Language of document : ECLI:EU:T:2017:871

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

6 décembre 2017 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition –Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque figurative Burlington – Marques nationales verbales antérieures BURLINGTON et BURLINGTON ARCADE – Marques de l’Union européenne et nationale figuratives antérieures BURLINGTON ARCADE – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Utilisation dans la vie des affaires d’un signe dont la portée n’est pas seulement locale – Article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009 (devenu article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001) – Profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures – Article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 (devenu article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001) »

Dans l’affaire T‑122/16,

Tulliallan Burlington Ltd, établie à Saint-Hélier (Jersey), représentée par M. A. Norris, barrister,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. M. Fischer, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Burlington Fashion GmbH, établie à Schmallenberg (Allemagne), représentée par Me A. Parr, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 11 janvier 2016 (affaire R 2409/2013‑4), relative à une procédure d’opposition entre Tulliallan Burlington et Burlington Fashion,


LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, I. S. Forrester et E. Perillo (rapporteur), juges,

greffier : M. I. Dragan, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 22 mars 2016,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 10 juin 2016,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 13 juin 2016,

à la suite de l’audience du 28 avril 2017,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 20 novembre 2008, l’intervenante, Burlington Fashion GmbH, a présenté à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) une demande de protection dans l’Union européenne de l’enregistrement international n° 982021 en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p 1)]. L’enregistrement pour lequel la protection a été demandée est la marque figurative représentée ci-après :

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2        Les produits pour lesquels la protection a été demandée relèvent des classes 3, 14, 18 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Savons à usage cosmétique, savons pour textiles, produits de parfumerie, huiles éthérées, produits pour nettoyer, soigner et embellir la peau, le cuir chevelu et les cheveux ; produits de toilette, compris dans cette classe, déodorants à usage personnel, produits avant-rasage et produits après-rasage » ;

–        classe 14 : « Articles de bijouterie, montres » ;

–        classe 18 : « Cuir et imitations de cuir, à savoir valises, sacs (compris dans cette classe) ; petits articles en cuir (compris dans cette classe), notamment porte-monnaie, portefeuilles, étuis pour clés ; parapluies et pare-soleil sous forme de parasols » ;

–        classe 25 : « Articles chaussants, vêtements, articles de chapellerie, ceintures ». 

3        Le 12 août 2009, la requérante, Tulliallan Burlington Ltd, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits compris dans les classes 3, 14 et 18. Elle est propriétaire, dans le centre de Londres (Royaume-Uni), de la galerie commerciale « Burlington Arcade ».

4        L’opposition était fondée notamment sur les marques et les droits antérieurs suivants :

–        la marque verbale BURLINGTON, enregistrée au Royaume-Uni sous le numéro 2314342 le 5 décembre 2003 et dûment renouvelée le 29 octobre 2012, désignant des services relevant des classes 35 et 36 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 35 : « Location et crédit-bail d’espaces publicitaires ; organisation d’expositions à des fins commerciales ou publicitaires ; organisation de foires à des fins commerciales ; services de publicité et de promotion et services d’informations correspondants ; regroupement, pour le compte de tiers, de produits divers, permettant aux clients de les voir et de les acheter commodément dans une gamme de magasins de vente au détail de commerce non spécialisé » ;

–        classe 36 : « Location de magasins et de bureaux ; crédit-bail ou gestion de biens immobiliers ; crédit-bail de bâtiments ou espaces dans des bâtiments ; gérance de biens immobiliers ; services d’informations concernant la location de magasins et de bureaux ; services de biens immobiliers ; placement de fonds, constitution de fonds » ;

–        la marque verbale BURLINGTON ARCADE, enregistrée au Royaume-Uni sous le numéro 2314343 le 7 novembre 2003 et dûment renouvelée le 29 octobre 2012, désignant des services relevant des classes 35, 36 et 41 et correspondant, pour cette dernière classe, à la description suivante : « Services de divertissement ; organisation de compétitions ; organisation d’expositions ; fourniture d’informations en matière de loisirs ; représentation de spectacles ; mise à disposition d’installations sportives ; mise à disposition de musique en direct et de divertissement en direct ; mise à disposition d’équipements et d’installations pour représentations de groupes de musique en direct ; fourniture de divertissement en direct ; services de musique en direct ; services de représentations musicales en direct ; organisation de spectacles en direct » ;

–        la marque figurative enregistrée au Royaume-Uni sous le numéro 2330341 le 7 novembre 2003 et dûment renouvelée le 25 avril 2013, désignant les services compris dans les classes 35, 36 et 41, telle que reproduite ci-après :

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–        la marque de l’Union européenne figurative enregistrée sous le numéro 3618857 le 16 octobre 2006 et limitée, à la suite de la procédure d’annulation n° 8715 C, aux services relevant des classes 35, 36 et 41 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante : « Services de publicité et de promotion et services d’informations correspondants ; regroupement, pour le compte de tiers, de produits divers, permettant aux clients de les voir et de les acheter commodément dans une gamme de magasins de vente au détail de commerce non spécialisé » (classe 35) ; « Location de magasins ; crédit-bail ou gestion de biens immobiliers ; crédit-bail de bâtiments ou espaces dans des bâtiments ; services de gestion immobilière ; services d’informations concernant la location de magasins » (classe 36) ; « Services de divertissement ; fourniture de services de divertissement en direct » (classe 41), telle que reproduite ci-après :

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5        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphes 4 et 5, du règlement n° 207/2009. [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphes 4 et 5, du règlement 2017/1001].

6        Le 8 octobre 2013, la division d’opposition, après avoir examiné l’opposition de la requérante sur la base de la marque de l’Union européenne figurative enregistrée sous le numéro 3618857, a accueilli ladite opposition pour les produits compris dans les classes 3, 14 et 18, en condamnant par conséquent l’intervenante aux dépens.

7        Le 3 décembre 2013,l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition.

8        Par décision du 11 janvier 2016 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’opposition, en condamnant la requérante à supporter les frais exposés lors des procédures d’opposition et de recours.

9        Dans la décision attaquée, la chambre de recours a, en premier lieu, considéré que, s’agissant de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, la renommée des marques antérieures était prouvée sur le territoire pertinent pour les services relevant des classes 35 et 36, à l’exception, néanmoins, du service « regroupement, pour le compte de tiers, de produits divers, permettant aux clients […] de les acheter commodément dans une gamme de magasins de vente au détail de commerce non spécialisé », compris dans la classe 35. En deuxième lieu, quant au motif visé à l’article 8, paragraphe 4, dudit règlement, elle a considéré, en substance, que la requérante n’avait pas démontré que les conditions nécessaires pour établir la présentation trompeuse et le préjudice à l’égard du public cible avaient été, en l’espèce, remplies. En troisième lieu, en ce qui concerne l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, elle a considéré, en substance, que les produits et les services en cause étaient différents et que tout risque de confusion était exclu, indépendamment, d’ailleurs, de la similitude des marques concernées.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      Au soutien du recours, la requérante invoque trois moyens, tirés en substance, le premier, d’une violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, d’un vice de procédure et d’une violation des règles de procédure, le deuxième, d’une violation de l’obligation de motivation, d’une violation du droit d’être entendu et d’une violation de l’article 8, paragraphe 4, dudit règlement et, le troisième, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

 Sur le premier moyen

13      En premier lieu, la requérante reproche, en substance, à la chambre de recours d’avoir commis une erreur d’interprétation concernant une partie des services compris dans la classe 35 et pour lesquels la renommée des marques antérieures n’avait pas été démontrée. En deuxième lieu, elle soutient que ladite chambre a commis une erreur dans la définition des services compris dans les classes 35 et 36. En troisième lieu, elle invoque une violation par cette chambre des règles de procédure.

14      À l’appui du premier grief, la requérante soutient que le service « regroupement, pour le compte de tiers, de produits divers, permettant aux clients de les voir et de les acheter commodément dans une gamme de magasins de vente au détail de commerce non spécialisé », relevant de la classe 35, désigne également les services fournis par des « galeries commerciales », et pas seulement le service de « vente au détail » effectué dans des magasins individuels. Selon elle, une telle interprétation est notamment confirmée par l’emploi, dans le descriptif de ladite classe, de l’expression « dans une gamme de magasins de vente au détail », ce qui prouverait que, contrairement à ce qui a été soutenu par la chambre de recours, les services d’une galerie commerciale correspondaient au regroupement de produits divers en vente dans une « gamme de magasins » plutôt qu’exclusivement dans des magasins individuels de vente au détail.

15      À cet égard, par ailleurs, la chambre de recours n’aurait pas interprété correctement l’arrêt du 7 juillet 2005, Praktiker Bau- und Heimwerkermärkte (C‑418/02, ci-après l’« arrêt Praktiker », EU:C:2005:425). En effet, selon la requérante, la Cour a adopté, dans cet arrêt, une interprétation large de la notion de vente au détail, allant jusqu’à inclure les services d’une galerie commerciale.

16      Enfin, la requérante fait valoir que la décision attaquée est également entachée d’un vice de procédure dans la mesure où la chambre de recours a constaté que seule l’intervenante avait présenté des observations, alors qu’elle aussi avait présenté des observations le 12 novembre 2015.

17      À l’appui du deuxième grief, la requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a interprété la notion de services compris dans les classes 35 et 36 de façon stricte en considérant que, dans l’esprit du public, il n’existait aucun lien entre les services et les produits en cause, car, parmi les consommateurs des produits et des services relevant des classes 35 et 36, figurent également les consommateurs finaux des produits vendus dans les magasins.

18      Enfin, à l’appui du troisième grief, la requérante affirme que la chambre de recours a violé les règles de procédure en considérant qu’elle n’avait pas présenté d’argument démontrant que l’usage de la marque demandée tirait indûment profit de la marque antérieure ou lui portait préjudice.

19      L’EUIPO et l’intervenante concluent au rejet du présent moyen.

20      En ce qui concerne les deux premiers griefs soulevés par la requérante, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, la marque est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou semblable à une marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui n’ont pas de similitudes avec ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union européenne et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice. Ces conditions étant cumulatives, l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable cette disposition [arrêt du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, EU:T:2007:93, point 34].

21      S’agissant, en particulier, de la condition liée à l’identité ou à la similitude avec une marque antérieure, concernant la similitude des signes en conflit, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, l’appréciation de la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en cause doit se fonder sur l’impression d’ensemble produite par ces signes, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir arrêt du 9 mars 2012, Ella Valley Vineyards/OHMI – HFP (ELLA VALLEY VINEYARDS), T‑32/10, EU:T:2012:118, point 38 et jurisprudence citée].

22      En outre, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [voir arrêt du 14 avril 2011, Lancôme/OHMI – Focus Magazin Verlag (ACNO FOCUS), T‑466/08, EU:T:2011:182, point 52 et jurisprudence citée]. Sur le plan conceptuel, par exemple, des signes sont assez proches l’un de l’autre dès qu’ils évoquent, notamment, la même idée commerciale [voir, en ce sens, arrêt du 27 octobre 2016, Spa Monopole/EUIPO – YTL Hotels & Properties (SPA VILLAGE), T‑625/15, non publié, EU:T:2016:631, point 35].

23      Enfin, puisque l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 exige que la similitude existante soit susceptible de conduire le public concerné non pas à confondre les signes en conflit mais à effectuer un rapprochement entre ceux‑ci, c’est‑à‑dire à établir un lien entre eux, il doit en être conclu que la protection que cette disposition accorde en faveur des marques renommées est susceptible de s’appliquer alors même que les signes en conflit présentent un degré de similitude moindre (arrêt du 10 décembre 2015, El Corte Inglés/OHMI, C‑603/14 P, EU:C:2015:807, point 42).

24      En l’espèce, il y a lieu de considérer, d’abord, que les appréciations de la chambre de recours figurant aux points 21 à 24 de la décision attaquée, au demeurant non contestées par la requérante, et selon lesquelles les signes en conflit sont moyennement similaires en raison de leur élément verbal commun, à savoir le terme « burlington », doivent être entérinées.

25      Ensuite, parmi les autres conditions de protection prévues par l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, sur lesquelles la requérante fonde son premier moyen, doit être prise aussi en considération celle relative à la renommée des marques et des droits antérieurs et à leur éventuelle protection.

26      À cet égard, il convient de relever que, en l’absence d’une définition légale de la notion de renommée prise par le législateur européen, le juge de l’Union considère que, pour satisfaire à cette condition, une marque antérieure doit être connue d’une partie significative du public concerné par les produits ou les services couverts par celle-ci [voir, en ce sens, arrêts du 6 février 2007, Aktieselskabet af 21. november 2001/OHMI – TDK Kabushiki Kaisha (TDK), T‑477/04, EU:T:2007:35, point 48, et du 2 octobre 2015, The Tea Board/OHMI – Delta Lingerie (Darjeeling), T‑627/13, non publié, EU:T:2015:740, point 74].

27      Il ressort en outre des pièces du dossier que les marques antérieures de la requérante, qui désignent les services relevant des classes 35 et 36, sont connues d’une partie importante du public du marché pertinent comme étant le nom d’une galerie commerciale très connue au Royaume-Uni, située au centre de Londres et réunissant sous ses arches des boutiques de luxe. Cette renommée des marques antérieures de la requérante n’étant pas contestée par les parties, la question qui se pose en l’espèce est, en définitive, celle de savoir si ladite renommée correspond effectivement aux services relevant de la classe 35 pour lesquels les marques antérieures ont été enregistrées, de sorte que la requérante puisse légitimement bénéficier de la protection de la renommée en question.

28      Selon la chambre de recours, en ce qui concerne le service de vente au détail relevant de la classe 35, la renommée des marques antérieures de la requérante n’a pas été prouvée.

29      Cette conclusion de la chambre de recours ne saurait cependant être partagée.

30      Il convient d’abord de relever que, dans l’arrêt du 7 juillet 2005, Praktiker (C‑418/02, EU:C:2005:425), la Cour a jugé, au point 34, que « l’objectif du commerce de détail est la vente de produits aux consommateurs », que « [c]e commerce comprend, outre l’acte juridique de la vente, toute activité déployée par l’opérateur en vue d’inciter à la conclusion d’un tel acte » et que « [c]ette activité consiste notamment en la sélection d’un assortiment des produits proposés à la vente et en l’offre de diverses prestations qui visent à amener le consommateur à conclure ledit acte avec le commerçant en cause plutôt qu’avec un autre concurrent ».

31      En outre, le Tribunal a eu également l’occasion de préciser que l’interprétation faite par la Cour de la question de savoir si le commerce de détail de marchandises constituait un service au sens de l’article 2 de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), rappelée au point 30 ci-dessus, « ne saurait constituer une définition exhaustive et de portée générale de la notion de service de vente au détail » [arrêt du 26 juin 2014, Basic/OHMI – Repsol YPF (basic), T‑372/11, EU:T:2014:585, point 55].

32      Ainsi, contrairement à ce que soutient l’EUIPO dans la présente affaire, l’interprétation faite par la Cour au point 34 de l’arrêt du 7 juillet 2005, Praktiker (C‑418/02, EU:C:2005:425), ne permet pas d’affirmer que les galeries marchandes ou les centres commerciaux soient, par définition, exclus du champ d’application de la notion de service de vente au détail défini dans la classe 35.

33      L’interprétation faite par la Cour au point 34 de l’arrêt du 7 juillet 2005, Praktiker (C‑418/02, EU:C:2005:425), s’oppose, d’ailleurs, aussi à la thèse soutenue par l’EUIPO selon laquelle les services d’une galerie commerciale seraient essentiellement limités à des services de location et de gestion immobilière et que, par conséquent, les clients auxquels ces services s’adressent seraient principalement les personnes intéressées à prendre en location les magasins ou les bureaux se trouvant dans ladite galerie. En effet, la notion de « diverses prestations », telle que mentionnée audit point, ne peut pas ne pas inclure également les services organisés par une galerie commerciale afin de garder toute l’attractivité et les avantages pratiques d’un tel lieu de commerce, selon d’ailleurs les termes mêmes utilisés dans le libellé de la classe 35, le but étant celui de permettre aux clients intéressés par des produits divers « de les voir et de les acheter commodément dans une gamme de magasins » et d’augmenter ainsi dans ce lieu l’affluence de clients intéressés par l’achat desdits produits, plutôt, comme l’a relevé la Cour dans ledit arrêt, que de voir acheter ces produits chez « un autre concurrent » n’ayant pas son magasin de vente dans la galerie marchande dont il s’agit.

34      Il y a donc lieu de conclure que, eu égard au libellé de la classe 35, la notion de service de vente au détail, telle qu’interprétée par la Cour au point 34 de l’arrêt du 7 juillet 2005, Praktiker (C‑418/02, EU:C:2005:425), comprend aussi les services de vente fournis par une galerie commerciale.

35      À la lumière de ce qui précède, il y a lieu dès lors de constater que l’interprétation stricte de la notion de vente au détail utilisée en l’espèce par la chambre de recours est erronée et que la requérante peut, par conséquent, se prévaloir de la protection de la renommée des marques antérieures pour des services relevant de la classe 35.

36      Par ailleurs, la chambre de recours a considéré dans la décision attaquée qu’il n’y avait pas de lien entre les marques en conflit et que la requérante n’avait pas prouvé que l’usage de la marque demandée aurait pu tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures ou qu’il pourrait leur porter préjudice.

37      À cet égard, il convient de rappeler que, pour bénéficier de la protection prévue par l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, le titulaire de la marque antérieure doit également rapporter, parmi les conditions mentionnées au point 20 ci-dessus, la preuve, conformément au libellé de cet article, que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice (voir, en ce sens, arrêt du 22 mars 2007, VIPS, T‑215/03, EU:T:2007:93, point 34).

38      En outre, il convient de rappeler que l’existence d’un profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure doit être appréciée eu égard au consommateur moyen des produits ou des services visés par la marque, en tant que consommateur normalement informé et raisonnablement avisé (voir, en ce sens, arrêt du 12 mars 2009, Antartica/OHMI, C‑320/07 P, non publié, EU:C:2009:146, points 46 à 48). Or, s’agissant de produits de grande consommation, tels que les savons, les produits de toilette, les articles en cuir et autres articles similaires, le public pertinent est, en l’espèce, le grand public, composé précisément de consommateurs moyens.

39      Il convient également de rappeler que, afin de bénéficier de la protection instaurée par l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, le titulaire de la marque antérieure n’est pas tenu de démontrer l’existence d’une atteinte effective et actuelle à sa marque au sens de ladite disposition. En effet, lorsqu’il est prévisible qu’une telle atteinte découlera de l’usage que le titulaire de la marque postérieure peut être amené à faire de sa marque, le titulaire de la marque antérieure ne saurait être obligé d’attendre la réalisation effective de celle-ci pour pouvoir faire interdire ledit usage. Le titulaire de la marque antérieure doit toutefois établir l’existence d’éléments permettant de conclure à un risque sérieux qu’une telle atteinte se produise dans le futur (arrêt du 10 mai 2012, Rubinstein et L’Oréal/OHMI, C‑100/11 P, EU:C:2012:285, point 93).

40      Dès lors, afin de déterminer si l’usage du signe contesté tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale qui tienne compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, au nombre desquels figurent, notamment, l’intensité de la renommée et le degré de caractère distinctif de la marque, le degré de similitude entre les marques en conflit ainsi que la nature et le degré de proximité des produits ou des services concernés (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 42).

41      S’agissant, en particulier, de l’intensité de la renommée et du degré de caractère distinctif de la marque antérieure, la Cour a jugé que, plus le caractère distinctif et la renommée de cette marque étaient importants, plus l’existence d’une atteinte à celle-ci serait aisément admise. Aussi, plus l’évocation de la marque antérieure par le signe contesté est immédiate et forte, plus le risque que l’utilisation actuelle ou future du signe puisse tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure devient important (voir, en ce sens, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 67 à 69).

42      Dans ce contexte, il a été également jugé qu’il appartenait au titulaire de la marque antérieure de démontrer, le cas échéant, si le comportement économique du consommateur moyen de ses produits ou de ses services avait pu subir une modification en raison de l’usage de la marque postérieure ou s’il y aurait un risque sérieux qu’une telle modification puisse se produire dans le futur (arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 77 et 81 et point 6 du dispositif).

43      À la lumière de ce qui précède, il y a lieu dès lors de constater que, en l’espèce, la requérante n’a pas produit devant la chambre de recours ou le Tribunal des éléments cohérents permettant de conclure que l’usage de la marque demandée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures.

44      En effet, même si la requérante souligne le caractère « presque unique » de ses marques antérieures ainsi que de leur renommée « importante et exclusive », il y a lieu de relever qu’elle n’a pas fourni d’éléments spécifiques susceptibles d’étayer le fait que l’usage de la marque demandée diminuerait l’attrait de ses marques antérieures, notamment à la lumière des critères posés par l’arrêt du 14 novembre 2013, Environmental Manufacturing/OHMI (C‑383/12 P, EU:C:2013:741, point 43), selon lesquels de telles déductions doivent reposer « sur une analyse des probabilités et en prenant en compte les pratiques habituelles dans le secteur commercial pertinent, ainsi que toute autre circonstance de l’espèce ».

45      Or, le fait qu’un autre sujet économique puisse être autorisé à utiliser une marque incluant le terme « burlington », pour des produits semblables à ceux en vente dans la galerie londonienne de la requérante, n’est pas de nature, à lui seul, à affecter, aux yeux du consommateur moyen, l’attractivité commerciale de ce lieu. En effet, comme l’a d’ailleurs précisé la Cour dans l’arrêt du 7 juillet 2005, Praktiker (C‑418/02, EU:C:2005:425) (voir point 30 ci-dessus), une telle caractéristique est étroitement liée aux « diverses prestations » commerciales réalisées par les locataires des magasins se trouvant dans cette galerie et non exclusivement au nom de cette dernière, qui, de surcroît, correspond, comme l’a remarqué à juste titre la chambre de recours dans la décision attaquée, aux noms d’autres lieux également très connus se trouvant à proximité de cette galerie, tels que Burlington Gardens ou Burlington House.

46      Enfin, quant au vice de procédure dont serait entachée la décision attaquée dans la mesure où la chambre de recours a constaté que seule l’intervenante avait présenté des observations, alors que la requérante aussi avait présenté des observations le 12 novembre 2015, il convient de relever, d’une part, que ces dernières observations figurent au dossier de l’affaire en causeet, d’autre part, que, lors de l’audience, l’EUIPO a confirmé que lesdites observations, figurant aussi au dossier dont disposaient les instances concernées de l’EUIPO, ont été dûment prises en compte par ces dernières. Il convient dès lors de rejeter cet argument comme étant non fondé.

47      Quant au troisième grief de la requérante, il suffit de relever qu’il ressort du libellé des points 33 et 34 de la décision attaquée que la chambre de recours a pris formellement acte que la requérante avait bien présenté des observations, mais que ces dernières n’étaient pas aptes à démontrer, dans le cas d’espèce, la réunion des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, notamment à prouver que l’usage de la marque pouvait tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures de la requérante. Le grief tiré d’une violation des règles de procédure ne saurait, dès lors, être retenu.

48      Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen

49      La requérante fait d’abord valoir que, dans la décision attaquée, la chambre de recours ne motive nullement le rejet de son argument visant à faire valoir la violation, en l’espèce, de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009. En outre, ladite décision serait entachée d’une erreur de droit étant donné que, en raison de l’absence d’une renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, dudit règlement, l’opposition au titre de l’article 8, paragraphe 4, de ce règlement devait être rejetée en conséquence.La requérante estime ensuite que, lorsque l’appréciation du « goodwill », c’est-à-dire la force d’attraction de la clientèle, est invoquée, sur le plan national, dans le cadre d’une action en usurpation, cette appréciation ne saurait être limitée aux seuls services pour lesquels les marques antérieures ont été enregistrées, comme c’est le cas, en revanche, lors de l’appréciation de la renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du même règlement.Elle soutient avoir en tout état de cause largement prouvé devant ladite chambre sa renommée (à savoir son goodwill) en tant que galerie commerciale haut de gamme. En dernier lieu, elle affirme que cette chambre a commis une erreur de procédure en ne donnant pas aux parties, au cours de la procédure devant celle-ci, une nouvelle occasion pour présenter leurs arguments sur la violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement en question.

50      L’EUIPO conclut au rejet du présent moyen.

51      L’intervenante considère, quant à elle, que certains des arguments concernant l’application correcte de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009 ont été invoqués, par la requérante, seulement au stade de la procédure devant le Tribunal et que, par conséquent, ils ne sauraient être pris en considération par cette juridiction.

52      Il convient tout d’abord de rejeter l’argumentation de la requérante prise d’une violation de l’obligation de motivation et celle prise d’une violation du droit d’être entendu. Ces argumentations, en effet, ne sont pas fondées.

53      En effet, il ressort des points 36 et suivants de la décision attaquée que la chambre de recours a procédé à l’analyse des différentes conditions fixées par l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009 et, en l’espèce, aussi à celle des conditions relatives à l’action en usurpation. En outre, quant à la circonstance que les parties n’auraient pas pu présenter leurs observations sur ces conditions, il ressort du dossier de l’affaire que, tout au long de la procédure devant les instances de l’EUIPO, la requérante a bien été en mesure de présenter ses observations.

54      À cet égard, si devant la chambre de recours la requérante n’a pas développé le grief qu’elle avait elle-même invoqué lors de la procédure en opposition, à savoir la violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, il ne saurait être reproché à la chambre de recours de ne pas avoir demandé aux parties des observations complémentaires à ce sujet. Au surplus, selon la jurisprudence pertinente, le droit d’être entendu ne s’applique pas à l’avis final avant qu’il ne soit adopté par la chambre de recours compétente. En effet, celle-ci n’est pas tenue d’informer les parties de ses conclusions en droit avant de prononcer sa décision finale ni de leur laisser la possibilité de soumettre leurs observations sur ces conclusions, voire de soumettre des preuves supplémentaires [voir arrêt du 14 juin 2012, Seven Towns/OHMI (Représentation de sept carrés en différentes couleurs), T‑293/10, non publié, EU:T:2012:302, point 46 et jurisprudence citée].

55      Enfin, il convient de rappeler que l’appréciation des faits appartient à l’auteur de l’acte décisionnel. Or, le droit d’être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais non à la position finale que l’administration entend adopter [voir arrêt du 7 juin 2005, Lidl Stiftung/OHMI – REWE-Zentral (Salvita), T‑303/03, EU:T:2005:200, point 62 et jurisprudence citée].

56      En ce qui concerne ensuite l’argumentation de la requérante prise d’une violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, il convient de rappeler que, aux termes de cette disposition, le titulaire d’un signe autre qu’une marque peut s’opposer à l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne si ledit signe remplit cumulativement les quatre conditions suivantes : ce signe doit être utilisé dans la vie des affaires ; il doit avoir une portée qui n’est pas seulement locale ; le droit à ce signe doit avoir été acquis conformément au droit de l’État membre où le signe était utilisé avant la date de dépôt de la demande de marque de l’Union européenne ; enfin, en vertu de ce signe, son titulaire doit avoir le droit d’interdire l’utilisation d’une marque plus récente. Ces conditions sont cumulatives, de sorte que, lorsqu’un signe ne remplit pas l’une de ces conditions, l’opposition ne saurait aboutir [arrêt du 30 juin 2009, Danjaq/OHMI – Mission Productions (Dr. No), T‑435/05, EU:T:2009:226, point 35].

57      En l’espèce, la chambre de recours a relevé qu’une action en usurpation d’appellation introduite par rapport à une marque non enregistrée utilisée dans la vie des affaires au Royaume-Uni peut bien constituer un droit antérieur au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009 (voir notamment points 38 et 39 de la décision attaquée).

58      À cet égard, il a été jugé que l’opposant concerné doit établir, conformément au régime juridique de l’action en usurpation d’appellation prévue par le droit du Royaume-Uni, que les trois conditions suivantes soient satisfaites, à savoir, premièrement, que la marque non enregistrée ou le signe en cause ait acquis le « goodwill », deuxièmement, que la présentation de la part du titulaire de la marque plus récente soit trompeuse et, troisièmement, que le « goodwill » dont il s’agit ait subi un préjudice [voir, en ce sens, arrêt du 18 janvier 2012, Tilda Riceland Private/OHMI – Siam Grains (BASmALI), T‑304/09, EU:T:2012:13, point 19].

59      Force est également de constater que, au point 38 de la décision attaquée, la chambre de recours a fait précisément état de ces trois conditions et que la requérante concède, au demeurant, que ladite chambre a correctement identifié le cadre juridique concernant les actions en usurpation d’appellation.

60      En outre, il convient de rappeler que, conformément à l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 (devenu article 95 du règlement 2017/1001), la charge de la preuve devant l’EUIPO pèse à cet égard sur l’opposant concerné (voir, en ce sens, arrêt du 29 mars 2011, Anheuser-Busch/Budějovický Budvar, C‑96/09 P, EU:C:2011:189, point 189).

61      Ainsi, il ressort des pièces du dossier que, au cours de la procédure devant la division d’opposition, la requérante, en tant qu’opposant, tout en invoquant la violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, n’a pas fourni les éléments de fait ou de droit nécessaires pour prouver que les conditions relatives à l’application de cette disposition étaient dûment remplies. Ensuite, devant la chambre de recours, elle s’est limitée à affirmer qu’elle « maintenait les arguments présentés devant la division d’opposition », alors qu’il est constant que, devant ladite chambre, ces arguments n’ont pas été étayés davantage, ni en fait ni en droit.

62      C’est donc à bon droit que la chambre de recours, au point 39 de la décision attaquée, a considéré que la requérante n’avait pas prouvé que les conditions pour fonder l’action en usurpation d’appellation étaient dûment remplies. Ladite chambre n’ayant donc pas commis d’erreur de droit ou de procédure, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen.

 Sur le troisième moyen

63      La requérante invoque une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Elle considère, en substance, qu’il y a, en premier lieu, une similitude évidente entre les services de sa galerie commerciale et les produits visés par la marque demandée, car les consommateurs finaux seraient, en l’espèce, les mêmes. À cet égard, elle souligne que le terme « burlington » a un caractère particulièrement distinctif. En deuxième lieu, contrairement à ce que la chambre de recours a retenu au point 45 de la décision attaquée, elle estime que, même si la classe 35 concerne également l’activité d’une galerie commerciale, l’indication « regroupement » figurant dans le libellé de cette classe couvrirait les services de galeries commerciales plutôt que les services de vente au détail en général et que, dès lors, elle ne serait pas tenue de préciser les produits en cause. En troisième lieu, elle fait valoir, en substance, que, selon le manuel des marques de l’Intellectual Property Office (Office pour la propriété intellectuelle, Royaume-Uni) ainsi que selon la jurisprudence de la High Court of Justice (England & Wales) Chancery Division [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division de la Chancery, Royaume-Uni], elle n’avait pas l’obligation de préciser lesdits produits.

64      L’EUIPO et l’intervenante concluent au rejet du présent moyen.

65      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée.

66      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié « globalement », selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

67      En effet, le risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

68      Or, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

69      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 44 de la décision attaquée, que les services de la requérante et les produits visés par la marque demandée n’étaient pas similaires.

70      D’une part, en ce qui concerne les services relevant de la classe 36, il est constant que, par exemple, entre les services de location de magasins et de bureaux ou de gérance de biens immobiliers et les produits tels que des savons, des articles de bijouterie ou des articles en cuir, il n’y a aucune similitude. D’autre part, s’agissant des services relevant de la classe 35, le juge de l’Union a clairement établi que, pour le service de vente au détail, il était nécessaire que les produits offerts à la vente soient ponctuellement précisés [voir, en ce sens, arrêt du 24 septembre 2008, Oakley/OHMI – Venticinque (O STORE), T‑116/06, EU:T:2008:399, point 44 ;voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 7 juillet 2005, Praktiker, C‑418/02, EU:C:2005:425, point 50].

71      Or, l’absence de toute indication précise au sujet des produits pouvant être vendus dans les différents magasins composant une galerie commerciale comme Burlington Arcade empêche toute association entre ces derniers et les produits de la marque demandée, la définition donnée, en l’espèce, par la requérante relative aux « produits de luxe » n’étant pas suffisante afin de préciser de quels produits il s’agit. Ainsi, à défaut d’une telle précision, il n’est pas possible d’établir une similitude ou une complémentarité entre les services visés par les marques antérieures et les produits visés par la marque demandée.

72      Par conséquent, l’argument de la requérante selon lequel, pour les services des galeries commerciales, il n’est pas nécessaire de préciser les produits concernés est également à rejeter, au vu du fait que, au point 34 du présent arrêt, le Tribunal a jugé que, eu égard au libellé de la classe 35, la notion de service de vente au détail, telle qu’interprétée par la Cour au point 34 de l’arrêt du 7 juillet 2005, Praktiker (C‑418/02, EU:C:2005:425), comprend aussi les services de vente fournis par une galerie commerciale. En outre, il y a lieu de relever que le chevauchement entre les groupes de consommateurs finaux n’est pas suffisant pour prouver un risque de confusion en l’absence de toute précision sur les produits pouvant être vendus dans les espaces de la galerie.

73      Enfin, quant à l’argument relatif à l’applicabilité du manuel des marques de l’Office pour la propriété intellectuelle ainsi que de la jurisprudence de la High Court of Justice (England & Wales) Chancery Division [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division de la Chancery], cet argument est inopérant, car le cadre juridique de référence est, en l’espèce, l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et, selon une jurisprudence constante, le régime des marques de l’Union européenne est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national [voir arrêt du 16 janvier 2014, Message Management/OHMI – Absacker (ABSACKER of Germany), T‑304/12, non publié, EU:T:2014:5, point 58 et jurisprudence citée].

74      Au vu de tout ce qui précède, étant donné qu’une des conditions nécessaires visées à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 n’est pas remplie, il convient de rejeter le présent moyen ainsi que le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

75      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

76      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Tulliallan Burlington Ltd est condamnée aux dépens.

Frimodt Nielsen

Forrester

Perillo

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 décembre 2017.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.