Language of document : ECLI:EU:C:2020:128

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. EVGENI TANCHEV

présentées le 27 février 2020 (1)

Affaire C897/19 PPU

I.N.,

avec la participation de

la Fédération de Russie

[demande de décision préjudicielle formée par le Vrhovni sud (Cour suprême, Croatie)]

« Accord EEE et droit de recevoir des services – Confiance mutuelle et régime d’asile européen commun – Règlement Dublin III et États associés à l’espace Schengen – Demande d’extradition adressée par un État tiers à un État membre de l’Union européenne concernant un ressortissant de l’Espace économique européen (EEE) – Octroi de l’asile par cet État membre de l’EEE, avant l’acquisition de la nationalité, à un ressortissant de l’EEE qui fait l’objet d’une demande d’extradition, octroi motivé par le risque d’être exposé à des traitements inhumains ou dégradants et de faire l’objet d’une procédure pénale inéquitable en cas de refoulement vers l’État tiers demandeur – Arrestation et détention par un État membre de l’Union européenne en vue d’extrader un ressortissant de l’EEE aux fins des poursuites pour la même infraction que celle envisagée dans le cadre de la procédure d’asile dans l’État AELE – Discrimination en raison de la nationalité dans le cadre d’une extradition – Accord international entre la République d’Islande, le Royaume de Norvège et l’Union relatif à la procédure de remise et à la coopération judiciaire en matière pénale – Sur le point de savoir si l’État membre requis est tenu d’informer l’État de l’EEE de la demande d’extradition de l’État tiers – Sur le point de savoir si un État membre de l’Union européenne est tenu de remettre un ressortissant de l’Union à son État d’origine plutôt que de faire droit à la demande d’extradition d’un État tiers – Arrêt Petruhhin de la Cour – Risque d’impunité – Articles 4, 19 et 47 de la charte des droit fondamentaux de l’Union européenne »






1.        I.N. est un ressortissant de Russie, et est devenu ressortissant d’Islande le 19 juin 2019, après avoir obtenu l’asile en tant que réfugié dans ce pays le 8 juin 2015. Le 30 juin 2019, il a été arrêté par les autorités croates, alors qu’il était en vacances avec sa famille, lors du passage en bus de la frontière entre cet État membre et la Slovénie, et est depuis incarcéré. L’arrestation a eu lieu en vertu d’un avis de recherche international émis le 20 mai 2015 par le bureau d’Interpol à Moscou.

2.        La Fédération de Russie (ci-après la « Russie ») demande à la République de Croatie (ci-après la « Croatie ») d’extrader I.N. pour des motifs de corruption ; elle est appuyée par le procureur général de Croatie qui représente celle-ci (ci‑après le « procureur général »). La Constitution croate s’oppose à l’extradition de ses propres ressortissants, mais pas des non‑nationaux, comme I.N., lorsque, comme dans le cas de la Russie, il n’existe pas d’accord d’extradition. Le procureur général soutient que, dans les circonstances de l’affaire au principal, le droit de l’Union ne s’oppose pas à cette situation.

3.        La République d’Islande (ci-après l’ « Islande ») demande un sauf-conduit pour I.N. vers l’Islande, dans la mesure où les poursuites dont il fait l’objet en Russie semblent avoir fondé l’octroi de l’asile avant que I.N. n’acquière la nationalité islandaise.

4.        À l’appui de la demande de sauf-conduit, I.N. et l’Islande invoquent le droit de l’Union, mais surtout le droit de l’Espace économique européen (EEE) (2). Dans le même temps, l’Islande invoque les articles 18 et 21 TFUE qui, selon l’arrêt Petruhhin (3), s’opposent à une discrimination en raison de la nationalité en matière d’extradition vers des États tiers de citoyens de l’Union européenne ayant exercé leurs droits à la libre circulation, mais qui font toutefois l’objet de réserves importantes et pertinentes pour la procédure au principal.

5.        C’est sur ce point que porte en substance la demande de décision préjudicielle du Vrhovni sud (Cour suprême, Croatie ; ci‑après la « juridiction de renvoi »). Cette demande fournit à la Cour l’opportunité de statuer sur les points de jonction entre l’accord EEE et le droit de l’Union, sur les conséquences de la participation d’États tiers, tels que l’Islande, à l’acquis de Schengen en qualité d’États associés à l’espace Schengen (4) et sur l’association de l’Islande au règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (5) (ci‑après le « règlement Dublin III »). La participation à la fois de l’Islande (6) et de la Croatie au règlement Dublin III est d’une importance particulière pour la procédure au principal, tout comme, plus généralement, pour le régime d’asile européen commun (7).

6.        De plus, il convient de prendre en considération l’accord, entre l’Union européenne et la République d’Islande et le Royaume de Norvège, relatif à la procédure de remise entre les États membres de l’Union européenne et la République d’Islande et le Royaume de Norvège (8) , avec pour toile de fond une série d’instruments du Conseil de l’Europe en matière d’extradition (9), ainsi que la convention de Genève relative au statut des réfugiés (10). Il convient de prendre aussi dûment en considération l’interdiction, édictée par le droit de l’Union, des extraditions en cas de risque de peines ou de traitements inhumains ou dégradants, qui s’applique à la fois aux extraditions vers des pays tiers (11) et aux extraditions entre États membres dans le cadre du mandat d’arrêt européen (12) (telle que reflétée, respectivement, aux articles 19 et 4 de la Charte), ainsi que l’interdiction des extraditions en cas d’allégations de défaillances systémiques dans le système judiciaire de l’État membre d’émission qui compromettent la tenue d’un procès équitable (article 47 de la Charte) (13).

7.        En réponse à la première question déférée, je suis parvenu à la conclusion que les autorités croates étaient tenues, en vertu des principes développés dans l’arrêt Petruhhin, d’informer les autorités islandaises de la demande d’extradition de la Russie dirigée contre I.N., et continuent d’être tenues de transmettre à l’Islande tout élément en leur possession susceptible d’aider les autorités islandaises à prendre une décision quant à d’éventuelles poursuites dirigées contre I.N. en Islande et quant à une demande de remise.

8.        En outre, en raison de l’obligation de confiance mutuelle dans la qualité et la légalité des lois des États participants qui sous-tend le régime d’asile européen commun, et notamment le règlement Dublin III, il n’est pas permis aux autorités croates, y compris aux juridictions, de ne pas se conformer à une décision accordant l’asile adoptée par un État associé à l’espace Schengen, tel l’Islande, en vertu du régime d’asile européen commun. Une telle incohérence se présenterait si la Croatie i) s’abstenait de communiquer à l’Islande une demande d’extradition concernant des chefs de poursuites pénales identiques ou semblables à ceux en vertu desquels l’Islande a accordé l’asile à I.N., dès lors que l’Islande a constaté qu’elle était l’État responsable au titre du règlement Dublin III (14), et si ii) l’une des autorités croates, y compris les juridictions, statuait sur le risque que I.N. soit exposé à des traitements inhumains ou dégradants ou à un déni de justice flagrant en Russie à la date de la procédure en Croatie, de manière incompatible avec l’octroi en 2015 de l’asile à I.N. par l’Islande.

9.        Dans le cadre de la réponse à la seconde question, étant donné que l’Islande doit encore introduire une demande d’extradition, la Croatie n’est actuellement pas tenue de remettre activement I.N. à l’Islande en application de l’accord relatif à la procédure de remise (15). Il appartiendra aux juridictions croates de déterminer si, au vu de l’ensemble des circonstances, un mandat d’arrêt finalement émis par l’Islande, combiné à l’accord relatif à la procédure de remise, offre une protection contre l’impunité équivalente à l’extradition, sans libérer ces juridictions de leur obligation de se conformer à l’octroi en 2015 de l’asile par l’Islande.

I.      Le cadre juridique

A.      Le droit de l’Union

10.      L’article 18, paragraphe 1, TFUE dispose :

« Dans le domaine d’application des traités, et sans préjudice des dispositions particulières qu’ils prévoient, est interdite toute discrimination exercée en raison de la nationalité. »

11.      L’article 2, paragraphe 1, de la convention d’application de l’accord de Schengen, du 14 juin 1985, entre les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990 (16) dispose :

« Les frontières intérieures peuvent être franchies en tout lieu sans qu’un contrôle des personnes soit effectué. »

12.      L’article 2 du protocole (no 19) sur l’acquis de Schengen intégré dans le cadre de l’Union européenne (17) dispose :

« L’acquis de Schengen s’applique aux États membres visés à l’article 1er, sans préjudice de l’article 3 de l’acte d’adhésion du 16 avril 2003 et de l’article 4 de l’acte d’adhésion du 25 avril 2005. Le Conseil se substitue au comité exécutif institué par les accords de Schengen. »

13.      Le premier alinéa de l’article 6 du protocole (no 19) sur l’acquis de Schengen intégré dans le cadre de l’Union européenne (18) dispose :

« La République d’Islande et le Royaume de Norvège sont associés à la mise en œuvre de l’acquis de Schengen et à la poursuite de son développement. Des procédures appropriées sont prévues à cet effet dans le cadre d’un accord avec ces États, conclu par le Conseil statuant à l’unanimité des membres visés à l’article 1er. Un tel accord doit comprendre des dispositions sur la contribution de [la République d’Islande] et [du Royaume de Norvège] à toute conséquence financière résultant de la mise en œuvre du présent protocole. »

14.      L’article 1er de l’accord d’association à l’acquis de Schengen (19) dispose :

« La République d’Islande et le Royaume de Norvège, ci‑après dénommés respectivement “Islande” et “Norvège”, sont associés aux activités de la Communauté européenne et de l’Union européenne dans les domaines couverts par les dispositions visées aux annexes A et B du présent accord ainsi que par celles qui leur feront suite.

Le présent accord crée des droits et obligations réciproques conformément aux procédures qui y sont prévues. »

15.      L’article 4, paragraphes 1 et 2, de l’acte d’adhésion de la République de Croatie (20) dispose :

« 1.      Les dispositions de l’acquis de Schengen visées dans le protocole sur l’acquis de Schengen intégré dans le cadre de l’Union européenne (ci‑après dénommé le “protocole Schengen”), annexé au TUE et au TFUE, et les actes fondés sur celles‑ci ou qui s’y rapportent, énumérés à l’annexe II, ainsi que tout nouvel acte de cette nature adopté avant la date d’adhésion, sont contraignants pour la [République de Croatie] et s’y appliquent à compter de la date d’adhésion.

2.      Les dispositions de l’acquis de Schengen qui ont été intégrées dans le cadre de l’Union européenne et les actes fondés sur celles‑ci ou qui s’y rapportent et qui ne sont pas visés au paragraphe 1, bien qu’ils soient contraignants pour la [République de Croatie] à compter de la date d’adhésion, ne s’appliquent en Croatie qu’à la suite d’une décision du Conseil à cet effet, après qu’il a été vérifié, conformément aux procédures d’évaluation de Schengen applicables, que les conditions nécessaires à l’application de toutes les parties de l’acquis concerné, y compris l’application effective de l’ensemble des règles Schengen, en conformité avec les critères communs adoptés ainsi qu’avec les principes fondamentaux, sont remplies en Croatie. […] » (21).

B.      Le droit de l’EEE

16.      L’article 4 de l’accord sur l’Espace économique européen (22) (ci‑après l’« accord EEE ») dispose :

« Dans le domaine d’application du présent accord, et sans préjudice des dispositions particulières qu’il prévoit, est interdite toute discrimination exercée en raison de la nationalité. »

17.      L’article 36, paragraphe 1, de l’accord EEE dispose :

« Dans le cadre du présent accord, toute restriction à la libre prestation des services à l’intérieur du territoire des parties contractantes à l’égard des ressortissants des États membres de la CE et des États de l’AELE établis dans un État membre de la CE ou dans un État de l’AELE, autre que celui du destinataire de la prestation, est interdite. »

C.      Le droit national

18.      L’article 9 de la Constitution de la République de Croatie (« Narodne novine » no 56/90, 135/97, 113/00, 28/01, 76/10 et 5/14) dispose :

« Un ressortissant de la République de Croatie ne peut être expulsé de la République de Croatie ni privé de sa nationalité, ni extradé vers un autre État, sauf dans le cadre de l’exécution d’une décision sur l’extradition ou la remise, adoptée conformément aux traités internationaux ou à l’acquis communautaire. »

19.      L’article 12, paragraphe 1, points 1, 3 et 4, du Zakon o međunarodnoj pravnoj pomoći u kaznenim stvarima (loi relative à l’entraide judiciaire internationale en matière pénale, Narodne novine 178/04 ; ci‑après le « ZOMPO ») prévoit qu’une demande d’assistance judiciaire internationale peut être rejetée si « 1) la demande concerne un acte considéré comme une infraction politique ou comme un acte lié à une telle infraction ; […] 3) l’acceptation de la demande serait susceptible de conduire à une atteinte à la souveraineté, à la sécurité, à l’ordre juridique ou à d’autres intérêts vitaux de la République de Croatie ; et si 4) on peut raisonnablement présumer que la personne visée par la demande d’extradition serait, en cas d’extradition, pénalement poursuivie ou sanctionnée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social, ou de ses opinions politiques, ou encore que sa situation serait rendue plus difficile pour l’un de ces motifs ».

20.      L’article 55 du ZOMPO dispose :

« (1)      Lorsque la juridiction compétente juge que les conditions légales de l’extradition ne sont pas remplies, elle adopte une ordonnance de rejet de la demande d’extradition et transmet celle‑ci sans délai au Vrhovni sud (Cour suprême) de la République de Croatie, qui, le procureur général compétent entendu, confirme, infirme ou modifie l’ordonnance. »

II.    Les faits de la procédure au principal et les questions préjudicielles déférées

21.      Comme mentionné ci‑dessus, le 20 mai 2015, le bureau d’Interpol à Moscou a émis un avis de recherche international à l’encontre de I.N. aux fins de son arrestation en raison de poursuites pénales pour corruption, et plus particulièrement pour une forme de corruption qualifiée de corruption passive (article 290, paragraphe 5, du code pénal de la Fédération de Russie). I.N. est suspecté d’avoir reçu, en sa qualité de directeur de la division des licences et certificats du ministère russe des situations d’urgence en République de Carélie, après concertation préalable avec d’autres fonctionnaires du ministère et dans le cadre d’un abus de ses fonctions officielles, un pot-de-vin d’un montant de 833 000 roubles russes (RUB) (environ 11 700 euros) de la part d’un représentant d’une entreprise et de lui avoir délivré en contrepartie des licences relatives au montage, au soutien technique et à la réparation d’appareils de prévention des incendies dans des immeubles et des chantiers.

22.      Le 30 juin 2019, à un point de passage frontalier croate, I.N. a été arrêté sur la base de l’avis de recherche international précité. À la frontière, I.N. a présenté un titre de voyage islandais pour réfugiés no […], valable du 25 février 2019 au 25 février 2021.

23.      Le 1er juillet 2019, I.N. a été déféré devant le juge d’instruction du Županijski sud (tribunal de comitat, Croatie) de Zagreb. Ce même jour, le Županijski sud (tribunal de comitat) de Zagreb a ordonné la mise sous écrou extraditionnel de I.N., en application de l’article 47 du ZOMPO. I.N. est toujours détenu, en dépit de ses recours infructueux.

24.      Le 1er août 2019, l’administration des affaires consulaires, service des visas et des étrangers auprès du ministère des Affaires étrangères et européennes de la Croatie, a transmis au Županijski sud (tribunal de comitat) de Zagreb une note de l’ambassade d’Islande indiquant que I.N. possède la nationalité islandaise et a une résidence permanente en Islande. Cette note déclare que I.N. a acquis la nationalité islandaise le 19 juin 2019. Avant d’acquérir la nationalité islandaise, il était détenteur du titre de voyage pour réfugiés no […]. La note indique également que le gouvernement islandais demande à ce qu’il soit délivré à I.N. un sauf-conduit pour l’Islande dans les plus brefs délais.

25.      Le 6 août 2019, le Županijski sud (tribunal de comitat) de Zagreb a reçu une demande du bureau du ministère public de la Fédération de Russie, sollicitant l’extradition de I.N. vers la Russie, conformément aux dispositions de la convention européenne d’extradition (23). La demande d’extradition était motivée par des poursuites pénales au titre de neuf infractions de corruption passive, visées à l’article 290, paragraphe 3, du code pénal de la Fédération de Russie, et de cinq infractions de corruption passive, visées à l’article 290, paragraphe 5, sous a), du code pénal de la Fédération de Russie. Des documents ont également été produits à l’appui de la demande d’extradition, conformément aux dispositions de la convention européenne d’extradition, en l’absence d’accord d’extradition entre la Croatie et la Russie.

26.      La demande indiquait que le bureau du ministère public de la Fédération de Russie garantit que la demande d’extradition n’a pas pour but de poursuivre la personne pour des motifs politiques, en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de ses opinions, que I.N. bénéficiera de toutes les possibilités d’exercer ses droits de la défense, y compris l’assistance d’un avocat, et qu’il ne sera pas soumis à la torture, à des traitements cruels ou inhumains, ou encore à des peines portant atteinte à la dignité humaine.

27.      Le 5 septembre 2019, la chambre du Županijski sud (tribunal de comitat) de Zagreb a jugé que les conditions légales de l’extradition de I.N. aux fins d’une procédure pénale, prévues aux articles 33, 34 et 37 du ZOMPO, étaient réunies.

28.      Le 30 septembre 2019, I.N. a interjeté appel devant la juridiction de renvoi. Selon la décision de renvoi, I.N. a déclaré qu’il existe un risque concret, sérieux et raisonnablement prévisible que, en cas d’extradition, il soit soumis à la torture et à des traitements inhumains et dégradants. Dans la requête en appel, il a déclaré, entre autres, qu’un statut de réfugié lui avait été reconnu en Islande précisément en raison des poursuites spécifiques en Russie, qu’il est détenteur d’un titre de voyage islandais pour réfugiés valable, et que le Županijski sud (tribunal de comitat) de Zagreb a mis fin de facto à la protection internationale qui lui avait été accordée en Islande. Il a également soutenu que le Županijski sud (tribunal de comitat) avait mal interprété la jurisprudence de l’arrêt Petruhhin (24).

29.      Selon la jurisprudence de la juridiction de renvoi, une demande d’extradition doit être rejetée lorsqu’il existe un risque réel que, en cas d’extradition de la personne concernée, celle-ci soit soumise à la torture, ou à des peines ou traitements inhumains. La décision de renvoi précise que ces aspects seront examinés dans le cadre de la procédure d’appel.

30.      Néanmoins, la juridiction de renvoi a des doutes sur le point de savoir si, avant d’adopter une décision sur la demande d’extradition sur le fondement des dispositions du droit de l’Union, il convient d’informer l’Islande, qui a accordé la nationalité à I.N., de la demande d’extradition, de manière à ce que cet État puisse solliciter, le cas échéant, la remise de son ressortissant aux fins de mener des poursuites dans le but de prévenir un risque d’impunité.

31.      Eu égard aux doutes quant à l’application du droit de l’Union, le Vrhovni sud (Cour suprême) a sursis à statuer le 26 novembre 2019 et a posé à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Convient-il d’interpréter l’article 18 TFUE en ce sens qu’un État membre de [l’Union] qui statue sur l’extradition vers un État tiers d’un ressortissant d’un État qui n’est pas membre de [l’Union], mais qui est membre de l’espace Schengen, est tenu d’informer de la demande d’extradition l’État membre de l’espace Schengen dont cette personne a la nationalité ?

2)      Si la question précédente appelle une réponse affirmative et que l’État membre de l’espace Schengen a sollicité la remise de cette personne aux fins de mener une procédure pour laquelle l’extradition est demandée, convient-il de lui remettre cette personne conformément à l’accord entre l’Union européenne et la République d’Islande et le Royaume de Norvège relatif à la procédure de remise entre les États membres de l’Union européenne et la République d’Islande et le Royaume de Norvège ? »

32.      La décision de renvoi est parvenue au greffe de la Cour le 5 décembre 2019 et il a été décidé de la traiter selon la procédure préjudicielle d’urgence.

33.      Des observations écrites ont été déposées devant la Cour par I.N., le procureur général, le gouvernement croate et la Commission européenne. I.N. et la Commission ont participé à l’audience qui s’est tenue le 31 janvier 2020, tout comme le gouvernement hellénique, les gouvernements d’Islande et du Royaume de Norvège ainsi que l’autorité de surveillance AELE (ci‑après l’« ASA »).

III. Résumé des observations écrites et orales

34.      I.N. affirme que les autorités islandaises ont établi qu’il avait témoigné devant les autorités russes compétentes à l’encontre de ses supérieurs hiérarchiques de l’administration publique au sujet de leurs activités de corruption, mais que, en raison des liens de sa hiérarchie avec des hauts fonctionnaires de l’administration publique, c’est lui qui avait été poursuivi plutôt que ses supérieurs hiérarchiques.

35.      I.N. soutient que les poursuites sont illégales et manquent de clarté, et que la Croatie agit en violation de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »). Il affirme que son statut de réfugié est toujours pertinent et qu’il aurait dû être pris en considération. Il fait également observer qu’il ne peut pas demander l’asile en application du droit croate parce que l’asile lui a déjà été octroyé et qu’il existe une jurisprudence de 2018 de la Cour constitutionnelle de Croatie qui oblige les juridictions croates à tenir compte des octrois de la protection internationale en application du règlement Dublin III (25).

36.      La notion d’« égalité de traitement » dans le cadre des quatre libertés est au centre des relations entre l’EEE et les États membres de l’Union (voir le considérant 15 et l’article 4 de l’accord EEE), de même que l’interprétation uniforme de l’accord EEE et de la législation de l’Union. L’objectif est de parvenir à une homogénéité entre les deux systèmes (article 105 de l’accord EEE).

37.      I.N. ajoute que la jurisprudence de la Cour relative à l’article 18 TFUE s’applique par analogie, car l’article 4 de l’accord EEE la reproduit en substance. Ainsi, une personne qui se trouve dans une situation relevant du champ d’application de l’accord EEE doit être traitée de la même manière, quelle que soit sa nationalité (26). Or, le litige au principal relève du champ d’application de l’article 36 de l’accord EEE, qui reprend en substance l’article 56 TFUE relatif à la libre prestation des services. Si les ressortissants de l’EEE ne pouvaient pas se prévaloir de la protection contre l’extradition prévue telle qu’établie dans l’arrêt Petruhhin (27), ils recourraient moins souvent aux services d’opérateurs touristiques proposant des voyages à travers l’Europe.

38.      I.N. ajoute que la libre circulation des personnes qui n’exercent pas une activité économique au sein de l’EEE et qui ne relèvent pas de l’une des quatre libertés relève parfois de l’accord EEE, parce que la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres (28) a été intégrée dans le droit de l’EEE par la décision du Comité mixte de l’EEE no 158/2007 du 7 décembre 2007 modifiant l’annexe V (Libre circulation des travailleurs) et l’annexe VIII (Droit d’établissement) de l’accord EEE (29). Dans les arrêts Gunnarsson (30) et Jabbi (31), la Cour AELE a interprété la directive 2004/38 de manière large afin de pallier l’absence d’une disposition du droit de l’EEE correspondant à l’article 21 TFUE en matière de nationalité.

39.      Selon I.N., la lutte contre l’impunité est un objectif légitime justifiant une restriction des libertés fondamentales, mais le même objectif peut être atteint par des mesures moins restrictives que l’extradition (32), et il renvoie à l’accord relatif à la procédure de remise  (33), dont le contenu correspond presque entièrement à la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (34). I.N. relève les similitudes entre la définition du mandat d’arrêt européen à l’article 1er de la décision-cadre 2002/584 et celle figurant à l’article 2, paragraphe 5, de l’accord relatif à la procédure de remise (35).

40.      Selon le procureur général, l’Islande n’étant pas un État membre de l’Union européenne, I.N. jouissait, à la date de son arrestation, de droits découlant de l’accord EEE, mais pas de ceux découlant du traité FUE au bénéfice des ressortissants des États membres de l’Union européenne. Le droit à la libre circulation dans le cadre de l’EEE est plus restreint que les droits reconnus par l’article 21 TFUE, et les droits de libre circulation reconnus dans le cadre de l’EEE ne couvrent pas l’extradition. Par conséquent, le principe de non‑discrimination énoncé à l’article 4 de l’accord EEE ne s’applique pas au litige au principal (36).

41.      En outre, la procédure d’extradition croate ne connaît pas de pratique dans laquelle l’accusé serait renvoyé dans le pays dont il est ressortissant plutôt que vers l’État qui demande l’extradition. Il ne s’agit pas là d’une mesure moins restrictive au sens de la jurisprudence Petruhhin, car elle prolonge la période de détention dans l’attente de l’extradition. Il n’est donc pas nécessaire d’informer l’Islande de la procédure d’extradition, dont elle a connaissance en tout état de cause.

42.      Lors de l’audience, l’Islande a demandé à la Cour de reconsidérer sa jurisprudence Petruhhin (37) en adoptant l’approche retenue par l’avocat général Bot dans cette affaire, selon laquelle les ressortissants d’autres pays et les ressortissants nationaux ne sont pas dans des situations comparables du point de vue des règles excluant l’extradition vers des pays tiers ; la poursuite des ressortissants nationaux dans l’État membre d’origine s’inscrit dans la lutte contre l’impunité. S’agissant des constatations à reconsidérer dans l’arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630), l’Islande cite notamment les points 47, 48 et 49.

43.      Lors de l’audience, le gouvernemente hellénique a conclu à l’application des principes découlant de la jurisprudence Petruhhin. I.N. a exercé ses droits de libre circulation, et il ne saurait faire l’objet d’une discrimination en raison de sa nationalité, bien que le gouvernement hellénique n’exclue pas que l’extradition vers un pays tiers puisse poursuivre un but légitime, tel que la lutte contre l’impunité. Il était important pour la juridiction de renvoi d’apprécier les raisons pour lesquelles I.N. s’était vu octroyer le statut de réfugié. Le gouvernement hellénique s’est référée aux articles 3, 4, 28 et 36 de l’accord EEE (38).

44.      Lors de l’audience, l’ASA a souligné que l’EEE est un ordre juridique sui generis fondé sur la confiance mutuelle et la coopération, caractérisé par la proximité des valeurs fondamentales communes des États membres de l’Union européenne et de l’EEE (39). La clause de bonne foi visée à l’article 3 de l’accord EEE était équivalente à celle de l’article 4 TUE. Le système se caractérise par un alignement dynamique des dispositions matérielles, et les États de l’EEE se trouvent sur un pied d’égalité avec les États membres de l’Union européenne en ce qui concerne les propositions législatives de la Commission (article 99, paragraphe 1, de l’accord EEE) ; il s’agit d’un processus continu de consultation (article 99, paragraphe 3, de l’accord EEE). Les actes pertinents de l’Union s’ajoutent à l’accord EEE et font partie de l’acquis s’ils ne sont pas adaptés (article 102 de l’accord EEE). L’homogénéité est assurée par les articles 6 et 105 de l’accord EEE. La jurisprudence de la Cour AELE et de la Cour de justice renforce cet alignement dynamique et les différences entre les deux ne s’étendent pas à ses fondations et valeurs.

45.      Ainsi, l’ASA a fait valoir que la Croatie a restreint les droits à la libre circulation de I.N. et que la jurisprudence Petruhhin s’applique avec la même force aux ressortissants de l’EEE. L’application de l’article 4 de l’accord EEE, combiné à la disposition correspondante de l’accord EEE en matière de libre circulation, aboutit au même résultat.

46.      L’ASA s’est également fondée sur l’ordonnance Peter Schotthöfer & Florian Steiner (40). Les citoyens de l’Union européenne et les ressortissants de l’EEE qui circulent librement doivent être protégés contre les extraditions vers les pays tiers entraînant un risque de traitements inhumains et dégradants visés à l’article 19 de la Charte.

47.      L’ASA considère que l’ordonnance Peter Schotthöfer & Florian Steiner représente un principe absolu et soutient que la Croatie devrait se fier à l’appréciation faite par l’Islande en ce qui concerne les conséquences de l’extradition. Il devrait y avoir une présomption quant à la validité des motifs de l’octroi de l’asile (41). Ces motifs n’ont pas disparu avec l’octroi de la nationalité islandaise à I.N. L’ASA relève que l’article 15 de la directive relative aux conditions (42) est mentionné dans le droit islandais. L’ASA fait valoir que l’article 21 TFUE ne saurait restreindre les droits à la libre circulation normalement applicables au titre du droit de l’EEE et que l’acquis en matière de libre circulation ne fait aucune distinction quant au point de savoir si une restriction est justifiée en droit civil, pénal ou public.

48.      Lors de l’audience, l’Islande a fourni des détails sur les voyages d’I.N. Ce dernier a pris un vol avec son épouse et ses deux enfants de l’Islande à Vienne, puis un bus à destination de Zagreb pour des vacances prévues sur les plages de Croatie.

49.      L’Islande fait valoir que l’arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630), s’applique au litige au principal car l’article 36 de l’accord EEE relatif aux services est équivalent à l’article 56 TFUE et que, dans l’arrêt Cowan (43), la Cour a établi que les services touristiques sont des services et que la directive 2004/38 est intégrée dans le droit de l’EEE. Elle a également invoqué l’arrêt de la Cour AELE dans l’affaire Wahl c. État islandais (44), faisant valoir que l’article 4 de l’accord EEE est équivalent à l’article 18 TFUE.

50.      Selon l’Islande, la Croatie était tenue de lui fournir les informations nécessaires pour se prononcer sur l’opportunité de poursuivre I.N. et de demander ensuite sa remise au titre de l’accord relatif à la procédure de remise (45).

51.      L’octroi d’une protection internationale par la direction de l’immigration islandaise le 8 juin 2015 était fondé sur un témoignage jugé détaillé, sans contradiction, clair, cohérent, crédible et réaliste. Il était également fondé sur la situation générale des droits de l’homme en Russie à l’époque, telle que décrite par des rapports d’ONG, des rapports nationaux et internationaux, sur la corruption généralisée dans l’administration et le pouvoir judiciaire, ainsi que sur le taux de succès anormalement faible des recours en matière pénale (1 %). L’Islande avait connaissance de la notice rouge dont I.N. faisait l’objet pour l’infraction qui lui était reprochée lorsqu’il a obtenu la protection internationale. L’Islande n’a pas répondu aux demandes de la Russie concernant le lieu où se trouvait I.N. Depuis 2015, la protection internationale a été accordée à 12 ressortissants russes sur 47 demandes. Quatre d’entre elles ont été octroyées à I.N. et à sa famille.

52.      De plus, lors de l’audience, l’Islande a soutenu que le respect de la Charte s’impose également dans le cadre de l’EEE (46) et que I.N. devait être protégé contre les défaillances systémiques du système judiciaire russe (47).

53.      Après avoir été interrogée sur ce qu’il fallait entendre par une demande de « sauf-conduit », l’Islande a ajouté que, le 24 juillet 2019, l’ambassade d’Islande à Berlin avait reçu une note verbale selon laquelle I.N. avait été arrêté le mois précédent. L’ambassadeur a répondu à la note, en application de la convention de Vienne sur les relations consulaires (48), indiquant que son gouvernement souhaitait que les procédures soient menées avec diligence et qu’un sauf-conduit soit délivré dans les meilleurs délais. L’accord relatif à la procédure de la remise n’était pas applicable à cette époque (49).

54.      L’Islande a déclaré qu’elle pourrait être compétente pour juger I.N. en application de l’article 6 du code pénal islandais, mais que cela relève de la décision du procureur général, qui agit en toute indépendance. I.N. ne peut pas être extradé d’Islande en tant que ressortissant islandais en application de la loi islandaise relative à l’extradition.

55.      Lors de l’audience, le gouvernement du Royaume de Norvège a fait valoir qu’aucune disposition de l’accord EEE n’était équivalente à l’article 21 TFUE. Les dispositions de l’accord EEE applicables étaient les articles 4, 28 et 36, mais il appartenait à la seule juridiction de renvoi de décider laquelle des libertés, le cas échéant, s’appliquait, et il ne pouvait pas être présumé que I.N. était destinataire de services, ce qu’une juridiction croate devait également établir. La directive 2004/38 ne pouvait non plus s’appliquer. Elle ne règle pas les demandes d’extradition. La matière pénale ne relève pas de l’accord EEE.

56.      Le Royaume de Norvège fait observer que la Cour suprême de Norvège avait demandé à la Cour AELE d’annuler, dans l’affaire pendante Campbell (50), son arrêt Jabbi (51), dans lequel celle‑ci a soutenu que la directive 2004/38 pouvait être interprétée comme accordant des droits identiques à ceux prévus à l’article 21 TFUE. La Norvège est d’avis que l’arrêt Jabbi est incompatible avec l’article 6 de l’accord EEE et elle invite la Cour à constater que les droits fondés uniquement sur l’article 21 TFUE ne relèvent pas de l’accord EEE faute d’une disposition correspondante.

57.      S’agissant de la première question préjudicielle, le gouvernement du Royaume de Norvège a fait valoir que l’accord relatif à la procédure de remise est un traité international valable qui ne fait pas partie du droit de l’EEE et qui ne saurait être interprété de la même manière que la décision-cadre relative au MAE (52). Le contexte et la finalité sont différents, même si le libellé est similaire. La jurisprudence Petruhhin mettait en exergue le contexte et la finalité.

58.      Selon l’arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630), une différence de traitement pourrait être justifiée par la lutte contre l’impunité et les mesures adoptées doivent être aptes à atteindre cet objectif. Ce qui est exigé, c’est l’identification d’un moyen moins restrictif de la libre circulation, mais aussi efficace que l’extradition en termes de lutte contre l’impunité (53).

59.      Selon le Royaume de Norvège, la décision-cadre relative au MAE permet au juge national d’accorder une telle priorité, ce que ne permet toutefois pas l’accord relatif à la procédure de remise en raison de son objectif et de son contexte différents, mais aussi en raison de l’absence d’un objectif de confiance mutuelle équivalent à celui de la décision-cadre relative au MAE (54) ou à l’objectif énoncé à l’article 3, paragraphe 2, TUE (voir arrêt Petruhhin). Dans l’arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630), la Cour a également fait référence à l’article 1er, paragraphe 2, de la décision-cadre relative au MAE lui reconnaissant une priorité, une disposition similaire faisant défaut dans l’accord relatif à la procédure de remise, son préambule ne faisant référence qu’à la « confiance mutuelle ». L’article 3 de l’accord EEE exige que les États parties à l’accord EEE facilitent la coopération, mais il ne comporte pas les exigences supplémentaires prévues à l’article 4 TUE. L’article 19, paragraphe 1, de l’accord relatif à la procédure de remise exige une appréciation de toutes les circonstances pertinentes et particulièrement celles visées à l’article 1er de cet accord.

60.      S’agissant de la seconde question préjudicielle, les droits fondamentaux font partie du droit de l’EEE (55) et l’article 19 de la Charte s’oppose à des expulsions entraînant un risque de peines ou de traitements inhumains ou dégradants (56). De l’avis du Royaume de Norvège, la juridiction de renvoi est tenue d’apprécier les preuves d’un risque réel d’exposition à des traitements inhumains ou dégradants en cas d’extradition vers la Russie (57), et doit prendre en considération la décision des autorités islandaises d’accorder le statut de réfugié ainsi que les éléments de preuve appuyant cette décision.

61.      Le gouvernement croate affirme que les articles 28 et 36 de l’accord EEE correspondent aux articles 45 et 56 TFUE (58), tout en relevant que l’article 21 TFUE couvre des personnes qui se rendent dans d’autres États membres pour des raisons qui ne sont pas liées à une activité économique. L’article 21 TFUE concerne les ressortissants de l’EEE parce que la directive 2004/38 ne se limite pas aux activités économiques.

62.      Dès lors que I.N. a exercé ses droits à la libre circulation, sa situation relève du champ d’application des traités au sens de l’article 18 TFUE et de l’interdiction de toute discrimination en raison de la nationalité (59), qui correspond à l’article 4 de l’accord EEE.

63.      Selon le gouvernement croate, à la lumière de la jurisprudence Petruhhin (60), afin d’éviter une impunité et d’appliquer des mesures moins restrictives de la libre circulation, toutes les mesures d’assistance mutuelle et de coopération en vigueur dans le droit pénal devraient être appliquées. À cette fin, le gouvernement croate se réfère à la portée des dispositions de l’acquis de Schengen prévues à l’article 6 du protocole no 19 sur l’acquis de Schengen, qui est intégré au droit de l’Union et s’applique à la République d’Islande et au Royaume de Norvège.

64.      Le gouvernement croate se réfère à la convention d’application de l’accord de Schengen(61). L’objectif fondamental de cet accord consiste en l’instauration d’un espace de liberté, de sécurité et de justice garantissant la libre circulation des personnes tant pour les citoyens de l’Union que les étrangers séjournant sur le territoire de l’Union.

65.      La convention d’application de l’accord de Schengen prévoit la mise en place de dispositions fondamentales relatives à l’entraide judiciaire en matière pénale (chapitre 2 du titre III intitulé « Police et sécurité ») sur lesquelles reposent actuellement le développement de l’entraide judiciaire en matière pénale. L’acquis de Schengen inclut également le système d’information Schengen (62).

66.      En conséquence, le gouvernement croate soutient qu’il conviendrait de privilégier l’échange d’informations avec l’État membre dont l’intéressé a la nationalité, en vue de donner à cet État membre la possibilité de poursuivre la personne, dans la mesure où il est compétent pour des faits commis en dehors du territoire national, et d’émettre un mandat d’arrêt conformément à l’accord relatif à la procédure de remise.

67.      Enfin, selon le gouvernement croate, le principe de non‑refoulement et de non‑exposition aux traitements inhumains et dégradants est le principe fondamental du droit international en matière de réfugié. Si I.N. demandait l’asile en Croatie, cela lui serait refusé en vertu de l’article 43, paragraphe 1, de la loi croate sur la protection internationale, car une protection internationale a été accordée par un État membre de l’EEE.

68.      Le gouvernement croate fait observer que l’Islande applique le règlement Dublin III (63) et est impliquée dans Eurodac (64). Ce gouvernement soutient donc que l’on peut reconnaître que l’Islande respecte les règles de l’Union en matière d’asile et de protection internationale. En 2014, l’Islande a conclu un accord avec le Bureau européen d’appui en matière d’asile (65) concernant les modalités de sa participation (66).

69.      Dès lors, soutient le gouvernement croate, alors même qu’il n’existe actuellement aucun système de reconnaissance mutuelle des décisions en matière d’asile dans l’EEE, le cadre juridique est défini par le régime d’asile européen commun et les conditions d’asile sont uniformes dans chaque pays.

70.      Contrairement au gouvernement croate, la Commission considère que la qualité de partie à l’accord EEE de l’Islande est plus pertinente que son appartenance à l’espace Schengen pour la résolution du litige. La Commission affirme que certaines dispositions de l’accord EEE aboutissent au même résultat que dans l’affaire Petruhhin. Lors de l’audience, la Commission a reconnu que certaines pièces du puzzle de l’affaire Petruhhin faisaient défaut dans l’affaire au principal, tels que le fait que I.N. n’est pas un citoyen de l’Union, mais elle a déclaré que d’autres dispositions de l’accord EEE pouvaient pallier cette lacune.

71.      La Commission rappelle que, aux termes de l’article 1er de l’accord EEE, l’objectif de ce dernier est de « favoriser un renforcement continu et équilibré des relations économiques et commerciales entre les parties contractantes, dans des conditions de concurrence égales et le respect des mêmes règles, en vue de créer un Espace économique européen homogène ».

72.      La Commission cite la déclaration commune des parties contractantes concernant la décision no 158/2007 du Comité mixte de l’EEE intégrant la directive 2004/38 dans l’accord (67) qui indique, entre autres, que le concept de citoyenneté de l’Union n’a pas d’équivalent en droit de l’EEE et que l’accord EEE ne constitue pas une base pour les droits politiques des ressortissants de l’EEE.

73.      Toutefois, tous les droits et libertés prévus par la directive 2004/38 sont intégrés dans le droit de l’EEE. Sous certaines conditions, les ressortissants de l’EEE ont le droit de circuler au sein de l’EEE et de séjourner jusqu’à trois mois dans un État partie à l’accord EEE et bénéficient, également sous certaines conditions, d’une protection contre les discriminations même s’ils ne sont pas économiquement actifs (68). La Commission affirme qu’il appartient à la juridiction de renvoi de constater si la situation de I.N. relève du champ d’application matériel des articles 28 ou 36 de l’accord EEE et de la directive 2004/38, faisant observer que I.N. pourrait avoir tiré avantage de son droit de recevoir des services en tant que touriste (69). La Commission affirme que, en tout état de cause, I.N. relève du champ d’application de l’accord EEE en vertu du fait qu’il a quitté l’Islande pour la Croatie. Par conséquent, il a droit à la protection contre les discriminations (article 4 de l’accord EEE et article 18 TFUE).

74.      Selon la Commission, l’arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630), était essentiellement fondé non pas sur la notion abstraite de citoyenneté, mais sur les droits à la libre circulation et sur l’article 18 TFUE. La Commission ajoute que, dans l’arrêt Pisciotti (70), le point de départ pour activer la procédure en cause dans l’affaire Petruhhin était l’existence d’une discrimination au sens de l’article 18 TFUE, correspondant à l’article 4 de l’accord EEE.

75.      La Commission soutient qu’il est utile de comparer l’arrêt de la Cour dans l’affaire O. et B. (71) et l’arrêt de la Cour AELE dans l’affaire Jabbi (72). Dans l’affaire O. et B., la Cour a déduit de l’article 21 TFUE l’existence d’un droit de séjour dérivé pour le ressortissant d’un État tiers qui est membre de la famille d’un citoyen de l’Union dans l’État membre d’origine de ce dernier. Dans l’affaire Jabbi, la Cour AELE est parvenue à la même conclusion en appliquant la directive 2004/38 à des ressortissants de l’EEE qui ne sont pas économiquement actifs, bien que la Cour, dans l’arrêt O. et B., ait refusé d’appliquer la directive 2004/38 de cette manière.

76.      La Commission fait observer que l’accord EEE reconnaît les « relations privilégiées […] qui lient la Communauté européenne, ses États membres et les États de l’AELE » « fondées sur leur proximité, leurs valeurs communes » (73) et « sur des règles communes » (74), l’objectif des parties contractantes étant « d’obtenir et de maintenir une interprétation et une application uniformes du présent accord et de celles des dispositions de la législation communautaire qui sont reproduites en substance » dans l’accord EEE et « d’arriver à un traitement égal des individus et des opérateurs économiques en ce qui concerne les quatre libertés » (75). Les articles 105 et 106 de l’accord EEE établissent une interprétation uniforme (76).

77.      Par conséquent, la Commission conclut qu’il y a lieu de respecter les principes établis dans l’arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630), faisant valoir que, en Islande, les autorités disposent d’un instrument équivalent au mandat d’arrêt européen (77), à savoir l’accord relatif à la procédure de remise. La Commission en conclut que les autorités croates doivent informer l’Islande de la réception de la demande d’extradition émanant de la Russie, ce qui permet à l’Islande de demander la remise de cette personne, dans la mesure où l’Islande est en mesure de lancer des poursuites pénales à l’encontre de leur ressortissant au titre de l’accord relatif à la procédure de remise. La Croatie doit donner la priorité à cette demande (78). Dès qu’elle est saisie de cette demande, elle est tenue de remettre I.N. à l’Islande.

IV.    Analyse

A.      Identifier les éléments clés du litige dans un système juridique à strates multiples

78.      À titre liminaire, il est utile de souligner qu’il existe sept systèmes juridiques en jeu dans l’affaire au principal. Trois systèmes juridiques nationaux, à savoir ceux de l’Islande, de la Croatie et de la Russie, et trois systèmes transnationaux, ceux de l’Union européenne, du Conseil de l’Europe et de l’Espace économique européen, à côté des instruments juridiques universels du droit international public, tels que la convention de Genève sur le statut des réfugiés (79). Ces systèmes se chevauchent dans une série de cercles concentriques, aucun n’ayant la primauté sur les autres, sous réserve de la circonstance exceptionnelle où l’un d’entre eux, à l’exception de la Russie et de l’Islande, empiète sur la primauté, l’unité et l’effectivité du droit de l’Union (80).

79.      Toutefois, une telle question ne se pose pas directement dans l’affaire au principal. Par conséquent, l’ordre juridique supranational, tel que caractérisé par l’Union européenne, en tant qu’ordre constitutionnel additionnel, n’est pas hiérarchiquement supérieur ou inférieur à celui de la juridiction de renvoi (81), ni à l’un des autres ordres juridiques qui se chevauchent. Ces ordres opèrent comme des synergies qui s’influencent mutuellement (82).

80.      En résumé, en ordonnançant ces systèmes juridiques – les multiples ordres juridiques qui forment le cadre juridique en l’espèce – chacun de ces systèmes est interhiérarchique, mais ne constitue pas une entité intra-hiérarchique.

81.      Ainsi, la première tâche de la Cour consiste à identifier les règles normatives lui permettant de répondre aux questions déférées dans le contexte de ce qui a été décrit comme une coopération à plusieurs niveaux des juridictions constitutionnelles européennes (83), à savoir la Cour de justice, la Cour européenne des droits de l’homme et, en l’espèce, la Cour suprême de Croatie (84). En effet, dans la procédure au principal, ce trio devient un quartet, en raison de la pertinence du rôle de la Cour AELE et de sa jurisprudence pour le règlement du litige.

82.      Alors qu’aucune disposition explicite du traité FUE ne reflète l’article 6 de l’accord EEE (85), la Cour, après avoir relevé que l’un des principaux objectifs de l’accord EEE est d’étendre le marché intérieur réalisé sur le territoire de l’Union européenne aux États de l’AELE, a déclaré que certaines dispositions de l’accord EEE « visent à garantir une interprétation aussi uniforme que possible de celui‑ci sur l’ensemble de l’EEE […]. Il appartient à la Cour, dans ce cadre, de veiller à ce que les règles de l’accord EEE identiques en substance à celles du traité soient interprétées de manière uniforme à l’intérieur des États membres » (86). Ledit principe d’homogénéité renforce la place de l’EEE dans l’ordre constitutionnel multistrate examiné en l’espèce (87).

83.      Les éléments clés du litige à résoudre sont les suivants : 1) la portée de la liberté de circuler et du droit de recevoir des services ainsi que l’interdiction de toute discrimination en raison de la nationalité, prévues à la fois par le traité FUE (articles 56 et 18) (88) et l’accord EEE (articles 36 et 4) ; 2) une justification objective d’une restriction claire de ce droit ; 3) les normes et les faits pertinents aux fins d’une justification objective dans les circonstances de l’affaire au principal, dont des règles issues du régime d’asile européen commun, le rôle de la confiance mutuelle, et 4) l’accord relatif à la procédure de remise garantissant le droit fondamental de I.N. de ne pas être exposé à des traitements inhumains et dégradants ou à un déni de justice flagrant, droit protégé par les articles 6 et 13 de la CEDH, ainsi que les articles 4, 19 et 47 de la Charte (89).

B.      Détermination des normes applicables

1.      Le droit de recevoir des services

a)      Les articles 36 et 4 de l’accord EEE

84.      S’agissant de la détermination des règles applicables, sur le fondement des éléments fournis à la Cour lors de l’audience concernant les activités de I.N. lors de son entrée sur le territoire croate, à savoir être en vacances (voir point 48 des présentes conclusions), il peut être constaté qu’il était destinataire de services au titre de l’article 36 de l’accord EEE relatif à la libre prestation des services. La Cour a constaté que l’article 36 de l’accord EEE était « analogue à l’article 56 TFUE », de sorte qu’une restriction à l’article 56 TFUE « doit être considérée, en principe, également contraire audit article 36 » (90). La Cour a également déclaré que le libellé de l’article 4 de l’accord EEE est pratiquement identique à celui de l’article 18 TFUE, de sorte que cette disposition doit être interprétée « d’une manière uniforme » à l’article 18 TFUE (91). Il convient de rappeler que I.N. a fait l’objet d’une discrimination en raison de sa nationalité du point de vue de la protection contre une extradition alors qu’il recevait des services de tourisme.

85.      Ce qui importe c’est que la Cour AELE a fait application de l’arrêt Cowan (92) en consacrant le droit de recevoir des services (93), et c’est dans ce contexte qu’est apparue l’interdiction de toute discrimination en raison de la nationalité. Cette solution est transposable à l’affaire au principal, dans laquelle ce droit relève de l’examen de la Cour plutôt que de celui de la Cour AELE.

86.      En fait, la restriction des droits de I.N. à recevoir des services de tourisme était bien plus grave, à savoir une incarcération dans le cadre d’une procédure pénale avec la perspective d’une extradition durant ses vacances, que la restriction en cause dans l’affaire Cowan (94). Cette dernière affaire portait sur le refus de faire intervenir un fonds pour l’octroi d’une indemnité pour une agression subie pendant les vacances, mais dont les séquelles ne sont apparues qu’après les vacances.

87.      En outre, ainsi que l’a fait valoir l’ASA lors de l’audience, le fait que la restriction soit intervenue dans le cadre de l’application du droit pénal est sans incidence (voir point 47 des présentes conclusions), étant donné qu’une distinction selon que les restrictions sont fondées sur le droit civil, administratif ou pénal est inconnue de la jurisprudence de la Cour. J’ajouterais qu’il a été établi, avant l’entrée en vigueur de l’accord EEE, que les règles de droit pénal peuvent créer des restrictions à la libre circulation (95) et que l’interdiction de toute discrimination en raison de la nationalité avait déjà été appliquée par la Cour dans le cadre d’une procédure pénale (96).

88.      Par souci d’exhaustivité, j’ajoute que, contrairement à ce qu’a soutenu le Royaume de Norvège lors de l’audience (point 55 des présentes conclusions), il n’existe pas de monopole concernant la détermination de la liberté en cause dans un cas donné entre les mains des juridictions des États membres et que, selon une jurisprudence constante de la Cour, il incombe à cette dernière de donner toutes les indications nécessaires au regard du droit de l’Union pour lui permettre de trancher le litige dont elle est saisie (97).

89.      Par conséquent, je me réfère aux articles 36 et 4 de l’accord EEE pour répondre aux questions déférées (voir point 124 ci‑après).

b)      L’article 21 TFUE n’est pas applicable à l’affaire au principal

90.      Dès lors qu’il a été déterminé que les articles 36 et 4 de l’accord EEE sont les normes essentielles applicables, on peut laisser de côté le débat sur le point de savoir si des droits accordés aux citoyens de l’Union au titre de l’article 21 TFUE sont ou non transposables aux ressortissants de l’EEE, en dépit de l’examen de ces questions dans les observations (98). Ainsi que l’a relevé l’agent de l’ASA lors de l’audience, l’article 21 TFUE ne saurait entraîner une restriction des droits à la libre circulation que l’on peut déjà faire valoir au titre de l’accord EEE (point 47 ci‑dessus).

91.      Quel que soit le statut de l’article 21 TFUE au regard du droit de l’EEE, une question qui sera sous peu à nouveau examinée par la Cour AELE (99) (voir point 56 ci‑dessus), il n’a pas de rapport avec l’issue du litige au principal (100). Il suffit de déclarer ici que le scepticisme quant à la pertinence de la jurisprudence élaborée par la Cour sur le fondement exclusif de l’article 21 TFUE, dont un échantillon a été débattu par la Commission (point 75 ci‑dessus), semble fondé, puisque l’article 21 TFUE a été intégré aux traités par le traité de Lisbonne en 2007, bien après l’entrée en vigueur de l’accord EEE le 1er janvier 1994 (101).

2.      Justification objective

a)      La lutte contre l’impunité est une justification objective de la restriction du droit de recevoir des services

92.      Le droit à la libre prestation des services touristiques fait l’objet d’une justification objective en droit de l’EEE (102), tout comme dans le cadre de l’article 56 TFUE. La Croatie peut-elle invoquer la lutte contre l’impunité comme justification objective à la limitation des droits de I.N. à la libre circulation au titre de l’article 36 de l’accord EEE en le plaçant sous écrou extraditionnel alors que les ressortissants croates ne font pas l’objet du même traitement ?

93.      Ce n’est que dans ce cas que l’arrêt Petruhhin (103) commence à devenir pertinent pour l’affaire au principal, bien qu’il semble avoir été un élément clé de la procédure devant les juridictions croates, ce qui a pu avoir une influence, peut-être démesurée, sur le contenu du dossier.

94.      Dans ledit arrêt Petruhhin, la Cour a déclaré que la prévention du risque d’impunité des personnes ayant commis une infraction doit, en principe, « être considéré[e] comme présentant un caractère légitime en droit de l’Union » (104), et cette approbation de principe à la justification d’une restriction à la libre circulation par la prévention du risque d’impunité a été confirmé dans les arrêts ultérieurs Pisciotti (105) et Raugevicius (106).

95.      L’impératif d’homogénéité entre le droit de l’EEE et le droit de l’Union semblerait appeler une réponse positive aux autorités croates quant à l’invocation de la prévention du risque d’impunité pour justifier la détention et l’extradition de I.N. Étant donné que les restrictions à la libre circulation peuvent être fondées en droit pénal, il serait illogique d’interdire à un État membre de se fonder sur des considérations ayant également pour source le droit pénal aux fins d’une justification.

96.      Toutefois, il s’agit d’une question distincte de celle de savoir si, au vu de l’ensemble des circonstances de l’affaire au principal, les actes des autorités croates à ce jour « peuvent être justifiées par des considérations objectives […] nécessaires pour la protection des intérêts qu’elles visent à garantir et seulement dans la mesure où ces objectifs ne peuvent être atteints par des mesures moins restrictives » (107).

b)      L’absence de confiance mutuelle en droit de l’EEE n’est pas un obstacle à l’application de la jurisprudence Petruhhin

97.      En premier lieu, je partage l’argumentation développée par le gouvernement du Royaume de Norvège lors de l’audience, selon laquelle le principe de confiance mutuelle, tel qu’il a évolué dans l’Union depuis le traité de Lisbonne de 2007, ne trouve pas à s’appliquer en droit de l’EEE. En dépit de la nature sui generis de l’ordre juridique de l’EEE, de la proximité des relations entre les États parties à l’AELE et les États membres, telle qu’elle ressort de la description de l’ASA mentionnée au point 44 des présentes conclusions, et des dispositions de l’accord EEE, mentionnées par la Commission (point 76 des présentes conclusions), relatives à la relation privilégiée entre l’EEE et l’Union, il n’en reste pas moins que la confiance mutuelle était relativement à ses débuts avant le traité de Lisbonne (108). Ainsi que l’a fait observer le Royaume de Norvège (point 59 des présentes conclusions), l’article 3, paragraphe 2, TUE n’a pas d’équivalent dans l’accord EEE.

98.      Je ne partage toutefois pas la position du Royaume de Norvège, selon laquelle ce n’est pas parce que la Cour, dans l’arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630), s’est fondée sur le recours à un mandat d’arrêt européen comme alternative à l’extradition, moins restrictive de la libre circulation, qu’elle a considéré que le recours à un mandat d’arrêt européen constitue la seule alternative acceptable dont un prévenu peut se prévaloir lorsqu’un État membre invoque la lutte contre l’impunité en tant que restriction justifiée à la libre circulation.

99.      Cela est confirmé par l’arrêt du 10 avril 2018, Pisciotti (C‑191/16, EU:C:2018:222), dans lequel, à la différence dudit arrêt Petruhhin, aucune référence n’était faite aux dispositions de la décision-cadre relative au MAE (109) en rapport avec la coopération mutuelle (comparer les arguments du Royaume de Norvège reproduits ci‑dessus aux points 57 et 59). Dans ledit arrêt Pisciotti, l’accent était plutôt mis sur la disponibilité d’un mécanisme en vertu duquel l’accusé peut effectivement être poursuivi de manière effective. La Cour a déclaré ceci :

« À cet égard, la Cour a jugé qu’il importe de privilégier l’échange d’informations avec l’État membre dont l’intéressé a la nationalité en vue, le cas échéant, de donner aux autorités de cet État membre l’opportunité d’émettre un mandat d’arrêt européen aux fins de poursuites. Ainsi, lorsqu’un État membre dans lequel un citoyen de l’Union, ressortissant d’un autre État membre, s’est déplacé, se voit adresser une demande d’extradition par un État tiers avec lequel le premier État membre a conclu un accord d’extradition, il est tenu d’informer l’État membre dont ledit citoyen est ressortissant et, le cas échéant, à la demande de ce dernier État membre, de lui remettre ce citoyen, conformément aux dispositions de la décision-cadre 2002/584, pourvu que cet État membre soit compétent, en vertu de son droit national, pour poursuivre cette personne pour des faits commis en dehors de son territoire national (voir, en ce sens, arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin, C‑182/15, EU:C:2016:630, points 48 et 50). » (110)

100. J’estime, par conséquent, que, dans cet arrêt, l’accent était mis sur l’existence d’une alternative garantissant une absence d’impunité dans une mesure identique ou semblable à celle d’une extradition. Dans le cadre de la réponse aux questions déférées, j’examinerai, aux points 119 à 123 ci‑après, le point de savoir si les mesures prises par l’Islande jusqu’à ce jour satisfont à ce seuil.

c)      La confiance mutuelle et le régime d’asile européen commun

101. S’il est vrai, selon moi, que, en vertu du régime d’adhésion de la Croatie à l’Union, sa participation à l’acquis de Schengen n’est que partielle (point 15 des présentes conclusions) (111), la Croatie participe au régime d’asile européen commun. Non seulement la Croatie est partie au règlement Dublin III (112), dont les conséquences ont été envisagées par la Cour dans l’arrêt A.S.(113), ainsi qu’au règlement Eurodac (114), mais elle a également transposé et applique régulièrement la directive relative aux conditions (115), la directive procédures (116) et la directive accueil (117). Elle est donc liée par l’article 80 TFUE, en vertu duquel la mise en œuvre du régime d’asile européen commun est régie « par le principe de solidarité ».

102. Les larges paramètres qui sous-tendent la participation au régime Dublin III, à la fois pour les États membres et les États associés à l’espace Schengen, tel l’Islande, ont été examinés par l’avocate générale Sharpston dans ses conclusions présentées dans les affaires A.S. et Jafari (118). Elle a fait les observations suivantes :

« Le RAEC a été conçu dans un contexte dans lequel il semblait raisonnable de penser que tous les États participants, qu’ils soient États membres ou États tiers, respectaient des droits fondamentaux, dont les droits fondés sur la convention de Genève et le protocole de 1967, ainsi que sur la CEDH […], et que les États membres pouvaient par conséquent avoir confiance les uns envers les autres sur ce point […]. “C’est précisément en raison de ce principe de confiance mutuelle que le législateur de l’Union a adopté le [règlement Dublin II] en vue de rationaliser le traitement des demandes d’asile et d’éviter l’engorgement du système par l’obligation, pour les autorités des États, de traiter des demandes multiples introduites par un même demandeur, d’accroître la sécurité juridique en ce qui concerne la détermination de l’État responsable du traitement de la demande d’asile et ainsi d’éviter le forum shopping, l’ensemble ayant pour objectif principal d’accélérer le traitement des demandes dans l’intérêt tant des demandeurs d’asile que des États participants” […]. Ces questions touchent le cœur même de l’idée d’un “espace de liberté, de sécurité et de justice” […] et en particulier l’esprit du RAEC fondé sur une confiance mutuelle et une présomption de respect par les États membres du droit de l’Union et en particulier des droits fondamentaux […] » (119)

103. S’agissant de l’Islande, en 2001, la Communauté européenne, dans sa configuration de l’époque, a conclu un accord avec le Royaume de Norvège et l’Islande sur les critères et les mécanismes permettant de déterminer l’État responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée en Islande ou en Norvège (120). Par conséquent, ainsi que l’a relevé la Commission (voir point 68 des présentes conclusions), l’Islande participe au régime Dublin III et à Eurodac (121) et est impliquée dans le Bureau européen d’appui en matière d’asile par un accord international, tandis que l’ASA a fait observer que l’article 15 de la directive relative aux conditions est mentionné dans le droit islandais (voir le point 47 des présentes conclusions).

104. Ces éléments, conjugués à la participation plus large de l’Islande à l’acquis de Schengen en tant qu’État associé à l’espace Schengen (122), imposent à la Croatie et à l’Islande une obligation de confiance mutuelle quant aux décisions prises dans le cadre de la politique européenne commune en matière d’asile, et notamment du règlement Dublin III.

105. Il convient de souligner que la confiance mutuelle ne se limite pas, dans la jurisprudence de la Cour, à se fier au respect des droits fondamentaux des demandeurs d’asile et à l’application correcte de la convention de Genève (123). Elle s’étend plus généralement au droit de l’Union (124), supposant ainsi que le règlement Dublin III a fait l’objet d’une application régulière en Islande, ou, ainsi que l’a soutenu l’ASA (point 47 des présentes conclusions), il doit y avoir une présomption selon laquelle l’octroi de l’asile par l’Islande était fondé, puisque l’Islande a considéré qu’elle était l’État responsable en vertu du chapitre III du règlement Dublin III et a effectivement défendu sa décision lors de l’audience (point 51 des présentes conclusions). Cette approche est également cohérente avec les priorités et les impératifs organisationnels du système de Dublin III, comme l’explique l’avocate générale Sharpston dans ses conclusions citées au point 102 des présentes conclusions (rationaliser le traitement des demandes d’asile ; éviter les blocages ; promouvoir la sécurité juridique ; prévenir le forum shopping).

106. En effet, jusqu’à ce jour, la Cour a atténué le rôle de la confiance mutuelle dans le contexte du règlement Dublin III uniquement aux fins de garantir les droits fondamentaux des demandeurs d’asile (125). Cette approche de la Cour irait de soi si la confiance mutuelle pouvait diminuer dans le cadre du règlement Dublin III avec pour conséquence que les droits fondamentaux seraient supprimés.

107. Cela signifie que c’est à juste titre que la Croatie soutient (point 68 des présentes conclusions) qu’il faut admettre que l’Islande respecte les règles de l’Union en matière d’asile et de protection internationale et que tous les mécanismes de coopération entre les deux États s’appliquent à l’examen du cas de I.N. (126). La confiance mutuelle dans le cadre du régime d’asile européen commun est le genre de confiance mutuelle à prendre en compte dans l’appréciation de la réponse de la Croatie aux demandes introduites par l’Islande jusqu’à ce jour à l’encontre des principes établis dans l’arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630), plutôt que la confiance mutuelle dans le cadre de la coopération en matière pénale au titre du droit de l’Union, ou l’extension et le développement des règles de bonne foi inhérentes à l’accord EEE. Selon le sixième considérant du protocole (no 19) sur l’acquis de Schengen (127), il est nécessaire de maintenir des « relations privilégiées » avec la République d’Islande et le Royaume de Norvège.

108. Il convient d’ajouter que la confiance mutuelle que la Croatie est tenue d’accorder à l’Islande n’est nullement affectée par le fait que I.N. a acquis la nationalité islandaise. Premièrement, les documents délivrés par l’Islande qui accordaient à I.N. le statut de réfugié étaient toujours valides lorsqu’il a franchi la frontière croate. Deuxièmement, il était impossible pour I.N. de demander l’asile en vertu tant de la loi croate (voir points 35 et 67 des présentes conclusions) que du règlement Dublin III (128), dès lors qu’il avait déjà acquis l’asile dans un État participant. Troisièmement, l’octroi de l’asile en Islande est resté pertinent aux fins de la protection de I.N. contre les comportements interdits par la convention de Genève (129) et de la prévention du forum shopping, un des principaux objectifs du règlement Dublin III (130). Quatrièmement, le statut de réfugié de I.N. ne lui a pas été retiré en application d’une des procédures prévues à cet effet par le droit de l’Union (131).

109. Il est vrai que l’article 1C de la convention de Genève des réfugiés mentionne à son alinéa 3, comme motif pour mettre fin au statut de réfugié, l’acquisition d’une « nouvelle nationalité » et la jouissance « de la protection du pays dont [le demandeur] a acquis la nationalité ». Toutefois, à la lumière de l’objectif de la convention, il ne peut être mis fin au statut de réfugié par acquisition d’une nationalité que « si le fondement de l’octroi du statut de réfugié a cessé d’exister et que la protection n’est plus nécessaire ou justifiée » (132). Comme démontré par l’affaire au principal, les particularités de la gestion du régime d’asile européen commun font que le statut de réfugié peut demeurer « nécessaire » pour assurer la protection, même après l’acquisition d’une nouvelle nationalité. C’est dans ce contexte qu’il convient de lire l’article 1C, alinéa 3, de la convention de Genève et c’est ce contexte qui s’oppose à une interprétation littérale. Le préambule de la convention indique que « l’Organisation des Nations Unies a, à plusieurs reprises, manifesté la profonde sollicitude qu’elle éprouve pour les réfugiés et qu’elle s’est préoccupée d’assurer à ceux‑ci l’exercice le plus large possible des droits de l’homme et des libertés fondamentales » (133).

110. Enfin, rien ne saurait être plus contraire aux droits fondamentaux de I.N. que de lui retirer la protection résultant de l’application, par l’Islande, du règlement Dublin III en raison de l’acquisition de la nationalité islandaise.

d)      Normes applicables à la protection des droits fondamentaux de I.N.

111. S’agissant des droits fondamentaux, I.N. souhaite éviter d’être soumis à des traitements ou peines inhumains ou dégradants et à un procès inéquitable. Pour ces deux catégories de droits, I.N. fait l’objet d’un traitement différent comparé à un ressortissant croate, en raison de l’interdiction prévue par la Constitution croate d’extrader des ressortissants nationaux.

112. À ce stade, il pourrait être utile de préciser que l’affaire au principal est un exemple de chevauchement dans les synergies des cercles concentriques qui contiennent la série d’organisations internationales en cause, car les droits matériels à examiner sont protégés d’une manière similaire dans les trois instruments juridiques, même s’ils pouvaient être considérés comme concurrents ; à savoir la CEDH, la Charte et l’accord EEE. L’interdiction des traitements inhumains et dégradants fait partie du patrimoine constitutionnel européen commun.

113. Force est de reconnaître que la Cour EDH a déclaré que « bien que la Cour AELE a exprimé l’opinion selon laquelle les dispositions de l’accord EEE “doivent être interprétées à la lumière des droits fondamentaux” aux fins d’augmenter le cohérence entre le droit de l’EEE et le droit de l’Union [voir, entre autres, arrêt de la Cour AELE du 28 juillet 2016, Yankuba Jabbi (E-28/15, EFTA Court Report 2016, p. 575, point 81)], l’accord EEE n’inclut pas la [Charte], ni aucune référence d’aucune sorte à d’autres instruments juridiques ayant le même effet, telle que la convention » (134).

114. Cependant, dans le contexte de l’affaire au principal, cela n’importe tout simplement pas, parce que l’obligation incombant à une juridiction d’un État partie à la CEDH d’évaluer le risque d’exposition à un traitement inhumain ou dégradant avant de procéder à une extradition est consacrée dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme relative à l’article 3 de la CEDH (135). La passerelle vers le droit de l’Union et la Charte découle du fait que la Cour a déclaré que « l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants prévue à l’article 4 de la Charte correspond à celle énoncée à l’article 3 de la CEDH et que, dans cette mesure, son sens et sa portée sont, conformément à l’article 52, paragraphe 3, de la Charte, les mêmes que ceux que lui confère cette convention » (136). Le niveau de protection des droits fondamentaux des particuliers peut être relevé en étendant le champ d’application de la Charte (par exemple, peut-être, dans le cas de la protection de la propriété au titre de la Charte, telle que reflétée à l’article 17 de la Charte et dans la référence expresse à la propriété intellectuelle qui figure à cet article). Toutefois, l’affaire au principal ne concerne pas une situation de ce type.

115. La passerelle vers le droit de l’EEE vient du fait que la CEDH est une importante source bien établie du droit de l’EEE, le premier considérant de l’accord EEE indiquant que l’EEE « contribuera à la construction d’une Europe fondée sur la paix, la démocratie et les droits de l’homme », ce qui va jusqu’à imposer aux parties contractantes à l’accord EEE de respecter les droits fondamentaux lorsqu’elles dérogent au droit de l’EEE (137).

116. En droit de l’Union, comme en droit de la CEDH, l’interdiction de toute extradition entraînant un traitement inhumain ou dégradant s’applique à toute personne, quelle que soit sa nationalité. Cette interdiction est reflétée par le mot « Nul » figurant à l’article 19, paragraphe 2, de la Charte, qui transpose dans le droit de l’Union les principes développés par la Cour EDH dans le cadre de l’article 3 de la CEDH (138). Par conséquent, le fait que I.N. n’est pas un ressortissant de l’Union est dénué de pertinence aux fins de l’exercice de ce droit matériel, compte tenu du champ d’application ratione personae de cette disposition. L’article 19, paragraphe 2, de la Charte s’applique indépendamment de toute discrimination et de la citoyenneté de l’Union (139).

117. Jusqu’à ce jour, la Cour a reconnu l’interdiction de soumettre un justiciable à un risque de procès inéquitable, en violation de l’article 47 de la Charte, en raison de défaillances systémiques, uniquement dans un contexte intra-européen et exclusivement dans le cadre du mandat d’arrêt européen (140). Toutefois, ainsi que je l’ai fait observer dans mes conclusions dans l’affaire Minister for Justice and Equality (141), la Cour EDH interdit aux États contractants d’expulser une personne lorsque celle‑ci court, dans le pays de destination, un risque réel d’être soumise à un déni de justice flagrant, en violation de l’article 6 de la CEDH (142). Je suis donc d’avis que le champ d’application matériel de l’article 47 de la Charte vise également la situation où une personne, quelle que soit sa nationalité (143), est exposée à un tel déni de justice dans un État tiers, pour autant que sa situation relève de la Charte. Cette large portée du champ d’application découle du fait que l’article 52, paragraphe 3, de la Charte prévoit que les droits garantis par la Charte qui correspondent à ceux prévus par la CEDH doivent être interprétés de la même manière, tout en laissant à l’Union le pouvoir de fixer un niveau de protection plus élevé. Autrement dit, si l’article 6 de la CEDH s’oppose à une extradition lorsqu’une personne court le risque d’un déni de justice flagrant, tel doit être également le cas de l’article 47 de la Charte.

118. La situation de I.N. relève de la Charte à deux égards. Premièrement, tant en vertu du droit de l’EEE que des droits fondamentaux de l’Union européenne, les dérogations à la libre circulation doivent respecter les droits fondamentaux (144). Deuxièmement, étant donné que la juridiction de renvoi est liée par la confiance légitime qui fonde le régime du règlement Dublin III, toutes les dispositions applicables de ce règlement, telles que son article 3, paragraphe 1, et son interdiction (implicite) de demandes d’asile multiples, doivent être interprétées conformément à la Charte (145).

V.      Les faits pertinents et les réponses aux questions déférées

119. J’ai répondu aux questions préjudicielles dans le sens décrit aux points 7 à 9 des présentes conclusions sur la base des principes juridiques énoncés dans la partie IV et des éléments de fait importants suivants.

120. Les termes employés dans la seconde question préjudicielle laissent entendre que l’Islande a demandé la remise de I.N. « aux fins de mener une procédure pour laquelle l’extradition est demandée ». Toutefois, les réponses aux questions posées à l’Islande lors de l’audience ont clarifié le fait que la communication faite par l’ambassade d’Islande à Berlin le 24 juillet 2019 ne contenait aucune demande spécifique en ce sens (voir point 53 des présentes conclusions). En outre, l’agent de l’Islande a déclaré lors de l’audience que la Croatie était tenue de fournir à l’Islande des documents en sa possession afin de les transmettre au procureur général de l’Islande, qui agit en toute indépendance, lequel envisagera ensuite l’opportunité de lancer des poursuites à l’encontre de I.N. en Islande (voir point 50 des présentes conclusions). Mais il n’est pas établi que l’Islande ait jamais demandé la remise de I.N. Toutefois, il n’y a pas d’élément dans le dossier indiquant avec précision quand et si l’Islande a fait cette demande à la Croatie.

121. Il n’y avait de plus aucune mention quant au point de savoir si le comité mixte, établi en vertu de l’article 3 de l’accord entre la Communauté européenne, la république d’Islande et le Royaume de Norvège sur les critères et les mécanismes permettant de déterminer l’État responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans un État membre, en Islande ou en Norvège, avait été saisi du litige entre la Croatie et l’Islande (146).

122. Par conséquent, selon moi, il serait prématuré pour la Cour de répondre par l’affirmative à la seconde question préjudicielle et d’obliger la Croatie à prendre des mesures actives en vue de la remise de I.N. sur le fondement de l’accord relatif à la procédurede remise (147). Si l’Islande émet un mandat d’arrêt (148), il appartiendra à la juridiction croate d’apprécier, sur le fondement de l’ensemble des éléments de preuve pertinents, si ce que propose l’Islande garantit la prévention de l’impunité d’une manière équivalente à l’extradition, ce qui constitue la pierre angulaire de la jurisprudence Petruhhin (voir les points 99 et 100 des présentes conclusions). Cela étant énoncé, mes observations concernant l’accord relatif à la procédure de remise se limiteront à déclarer que, de prime abord, une telle garantie est fournie et que, contrairement aux arguments du Royaume de Norvège (points 57 à 59 des présentes conclusions), cette garantie n’est pas diminuée par l’absence d’une référence expresse à la confiance mutuelle, la rigueur de l’accord relatif à la procédure de remise étant largement établie par d’autres dispositions (149).

123. Dans le même temps, ma réponse à la seconde question préjudicielle n’autorise en aucune façon les juridictions croates à agir de manière incompatible avec la décision du 11 juin 2015 de l’Islande d’octroyer l’asile à I.N. (même si l’appréciation par les juridictions croates de la situation en Russie sera effectuée au regard des circonstances actuelles plutôt que de celles prévalant en 2015) en raison de l’obligation de confiance mutuelle entre l’Islande et la Croatie découlant de leur participation au régime d’asile européen commun, et plus particulièrement au règlement Dublin III (150).

VI.    Conclusion

124. Je propose donc de répondre de la manière suivante aux questions posées par le Vrhovni sud (Cour suprême, Croatie) :

1)      Dans les circonstances de l’affaire au principal, les articles 4 et 36 de l’accord EEE doivent être interprétés en ce sens qu’un État membre de l’Union européenne qui statue sur l’extradition vers un État tiers d’un ressortissant d’un État qui n’est pas membre de l’Union, mais qui est membre de l’espace Schengen, est tenu d’informer cet État membre de l’espace Schengen de la demande d’extradition. L’État membre est, en outre, tenu de transmettre à l’État membre de l’espace Schengen tout élément en sa possession susceptible d’aider ce dernier à prendre une décision sur le point de savoir s’il entend poursuivre le ressortissant concerné et demander sa remise. De plus, l’obligation de confiance mutuelle inhérente au régime d’asile européen commun, incluant le règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, s’oppose à ce que les autorités de l’État membre, y compris ses juridictions, ne se conforment pas à l’octroi de l’asile antérieur à l’acquisition de la nationalité de cet État membre de l’espace Schengen. Cela s’applique, lors de l’appréciation du risque d’exposer le ressortissant de l’État membre de l’espace Schengen à un traitement inhumain ou dégradant ou à un déni de justice flagrant, à la date de l’extradition vers un État tiers.

2)      Lorsque l’État membre de l’espace Schengen doit encore émettre une demande d’extradition, l’État membre n’est pas tenu de remettre activement le ressortissant de l’État membre de l’espace Schengen en vertu de l’accord entre l’Union européenne et la République d’Islande et le Royaume de Norvège relatif à la procédure de remise entre les États membres de l’Union européenne et la République d’Islande et le Royaume de Norvège. En cas de demande d’extradition, il appartiendra aux juridictions de l’État membre de déterminer si, au vu de l’ensemble des circonstances, la demande d’extradition offre des garanties contre l’impunité équivalentes à l’extradition vers l’État tiers, tout en restant tenues de se conformer à l’octroi antérieur du droit d’asile par l’État membre de l’espace Schengen.


1      Langue originale : l’anglais.


2      L’article 216, paragraphe 2, TFUE prévoit que les accords conclus par l’Union lient les institutions de l’Union et les États membres. Voir, notamment, arrêt du 30 avril 1974, Haegeman (181/73, EU:C:1974:41, point 5).


3      Arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630).


4      Voir l’accord du 18 mai 1999 conclu par le Conseil de l’Union européenne, la République d’Islande et le Royaume de Norvège sur l’association de ces États à la mise en œuvre, à l’application et au développement de l’acquis de Schengen (JO 1999, L 176, p. 36) (ci‑après l’« accord d’association à l’acquis de Schengen »).


5      JO 2013, L 180, p. 31. Son article 48 abroge le règlement (CE) no 343/2003 du 18 février 2003 (Dublin II).


6      Accord entre la Communauté européenne, la République d’Islande et le Royaume de Norvège sur les critères et les mécanismes permettant de déterminer l’État responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans un État membre, en Islande ou en Norvège (JO 2001, L 93, p. 40).


7      Les règles fondamentales primaires et législatives du régime d’asile européen commun sont les suivantes : les articles 67, 78 et 80 TFUE ainsi que l’article 18 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») ; le règlement Dublin III ; le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relatif à la création d’Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l’application efficace du règlement (UE) no 604/2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride et relatif aux demandes de comparaison avec les données d’Eurodac présentées par les autorités répressives des États membres et Europol à des fins répressives, et modifiant le règlement (UE) no 1077/2011 portant création d’une agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice (ci‑après le « règlement Eurodac ») (JO 2013, L 180, p. 1) ; la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection (ci‑après la « directive relative aux conditions ») (JO 2011, L 337, p. 9) ; la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale (ci‑après la « directive procédures ») (JO 2013, L 180, p. 60) ; la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale (ci‑après la « directive accueil ») (JO 2013, L 180, p. 96) ; le règlement (UE) no 439/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 19 mai 2010, portant création d’un Bureau européen d’appui en matière d’asile (JO 2010, L 132, p. 11) ; la directive 2001/55/CE du Conseil, du 20 juillet 2001, relative à des normes minimales pour l’octroi d’une protection temporaire en cas d’afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil (JO 2001, L 212, p. 12).


8      JO 2006, L 292, p. 2. Cet accord a été intégré dans le droit de l’Union par la décision du Conseil, du 27 novembre 2014, relative à la conclusion de l’accord entre l’Union européenne, d’une part, et la République d’Islande et le Royaume de Norvège, d’autre part, relatif à la procédure de remise entre les États membres de l’Union européenne et la République d’Islande et le Royaume de Norvège (ci‑après « l’accord relatif à la procédure de remise ») (JO 2014, L 343, p. 1).


9      La convention européenne d’extradition (STE no 24) ; la convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale (STE no 30) qui est entrée en vigueur le 12 juin 1962. La Russie a ratifié ces deux conventions, et le deuxième protocole additionnel à la convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale (STE no 182) est entré en vigueur pour la Russie le 1er janvier 2020. A également été adoptée sous l’égide du Conseil de l’Europe la convention sur le transfèrement des personnes condamnées (STE no 112).


10      Signée à Genève le 28 juillet 1951 et qui est entrée en vigueur le 22 avril 1954 [Série des traités des Nations Unies, vol. 189, p. 150, n° 2545 (1954)], telle que complétée par le protocole relatif au statut des réfugiés, conclu à New York le 31 janvier 1967 et entré en vigueur le 4 octobre 1967 (ci‑après, ensemble, la « convention de Genève »).


11      Ordonnance du 6 septembre 2017, Peter Schotthöfer & Florian Steiner (C‑473/15, EU:C:2017:633, point 24 et jurisprudence citée).


12      Voir, notamment, arrêt du 25 juillet 2018, Generalstaatsanwaltschaft (Conditions de détention en Hongrie) (C‑220/18 PPU, EU:C:2018:589).


13      Arrêt du 25 juillet 2018, Minister for Justice and Equality (Défaillances du système judiciaire) (C‑216/18 PPU, EU:C:2018:586).


14      Note en bas de page 5.


15      Note en bas de page 8.


16      JO 2000, L 239, p. 19, ci-après la « convention d’application de l’accord de Schengen ».


17      JO 2012, C 326, p. 1.


18      Ibid.


19      Note en bas de page 4.


20      Voir décision du Conseil de l’Union européenne, du 5 décembre 2011, relative à l’admission de la République de Croatie à l’Union européenne, ainsi que les conditions d’admission de la République de Croatie et les adaptations du traité sur l’Union européenne, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et du traité instituant la Communauté européenne de l’énergie atomique annexées à cette décision (JO 2012, L 112, p. 6).


21      L’annexe II énumère en premier lieu l’accord entre les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signé à Schengen le 14 juin 1985 (JO 2000, L 239, p. 13) (ci‑après l’« accord de Schengen du 14 juin 1985 »).


22      JO 1994, L 1, p. 3.


23      Note en bas de page 9.


24      Arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630).


25      Note en bas de page 5.


26      I.N. se réfère à l’arrêt du 2 février 1989, Cowan (186/87, EU:C:1989:47, point 10).


27      Arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630).


28      Modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO 2004, L 158, p. 77).


29      JO 2008, L 124, p. 20.


30      Arrêt de la Cour AELE du 24 novembre 2014, Islande/Gunarsson (E-27/13, EFTA Court Report 2014, p. 1090).


31      Arrêt de la Cour AELE du 26 juillet 2016, Jabbi/Norwegian Government (E‑28/15, EFTA Court Report 2016, p. 575).


32      I.N. renvoie aux arrêts du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630) et du 13 novembre 2018, Raugevicius (C‑247/17, EU:C:2018:898).


33      Note en bas de page 8.


34      JO 2002, L 190, p. 1 ; ci‑après la « décision-cadre relative au MAE ».


35      Note en bas de page 8.


36      S’agissant des droits et dérogations à la libre circulation prévus à l’article 21 TFUE, le procureur général cite les arrêts du 12 mai 2011, Runevič-Vardyn et Wardyn (C‑391/09, EU:C:2011:291) ; du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630), ainsi quedu 13 novembre 2018, Raugevicius (C‑247/17, EU:C:2018:898).


37      C‑182/15, EU:C:2016:630.


38      Le gouvernement hellénique a également cité d’autres arrêts, tels que l’arrêt du 5 juillet 2007, Commission/Belgique (C‑522/04, EU:C:2007:405).


39      Cette position se fonde sur les deux premiers considérants de l’accord EEE.


40      Ordonnance du 6 septembre 2017, Peter Schotthöfer & Florian Steiner (C‑473/15, EU:C:2017:633).


41      À cet endroit, l’ASA fait référence à l’arrêt du 21 décembre 2011, N. S. e.a. (C‑411/10 et C‑493/10, EU:C:2011:865, point 83).


42      Note en bas de page 7.


43      Arrêt du 2 février 1989, Cowan (186/87, EU:C:1989:47).


44      Arrêt de la Cour AELE du 22 juillet 2013, Wahl c. État islandais (E-15/12, EFTA Court Report 2013, p. 534).


45      Note en bas de page 8.


46      L’Islande se fonde sur l’arrêt du 26 février 2013, Åkerberg Fransson (C‑617/10, EU:C:2013:105).


47      Tel que l’interdit l’article 47 de la Charte. Arrêt du 25 juillet 2018, Minister for Justice and Equality (Défaillances du système judiciaire) (C‑216/18 PPU, EU:C:2018:586).


48      Recueil des traités des Nations Unies, vol. 596, p. 261.


49      Note en bas de page 8. L’accord relatif à la procédure de remise est entré en vigueur le 1er novembre 2019.


50      Affaire pendante Campbell c. Gouvernement norvégien (E-4/19).


51      Arrêt de la Cour AELE du 26 juillet 2016, Jabbi c. Gouvernement norvégien (E-28/15, EFTA Court Report 2016, p. 575).


52      Note en bas de page 34. La Norvège a soutenu que l’accord relatif à la procédure de remise était plutôt régi par la convention de Vienne sur le droit des traités (1969) (Recueil des traités des Nations Unies, vol. 1155, p. 331).


53      La Norvège cite les points 37 et 40 de l’arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630).


54      Note en bas de page 34.


55      La Norvège a cité l’arrêt de la Cour AELE du 19 avril 2016, Holship Norge AS c. Norsk Transportarbeiderforbund (E-14/15, EFAT Court Report 2016, p. 240, point 123).


56      Arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630, point 62).


57      Ibid., points 58 et 62.


58      Le gouvernementcroate renvoie aux arrêts du 11 septembre 2007, Commission/Allemagne (C‑318/05, EU:C:2007:495, point 32 et jurisprudence citée) et du 21 décembre 2016, Commission/Portugal (C‑503/14, EU:C:2016:979, points 35 et 70).


59      Le gouvernement croate renvoie à l’arrêt du 2 février 1989, Cowan (186/87, EU:C:1989:47 points 17 à 19).


60      Arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630).


61      Note en bas de page 16.


62      Cet accord est constitué actuellement de trois règlements : le règlement (UE) 2018/1860 du Parlement européen et du Conseil, du 28 novembre 2018, relatif à l’utilisation du système d’information Schengen aux fins du retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO 2018, L 312, p. 1) ; le règlement (UE) 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil, du 28 novembre 2018, sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières (JO 2018, L 312, p. 14), et le règlement (UE) 2018/1862 du Parlement européen et du Conseil, du 28 novembre 2018, sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen (SIS) dans le domaine de la coopération policière et de la coopération judiciaire en matière pénale, modifiant et abrogeant la décision 2007/533/JAI du Conseil, et abrogeant le règlement (CE) no 1986/2006 du Parlement européen et du Conseil et la décision 2010/261/UE de la Commission (JO 2018, L 312, p. 56).


63      Note en bas de page 6.


64      Note en bas de page 7.


65      Note en bas de page 7.


66      Le gouvernement croate cite la décision 2014/194/UE du Conseil, du 11 février 2014, relative à la signature, au nom de l’Union, de l’arrangement entre l’Union européenne et la République d’Islande sur les modalités de sa participation au Bureau européen d’appui en matière d’asile (JO 2014, L 106, p. 2).


67      Note en bas de page 29.


68      La Commission cite les articles 4 à 7 de la directive 2004/38, ainsi que les points 78 et 79 de l’arrêt de la Cour de l’AELE du 22 juillet 2013, Wahl (E-15/12, EFTA Court Report 2013, p. 534).


69      La Commission cite ici l’arrêt du 2 février 1989, Cowan (186/87, EU:C:1989:47, points 14 à 17) et l’arrêt de la Cour AELE du 25 avril 2012, Granvill (E-13/11, EFTA Court Report 2012, p. 400, point 37).


70      Arrêt du 10 avril 2018, Pisciotti (C‑191/16, EU:C:2018:222).


71      Arrêt du 12 mars 2014, O. et B. (C‑456/12, EU:C:2014:135).


72      Arrêt de la Cour AELE du 26 juillet 2016, Jabbi c. Gouvernement norvégien (E‑28/15, EFTA Court Report 2016, p. 575, points 66 à 77). La Commission cite également l’arrêt de la Cour AELE du 24 novembre 2014, Islande c. Gunnarsson (E-27/13, EFTA Court Report 2014, p. 1090, points 79 à 82).


73      Deuxième considérant de l’accord EEE.


74      Quatrième considérant de l’accord EEE.


75      Quinzième considérant de l’accord EEE.


76      Arrêt de la Cour AELE du 26 juillet 2016, Jabbi c. Gouvernement norvégien (E‑28/15, EFTA Court Report 2016, p. 575, points 68 et 70).


77      Note en bas de page 34.


78      La Commission cite ici les arrêts du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630, point 49) et du 10 avril 2018, Pisciotti (C‑191/16, EU:C:2018:222).


79      Note en bas de page 10.


80      Voir arrêt du 26 février 2013, Melloni (C‑399/11, EU:C:2013:107, notamment les points 58 et 59). Voir plus récemment arrêt du 29 juillet 2019, Siegel Online (C‑516/17, EU:C:2019:625, point 21).


81      Pernice, I., « Multilevel Constitutionalism and the Crisis of Democracy in Europe » 11 (2015), European Constitutional Law Review, p. 541, p. 544 à 545.


82      Voir Lenaerts, K., « The European Court of Human Rights and the Court of Justice of the European Union : Creating Synergies in the Field of Fundamental Rights Protection » 1 (2018), Il Diritto del’Unione Europea, p. 9, ainsi que son discours prononcé sur le même thème le 23 mars 2018 à la faculté de droit de l’université de Sofia.


83      Voßkuhle, A., Multilevel Cooperation of the European Constitutional Court « Der Europäische Verfassungsgerichtsverbund » 6 (2010), European Constitutional law Review, p. 175.


84      Sur les Cours constitutionnelles des États membres dans ce paradigme, voir Popelier, P., Mazmanyan, A., et Vandenbruwaene (ed.), The Role of Constitutional Courts in Multilevel Governance, Intersentia, Mortsel, 2013.


85      La première version de l’accord EEE comportait une telle disposition (article 104, paragraphe 1). Toutefois, dans l’avis rendu en vertu de l’article 228, paragraphe 1, deuxième alinéa du traité - Projet d’accord entre la Communauté, d’une part, et les pays de l’Association européenne de libre échange, d’autre part, portant sur la création de l’Espace économique européen (Avis 1/91, EU:C:1991:490), la Cour a déclaré que cette disposition est incompatible avec le droit de l’Union. Voir Baudenbacher, C., « The EFTA Court : Structure and Tasks », dans The Handbook of EEA Law Springer, 2016, p. 179-188.


86      Arrêt du 23 septembre 2003, Ospelt et Schlössle Weissenberg (C‑452/01, EU:C:2003:493, point 29). Voir, plus récemment, notamment, arrêts du 20 octobre 2011, Commission/Allemagne (C‑284/09, EU:C:2011:670, point 95) ; du 19 juillet 2012, A (C‑48/11, EU:C:2012:485, point 22), et du 11 septembre 2014, Essent Belgium (C‑204/12 à C‑208/12, EU:C:2014:2192, point 72 et jurisprudence citée). Pour ce qui est du Tribunal, voir arrêt du 22 janvier 1997, Opel Austria/Conseil (T‑115/94, EU:T:1997:3).


87      L’absence de hiérarchie entre les cercles qui se chevauchent est mise en évidence par des commentaires indiquant que la Cour AELE accorde davantage de poids au droit à un procès équitable au sens de l’article 6 de la CEDH que la Cour de justice. Voir, notamment, Baudenbacher, B., « The EFTA Court and the Court of Justice of the European Union : Coming in Parts But Winning Minds », dans The Court of Justice and the Construction of Europe : Analyses and Perspectives on Sixty Years of Case-law, T.M.C. Asser Press (2013), p. 183, p. 198, faisant référence à un commentaire sur un blog par de la Serr, E.B., concernant les arrêts du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission (C‑272/09 P, EU:C:2011:810) et du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission (C‑386/10 P, EU:C:2011:815).


88      L’article 45 de la Charte protège également les droits des citoyens de l’Union européenne de circuler et de séjourner librement dans l’Union.


89      Les autres normes applicables en Europe sont la convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale (STE no 30), qui est entrée en vigueur le 12 juin 1962. La Fédération de Russie a ratifié ces deux accords, et le deuxième protocole additionnel à la convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale (STE no 182) est entré en vigueur à l’égard de la Russie le 1er janvier 2020. A également été adoptée sous les auspices du Conseil de l’Europe la convention européenne sur le transfèrement des personnes condamnées (STE no 112).


90      Arrêt du 11 décembre 2014, Commission/Espagne (C‑678/11, EU:C:2014:2434, point 66). Voir également, notamment, le point 48 de l’arrêt du 6 octobre 2009, Commission/Espagne (C‑153/08, EU:C:2009:618) : « Dans la mesure où les stipulations de l’article 36 de l’accord EEE revêtent la même portée juridique que celle des dispositions, identiques en substance, de l’article 49 CE [désormais article 56 TFUE] », les conclusions tirées en ce qui concerne l’article 49 CE, en ce compris la justification de la discrimination, « sont transposables mutatis mutandis ».


91      Arrêt du 11 septembre 2014, Essent Belgium (C‑204/12 à C‑208/12, EU:C:2014:2192, point 123, lu en combinaison avec le point 72). La Cour a renvoyé aux arrêts du 1er avril 2004, Bellio F.lli (C‑286/02, EU:C:2004:212, points 34 et 35) et du 10 avril 2008, Commission/Portugal (C‑265/06, EU:C:2008:210, point 30).


92      Arrêt du 2 février 1989, Cowan (186/87, EU:C:1989:47).


93      Arrêt de la Cour AELE du 25 avril 2012, Granville (E-13/11, EFTA Court Report 2012, p. 400, point 37).


94      Arrêt du 2 février 1989, Cowan (186/87, EU:C:1989:47).


95      Arrêt du 24 novembre 1993, Keck et Mithouard (C‑267/91 et C‑268/91, EU:C:1993:905).


96      Par exemple, arrêt du 10 juillet 1984, Kirk (63/83, EU:C:1984:255).


97      Voir, notamment, le récent arrêt du 8 mai 2019, Związek Gmin Zagłębia Miedziowego (C‑566/17, EU:C:2019:390, point 44).


98      Voir les points 38, 40, 55, 56, 61 et 75 des présentes conclusions.


99      Voir, initialement, l’arrêt de la Cour AELE du 26 juillet 2016, Jabbi c. Gouvernement norvégien (E-28/15, EFTA Court Report 2016, p. 573). I.N. n’a pas soulevé d’objection spécifique fondée sur la directive 2004/38, telle que la violation d’un droit d’entrée au sens de l’article 5 de ladite directive, ainsi que cela est envisagé dans l’arrêt de la Cour AELE du 22 juillet 2013, Wahl (E-15/12, EFTA Court Report 2013, p. 534). Cela étant, je n’examinerai pas plus en avant la directive 2004/38, sinon pour faire observer que, en tant que mesure de droit dérivé, elle doit être interprétée conformément à la mesure du droit primaire que constitue l’article 36 de l’accord EEE. Voir arrêt de la Cour AELE du 23 janvier 2012, STX Norway Offshore AS e.a. c. État norvégien (E-2/11, EFTA Court Report 2012, p. 4, point 34).


100      Le présent débat sur le point de savoir si la citoyenneté peut être découplée de la nationalité d’un État membre peut également être laissé de côté. Voir, notamment, Nic Shuibhine, N., « The Territory of the Union in EU citizenship Law : Charting a Route from Parallel to Integrated Narratives » (2019), Yearbook of European Law, 1.


101      J’ai à l’esprit ici la distinction, en droit de l’EEE, entre les arrêts de la Cour antérieurs à la date de l’accord EEE, qui s’appliquent aux dispositions de l’accord EEE qui sont « identiques en substance aux règles correspondantes du traité instituant la Communauté économique européenne » (article 6 de l’accord EEE) et les arrêts de la Cour adoptés après la date de la signature de l’accord EEE. L’Autorité de surveillance AELE et la Cour AELE sont uniquement tenues de tenir « dûment compte des principes établis par la jurisprudence pertinente de la Cour » (article 3, paragraphe 2, de l’accord entre les États de l’AELE relatif à l’institution d’une autorité de surveillance et d’une Cour de justice ; JO 1994, L 344, p. 1).


102      Arrêt de la Cour AELE du 19 avril 2016, Holship Norge AS c. Norsk Transportarbeiderforbund (E-14/15, EFTA Court Report 2016, p. 238, point 121).


103      Arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630).


104      Voir arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630, point 37).


105      Arrêt du 10 avril 2018, Pisciotti (C‑191/16, EU:C:2018:222, point 47).


106      Arrêt du 13 novembre 2018, Raugevicius (C‑247/17, EU:C:2018:898, point 32). La Cour a également mis en garde contre le risque d’impunité lorsqu’elle a élaboré sa jurisprudence relative au fonctionnement du mandat d’arrêt européen et contre le risque d’être soumis à un traitement ou une peine inhumains ou dégradants. Voir arrêt du 25 juillet 2018, Generalstaatsanwaltschaft (Conditions de détention en Hongrie) (C‑220/18 PPU, EU:C:2018:589, points 85 et 86).


107      Voir arrêt du 10 avril 2018, Pisciotti (C‑191/16, EU:C:2018:222, point 48 ainsi que jurisprudence citée).


108      Pour un aperçu, voir Brouwer, E., « Mutual Trust and the Dublin Regulation : the Protection of Fundamental Rights in the EU and the Burden of Proof », Utrecht Law Review, 9 (2013), p. 135.


109      Cela s’applique de la même manière à l’arrêt du 13 novembre 2018, Raugevicius (C‑247/17, EU:C:2018:898), qui portait sur une demande d’un État tiers visant à l’exécution d’une peine privative de liberté à l’encontre d’un citoyen de l’Union qui avait exercé ses droits à la libre circulation.


110      Point 51 de l’arrêt du 10 avril 2018, Pisciotti (C‑191/16, EU:C:2018:222). Mise en italique ajoutée par mes soins.


111      Cela pourrait changer sous peu. Voir communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil relative à la vérification de l’application intégrale de l’acquis de Schengen par la République de Croatie [COM(2019) 497 final].


112      Note en bas de page 5.


113      Arrêt du 26 juillet 2017, A.S. (C‑490/16, EU:C:2017:585).


114      Note en bas de page 7.


115      Note en bas de page 7.


116      Note en bas de page 7.


117      https://www.asylumineurope.org/reports/country/croatia/annex-i-transposition-ceas-national-legislation.


118      Conclusions de l’avocate générale Sharpston dans les affaires A.S. et Jafari (C‑490/16 et C‑646/16, EU:C:2017:443).


119      Point 123 des conclusions. Mise en italique ajoutée par nos soins. L’avocate générale a cité les considérants 2, 3, 19 et 39 du règlement Dublin III ainsi que les arrêts du 21 décembre 2011, N. S. e.a. (C‑411/10 et C‑493/10, EU:C:2011:865) ; du 6 juin 2013, MA e.a. (C‑648/11, EU:C:2013:367), ainsi que du 10 décembre 2013, Abdullahi (C‑394/12, EU:C:2013:813). Le texte cité est extrait du point 53 de l’arrêt Abdullahi.


120      Décision du Conseil 2001/258/CE (JO 2001, L 93, p. 38). Voir aussi article 1er de l’accord cité à la note en bas de page 6.


121      Notes en bas de page 6 et 7, respectivement.


122      Cela est prévu, principalement, par l’accord d’association de la République d’Islande et du Royaume de Norvège à Schengen (note en bas de page 4) et inclut, notamment : l’accord de Schengen du 14 juin 1985 (note en bas de page 21) et, sous réserve de certaines exceptions, la convention d’application de l’accord de Schengen (note ende bas de page 16) ; le règlement (CE) no 574/1999 du Conseil, du 12 mars 1999, déterminant les pays tiers dont les ressortissants doivent être munis d’un visa lors du franchissement des frontières extérieures des États membres (JO 1999, L 72, p. 2), devenu le règlement (UE) 2018/1806 du Parlement européen et du Conseil, du 14 novembre 2018, fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation (JO 2018, L 303, p. 39) ; le règlement (CE) no 1683/95 du Conseil, du 29 mai 1995, établissant un modèle type de visa (JO 1995, L 164, p. 1).


123      Note en bas de page 10 des présentes conclusions. Voir, de manière générale, Lawunmi, D., « The Dublin Regulation and the Charter : an impetus for change », dans Peers, S., et. al. (ed.), The EU Charter of Fundamental Rights : a Commentary Second Edition, Hart Publishing, Oxford, 2020 (à paraître).


124      Voir, notamment, arrêt du 19 mars 2019, Jawo (C‑163/17, EU:C:2019:218, point 81).


125      Voir arrêt du 21 décembre 2011, N. S. e.a. (C‑411/10 et C‑493/10, EU:C:2011:865) et son interaction avec l’arrêt de la Cour EDH, 21 janvier 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce (CE:ECHR:2011:0121JUD003069609). Voir le récent arrêt du 19 mars 2019, Jawo (C‑163/17, EU:C:2019:218).


126      Il semblerait que ce soit à juste titre que la Croatie affirme qu’elle est liée par les dispositions du chapitre 2, intitulé « Entraide en matière pénale », de la convention d’application de l’accord de Schengen (note en bas de page 16), du moins partiellement. Voir annexe II de l’acte d’adhésion de la République de Croatie (note en bas de page 20). L’islande est liée par le chapitre 2, intitulé « Entraide en matière pénale », de la même convention en vertu de la partie 1 de l’annexe A à l’accord d’association à l’acquis de Schengen (note en bas de page 4).


127      Note en bas de page 17.


128      En vertu de l’article 3, paragraphe 1, du règlement Dublin III (note en bas de page 5), la demande d’asile « est examinée par un seul État membre ».


129      Note en bas de page 10. Conformément au troisième considérant du règlement Dublin III, cette convention est une source d’interprétation du règlement Dublin III.


130      Voir conclusions de l’avocate générale Sharpston dans les affaires A.S. et Jafari (C‑490/16 et C‑646/16, EU:C:2017:443, point 102).


131      Voir la directive procédures, citée à la note en bas de page 7 des présentes conclusions.


132      Kapferer, S., « Cancellation of Refugee Status », Legal and Protection Policy Research Series, UNHCR PPLA/2003/02, mars 2003, p. 36 et 37.


133      Note en bas de page 10. Mise en italique ajoutée par nos soins. Voir également arrêt du 14 mai 2019, M (Révocation du statut de réfugié) (C‑391/16, C‑77/17 et C‑78/17, EU:C:2019:403, points 78 et 81) concernant le statut de la convention de Genève dans le droit de l’Union. Au point 108, la Cour a également déclaré que le droit secondaire de l’Union ne saurait être interprété en ce sens qu’il aurait pour effet d’inciter ces États « à se soustraire à leurs obligations internationales, telles qu’elles résultent de la convention de Genève, en limitant les droits » dérivés de cette convention.


134      Cour EDH, 5 novembre 2019, Konkurrenten NO A.S. c. Norvège (CE:ECHR:2019:1105DEC004734115, §43).


135      Voir, notamment, arrêt de la Cour EDH, 19 novembre 2019, TK et SR c. Russie (CE:ECHR:1997:0521DEC002620995, §§ 78 et 91 à 96).


136      Arrêt du 16 février 2017, C. K. e.a. (C‑578/16 PPU, EU:C:2017:127, point 67).


137      Arrêt de la Cour AELE du 19 avril 2016, Holship Norge AS c. Norsk Transportarbeiderforbund (E-14/15, EFTA Court Report 2016, p. 238, point 123).


138      Voir les explications relatives à l’article 19, paragraphe 2, de la Charte (JO 2007, C 303, p. 17).


139      Voir ordonnance du 6 septembre 2017, Peter Schotthöfer & Florian Steiner (C‑473/15, EU:C:2017:633). Le dispositif de cette décisionmentionne la citoyenneté, mais les points exposant les principes juridiques découlant de l’article 19, paragraphe 2, de la Charte ne le font pas. Voir, notamment, points 22, 24 et 26. Le point 24 fait référence à une « personne » plutôt qu’à un citoyen. Sur la question du refoulement et sur l’article 19, paragraphe 2, de la Charte, voir arrêt du 14 mai 2019, M (Révocation du statut de réfugié) (C‑391/16, C‑77/17 et C‑78/17, EU:C:2019:403, point 95).


140      Arrêt du 25 juillet 2018, Minister for Justice and Equality (Défaillances du système judiciaire) (C‑216/18 PPU, EU:C:2018:586).


141      C‑216/18 PPU, EU:C:2018:517, point 66.


142      Arrêt de la Cour EDH, 17 janvier 2012, Othman (Abu Qatada) c. Royaume‑Uni (CE:ECHR:2012:0117JUD000813909, § 258).


143      Je relève que l’interdiction de toute discrimination en raison de la nationalité prévue à l’article 4 de l’accord EEE ou à l’article 18 TFUE n’est pas limitée, que ce soit à l’égard des ressortissants de l’EEE ou des ressortissants de l’Union européenne, et que le deuxième paragraphe de l’article 21 de la Charte n’est pas libellé en de tels termes. Toute discrimination est proscrite par le champ d’application des instruments respectifs.


144      Voir, respectivement, arrêt de la Cour AELE du 19 avril 2016, Holship Norge AS c. Norsk Transportarbeiderforbund (E-14/15, EFTA Court Report 2016, p. 238, point 123) et arrêt du 20 décembre 2017, Global Starnet (C‑322/16, EU:C:2017:985, point 44 et jurisprudence citée).


145      Arrêt du 19 mars 2019, Jawo (C‑163/17, EU:C:2019:218, point 78). Étant donné que I.N. n’est pas un citoyen de l’Union et que la décision-cadre relative au MAE (note en bas de page 34) n’est pas applicable en l’espèce, le fondement retenu par la Cour, dans l’arrêt du 6 septembre 2016, Petruhhin (C‑182/15, EU:C:2016:630), pour appliquer la Charte ne saurait être transposé à l’affaire au principal.


146      Note en bas de page 6. Voir, par analogie, arrêt du 16 janvier 2018, E (C‑240/17, EU:C:2018:8). L’article 3 de l’accord d’association à l’acquis de Schengen (note en bas de page 4) et le Comité mixte qu’il établit peuvent également être pertinents.


147      Note en bas de page 8.


148      Voir arrêt du 10 avril 2018, Pisciotti (C‑191/16, EU:C:2018:222, point 55). Dans cet arrêt, la Cour a jugé déterminant le fait que les autorités de l’État membre n’ont jamais émis de mandat d’arrêt européen.


149      Par exemple, les premier, troisième et huitième considérants, l’article 1er et les motifs limités de non-exécution prévus à l’article 4 dudit accord, couplés à la similitude générale avec le mandat d’arrêt européen. Voir l’accord relatif à la procédure de remise (note en bas de page 8).


150      Note 6 des présentes conclusions.