Language of document : ECLI:EU:T:2018:73

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

7 février 2018 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque figurative CRABS – Enregistrement international antérieur de la marque figurative РАКОВЫЕ ШЕЙКИ – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑795/16,

Moscow Confectionery Factory « Krasnyiy oktyabr » OAO, établie à Moscou (Russie), représentée par Mes O. Spuhler, M. Geitz et J. Stock, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mmes A. Lukošiūtė et D. Walicka, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Dochirnie pidpryiemstvo Kondyterska korporatsiia « Roshen », établie à Kiev (Ukraine), représentée par Mes R. Žabolienė et I. Lukauskienė, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 11 août 2016 (affaire R 2507/2015-1), relative à une procédure d’opposition entre Moscow Confectionery Factory « Krasnyiy oktyabr » et Dochirnie pidpryiemstvo Kondyterska korporatsiia « Roshen »,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen (rapporteur), président, I. S. Forrester et E. Perillo, juges,

greffier : Mme X. Lopez Bancalari, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 9 novembre 2016,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 22 février 2017,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 20 février 2017,

à la suite de l’audience du 21 novembre 2017,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 26 septembre 2013, l’intervenante, Dochirnie pidpryiemstvo Kondyterska korporatsiia « Roshen », a présenté à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) une demande de protection dans l’Union européenne de l’enregistrement international no 1186110, en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        L’enregistrement international pour lequel la protection a été demandée est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels la protection a été demandée relèvent de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour cette classe, à la description suivante : « confiseries, caramels [bonbons] ».

4        Les couleurs rouge, jaune et blanc étaient revendiquées.

5        Les indications de l’enregistrement international prévues à l’article 152, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 (devenu article 190, paragraphe 1, du règlement 2017/1001) ont été publiées au Bulletin des marques communautaires no 242/2013, du 20 décembre 2013.

6        Le 4 mars 2014, la requérante, Joint-Stock Company « Krasnyiy oktyabr », a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à la demande de protection de l’enregistrement international pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001], sur la base de l’enregistrement international no 1102599 produisant ses effets en Bulgarie, au Benelux, en Allemagne, en Grèce, en Espagne, en France, en Croatie, en Italie, à Chypre, en Lettonie, en Lituanie, en Pologne, au Portugal, en Roumanie, en Slovaquie et au Royaume-Uni du signe figuratif suivant enregistré pour des produits relevant de la classe 30, à savoir des « bonbons » :

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8        Les couleurs rouge, blanc et noir étaient revendiquées.

9        L’opposition était fondée sur tous les produits désignés par le droit antérieur et dirigée contre tous les produits couverts par l’enregistrement international de l’intervenante.

10      Le 21 octobre 2015, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité. Elle a conclu que, indépendamment de l’identité des produits et de la similitude conceptuelle des images d’écrevisses, les différences visuelles et phonétiques entre les signes, en particulier au niveau de leurs éléments verbaux, étaient suffisantes pour compenser les similitudes et que, dès lors, il n’existait pas de risque de confusion.

11      Le 16 décembre 2015, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition.

12      Par décision du 11 août 2016 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté ce recours.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

14      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      La requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, qu’elle divise en trois branches : l’appréciation des signes en conflit, l’appréciation du caractère distinctif de la marque antérieure et l’appréciation du risque de confusion.

16      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

17      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

18      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

19      S’agissant de la détermination du public pertinent, il ressort du point 18 de la décision attaquée que la chambre de recours a considéré que le public pertinent se composait du grand public et que son niveau d’attention variait de faible, dans le cas de confiseries à bas prix s’adressant à la grande consommation, à moyen, dans le cas de confiseries de luxe. Par ailleurs, la chambre de recours a considéré, au point 19 de la décision attaquée, que les territoires pertinents pour l’appréciation globale du risque de confusion étaient la Bulgarie, le Benelux, l’Allemagne, la Grèce, l’Espagne, la France, la Croatie, l’Italie, Chypre, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, la Slovaquie et le Royaume-Uni.

20      Eu égard aux éléments du dossier, il y a lieu d’entériner cette définition du public pertinent, qui, au demeurant, n’est pas contestée par les parties.

21      Par ailleurs, il convient de rappeler que, en ce qui concerne l’appréciation du risque de confusion, le public ayant le niveau d’attention le moins élevé doit être pris en considération [voir arrêt du 15 juillet 2011, Ergo Versicherungsgruppe/OHMI – Société de développement et de recherche industrielle (ERGO), T‑220/09, non publié, EU:T:2011:392, point 21 et jurisprudence citée]. En l’espèce, le risque de confusion s’apprécie en considération d’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, mais dont le niveau d’attention est faible au regard des confiseries et des bonbons peu onéreux destinés à la grande consommation.

 Sur la comparaison des produits

22      S’agissant de la comparaison des produits, il ressort du point 21 de la décision attaquée que la chambre de recours a relevé que ceux-ci étaient identiques, dès lors, d’une part, que les « confiseries » du droit contesté étaient identiques aux « bonbons » du droit antérieur et, d’autre part, que les « caramels [bonbons] » du droit contesté étaient inclus dans les « bonbons » du droit antérieur et étaient donc également identiques.

23      Eu égard aux éléments du dossier, il y a lieu d’entériner cette appréciation de la comparaison des produits, qui, au demeurant, n’est pas contestée par les parties.

 Sur la comparaison des signes

24      La requérante fait valoir que les signes en conflit présentaient au moins un degré moyen de similitude. En l’espèce, la chambre de recours aurait dû considérer que la structure des signes était presque identique, dès lors qu’ils étaient tous les deux rectangulaires et comportaient plusieurs écrevisses représentées au centre des signes ainsi qu’une bordure constituée d’éléments figuratifs ou verbaux sur les côtés gauche et droit.

25      Or, premièrement, en adoptant une approche trop analytique qui a décortiqué les signes en conflit en pointant leurs différences jusque dans leurs moindres détails, la chambre de recours n’aurait pas correctement évalué leur impression d’ensemble. En particulier, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte du fait que le niveau d’attention des consommateurs pertinents quant aux produits en cause, à savoir le grand public, varierait de faible à moyen. Or, si le niveau d’attention du consommateur moyen est considéré comme faible, celui-ci ne se livrerait pas à un examen détaillé, mais se concentrerait sur l’impression d’ensemble.

26      Deuxièmement, la chambre de recours aurait présumé à tort que l’élément distinctif du signe contesté était l’élément verbal « crabs ». Elle aurait également omis de relever que, en l’espèce, les éléments figuratifs avaient un poids supérieur à celui des éléments verbaux du signe contesté dès lors que l’importance de l’élément verbal était affaiblie par sa taille et sa position et par le fait que l’élément figuratif était conceptuellement lié à l’élément verbal. La chambre de recours n’aurait pas non plus tenu compte du fait que le public pertinent, en raison de son niveau d’attention, ne faisait pas de distinction entre les notions de crabes et d’écrevisses qu’il associerait à des crustacés sans penser aux différences possibles. Le public présumerait que l’élément « crabs » dans le signe contesté serait une illustration ou une description des écrevisses représentées au centre de celui-ci. De surcroît, en raison de sa position centrale, ce serait l’élément figuratif représentant des écrevisses qui attirerait l’attention plutôt que l’élément verbal « crabs » qui fait partie du cadre. Le fait que le signe contesté utiliserait des écrevisses en association avec le mot « crabs » montrerait que le public pertinent confondrait les unes et les autres. Pour le public pertinent, ce serait la représentation des écrevisses au centre du signe contesté qui en constituerait l’élément distinctif. Il ne s’agirait pas d’un élément décoratif, mais de l’élément dominant du signe contesté. De même, la décision attaquée ne tiendrait pas compte du fait que le public pertinent ne chercherait pas à analyser si les écrevisses du signe contesté étaient représentées ou non sur des emballages de bonbons. En raison de son faible niveau d’attention, ce public percevrait uniquement que ces écrevisses étaient représentées au centre du signe contesté. Le consommateur moyen ne penserait pas au fond sur lesquels se trouvent les écrevisses. Quant au signe antérieur, la décision attaquée présumerait à juste titre que ses éléments verbaux ne seraient pas compris par la majorité du public pertinent et que l’élément distinctif de ce signe serait la représentation des écrevisses située en son centre.

27      Troisièmement, la structure des signes serait identique sur le plan visuel, dès lors que ces signes étaient constitués de représentations d’écrevisses placées au centre, qui en étaient les éléments distinctifs, et d’éléments placés à droite et à gauche de ces représentations qui donnaient l’impression de former un cadre. Le public pertinent, qui n’aurait que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des marques, se souviendrait de l’image imparfaite des écrevisses alignées verticalement au centre des signes en conflit et ne prêterait pas attention aux détails de ces écrevisses ou à leur alignement. Malgré des prétendues différences dans les degrés de stylisation, les signes produiraient une impression globale de symétrie et posséderaient un degré au moins moyen de similitude visuelle. Quant à la comparaison des signes sur le plan phonétique, la chambre de recours aurait eu raison d’observer que, pour la majorité du public pertinent, il ne serait pas possible de procéder à une telle comparaison. La chambre de recours prendrait toutefois à tort en considération le fait que seule une petite partie du public pertinent serait susceptible de prononcer les éléments verbaux de la marque antérieure et de relever des différences entre les signes.En outre, d’un point de vue conceptuel, les signes en conflit seraient identiques comme le relèverait la chambre de recours.

28      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

29      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

30      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

31      En l’espèce, au terme de son analyse de la comparaison des signes, la chambre de recours a considéré que, même si les signes en conflit contenaient des représentations d’écrevisses, ils présentaient plusieurs différences significatives, en particulier sur le plan visuel. Dès lors, la chambre de recours a conclu que les signes en conflit ne présentaient qu’« un faible degré de similitude » (voir point 33 de la décision attaquée).

32      À titre liminaire, il convient de rappeler que les signes en conflit ont été décrits de la manière suivante par la chambre de recours.

33      D’une part, au point 22 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé, tout d’abord, que le signe contesté représentait une étiquette composée d’un carré blanc orné de lignes ondulées jaunes et rouges sur ses côtés droit et gauche et surmonté d’un épais bandeau jaune incurvé. Ensuite, la chambre de recours a indiqué que, au milieu du carré blanc, étaient représentés une écrevisse rouge stylisée et plusieurs bonbons « dont chacun port[ait], sur son emballage, l’image de la même écrevisse rouge stylisée ». Enfin, la chambre de recours a souligné que, au-dessus de l’écrevisse et des bonbons enveloppés dans des emballages ornés d’écrevisses apparaissait l’élément verbal « crabs » écrit en grandes lettres rouges stylisées.

34      D’autre part, au point 23 de la décision attaquée, la chambre de recours a également indiqué que le signe antérieur se composait d’une étiquette rectangulaire contenant une image stylisée d’écrevisses représentées quatre fois suivant une ligne verticale, qu’il comportait l’expression « раковЫе шейки » et l’élément verbal « карамель », écrits en caractères cyrilliques en noir et répétés deux fois (leur translittération étant « rakovye šejki » et « karameľ »), qu’un sceau arrondi contenant différents éléments illisibles était représenté, des deux côtés du signe, deux fois sur la gauche et trois fois sur la droite, et que, du côté gauche du signe, certains mots étaient écrits à la verticale en lettres cyrilliques, dont la transcription était « kond », « f-ka » et « krasnyj octyabr » selon la description du signe figurant dans le certificat d’enregistrement.

35      Dans ce contexte, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas correctement évalué, d’une part, l’importance relative de l’élément verbal et des éléments figuratifs du signe contesté ainsi que, d’autre part, la structure des signes en conflit. La requérante soutient également que le résultat de la comparaison des signes sur les plans visuel, phonétique et conceptuel serait erroné et que la chambre de recours n’a pas correctement évalué l’impression d’ensemble des signes en conflit.

36      En premier lieu, comme elle l’avait déjà fait devant la chambre de recours, la requérante soutient que l’élément distinctif du signe contesté n’était pas l’élément verbal « crabs ».

37      Force est toutefois de relever que, pour les raisons invoquées au point 24 de la décision attaquée, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que l’élément le plus distinctif du signe contesté était l’élément verbal « crabs ». Premièrement, comme l’a relevé la chambre de recours, ce mot n’était pas descriptif des produits en cause, même pour la partie du public pertinent qui en comprenait la signification. Un crabe n’a aucun lien avec un bonbon. Deuxièmement, la chambre de recours a tout aussi correctement relevé que l’élément verbal « crabs » était écrit en grandes lettres rouges grasses et constituait le principal élément visuel du signe contesté, parce qu’il était placé de façon proéminente en son centre et qu’il était surélevé par rapport aux éléments figuratifs qu’il surplombait. Troisièmement, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que, du fait de leur emplacement au sein du signe contesté, de leur agencement et de leur taille significativement moindre que celle de l’élément verbal « crabs », les éléments figuratifs représentant une écrevisse et des bonbons enveloppés dans des emballages ornés d’écrevisses allaient être perçus comme ayant une finalité strictement décorative. Sur ce point, la chambre de recours pouvait légitimement relever que cela était d’autant plus vrai que la représentation de bonbons était dépourvue de caractère distinctif pour les produits pertinents.

38      De même, la chambre de recours était fondée à rappeler au point 25 de la décision attaquée qu’il ressortait de la jurisprudence que, lorsqu’une marque était composée à la fois d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers étaient, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en en citant le nom qu’en en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir, arrêt du 15 décembre 2009, Trubion Pharmaceuticals/OHMI – Merck (TRUBION), T‑412/08, non publié, EU:T:2009:507, point 45 et jurisprudence citée].

39      Ce principe trouvait bien à s’appliquer dans la présente affaire. En effet, pour les raisons exposées par la chambre de recours aux points 25 et 26 de la décision attaquée en réponse aux arguments présentés sur ce point par la requérante, il ne pouvait pas être considéré que les éléments figuratifs avaient la même importance, voire même plus d’importance, que l’élément verbal [voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, CEDC International/OHMI – Fabryka Wódek Polmos Łańcut (WISENT), T‑449/13, non publié, EU:T:2015:839, points 81 à 84, et du 30 novembre 2015, Hong Kong Group/OHMI – WE Brand (W E), T‑718/14, non publié, EU:T:2015:916, point 45]. Pour les mêmes raisons, la requérante ne peut être suivie quand elle affirme que l’importance de l’élément verbal était affaiblie par sa taille et que l’élément figuratif était conceptuellement lié à l’élément verbal pour se prévaloir une nouvelle fois de la jurisprudence précitée. En effet, cette affirmation ne correspond pas du tout à la description du signe contesté, où l’élément verbal « crabs » occupe une position centrale et est significativement plus grand que les éléments figuratifs et où ces éléments figuratifs représentent des écrevisses et non des crabes.

40      La requérante n’est donc pas fondée à alléguer que, dans le signe contesté, l’élément verbal « crabs » n’était pas l’élément le plus distinctif, mais qu’il était seulement descriptif des éléments figuratifs qui représentaient des écrevisses.

41      Dans le prolongement de ce qui précède, la requérante fait valoir que la chambre de recours aurait dû considérer que l’élément dominant du signe contesté était constitué par ses éléments figuratifs qui représentaient des écrevisses.

42      Sur ce point, contrairement à ce qu’affirme la requérante, rien ne permet de considérer que le public pertinent ne ferait pas la distinction entre les notions de crabes et d’écrevisses qu’il associerait toutes les deux à des crustacés sans penser aux différences possibles. Outre le fait qu’une telle affirmation n’est pas étayée par le moindre élément de preuve, il y a également lieu de relever qu’elle est contredite par plusieurs constatations faites par la chambre de recours au point 26 de la décision attaquée. Ainsi, pour la partie du public pertinent qui comprenait la signification de l’élément verbal « crabs » et était donc en mesure de l’examiner au regard des éléments figuratifs représentant des écrevisses, ledit élément verbal ne pouvait être perçu comme un élément rattachable aux éléments figuratifs. En tout état de cause, le seul fait que le crabe et l’écrevisse soient des crustacés ne saurait suffire à éliminer les différences qui existent entre ces deux animaux ou entre un crabe et un bonbon revêtant une représentation d’écrevisse sur l’emballage quand il s’agit d’apprécier quels sont les éléments distinctifs et dominants des signes en conflit du point du vue du public pertinent. De même, pour la partie du public pertinent qui ne comprenait pas la signification de l’élément verbal « crabs », il n’en demeurait pas moins que, en principe, cet élément restait plus distinctif que les éléments figuratifs pour les raisons exposées au point 39 ci-dessus.

43      La requérante n’est donc pas fondée à alléguer que, dans le signe contesté, les éléments figuratifs représentant des écrevisses constituaient l’élément dominant.

44      En outre, la requérante reproche à la chambre de recours de n’avoir pas tenu compte du fait que le public pertinent ne chercherait pas à analyser si les écrevisses du signe contesté étaient représentées ou non sur des emballages de bonbons.

45      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, au point 24 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que le signe contesté comportait la représentation graphique de plusieurs bonbons enveloppés dans des emballages ornés d’une écrevisse. En relevant cette caractéristique, la chambre de recours n’a pas pour autant commis une erreur dans l’identification de l’élément distinctif du signe contesté comme le fait valoir la requérante. En effet, ainsi qu’il a été exposé aux points 37 à 40 ci-dessus, l’élément le plus distinctif du signe contesté était l’élément verbal « crabs » et non les éléments figuratifs représentant des écrevisses, que le public pertinent soit ou non à même de distinguer entre l’écrevisse rouge stylisée située sur la gauche au centre du signe contesté ou les quatre autres écrevisses figurant sur les emballages des deux bonbons situés sur la droite au centre dudit signe. La référence faite par la requérante à la décision de la première chambre de recours du 11 août 2016 dans l’affaire R 2419/2015-1 n’est pas plus pertinente, dès lors que le signe contesté qui faisait l’objet de cette décision, même s’il était lui-même la représentation d’un emballage de bonbon, ne comportait pas d’élément figuratif reproduisant des emballages de bonbons ornés d’écrevisses.

46      La requérante n’est donc pas fondée à alléguer que la chambre de recours a commis une erreur dans l’identification de l’élément distinctif du signe contesté en relevant que celui-ci comportait des emballages ornés d’une écrevisse.

47      Par ailleurs, et ce point n’est pas contesté par les parties, il convient de relever que la chambre de recours a considéré que, comme ses éléments verbaux n’étaient pas compris par la majorité du public pertinent, l’élément le plus distinctif du signe antérieur était la représentation des écrevisses située en son centre (voir décision attaquée, points 27 à 29).

48      Pour autant, contrairement à ce que fait valoir la requérante, il ne suffirait pas d’alléguer que la structure des signes était « presque identique », parce qu’ils étaient tous les deux rectangulaires et comportaient plusieurs écrevisses représentées au centre ainsi qu’une bordure constituée d’éléments figuratifs ou verbaux sur les côtés, pour affirmer que la chambre de recours n’était pas en droit de considérer que l’élément le plus distinctif du signe contesté n’était pas ladite représentation d’écrevisses, mais l’élément verbal « crabs ».

49      En deuxième lieu, au titre précisément de son appréciation de la comparaison des signes en conflit dans la présente affaire, la chambre de recours est arrivée à la conclusion que lesdits signes ne présentaient qu’un « faible degré de similitude sur le plan visuel » pour les raisons suivantes (voir décision attaquée, point 29).

50      Tout d’abord, la chambre de recours a relevé que les signes en conflit étaient similaires dans la mesure où ils contenaient tous les deux des représentations graphiques d’écrevisses. Cependant, la chambre de recours a immédiatement précisé que, alors que l’élément verbal « crabs » constituait l’élément le plus distinctif du signe contesté, l’élément le plus distinctif du signe antérieur était, pour la partie non russophone du public pertinent, laquelle constituait la grande majorité de ce public, l’ensemble formé par les quatre représentations d’écrevisses.

51      Une telle appréciation est fondée comme cela ressort des points 36 à 47 ci-dessus.

52      Par ailleurs, la chambre de recours a relevé que les signes en conflit présentaient une structure significativement différente à plusieurs égards :

–        les quatre écrevisses étaient agencées dans le signe antérieur suivant une ligne verticale, alors que les représentations graphiques d’une écrevisse et de bonbons enveloppés dans des emballages ornés d’écrevisses du signe contesté donnaient l’impression de n’avoir qu’une finalité décorative ;

–        le signe antérieur se composait de trois lignes verticales, à savoir une ligne verticale proéminente au milieu du signe montrant des représentations d’écrevisses et deux lignes verticales nettement plus petites formées d’éléments figuratifs et verbaux supplémentaires, tandis que le signe contesté ne comportait pas de ligne verticale centrale proéminente ;

–        à la différence du signe antérieur, les représentations d’écrevisses du signe contesté ne donnaient pas une impression d’ordre, mais évoquaient plutôt une impression d’éparpillement aléatoire ;

–        l’élément individuel le plus grand dans le signe contesté était le mot « crabs », écrit en grandes lettres dans la partie supérieure du signe et nettement plus grand que les représentations d’une écrevisse et de bonbons enveloppés dans des emballages ornés d’écrevisses, alors que les éléments individuels les plus grands dans le signe antérieur étaient les représentations d’écrevisses ;

–        les représentations d’écrevisses figurant dans les signes respectifs présentaient des différences, dès lors que, dans le signe contesté, la représentation était beaucoup plus stylisée et simplifiée que dans le signe antérieur, dans lequel les écrevisses étaient présentées de manière plus réaliste et naturaliste ;

–        les signes en conflit diffèrent également par leur expression « раковЫе шейки » et leur élément verbal « карамель » dans le signe antérieur et l’élément verbal « crabs » dans le signe contesté et par leurs autres éléments figuratifs (les sceaux dans la marque antérieure et les bonbons et les lignes ondulées dans le signe contesté).

53      Toutes ces appréciations reposent sur l’examen des signes en conflit sur le plan visuel et permettent effectivement, tout particulièrement quand elles sont prises ensemble, d’étayer la conclusion qui en est tirée par la chambre de recours, à savoir les signes en conflit présentaient une structure significativement différente du point de vue du public pertinent.

54      La requérante ne peut donc être suivie quand elle fait valoir que la structure des signes était identique sur le plan visuel, au motif qu’ils étaient tous les deux constitués de représentations d’écrevisses placées au centre, qui en seraient les éléments distinctifs, et d’éléments placés à droite et à gauche de ces représentations qui donnaient l’impression de former un cadre. De même, ses affirmations selon lesquelles, d’une part, le public pertinent ne se souviendrait que de l’image imparfaite des écrevisses alignées verticalement au centre des signes en conflit et ne prêterait pas attention aux détails de ces écrevisses ou à leur alignement, et, d’autre part, les signes produiraient une impression globale de symétrie et posséderaient un degré au moins moyen de similitude visuelle, ne correspondent manifestement pas au résultat précité de la comparaison des signes sur le plan visuel.

55      En considération de telles observations, la chambre de recours était bien en droit de constater que les signes en conflit ne présentaient qu’un faible degré de similitude sur le plan visuel.

56      En ce qui concerne la comparaison des signes sur le plan phonétique, il n’est pas contesté que les signes en conflit soit ne donnaient pas lieu à une telle comparaison, parce que leurs éléments verbaux étaient incompréhensibles et illisibles pour les consommateurs pertinents, tels ceux qui ne pouvaient pas prononcer les éléments verbaux du signe antérieur écrits en caractères cyrilliques, soit ne pouvaient être reconnus que par les consommateurs qui parlaient le bulgare ou qui avaient une connaissance du russe, auquel cas les signes en conflit étaient différents sur le plan phonétique (voir décision attaquée, points 30 et 31).

57      La requérante fait toutefois valoir que la chambre de recours aurait à tort pris en considération le fait que seule une partie du public pertinent était susceptible de prononcer les éléments verbaux du signe antérieur et de relever des différences entre les signes.

58      Une telle affirmation, dépourvue de toute explication sur la nature et la portée de l’erreur qui aurait été commise par la chambre de recours, est sans incidence sur le raisonnement exposé par la chambre de recours dans la décision attaquée. En effet, la chambre de recours a relevé à juste titre que les signes en conflit étaient soit différents pour le public capable de lire l’alphabet cyrillique, soit incomparables dans la mesure où le public restant n’était pas en mesure de prononcer l’expression « раковЫе шейки ».

59      En ce qui concerne la comparaison des signes sur le plan conceptuel, c’est également à juste titre que la chambre de recours a considéré au point 32 de la décision attaquée que les signes étaient similaires sur le plan conceptuel, dans la mesure où ils contenaient tous les deux des représentations d’écrevisses et que leurs éléments verbaux étaient dépourvus de signification pour les parties du public pertinent qui ne comprenaient pas le russe ou le bulgare afin de pouvoir saisir la signification de l’expression « раковЫе шейки » ou ne comprenaient pas l’anglais ou le français afin de pouvoir saisir la signification de l’élément verbal « crabs ».

60      Toutefois, contrairement à ce que fait valoir la requérante, il ne saurait pour autant être considéré que la chambre de recours a estimé que les signes en conflit étaient identiques sur le plan conceptuel. Il y a lieu sur ce point de s’en tenir au contenu de la décision attaquée, dans laquelle la chambre de recours n’a relevé sur ce plan que la similitude et non l’identité des signes en conflit.

61      En dernier lieu, force est de constater que, dans son analyse de l’impression d’ensemble transmise au public pertinent par des marques complexes, qui peuvent chacune être dominée par un ou plusieurs de ses composants, la chambre de recours n’a pas procédé à une approche « trop analytique » comme le fait valoir la requérante, mais a bien suivi les principes applicables à une telle analyse (voir points 21, 29 et 30 ci-dessus).

62      À cet égard, la requérante ne peut se contenter d’alléguer que, parce que son niveau d’attention serait faible, le public pertinent ne serait pas en mesure d’identifier les différences constatées entre les signes en conflit dans la présente affaire. En effet, aucun élément de son argumentation ne permet d’étayer une telle allégation et de remettre en cause les constations effectuées par la chambre de recours dans la décision attaquée à l’issue de son examen des signes en conflit du point de vue du public pertinent.

63      En conclusion, la chambre de recours était en droit de conclure que, lorsqu’ils étaient comparés dans leur ensemble, les signes en conflit ne présentaient qu’un faible degré de similitude. Les arguments de la requérante visant à remettre en cause cette appréciation doivent donc être rejetés.

 Sur le caractère distinctif du droit antérieur

64      La requérante fait valoir que la chambre de recours aurait dû considérer que l’image des écrevisses rouges possédait un caractère distinctif élevé pour les produits en cause. La chambre de recours aurait également dû constater le caractère distinctif de la marque antérieure sur la base des documents présentés par l’intervenante à l’EUIPO le 17 juin 2015, lesquels établiraient l’ancienneté de l’usage de la marque antérieure. Enregistrée en 2011, la marque antérieure aurait été utilisée de manière continue depuis, ce qui suffirait à démontrer son caractère distinctif élevé. Les documents fournis par l’intervenante indiqueraient également que l’expression « раковЫе шейки » était utilisée par plusieurs fabricants de bonbons. Cet élément ainsi que l’élément verbal « crabs » seraient donc dépourvus de caractère distinctif pour de tels produits. À cet égard, par lettre du 1er septembre 2017, sur laquelle les autres parties ont pu présenter leurs observations, respectivement le 6 octobre 2017 pour l’EUIPO et les 9 octobre et 14 novembre 2017 pour l’intervenante, la requérante a indiqué au Tribunal que la marque de l’Union européenne figurative enregistrée le 7 juillet 2017 sous le numéro 15948185, dont elle était titulaire et qui désignait des produits compris dans la classe 30, confirmait que l’élément constitué d’une écrevisse dans le droit antérieur était en soi distinctif aux yeux des milieux commerciaux visés.

65      L’EUIPO fait observer que la chambre de recours a considéré à juste titre qu’une marque ne possédait pas un degré de caractère distinctif plus élevé au seul motif qu’elle n’était pas conceptuellement liée aux produits pertinents. En ce qui concerne le prétendu usage de longue durée de la marque antérieure, la chambre de recours a considéré que les éléments fournis, qui concernaient la Russie, l’Ukraine et la Biélorussie, ne concernaient pas les territoires pertinents pour l’analyse.

66      L’intervenante fait valoir que la requérante n’a pas fourni de preuves suffisantes pour démontrer le prétendu caractère distinctif accru de la marque antérieure. Pour autant, même si elle est en général d’accord avec la décision attaquée et n’est pas fondée à la contester, l’intervenante considère toujours que la marque antérieure possède un caractère distinctif faible. L’expression « раковЫе шейки » et l’élément visuel représentant une écrevisse sur des bonbons seraient dépourvus de caractère distinctif, parce qu’ils seraient utilisés continuellement sous diverses formes depuis le XIXe siècle et l’invention de ces bonbons par M. Alexei Abrikosov, le propriétaire de la plus grande fabrique de confiseries de Russie. La requérante ne serait pas la seule à fabriquer ces bonbons et ne pourrait donc pas revendiquer le caractère distinctif intrinsèque ou accru de sa marque. La chambre de recours aurait conclu à tort que les territoires de la Russie, de la Biélorussie et de l’Ukraine n’auraient aucun rapport avec les territoires pertinents pour l’analyse puisque les éléments de preuves fournis à cet égard portaient sur la période soviétique, période pendant laquelle la Lituanie, la Lettonie et même la Bulgarie étaient étroitement liées à l’Union soviétique.

67      Ainsi qu’il découle du considérant 8 du règlement no 207/2009, l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs, et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre [voir arrêt du 24 novembre 2016, CG/EUIPO – Perry Ellis International Group (P PRO PLAYER), T‑349/15, non publié, EU:T:2016:677, point 66 et la jurisprudence citée].

68      En l’espèce, au point 36 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les preuves déposées au cours de la procédure d’opposition en ce qui concernait le prétendu caractère distinctif faible de l’expression « раковЫе шейки », lesquelles sont invoquées par la requérante pour démontrer le caractère distinctif élevé du droit antérieur, ne concernaient pas les territoires pertinents pour l’appréciation du risque de confusion (à savoir la Bulgarie, le Benelux, l’Allemagne, la Grèce, l’Espagne, la France, la Croatie, l’Italie, Chypre, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, la Slovaquie et le Royaume-Uni), mais des territoires extérieurs à l’Union européenne (à savoir la Russie, la Biélorussie et l’Ukraine). De telles preuves n’avaient donc pas à être prises en considération au titre de l’appréciation du caractère distinctif acquis par le droit antérieur au sein des différents États membres territoires désignés par cet enregistrement international, à supposer même qu’une différence puisse être faite entre certains de ces États membres en considération de leur histoire au cours du XXe siècle.

69      Le même raisonnement vaut pour les preuves déposées par l’intervenante.

70      En conséquence, en l’absence de tout élément pertinent dans le dossier à même d’établir le caractère distinctif élevé du droit antérieur, la chambre de recours était en droit de conclure au point 38 de la décision attaquée, que cette appréciation reposerait sur son caractère distinctif intrinsèque. En effet, le signe antérieur n’étant ni descriptif ni allusif des produits en cause, il possédait un degré normal de caractère distinctif intrinsèque.

71      Les arguments de la requérante visant à remettre en cause cette appréciation doivent donc être rejetés.

72      Il n’y a pas lieu à cet égard de se prononcer sur les éléments communiqués en cours d’instance dans la lettre de la requérante du 1er septembre 2017, qui concernent une marque de l’Union européenne enregistrée après l’adoption de la décision attaquée. En effet, outre le fait que ladite marque, dont l’intervenante est titulaire, fait actuellement l’objet d’une procédure d’annulation introduite par la requérante comme celle-ci a pu l’indiquer au Tribunal dans ses observations du 14 novembre 2017, il y a lieu de rappeler que, si le Tribunal apprécie la légalité de la décision de la chambre de recours en contrôlant l’application du droit de l’Union effectuée par celle-ci eu égard, notamment, aux éléments de fait qui ont été soumis à ladite chambre, il ne saurait, en revanche, effectuer un tel contrôle en prenant en considération des éléments de fait nouvellement produits devant lui (voir, en ce sens, arrêt du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, EU:C:2007:162, point 54 et jurisprudence citée).

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

73      La requérante fait valoir que la chambre de recours a conclu, à tort, à l’absence de risque direct ou indirect de confusion.

74      D’une part, la requérante soutient que, compte tenu de l’identité des produits en cause, du degré au moins moyen de similitude entre les signes en conflit, de leur identité sur le plan conceptuel et du caractère distinctif au moins normal du droit antérieur, la chambre de recours n’aurait pas correctement apprécié l’existence d’un risque de confusion entre les droits en conflit. En effet, le droit contesté copierait la structure du droit antérieur en se contentant de disposer autrement les représentations d’écrevisses placées au centre du signe. En raison du faible niveau d’attention du public pertinent et du fait que les produits en cause seraient habituellement achetés à vue, il existerait ainsi un risque de confusion direct entre les droits en conflit. De surcroît, l’appréciation de l’absence de risque de confusion par la chambre de recours serait contradictoire, dès lors qu’elle aurait relevé que tous les facteurs nécessaires à l’établissement d’un risque de confusion – similitude entre les signes en conflit, similitude entre les produits couverts et caractère distinctif du droit antérieur – étaient réunis, sans pourtant conclure à l’existence d’un tel risque. En outre, même si les différences entre les signes en conflit l’emportaient sur leurs similitudes, les signes n’en demeureraient pas moins similaires, et, comme les produits en cause sont identiques, même un degré très faible de similitude serait suffisant pour établir un risque de confusion.

75      D’autre part, la requérante allègue également que la chambre de recours n’a pas pris en considération l’existence d’un risque de confusion indirect entre les droits en conflit.

76      En effet, compte tenu de l’usage ancien de la marque antérieure, non contesté par les parties, de l’identité des produits couverts, du niveau du caractère distinctif de la marque antérieure, de l’identité des signes sur le plan conceptuel et de la similitude au moins moyenne entre ceux-ci, le public pertinent présumerait automatiquement qu’il existe des liens juridiques ou économiques entre les parties à la procédure d’opposition. Par ailleurs, la requérante fait valoir que, même s’il devait percevoir les différences entre les signes en conflit signalées dans la décision attaquée, le public visé pensera que la marque contestée est une simple modernisation ou une variante ludique de la marque antérieure, en particulier s’il relève l’alignement vertical asymétrique des trois ou quatre écrevisses au centre du signe.

77      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

78      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

79      En l’espèce, ainsi que l’a souligné à juste titre la chambre de recours au point 43 de la décision attaquée, malgré l’identité des produits en conflit et le faible niveau d’attention dont le public pertinent fait preuve à l’égard de certains de ces produits, il n’existait pas de risque de confusion. En effet, comme l’a relevé la chambre de recours, les signes en conflit produisaient une impression d’ensemble significativement différente sur le public pertinent.

80      Ainsi, la requérante ne peut ignorer que, à la différence du droit antérieur, les représentations d’une écrevisse et de bonbons enveloppés dans des emballages ornés d’une écrevisse du droit demandé étaient perçues comme ayant des finalités strictement décoratives.

81      De même, la requérante ne peut valablement contester que « l’élément le plus distinctif du signe contesté [était] le mot “crabs”, qui n’a[vait] pas d’équivalent dans le signe antérieur », que « les signes en conflit différ[aient] de manière significative par leur structure et composition d’ensemble (agencement et taille des écrevisses représentées différents, emplacement et taille des éléments verbaux par rapport aux éléments figuratifs différents, éléments figuratifs supplémentaires différents) ainsi que par leur combinaison de couleurs (blanc, rouge et noir contre blanc, rouge et jaune) » ; que « le mot “crabs” [était] écrit en grandes lettres dans la partie supérieure du signe contesté », que ce mot « [était] nettement plus grand que les représentations d’une écrevisse et de […] bonbons enveloppés dans des emballages ornés d’une écrevisse », « [a]lors que, dans le signe antérieur, les éléments individuels les plus grands [étaient] les représentations d’écrevisses », et que, « [a]lors que le signe antérieur évoqu[ait] une impression d’ordre et de symétrie, le signe contesté véhiculait une impression plus dynamique et irrégulière ». Dès lors, la chambre de recours était bien en droit de considérer que le signe contesté se distinguait aisément, sur le plan visuel, du signe antérieur.

82      En outre, comme cela a été noté par la chambre de recours, les signes en conflit n’étaient pas similaires sur le plan phonétique, dès lors que, pour une partie du public pertinent, ils étaient différents sur le plan phonétique et que, pour l’autre partie de ce public, il n’était pas possible d’opérer une comparaison phonétique. Par ailleurs, c’est tout autant à juste titre que la chambre de recours a relevé que la similitude conceptuelle se limitait à la présence de la représentation d’écrevisses dans les deux signes.

83      En conséquence, compte tenu des considérations qui précèdent, la chambre de recours pouvait bien conclure, au point 44 de la décision attaquée, que les différences existant entre les signes, en particulier les différences visuelles clairement identifiables concernant leur structure et l’impression d’ensemble que les signes produisaient l’emportaient sur leurs similitudes et que, en conséquence, il n’existait pas de risque de confusion sur le territoire pertinent, même pour des produits identiques.

84      Cette conclusion n’est pas remise en cause par les allégations faites par la requérante aux points 74 et 75 ci-dessus qui ne tiennent pas compte du résultat de l’appréciation globale du risque de confusion, qu’il s’agisse notamment de la comparaison des signes ou du caractère distinctif du droit antérieur.

85      Dès lors, il y a lieu de rejeter le moyen pris de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 comme non fondé.

86      Le recours doit donc être rejeté.

 Sur les dépens

87      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Moscow Confectionery Factory « Krasnyiy oktyabr » OAO est condamnée aux dépens.

Frimodt Nielsen

Forrester

Perillo

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 février 2018.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.