Language of document : ECLI:EU:C:2018:98

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

22 février 2018 (*)

« Manquement d’État – Directive 91/271/CEE – Traitement des eaux urbaines résiduaires – Arrêt de la Cour constatant un manquement – Inexécution – Article 260, paragraphe 2, TFUE – Sanctions pécuniaires – Somme forfaitaire – Astreinte »

Dans l’affaire C‑328/16,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 260, paragraphe 2, TFUE, introduit le 10 juin 2016,

Commission européenne, représentée par MM. G. Zavvos, E. Manhaeve et D. Triantafyllou, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République hellénique, représentée par Mme E. Skandalou, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, (rapporteur), président de chambre, MM. J. Malenovský, M. Safjan, D. Šváby et M. Vilaras, juges,

avocat général : M. N. Wahl,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 juin 2017,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour :

–        de constater que, en n’ayant pas pris toutes les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 260, paragraphe 1, TFUE ;

–        d’enjoindre à la République hellénique de verser à la Commission l’astreinte proposée d’un montant de 34 974 euros par jour de retard dans l’exécution de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), à compter du jour où sera rendu l’arrêt dans la présente affaire jusqu’au jour où sera exécuté l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385) ;

–        d’enjoindre à la République hellénique de verser à la Commission la somme forfaitaire journalière de 3 828 euros, à compter du jour du prononcé de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), jusqu’au jour où sera rendu l’arrêt dans la présente affaire ou jusqu’au jour où sera exécuté l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), s’il l’est auparavant, et

–        de condamner la République hellénique aux dépens.

 Le cadre juridique

2        Aux termes de son article 1er, la directive 91/271/CEE du Conseil, du 21 mai 1991, relative au traitement des eaux urbaines résiduaires (JO 1991, L 135, p. 40), telle que modifiée par la directive 98/15/CE de la Commission, du 27 février 1998 (JO 1998, L 67, p. 29) (ci‑après la « directive 91/271 »), concerne la collecte, le traitement et le rejet des eaux urbaines résiduaires ainsi que le traitement et le rejet des eaux usées provenant de certains secteurs industriels. Elle vise à protéger l’environnement contre une détérioration due au rejet des eaux urbaines résiduaires.

3        L’article 2 de cette directive définit, à son point 1, les « eaux urbaines résiduaires » comme étant « les eaux ménagères usées ou le mélange des eaux ménagères usées avec des eaux industrielles usées et/ou des eaux de ruissellement ». Cet article définit également, à son point 4, l’« agglomération »comme étant une zone dans laquelle la population et/ou les activités économiques sont suffisamment concentrées pour qu’il soit possible de collecter les eaux urbaines résiduaires pour les acheminer vers une station d’épuration ou un point de rejet final et, à son point 6, l’équivalent habitant (ci‑après l’« EH ») comme étant « la charge organique biodégradable ayant une demande biochimique d’oxygène en cinq jours (DB05) de 60 grammes d’oxygène par jour ». Au point 8 dudit article, le « traitement secondaire » est défini comme étant « le traitement des eaux urbaines résiduaires par un procédé comprenant généralement un traitement biologique avec décantation secondaire ou par un autre procédé permettant de respecter les conditions du tableau 1 de l’annexe I ».

4        Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, de ladite directive :

« Les États membres veillent à ce que toutes les agglomérations soient équipées de systèmes de collecte des eaux urbaines résiduaires [...]

Pour les rejets d’eaux urbaines résiduaires dans des eaux réceptrices considérées comme des “zones sensibles”, telles que définies à l’article 5, les États membres veillent à ce que des systèmes de collecte soient installés au plus tard le 31 décembre 1998 pour les agglomérations dont l’EH est supérieur à 10 000.

Lorsque l’installation d’un système de collecte ne se justifie pas, soit parce qu’il ne présenterait pas d’intérêt pour l’environnement, soit parce que son coût serait excessif, des systèmes individuels ou d’autres systèmes appropriés assurant un niveau identique de protection de l’environnement sont utilisés. »

5        Les règles générales applicables aux eaux urbaines résiduaires figurent à l’article 4 de cette même directive, qui dispose, à son paragraphe 1 :

« Les États membres veillent à ce que les eaux urbaines résiduaires qui pénètrent dans les systèmes de collecte soient, avant d’être rejetées, soumises à un traitement secondaire ou à un traitement équivalent selon les modalités suivantes :

–        au plus tard le 31 décembre 2000 pour tous les rejets provenant d’agglomérations ayant un EH de plus de 15 000,

[...] »

6        L’article 5, paragraphes 1 et 2, de la directive 91/271 prévoit :

« 1.      Aux fins du paragraphe 2, les États membres identifient, pour le 31 décembre 1993, les zones sensibles sur la base des critères définis à l’annexe II.

2.      Les États membres veillent à ce que les eaux urbaines résiduaires qui entrent dans les systèmes de collecte fassent l’objet, avant d’être rejetées dans des zones sensibles, d’un traitement plus rigoureux que celui qui est décrit à l’article 4, et ce au plus tard le 31 décembre 1998 pour tous les rejets provenant d’agglomérations ayant un EH de plus de 10 000. »

 L’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385)

7        Dans son arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), la Cour a jugé que, en ne prenant pas les mesures nécessaires pour l’installation d’un système de collecte des eaux urbaines résiduaires de la région de Thriasio Pedio et en ne soumettant pas à un traitement plus rigoureux que le traitement secondaire les eaux urbaines résiduaires de ladite région avant qu’elles ne soient rejetées dans la zone sensible du golfe d’Éleusis, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, et de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 91/271.

 La procédure précontentieuse et la procédure devant la Cour

8        Dans le cadre du contrôle de l’exécution de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), les services de la Commission ont demandé aux autorités grecques, par lettre de 6 août 2004, des informations sur les mesures prises aux fins de l’exécution de cet arrêt.

9        Par lettre du 14 juin 2005, ces autorités ont transmis aux services de la Commission un calendrier concernant l’exécution des travaux nécessaires aux fins de se mettre en conformité avec ledit arrêt. Selon ce calendrier, le système de collecte des eaux urbaines résiduaires de la région de Thriasio Pedio devait être mis en service le 20 juin 2009.

10      Par la lettre de mise en demeure du 10 avril 2006, la Commission a indiqué aux autorités grecques que la mise en conformité avec les exigences de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), n’avait pas encore été réalisée.

11      Par plusieurs courriers en réponse, les autorités grecques ont mis l’accent sur la date limite prévue dans les décisions de la Commission approuvant le cofinancement, par le Fonds de cohésion, des projets destinés à assurer cette mise en conformité, à savoir le 31 décembre 2009. En particulier, dans leur réponse du 29 juin 2006, les autorités grecques ont affirmé que ce délai serait respecté en dépit des retards constatés. Par ailleurs, les autorités grecques ont informé la Commission du fait qu’un recours en référé formé contre le résultat d’un appel d’offres qu’elles avaient lancé dans ce contexte était susceptible d’entraîner des retards.

12      La République hellénique a considéré que l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), devait être exécuté par le biais de la réalisation de différents projets :

–        la création d’un centre de traitement des eaux urbaines résiduaires (ci‑après la « station d’épuration ») ;

–        la construction de canalisations principales pour le réseau des eaux urbaines résiduaires (ci‑après le « réseau principal ») ;

–        la construction de conduites pour le réseau des eaux urbaines résiduaires (ci‑après le « réseau secondaire ») ;

–        le raccordement des différentes habitations et industries de la région de Thriasio Pedio, plus particulièrement les agglomérations d’Aspropyrgos, d’Élefsina, de Mandra et de Magoula, au réseau des eaux urbaines résiduaires (ci‑après le « réseau tertiaire »).

13      Dans leurs réponses ultérieures, les autorités grecques ont informé la Commission que les travaux de construction du réseau principal se poursuivaient avec des retards dus à des difficultés techniques et que les travaux de construction du réseau secondaire avaient subi un retard en raison d’un recours formé devant le Symvoulio tis Epikrateias (Conseil d’État, Grèce).

14      Invoquant un certain nombre de difficultés juridiques et techniques ayant freiné l’avancement des travaux de mise en conformité, les autorités grecques ont demandé une prolongation du délai fixé dans les décisions de cofinancement de ceux‑ci et ont joint, à cette demande, un nouveau calendrier de réalisation de ces travaux. Selon ce calendrier, les travaux de construction du réseau principal et de la station d’épuration devaient être achevés le 31 juillet 2010 et les travaux de construction du réseau secondaire le 1er août 2010.

15      La Commission a adressé à la République hellénique, le 2 février 2009, un avis motivé et, le 7 mai 2010, une lettre de mise en demeure complémentaire.

16      Par plusieurs courriers en réponse et au cours de réunions, entre les mois de juillet 2010 et de février 2015, les autorités grecques ont informé la Commission de l’évolution de la situation.

17      Ainsi, dans un courrier du 27 novembre 2012, les autorités grecques ont informé la Commission que la station d’épuration fonctionnait, dans le cadre d’une phase expérimentale, depuis le 27 juillet 2012 et, de manière opérationnelle, depuis le 27  novembre 2012. En revanche, les réseaux secondaire et tertiaire n’étaient pas encore achevés, même si le premier de ces réseaux était pratiquement terminé, à l’exception d’une partie de celui‑ci desservant l’agglomération d’Élefsina, à savoir le secteur de Kato Élefsina.

18      Quant au réseau tertiaire, les autorités grecques ont, entre les mois de mars 2013 et d’août 2015, régulièrement informé la Commission du fait que, à la suite de difficultés d’ordre interne, le taux de collecte des eaux urbaines résiduaires n’avait pas atteint un niveau satisfaisant, seuls 28 % de celles‑ci étant recueillies.

19      La Commission estime, au moment de l’introduction du présent recours, que, bien que douze ans se soient écoulés depuis le prononcé de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), celui‑ci n’a pas encore été pleinement exécuté par la République hellénique.

20      Par ailleurs, la Commission n’aurait reçu des autorités nationales compétentes aucun calendrier qui serait fiable, permettant d’estimer la date à partir de laquelle il pourrait y avoir un progrès réel. Outre le réseau tertiaire, le réseau secondaire n’aurait pas non plus été achevé, notamment s’agissant de la partie de celui‑ci desservant le secteur de Kato Élefsina, dans l’agglomération d’Élefsina. Selon la Commission, les découvertes archéologiques invoquées par la République hellénique ne peuvent être qualifiées de « cas de force majeure » justifiant un tel retard dans l’exécution des travaux.

21      La Commission fait observer que, hormis la réponse des autorités grecques en date du 27 novembre 2012, elle n’a reçu aucune donnée prouvant que les eaux urbaines résiduaires qui ont été collectées ont été soumises à un traitement plus rigoureux que le traitement secondaire. Or, pour établir le caractère suffisant du traitement des eaux résiduaires, les autorités grecques auraient dû prouver le bon fonctionnement de la station d’épuration sur une période de douze mois, au moyen de prélèvements d’échantillons effectués conformément à l’annexe I, D, de la directive 91/271, indiquant un pourcentage de réduction de la DBO5 et de la DCO conforme aux prescriptions de cette directive en ce qui concerne le traitement secondaire et, s’agissant du traitement tertiaire, un pourcentage suffisant de réduction de l’azote conformément à l’annexe I, tableau 2, de ladite directive.

22      Dans ces conditions, la Commission, considérant que la mise en conformité avec l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), faisait encore défaut, a introduit le présent recours.

 Sur le manquement

 Argumentation des parties

23      La Commission observe que la République hellénique devait prendre, au plus tard le 31 décembre 1998, les mesures nécessaires pour que les eaux urbaines résiduaires de la région de Thriasio Pedio soient collectées et soumises à un traitement conforme à l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, et à l’article 5, paragraphe 2, de la directive 91/271, avant d’être rejetées dans la zone sensible du golfe d’Éleusis.

24      Dans son mémoire en défense, la République hellénique soutient que l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), a été exécuté et que, partant, le recours de la Commission est dénué de fondement.

25      À cet égard, cet État membre fait valoir que le traitement des eaux urbaines résiduaires de la région en cause devait être effectué par le biais de la construction de la station d’épuration, ainsi que des réseaux principal, secondaire et tertiaire.

26      S’agissant, tout d’abord, de la construction de la station d’épuration ainsi que des réseaux principal et secondaire, celle‑ci aurait été entamée avant l’introduction du recours dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385).

27      À cet égard, les autorités helléniques auraient soumis à la Commission des demandes de cofinancement de ces travaux, acceptées par cette dernière au mois de décembre 2004.

28      La République hellénique fait observer que les réactions de la population locale ainsi que l’introduction de recours en justice ont causé un retard conséquent dans la construction de la station d’épuration.

29      Cette dernière aurait été finalement achevée le 7 avril 2011 et, après une période expérimentale, la station n’aurait été opérationnelle qu’à partir du 27 novembre 2012.

30      Afin d’assurer un suivi plus complet du fonctionnement de la station d’épuration, des échantillons représentatifs seraient prélevés dans les eaux urbaines résiduaires à l’entrée et à la sortie de celle‑ci. Les résultats obtenus démontreraient que ces eaux sont soumises à un traitement plus rigoureux que le traitement secondaire. À cet égard, cet État membre soumet à la Cour des données à compter du 27 novembre 2012 et jusqu’au 28 juillet 2016, lesquelles démontreraient que le traitement des eaux est conforme aux exigences de la directive 91/271.

31      S’agissant, ensuite, du réseau principal, la République hellénique soutient que, bien que des collecteurs principaux aient été construits, des fouilles et des découvertes archéologiques ainsi que divers problèmes techniques rencontrés ont retardé la construction de ce réseau sur le territoire de l’agglomération d’Élefsina.

32      S’agissant, en outre, du réseau secondaire, la République hellénique soutient que des actions en justice, des difficultés techniques, de mauvaises conditions hydrogéologiques ainsi que des fouilles et des découvertes archéologiques ont provoqué un retard significatif dans la construction de ce réseau et ont empêché la construction de certaines parties de celui‑ci. Il en résulterait que le réseau secondaire aurait été entièrement réalisé, à l’exception de la partie située dans le secteur de Kato Élefsina de l’agglomération d’Élefsina, permettant ainsi de desservir 95 % de l’EHde la région de Thriasio Pedio.

33      La République hellénique précise néanmoins que le traitement des eaux usées en provenance du secteur de Kato Élefsina est actuellement assuré par le centre de traitement des eaux usées de Metamorfosi et que, partant, aucun rejet d’eaux usées non traitées n’a lieu dans des eaux de surface.

34      Enfin, le nombre insuffisant de raccordements, calculés en EH, au réseau tertiaire serait lié au fait que le coût du raccordement serait à la charge des propriétaires des immeubles, avec l’assistance de l’État, la crise économique ne permettant pas à cet État membre de financer ces raccordements sans la participation des habitants. Or, ces derniers ne seraient pas en mesure de financer lesdits raccordements au réseau d’assainissement.

35      Dans ces conditions, le nombre de raccordements au réseau tertiaire atteindrait 45 % de l’EH de la région du Thriasio Pedio.

36      Néanmoins, la République hellénique précise que les eaux urbaines résiduaires des ménages non raccordés seraient collectées dans des systèmes de réservoirs et de fosses septiques, avant d’être acheminées par camions‑citernes dans des stations d’épuration voisines afin d’y être traitées.

37      Dans son mémoire en réplique, la Commission soutient que, de l’aveu même de la République hellénique, les réseaux secondaire et tertiaire doivent encore être achevés.

38      Elle maintient ainsi ses griefs et réitère que la République hellénique ne s’est pas encore conformée à l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385).

39      Cette institution fait observer que cet État membre a finalement communiqué, dans son mémoire en défense, les résultats des échantillons requis. Sur ce point, la Commission consent que ces résultats démontrent que la station d’épuration fonctionne de manière adéquate et que toutes les eaux urbaines résiduaires actuellement collectées sont soumises à un traitement conforme aux exigences de la directive 91/271.

40      S’agissant néanmoins du réseau secondaire, la Commission rappelle que la République hellénique reconnaît elle‑même la nécessité d’en finaliser la construction. En effet, sur les 198 km de conduites prévus, seulement 184 auraient été mis en place, ceux du secteur de Kato Élefsina, dans l’agglomération d’Élefsina, étant manquants.

41      S’agissant du réseau tertiaire, sur la base des éléments présentés par la République hellénique dans son mémoire en défense, la Commission accorde à cet État membre le fait que 45 % de l’EH de la région du Thriasio Pedio y sont raccordés, les eaux urbaines résiduaires collectées par ce système étant dès lors soumises à un traitement adéquat.

42      Toutefois, la République hellénique demeurerait en défaut d’établir que les 55 % restants de l’EH de cette région sont raccordés en vue d’un traitement en conformité avec la directive 91/271. En effet, hormis les indications concernant la station d’épuration de Metamorfosi, laquelle recevrait 5 % seulement de la charge exprimée en EH, cet État membre n’apporterait aucun élément de nature à prouver le bon fonctionnement, ne serait‑ce que temporaire, du système provisoire mis en place par celui‑ci.

43      Selon cette institution, quand bien même la République hellénique démontrerait que le système fonctionne correctement, cette circonstance ne constituerait qu’une circonstance atténuante et non pas une mise en conformité avec l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385).

44      Dans son mémoire en duplique, la République hellénique maintient que l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), a été exécuté et que, dès lors, le recours de la Commission est dénué de fondement.

45      En ce qui concerne le réseau secondaire, cet État membre admet qu’il reste une partie infime à construire.

46      Quant aux raccordements des habitants de la région Thriasio Pedio au réseau tertiaire, il ressortirait des informations communiquées par les agglomérations concernées d’Élefsina, d’Aspropyrgos, de Mandra et de Magoula que les raccordements privés seraient en progression régulière.

47      Par ailleurs, en ce qui concerne les 49,3 % de l’EH de la région du Thriasio Pedio qui ne sont, selon l’affirmation de cet État membre formulée à l’audience, pas encore raccordés aux réseaux d’assainissement, les eaux usées seraient acheminées vers un centre de traitement voisin par des sociétés privées, au moyen de camions‑citernes. S’il est tenu un registre des données sur les convois de camions‑citernes arrivant sur le site, les informations relatives à la provenance des eaux usées et les coordonnées du propriétaire ne seraient cependant pas conservées, sauf lorsqu’il s’agit de déchets liquides issus des industries.

 Appréciation de la Cour

48      Afin de déterminer si la République hellénique a adopté toutes les mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), conformément à l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 260, paragraphe 1, TFUE, il convient de vérifier si cet État membre a pleinement respecté les dispositions de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, et de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 91/271, plus particulièrement en prenant les mesures nécessaires pour l’installation d’un système de collecte des eaux urbaines résiduaires de la région de Thriasio Pedio et en soumettant à un traitement plus rigoureux que le traitement secondaire visé à l’article 4 de cette directive les eaux urbaines résiduaires de ladite région avant qu’elles ne soient rejetées dans la zone sensible du golfe d’Éleusis.

49      En ce qui concerne la procédure en manquement au titre de l’article 260, paragraphe 2, TFUE, il y a lieu de retenir comme date de référence pour apprécier l’existence d’un tel manquement celle de l’expiration du délai fixé dans la lettre de mise en demeure émise en vertu de cette disposition (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 36).

50      En l’occurrence, ainsi qu’il a été rappelé au point 15 du présent arrêt, la Commission ayant envoyé, le 7 mai 2010, à la République hellénique une lettre de mise en demeure complémentaire, conformément à la procédure prévue à l’article 260, paragraphe 2, TFUE, la date de référence mentionnée au point précédent est celle de l’expiration du délai fixé dans cette lettre, à savoir le 7 juillet 2010.

51      Or, il est constant que, à cette dernière date, les eaux urbaines résiduaires de la région de Thriasio Pedio n’étaient pas encore collectées et soumises à un traitement conforme aux prescriptions de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, et de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 91/271, avant d’être rejetées dans la zone sensible du golfe d’Éleusis. En effet, ainsi qu’il ressort du mémoire en défense de cet État membre, la construction de la station d’épuration est postérieure à ladite date, cette construction n’ayant été achevée que le 7 avril 2011 et la station n’ayant été fonctionnelle, en dehors des périodes expérimentales, qu’à partir du 27 novembre 2012.

52      En tout état de cause, la République hellénique admet, d’une part, que le réseau de collecte secondaire n’a pas encore été intégralement achevé, le secteur de Kato Élefsina, dans l’agglomération d’Élefsina, ne disposant pas encore d’un tel réseau et, d’autre part, que tous les habitants de la région de Thriasio Pedio ne sont pas raccordés au réseau tertiaire.

53      S’agissant de l’argumentation de la République hellénique tirée des difficultés auxquelles cet État membre aurait été confronté pour se conformer à l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, un État membre ne saurait exciper de difficultés d’ordre interne pour justifier l’inobservation des obligations résultant du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2017, Commission/Royaume‑Uni, C‑502/15, non publié, EU:C:2017:334, point 48).

54      Dans ces conditions, il y a lieu de constater que, en n’ayant pas pris toutes les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 260, paragraphe 1, TFUE.

 Sur les sanctions pécuniaires

55      La Commission demande que la République hellénique soit condamnée au versement à la fois d’une astreinte et d’une somme forfaitaire.

56      S’agissant du montant desdites astreinte et somme forfaitaire, la Commission se fonde sur sa communication du 13 décembre 2005, intitulée « Mise en œuvre de l’article [260 TFUE] » [SEC(2005) 1658], telle que mise à jour par la communication C (2015/C 257/01) 6767 de la Commission du 6 août 2015, intitulée « Mise à jour des données utilisées pour le calcul des sommes forfaitaires et des astreintes que la Commission proposera à la Cour de justice dans le cadre de procédures d’infraction » (ci‑après la « communication du 13 décembre 2005 »).

 Sur l’astreinte

 Argumentation des parties

57      Conformément au point 6 de la communication du 13 décembre 2005, la Commission se fonde sur trois principaux critères pour déterminer le montant de l’astreinte qu’elle suggère à la Cour d’infliger, à savoir la gravité de l’infraction, la durée de celle‑ci et la nécessité d’assurer un effet dissuasif de la sanction, de manière à éviter les récidives.

58      S’agissant de la gravité de l’infraction constatée, la Commission souligne que le rejet d’eaux usées non traitées à la surface entraîne une pollution qui se caractérise par un déséquilibre de l’oxygène, tandis que l’apport de substances nutritives nuit particulièrement à la qualité des masses d’eaux de surface et des écosystèmes afférents. En outre, le rejet de telles eaux urbaines résiduaires pourrait avoir des répercussions importantes sur la santé publique.

59      Par ailleurs, l’exécution incomplète de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), porterait atteinte à la faculté des habitants de profiter de masses d’eaux de surface suffisamment propres pour permettre la pratique d’activités de loisirs.

60      En ce qui concerne les eaux urbaines résiduaires qui n’ont subi qu’un traitement insuffisant, la Commission souligne que le seul recours à un traitement secondaire n’est pas suffisant pour empêcher tout risque de pollution et de détérioration de la qualité de l’eau ainsi que des écosystèmes voisins si les eaux réceptrices ont été reconnues comme constituant une zone sensible, conformément à l’article 5 de la directive 91/271. Or, malgré les efforts déployés et les mesures prises par les autorités grecques, 72 % des eaux urbaines résiduaires ne seraient pas collectées conformément aux exigences de la directive 91/271, de sorte que le manquement constaté à cet égard au terme de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), se poursuivrait.

61      Selon la Commission, les efforts que déploient les autorités grecques, notamment depuis le prononcé de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), pourraient éventuellement être considérés comme des circonstances atténuantes. En effet, la station d’épuration serait aujourd’hui en service, le réseau principal de canalisation aurait été construit et le réseau secondaire, à l’exception du secteur Kato Élefsina, aurait été réalisé.

62      Cependant, la Commission estime que ces circonstances atténuantes sont, dans une large mesure, neutralisées par les circonstances aggravantes qui caractérisent la présente affaire. En particulier, plus de douze années se seraient écoulées depuis le prononcé de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385). Autrement dit, la République hellénique aurait eu plus de seize années à compter du déclenchement de la procédure d’infraction pour se conformer pleinement aux prescriptions de la directive 91/271. En outre, la Commission ne dispose pas d’un calendrier indicatif ou de données fiables permettant de préciser le moment où la République hellénique aura achevé la mise en œuvre de toutes les mesures destinées à se conformer à toutes les exigences découlant de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385).

63      Par conséquent, eu égard à l’importance des règles de droit de l’Union qui font l’objet du manquement constaté à cet égard au terme de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), aux conséquences de ce manquement sur les intérêts généraux et particuliers, à la circonstance atténuante liée aux progrès accomplis jusqu’à présent, aux circonstances aggravantes découlant de l’incertitude quant à la date à laquelle la République hellénique se sera totalement mise en conformité avec cet arrêt, de la clarté des dispositions enfreintes de la directive 91/271 et du comportement infractionnel répété de la République hellénique en matière d’observation de la réglementation de l’Union dans le domaine de l’environnement et de respect des arrêts de la Cour, la Commission propose un coefficient de gravité de 5, calculé conformément aux indications figurant dans la communication du 13 décembre 2005.

64      S’agissant de la durée de l’infraction, la Commission rappelle que la Cour a rendu l’arrêt Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385) le 24 juin 2004, tandis que la Commission a décidé d’introduire un recours sur le fondement de l’article 260, paragraphe 2, TFUE le 19 novembre 2015. La période écoulée étant de 137 mois, la Commission demande que le coefficient de durée soit fixé à 3, sur une échelle de 1 à 3.

65      Enfin, en ce qui concerne le coefficient afférent à la capacité de paiement de l’État membre poursuivi, appelé facteur « n », cette institution rappelle que la communication du 13 décembre 2005 fixe celui‑ci à 3,48 pour la République hellénique.

66      La Commission relève que, selon la formule mentionnée dans cette communication, l’astreinte journalière est égale au forfait de base uniforme, de 670 euros, multiplié par le coefficient de gravité, le coefficient de durée et le facteur « n ». Ainsi, en l’espèce, elle propose une astreinte journalière de 34 974 euros.

67      Toutefois, cette institution estime qu’il convient de réduire progressivement l’astreinte en fonction des progrès réalisés dans l’exécution de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385). Dès lors, elle propose d’appliquer, conformément au point 13.2 de ladite communication, une astreinte journalière décroissante, dont le montant effectif devrait être calculé à la fin de chaque période de six mois, en réduisant le total relatif à de telles périodes à concurrence d’un pourcentage correspondant à la proportion d’EH qui a été mise en conformité avec l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), au terme de la période concernée.

68      La Commission précise, à cet égard, dans sa requête que la proportion de la population de la région concernée ne disposant pas de systèmes de collecte et de traitement conformes aux prescriptions de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, et de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 91/271 correspondait, au moment de l’introduction de son recours, à un EH total de 35 883, et, dans son mémoire en réplique, que ce nombre était de 27 500.

69      Selon la Commission, afin d’établir le montant définitif de l’astreinte journalière, il conviendrait de tenir compte de chaque unité d’EH effectivement mise en conformité avec les prescriptions de la directive 91/271, après communication à cette institution, par la République hellénique, des données établissant que cette mise en conformité a été réalisée.

70      La République hellénique soutient que ni la gravité de l’infraction, ni la durée de cette dernière, ni la coopération et la diligence dont elle a fait preuve au cours de la procédure, ni les progrès réalisés dans l’exécution de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), ne justifient l’imposition d’une astreinte. À titre subsidiaire, la République hellénique conteste la méthode de calcul de celle‑ci.

71      Cet État membre estime ainsi que le montant de l’astreinte proposé est disproportionné par rapport à la gravité de l’infraction, dont les incidences sur l’environnement en raison de l’inexécution des obligations spécifiques procédant de la directive 91/271 n’ont pas été évaluées précisément.

72      La République hellénique considère qu’elle a exécuté l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), en ce sens qu’elle a mis en œuvre les ouvrages nécessaires à l’exécution de cet arrêt.

73      S’agissant de la gravité et de la durée de l’infraction, la proposition de la Commission d’appliquer un coefficient de 5 ne tiendrait pas compte du fait que ledit arrêt, précisément, a déjà été exécuté. À cet égard, cet État membre soutient que le dommage causé à la santé humaine n’est en l’espèce pas avéré, étant donné que les eaux urbaines résiduaires des ménages qui n’ont pas été raccordés au réseau secondaire ne sont pas rejetées directement et de manière incontrôlée dans des eaux réceptrices, mais sont collectées dans des systèmes de réservoirs ainsi que de fosses septiques, avant d’être acheminées par camions‑citernes dans des stations d’épuration voisines opérationnelles, afin d’y être traitées. Ce coefficient de gravité serait en outre excessif compte tenu du coefficient proposé par la Commission et retenu par la Cour dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal (C‑557/14, EU:C:2016:471).

74      En outre, la Commission affirmerait sans fondement que l’exécution prétendument incomplète de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), est susceptible d’affecter la mise en œuvre d’autres directives de l’Union ou a des répercussions sur des intérêts généraux ou particuliers en l’espèce.

75      La République hellénique conteste également les affirmations de la Commission selon lesquelles cet État membre aurait un comportement infractionnel répété dans ce domaine précis du droit de l’Union.

76      En l’espèce, selon la République hellénique, elle aurait établi, d’une part, que les eaux urbaines résiduaires de la région de Thriasio Pedio sont soumises à un traitement plus rigoureux que le traitement secondaire qui permet d’en éliminer le phosphore et l’azote et, d’autre part, que la proportion de la population qui n’est pas encore raccordée, en raison des fouilles archéologiques ou de difficultés financières, est desservie par le centre de traitement des eaux usées de Metamorfosi.

77      Dès lors que la République hellénique aurait éliminé, ou, à tout le moins, réduit substantiellement, l’atteinte à l’environnement découlant du manquement constaté par l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), la République hellénique propose, si la Cour devait décider de lui imposer une astreinte, de calculer le montant de celle‑ci sur la base d’un coefficient de gravité ramené à 1.

78      Par ailleurs, compte tenu des circonstances de l’espèce, ladite astreinte serait disproportionnée au regard de la durée de l’infraction, ainsi que de la capacité de paiement amoindrie de la République hellénique en raison de la crise économique subie par cette dernière.

79      En effet, compte tenu du fait qu’il ne resterait à réaliser que 5 % du réseau secondaire et que la République hellénique aurait d’ores et déjà pris les mesures nécessaires à cet effet, cet État membre considère qu’il y aurait lieu de fixer à 1 le coefficient de durée aux fins du calcul de l’éventuelle astreinte.

80      S’agissant de la capacité de paiement dudit État membre, le produit intérieur brut (PIB) de celui‑ci aurait chuté de 25,5 % entre les années 2010 et 2016.

81      Enfin, si la Cour décidait de lui imposer une astreinte, la République hellénique demande à ce que soit entérinée la proposition de la Commission qui consiste à appliquer une astreinte décroissante en fonction de l’état de l’exécution de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), et à calculer son montant à chaque échéance semestrielle.

 Appréciation de la Cour

82      Selon une jurisprudence constante de la Cour, l’infliction d’une astreinte ne se justifie, en principe, que pour autant que perdure le manquement tiré de l’inexécution d’un précédent arrêt jusqu’à l’examen des faits par la Cour (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 61 et jurisprudence citée).

83      À cet égard, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort des points 30 et 39 du présent arrêt, la République hellénique a communiqué, dans son mémoire en défense, les résultats d’échantillons représentatifs prélevés dans la station d’épuration qui démontrent son fonctionnement adéquat et font apparaître, pour la période du 27 novembre 2012 au 28 juillet 2016, l’efficacité du traitement des eaux urbaines résiduaires collectées au regard de la directive 91/271. À cet égard, la Commission a confirmé, tant dans son mémoire en réplique que lors de l’audience, que les eaux urbaines résiduaires actuellement collectées sont effectivement soumises à un traitement conforme aux exigences de cette directive.

84      Néanmoins, d’une part, si le réseau principal est complètement achevé dans la région de Thriasio Pedio, le réseau secondaire n’a pas encore été construit dans le secteur de Kato Élefsina de l’agglomération d’Élefsina, ainsi que le soutient la Commission et comme le reconnaît par ailleurs la République hellénique elle‑même, y compris lors de l’audience devant la Cour. Dès lors, il ne saurait être considéré que le réseau secondaire a été intégralement achevé dans la région de Thriasio Pedio.

85      D’autre part, s’agissant du raccordement de l’ensemble de la population de la région de Thriasio Pedio au réseau tertiaire, à supposer même que l’affirmation, formulée par la République hellénique lors de l’audience, selon laquelle 50,7 % de l’EH de cette région étaient déjà raccordés à ce réseau, est fondée, ce que la Commission conteste, il n’en demeure pas moins que 49,3 % de l’EH de ladite régionne bénéficie toujours pas d’un raccordement à ce réseau tertiaire.

86      Dans ces conditions, la Cour considère que la République hellénique n’a pas établi qu’elle avait complètement exécuté, à la date de l’audience devant la Cour, les obligations découlant de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385).

87      Par conséquent, la Cour considère que la condamnation de la République hellénique au paiement d’une astreinte constitue un moyen financier approprié afin d’inciter cette dernière à prendre les mesures nécessaires pour mettre fin au manquement constaté par l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), et pour assurer l’exécution complète de ce dernier.

88      Néanmoins, il ne saurait être a priori exclu que, au jour du prononcé du présent arrêt, l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), ait été exécuté de manière complète. Ainsi, l’astreinte ne doit être infligée que dans l’hypothèse où le manquement persisterait à la date de ce prononcé (voir, par analogie, arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 66).

89      Il ressort de la jurisprudence constante de la Cour que l’astreinte doit être arrêtée en fonction du degré de persuasion nécessaire pour que l’État membre défaillant à exécuter un arrêt en manquement modifie son comportement et mette fin à l’infraction incriminée (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 67 et jurisprudence citée).

90      Dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation en la matière, il incombe à la Cour de fixer l’astreinte, de sorte que celle‑ci soit, d’une part, adaptée aux circonstances et, d’autre part, proportionnée au manquement constaté ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre concerné (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 68).

91      Les propositions de la Commission concernant l’astreinte ne sauraient lier la Cour et ne constituent qu’une base de référence utile. De même, des lignes directrices telles que celles contenues dans les communications de la Commission ne lient pas la Cour, mais contribuent à garantir la transparence, la prévisibilité et la sécurité juridique de l’action menée par la Commission elle‑même lorsque cette institution fait des propositions à la Cour. En effet, dans le cadre d’une procédure fondée sur l’article 260, paragraphe 2, TFUE, relative à un manquement qui persiste dans le chef d’un État membre nonobstant le fait que ce même manquement a déjà été constaté à l’occasion d’un premier arrêt rendu au titre de l’article 258 TFUE, la Cour doit demeurer libre de fixer l’astreinte infligée au montant et sous la forme qu’elle considère adéquats pour inciter cet État membre à mettre fin à l’inexécution des obligations découlant de ce premier arrêt de la Cour (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 69).

92      Aux fins de la fixation du montant de l’astreinte, les critères de base qui doivent être pris en considération pour assurer la nature coercitive de cette dernière, en vue d’une application uniforme et effective du droit de l’Union, sont, en principe, la gravité de l’infraction, sa durée et la capacité de paiement de l’État membre en cause. Pour l’application de ces critères, il y a lieu de tenir compte, en particulier, des conséquences du défaut d’exécution sur les intérêts privés et publics ainsi que de l’urgence qu’il y a à ce que l’État membre concerné se conforme à ses obligations (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 70).

93      En premier lieu, en ce qui concerne la gravité de l’infraction, il convient de rappeler que la directive 91/271 vise à protéger l’environnement. L’absence ou l’insuffisance notamment de systèmes de traitement des eaux urbaines résiduaires sont susceptibles de porter atteinte à l’environnement et doivent être considérées comme particulièrement graves (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 71).

94      Il convient en outre de constater comme aggravante la circonstance selon laquelle l’exécution complète de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), n’est, ainsi qu’il ressort des indications de la République hellénique, pas encore intervenue, ce qui équivaut à un retard de presque vingt ans, dans la mesure où l’obligation d’assurer la conformité du traitement secondaire des eaux urbaines résiduaires de la région de Thriasio Pedio aurait dû être remplie au plus tard le 31 décembre 1998 (voir, à cet égard, arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce, C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385, point 51). La Cour ne peut dès lors que constater la durée particulièrement importante d’une infraction qui, eu égard à l’objectif visé ci‑avant, revêt en outre une gravité certaine (voir, par analogie, arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 74).

95      S’agissant de l’argument avancé par la République hellénique, selon lequel les eaux urbaines résiduaires rejetées par la population de la région de Thriasio Pedio non raccordée au réseau tertiaire ne seraient pas déversées dans la nature mais seraient transportées dans une station d’épuration voisine par des camions‑citernes, cet argument, par ailleurs contesté par la Commission, ne saurait prospérer, dans la mesure où la République hellénique n’apporte pas d’éléments de nature à prouver le bon fonctionnement d’un tel système de collecte.

96      Toutefois, il y a lieu de relever que la situation dans la région de Thriasio Pedio s’est améliorée par rapport à celle qui prévalait lors de l’engagement de la procédure en manquement ayant donné lieu à l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385). En effet, si, à cette époque, le système de collecte des eaux urbaines résiduaires faisait complètement défaut, à la date de l’examen des faits par la Cour, le réseau principal a été complètement achevé, le réseau secondaire ne doit plus être achevé que dans le secteur de Kato Élefsina et le raccordement de la population de la région de Thriasio Pedio au réseau tertiaire, ainsi que l’a fait valoir la République hellénique dans ses écrits de procédure, a atteint un pourcentage de 45 % de l’EH de cette région. À cet égard, toutefois, le pourcentage de 50,7 % avancé par cet État membre, ainsi qu’il ressort du point 85 du présent arrêt, ne saurait être retenu, dès lors que celui‑ci n’en établit pas le bien‑fondé.

97      Force est dès lors de constater que, dans la présente affaire, l’importance du préjudice, qui, à la date du prononcé du présent arrêt, continue d’être occasionné à la santé humaine et à l’environnement en raison du manquement reproché, est fonction, dans une large mesure, du nombre de sites affectés par ce manquement. Dès lors, ce préjudice est moins important que celui qui était occasionné à la santé humaine et à l’environnement en raison du manquement initial constaté dans l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385) (voir, par analogie, arrêt du 2 décembre 2014, Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 56).

98      En outre, il convient de considérer comme étant atténuante la circonstance que, ainsi que le fait valoir la République hellénique, la région de Thriasio Pedio est une région qui recèle un patrimoine archéologique important et que, en raison des fouilles archéologiques et de la découverte des vestiges archéologiques, le réseau secondaire a été réalisé, à l’exception d’une partie de celui‑ci située dans le secteur de Kato Élefsina de l’agglomération d’Élefsina.

99      S’agissant, en deuxième lieu, de la durée de l’infraction, il y a lieu de rappeler que celle‑ci doit être évaluée en prenant en considération le moment auquel la Cour apprécie les faits et non pas celui où cette dernière est saisie par la Commission. Or, en l’espèce, la durée de l’infraction, à savoir presque quatorze ans à compter de la date du prononcé de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), est considérable (voir, par analogie, arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 76).

100    En effet, bien que l’article 260, paragraphe 1, TFUE ne précise pas le délai dans lequel l’exécution d’un arrêt doit intervenir, l’intérêt qui s’attache à une application immédiate et uniforme du droit de l’Union exige, selon une jurisprudence constante de la Cour, que cette exécution soit entamée immédiatement et aboutisse dans des délais aussi brefs que possible (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 77 et jurisprudence citée).

101    En troisième lieu, en ce qui concerne la capacité de paiement de l’État membre en cause, il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’il convient de prendre en compte l’évolution récente du PIB de cet État membre, telle qu’elle se présente à la date de l’examen des faits par la Cour (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 78). À cet égard, il y a lieu de tenir compte des arguments de la République hellénique, selon lesquels son PIB a diminué de 25,5 % entre l’année 2010 et l’année 2016, lorsque cet État membre a déposé son mémoire en défense devant la Cour.

102    En outre, la Commission a proposé à la Cour de réduire progressivement l’astreinte en fonction des progrès réalisés dans l’exécution de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385).

103    Il convient de relever, à cet égard, que, même si, pour garantir l’exécution complète de l’arrêt de la Cour, l’astreinte doit être exigée dans son intégralité jusqu’à ce que l’État membre ait pris toutes les mesures nécessaires pour mettre fin au manquement constaté, dans certains cas spécifiques, toutefois, une sanction qui tient compte des progrès éventuellement réalisés par l’État membre dans l’exécution de ses obligations peut être envisagée (voir, en ce sens, arrêt du 2 décembre 2014, Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 60).

104    En l’espèce, la Commission suggère de prendre en considération, pour le calcul du montant de l’astreinte, la réduction progressive du nombre d’EH non conformes aux exigences de la directive 91/271, ce qui permettrait de tenir compte des progrès réalisés par la République hellénique dans l’exécution de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), et du principe de proportionnalité. Il importe, par le biais de cette dégressivité, d’inciter la République hellénique non seulement à mener à bien l’installation du système de collecte dans le secteur de Kato Élefsina dans les meilleurs délais, mais aussi, à s’assurer du fait qu’un système de collecte conforme aux exigences de la directive 91/271 a été mis en place dans l’ensemble de la région de Thriasio Pedio.

105    Compte tenu de l’ensemble des circonstances de la présente affaire, la Cour considère comme appropriée l’imposition d’une astreinte dégressive d’un montant de 18 000 euros par jour.

106    En ce qui concerne la périodicité de l’astreinte, la composante dégressive de celle‑ci est fixée, conformément à la proposition de la Commission, sur une base semestrielle, étant donné que la fourniture de la preuve de la conformité à la directive 91/271 peut exiger un certain délai et afin de tenir compte des progrès éventuellement réalisés par l’État membre défendeur. Il conviendra ainsi de réduire le montant total relatif à chacune de ces périodes d’un pourcentage correspondant à la proportion représentant le nombre d’unités d’EH effectivement mises en conformité avec l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), dans la région de Thriasio Pedio (voir, par analogie, arrêt du 15 octobre 2015, Commission/Grèce, C‑167/14, non publié, EU:C:2015:684, point 66).

107    Par conséquent, la Cour estime opportun, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, de fixer une astreinte semestrielle de 3 276 000 euros.

108    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il convient de condamner la République hellénique à payer à la Commission une astreinte de 3 276 000 euros par semestre de retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), à compter de la date du prononcé du présent arrêt, et jusqu’à l’exécution complète de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), dont le montant effectif doit être calculé à la fin de chaque période de six mois en réduisant le montant total relatif à chacune de ces périodes d’un pourcentage correspondant à la proportion représentant le nombre d’unités d’EH effectivement mises en conformité avec l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), dans la région de Thriasio Pedio, à la fin de la période considérée par rapport au nombre d’unités d’EH n’étant pas mises en conformité avec l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), dans cette région, au jour du prononcé du présent arrêt.

 Sur la somme forfaitaire

 Argumentation des parties

109    La Commission demande à la Cour de condamner la République hellénique au paiement d’une somme forfaitaire journalière de 3 828 euros, calculée sur la base de la communication du 13 décembre 2005, dont le montant résulte de la multiplication du forfait de base uniforme, fixé à 220 euros, par le coefficient de gravité de 5 et par le facteur « n » de 3,48, à compter de la date du prononcé de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), jusqu’à la date du prononcé du présent arrêt ou jusqu’à celle où aura été exécuté l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), si cette exécution intervient avant le prononcé du présent arrêt.

110    En l’espèce, 4 165 jours se seraient écoulés entre l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), et la décision de la Commission d’introduire le présent recours au titre de l’article 260, paragraphe 2 TFUE, à savoir le 19 novembre 2015. Par conséquent, la somme forfaitaire totale à la date de cette décision de la Commission serait égale à la somme forfaitaire journalière dont il est question au point précédent, multipliée par ce nombre de jours, à savoir 15 943 620 euros, montant qui serait supérieur à la somme forfaitaire minimale fixée pour la République hellénique, qui serait de 1 933 000 euros.

111    Dans la mesure où le montant de la somme forfaitaire dépasse celui de la somme forfaitaire minimale, il conviendrait d’imposer la somme forfaitaire journalière de 3 828 euros selon les modalités précisées au point 110 du présent arrêt.

112    La République hellénique fait valoir qu’elle a exécuté l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), dès lors que les travaux destinés à en assurer l’exécution ont été effectués et que, s’agissant des travaux qui demeurent à réaliser, les mesures nécessaires à cet effet ont déjà été prises. En outre, cet État membre aurait systématiquement et loyalement coopéré avec les services de la Commission. Par ailleurs, il n’y aurait pas de risque de récidive étant donné que la République hellénique aurait éliminé ou, à tout le moins, considérablement réduit, toute atteinte supplémentaire à l’environnement. Dès lors, cet État membre soutient que l’infliction d’une somme forfaitaire ne se justifie pas en l’espèce.

113    Si la Cour décidait néanmoins d’infliger à la République hellénique une somme forfaitaire, cet État membre fait observer que le jour à prendre en considération comme point de départ pour le calcul de celle‑ci ne saurait être celui du prononcé de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), puisque, compte tenu des travaux de construction en cours, cet arrêt ne pouvait pas avoir été exécuté à cette date, mais à une échéance située après l’écoulement d’un délai raisonnable pour l’exécution de celui‑ci.

114    En tout état de cause, il appartiendrait à la Cour d’apprécier si, eu égard à la conjoncture économique « extrêmement difficile » à laquelle la République hellénique serait confrontée, il y a objectivement lieu d’imposer le paiement d’une telle somme à cet État membre ou, au contraire, de l’en exonérer complètement.

115    En tout état de cause, la République hellénique conteste la méthode de calcul de la Commission. Elle soutient que, si elle devait être condamnée au paiement d’une somme forfaitaire journalière, celle‑ci devrait s’élever à 765,60 euros et, dans l’hypothèse où la Cour décidait de l’imposition d’une somme forfaitaire unique, cette dernière devrait être d’un montant de 1 933 000 euros.

 Appréciation de la Cour

116    Il convient de rappeler, à titre liminaire, que la Cour est habilitée, dans l’exercice du pouvoir d’appréciation qui lui est conféré dans le domaine considéré, à imposer, de façon cumulative, une astreinte et une somme forfaitaire (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 91).

117    La condamnation au paiement d’une somme forfaitaire et la fixation du montant éventuel de cette somme doivent, dans chaque cas d’espèce, demeurer fonction de l’ensemble des éléments pertinents ayant trait tant aux caractéristiques du manquement constaté qu’à l’attitude propre à l’État membre concerné par la procédure initiée sur le fondement de l’article 260 TFUE. À cet égard, celui‑ci investit la Cour d’un large pouvoir d’appréciation afin de décider de l’infliction ou non d’une telle sanction et de déterminer, le cas échéant, son montant (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 92).

118    Dans la présente affaire, l’ensemble des éléments juridiques et factuels ayant abouti à la constatation du manquement considéré, notamment la circonstance qu’ont déjà été prononcés d’autres arrêts, à savoir, outre l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), les arrêts du 7 février 2013, Commission/Grèce, (C‑517/11, non publié, EU:C:2013:66), et du 15 octobre 2015, Commission/Grèce (C‑167/14, non publié, EU:C:2015:684), constatant le manquement de la République hellénique à ses obligations en matière de traitement des eaux urbaines résiduaires, constituent un indicateur de ce que la prévention effective de la répétition future d’infractions analogues au droit de l’Union est de nature à requérir l’adoption d’une mesure dissuasive, telle que la condamnation au paiement d’une somme forfaitaire (voir, par analogie, arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 93).

119    Dans ces circonstances, il appartient à la Cour, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, de fixer le montant de cette somme forfaitaire de sorte qu’elle soit, d’une part, adaptée aux circonstances et, d’autre part, proportionnée à l’infraction commise (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 94).

120    Figurent notamment au rang des facteurs pertinents à cet égard des éléments tels que la gravité de l’infraction constatée et la période durant laquelle celle‑ci a persisté depuis le prononcé de l’arrêt l’ayant constatée (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 95).

121    Les circonstances de l’espèce devant être prises en compte ressortent notamment des considérations figurant aux points 92 à 101 du présent arrêt, relatives à la gravité et à la durée de l’infraction ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre en cause.

122    En ce qui concerne la gravité de l’infraction en cause, il y a lieu de relever que, s’agissant de la construction du réseau secondaire, seule une partie d’une agglomération demeure dépourvue d’un tel réseau, à savoir le secteur de Kato Élefsina, dans l’agglomération d’Élefsina, et, s’agissant du pourcentage de l’EH de la région de Thriasio Pedio raccordé au réseau tertiaire, celui‑ci s’élève à 45 %. Il y a lieu toutefois de relever que, en moyenne, pendant la majeure partie de la période comprise entre la date du prononcé de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), et celle du prononcé du présent arrêt, cette région n’a même pas disposé d’une station d’épuration, cette dernière n’ayant été opérationnelle qu’à partir du 27 novembre 2012. Dès lors, il y a lieu de considérer cette infraction comme étant plus grave aux fins du calcul de la somme forfaitaire, qu’aux fins de la fixation de l’astreinte.

123    En outre, s’agissant de la durée de l’infraction, outre les considérations figurant aux points 99 et 100 du présent arrêt, il convient, aux fins de la fixation de la somme forfaitaire, de prendre en considération le fait que la République hellénique, bien qu’elle ait coopéré systématiquement avec les services de la Commission, n’a pas respecté les différents calendriers qu’elle s’était elle‑même fixés en vue d’assurer la mise en conformité du traitement des eaux urbaines résiduaires de l’ensemble de la région de Thriasio Pedio. Il ressort en effet du dossier soumis à la Cour que la Commission n’a reçu de cet État membre aucun calendrier fiable permettant d’estimer la date à partir de laquelle la Commission pourrait constater un progrès réel dans la mise en œuvre des mesures nécessaires en vue de l’exécution de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C‑119/02, non publié, EU:C:2004:385), et, partant, aux fins de se conformer aux prescriptions de la directive 91/271.

124    Les justifications invoquées par la République hellénique à cet égard, à savoir le fait que le retard dans l’exécution de cet arrêt serait dû à des difficultés internes ne sauraient être retenues. En effet, ainsi qu’il a été rappelé au point 53 du présent arrêt, un État membre ne saurait exciper de difficultés d’ordre interne pour justifier l’inobservation des obligations résultant du droit de l’Union, une telle argumentation ne pouvant dès lors prospérer.

125    Force est donc de constater que le manquement reproché à la République hellénique a persisté pendant une période de temps significative.

126    Enfin, ainsi que la Commission l’a fait valoir, il convient d’avoir égard au nombre élevé des arrêts, mentionnés au point 118 du présent arrêt, ayant constaté des manquements par la République hellénique à ses obligations en matière de traitement des eaux urbaines résiduaires. Or, le caractère répétitif du comportement infractionnel d’un État membre s’avère d’autant plus inacceptable qu’il se manifeste dans un secteur dans lequel les incidences sur la santé humaine et sur l’environnement sont particulièrement importantes. À cet égard, une répétition de comportements infractionnels d’un État membre dans un secteur spécifique peut constituer un indicateur de ce que la prévention effective de la répétition future d’infractions analogues au droit de l’Union est de nature à requérir l’adoption d’une mesure dissuasive telle que l’imposition d’une somme forfaitaire (arrêt du 22 juin 2016, Commission/Portugal, C‑557/14, EU:C:2016:471, point 99).

127    Cependant, comme il a été indiqué au point 121 du présent arrêt, il convient également de tenir compte des éléments, tels que mentionnés aux points 92 à 101 du présent arrêt, dont ceux relatifs aux difficultés liées aux fouilles archéologiques et à la découverte des vestiges archéologiques dans la région de Thriasio Pedio ainsi qu’aux effets de la crise économique subie par la République hellénique sur la capacité de paiement de cet État membre.

128    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, la Cour considère qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en fixant à 5 000 000 euros le montant de la somme forfaitaire que la République hellénique devra acquitter.

129    Il convient, par conséquent, de condamner la République hellénique à payer à la Commission la somme forfaitaire de 5 000 000 euros.

 Sur les dépens

130    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République hellénique et le manquement ayant été constaté, il y a lieu de condamner cette dernière aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) déclare et arrête :

1)      En n’ayant pas pris l’ensemble des mesures nécessaires que comporte l’exécution de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C119/02, non publié, EU:C:2004:385), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 260, paragraphe 1, TFUE.

2)      Dans le cas où le manquement constaté au point 1 persiste au jour du prononcé du présent arrêt, la République hellénique est condamnée à payer à la Commission européenne une astreinte de 3 276 000 euros par semestre de retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C119/02, non publié, EU:C:2004:385), à compter de la date du prononcé du présent arrêt, et jusqu’à l’exécution complète de l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C119/02, non publié, EU:C:2004:385), dont le montant effectif doit être calculé à la fin de chaque période de six mois en réduisant le montant total relatif à chacune de ces périodes d’un pourcentage correspondant à la proportion représentant le nombre d’unités d’équivalents habitants effectivement mises en conformité avec l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C119/02, non publié, EU:C:2004:385), dans la région de Thriasio Pedio, à la fin de la période considérée par rapport au nombre d’unités d’équivalents habitants n’étant pas mises en conformité avec l’arrêt du 24 juin 2004, Commission/Grèce (C119/02, non publié, EU:C:2004:385), dans cette région, au jour du prononcé du présent arrêt.

3)      La République hellénique est condamnée à payer à la Commission européenne une somme forfaitaire de 5 millions d’euros.

4)      La République hellénique est condamnée aux dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : le grec.