comme les deux parties l’ont fort justement observé, il s’agit là de la politique d’achat des soumissionnaires potentiels.

80.      Du fait de sa référence au label «Max Havelaar», le pouvoir adjudicateur n’a donc pas établi de spécification technique au sens de la directive 2004/18, mais a, au contraire, fait entrer des considérations sociales dans la procédure de passation de marché.

81.      Par conséquent, l’article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18 n’est pas applicable à la présente affaire. Comme nous le démontrerons ci-après (27), la référence, par un pouvoir adjudicateur, à un label de commerce équitable tel que «Max Havelaar» aurait correctement dû être examinée au regard de l’article 26 de la directive 2004/18.

82.      Partant, il convient de rejeter la deuxième branche du premier moyen de la Commission comme infondé.

83.      À la différence de ce que semble penser la Commission, son moyen fondé sur l’article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18 ne saurait être tout simplement réinterprété en un moyen tiré de l’article 26 de cette même directive. En effet, selon une jurisprudence établie (28), l’objet d’un recours en manquement est circonscrit par la procédure précontentieuse. Dans le cadre de la procédure devant la Cour, la Commission ne saurait sortir des limites de l’objet du litige ainsi circonscrit. Par conséquent, si la Commission a critiqué dans le cadre de la procédure précontentieuse une violation de l’article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18, il ne peut être constaté, dans le cadre de la procédure judiciaire consécutive, un manquement à l’article 26 de ladite directive. Au demeurant, un moyen tendant à faire constater un tel manquement serait également irrecevable en application de l’article 42, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, dans la mesure où ce n’est que dans le mémoire en réplique de la Commission qu’il a été avancé pour la première fois, sans que ce retard ne semble être justifié par des raisons valables.

b)      À titre subsidiaire: sur la compatibilité de la référence au label «Max Havelaar» avec la directive 2004/18

84.      Pour être complète, nous nous pencherons ci-après brièvement, à titre subsidiaire, sur la question de savoir si le fait, pour la province de Hollande-Septentrionale, de se référer au label «Max Havelaar» était compatible avec la directive 2004/18.

i)      Sur la disposition applicable: l’article 26 de la directive 2004/18

85.      Comme le Royaume des Pays-Bas l’a fait très justement observer, la légalité de la référence, par le pouvoir adjudicateur, à un label de commerce équitable est à apprécier au regard non pas de l’article 23, paragraphe 8, de la directive 2004/18, mais de l’article 26 de celle-ci. Selon cette dernière disposition, les pouvoirs adjudicateurs peuvent «exiger des conditions particulières concernant l’exécution du marché», lesquelles peuvent «notamment viser des considérations sociales et environnementales».

86.      Un élément non négligeable de l’exécution d’un marché public est constitué par l’achat, par l’adjudicataire, des produits à fournir au pouvoir adjudicateur. Le point de savoir si un produit, tel que du café ou du thé, qui doit être fourni à un pouvoir adjudicateur est issu du commerce équitable dépend de la politique d’achat, selon des critères sociaux, de l’adjudicataire.

87.      En se référant au label «Max Havelaar» au sujet de l’exécution du marché public en cause, la province de Hollande-Septentrionale a donc en réalité établi une condition motivée par des considérations de politique sociale au sens de l’article 26 de la directive 2004/18, même s’il est possible que la province pensait elle-même que ses documents du marché ne contenaient pas de conditions de ce type (29).

ii)    Examen de la référence au label «Max Havelaar» au regard de l’article 26 de la directive 2004/18

88.      Sur le fond, il convient de concéder à la Commission que l’article 26 de la directive 2004/18 ne confère pas au pouvoir adjudicateur un pouvoir illimité d’influencer la politique d’achat du futur adjudicataire. Ses exigences relatives à cette politique d’achat doivent porter concrètement sur l’objet du marché public de fourniture (30) et non pas concerner, par exemple, la politique générale d’achat de l’adjudicataire. Le pouvoir adjudicateur ne peut donc pas exiger que des soumissionnaires potentiels distribuent exclusivement des produits issus du commerce équitable, mais seulement que les produits qui lui seront concrètement fournis dans le cadre du marché public soient issus du commerce équitable. Or, dans le cas présent, la province de Hollande-Septentrionale n’a rien exigé d’autre.

89.      Le fait qu’un pouvoir adjudicateur se réfère à un label de commerce équitable pour expliciter les conditions sociales d’exécution du marché imposées par lui, sans énumérer en détail les critères sur lesquels ce label repose, n’appelle pas davantage de réserves de principe au regard de l’impératif de transparence, lequel doit être respecté dans le cadre de l’article 26 de la directive 2004/18 (31). En effet, comme nous l’avons déjà exposé au sujet des éco-labels (32), il peut être attendu d’un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent qu’il connaisse les labels de commerce équitable utilisés sur le marché en cause ou, à tout le moins, s’informe auprès des organismes de certification de ces labels des critères appliqués par eux.

90.      La mise en œuvre de la procédure de passation du marché tout comme l’exécution du marché par la suite peuvent même se trouver considérablement facilitées s’il est permis aux entreprises concernées de renvoyer à des labels de commerce équitable pour prouver qu’elles respectent les conditions sociales imposées par le pouvoir adjudicateur. De cette manière, la charge administrative sera réduite à un minimum, tant pour le pouvoir adjudicateur que pour les soumissionnaires potentiels et le futur adjudicataire.

91.      Contrairement à ce qu’a déclaré la Commission lors de l’audience, il ne peut tout simplement pas être exigé des pouvoirs adjudicateurs d’exposer dans les documents du marché leurs propres idées en matière de commerce équitable. Le plus souvent, les connaissances nécessaires en la matière leur feront de toute manière défaut. En outre, des différences de conception des pouvoirs adjudicateurs quant aux caractéristiques d’un commerce équitable (concernant, par exemple, le niveau de prix, la durée appropriée des relations entre les acheteurs et les producteurs dans les pays en voie de développement ainsi que le mode et l’étendue du préfinancement de la production (33)) comporteraient un risque sérieux de fractionnement du marché. Il est par conséquent dans l’intérêt à la fois des soumissionnaires potentiels et des pouvoirs adjudicateurs d’autoriser, lors de la passation de marchés publics de fourniture, un renvoi à des labels de commerce équitable.

92.      Les conditions sociales d’exécution du marché établies par le pouvoir adjudicateur en vertu de l’article 26 de la directive 2004/18 doivent cependant être conformes au droit de l’Union. Cela signifie notamment qu’il ne doit pas se produire de discrimination, ni directe ni indirecte (34).

93.      Cette dernière exigence a été enfreinte dans la présente affaire. En effet, la province de Hollande-Septentrionale n’a pas utilisé le label «Max Havelaar» uniquement pour expliciter ses idées de politique sociale en ce qui concerne le commerce équitable. Elle ne s’est pas davantage bornée à énoncer la présomption que des produits portant le label «Max Havelaar» satisfont à ses exigences d’exécution du marché motivées par des considérations de politique sociale. Au contraire, elle a prescrit de manière contraignante le label «Max Havelaar» en tant que tel, avec la conséquence que seul du café et du thé portant ce label spécifique — à l’exclusion de tout autre café ou thé — pouvaient être fournis (35).

94.      Ce faisant, elle a, d’une part, désavantagé des entreprises — en particulier des entreprises établies dans d’autres États membres — dont le café ou le thé sont revêtus d’un autre label que le label «Max Havelaar», utilisé surtout aux Pays-Bas et en Belgique. D’autre part, elle a défavorisé des entreprises qui distribuent du café ou du thé issus du commerce équitable sans bénéficier d’un label (36).

95.      De ce qui précède, il peut être conclu que la démarche de la province de Hollande-Septentrionale, consistant à prescrire de manière contraignante que le café et le thé à fournir portent un label de commerce équitable déterminé, à savoir le label «Max Havelaar», n’était pas conforme à l’article 26 de la directive 2004/18.

96.      Comme nous l’avons déjà exposé (37), la clarification apportée par le pouvoir adjudicateur par la suite au point 11 de sa note d’information, selon laquelle il convenait de comprendre la référence au label «Max Havelaar» comme étant assortie de la mention «ou équivalent», est sans incidence sur cette analyse.

97.      Incidemment, nous ajouterons que les réflexions que nous venons d’exposer au sujet de l’article 26 de la directive 2004/18 sont également pertinentes aux fins de l’article 23, paragraphe 8, de cette directive si la Cour devait estimer que, contrairement à nos développements ci-dessus (38), cette dernière disposition est d’application.

3.      Résumé du premier moyen

98.      Le premier moyen du recours n’est que partiellement fondé. Il convient de l’accueillir dans la mesure où il fait valoir une violation de l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18; il convient, en revanche, de le rejeter dans la mesure où il s’appuie sur une violation de l’article 23, paragraphe 8, de cette directive.

B –    Sur le troisième moyen: la référence faite dans les critères d’attribution aux labels «Max Havelaar» et «EKO» en ce qui concerne les ingrédients à fournir

99.      En raison de son lien thématique étroit avec le premier moyen, il semble opportun d’examiner le troisième moyen avancé par la Commission à la suite du premier. Le troisième moyen est tiré de la violation de l’article 53, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/18, lequel détermine les critères d’attribution que les pouvoirs adjudicateurs sont autorisés à appliquer pour attribuer le marché. Selon la Commission, cette disposition a été enfreinte du fait que la province de Hollande-Septentrionale s’est, dans la formulation de ses critères d’attribution, référée aux labels «Max Havelaar» et/ou «EKO», en tout état de cause cependant à des labels reposant sur les mêmes critères.

100. Concrètement, ce moyen vise le point 35 du programme d’exigences, informant les soumissionnaires du «souhait» de la province de Hollande-Septentrionale que les «ingrédients» à fournir (à savoir le sucre, le lait en poudre et le cacao) satisfassent «si possible» aux labels «EKO» et/ou «Max Havelaar». Le respect de ce «souhait» pouvait être récompensé dans le cadre de la procédure d’adjudication par jusqu’à 15 points. Au point 12 de la note d’information, le pouvoir adjudicateur précisait en outre qu’il accepterait également des labels «équivalents», en ajoutant que les ingrédients pouvaient «porter un label reposant sur les mêmes fondements» que les labels «EKO» et «Max Havelaar».

1.      Observation liminaire

101. L’article 53, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/18 vient à s’appliquer si le pouvoir adjudicateur a — comme en l’espèce — décidé d’attribuer le marché à l’offre économiquement la plus avantageuse (39). Ainsi qu’il ressort clairement du libellé de cette disposition et, notamment, de l’emploi de l’expression «par exemple», la directive 2004/18 elle-même n’énumère pas de manière limitative les critères en application desquels il convient de déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse (40).

102. Ces critères ne doivent pas nécessairement être de nature purement économique. La valeur d’une offre pour le pouvoir adjudicateur peut, en effet, également être influencée par des facteurs qui sortent d’une approche purement économique. Cela ressort déjà du texte même de l’article 53, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/18, selon lequel le caractère esthétique et fonctionnel ainsi que les caractéristiques environnementales peuvent, entre autres, jouer un rôle lors de la détermination de l’offre économiquement la plus avantageuse (41).

103. Dans ces conditions, rien ne s’oppose à ce que, dans le cadre de la détermination de l’offre économiquement la plus avantageuse, un pouvoir adjudicateur tienne également compte d’aspects écologiques et sociaux (42).

104. Néanmoins, cette constatation ne signifie pas que tout critère de cette nature peut être pris en considération par le pouvoir adjudicateur. Au contraire, selon la jurisprudence, seuls peuvent l’être des critères visant effectivement à identifier l’offre économiquement la plus avantageuse (43).

105. À cet égard, le pouvoir adjudicateur n’a pas une liberté inconditionnée de choix (44). En effet, ainsi qu’il résulte du libellé de l’article 53, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/18, les critères qu’il applique doivent être liés à l’objet du marché public en question (45). Ils doivent permettre de déterminer l’offre présentant le meilleur rapport qualité/prix (46). Il doit s’agir par ailleurs de critères objectifs qui assurent le respect des principes de transparence, de non-discrimination et d’égalité de traitement et qui garantissent l’appréciation des offres dans des conditions de concurrence effective (47).

106. La Commission estime que, dans la présente affaire, ces principes ont été violés à deux égards: d’une part, il n’existe, d’après elle, aucun lien entre les labels «Max Havelaar» et «EKO» et l’objet du marché public (voir titre 2 ci-dessous). D’autre part, soutient-elle, la province de Hollande-Septentrionale a élevé les deux labels eux-mêmes au rang de critères d’attribution, au lieu de prendre uniquement en considération les exigences de fond sur lesquelles ils reposent (sur cet aspect, voir section 3 ci-après). Ce sont ces deux arguments avancés par la Commission que nous examinerons plus en détail ci-après.

2.      Premier argument avancé au soutien du troisième moyen: la prétendue absence de tout lien entre l’objet du marché public et les deux labels

107. La Commission fait d’abord valoir qu’il n’existe aucun lien entre l’objet du marché public et les deux labels «EKO» et «Max Havelaar» sur lesquels s’est fondée la province de Hollande-Septentrionale, au motif que ces labels ne sont afférents qu’à la politique générale d’achat des soumissionnaires potentiels.

108. Cet argument n’emporte pas la conviction et est au demeurant en contradiction avec l’argumentation avancée par la Commission elle-même dans le cadre du premier moyen (48). Contrairement à l’opinion de la Commission, les deux labels en cause présentent un lien suffisant avec l’objet du marché public.

109. Ainsi, le label «EKO» concerne directement les caractéristiques — plus précisément les caractéristiques environnementales — des ingrédients à fournir. Un label, que la Commission a elle-même qualifié, dans le cadre des dispositions combinées de l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18 et du paragraphe 3, sous b), dudit article, de spécification technique visant à déterminer les performances ou les exigences fonctionnelles des produits à fournir ne saurait se voir dénier tout lien avec l’objet du marché public dans le cadre de l’article 53, paragraphe 1, de la directive 2004/18.

110. En ce qui concerne, ensuite, le label «Max Havelaar», il est exact que celui-ci ne définit pas des caractéristiques des produits au sens strict, tels qu’ils sont objet des spécifications techniques (article 23 de la directive 2004/18) (49). Ce label indique cependant si les transactions dont les produits ont fait l’objet étaient équitables. Ce type d’aspect peut être pris en considération dans le cadre des conditions d’exécution du marché (article 26 de la directive 2004/18) (50). Le lien avec l’objet du marché (en l’occurrence la livraison d’«ingrédients» tels que du sucre, du lait en poudre et du cacao) ne saurait donc lui être dénié d’emblée. En effet, pour un pouvoir adjudicateur qui, comme en attestent les documents du marché, attache de l’importance à agir de manière socialement responsable, le point de savoir si les produits à fournir ont été achetés à leurs producteurs à des conditions équitables peut tout à fait faire une différence lors de la détermination du rapport qualité/prix. Certes, strictement parlant, le goût du sucre ne change pas selon qu’il est issu du commerce équitable ou non. Néanmoins, un produit qui a été commercialisé dans des conditions injustes laissera un goût amer dans la bouche d’un client conscient de ses responsabilités sociales.

111. Il serait certainement excessif si, dans le cadre de l’identification de l’offre économiquement la plus avantageuse, un pouvoir adjudicateur entendait évaluer la politique générale d’achat des soumissionnaires potentiels et tenir compte du point de savoir si tous les produits qu’ils distribuent — indépendamment du point de savoir s’ils font l’objet du marché public en cause ou non — sont issus du commerce équitable (51).

112. Or, dans le cas présent, la prise en considération de l’aspect du commerce équitable ne va absolument pas aussi loin. Comme le Royaume des Pays-Bas l’a fait observer à juste titre, la province de Hollande-Septentrionale a uniquement énoncé au point 35 de son programme d’exigences le critère de savoir si les «ingrédients» qui devaient lui être fournis bénéficiaient d’un label de nature à attester qu’ils étaient issus du commerce équitable. Ainsi, l’utilisation du label «Max Havelaar» dans les documents du marché en cause présentait clairement un lien spécifique avec l’objet du marché public.

113. Partant, il convient de rejeter le premier argument avancé par la Commission à l’appui du troisième moyen.

3.      Deuxième argument avancé au soutien du troisième moyen: le renvoi aux labels et non aux critères sur lesquels ceux-ci reposent

114. Il reste à examiner si la manière dont la province de Hollande-Septentrionale s’est, au point 35 du programme d’exigences, référée aux labels «EKO» et «Max Havelaar» emporte violation de l’article 53, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/18.

115. L’interprétation des faits par les parties diffère sur ce point. Tandis que la Commission considère que le pouvoir adjudicateur a, en ce qui concerne les «ingrédients» à fournir (à savoir le sucre, le lait en poudre et le cacao), érigé le label «EKO» et le label «Max Havelaar» en critère d’attribution, le Royaume des Pays-Bas soutient que la province de Hollande-Septentrionale avait uniquement voulu se référer aux exigences de fond sur lesquelles reposent ces deux labels.

116. Le point de vue de la Commission peut se prévaloir des meilleurs arguments.

117. Il est vrai que, tant dans l’avis de marché publié au Journal officiel de l’Union européenne que dans le cahier des charges, la province de Hollande-Septentrionale avait, employant des formules très vagues, souligné qu’elle entendait utiliser davantage de produits biologiques et issus du commerce équitable dans ses distributeurs de café. Au point 35 du programme d’exigences, elle a cependant exprimé le «souhait» que les ingrédients satisfassent «si possible» aux labels «EKO» «et/ou» «Max Havelaar». Elle a précisé cette déclaration au point 12 de la note d’information en ce sens que les ingrédients pouvaient porter un autre label, fondé sur les mêmes critères que les labels «EKO» et «Max Havelaar». En revanche, ni dans le programme d’exigences, ni dans la note d’information, il n’a été fait mention de produits biologiques ou issus du commerce équitable sans label.

118. Les soumissionnaires potentiels, dont la compréhension est déterminante pour la lecture des conditions du marché (52), ne pouvaient comprendre tout cela qu’en ce sens que, pour obtenir la meilleure notation possible, les produits à fournir par eux devaient porter le label «EKO» et/ou le label «Max Havelaar» ou, à tout le moins, des labels équivalents.

119. Une telle démarche de la part du pouvoir adjudicateur n’est pas conforme aux exigences de formulation des critères d’attribution résultant de l’article 53, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/18.

120. À la différence de ce que pense la Commission, la cause n’est nullement un supposé manque de transparence (53) du fait du renvoi à ces deux labels. En effet, comme nous l’avons déjà exposé (54), il peut tout à fait être attendu d’un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent qu’il connaisse les labels utilisés sur le marché en cause ou, à tout le moins, s’informe auprès des organismes de certification de ces labels des critères appliqués par eux.

121. Il était effectivement tout à fait possible que des soumissionnaires potentiels offrent des produits portant d’autres labels, reposant sur les mêmes critères que les labels «EKO» et «Max Havelaar». En effet, comme l’a exposé le gouvernement néerlandais sans avoir été contredit, le label «EKO» (55) se fonde uniquement sur les critères des règlements européens sur les produits issus de l’agriculture biologique (56) et le label «Max Havelaar» est, sur le fond, identique au label «Fairtrade» existant à l’échelle internationale, qui est octroyé dans un grand nombre d’États par les organismes regroupés au sein de la Fairtrade Labelling Organisation (57).

122. Il est cependant contraire au principe de non-discrimination et d’égalité de traitement (58) ainsi qu’au principe d’ouverture des marchés publics à la concurrence (59), qui doivent être respectés dans le cadre de l’article 53, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/18 (60), qu’un pouvoir adjudicateur récompense — comme en l’occurrence la province de Hollande-Septentrionale — dans le cadre des critères d’attribution du marché, par des points supplémentaires, le fait que les produits à fournir portent des labels de production biologique et de commerce équitable. Cela a en effet pour conséquence de défavoriser des entreprises qui distribuent des produits issus de l’agriculture biologique et du commerce équitable sans bénéficier d’un label. Les soumissionnaires potentiels doivent avoir la possibilité de prouver que leurs produits satisfont pleinement aux critères d’attribution fixés par le pouvoir adjudicateur alors même qu’ils portent un label autre que ceux cités par le pouvoir adjudicateur ou qu’ils ne portent pas de label du tout.

123. Dans ce contexte, il convient de rejeter l’argument avancé par le Royaume des Pays-Bas, selon lequel les labels «EKO» et «Max Havelaar» constituaient, en ce qui concerne les «ingrédients» à fournir, non pas des exigences impératives, mais uniquement des «souhaits» du pouvoir adjudicateur dépourvus de caractère contraignant, récompensés par un nombre de points négligeable. En effet, d’une part, quelques points peuvent le cas échéant décider de la réussite ou de l’échec dans une procédure de passation de marché comportant un système d’évaluation au moyen de points. D’autre part, tous les critères d’attribution — y compris ceux auxquels le pouvoir adjudicateur a, lors de la pondération, attribué un poids relativement faible — doivent être conformes, sans la moindre concession, aux principes fondamentaux du droit des marchés publics que sont les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination. Lesdits principes sont, selon une jurisprudence établie, à respecter à toutes les étapes de la procédure de passation de marché (61).

124. En conclusion, il convient par conséquent de constater une violation de l’article 53, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/18. Le troisième moyen avancé par la Commission est bien fondé.

C –    Sur le deuxième moyen: la supposée référence à des achats durables et à un comportement socialement responsable à titre de critère d’aptitude

125. Le deuxième moyen avancé par la Commission est fondé sur les articles 2, 44, paragraphe 2, ainsi que 48, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/18, auxquels sont inscrits, d’une part, le principe de transparence de la passation des marchés publics (article 2) et, d’autre part, les conditions de l’évaluation des capacités des entreprises par les pouvoirs adjudicateurs (articles 44 et 48). La Commission estime que ces dispositions ont été enfreintes du fait que la province de Hollande-Septentrionale a établi des critères et exigé des preuves relatifs — selon la Commission — au comportement d’achat durable et socialement responsable des soumissionnaires potentiels en général.

126. Ce moyen vise, plus précisément, la sous-section 4.4.4 du cahier des charges, dans laquelle la province de Hollande-Septentrionale exige des soumissionnaires potentiels de respecter «les critères de durabilité des achats et de responsabilité sociale des entreprises». À ladite sous-section, il est par ailleurs demandé aux soumissionnaires d’expliquer comment ils remplissent «les critères de durabilité des achats et de responsabilité sociale des entreprises» et d’indiquer comment ils contribuent «à rendre le marché du café plus durable et à rendre la production de café écologiquement, socialement et économiquement responsable» (62).

1.      Sur la première branche du deuxième moyen: des exigences prétendument illicites quant à la preuve des capacités techniques des soumissionnaires (dispositions combinées de l’article 48, paragraphe 1, de la directive 2004/18 et du paragraphe 2 dudit article)

127. La première branche du deuxième moyen est spécifiquement consacrée aux exigences quant à la preuve des capacités techniques des soumissionnaires. Selon la Commission, la province de Hollande-Septentrionale est, par ses développements consacrés dans le cahier des charges à la politique d’achats durables et au comportement socialement responsable des soumissionnaires potentiels, sortie du cadre étroit fixé par l’article 48 de la directive 2004/18 en ce qui concerne l’évaluation et la vérification des capacités techniques et professionnelles des opérateurs économiques.

128. Comme le Royaume des Pays-Bas le fait cependant très justement observer, cette branche du deuxième moyen repose sur une lecture erronée de la sous-section 4.4.4 du cahier des charges. Les exigences auxquelles les soumissionnaires potentiels y sont soumis ne concernent en effet nullement leurs capacités techniques ou professionnelles. Il s’agit, au contraire, ainsi qu’il ressort déjà du titre de la sous-section 4.4.4 du cahier des charges, d’«[e]xigences de qualité» relatives aux prestations à fournir.

129. L’examen du contexte général, dans lequel s’inscrit la sous-section 4.4.4 du cahier des charges, vient également confirmer cette impression. Ainsi, la section 4.4 du cahier des charges est intitulée «Exigences d’aptitude/exigences minimales», ce qui est un indice de ce que cette section ne traite pas uniquement de l’aptitude des soumissionnaires potentiels (ou de leurs capacités) — telle la sous-section 4.4.3, qui est consacrée à l’expérience des soumissionnaires —, mais aborde également d’autres aspects. Ces autres aspects comprennent la question, en cause en l’espèce, de savoir de quelle manière le soumissionnaire entend respecter les exigences de durabilité et de comportement socialement responsable (sous‑section 4.4.4 du cahier des charges).

130. Partant, la sous-section 4.4.4 du cahier des charges, en cause, ne relève, contrairement à l’analyse de la Commission, déjà pas du champ d’application de l’article 48, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/18 et ne peut donc pas non plus être mesurée à l’aune de cette disposition.

131. Pour le cas, cependant, où la Cour souhaiterait néanmoins appliquer ladite disposition, celle-ci ne ferait pas obstacle à une condition d’un marché public telle que celle énoncée à la sous-section 4.4.4 du cahier des charges.

132. L’article 48 de la directive 2004/18 contient, certes, incontestablement une énumération limitative des justificatifs que les pouvoirs adjudicateurs peuvent exiger des opérateurs économiques quant à leurs capacités techniques (63).

133. Or, pour ses «exigences de qualité» de la sous-section 4.4.4 du cahier des charges, la province de Hollande-Septentrionale pouvait s’appuyer sur l’une des dispositions de l’article 48, paragraphe 2, de l’article 2004/18, plus précisément la disposition sous c), qui prévoit expressément que les capacités techniques d’un fournisseur peuvent être justifiées par une «description […] des mesures employées […] pour s’assurer de la qualité». C’est ce que le Royaume des Pays-Bas a fait observer à très juste titre.

134. Partant, le reproche d’une violation de l’article 48 de la directive 2004/18 est infondé.

2.      Sur la deuxième branche du deuxième moyen: la prétendue absence de lien entre les exigences d’aptitude des soumissionnaires et l’objet du marché (article 44, paragraphe 2, de la directive 2004/18)

135. La deuxième branche du deuxième moyen s’appuie sur l’article 44, paragraphe 2, de la directive 2004/18. Cette disposition prévoit en substance que le pouvoir adjudicateur peut formuler des exigences minimales en ce qui concerne l’aptitude des soumissionnaires potentiels pour autant qu’ils soient liés et proportionnés à l’objet du marché (64).

136. La Commission estime que l’article 44, paragraphe 2, de la directive 2004/18 a été enfreint du fait que les développements relatifs à la politique d’achats durables et au comportement socialement responsable des soumissionnaires potentiels figurant dans le cahier des charges ne présentent, d’après elle, pas de lien avec l’objet du marché public de fourniture en cause en l’occurrence, mais concernent, au contraire, la politique générale d’achat des opérateurs économiques.

137. Il ne saurait être considéré que le Royaume des Pays-Bas a acquiescé à ce grief du fait qu’il s’est défendu relativement mollement contre ce reproche dans le cadre de la procédure précontentieuse (65). En effet, selon une jurisprudence bien établie, aucune règle de procédure ne fait obligation à l’État membre concerné de présenter, dès le stade de la procédure précontentieuse, tous les arguments de sa défense dans le cadre d’un recours fondé sur l’article 258 TFUE (66). Devant la Cour, en tout cas, le Royaume des Pays-Bas s’est défendu vigoureusement contre le reproche d’une violation de l’article 44, paragraphe 2, de la directive 2004/18.

138. Le grief d’une violation de l’article 44, paragraphe 2, de la directive 2004/18 n’est en outre pas fondé. En effet, d’une part, ce n’est, comme nous l’avons déjà mentionné, pas une exigence relative à l’aptitude ou aux capacités techniques des soumissionnaires potentiels qu’énonce la sous-section 4.4.4 du cahier des charges, visée par ce grief (67), ce qui fait que l’article 44 de la directive 2004/18 n’est même pas d’application. D’autre part, il ne saurait être soutenu que la sous-section 4.4.4 du cahier des charges ne présente pas un lien suffisant avec l’objet du marché public.

139. Le marché avait pour objet — dans la mesure pertinente aux fins du grief formulé par la Commission — la fourniture de café, de thé et d’autres «ingrédients» pour des distributeurs de café, le pouvoir adjudicateur attachant expressément de l’importance au caractère «durable» des produits, dont il souhaitait qu’ils soient issus, d’une part, de l’agriculture biologique et, d’autre part, du commerce équitable. Comme nous l’avons déjà exposé dans le cadre du premier moyen, ce type d’exigences sert en partie à décrire les caractéristiques des produits à fournir (caractéristiques environnementales au sens de l’article 23 de la directive 2004/18), en partie à décrire d’autres conditions d’exécution du marché (aspects sociaux au sens de l’article 26 de la directive 2004/18).

140. Dès lors que, partant, la durabilité et le respect de l’environnement jouent un rôle important lors de l’exécution du marché public en cause, il ne peut être dénié la possibilité au pouvoir adjudicateur d’interroger les soumissionnaires potentiels sur le point de savoir comment ils remplissent «les critères de durabilité des achats et de responsabilité sociale des entreprises» et d’indiquer comment ils contribuent «à rendre le marché du café plus durable et à rendre la production de café écologiquement, socialement et économiquement responsable».

141. Il est parfaitement légitime de la part d’un pouvoir adjudicateur de demander aux soumissionnaires potentiels de le renseigner sur la manière dont ils entendent atteindre les objectifs du marché qu’il a définis. Contrairement à ce que pense la Commission, cette demande ne vise pas, en première ligne, la politique générale d’achat des soumissionnaires potentiels, mais, au contraire, leur comportement d’achat en ce qui concerne les produits concrètement à fournir, à savoir du café, du thé et les autres «ingrédients» (68).

142. Partant, le reproche d’une violation de l’article 44, paragraphe 2, de la directive 2004/18 est également infondé.

3.      Sur la troisième branche du deuxième moyen: la prétendue violation de l’impératif général de transparence (article 2 de la directive 2004/18)

143. Dans le cadre de la troisième branche de son deuxième moyen, la Commission avance enfin, à titre subsidiaire, le reproche d’une violation de l’impératif général de transparence, énoncé à l’article 2 de la directive 2004/18 (69).

144. Ce principe fondamental du droit européen des marchés publics a essentiellement pour but de garantir l’absence de risque de favoritisme et d’arbitraire de la part du pouvoir adjudicateur. Il implique que toutes les conditions et modalités de la procédure d’attribution soient formulées de manière claire, précise et univoque, dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges, de façon, d’une part, à permettre à tous les soumissionnaires raisonnablement informés et normalement diligents d’en comprendre la portée exacte et de les interpréter de la même manière et, d’autre part, à mettre le pouvoir adjudicateur en mesure de vérifier effectivement si les offres des soumissionnaires correspondent aux critères régissant le marché en cause (70).

145. La Commission reproche aux exigences énoncées à la sous-section 4.4.4 du cahier des charges d’être formulées en des termes trop généraux et trop vagues.

146. Nous partageons cet avis. Du passage litigieux du cahier des charges, il ne ressort pas avec une clarté suffisante quels types d’explications et de preuves le pouvoir adjudicateur exige des soumissionnaires potentiels. Les formulations choisies par la province de Hollande-Septentrionale ne permettent en outre pas de savoir avec certitude ce qu’elle entend précisément par «durabilité des achats et […] responsabilité sociale des entreprises» ainsi que par une contribution «à rendre le marché du café plus durable et à rendre la production de café écologiquement, socialement et économiquement responsable».

147. Une description plus précise de ce que la province de Hollande-Septentrionale attendait des soumissionnaires potentiels aurait été nécessaire. Par exemple, la province aurait pu demander des informations sur les accords de commerce équitable et de production biologique que les soumissionnaires potentiels ont éventuellement conclus avec leurs fournisseurs respectifs. Elle aurait également pu inviter les soumissionnaires potentiels à préciser les mesures adoptées en vue de contrôler le respect de ces accords.

148. L’objection soulevée par le Royaume des Pays-Bas, selon laquelle plusieurs organisations internationales ont défini la notion de durabilité, n’a en tout état de cause pas été suffisamment étayée pour pouvoir réfuter le reproche d’un manque de transparence.

149. Force est, par conséquent, de constater une violation de l’article 2 de la directive 2004/18. Le deuxième moyen de la Commission est dès lors fondé en sa troisième branche.

D –    Résumé

150. En résumé, nous pouvons constater que la directive 2004/18 permet tout à fait au pouvoir adjudicateur de tenir compte d’aspects écologiques et sociaux dans le cadre de la procédure de passation d’un marché public, y compris de se référer dans les conditions de l’appel d’offres à des labels existant dans les domaines de l’environnement et du commerce équitable.

151. Le pouvoir adjudicateur ne peut cependant pas exiger que les produits à fournir portent un label bien précis, mais doit également accepter d’autres labels, tout comme des produits dépourvus de tout label, dès lors que leurs caractéristiques environnementales et leurs conditions de production et de commercialisation sont équivalentes aux exigences posées par le pouvoir adjudicateur.

152. Par ailleurs, lors de l’attribution du marché, le pouvoir adjudicateur ne peut pas tenir compte de la politique générale d’achat des soumissionnaires, mais doit uniquement prendre en considération leur comportement d’achat en ce qui concerne les produits concrètement à fournir. Si le pouvoir adjudicateur exige des soumissionnaires des informations et des preuves concernant la durabilité de leurs produits et de leur politique commerciale, cette exigence doit présenter un lien suffisant avec l’objet du marché et être formulée en des termes concrets.

153. Dans le cas présent, la province de Hollande-Septentrionale ne s’est que partiellement conformée à ces règles. Dans les conditions du marché public de fourniture en cause, passé au cours de l’année 2008, elle a enfreint trois dispositions du droit de l’Union: les articles 2, 23 paragraphe 6, et 53, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/18. En revanche, aucune violation des autres dispositions invoquées par la Commission, à savoir des articles 23, paragraphe 8, 44, paragraphe 2, ainsi que 48, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/18, n’est à constater.

VI – Sur les dépens

154. Conformément à l’article 69, paragraphe 3, du règlement de procédure, la Cour peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens. Cette disposition est notamment appliquée lorsque les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs.

155. Compte tenu de ce qui précède, la Commission a en l’occurrence obtenu gain de cause en ce qui concerne la première branche de son premier moyen, la troisième branche de son deuxième moyen et son troisième moyen, alors qu’elle a succombé sur la deuxième branche de son premier moyen ainsi que sur les première et deuxième branches du deuxième moyen.

156. Dans ces conditions, il nous semble raisonnable de condamner chaque partie à supporter ses propres dépens (71).

VII – Conclusion

157. Eu égard à ce qui précède, nous proposons à la Cour de statuer comme suit:

«1)      Le Royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des traités du fait que, dans le cadre d’une procédure de passation d’un marché public de fourniture et de gestion de distributeurs de café mise en œuvre au cours de l’année 2008, la province de Hollande-Septentrionale a

–        prescrit de manière contraignante que le café et le thé à fournir portent le label ‘EKO’ ou un label reposant sur des critères comparables, violant ainsi l’article 23, paragraphe 6, de la directive 2004/18,

–        posé, dans les conditions du marché, des ‘exigences de qualité’ manquant de clarté auxquelles les soumissionnaires potentiels devaient satisfaire en ce qui concernait ‘les critères de durabilité des achats et de responsabilité sociale des entreprises’, violant ainsi l’article 2 de la directive 2004/18, et

–        prévu, dans le cadre des critères d’attribution, de récompenser par des points supplémentaires le fait que les ‘ingrédients’ à fournir portent le label ‘EKO’ et/ou ‘Max Havelaar’ ou des labels reposant sur les mêmes critères, violant ainsi l’article 53, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/18.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      Chacune des parties supporte ses propres dépens.»


1 —      Langue originale: l’allemand.


2 —      JO L 134, p. 114.


3 —      JO 2008, S 158-213630.


4 —      Point II.1.5 de l’avis de marché.


5 —      Point III.1.4 de l’avis de marché.


6 —      Point IV.2.1 de l’avis de marché.


7 —      «Offerteaanvraag ‘Koffieautomaten’» du 11 août 2008 (référence: PNH‑45096).


8 —      Avis d’attribution de marché (JO 2008, S 250‑333033).


9 —      Selon les déclarations du gouvernement néerlandais, le nom «Max Havelaar» est emprunté au titre d’un livre très connu de la littérature néerlandaise: Max Havelaar of de koffieveilingen der Nederlandsche Handelsmaatschappij (Max Havelaar ou les ventes de café de la compagnie commerciale des Pays-Bas). Ce livre, publié en 1859 par Multatuli (pseudonyme d’Eduard Douwes Dekker), traite des injustices sociales existant dans le secteur de la culture de café dans les anciennes Indes orientales néerlandaises (l’actuelle République d’Indonésie) en conséquence de la politique coloniale néerlandaise.


10 —      Voir site Internet www.fairtrade.net (visité en dernier lieu le 25 octobre 2011).


11 —      Dans sa réponse à la lettre de mise en demeure, le Royaume des Pays-Bas reconnaissait à tout le moins que les dispositions des articles 2, 23, paragraphe 6, et 53 de la directive 2004/18 «n’ont pas été respectées à la lettre». Aucune déclaration en ce sens ne se trouve en revanche dans la réponse à l’avis motivé.


12 —      À cet égard, voir arrêts de principe du 20 septembre 1988, Beentjes (31/87, Rec. p. 4635, points 28 à 30), et du 17 septembre 2002, Concordia Bus Finland (C‑513/99, Rec. p. I‑7213, points 53 à 69), ainsi que premier, cinquième, vingt-neuvième, trente-troisième, quarante-quatrième et quarante-sixième considérants de la directive 2004/18.


13 —      Communication interprétative de la Commission du 4 juillet 2001 sur le droit communautaire applicable aux marchés publics et les possibilités d’intégrer des considérations environnementales dans lesdits marchés [COM(2001) 274 final, JO C 333, p. 12]; communication interprétative de la Commission du 15 octobre 2001 sur le droit communautaire applicable aux marchés publics et les possibilités d’intégrer des aspects sociaux dans lesdits marchés [COM(2001) 566 final, JO C 333, p. 27]; communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 16 juillet 2008 relative à des marchés publics pour un environnement meilleur [COM(2008) 400 final]; communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen du 5 mai 2009 — Contribuer au développement durable: le rôle du commerce équitable et des systèmes non gouvernementaux d’assurance de la durabilité liés au commerce [COM(2009) 215 final, p. 10]; communication de la Commission du 3 mars 2010 «EUROPE 2020 — Une stratégie pour une croissance intelligente, durable et inclusive» [COM(2010) 2020 final, p. 18 et 19].


14 —      Sur ce point, voir la description générale du marché dans l’avis de marché et dans le cahier des charges (dont des extraits ont été reproduits aux points 15 et 17 des présentes conclusions).


15 —      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 17 juillet 2000 établissant un système communautaire révisé d’attribution du label écologique (JO L 237, p. 1).


16 —      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 établissant le label écologique de l’UE (JO 2010, L 27, p. 1).


17 —      Sur ce point, voir explications de la Commission concernant l’amendement 45 dans la proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de fournitures, de services et de travaux [COM(2002) 236 final, JO C 203E, p. 210, notamment p. 215, colonne de droite]. Expressément soulevé par la Cour lors de l’audience, ce point n’était pas contesté entre les parties.


18 —      Article 2 et deuxième considérant de la directive 2004/18.


19 —      Voir, également, vingt-neuvième considérant, dernière phrase, de la directive 2004/18, dans le même sens, arrêt du 29 avril 2004, Commission/CAS Succhi di Frutta (C‑496/99 P, Rec. p. I‑3801, point 111).


20 —      Sur le critère du soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent, voir arrêts du 4 décembre 2003, EVN et Wienstrom (C‑448/01, Rec. p. I‑14527, point 57), et Commission/CAS Succhi di Frutta (précité à la note 19, point 111).


21 —      À ce sujet, voir point 20 des présentes conclusions.


22 —      En ce sens — au sujet de la détermination de la valeur d’un marché public de construction —, arrêt du 18 janvier 2007, Auroux e.a. (C‑220/05, Rec. p. I‑385, point 53).


23 —      En ce sens, voir également article 23, paragraphe 6, dernier membre de phrase, ainsi que vingt-neuvième considérant (notamment cinquième phrase) de la directive 2004/18.


24 —      Arrêts du 22 juin 1993, Commission/Danemark (C‑243/89, Rec. p. I‑3353, point 30), et du 6 octobre 2009, Commission/Suède (C‑438/07, Rec. p. I‑9517, point 53).


25 —      En ce sens, ordonnance du 27 septembre 2004, UER/M6 e.a. (C‑470/02 P, point 69), et arrêt du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission (C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07 P, Rec. p. I‑8533, point 65).


26 —      Point 36 des conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Parlement/Gutiérrez de Quijano y Lloréns (arrêt du 19 novembre 1998, C‑252/96 P, Rec. p. I‑7421).


27 —      Voir points 85 à 87 des présentes conclusions.


28 —      Voir, à titre d’exemples, arrêts du 15 février 2007, Commission/Pays-Bas (C‑34/04, Rec. p. I‑1387, point 49), et du 15 juin 2010, Commission/Espagne (C‑211/08, Rec. p. I‑5267, point 33).


29 —      Voir point 16 des présentes conclusions.


30 —      En ce sens, déjà — même si à propos de critères d’attribution écologiques —, arrêts Concordia Bus Finland (précité à la note 12, points 59, dernière phrase, et 64) et EVN et Wienstrom (précité à la note 20, point 66).


31 —      Voir article 2 ainsi que deuxième et trente-troisième considérants de la directive 2004/18.


32 —      Voir point 56 des présentes conclusions.


33 —      Les conditions commerciales appropriées peuvent en outre extrêmement varier d’un produit à un autre et d’un pays producteur à un autre. L’organisme de certification qui octroie un label de commerce équitable est, dans le doute, mieux à même de porter une appréciation objective qu’un fournisseur ou un pouvoir adjudicateur.


34 —      Vingt-neuvième considérant de la directive 2004/18; dans le même sens, arrêt Beentjes (précité à la note 12, point 30).


35 —      Sur ce point, voir également, au sujet du label «EKO», point 66 des présentes conclusions.


36 —      Sur ce point, voir également, au sujet du label «EKO», point 65 des présentes conclusions.


37 —      Voir point 67 des présentes conclusions.


38 —      Voir points 74 à 81 des présentes conclusions.


39 —      À ce sujet, voir point 16 des présentes conclusions.


40 —      En ce sens, au sujet des dispositions ayant précédé l’article 53, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/18, arrêts du 18 octobre 2001, SIAC Construction (C‑19/00, Rec. p. I‑7725, point 35); Concordia Bus Finland (précité à la note 12, point 54); du 19 juin 2003, GAT (C‑315/01, Rec. p. I‑6351, point 63), et du 24 janvier 2008, Lianakis e.a. (C‑532/06, Rec. p. I‑251, point 29).


41 —      En ce sens, déjà, arrêt Concordia Bus Finland (précité à la note 12, point 55).


42 —      Voir, également, quarante-sixième considérant, quatrième alinéa, de la directive 2004/18.


43 —      Arrêts Beentjes (précité à la note 12, point 19); SIAC Construction (précité à la note 40, point 36); Concordia Bus Finland (précité à la note 12, point 59); GAT (précité à la note 40, point 64), et Lianakis e.a. (précité à la note 40, points 29 et 30).


44 —      Arrêts Beentjes (précité à la note 12, point 26); SIAC Construction (précité à la note 40, point 37); Concordia Bus Finland (précité à la note 12, points 61 et 64), et du 24 novembre 2005, ATI EAC e Viaggi di Maio e.a. (C‑331/04, Rec. p. I‑10109, point 21).


45 —      En ce sens, déjà, arrêts Concordia Bus Finland (précité à la note 12, points 59, dernière phrase, et 64); EVN et Wienstrom (précité à la note 20, point 66), et ATI EAC e Viaggi di Maio e.a. (précité à la note 44, point 21).


46 —      Quarante-sixième considérant, troisième alinéa, de la directive 2004/18; voir, également, cinquième considérant de cette directive.


47 —      Quarante-sixième considérant, premier alinéa, et deuxième considérant de la directive 2004/18; dans le même sens, arrêts Concordia Bus Finland (précité à la note 12), et ATI EAC e Viaggi di Maio e.a. (précité à la note 44, point 21).


48 —      Dans le cadre du premier moyen, la Commission a analysé tant le label «EKO» que le label «Max Havelaar» comme constituant des spécifications techniques et les a mesurés à l’aune de l’article 23, paragraphes 6 et 8, de la directive 2004/18.


49 —      À ce sujet, voir points 74 à 81 des présentes conclusions.


50 —      À ce propos, voir points 85 à 87 des présentes conclusions.


51 —      Dans un sens similaire — bien que dans un autre contexte —, arrêts Beentjes (précité à la note 12, point 28), au sujet de la capacité des soumissionnaires d’employer des chômeurs de longue durée, ainsi que EVN et Wienstrom (précité à la note 20, points 70 à 72), concernant la capacité des soumissionnaires de fournir la plus grande quantité d’électricité possible au-delà de la quantité prescrite dans l’appel d’offres. Voir, également, point 88 des présentes conclusions.


52 —      À cet égard, voir point 64 des présentes conclusions.


53 —      Quarante-sixième considérant, premier et deuxième alinéas, de la directive 2004/18.


54 —      À ce sujet, voir point 56 des présentes conclusions.


55 —      À ce propos, voir point 28 des présentes conclusions.


56 —      À la date d’attribution du marché public litigieux, le règlement applicable était le règlement (CEE) no 2092/91 du Conseil, du 24 juin 1991, concernant le mode de production biologique de produits agricoles et sa présentation sur les produits agricoles et les denrées alimentaires (JO L 198, p. 1), remplacé par la suite par le règlement (CE) no 834/2007 du Conseil, du 28 juin 2007, relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques et abrogeant le règlement no 2092/91 (JO L 189, p. 1).


57 —      Voir point 27 des présentes conclusions.


58 —      Quarante-sixième considérant, premier et quatrième alinéas, de la directive 2004/18.


59 —      Deuxième considérant de la directive 2004/18.


60 —      En ce sens, arrêts Beentjes (précité à la note 12, point 29); du 26 septembre 2000, Commission/France (C‑225/98, Rec. p. I‑7445, point 50); Concordia Bus Finland (précité à la note 12, points 63 et 64), et EVN et Wienstrom (précité à la note 20, point 69).


61 —      À ce sujet, voir, concernant les domaines les plus divers du droit des marchés publics, arrêts du 25 avril 1996, Commission/Belgique (C‑87/94, Rec. p. I‑2043, point 54); du 12 décembre 2002, Universale-Bau e.a. (C‑470/99, Rec. p. I‑11617, point 93); EVN et Wienstrom (précité à la note 20, point 56), et ATI EAC e Viaggi di Maio e.a. (précité à la note 44, point 22).


62 —      Voir point 19 des présentes conclusions.


63 —      En ce sens, également — à propos de dispositions comparables à l’article 48 de la directive 2004/18 —, arrêts du 10 février 1982, Transporoute et travaux (76/81, Rec. p. 417, points 8, 9 et 15); du 9 juillet 1987, CEI et Bellini (27/86 à 29/86, Rec. p. 3347, point 9), et du 26 avril 1994, Commission/Italie (C‑272/91, Rec. p. I‑1409, point 35).


64 —      Voir, notamment, article 44, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive 2004/18.


65 —      La Commission cite la réponse du Royaume des Pays-Bas à la lettre de mise en demeure de la Commission (p. 6), où le Royaume des Pays-Bas a, selon elle, reconnu que les conditions litigieuses du marché n’étaient «pas exclusivement lié[e]s à l’objet du marché».


66 —      Arrêts du 16 septembre 1999, Commission/Espagne (C‑414/97, Rec. p. I‑5585, point 19), et Commission/Pays-Bas (précité à la note 28, point 49 in fine).


67 —      Voir points 128 à 130 des présentes conclusions.


68 —      Sur ce point, voir nos développements consacrés aux premier et troisième moyens (en particulier points 88 et 109 à 112 des présentes conclusions).


69 —      Voir, également, deuxième et trente-neuvième considérants de la directive 2004/18.


70 —      Arrêt Commission/CAS Succhi di Frutta (précité à la note 19, point 111); similaires, arrêts du 14 octobre 2004, Commission/France (C‑340/02, Rec. p. I‑9845, point 34), et du 10 décembre 2009, Commission/France (C‑299/08, Rec. p. I‑11587, point 41), selon lesquels le principe de transparence exige que l’objet de chaque marché ainsi que les critères de son attribution soient clairement définis.


71 —      Dans le même sens, par exemple, arrêt du 29 avril 2010, Commission/Allemagne (C‑160/08, Rec. p. I‑3713, point 133).