Language of document : ECLI:EU:T:2019:141

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

7 mars 2019 (*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) no 1049/2001 – Documents relatifs aux études de toxicité établies dans le cadre du renouvellement de l’approbation de la substance active glyphosate – Refus partiel d’accès – Exception relative à la protection des intérêts commerciaux – Intérêt public supérieur – Règlement (CE) no 1367/2006 – Notion d’informations ayant trait à des émissions dans l’environnement »

Dans l’affaire T‑716/14,

Anthony C. Tweedale, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Me B. Kloostra, avocat,

partie requérante,

soutenu par

Royaume de Suède, représenté initialement par Mmes A. Falk, C. Meyer-Seitz, U. Persson, N. Otte Widgren, MM. E. Karlsson et L. Swedenborg, puis par Mmes Falk, Meyer-Seitz, H. Shev, MM. Swedenborg et F. Bergius, en qualité d’agents,

partie intervenante,

contre

Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), représentée par MM. D. Detken, J. Tarazona, Mmes C. Pintado et B. Vagenende, en qualité d’agents, assistés initialement de Mes R. van der Hout et A. Köhler, puis de Mes van der Hout et C. Wagner, avocats,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation partielle de la décision de l’EFSA du 16 octobre 2017 annulant et remplaçant la décision du 30 juillet 2014 et accordant un accès partiel à deux études de toxicité concernant la substance active glyphosate, établies dans le cadre de la procédure de renouvellement de l’approbation de cette substance active en vertu du règlement (CE) no 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 21 octobre 2009, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil (JO 2009, L 309, p. 1),

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. A. M. Collins, président, Mme M. Kancheva et M. G. De Baere (rapporteur), juges,

greffier : M. P. Cullen, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 13 septembre 2018,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le glyphosate est un produit chimique utilisé dans les pesticides, qui sont des produits phytopharmaceutiques.

2        Aux fins de son inscription comme substance active à l’annexe I de la directive 91/414/CEE du Conseil, du 15 juillet 1991, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques (JO 1991, L 230, p. 1), le glyphosate a fait l’objet d’un rapport d’évaluation établi par la République fédérale d’Allemagne, sur le fondement duquel la Commission des Communautés européennes a adopté, le 29 juin 2001, un rapport d’examen du glyphosate qui a été rendu public le 21 janvier 2002.

3        Le glyphosate a été inscrit sur la liste des substances actives de l’annexe I de la directive 91/414 par la directive 2001/99/CE de la Commission, du 20 novembre 2001, modifiant l’annexe I de la directive 91/414 en vue d’y inscrire les substances actives glyphosate et thifensulfuron-méthyle (JO 2001, L 304, p. 14). L’inscription du glyphosate à titre de substance active était valable du 1er juillet 2002 au 30 juin 2012.

4        La Commission ayant reçu une demande de renouvellement de l’approbation du glyphosate comme substance active, l’inscription du glyphosate sur la liste des substances actives de l’annexe I de la directive 91/414 a été prolongée temporairement jusqu’au 31 décembre 2015 par la directive 2010/77/UE de la Commission, du 10 novembre 2010, modifiant la directive 91/414 en ce qui concerne la date d’expiration de l’inscription de certaines substances actives à l’annexe I (JO 2010, L 293, p. 48).

5        À la suite de l’adoption du règlement (CE) no 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 21 octobre 2009, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414 du Conseil (JO 2009, L 309, p. 1), le glyphosate a été inscrit à l’annexe du règlement d’exécution (UE) no 540/2011 de la Commission, du 25 mai 2011, portant application du règlement no 1107/2009, en ce qui concerne la liste des substances actives approuvées (JO 2011, L 153, p. 1). La date d’expiration de l’approbation, soit le 31 décembre 2015, est restée inchangée.

6        Le règlement (UE) no 1141/2010 de la Commission, du 7 décembre 2010, relatif à l’établissement de la procédure de renouvellement de l’inscription d’un deuxième groupe de substances actives à l’annexe I de la directive 91/414 et à l’établissement de la liste de ces substances (JO 2010, L 322, p. 10), a désigné la République fédérale d’Allemagne comme État membre rapporteur et la République slovaque comme État membre corapporteur pour la procédure de renouvellement de l’approbation de la substance active glyphosate.

7        En vue du renouvellement de l’approbation de la substance active glyphosate, conformément au règlement no 1141/2010, la République fédérale d’Allemagne a soumis à la Commission et à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) un projet de « rapport d’évaluation du renouvellement » (ci-après le « RER »), daté du 18 décembre 2013, dont la version publique a été publiée par l’EFSA le 12 mars 2014.

8        Par lettre datée du 11 avril 2014, envoyée par courriel le lendemain, le requérant, M. Anthony C. Tweedale, a soumis à l’EFSA une demande d’accès à des documents en vertu du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), ainsi qu’en vertu du règlement (CE) no 1367/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 6 septembre 2006, concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (JO 2006, L 264, p. 13).

9        Cette demande portait sur les études de toxicité ASB2012-11499 et TOX95552393, « les deux “études clés” utilisées pour déterminer la dose journalière admissible (DJA) de glyphosate » (ci-après les « études demandées »).

10      La demande du requérant indiquait que « le RER ne cont[enait] pas leurs résumés publics ou ne cont[enait] aucun détail de leurs protocoles ou de leurs résultats, lesquels [étaie]nt nécessaires pour apprécier leur fiabilité, qui [étai]t une tâche qui n’incomb[ait] pas uniquement à l’EFSA », et que « [l]es informations demandées [étaie]nt le rapport rédigé sur l’expérimentation animale et toutes les données brutes ou autres données auxiliaires de cette expérimentation ».

11      Par lettre du 5 juin 2014, l’EFSA a refusé l’accès aux études demandées. L’EFSA a mentionné qu’elle avait consulté les propriétaires des études demandées en application de l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 1049/2001. Elle a indiqué qu’il résultait de la position de ces derniers et de sa propre évaluation que ces études étaient couvertes par l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, relative à la protection des intérêts commerciaux, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle, et que leur protection complète était également la conséquence directe de leur qualification de « confidentielles » aux termes de l’article 63 du règlement no 1107/2009. Elle a considéré que la divulgation des études demandées révélerait le savoir-faire en matière d’expertise scientifique et la stratégie commerciale de leurs propriétaires, y compris leur savoir-faire en matière de compilation du dossier, et compromettrait leurs intérêts commerciaux.

12      L’EFSA a ajouté que, concernant la mise en balance des intérêts et la vérification de l’existence d’un intérêt public supérieur justifiant la divulgation des études demandées, l’intérêt du public à avoir accès aux informations scientifiques liées à l’innocuité de la substance active glyphosate était manifestement et pleinement satisfait par la publication de la version publique du RER (disponible sur le site Internet de l’EFSA). L’EFSA a refusé de divulguer au requérant les études demandées en application des exceptions prévues par l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, lues en combinaison avec les dispositions de ce règlement relatives au traitement confidentiel des données commerciales reçues en vue de l’évaluation scientifique, sans préjudice du règlement no 1367/2006.

13      Par courriel du 24 juin 2014, le requérant a présenté une demande confirmative tendant à ce que l’EFSA révise sa position.

14      Par décision du 30 juillet 2014, l’EFSA a confirmé son refus d’accès aux études demandées sur le fondement de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 et de l’article 63 du règlement no 1107/2009. Elle a également indiqué que ces études ne constituaient pas des informations qui « [avaie]nt trait à des émissions dans l’environnement », au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006.

15      Postérieurement à l’introduction du présent recours, l’évaluation de la substance active glyphosate ayant été retardée, la période de validité de son approbation a été prolongée jusqu’au 30 juin 2016 par le règlement d’exécution (UE) 2015/1885 de la Commission, du 20 octobre 2015, modifiant le règlement d’exécution no 540/2011 pour prolonger les périodes d’approbation des substances actives suivantes : 2,4-D, acibenzolar-S-méthyle, amitrole, bentazone, cyhalofop butyl, diquat, esfenvalérate, famoxadone, flumioxazine, DPX KE 459 (flupyrsulfuron-méthyle), glyphosate, iprovalicarb, isoproturon, lambda-cyhalothrine, métalaxyl-M, metsulfuron-méthyle, picolinafène, prosulfuron, pymétrozine, pyraflufen-éthyle, thiabendazole, thifensulfuron-méthyle et triasulfuron (JO 2015, L 276, p. 48).

16      L’évaluation des risques de la substance active glyphosate réalisée par l’État membre rapporteur dans le RER a été soumise à un examen par les pairs de l’EFSA (ci-après l’« examen par les pairs »). Les conclusions de l’examen par les pairs ont été adoptées le 30 octobre 2015 et publiées le 12 novembre 2015.

17      Le règlement d’exécution (UE) 2016/1056 de la Commission, du 29 juin 2016, modifiant le règlement d’exécution no 540/2011 en ce qui concerne la prolongation de la période d’approbation de la substance active « glyphosate » (JO 2016, L 173, p. 52), a prolongé l’inscription du glyphosate à l’annexe du règlement d’exécution no 540/2011 jusqu’au 31 décembre 2017, compte tenu du fait que l’évaluation de la substance et la décision relative au renouvellement de son approbation avaient été retardées.

18      Le 16 octobre 2017, l’EFSA a adopté une nouvelle décision confirmative qui annule et remplace la décision du 30 juillet 2014 et qui accorde au requérant un accès partiel aux études demandées.

19      Dans cette décision, l’EFSA a précisé que les études demandées avaient été identifiées comme étant les suivantes :

–        1991, Brooker e.a., « The Effect of Glyphosate on Pregnancy of the Rabbit (Incorporates Preliminary Investigations) », Huntingdon Research Centre, date : 1991-10-14, Reference TOX95552393,

–        1996, Coles e.a., « Glyphosate technical : oral gavage teratology study in the rabbit Safepharm Laboratories Limited », Shardlow Business Park, dated 1996-07-04.

20      L’EFSA, prenant en compte les arguments du requérant dans le présent recours, a décidé de lui donner accès aux données brutes et aux conclusions (agrégées dans des tableaux et des schémas) des études demandées. Elle a considéré que les demandes de confidentialité soulevées par les propriétaires de ces études, sur le fondement du règlement no 1049/2001, lu en combinaison avec l’article 63, paragraphe 2, du règlement no 1107/2009, ne s’appliquaient pas à ces informations.

21      En revanche, premièrement, l’EFSA a considéré que les parties des études demandées identifiées comme entrant dans la liste des informations pouvant porter atteinte aux intérêts commerciaux des propriétaires de ces études, au sens de l’article 63, paragraphe 2, du règlement no 1107/2009, devaient être protégées conformément à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. Deuxièmement, l’EFSA a estimé que les informations relatives au « savoir-faire scientifique » contenues dans les études demandées, à savoir l’introduction, qui contient des informations administratives sur ces études, et les parties relatives aux matériels et aux méthodes, renfermant des informations sur les lots et les méthodes d’analyse, étaient également couvertes par l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux prévue par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. Troisièmement, elle a considéré que les annexes et les autres parties administratives des études demandées, contenant la certification réglementaire de ces études par les laboratoires spécialisés et incluant la déclaration de conformité avec les bonnes pratiques de laboratoire ainsi que les protocoles suivis par les propriétaires de ces études, étaient protégées en vertu de cette même disposition.

22      L’EFSA a également indiqué que les noms et les signatures contenus dans les études demandées qui n’étaient pas déjà dans le domaine public étaient couverts par l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001.

23      En outre, l’EFSA a indiqué qu’elle avait effectué la mise en balance des intérêts conformément aux règlements nos 1049/2001 et 1367/2006 et avait conclu qu’aucun intérêt public supérieur à la divulgation des études demandées ne s’appliquait. Elle a considéré que les informations communiquées au requérant satisfaisaient le besoin de connaissance du public et permettaient de reproduire son évaluation tout en protégeant les intérêts des propriétaires des études demandées. Selon l’EFSA, les données brutes et les conclusions étaient suffisantes pour examiner avec soin l’appréciation des résultats des études demandées conduite lors de l’évaluation du glyphosate et de la détermination des « doses sans effet nocif observé » (DSENO) sélectionnées et, combinées avec les informations déjà publiées, étaient suffisantes pour vérifier leur rôle dans l’établissement de la dose journalière admissible (DJA) proposée.

24      Enfin, l’EFSA a considéré que les parties des études demandées qui n’étaient pas divulguées ne contenaient pas d’informations relatives aux émissions de produits phytopharmaceutiques ou à leurs résidus dans l’environnement ni d’informations relatives aux émissions ou aux rejets de glyphosate ou à leurs effets dans l’environnement et que la présomption établie à l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006 n’était donc pas applicable.

25      Par ailleurs, le règlement d’exécution (UE) 2017/2324 de la Commission, du 12 décembre 2017, renouvelant l’approbation de la substance active « glyphosate » conformément au règlement no 1107/2009 et modifiant l’annexe du règlement d’exécution no 540/2011 (JO 2017, L 333, p. 10), a renouvelé l’approbation du glyphosate jusqu’au 15 décembre 2022, sous réserve des conditions fixées à l’annexe I.

 Procédure et conclusions des parties

26      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 octobre 2014, le requérant a introduit le présent recours.

27      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 19 janvier 2015, l’EFSA a demandé que la procédure soit suspendue dans l’attente des décisions mettant fin aux instances dans l’affaire C‑673/13 P, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe et dans l’affaire C‑442/14, Bayer CropScience et Stichting De Bijenstichting. Le requérant n’a pas présenté d’observations sur cette demande.

28      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 22 janvier 2015, le Royaume de Suède a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions du requérant.

29      Par ordonnance du 14 avril 2015, le président de la cinquième chambre du Tribunal a fait droit à la demande de suspension de la procédure, sur le fondement de l’article 54, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 77, sous a), du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991.

30      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, en application de l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure du Tribunal, le juge rapporteur a été affecté à la quatrième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

31      À la suite du prononcé des arrêts du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe (C‑673/13 P, EU:C:2016:889), et du 23 novembre 2016, Bayer CropScience et Stichting De Bijenstichting (C‑442/14, EU:C:2016:890), la procédure a repris.

32      Par décision du 8 décembre 2016, le président de la quatrième chambre du Tribunal a admis l’intervention du Royaume de Suède, lequel a déposé son mémoire en intervention le 28 février 2017. Le requérant et l’EFSA ont déposé leurs observations sur ce mémoire dans le délai imparti.

33      Par décision du président du Tribunal, la présente affaire a été attribuée à un nouveau juge rapporteur, siégeant dans la huitième chambre.

34      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 19 octobre 2017, l’EFSA a informé le Tribunal de l’adoption de la décision du 16 octobre 2017.

35      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 22 décembre 2017, le requérant a adapté ses conclusions afin d’obtenir également l’annulation de la décision du 16 octobre 2017.

36      L’EFSA et le Royaume de Suède ont déposé leurs observations sur le mémoire en adaptation des conclusions, respectivement, le 9 février et le 19 mars 2018.

37      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 13 septembre 2018.

38      Dans le mémoire en adaptation des conclusions, le requérant, soutenu par le Royaume de Suède, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions du 30 juillet 2014 et du 16 octobre 2017 ;

–        condamner l’EFSA aux dépens.

39      L’EFSA conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

40      Lors de l’audience, le requérant s’est désisté de sa demande d’annulation de la décision de l’EFSA du 30 juillet 2014. Le requérant a également indiqué qu’il ne demandait pas la divulgation des noms et des signatures des personnes mentionnées dans les études demandées. Dès lors, le présent recours doit être considéré comme visant à l’annulation partielle de la décision du 16 octobre 2017 (ci-après la « décision attaquée »).

 En droit

41      À l’appui du recours, le requérant soulève deux moyens dans la requête et quatre moyens nouveaux dans le mémoire en adaptation des conclusions.

42      Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 et de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006 en ce que les études demandées pourraient être qualifiées d’informations qui « ont trait à des émissions dans l’environnement », au sens de cette dernière disposition.

43      Le deuxième moyen est tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 et de l’article 4 de la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, signée à Aarhus le 25 juin 1998 et approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 2005/370/CE du Conseil, du 17 février 2005 (JO 2005, L 124, p. 1, ci-après la « convention d’Aarhus »), en ce que l’EFSA n’a pas évalué le risque concret de préjudice que causerait la divulgation des études demandées aux intérêts commerciaux invoqués.

44      Le troisième moyen est tiré de l’application erronée de l’article 63, paragraphe 2, du règlement no 1107/2009.

45      Le quatrième moyen est tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 en ce que l’EFSA n’aurait pas reconnu l’existence d’un intérêt public supérieur justifiant la divulgation des études demandées.

46      Le cinquième moyen est tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 en ce que l’EFSA aurait omis de mettre en balance l’intérêt du public à avoir accès aux informations environnementales figurant dans les études demandées avec l’intérêt des sociétés à protéger leurs intérêts commerciaux et/ou en faisant prévaloir l’intérêt économique de ces sociétés.

47      Le sixième moyen est tiré de la violation des articles 2 et 4 du règlement no 1049/2001 et de l’article 41 du règlement (CE) no 178/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2002, établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l’EFSA et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires (JO 2002, L 31, p. 1), en ce que l’EFSA aurait nié l’intérêt public et l’intérêt du requérant justifiant la divulgation des études demandées.

48      Par le premier moyen, le requérant soutient que l’EFSA a violé l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 et l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006 en ne reconnaissant pas que les études demandées pouvaient être qualifiées d’informations qui « ont trait à des émissions dans l’environnement », au sens de cette dernière disposition.

49      Selon le requérant, l’application de l’exception à la divulgation de documents, fondée sur la protection des intérêts commerciaux énoncée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, doit être écartée en raison de l’existence d’un intérêt public supérieur. En effet, selon l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006, la divulgation serait réputée présenter un intérêt public supérieur lorsque les informations demandées « ont trait à des émissions dans l’environnement ». Or, les études demandées constitueraient, s’agissant du glyphosate, des informations qui « ont trait à des émissions dans l’environnement », au sens de cette disposition, et elles auraient donc dû être divulguées.

50      L’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 prévoit :

« 2.      Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection :

–        des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle,

–        des procédures juridictionnelles et des avis juridiques,

–        des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit,

à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé. »

51      Le considérant 15 du règlement no 1367/2006 indique :

« Lorsque le règlement no 1049/2001 prévoit des exceptions, celles-ci devraient s’appliquer sous réserve des dispositions plus spécifiques du présent règlement relatives aux demandes d’accès aux informations environnementales. Les motifs de refus en ce qui concerne l’accès aux informations environnementales devraient être interprétés de manière restrictive, en tenant compte de l’intérêt que la divulgation des informations demandées présente pour le public et du fait que les informations demandées ont ou non trait à des émissions dans l’environnement. Les termes “intérêts commerciaux” couvrent les accords de confidentialité conclus par des institutions ou des organes dans le cadre d’activités bancaires. »

52      L’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006 prévoit :

« En ce qui concerne les dispositions de l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, du règlement no 1049/2001, à l’exception des enquêtes, notamment celles relatives à de possibles manquements au droit communautaire, la divulgation est réputée présenter un intérêt public supérieur lorsque les informations demandées ont trait à des émissions dans l’environnement. Pour ce qui est des autres exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001, les motifs de refus doivent être interprétés de manière stricte, compte tenu de l’intérêt public que présente la divulgation et du fait de savoir si les informations demandées ont trait à des émissions dans l’environnement. »

53      L’article 6 du règlement no 1367/2006 ajoute au règlement no 1049/2001 des règles spécifiques concernant des demandes d’accès à des informations environnementales (arrêt du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 79).

54      En ce qui concerne la notion d’informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement », au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006, il y a lieu de rappeler que, selon la Cour, il résulte du considérant 2 du règlement no 1049/2001 que la transparence permet de conférer aux institutions de l’Union européenne une plus grande légitimité, efficacité et responsabilité à l’égard des citoyens de l’Union dans un système démocratique et que, en permettant que les divergences entre plusieurs points de vue soient ouvertement débattues, elle contribue, en outre, à augmenter la confiance de ces citoyens (arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 75).

55      À ces fins, le règlement no 1049/2001 vise, comme l’indiquent son considérant 4 et son article 1er, à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible. De même, le règlement no 1367/2006 a pour objectif, ainsi que le prévoit son article 1er, de garantir une mise à disposition et une diffusion systématiques aussi larges que possible des informations environnementales détenues par les institutions et organes de l’Union (voir arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 52 et jurisprudence citée ; arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 98).

56      Ainsi, ce n’est que dans la mesure où elles dérogent au principe d’un accès le plus large possible à ces documents en restreignant cet accès que les exceptions à ce principe, notamment celles prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001, doivent, selon une jurisprudence constante de la Cour, être interprétées et appliquées strictement. La nécessité d’une telle interprétation restrictive est, par ailleurs, confirmée par le considérant 15 du règlement no 1367/2006 (voir arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 53 et jurisprudence citée).

57      En revanche, en établissant une présomption selon laquelle la divulgation des informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement », à l’exception de celles relatives à des enquêtes, est réputée présenter un intérêt public supérieur par rapport à l’intérêt tiré de la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, de sorte que la protection desdits intérêts commerciaux ne peut être opposée à la divulgation de ces informations, l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006 déroge, certes, à la règle d’une mise en balance des intérêts prévue à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001. Toutefois, ledit article 6, paragraphe 1, première phrase, permet ainsi une mise en œuvre concrète du principe d’un accès le plus large possible aux informations détenues par les institutions et organes de l’Union, de sorte qu’une interprétation restrictive de cette disposition ne saurait être justifiée (arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 54).

58      Cela implique qu’une institution de l’Union, saisie d’une demande d’accès à un document, ne peut justifier son refus de le divulguer sur le fondement de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, lorsque les informations contenues dans ce document constituent des informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement », au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006.

59      Or, il y a lieu de rappeler que, en l’espèce, dans la décision attaquée, l’EFSA a justifié son refus de divulguer certaines parties des études demandées, sur le fondement de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, en invoquant la protection des intérêts commerciaux des propriétaires des études demandées.

60      Les études demandées ont été définies par le requérant, dans sa demande d’accès aux documents, comme « les ‘‘deux études clés’’ utilisées pour déterminer la [DJA] de glyphosate ». Il s’agit de deux études de toxicité pour le développement utilisées dans le cadre de la demande de renouvellement de l’approbation de la substance active glyphosate.

61      Il est constant entre les parties que ces deux études ont été réalisées en laboratoire sur des lapines gravides par gavage par doses élevées de glyphosate. Ces études avaient pour objet d’évaluer les effets sur l’embryon et le développement du fœtus en cas d’exposition à la substance active glyphosate et d’établir la DSENO pour la toxicité maternelle et le développement du fœtus.

62      Les parties s’accordent également sur le fait que, sur le fondement des études demandées, la DSENO a été fixée à 50 mg/kg pc/jour (milligramme par kilogramme de poids corporel et par jour) et que la DJA de glyphosate, calculée sur la base de la DSENO en appliquant un facteur de sécurité de 100, a été fixée dans le RER à 0,5 mg/kg pc/jour.

63      L’article 3, paragraphe 2, sous j), du règlement (CE) no 396/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 23 février 2005, concernant les limites maximales applicables aux résidus de pesticides présents dans ou sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux d’origine végétale et animale et modifiant la directive 91/414 (JO 2005, L 70, p. 1), définit la DJA comme étant « la quantité estimée d’une substance présente dans les denrées alimentaires, exprimée par rapport au poids corporel, qui peut être ingérée quotidiennement tout au long de la vie sans risque appréciable pour tout consommateur, compte tenu de tous les facteurs connus au moment de l’évaluation ainsi que des groupes sensibles de la population (enfants, fœtus et embryons) ».

64      Il ressort de la partie 2.6 du volume 1 du RER, relative aux effets sur la santé humaine et animale de la substance active glyphosate, que la DSENO établie à partir des études demandées a également permis d’établir la « dose aiguë de référence » (DARf), fixée en appliquant un facteur de sécurité de 100 à 0,5 mg par kilogramme de poids corporel.

65      L’article 3, paragraphe 2, sous i), du règlement no 396/2005 définit la « dose aiguë de référence » comme étant « la quantité estimée d’une substance présente dans les denrées alimentaires, exprimée par rapport au poids corporel, qui peut être ingérée sur une période de courte durée, généralement au cours d’une journée, sans risque appréciable pour la santé du consommateur, compte tenu des données obtenues sur la base d’études appropriées ainsi que des groupes sensibles de la population (enfants, fœtus et embryons) ».

66      D’une part, il y a lieu de relever que les études demandées, qui ont été qualifiées d’« “études clés” utilisées pour déterminer la [DJA] de glyphosate », constituent des informations nécessaires devant figurer dans le dossier de renouvellement.

67      En effet, l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 1107/2009 prévoit que la demande d’approbation d’une substance active est introduite par le producteur de cette substance auprès de l’État membre rapporteur et est accompagnée, notamment, d’un dossier récapitulatif et d’un dossier complet, établis conformément à l’article 8, paragraphes 1 et 2, du règlement no 1107/2009.

68      Le point 3.1 de l’annexe II du règlement no 1107/2009 indique notamment que « [l]es dossiers soumis conformément à l’article 7, paragraphe 1, contiennent les informations nécessaires pour établir, le cas échéant, la [DJA], le niveau acceptable d’exposition de l’opérateur (NAEO) et la [DARf] ».

69      D’autre part, il y a lieu de considérer que les études demandées visent à déterminer les effets de l’exposition au glyphosate sur la santé humaine.

70      Selon l’article 3, point 23, du règlement no 1107/2009, les « essais et études » sont définis comme les « recherches ou expériences visant à déterminer les propriétés et le comportement d’une substance active ou de produits phytopharmaceutiques, à prévoir l’exposition à des substances actives et/ou à leurs métabolites pertinents, à fixer des niveaux de sécurité en matière d’exposition et à définir les modalités d’un emploi inoffensif des produits phytopharmaceutiques ».

71      En outre, l’article 3 du règlement (UE) no 283/2013 de la Commission, du 1er mars 2013, établissant les exigences en matière de données applicables aux substances actives, conformément au règlement no 1107/2009 (JO 2013, L 93, p. 1), prévoit que le règlement (UE) no 544/2011 de la Commission, du 10 juin 2011, portant application du règlement no 1107/2009 (JO 2011, L 155, p. 1), s’applique aux procédures de renouvellement de l’approbation d’une substance active engagées avant le 31 décembre 2013. Le règlement no 544/2011 s’applique donc à la procédure de renouvellement de l’approbation du glyphosate (voir point 4 ci-dessus).

72      L’annexe du règlement no 544/2011 énumère les exigences en matière de données applicables aux substances actives, conformément à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1107/2009.

73      Concernant les études toxicologiques et du métabolisme, le point 5 de l’annexe du règlement no 544/2011 prévoit notamment dans son introduction :

« i)      Les informations fournies, jointes à celles concernant une ou plusieurs préparations contenant la substance active, doivent être suffisantes pour permettre une évaluation des risques pour l’homme découlant de la manutention et de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant la substance active, et du risque pour l’homme dû aux traces de résidus contenues dans les aliments et l’eau. En outre, les informations fournies doivent être suffisantes pour :

–        permettre une décision quant à l’approbation éventuelle de la substance active,

–        fixer les conditions ou restrictions appropriées liées à toute approbation,

–        classer la substance active en fonction du danger,

–        fixer une [DJA] pertinente pour l’homme,

–        fixer des niveaux acceptables d’exposition de l’opérateur (NAEO),

–        […] »

74      Concernant plus précisément les études de la toxicité pour le développement, dont font partie les études demandées, le point 5.6.2 de l’annexe du règlement no 544/2011 indique :

« Les études relatées, associées à d’autres données et informations pertinentes sur la substance active, doivent être suffisantes pour permettre d’évaluer les effets sur le développement de l’embryon et du fœtus à la suite d’expositions répétées à la substance active, et doivent notamment être suffisantes pour :

–        détecter les effets directs et indirects sur le développement de l’embryon et du fœtus à la suite d’une exposition à la substance active,

[…]

–        et fixer la DSENO. »

75      Il en ressort que les études demandées, en permettant de déterminer notamment la DJA et la DARf de glyphosate, qui représentent la quantité estimée présente dans les denrées alimentaires qui peut être ingérée, quotidiennement ou tout au long de la vie, sans risque pour la santé du consommateur, font partie du processus d’évaluation des risques de la substance active pour la santé humaine aux fins du renouvellement de l’approbation du glyphosate.

76      Au regard des considérations qui précèdent, il convient d’examiner si les informations contenues dans les études demandées constituent des informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement », au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006, ce que conteste l’EFSA.

77      En premier lieu, l’EFSA fait valoir que les études demandées ne concernent pas des émissions effectives ou prévisibles dans l’environnement ni les effets de telles émissions.

78      Selon la jurisprudence de la Cour, il ressort en substance de l’article 1er, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1367/2006, lu en combinaison avec l’article 2, paragraphe 1, sous d), de celui-ci, que l’objectif dudit règlement est de garantir le droit d’accès aux informations concernant des facteurs, tels que les émissions, qui ont ou sont susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments de l’environnement, notamment sur l’air, l’eau et le sol. Or, tel n’est pas le cas d’émissions purement hypothétiques (voir arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 72 et jurisprudence citée).

79      Toutefois, la notion d’informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement » ne saurait, pour autant, être limitée aux seules informations concernant les émissions effectivement libérées dans l’environnement lors de l’application du produit phytopharmaceutique ou de la substance active en cause sur les plantes ou le sol, lesquelles émissions dépendent notamment des quantités de produit utilisées dans les faits par les agriculteurs ainsi que de la composition exacte du produit final commercialisé (arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 73).

80      Ainsi, relèvent également de cette notion les informations sur les émissions prévisibles du produit phytopharmaceutique ou de la substance active en cause dans l’environnement, dans des conditions normales ou réalistes d’utilisation de ce produit ou de cette substance correspondant à celles pour lesquelles l’autorisation de mise sur le marché dudit produit ou de ladite substance est octroyée et prévalant dans la zone où ce produit ou cette substance est destiné à être utilisé (voir arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 74 et jurisprudence citée).

81      En effet, si la mise sur le marché d’un produit ou d’une substance ne suffit en général pas pour considérer que ce produit ou cette substance sera nécessairement rejeté dans l’environnement et que les informations le ou la concernant « ont trait à des émissions dans l’environnement », il en va différemment s’agissant d’un produit, tel qu’un produit phytopharmaceutique, et des substances que ce produit contient, qui sont, dans le cadre d’une utilisation normale, destinés à être libérés dans l’environnement en raison de leur fonction même. Dans ce cas, les émissions prévisibles, dans des conditions normales ou réalistes d’utilisation, du produit en cause, ou des substances que ce produit contient, dans l’environnement ne sont pas hypothétiques et relèvent de la notion d’« émissions dans l’environnement » au sens de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006 (voir arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 75 et jurisprudence citée).

82      Il en ressort qu’une substance active contenue dans les produits phytopharmaceutiques, telle que le glyphosate, est, dans le cadre de son utilisation normale, destinée à être libérée dans l’environnement en raison de sa fonction même et ses émissions prévisibles ne sauraient, dès lors, être considérées comme purement hypothétiques.

83      En tout état de cause, les émissions de glyphosate ne sauraient être qualifiées d’émissions seulement prévisibles. En effet, les études demandées faisaient partie du dossier de renouvellement de l’approbation de la substance active glyphosate.

84      Il convient de rappeler, à cet égard, que le glyphosate a été inscrit comme substance active à compter du 1er juillet 2002. Depuis cette date, le glyphosate a été autorisé dans les États membres et a été effectivement utilisé dans des produits phytopharmaceutiques. Comme l’indique le considérant 19 du règlement d’exécution 2017/2324, le glyphosate est l’un des herbicides les plus couramment utilisés dans l’Union.

85      Les émissions de glyphosate dans l’environnement sont donc réelles. Cette substance active est notamment présente sous forme de résidus dans les plantes, l’eau et les aliments.

86      Les études demandées sont, dès lors, des études visant à établir la toxicité d’une substance active qui est effectivement présente dans l’environnement.

87      Partant, l’EFSA ne saurait soutenir que les études demandées ne portent pas sur des émissions réelles ni sur les effets d’émissions réelles.

88      En deuxième lieu, l’EFSA fait valoir que les études demandées ont été menées pour déterminer les propriétés dangereuses du glyphosate, et non pour établir le niveau d’émissions qui pourrait être autorisé, et que, partant, elles n’ont pas pour objet d’évaluer les émissions effectives ou prévisibles. Un lien avec des émissions dans l’environnement ne suffirait pas pour que ces études soient couvertes par l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006.

89      Certes, la Cour a jugé que, s’il n’y avait pas lieu de retenir une interprétation restrictive de la notion d’informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement », cette notion ne saurait pour autant inclure toute information présentant un quelconque lien, même direct, avec des émissions dans l’environnement. En effet, si ladite notion était interprétée comme couvrant de telles informations, elle épuiserait en grande partie la notion d’« information environnementale », au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous d), du règlement no 1367/2006. Une telle interprétation priverait ainsi de tout effet utile la possibilité, prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, pour les institutions de refuser la divulgation d’informations environnementales au motif notamment qu’une telle divulgation porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée et mettrait en péril l’équilibre que le législateur de l’Union a voulu assurer entre l’objectif de transparence et la protection de ces intérêts. Elle porterait également une atteinte disproportionnée à la protection du secret professionnel garantie par l’article 339 TFUE (arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 81).

90      Toutefois, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence citée au point 55 ci-dessus, le règlement no 1367/2006 poursuit, conformément à son article 1er, l’objectif de garantir une mise à disposition et une diffusion systématiques aussi larges que possible des informations environnementales. En effet, il ressort en substance du considérant 2 de ce règlement que l’accès aux informations environnementales garanti par ce règlement vise notamment à favoriser une participation plus efficace du public au processus décisionnel de manière à renforcer l’obligation des instances compétentes de rendre des comptes dans le cadre de la prise de décision en vue de sensibiliser l’opinion publique et d’obtenir son adhésion aux décisions adoptées (arrêts du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 80, et du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 98).

91      Or, pour pouvoir s’assurer que les décisions prises par les autorités compétentes en matière environnementale sont fondées et participer efficacement au processus décisionnel en matière environnementale, le public doit avoir accès aux informations lui permettant de vérifier si les émissions ont été correctement évaluées et doit être mis en mesure de raisonnablement comprendre la manière dont l’environnement risque d’être affecté par lesdites émissions. La Cour en a conclu qu’il y avait lieu d’inclure dans la notion d’informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement » les informations permettant au public de contrôler si l’évaluation des émissions effectives ou prévisibles, sur la base de laquelle l’autorité compétente a autorisé le produit ou la substance en cause, était correcte, ainsi que les données relatives aux incidences de ces émissions sur l’environnement (arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 80).

92      Il ressort de cette jurisprudence que la notion d’informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement », au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006, n’est pas limitée aux informations permettant d’évaluer les émissions en tant que telles, mais vise également les informations relatives aux incidences de ces émissions.

93      À cet égard, la Cour a donné des précisions dans le cadre de son interprétation de la notion d’« informations relatives à des émissions dans l’environnement », au sens de l’article 4, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2003, concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement et abrogeant la directive 90/313/CEE du Conseil (JO 2003, L 41, p. 26).

94      L’article 4, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive 2003/4 vise à mettre en œuvre l’article 4, paragraphe 4, sous d), de la convention d’Aarhus, dont les stipulations font partie intégrante de l’ordre juridique de l’Union (voir arrêt du 15 mars 2018, North East Pylon Pressure Campaign et Sheehy, C‑470/16, EU:C:2018:185, point 46 et jurisprudence citée). Cette convention prime les actes de droit dérivé de l’Union, lesquels doivent être interprétés, dans la mesure du possible, en conformité avec celle-ci (voir, par analogie, arrêt du 11 juillet 2018, Bosphorus Queen Shipping, C‑15/17, EU:C:2018:557, point 44).

95      Ainsi, il doit être tenu compte de la convention d’Aarhus aux fins de l’interprétation de la directive 2003/4 (arrêt du 23 novembre 2016, Bayer CropScience et Stichting De Bijenstichting, C‑442/14, EU:C:2016:890, point 54) et du règlement no 1367/2006 (arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 61).

96      Il y a lieu de relever que l’article 4, paragraphe 2, sous d), de la directive 2003/4 et l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006 visent à mettre en œuvre la même disposition de la convention d’Aarhus.

97      Comme l’a relevé M. l’avocat général Szpunar, au point 40 de ses conclusions dans l’affaire Saint-Gobain Glass Deutschland/Commission (C‑60/15 P, EU:C:2016:778), il est souhaitable d’assurer une cohérence dans l’interprétation de ces deux actes, à savoir la directive 2003/4 et le règlement no 1367/2006, dans la mesure où ils mettent en œuvre les mêmes dispositions de la convention d’Aarhus. Il est raisonnable de considérer, sauf indication contraire explicite, que le législateur de l’Union a entendu mettre en œuvre cette convention de manière uniforme en droit de l’Union, tant pour les États membres que pour les institutions de l’Union.

98      Dès lors, il y a lieu de considérer que l’interprétation retenue par la Cour, dans l’arrêt du 23 novembre 2016, Bayer CropScience et Stichting De Bijenstichting (C‑442/14, EU:C:2016:890), de la notion d’« informations relatives à des émissions dans l’environnement », au sens de l’article 4, paragraphe 2, sous d), de la directive 2003/4, s’applique également à la notion d’informations « qui ont trait aux émissions dans l’environnement », au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006.

99      La Cour a jugé que le public devait avoir accès non seulement aux informations sur les émissions en tant que telles, mais aussi à celles concernant les conséquences à plus ou moins long terme de ces émissions sur l’état de l’environnement, telles que les effets desdites émissions sur les organismes non ciblés. En effet, l’intérêt du public à accéder aux informations relatives aux émissions dans l’environnement est précisément de savoir non seulement ce qui est, ou sera de manière prévisible, rejeté dans l’environnement, mais aussi de comprendre la manière dont l’environnement risque d’être affecté par les émissions en question (voir, par analogie, arrêt du 23 novembre 2016, Bayer CropScience et Stichting De Bijenstichting, C‑442/14, EU:C:2016:890, point 86).

100    Il s’ensuit que la notion d’informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement », au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006, doit être interprétée comme couvrant non seulement les informations sur les émissions en tant que telles, c’est-à-dire les indications relatives à la nature, à la composition, à la quantité, à la date et au lieu de ces émissions, mais aussi les données relatives aux incidences à plus ou moins long terme desdites émissions sur l’environnement (voir, par analogie, arrêt du 23 novembre 2016, Bayer CropScience et Stichting De Bijenstichting, C‑442/14, EU:C:2016:890, point 87).

101    À cet égard, en ayant permis de fixer la DSENO et la DJA de glyphosate, à savoir la dose maximale d’exposition à la substance active en deçà de laquelle aucun effet nocif n’est observé ainsi que la quantité estimée de la substance qui peut être ingérée quotidiennement tout au long de la vie sans risque appréciable pour le consommateur, les études demandées doivent être considérées, conformément à la définition de l’article 3, point 23, du règlement no 1107/2009, comme ayant conduit à « fixer des niveaux de sécurité en matière d’exposition » et à « définir les modalités d’un emploi inoffensif » du glyphosate.

102    De plus, il ressort du point 5 de l’annexe du règlement no 544/2011 que les études demandées, en permettant de fixer la DJA de glyphosate, constituent des informations permettant une « évaluation des risques pour l’homme découlant de la manutention et de l’utilisation de la substance active » ainsi que du « risque pour l’homme dû aux traces de résidus contenues dans l’alimentation et l’eau ». Plus précisément, les études demandées, en tant qu’études de la toxicité pour le développement, ont pour objet, selon le point 5.6.2 de l’annexe du règlement no 544/2011, de « permettre d’évaluer les effets sur le développement de l’embryon et du fœtus à la suite d’expositions répétées à la substance active ».

103    Il y a donc lieu de considérer que les études demandées, en établissant la DSENO, sur la base de laquelle ont été calculées la DJA et la DARf, ont permis de déterminer les limites en dessous desquelles le glyphosate, lorsqu’il est présent dans les denrées alimentaires, ne présente pas de risque, à plus ou moins long terme, pour la santé humaine, et donc de fixer les différentes valeurs relatives à l’incidence des émissions de glyphosate sur la santé humaine.

104    Par ailleurs, comme le relève le Royaume de Suède, la DJA représente un seuil d’exposition sans risque à long terme pour les consommateurs. Ainsi, si l’utilisation ou les résidus d’un produit phytopharmaceutique ont pour effet un dépassement de la DJA, ils seront considérés comme nocifs pour la santé.

105    À cet égard, l’EFSA reconnaît que la DJA fait partie du processus d’évaluation des risques aux fins de l’approbation d’une substance active, laquelle exige que les conditions énoncées à l’article 4 du règlement no 1107/2009 soient remplies. Elle indique que, à cet effet, il y a lieu d’évaluer si la substance active ou ses résidus ont des effets nocifs sur la santé humaine. L’EFSA relève que, lors d’une première étape, la valeur toxicologique de référence utilisée pour évaluer l’exposition à long terme des êtres humains est la DJA, calculée sur la base de la DSENO, et que, lors d’une seconde étape, l’exposition à la substance active et à ses résidus est évaluée et comparée à la DJA.

106    Or, il ressort de l’examen par les pairs, et il est constant entre les parties, que, sur la base des études demandées, la DJA de glyphosate est passée de 0,3 mg/kg pc/jour lors de la première approbation du glyphosate à 0,5 mg/kg pc/jour lors du renouvellement de l’approbation de cette substance active.

107    Une augmentation de la DJA implique la possibilité d’une augmentation des résidus de glyphosate considérés comme sans effet nocif sur la santé. Comme le relève le Royaume de Suède, une augmentation de la DJA a pour conséquence que les autorités compétentes accepteront des résidus de glyphosate plus élevés dans les aliments.

108    En troisième lieu, l’EFSA soutient que les doses administrées aux vertébrés en laboratoire ne sont pas équivalentes aux doses auxquelles les êtres humains seront exposés lors de l’utilisation de la substance et que ces études réalisées en laboratoire sont indépendantes du mode d’utilisation envisagé et ne correspondent pas à des conditions réalistes. Les conditions d’exposition utilisées dans les études en laboratoire ne seraient pas comparables à la fourchette des expositions humaines et environnementales résultant de la pulvérisation de glyphosate selon les bonnes pratiques agricoles.

109    Certes, en l’espèce, il n’est pas contesté que les études demandées ont été réalisées en laboratoire sur des lapines gravides par gavage avec des doses élevées de glyphosate qui ne correspondent pas à celles auxquelles un être humain est exposé lors d’une utilisation normale de cette substance.

110    Or, la Cour a jugé que ce qui importait ce n’était pas tant que les données en cause proviennent d’études réalisées en tout ou partie sur le terrain ou en laboratoire, ou encore de l’examen de la translocation, mais que lesdites études aient pour objet d’évaluer des « émissions dans l’environnement », au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006, c’est-à-dire les émissions effectives ou prévisibles du produit ou de la substance en cause dans l’environnement dans des circonstances représentatives des conditions normales ou réalistes d’utilisation de ce produit ou de cette substance, ou d’analyser les incidences de ces émissions (voir, par analogie, arrêt du 23 novembre 2016, Bayer CropScience et Stichting De Bijenstichting, C‑442/14, EU:C:2016:890, point 89).

111    Ainsi, ne constitueraient notamment pas des informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement » des données extraites d’essais ayant pour objet d’étudier les effets de l’utilisation d’une dose du produit ou de la substance en cause nettement supérieure à la dose maximale pour laquelle l’autorisation de mise sur le marché est octroyée et qui sera utilisée en pratique, ou dans une concentration bien plus élevée, dès lors que de telles données se rapportent à des émissions non prévisibles dans des conditions normales ou réalistes d’utilisation (voir, par analogie, arrêt du 23 novembre 2016, Bayer CropScience et Stichting De Bijenstichting, C‑442/14, EU:C:2016:890, point 90).

112    En revanche, relèvent de la notion d’informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement » des études visant à déterminer la toxicité, les effets et autres aspects d’un produit ou d’une substance dans les conditions réalistes les plus défavorables pouvant raisonnablement se présenter, ainsi que des études réalisées dans des conditions aussi proches que possible de la pratique agricole normale et des conditions prévalant dans la zone où ce produit ou cette substance sera utilisé (voir, par analogie, arrêt du 23 novembre 2016, Bayer CropScience et Stichting De Bijenstichting, C‑442/14, EU:C:2016:890, point 91).

113    Il en ressort que, pour que des études puissent être qualifiées d’informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement », au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006, ce ne sont pas tant les conditions de réalisation de ces études qui importent, notamment le fait qu’elles aient été réalisées ou non en laboratoire, mais leur objet.

114    Ainsi, l’EFSA ne saurait soutenir que, les doses élevées utilisées dans les études demandées pour fixer la DJA ne correspondant pas à celles émises effectivement dans l’environnement, les études demandées ne seraient pas liées aux utilisations envisagées et seraient purement théoriques.

115    En effet, cela signifierait que les études demandées ont fixé la DSENO de glyphosate pour l’être humain, à partir de laquelle la DJA a été calculée, à partir de données purement hypothétiques qui n’ont aucun rapport avec la manière dont les êtres humains seront exposés au glyphosate lors de son utilisation.

116    Ainsi, l’argument de l’EFSA, selon lequel les conditions de réalisation des études demandées ne sont pas liées aux émissions, n’est pas pertinent. Ce qui compte, ce ne sont pas tant les conditions de réalisation des études demandées que leur objet, qui est de définir la DSENO, laquelle a servi de base à l’établissement de la DJA ainsi que de la DARf. Il s’ensuit que l’objet des études demandées est de déterminer les limites au-delà desquelles l’exposition à la substance active glyphosate présente des risques pour la santé humaine.

117    Partant, les études demandées, en permettant de définir la dose maximale d’exposition au glyphosate au-delà de laquelle les résidus de la substance active seront considérés comme nocifs pour la santé humaine, constituent des études visant à déterminer la toxicité du glyphosate dans les conditions réalistes les plus défavorables pouvant raisonnablement se présenter.

118    En outre, en application de la jurisprudence citée au point 91 ci-dessus, selon laquelle le public doit être mis en mesure de raisonnablement comprendre la manière dont l’environnement risque d’être affecté par les émissions, il y a lieu de considérer que l’accès du requérant aux études demandées lui permettrait de comprendre la manière dont la santé humaine risque d’être affectée par les rejets de glyphosate dans l’environnement.

119    Il ressort de ce qui précède que les études demandées doivent être considérées comme constituant des informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement », au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006.

120    Dès lors, en application de cette disposition, la divulgation des études demandées est réputée présenter un intérêt public supérieur et l’EFSA ne pouvait la refuser au motif que cela porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux des propriétaires des études demandées, au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

121    Il en résulte que n’est pas pertinent l’argument de l’EFSA selon lequel, les parties des études demandées qui ont été divulguées permettant de vérifier le résultat des études ou de l’évaluation effectuée, l’accès aux études complètes ne serait pas nécessaire.

122    Par ailleurs, dans la décision attaquée, dans le cadre de l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, l’EFSA a indiqué que l’article 63, paragraphe 2, du règlement no 1107/2009 contenait une liste non exhaustive d’informations sensibles dont la divulgation était en principe considérée comme portant atteinte à la protection des intérêts commerciaux des personnes concernées. Elle a estimé que les parties des études identifiées comme entrant dans cette liste devaient être protégées conformément à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

123    D’une part, il ressort de la décision attaquée que l’EFSA ne précise pas quelles parties des études demandées auraient été identifiées comme entrant dans la liste de l’article 63, paragraphe 2, du règlement no 1107/2009.

124    À cet égard, il y a lieu de relever que, s’agissant des informations relatives aux noms et aux adresses des personnes pratiquant des essais sur les vertébrés, visées à l’article 63, paragraphe 2, sous g), du règlement no 1107/2009, l’EFSA a indiqué explicitement qu’elles étaient protégées en vertu de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001. Or, il convient de rappeler que ces informations ne font pas l’objet du présent recours.

125    En revanche, l’EFSA n’indique pas quelles informations figurant dans les études demandées relèveraient d’une des autres exceptions contenues dans la liste de l’article 63, paragraphe 2, du règlement no 1107/2009. À cet égard, il y a lieu de relever que le tableau figurant en annexe de la décision attaquée, indiquant quelles parties des études demandées ont été divulguées ou non et pour quel motif, ne fait référence à l’article 63, paragraphe 2, du règlement no 1107/2009 que pour ce qui concerne les parties de ces études qui ont été divulguées, à savoir le titre, la table des matières et les tableaux, schémas et annexes contenant des données brutes des études.

126    D’autre part, l’EFSA indique explicitement, dans la décision attaquée, qu’elle a appliqué l’article 63, paragraphe 2, du règlement no 1107/2009 dans le cadre de l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, à savoir la protection des intérêts commerciaux.

127    Or, il ressort de ce qui précède que l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux, prévue par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, ne peut être invoquée pour s’opposer à la divulgation les études demandées, qui sont considérées comme constituant des informations « qui ont trait à des émissions dans l’environnement » au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006.

128    Partant, il y a lieu de considérer que l’EFSA n’a pas justifié l’application de l’article 63, paragraphe 2, du règlement no 1107/2009.

129    Au vu de l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu d’accueillir le premier moyen et, partant, d’annuler la décision attaquée en ce qu’elle a refusé la divulgation de l’ensemble des études demandées, à l’exception des noms et des signatures des personnes qui y sont mentionnées.

 Sur les dépens

130    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

131    L’EFSA ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le requérant, conformément aux conclusions de celui-ci.

132    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. Dès lors, le Royaume de Suède supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) du 16 octobre 2017 annulant et remplaçant la décision du 30 juillet 2014 et accordant un accès partiel à deux études de toxicité concernant la substance active glyphosate, établies dans le cadre de la procédure de renouvellement de l’approbation de cette substance active, est annulée en ce que l’EFSA refuse la divulgation de l’ensemble de ces études, à l’exception des noms et des signatures des personnes qui y sont mentionnées.

2)      L’EFSA supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par M. Anthony Tweedale.

3)      Le Royaume de Suède supportera ses propres dépens.

Collins

Kancheva

De Baere

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 mars 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.