Language of document : ECLI:EU:C:2008:611

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. Dámaso Ruiz-Jarabo Colomer

présentées le 6 novembre 2008 (1)

Affaire C‑326/07

Commission des Communautés européennes

contre

République italienne


«Recours en manquement – Articles 43 CE et 56 CE – Statut des entreprises privatisées – Clause concernant l’exercice de certains droits spéciaux»






I –    Introduction

1.        Tout ce qui brille n’est pas or. William Shakespeare écrit cette phrase dans Le marchand de Venise (2) lorsque le prince du Maroc choisit le coffret en argent pour conquérir le coeur de Portia. En matière d’«actions spécifiques» («golden shares»), cet adage aurait déjà dû inspirer profondément les États membres qui s’acharnent à jouer le rôle du roi Midas en transformant en succédané du précieux métal les participations dans le capital des entreprises qui opèrent dans des secteurs stratégiques ou qui fournissent des services publics.

2.        Toutefois, dans ce travail débridé d’alchimiste, les gouvernements oublient fréquemment l’effet correcteur du droit communautaire qui prive de toute valeur les privilèges exorbitants soigneusement protégés dont ils souhaitent se doter en se plaçant au-dessus de l’actionnaire commun. Sans doute les meilleures intentions les guident-elles, fondées sur l’idée de l’intérêt général, mais cette volonté ne justifie aucun écart par rapport au régime imposé par les règles du traité CE.

3.        Le présent recours de la Commission dirigé contre la République italienne s’inscrit dans le prolongement des affaires relatives à ce que l’on qualifie d’«actions spécifiques» qui, depuis l’arrêt Commission/Allemagne (3) doivent être entendues comme toute structure juridique applicable aux entreprises individuellement, qui conserve ou contribue à perpétuer l’influence des autorités publiques sur ces sociétés (4). En substance, l’institution communautaire demande à la Cour de justice de déclarer que les critères contenus dans un décret en vue d’exercer des pouvoirs extraordinaires reconnus par la loi en faveur de certaines autorités publiques sont incompatibles avec la libre circulation des capitaux et avec le droit d’établissement.

II – Le cadre juridique

A –    Le droit communautaire

4.        La validité des dispositions nationales que la Commission met en cause dans le cadre des actions spécifiques est habituellement examinée par la Cour à la lumière de deux des libertés fondamentales du traité CE, à savoir le droit d’établissement et la libre circulation des capitaux. La première liberté est régie par l’article 43, premier alinéa, CE, qui est libellé comme suit:

«Dans le cadre des dispositions visées ci-après, les restrictions à la liberté d’établissement des ressortissants d’un État membre dans le territoire d’un autre État membre sont interdites. Cette interdiction s’étend également aux restrictions à la création d’agences, de succursales ou de filiales, par les ressortissants d’un État membre établis sur le territoire d’un État membre.»

5.        Le traité CE consacre son article 56, paragraphe 1, à la libre circulation des capitaux en précisant:

«1. Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers sont interdites.»

6.        Compte tenu de l’importance que revêt son appréciation, il importe de citer l’article 295 CE:

«Le présent traité ne préjuge en rien le régime de la propriété dans les États membres.»

7.        En droit dérivé, il faut citer la directive 88/361/CEE (5) qui comporte en son annexe I une nomenclature en vue de classer les mouvements de capitaux auxquels se réfère l’article 1er. Elle mentionne en particulier les «participation à des entreprises nouvelles ou existantes en vue de créer ou maintenir des liens économiques durables» (investissements directs) (6) et l’«acquisition par des non-résidents de titres nationaux non négociés en bourse» (investissements de portefeuille) (7).

B –    Le droit italien

8.        L’article 4, paragraphes 227 à 231 de la loi italienne de finances pour l’année 2004 (ci-après la «loi de finances») (8) a modifié le décret‑loi n° 332 du 31 mai 1994 (9), devenu moyennant certaines modifications la loi n° 474 du 30 juillet de la même année, qui instaure des dispositions pour l’accélération des procédures de vente des participations de l’État et des organismes publics dans les sociétés par action (10).

9.        L’article 4, paragraphe 227, régit les droits spéciaux accordés à l’État italien sur certaines sociétés; le paragraphe 1 de cet article 227 fournit principalement une nouvelle rédaction de l’article 2, paragraphe 1, du décret-loi n° 332, d’après lequel:

«1. Parmi les sociétés qui sont contrôlées directement ou indirectement par l’État et qui opèrent dans le secteur de la défense, du transport, des télécommunications, des sources d’énergie et des autres services publics, un décret du président du Conseil des ministres détermine […] celles dans les statuts desquelles, avant tout acte qui entraîne la perte de contrôle, il faut introduire par délibérations de l’assemblée extraordinaire une clause qui attribue au Ministre de l’économie et des finances un ou plusieurs des pouvoirs spéciaux suivants, qui doit être exercé en concertation avec le Ministre des activités productives [.]»

10.      Les prérogatives exorbitantes de l’État italien sont décrites en détail à la suite sous les points a), b), c) et d) de cet article 2; ils se résument comme suit:

a)      opposition à l’achat par des investisseurs de participations importantes dans lesdites sociétés, représentant au moins 5 % des droits de vote ou le pourcentage inférieur établi par le ministre de l’économie et des finances par voie de décret.

b)      opposition à la conclusion de pactes ou d’accords entre actionnaires qui représentent au moins 5 % des droits de vote ou le pourcentage inférieur établi par le ministre de l’économie et des finances par voie de décret;

c)      veto à l’adoption de décisions de dissolution de la société, de transfert de l’entreprise, de fusion, de scission, de transfert du siège social à l’étranger, de changement de l’objet social, de modification du statut qui suppriment ou modifient les doits spéciaux en cause; et

d)      désignation d’un administrateur sans droit de vote.

11.      Le 10 juin 2004, le président du Conseil des ministres italien a adopté le décre (11) prévu par l’article 4, paragraphe 230, de la loi de finances; l’article 1er, paragraphe 1, de ce décret dispose:

«Les pouvoirs spéciaux visés à l’article 2 du décret-loi n° 332 de 1994 sont exercés exclusivement, lorsqu’ils sont justifiés par des motifs importants et impératifs d’intérêt général, concernant plus précisément l’ordre public, la sécurité publique, la santé publique et la défense, et prennent la forme de mesures adaptées et proportionnelles à la protection de ces intérêts, telles que la fixation éventuelle de délais opportuns, sans préjudice du respect des principes du droit national et communautaire et, avant toute chose, du principe de non‑discrimination.»

12.      Le paragraphe 2, de l’article 1er, du décret énumère les critères d’intervention des autorités publiques dans le cadre des droits spéciaux dans les termes suivants:

«2.      Les pouvoirs spéciaux visés à l’article 2, paragraphe 1, points a), b) et c), du décret-loi n° 332 de 1994 sont exercés, sans préjudice des modalités indiquées dans ce même paragraphe 1, dans les circonstances suivantes:

a)      risque grave et réel d’une rupture de l’approvisionnement national minimal en produits pétroliers et énergétiques ainsi que de la fourniture de services connexes et ultérieurs et, en général, de l’approvisionnement en matières premières et en biens essentiels à la collectivité, et rupture de la fourniture d’un service minimum dans les secteurs des télécommunications et des transports;

b)      risque grave et réel pour la continuité de l’exercice des obligations à l’égard de la collectivité dans le cadre de la fourniture d’un service public ainsi que pour l’exercice de la mission confiée à la société pour servir l’intérêt public;

c)      risque grave et réel pour la sécurité des installations et des réseaux dans les services publics essentiels;

d)      risque grave et réel pour la défense nationale, la sécurité militaire, l’ordre public et la sécurité publique;

e)      urgences sanitaires.»

III – La procédure précontentieuse

13.      Le gouvernement italien n’ayant attaqué aucun des aspects du contexte factuel exposé par la Commission ni dans son mémoire en défense ni dans sa duplique, il faut accepter l’exposé des faits tel qu’il figure dans la requête, mais sans les éléments inutiles pour porter un jugement sur l’affaire.

14.      En février 2003, la Commission a attiré l’attention du gouvernement italien dans une mise en demeure sur la compatibilité avec le droit communautaire de l’article 66 de la loi de finances n° 488 du 23 décembre 1999 ainsi que du décret du président du Conseil du 11 février 2000 sur la privatisation des entreprises publiques.

15.      Les autorités italiennes ont indiqué dans leurs deux réponses de juin 2003 que ce décret constituait une première réponse à l’arrêt de la Cour dans l’affaire C-58/99 (12) et, en novembre, qu’elles adopteraient à la fin de ce même mois une législation conforme à l’ordre juridique communautaire.

16.      Après l’approbation des modifications annoncées, le gouvernement italien a porté à la connaissance de la Commission en janvier 2004 le texte de la loi de finances pour cette année, qui chargeait le président du Conseil des ministres d’adopter dans les 90 jours de l’entrée en vigueur de la loi un décret fixant les critères de l’exercice des droits spéciaux.

17.      Le 30 juin 2004, la Commission a reçu la communication de ces dispositions d’application, à savoir le décret attaqué.

18.      Le 22 décembre 2004, l’institution précitée a adressé une lettre de mise en demeure complémentaire aux autorités italiennes parce qu’elle considérait que les dispositions modifiées et les nouveaux critères relatifs à l’exercice des droits spéciaux n’avaient pas pour effet de faire disparaître la violation des règles du traité CE sur la libre circulation des capitaux et la liberté d’établissement.

19.      Le gouvernement italien a répondu le 24 mai 2005 que le décret‑loi n° 332 et le décret du 10 juin 2004 instituaient un régime d’«actions spécifiques» dans le cadre de la gestion des sociétés dans lesquelles l’État détient une participation, qui est compatible avec le droit communautaire.

20.      Cette argumentation n’a pas satisfait la Commission qui a envoyé un avis motivé au gouvernement concerné le 18 octobre 2005. Le 20 décembre 2005, les autorités italiennes ont contesté l’avis précité, de sorte que la Commission a décidé de soumettre le litige à l’appréciation de la Cour.

IV – La procédure devant la Cour et les prétentions des parties

21.      La requête de la Commission est parvenue au greffe de la Cour le 13 juillet 2007 et le mémoire en défense du gouvernement italien, le 5 octobre suivant.

22.      Le mémoire en réplique a été déposé le 16 novembre 2007, la duplique ayant de son côté été présentée le 7 février 2008.

23.      La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour constater qu’en prévoyant des dispositions telles que celles figurant à l’article 1er, paragraphe 2, du décret du 10 juin 2004 sur la définition des critères relatifs à l’exercice des pouvoirs spéciaux visés à l’article 2 du décret-loi n° 332, converti avec modifications par la loi n° 474 du 30 juillet 1999, elle‑même modifiée par l’article 4, paragraphe 227, points a), b) et c), de la loi de finances, la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 43 et 56 du traité CE. Elle demande aussi que le gouvernement italien soit condamné aux dépens.

24.      Ce dernier demande le rejet du recours en manquement et la condamnation de la Commission aux dépens.

25.      À l’audience du 2 octobre 2008, les représentants du gouvernement italien et de la Commission ont exposé leur argumentation.

V –    Analyse du manquement

A –    Observations préliminaires

1.      Sur l’objet du litige

26.      Dans ses mémoires (13), le gouvernement italien invoque l’irrecevabilité, non pas du recours dans sa totalité, mais de la majeure partie des arguments qui fondent l’imputation du manquement. Il considère que, en réalité, les critiques figurant dans la requête et dans la réplique ne sont pas tant dirigés contre le décret attaqué mais contre les droits spéciaux visés dans le décret-loi n° 332; toutefois, dans la mesure où l’avis motivé n’attaquait pas ces prérogatives, la Commission lui reproche un manquement parce qu’il règlemente ces droits spéciaux, en élargissant subrepticement l’objet du recours.

27.      La requérante confirme à son tour dans sa réplique (14) qu’elle met uniquement en doute la proportionnalité de l’article 1er, paragraphe 2, du décret litigieux, en particulier les critères relatifs à l’exercice des facultés exorbitantes de l’État italien; elle reproche l’insuffisance d’éléments concrets devant permettre aux investisseurs d’apprécier les circonstances exactes dans lesquelles l’administration peut faire usage de ces pouvoirs extraordinaires. Elle reconnaît néanmoins la nécessité d’effectuer l’analyse de proportionnalité en relation avec la légalité de la mise en oeuvre des droits spéciaux ainsi qu’avec l’opportunité de leur usage (15).

28.      Selon une jurisprudence constante, la procédure administrative préalable, régie par l’article 226 CE, délimite l’objet d’un recours formé en application de cet article. En conséquence, l’avis motivé de la Commission et le recours doivent être fondés sur les mêmes motifs et moyens, de sorte que la Cour ne peut pas examiner un grief qui n’a pas été formulé dans l’avis (16). Il se déduit de cette jurisprudence que la finalité de ce recouvrement entre la phase précontentieuse et le recours formé devant la Cour est de fournir l’occasion à l’État membre concerné à la fois de respecter ses obligations découlant du droit communautaire et d’expliquer adéquatement les éléments qu’il juge pertinents dans sa défense face aux griefs de la Commission.

29.      Il n’y a pas lieu d’accueillir l’objection d’irrecevabilité avancée par le gouvernement italien dans la mesure où une analyse comparative de la requête (17), de l’avis motivé (18) et de la mise en demeure montre non seulement que la Commission vise uniquement à ce que la Cour examine le décret attaqué, mais aussi que, dans le dernier de ce document, elle a limité l’objet du litige au décret, tandis que les documents antérieurs à la requête contiennent certains éléments pour réfuter la validité des droits spéciaux en eux-mêmes (19).

30.      En tout cas, même dans l’hypothèse où le débat serait limité, il suffit de souligner que la Cour a accepté cette possibilité dans le cadre des recours en manquement, en la différenciant de l’extension (20).

31.      De plus, l’argumentation du gouvernement italien est un sophisme, dans la mesure où il insinue que la Commission, en critiquant le décret attaqué, vise en réalité la nature des droits spéciaux, dans la mesure où il n’est pas licite d’examiner les droits spéciaux sans porter de jugement à leur égard. En assimilant l’énonciation des droits spéciaux et leur mise en oeuvre, il confond la norme qui les reconnaît [l’article 2, paragraphe 1, sous a), b), c) et d), du décret-loi n° 332] et celle qui régit leur exercice [l’article 1, paragraphe 2, dudit décret].

32.      En somme, le champ du litige entre la Commission et le gouvernement italien se concentre sur la proportionnalité des dispositions précitées dudit décret, toutes les allégations de la Commission exposées dans ses documents de procédure conservant leur valeur.

33.      Il existe des doutes sur la validité des droits spéciaux du décret-loi n° 332 à la lumière des règles du traité sur la libre circulation; toutefois, les particularités de la procédure en manquement interdisent à la Cour d’examiner d’office cette compatibilité dans la mesure où elle se prononcerait ultra petita.

34.      Il faut donc qualifier pour le moins d’étranges les circonstances de ce recours: la Cour est invitée à se prononcer sur la proportionnalité de l’exercice de certains droits spéciaux sans examiner au préalable la compatibilité de ces prérogatives avec les libertés fondamentales du traité CE. Dans la mesure où l’on ne peut pas écarter un autre recours à ce propos, j’invite la Commission à pondérer son zèle inquisiteur d’une certaine dose de cohérence au bénéfice de l’économie de procédure, en garantissant une meilleure utilisation des ressources publiques.

2.      Pertinence de l’article 295 CE

35.      Bien que le gouvernement italien n’ait pas invoqué dans sa défense le respect que mérite l’article 295 CE, qui a été largement étudié dans les deux conclusions jointes que j’ai présentées dans les affaires ayant débouché sur les arrêts Commission/Portugal, Commission/France et Commission/Belgique (21), d’une part, et Commission/Espagne et Commission/Royaume-Uni (22), de l’autre, la nature des droits spéciaux en cause invite à s’en tenir à la thèse défendue dans ces conclusions.

36.      Je répète donc la position selon laquelle l’expression «régime de la propriété» de l’article 295 CE ne se réfère pas à l’ordre civil des relations patrimoniales, mais bien à l’ensemble idéal de règles de toute nature, y compris de droit public, qui sont susceptibles de conférer le contrôle économique d’une entreprise, c’est-à-dire qui permettent à celui qui le possède d’exercer une influence décisive sur la définition et l’exécution de tous ses objectifs économiques ou de certains d’entre eux; de la même façon, la nécessaire interprétation finaliste de la disposition fait abstraction de toute distinction entre entreprises publiques et privées qui, aux fins du traité, est fondée sur la simple composition de son actionnariat, mais dépend de la possibilité qu’a l’État d’imposer certains objectifs de politique économique, distincts de la recherche du profit maximum qui caractérise l’activité privée.

37.      Je rappelle que le traité respecte le régime de la propriété des ordres juridiques nationaux consacré à l’article 295 CE, en l’étendant à toute mesure qui, à travers des interventions dans le secteur public, entendu dans le sens économique, laisse à l’État la possibilité de contribuer à l’aménagement de l’activité productive du pays, surtout dans les processus de privatisation d’entreprises qui opéraient dans des domaines réputés «stratégiques» et qui ont été libéralisés progressivement (23). Je pense concrètement au contrôle des pouvoirs publics sur certaines activités d’intérêt vital pour la nation, que poursuit la mise en oeuvre de stratégies de politique économique.

38.      Dans ce contexte, la critique que j’ai émise dans les conclusions présentées dans les affaires C-463/00 et C-98/01 conserve toute sa valeur, lorsque j’ai déclaré que les arrêts ont rejeté sans aucune motivation l’application et la portée de l’article 295 CE, d’autant que ceux prononcés ultérieurement ne l’ont pas interprété non plus; la Cour s’est limitée à signaler que l’on ne peut ignorer les préoccupations pouvant, selon les circonstances, justifier que les États membres gardent une certaine influence dans les entreprises initialement publiques et ultérieurement privatisées, lorsque ces entreprises agissent dans les domaines des services essentiels ou d’intérêt général (24).

39.      La Cour a ajouté que ces préoccupations ne sauraient toutefois permettre aux États membres d’exciper de leurs régimes de propriété, tels que visés à l’article 295 CE, pour justifier des entraves aux libertés prévues par le traité, qui résultent de privilèges dont ils assortissent leur position d’actionnaire dans une entreprise privatisée. En effet, ledit article n’a pas pour effet de faire échapper les régimes de propriété existant dans les États membres aux règles fondamentales du traité (25).

40.      Mes conclusions jointes que j’ai déjà évoquées comportent une affirmation très similaire en soulignant que la clause de neutralité de l’article 295 CE n’implique aucunement une dérogation aux règles impératives du traité, qui produisent leurs effets conformément à leur libellé et, en particulier, à l’interdiction de discrimination en raison de la nationalité. Répétons-le avec insistance, l’article 295 CE ne soustrait pas à l’application des règles fondamentales du traité, mais il empêche, en revanche, de considérer ces mesures en soi comme étant incompatibles avec le traité, parce qu’elles sont couvertes par la présomption de validité que leur confère la légitimité de l’article 295 CE (26).

41.      Il est vrai que, d’après la thèse que je défends, les prérogatives spéciales des pouvoirs publics en cause dans la présente procédure de manquement sont des réglementations d’intervention publique dans l’activité de certaines entreprises en vue d’imposer des objectifs de politique économique et qu’elles doivent être assimilées à des formes de propriété des entreprises, dont l’aménagement appartient aux États membres en vertu de l’article 295 CE; leur existence n’est pas contraire en soi aux libertés fondamentales du traité, même si leur mise en oeuvre concrète peut l’être.

42.      Or, d’une part, la Commission critique uniquement dans le présent litige l’absence de proportionnalité, à la lumière du traité CE, de certains aspects du décret attaqué relatifs à l’exercice des droits spéciaux conférés à l’État italien par le décret-loi n° 332; d’autre part, le principe de proportionnalité, entendu sommairement comme l’élément qui met en adéquation l’intervention régulatrice de l’État et l’objectif poursuivi (27), fait partie des principes généraux de l’ordre juridique communautaire, en vertu duquel il y a lieu d’apprécier ces pouvoirs exorbitants détenus par les États membres. Ainsi, dans des conclusions précédentes, j’ai proposé que les gouvernements qui défendent des réglementations sur les «actions spécifiques» devraient démontrer que la présence de l’État dans les entreprises libéralisées est nécessaire au but poursuivi (28) et, maintenant, par cohérence avec les considérations que j’ai émises dans les pages qui précèdent, j’estime que rien ne s’oppose à ce que cette réglementation soit soumise à un examen au regard du principe de proportionnalité précité.

3.      Article 43 CE par opposition à l’article 56 CE

43.      La requérante demande de constater que la république italienne a méconnu la liberté d’établissement et la libre circulation des capitaux.

44.      Je n’ai à cet égard pas changé mon critère, qui réside, dans le cadre naturel et adéquat de l’évaluation des restrictions que recouvre l’expression «actions spécifiques», dans la liberté d’établissement, étant donné que l’État membre en cause souhaite contrôler, en utilisant des possibilités d’intervention dans la structure de l’actionnariat, la formation de la volonté sociale des entités privatisées (en exerçant une influence dans l’aménagement de l’actionnariat ou dans des actes concrets d’administration), aspect qui n’a plus que des liens ténus avec la libre circulation des capitaux (29).

45.      Ces pouvoirs peuvent toutefois affecter la liberté d’établissement, en la rendant moins intéressante, à la fois de façon directe, lorsqu’ils portent sur l’accès au capital social, et de façon indirecte, lorsqu’ils réduisent leur attractivité au motif qu’ils réduisent la capacité de disposition ou de gestion des organes sociaux (30). Contrairement à la Cour (31), j’insiste sur l’idée que l’obstacle à la libre circulation des capitaux qui en résulte revêt un caractère subsidiaire et non nécessaire. J’ai déjà signalé que cette affirmation est correcte à l’égard des mesures qui influencent la composition de l’actionnariat, mais elle l’est encore davantage dans le cas de celles qui limitent l’adoption d’accords sociaux (modification de l’objet de l’entreprise ou aliénation d’actifs, par exemple), comme les mesures attaquées en l’occurrence, le lien avec la libre circulation des capitaux devenant hypothétique ou très ténu (32).

46.      La distinction acquiert une importance pratique de premier ordre si l’on tient compte du fait que la libre circulation des capitaux ne s’applique pas seulement entre les États membres, mais aussi entre ces derniers et les pays tiers (33). On en déduit ainsi que, même si une mesure comme le veto à une décision de dissolution d’une société dans un secteur stratégique est déclaré incompatible avec l’article 43 CE, elle serait opposable aux actionnaires de pays tiers.

47.      D’un autre côté, en dépit du caractère accessoire du mouvement de capitaux en provenance de pays tiers et qui est indispensable pour acquérir la portion de titres qui permettent de contrôler la gestion de l’entreprise, considérer ce pouvoir exorbitant comme étant contraire à l’article 56 CE laisserait la voie libre à ces mêmes actionnaires extracommunautaires pour mener à bien l’acte de dissolution au détriment des intérêts de l’État membre dans la continuité de la prestation de service public qu’assurait l’entreprise.

48.      Je ne nie pas qu’il existe certaines mesures susceptibles d’être appréciées au regard des deux libertés fondamentales en cause; je souhaite uniquement attirer l’attention sur le fait qu’il existe d’autres types de droits spéciaux dont le lien intrinsèque avec l’administration des entreprises affaiblit tellement leur lien avec la libre circulation des capitaux qu’affirmer leur nullité déboucherait sur une conception excessivement large de l’article 56 CE.

49.      Je plaide par conséquent pour une délimitation plus précise des champs d’application respectifs des deux libertés fondamentales, qui interfère avec l’attractivité de la libre circulation des capitaux découlant de la jurisprudence de la Cour. Je laisse cette observation à l’état d’esquisse sans préjudice d’un développement ultérieur, lorsque j’aborderai l’examen détaillé du décret du 10 juin 2004. J’annonce déjà que la raison de la séparation du manquement sous les points a) et b) de la section 2 de la lettre B) des présentes conclusions obéit à la liberté fondamentale à l’aune de laquelle il y a lieu d’examiner le décret litigieux.

50.      Pour terminer, il convient de mentionner que la procédure révèle que c’est précisément la crainte des investissements destinés à un établissement qui a poussé l’État italien à adopter la réglementation attaquée par la Commission. Bien qu’il ne soit pas l’unique mobile, il y a le désir sous-jacent de s’opposer à ce que les entreprises des secteurs stratégiques tombent dans les mains de groupes financiers extracommunautaires à la solvabilité douteuse, qui poursuivent peut-être des objectifs inconciliables avec la politique des États membres.

B –    Sur la proportionnalité du décret attaqué

1.      Approche

51.      La Commission fonde sa demande sur le fait que le décret attaqué ne définit pas suffisamment les critères d’utilisation des pouvoir exorbitants, de sorte que l’investisseur ignore la situation dans laquelle le gouvernement pense y recourir. Elle prétend dans ce contexte que, dans la mesure où ce décret est rédigé dans des termes très génériques, l’État interviendra uniquement lorsque l’investisseur entend acquérir un important paquet d’actions des entreprises dans les secteurs d’activité économique affectés (défense, transports, télécommunications, énergie et autres services publics) (34), ce qui suppose que la décision soit subjective et inspirée exclusivement par les qualités de l’investisseur.

52.      Elle ajoute que les expressions «risque grave et réel» ou «urgence sanitaire» sont dépourvues de l’objectivité et de la spécificité adéquates pour décrire les circonstances dans lesquelles ces pouvoirs extraordinaires sont mis en oeuvre, en laissant ainsi une large marge d’appréciation aux autorités italiennes et en freinant ou décourageant les investisseurs, en particulier ceux qui aspiraient à s’installer en Italie avec l’intention d’influencer la gestion de l’entreprise.

53.      De plus, poursuit la Commission, le juge national chargé de statuer sur le recours éventuel dans un cas concret d’exercice des droits spéciaux ne trouverait pas non plus d’éléments sur lesquels se baser pour contrôler le pouvoir d’appréciation de l’autorité administrative.

54.      Enfin, la Commission souligne l’absence de lien de causalité entre la garantie indispensable de la fourniture de produits énergétiques, la prestation de services publics et le contrôle de l’actionnariat des entreprises, surtout dans le cas des secteurs non harmonisés. Dans les branches d’activité dont les législations nationales ont été rapprochées dans une certaine mesure, la Commission invoque les directives 2003/54/CE (35), 2003/55/CE (36) et 2002/21/CE (37) (ci-après la «directive électricité», la «directive gaz» et la «directive télécommunication»), en indiquant qu’elles contiennent les mesures en vue de protéger les fournitures ininterrompues à l’échelle nationale dans ces secteurs de l’économie.

55.      Mis à part les arguments relatifs à l’objet du litige, qui ont déjà été évoqués, le gouvernement italien insiste pour concentrer le débat en termes de liberté d’établissement et non de libre circulation des capitaux, dès lors que les actes soumis à examen sont destinés à intervenir de manière déterminante dans la gestion des entreprises.

56.      Il réfute aussi la pertinence des directives sur les marchés de l’électricité et du gaz, étant donné que le décret attaqué n’a introduit aucune mesure structurelle.

57.      Il cite également le principe de subsidiarité pour prétendre que la législation nationale est mieux à même d’affronter des situations gravement préjudiciables pour les intérêts nationaux, tant dans les services publics que dans les matières de défense.

2.      Appréciation

a)      Observations liminaires

58.      Avant d’entamer l’examen des raisons du manquement, il importe d’esquisser les paramètres avec lesquels je vais y procéder.

59.      Ainsi, en premier lieu, la Commission n’ayant pas inclus dans son recours les droits spéciaux de l’article 2, paragraphe 1, du décret-loi n° 332, je répète qu’ils doivent être considérés comme étant conformes à la liberté d’établissement et à la libre circulation des capitaux garanties par le traité CE. De plus, dès lors qu’elle a critiqué uniquement l’absence de proportionnalité des objectifs régis par le décret précité, il faut donc pondérer leur justification en relation avec ces libertés.

60.      En ce sens, la disposition italienne en cause offre une gamme de possibilités pour excuser les distorsions de l’exercice des droits spéciaux pourrait provoquer dans le marché intérieur, étant donné qu’il évoque expressément le maintien des fournitures énergétiques et la prestation de services publics, la sécurité des installations dans lesquelles elle est assurée, la défense nationale et l’ordre public, ainsi que l’urgence sanitaire (38).

61.      En deuxième lieu, lorsqu’il faut apprécier la compatibilité avec le traité de dispositions nationales qui interfèrent avec les libertés fondamentales, le principe de proportionnalité assure la promotion de l’intégration des marchés et la Cour l’utilise de façon plus stricte que lorsqu’elle l’applique à des normes adoptées par les institutions communautaires (39).

62.      De plus, s’agissant de ma méthodologie, j’insiste sur le fait que la question des modalités d’exercice des droits spéciaux du décret attaqué en fonction, d’une part, des points a) et b) de l’article 2, paragraphe 1, du décret-loi n° 332 et, de l’autre, du c) du même texte se pose parce que la validité des deux premiers points doit être confrontée à l’article 56 CE, tandis que la légalité du troisième doit être appréciée au regard de l’article 43 CE.

b)      La proportionnalité du décret attaqué en ce qui concerne les droits contenus à l’article 2, paragraphe 1, points a) et b) du décret-loi n° 332

63.      Ces deux points de la disposition précitée prévoient que le ministre de l’économie, en concertation avec celui des activités productives, peut s’opposer à l’acquisition par des investisseurs de participations importantes dans les sociétés des secteurs évoqués ci‑dessus, qui représentent au moins 5 % des droits de vote [point a)], ainsi qu’aux pactes ou accords entre actionnaires qui représentent au moins 5 % des droits de vote [point b)] (40).

64.      À ce jour et en l’absence d’une définition de la notion de «mouvements de capitaux» dans le traité CE, la jurisprudence a reconnu la valeur indicative de la nomenclature annexée à la directive 88/361/CEE (41), selon laquelle relèvent de cette notion les investissements directs sous forme de participations dans une entreprise par la détention d’actions qui confère la possibilité d’intervenir dans sa gestion et sur son contrôle, ainsi que les investissements indirects, comme l’acquisition de titres sur le marché des capitaux en vue de réaliser un placement, mais sans intention d’influencer la gestion et le contrôle de l’entreprise (appelés aussi investissements «de portefeuille») (42).

65.      La Cour a étudié ces deux catégories d’investissements et a qualifié de «restrictions» au sens de l’article 56, paragraphe 1, CE les mesures nationales qui empêchent l’acquisition d’actions dans les entreprises concernées ou qui dissuadent les investisseurs d’autres États membres d’effectuer leurs placements dans le capital de ces entreprises (43).

66.      Bien que j’aie déjà indiqué que le présent recours ne porte pas sur l’appréciation des droits spéciaux conférés aux ministres en cause, les explications qui précèdent confirment que tant l’opposition à l’achat de paquets d’actions qui représentent au moins 5 % du capital d’une entreprise que l’obstruction aux pactes que les propriétaires de ces actions peuvent conclure avec d’autres doivent être examinées en ce qui concerne leur conformité avec le droit communautaire à la lumière de l’article 56 CE, dès lors que les interférences qu’elles provoqueraient avec l’achat d’actions sont évidentes, y compris si elles sont de nature purement dissuasive.

67.      La possession de ce volume de titres n’est pas suffisante en soi pour s’assurer le contrôle de la société, même s’il est vrai que la dispersion de l’actionnariat dans les grandes sociétés anonymes permet plus facilement à des grands investisseurs détenant des pourcentages relativement faibles d’actions de participer à l’administration de l’entreprise.

68.      En concentrant l’analyse sur la proportionnalité du décret italien, il ne semble pas difficile de se hasarder à dire qu’il ne résiste même pas au test de l’adéquation (44), puisque, comme le prétend la Commission, on ne perçoit aucun lien logique entre les droits d’opposition visés aux points a) et b) de l’article 2, paragraphe 1, du décret-loi n° 332 et les conditions de leur exercice d’après ce décret.

69.      Ainsi, on ne comprend pas la façon dont l’acquisition d’actions ou un accord entre actionnaires peut susciter le moindre risque grave et réel d’interruption des fournitures de produits énergétiques ou de perturbations, elles aussi graves et certaines, de la continuité des services publics; on ne comprend pas davantage que ces actes supposent une menace grave et réelle pour la sécurité des installations et les réseaux des services publics essentiels ni pour la défense nationale ou la sécurité publique et, dans une moindre mesure encore, qu’ils impliquent une urgence sanitaire, quelle que soit la gravité de l’éventuelle maladie des investisseurs acquéreurs ou des parties à l’accord entre actionnaires.

70.      Le gouvernement italien n’a produit aucune preuve ni avancé aucun indice susceptible d’écarter les doutes de la Commission, qui semblent ainsi bien fondés. Ce jugement négatif est accentué par le fait que les ministres compétents sont autorisés, sans aucune justification, à réduire le chiffre de 5 %, dans la mesure où, au-dessous de ce pourcentage, le sentiment d’arbitraire complet auquel est soumis exercice de ce pouvoir de veto s’accentue (45).

71.      L’examen de l’argument relatif à l’applicabilité des directives électricité, gaz et télécommunications perd de son intérêt, étant donné que l’on ne remédierait pas au défaut initial d’incohérence entre les droits et l’aménagement de leur exercice dans le décret attaqué; de plus, il y a lieu de douter de la pertinence de ces textes normatifs, dès lors qu’ils s’attachent à des aspects régulateurs de la concurrence dans ces marchés respectifs et contiennent uniquement des règles minimales relatives au respect des exigences de service public (46).

72.      S’agissant de la thèse du gouvernement italien qui prétend conforter la validité du décret en invoquant le principe de subsidiarité comme garantie de l’intervention des États membres pour la défense de leurs intérêts vitaux, il y a lieu de faire observer que sa mise en pratique doit être réalisée, d’après les termes mêmes du traité CE, en respectant ses dispositions générales et ses objectifs, notamment en ce qui concerne le maintien intégral de l’acquis communautaire (47).

73.      En outre, la Cour a déclaré que si les États membres sont libres de déterminer les exigences de l’ordre public et de la sécurité publique conformément à leurs besoins nationaux, dans le contexte communautaire, ces exigences doivent être entendues strictement, de sorte que leur portée ne saurait être déterminée unilatéralement sans contrôle des institutions de l’Union (48).

74.      Elle a de même ajouté qu’un régime d’autorisation préalable pour les investissements directs étranger (49) ou un système d’opposition a posteriori (50), qui se limitent à définir de manière globale les opérations financières auxquelles ils s’appliquent parce qu’ils mettent en péril l’ordre public ou la sécurité publique, ne permettent pas aux intéressés de connaître les circonstances spécifiques dans lesquelles une autorisation préalable est nécessaire ou celles dans lesquelles il sera fait usage de l’opposition; la Cour elle-même a censuré cette imprécision des droits et obligations des particuliers qui découlent de l’article 56 CE, parce qu’elle est contraire au principe de sécurité juridique.

75.      En somme, une utilisation en termes aussi vagues du principe de subsidiarité irait à l’encontre du principe de sécurité juridique que la Cour impose pour éluder la rigueur des engagements pris par les États membres dans le traité.

76.      Au regard des explications que j’ai exposées, je propose à la Cour de déclarer qu’en prévoyant des dispositions telles que celles figurant à l’article 1er, paragraphe 2, du décret du président du Conseil des ministres du 10 juin 2004 en relation avec les points a), et b) de l’article 4, paragraphe 227 de la loi de finances, la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 56 du traité CE.

c)      Sur la proportionnalité du décret attaqué par rapport aux droits visés au point c) de l’article 2, paragraphe 1, du décret-loi n° 332

77.      Pour mémoire, la disposition en question soumet au veto des ministres de l’économie et des activités productives les décisions de dissolution, de transfert de l’entreprise, de fusion, de scission, de transfert du siège social à l’étranger, de changement de l’objet social, de modification du statut qui suppriment ou modifient les pouvoirs spéciaux en cause.

78.      J’ai consacré le point 49 des présentes conclusions à la délimitation claire des hypothèses concernées par la libre circulation des capitaux et de celles qui relèvent de la liberté d’établissement, en contestant donc leur assimilation automatique dès lors que l’on les examine à la lumière des libertés fondamentales garanties par le traité CE.

79.      Je suis convaincu dans ce contexte que les mesures visées par le point c) de l’article 2, paragraphe 1, du décret-loi n° 332 tombent dans le champ d’application de la liberté d’établissement. En effet, la Cour indique dans sa jurisprudence que, pour savoir si une législation nationale relève de l’une ou de l’autre des libertés de circulation, il convient de se référer à l’objet de cette législation (51), en ajoutant que sont visées par la liberté d’établissement les dispositions nationales applicables à la possession par un ressortissant d’un État membre d’une participation telle dans le capital d’une société située dans un autre État membres qu’elle lui confère une influence réelle sur les décisions de cette société et lui permet de s’immiscer dans ses activités (52).

80.      Or, celui qui est l’instigateur ou qui promeut les telles décisions doit détenir un nombre suffisant d’actions pour obtenir l’accord de l’assemblée générale des actionnaires en sa faveur, parce que c’est uniquement dans cette position qu’il obtiendrait la majorité indispensable pour influencer aussi intensément la vie de l’entreprise; de fait, une décision de ce type pourrait mettre en danger jusqu’à la subsistance de la société, raison pour laquelle les législateurs nationaux ont pris la précaution d’exiger une majorité qualifiée du capital représenté à l’assemblée générale des actionnaires pour son adoption (53).

81.      En toute hypothèse, le mouvement de fonds transfrontière qui a donné lieu à l’acquisition du paquet de titres a eu lieu préalablement, sans aucune perturbation, reléguant aussi entièrement au statut de cas d’école le lien avec la libre circulation des capitaux. De surcroît, même si un certain effet dissuasif de la législation n’est pas exclu (ayant pour conséquence qu’un investisseur étranger cesse de s’intéresser à toute entreprise dont les statuts comprennent une clause comme celle à l’examen), une grande partie des mesures en question ont été harmonisées dans la Communauté au titre de la liberté d’établissement, concrètement en vertu de l’article 44, paragraphe 2, sous g) CE (54). Ceci me paraît logique compte tenu du lien étroit existant entre les décisions prises au titre de l’article 2, paragraphe 1, point c), du décret-loi n° 332 et cette liberté fondamentale du traité.

82.      De toute façon, il ne vaut pas la peine d’approfondir la question du domaine dont relèvent les mesures, dès lors que ce n’est pas leur validité qui est en cause mais celle des critères de leur exercice conformément au décret attaqué. Je souhaite néanmoins rappeler que je suis pleinement convaincu qu’il faut faire relever ce type d’actes des organes sociaux de la liberté d’établissement visée à l’article 43 CE et non de la libre circulation des capitaux, qui n’est pas pertinente, même pas lorsque l’on suppose l’existence d’une force dissuasive des fonds étrangers, en raison de la nature ténue de leur relation.

83.      Reprenant l’examen de la proportionnalité du décret en question, je crois que, à l’exception de la modification du statut social qui supprime ou modifie les droits spéciaux dans les entreprises publiques, l’opposition aux autres actes me semble adéquate pour atteindre le but poursuivi, étant donné que, par exemple, la dissolution des entreprises et la modification de leur objet social sont susceptibles d’affecter la sécurité de l’approvisionnement énergétique et/ou la prestation d’autres services publics au détriment de l’intérêt légitime et vital de l’État membre, soucieux du niveau de bien-être de ses citoyens.

84.      Je nourris néanmoins de sérieux doutes sur sa nécessité, dans la mesure où il existe des solutions moins contraignantes pour le fonctionnement du marché commun, qui accordent une plus grande prévisibilité aux actes des investisseurs étrangers; je pense concrètement que l’État italien pourrait conserver une minorité de blocage dans les sociétés dans lesquelles il estime opportun de maintenir sa présence.

85.      J’ai avancé le critère unanime en droit européen des sociétés, qui soumet l’efficacité des décisions comme celles visées au point c) de l’article 2, paragraphe 1, du décret-loi n° 332 à des exigences non seulement de majorité renforcée ou qualifiée à l’assemblée –généralement extraordinaire – des actionnaires, mais aussi de quorum.

86.      Dans ce contexte et pour autant qu’il n’y ait pas d’abus, le fait de garder un paquet suffisant de titres pour faire obstacle à toute tentative de soumettre les sociétés qui fournissent des services publics à un accord social ayant la portée de ceux en litige en l’espèce présente l’avantage indiscutable de conformer les intérêts généraux poursuivis par les dispositions administratives correspondantes au droit national des sociétés sans enfreindre les règles communautaires. Dans la quasi‑totalité des cas, cette solution ne signifie par ailleurs aucun coût ajouté pour l’État, dans la mesure où il ne s’agit pas d’acquérir un volume concret de capital, puisque, compte tenu des particularités de ces sociétés qui étaient encore récemment sous le contrôle absolu du gouvernement, les autorités publiques se défont uniquement de la quantité adéquate d’actions pour continuer à diriger le destin de ces entreprises.

87.      Pour le reste, dès lors qu’il est légitime que l’État se sente obligé de contrôler la continuité et la stabilité de la fourniture et de la prestation de services publics, rien ne l’empêche de doter les organismes régulateurs du marché énergétique, de celui des télécommunications et de ceux d’autres secteurs de pouvoirs pour veiller, par exemple, à ce que la dissolution d’une société électrique qui entraînerait la disparition d’un fournisseur de biens ou services aussi importants n’affecte pas les citoyens.

88.      En résumé, le décret attaqué n’est pas proportionné par rapport aux droits dont il prétend régir l’exercice ni au droit communautaire. Je propose dès lors à la Cour de déclarer qu’en prévoyant des dispositions telles que celles figurant à l’article 1er, paragraphe 2, en relation avec le point c) de l’article 4, paragraphe 227, de la loi de finances, la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 43 du traité CE.

d)      Épilogue

89.      Le recours formé par la Commission contre la République italienne concerne très particulièrement la prise de participation d’une certaine importance par des investisseurs des pays extra communautaires dans des sociétés opérant dans des secteurs jugés stratégiques ou de service public, provoquant dans certains cas la crainte des gouvernements européens. Cet aspect ressort à l’évidence du mémoire en défense du gouvernement italien, lorsqu’il souligne que les critères (du décret attaqué) peuvent uniquement se concrétiser en fonction des caractéristiques de l’acquéreur des actions (55).

90.      Il a été prétendu, notamment, que l’idée centrale de la législation en matière d’«actions spécifiques» concerne les conditions dans lesquelles les entités extra européennes peuvent bénéficier des privilèges découlant de la propriété d’entreprises dans les secteurs les plus sensibles, en rejetant des solutions comme la réciprocité et en optant pour les pactes qui introduisent des actions spécifiques dans les statuts avec l’accord de la majorité des actionnaires (56).

91.      Dans ces circonstances, je crois que la thèse que je propose est assez respectueuse des préoccupations des États membres à l’égard de groupes d’investisseurs des pays tiers. J’ai qualifié de disproportionné et, en fin de compte, de contraire à l’article 56 CE, le décret national sur l’exercice des droits spéciaux visés aux points a) et b) de l’article 4, paragraphe 227 de la loi de finances, de sorte que la République italienne ne peut pas opposer la norme litigieuse aux ressortissants des États membres ni à ceux de pays tiers, compte tenu de l’application extra communautaire de la libre circulation des capitaux, comme je l’ai exposé.

92.      En échange, les gouvernements conservent une certaine marge de manoeuvre pour freiner les investisseurs d’origine extra communautaire animés de prétentions discutables et en leur imposant des limites aux actes visés au point c) de l’article 4, paragraphe 227, de la loi de finances; en effet, en les ayant traités par la voie de l’article 43 CE, l’incompatibilité avec la liberté d’établissement de l’opposition à ces décisions structurelles pour la vie de l’entreprise n’empêche pas que les États membres l’appliquent à l’encontre des grands actionnaires extra communautaires, puisque la liberté fondamentale du droit d’établissement ne les aide pas.

VI – Dépens

93.      L’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour de justice précise que la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens par l’autre partie. La République italienne ayant succombé dans ses prétentions et la Commission ayant conclu à ce qu’elle soit condamnée aux dépens, il y a lieu de lui imposer les coûts de la présente procédure.

VII – Conclusion

94.      Au regard des considérations qui précèdent, je suggère à la Cour:

1)       de déclarer que la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 56, paragraphe 1, CE, en ce qui concerne les points a) et b) de l’article 4, paragraphe 227 de la loi de finances, ainsi qu’en vertu de l’article 43 CE en ce qui concerne le point c) de cette même disposition en prévoyant des règles telles que celles figurant à l’article 1er, paragraphe 2, du décret du président du Conseil des ministres du 10 juin 2004 sur la définition des critères relatifs à l’exercice des pouvoirs spéciaux visés à l’article 2 du décret-loi n° 332 du 31 mai 1994, converti avec modifications par la loi n° 474 du 30 juillet 1994, dans sa version modifiée par ladite loi de finances.

2)       de condamner la République italienne aux dépens.


1 – Langue originale: l’espagnol.


2 – La citation en langue espagnole est tirée de Shakespeare, W., Teatro completo, Ed. Galaxia Gutemberg/Círculo de lectores, «El mercader de Venecia», traducción de Vicente Molina Fox; acto II, escena séptima, p. 555.


3 – Arrêt du 23 octobre 2007, C-112/05, Rec. p. I-8995, et mes conclusions qui ont été lues le 13 février 2007.


4 – Van Bekkum, J., Kloosterman, J., Winter, J., «Golden shares and European Company Law: the implications of Volkswagen», European Company Law, volume 5/1, février 2008, p. 8.


5 – Directive du Conseil, du 24 juin 1988, pour la mise en oeuvre de l’article 67 du traité, JO L 178, p. 5.


6 – Point I.2 de l’annexe précitée.


7 – Point III.A.1 de la même annexe.


8 – Loi n° 350/2003, du 24 décembre 2004, GURI n° 299 du 27 décembre 2003.


9 – GURI n° 126 du 1er juin 1994.


10 – GURI n° 177 du 30 juillet 1994.


11 – GURI n° 139 du 16 juin 2004.


12 – Arrêt du 23 mai 2000, Commission/Italie, C-58/99, Rec. p. I‑3811.


13 – Concrètement, aux points 4 et 14 a contrario de son mémoire en défense et aux points 2, 4 et 43 in fine de sa duplique.


14 – Aux points 3 et suiv. de ce mémoire.


15 – Au point 5 de la réplique.


16 – Voir par exemple les arrêts du 11 mai 1989, Commission/Allemagne (76/86, Rec. p. 1021, point 8), du 20 mars 1997, Commission/Allemagne (C-96/95, Rec. p. I‑1653, point 22), du 11 juin 1998, Commission/Luxembourg (C-206/96, Rec. p. I‑3401, point 13), et du 24 juin 2004, Commission/Pays-Bas (C-350/02, Rec. p. I‑6213, points 19 et 20).


17 – Lettre de la Commission à la Représentation permanente de la république italienne du 6 février 2003.


18 – Lettre de la Commission à la Représentation précitée du 18 octobre 2005.


19 – À la page 7, avant-dernier paragraphe de la mise en demeure et à la page 6, dernier paragraphe de l’avis motivé.


20 – Arrêt du 16 septembre 1997, Commission/Italie (C-279/94, Rec. p. I‑4743), point 25.


21 – Arrêts du 4 juin 2002, Commission/Portugal (C-367/98, Rec. p. I‑4731), Commission/France (C‑483/99, Rec. p. I‑4781), et Commission/Belgique (C-503/99, Rec. p. I‑4809), affaires dans lesquelles les conclusions ont été présentées le 3 juin 2001).


22 – Arrêts du 13 mai 2003, Commission/Espagne (C-463/00, Rec. p. I‑4581) et Commission/Royaume-Uni (C-98/01, Rec. p. I‑4641); les conclusions ont été lues le 6 février 2003.


23 – Voir aussi mes conclusions dans l’affaire qui a débouché sur l’arrêt Commission/Allemagne, précité à la note 3, points 47 et suiv.


24 – Voir, par exemple, les arrêts du 13 mai 2003, Commission/Espagne, précité, point 66, et du 6 décembre 2007, Ferderconsumatori e.a. (C-463/04 et C‑464/04, Rec. p. I‑10479, point 41).


25 – Arrêts Commission/Espagne, précité à la note 22, point 67, Commission/France, précité à la note 21, point 44, et Commission/Belgique, précité à la note 21, point 44.


26 – Conclusions présentées dans les affaires Commission/Portugal, Commission/France et Commission/Belgique, précitées à la note 21, point 67, ainsi que dans les affaires Commission/Espagne et Commission/Royaume-Uni, précitées à la note 22, point 37.


27 – Schwarze, J., European Administrative Law, Ed. Sweet & Maxwell, 1e éd. révisée, Londres, 2006, p. 679.


28 – Conclusions présentées dans les affaires Commission/Espagne et Commission/Royaume-Uni, précitées à la note 22, point 37.


29 – Conclusions présentées dans l’affaire qui avait débouché sur les arrêts Commission/Espagne et Commission/Royaume-Uni, précités, point 36; voir, de même, mes conclusions dans l’affaire Commission/Allemagne, précitée à la note 3, points 58 et 59.


30 – Velasco San Pedro, L.A. y Sánchez Felipe, J.M., «La libertad de establecimiento de las sociedades en la UE. El Estado de la cuestión después de la SE», dans Revista de derecho de sociedades, numéro 19, 2002-2, p. 31.


31 – Arrêts Commission/Portugal et Commission/France, précités à la note 21, point 56. Voir aussi l’arrêt Commission/Pays-Bas, précité à la note 16, point 43.


32 – Conclusions dans l’affaire qui est débouchée sur les arrêts Commission/Espagne et Commission/Royaume-Uni, précités à la note 22, point 36.


33 – Voir par exemple, le récent arrêt du 17 juillet 2008, Commission/Espagne (C‑207/07, non encore publié au Recueil), point 31.


34 – D’après la Commission, qui n’a pas été démentie sur cet aspect par le gouvernement italien, la clause relative à l’exercice des droits spéciaux a été ajoutée dans les statuts des sociétés ENI Spa (énergie et pétrochimie), Telecom Italia (télécommunications), Enel Spa (électricité) et Finameccanica Spa (défense).


35 – Directive du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 96/92/CE - Déclarations concernant les opérations de déclassement et de gestion des déchets, JO L 176, p. 37.


36 – Directive du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 98/30/CE, JO L 176, p. 57.


37 – Directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive «cadre»), JO L 108, p. 33.), que la Commission cite avec la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive «service universel»), JO L 108, p. 51.


38 – Points a), b), c), d) et e) de l’article 2, paragraphe 1, du décret attaqué.


39 – Tridimas, T., The General Principles of EU Law, 2è éd., Ed. Oxford University Press, Oxford, 2006, p. 193; Galetta, D. U., Principio di proporzionalità e sindacato giurisdizionale nel diritto amministrativo, Giuffrè Editore, Milan, 1998, p. 103 et suiv.).


40 – Dans les deux cas, le ministre de l’économie a la faculté de réduire ce pourcentage par décret.


41 – Directive du Conseil du 24 juin 19988, pour la mise en œuvre de l’article 67 du traité, précitée.


42 – Arrêt du 16 mars 1999, Trummer et Mayer (C-222/97, Rec. p. I‑1661, point 21), et les arrêts précités à la note 21, Commission/France, points 36 et 37 et Commission/Royaume-Uni, points 39 et 40.


43 – Arrêts Commission/France, point 41; du 2 juin 2005, Commission/Italie (C-174/04, Rec. p. I-4933), points 30 et 31; et du 19 janvier 2006, Bouanich (C-265/04, Rec. p. I‑923), points 34 et 35.


44 – Je pars de l’idée communément acceptée que la proportionnalité englobe deux tests: celui de l’adéquation de la disposition à l’examen aux objectifs poursuivis et celui de la nécessité de cette disposition, que l’on a l’habitude d’appeler en droit communautaire celui de «la mesure la moins contraignante»; voir, en ce sens, Sarmiento Ramírez-Escudero, D., El control de proporcionalidad de la actividad administrativa, Ed. Tirant lo Blanch, Valence, 2004, p. 641 et suiv.


45 – Il est étonnant de vouloir faire cette observation, alors que, en droit italien, le principe de proportionnalité est généralement associé à celui de rationalité, d’après Fromont, M., Droit administratif des États européens, Thémis droit puf, París, 2006, p. 294.


46 – Article 3, paragraphe 2, en relation avec le 27e considérant de la directive gaz, et article 3, en combinaison avec le 26e considérant de la directive électricité; en outre, la directive 2002/22/CE aborde le service universel et les obligations qu’il implique ce qui constitue uniquement un secteur des services publics. Voir aussi Pießcalla, M., Golden Aktien aus EG rechtlicher Sicht – Eine Untersuchung staatlicher und privater Sonderrechte in Wirtschaftsgesellschaften unter besonderer Berücksichtigung der Kapitalverkehrsfreiheit, Ed. Dr. Kovac, Hambourg, 2006, p. 202.


47 – Protocole sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité, a introduit comme annexe au traité CE par le traité d’Amsterdam, point 2.


48 – Arrêt du 28 octobre 1975, Rutili, 36/75, Rec. p. 1219, points 26 et 27.


49 – Arrêt du 14 mars 2000, Église de scientologie et Scientology International (C‑54/99, Rec. p. I‑1335, points 19 à 23).


50 – Arrêts précités Commission/France, points 50 et 52, et du 13 mai 2003, Commission/Espagne, point 74.


51 – Arrêts du 12 septembre 2006, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas (C-196/04, Rec. p. I-7995, points 31 à 33), du 3 octobre 2006, Fidium Finanz (C-452/04, Rec. p. I-9521, points 34 et 44 à 49), du 12 décembre 2006, Test Claimants in Class IV of the ACT Group Litigation (C-374/04, Rec. p. I-11673, points 37 et 38), et du 17 juillet 2008, Comisión/España, précité à la note 22, point 35.


52 – Arrêts du 13 avril 2000, Baars (C-251/98, Rec. p. I-2787), point 22, du 21 novembre 2002, X et Y (C-436/00, Rec. p. I-10829), point 37, et Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, précité à la note 51, point 31.


53 – Articles 59, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2157/2001 du Conseil du 8 octobre 2001 relatif au statut de la société européenne (SE), JO L 294, p.1); 39, paragraphe 1, de le Troisième modification à la proposition de cinquième directive du Conseil fondée sur l’article 54 du traité CEE concernant la structure des sociétés anonymes et les pouvoirs et obligations de leurs organes [COM(1991) 372 fin]; à titre d’exemple des droits nationaux, voir aussi les articles 153 et 239 de la loi française n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales; les articles 179 (II), 182 (I), 193 (I) et 262 (I), n° 2, notamment, de la loi allemande sur les sociétés anonymes (Aktiengesetz), du 6 septembre 1965 (BGBl. I, p. 1089); les articles 2364 et 2368 à 2369 bis du code civil italien, ainsi que les articles 144, paragraphe 1, et 260, paragraphe 1, premier alinéa, du texte consolidé de la loi espagnole sur les sociétés anonymes, approuvé par le Real Decreto legislativo 1564/1989, du 22 décembre 1989.


54 – Il s’agit fondamentalement des textes suivants, dont j’omets la dénomination exacte pour ne pas alourdir exagérément cette note de bas de page, en me limitant à indiquer leur numéro et la référence de la publication au Journal officiel: la directive 68/151/CEE (JO L 65, p. 8); la directive 77/91/CEE (JO L 26, p. 1); la directive 78/855/CEE (JO L 295, p. 36 ); la directive 78/660/CEE (JO L 222, p. 11); la directive 82/891/CEE (JO L 378, p. 47), la directive 83/349/CEE (JO L 193, p. 1); la directive 84/253/CEE (JO L 126, p. 20); la directive 89/666/CEE (JO L 395 p. 36); la directive 89/667/CEE (JO L 395, p. 40); la directive 2004//25/CE (JO L 142, p. 12); la directive 2005/56/CE (JO L 310, p. 1); la directive 2007/36/CE (JO L 184, p. 17), et la directive 2007/63/CE (JO L 300, p. 47).


55 – Points 26 et suiv. du mémoire en défense.


56 – Goldschmidt, P.N., «Editorial – Golden Shares», dans Cahiers de droit européen, 2007, nº 3/4, p. 297. Weiss, M., «Staatlicher Schutz vor Investitionen nach dem Urteil zum VW Gesetz», en EWS, 2008, nº 1/2, p. 20, se prononce en revanche en faveur de la réciprocité.