Language of document : ECLI:EU:F:2009:164

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre)

30 novembre 2009 *(1)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Notation – Rapport d’évolution de carrière – Exercice d’évaluation 2007 – Violation de l’article 43 du statut – Motivation – Erreur manifeste d’appréciation – Évaluation du rendement sur une partie de la période de référence »

Dans l’affaire F‑16/09,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Jorge de Britto Patrício-Dias, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Me L. Massaux,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme C. Berardis-Kayser et M. G. Berscheid, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. S. Gervasoni (rapporteur), président, H. Kreppel et S. Van Raepenbusch, juges,

greffier : M. G. Delannay, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 15 septembre 2009,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 24 février 2009 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 27 février suivant), M. de Britto Patrício-Dias demande l’annulation de son rapport d’évolution de carrière portant sur la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2007 et de la décision du 21 novembre 2008 par laquelle l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a rejeté sa réclamation dirigée contre le rapport d’évaluation de carrière susmentionné.

 Cadre juridique

2        L’article 43, premier alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») dispose :

« La compétence, le rendement et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire font l’objet d’un rapport périodique établi au moins tous les deux ans, dans les conditions fixées par chaque institution conformément à l’article 110. […] »

3        Les dispositions générales d’exécution adoptées en application de l’article 110 du statut et régissant, conformément à l’article 43 du statut, l’évaluation des fonctionnaires de la Commission des Communautés européennes pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2007 ont été adoptées par cette institution le 23 décembre 2004 (ci-après les « DGE »).

4        L’article 1er des DGE prévoit qu’un exercice d’évaluation est organisé au début de chaque année. La période de référence pour l’évaluation s’étend du 1er janvier au 31 décembre de l’année précédente. À cette fin, un rapport annuel couvrant la période de référence, appelé rapport d’évolution de carrière, est établi pour chaque fonctionnaire au sens de l’article 1er du statut, qui a été dans une position d’activité ou de détachement dans l’intérêt du service, pendant au moins un mois continu au cours de la période de référence. L’exercice d’évaluation a notamment pour objet d’évaluer le rendement, les compétences et la conduite dans le service du titulaire de poste. Une note de mérite est attribuée sur la base des appréciations relatives à chacun de ces trois volets.

5        La procédure de notation prévue par les DGE peut être résumée comme suit.

6        Sur la base d’une « autoévaluation » établie par le titulaire de poste, l’évaluateur, chef d’unité ou supérieur hiérarchique direct du titulaire de poste, procède à un entretien annuel avec celui-ci. Immédiatement après la tenue de cet entretien, appelé « dialogue formel », l’évaluateur rédige un projet de rapport d’évolution de carrière.

7        L’article 4, paragraphe 3, des DGE dispose :

« En cas de mutation du titulaire de poste au sein de la même direction générale ou service ou en cas de changement d’évaluateur, un rapport intermédiaire ne doit pas être établi. L’évaluateur doit rédiger un rapport simplifié, portant exclusivement sur le rendement, les compétences et la conduite dans le service. Ce rapport simplifié ne comprend pas de note. Il est porté à la connaissance du titulaire de poste qui peut faire part de ses observations dans la partie réservée à cette fin. Il est intégré dans le rapport annuel ou le rapport intermédiaire suivant.

Un rapport simplifié ne doit pas être établi si les changements mentionnés dans ce paragraphe interviennent moins de quatre mois après la fin de la période couverte par le dernier rapport annuel, le dernier rapport intermédiaire ou le dernier rapport simplifié. Cette période inférieure à quatre mois sera couverte par le prochain rapport annuel ou le prochain rapport intermédiaire. »

8        L’article 8, paragraphe 5, troisième alinéa, des DGE prévoit que lorsque le grade du titulaire de poste est également celui de son évaluateur, le validateur participe au dialogue, si le titulaire de poste, l’évaluateur ou le validateur en fait la demande.

9        En vertu de l’article 8, paragraphe 7, des DGE, lorsque, pour un grade donné, au moins deux tiers des rapports d’évolution de carrière relevant de la compétence d’un validateur, lequel est le supérieur hiérarchique direct de l’évaluateur, ont été rédigés, le validateur vérifie avec les évaluateurs concernés l’application cohérente des normes d’évaluation définies en application de l’article 8, paragraphe 3, des DGE et procède à la comparaison des mérites et à l’harmonisation des notes de mérite proposées, en se basant sur les indications données par les évaluateurs lors du dialogue formel. Avant la finalisation des rapports d’évolution de carrière, le directeur général se concerte avec les validateurs, afin de veiller, au niveau de la direction générale et grade par grade, à la cohérence de l’évaluation des mérites des titulaires de poste concernés.

10      Selon l’article 8, paragraphe 8, premier alinéa, des DGE, lorsque la concertation mentionnée au paragraphe 7 a eu lieu, l’évaluateur et le validateur finalisent le rapport d’évolution de carrière et le communiquent au titulaire de poste.

11      En vertu de l’article 8, paragraphe 9, des DGE, si le titulaire de poste refuse le rapport d’évolution de carrière, il peut, dans un délai de cinq jours ouvrables, présenter dans son rapport d’évolution de carrière une demande motivée de révision de celui-ci. Dans ce cas, l’article 8, paragraphe 10, des DGE prévoit que le validateur tient un dialogue avec le titulaire de poste dans un délai de dix jours ouvrables et que, au plus tard cinq jours ouvrables après ce dialogue, le validateur confirme ou modifie le rapport d’évolution de carrière, puis le communique au titulaire de poste.

12      Si, dans le délai de dix jours ouvrables qui lui est alors imparti, le titulaire de poste refuse le rapport d’évolution de carrière, ce refus vaut, selon l’article 8, paragraphe 11, des DGE, saisine du comité paritaire d’évaluation (ci-après le « CPE »). Le CPE dispose, en vertu de l’article 9, paragraphe 5, des DGE, d’un délai de dix jours ouvrables pour rendre son avis.

13      L’article 9, paragraphe 7, des DGE prévoit que l’avis du CPE est transmis au titulaire de poste, à l’évaluateur, au validateur et à l’évaluateur d’appel. Ce dernier, qui est le directeur général de la direction générale concernée, confirme ou modifie le rapport, dans un délai de cinq jours ouvrables. Lorsqu’il s’écarte des recommandations figurant dans l’avis du CPE, l’évaluateur d’appel motive sa décision. Le rapport est alors clôturé et communiqué à l’intéressé, à l’évaluateur et au validateur ainsi qu’au CPE.

 Faits à l’origine du litige

14      Le requérant, fonctionnaire de grade AD 12 à la Commission, exerce les fonctions de responsable de projet à la direction générale (DG) « Énergie et transports ».

15      Le rapport d’évolution de carrière du requérant, portant sur la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2006, s’est conclu par l’attribution d’une note de mérite de 14,5 sur 20, dont 6,5 points sur 10 au titre de la rubrique « Rendement », 5 sur 6 au titre de la rubrique « Aptitudes » et 3 sur 4 au titre de la rubrique « Conduite dans le service ».

16      Le 13 avril 2008, l’évaluateur a établi le rapport d’évolution de carrière du requérant portant sur la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2007. Ce rapport a été approuvé par le validateur le 15 avril 2008. Dans ce rapport, le requérant a obtenu une note de mérite de 14 sur 20, se décomposant de la manière suivante : 6 points sur 10 au titre de la rubrique « Rendement », 5 sur 6 au titre de la rubrique « Aptitudes » et 3 sur 4 au titre de la rubrique « Conduite dans le service ».

17      Le 18 avril 2008, le requérant a introduit une demande de révision.

18      Le 8 mai 2008, le dialogue prévu par l’article 8, paragraphe 10, des DGE s’est tenu entre le requérant et le validateur.

19      Le 19 mai 2008, le validateur a signé le rapport d’évolution de carrière en maintenant le nombre de points attribués.

20      Le 29 mai 2008, le requérant a refusé ce rapport d’évolution de carrière, refus valant saisine du CPE.

21      Par avis du 6 juin 2008, le CPE a proposé à l’évaluateur d’appel de confirmer le rapport d’évolution de carrière.

22      Par décision du 20 juin 2008, l’évaluateur d’appel a confirmé le rapport d’évolution de carrière de l’exercice 2007 (ci après le « REC »).

23      Le 1er août 2008, le requérant a introduit une réclamation contre le REC, sur le fondement de l’article 90, paragraphe 2, du statut.

24      Par décision du 21 novembre 2008, l’AIPN a rejeté la réclamation et confirmé le REC (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »).

 Procédure et conclusions des parties

25      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler, en tant que de besoin, le REC ;

–        annuler la décision de rejet de la réclamation ;

–        condamner la Commission aux dépens.

26      La Commission demande au Tribunal de :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

27      Dans le rapport préparatoire d’audience, le Tribunal a demandé aux parties de lui indiquer, d’une part, le nom des différents supérieurs hiérarchiques sous les ordres desquels le requérant a servi au cours de l’année 2007, et, d’autre part, si des rapports simplifiés d’évaluation ont été établis au titre de ladite année.

 En droit

 Sur les conclusions aux fins d’annulation de la décision de rejet de la réclamation

28      Si le requérant demande l’annulation de la décision de rejet de la réclamation, il convient de constater, au vu de la jurisprudence et de la portée de cette décision de rejet (arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, Rec. p. 23, points 7 et 8 ; arrêt du Tribunal de première instance du 10 juin 2004, Liakoura/Conseil, T‑330/03, RecFP p. I‑A‑191 et II‑859, point 13 ; arrêt du Tribunal du 11 septembre 2008, Spee/Europol, F‑121/06, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 22), que ces conclusions sont, en l’espèce, dépourvues de contenu autonome et se confondent donc avec celles dirigées contre le REC.

29      Il y a lieu, dès lors, de considérer que les conclusions dirigées contre la décision de rejet de la réclamation doivent être regardées comme dirigées contre le REC.

 Sur les conclusions aux fins d’annulation du REC

 Arguments des parties

30      Le requérant soutient, en premier lieu, que le REC méconnaît l’article 43 du statut et l’article 8, paragraphe 5, troisième alinéa, des DGE. En effet, malgré la circonstance que le requérant et l’évaluateur aient le même grade, le dialogue formel prévu par cette disposition des DGE aurait eu lieu sans la présence du validateur.

31      En deuxième lieu, le requérant fait valoir que le REC viole l’article 43 du statut, l’article 1er, paragraphes 1 et 2, ainsi que l’article 6, paragraphe 3, sous c), des DGE, les principes de bonne administration et de sécurité juridique et serait entaché de détournement de pouvoir.

32      En troisième lieu, le requérant soutient que le REC méconnaît l’obligation de motivation particulière, posée par le juge communautaire, d’un rapport d’évolution de carrière comportant une régression des appréciations par rapport à celles figurant dans le rapport d’évolution de carrière de l’année précédente. En effet, alors que la notation au titre de l’exercice 2007 serait en diminution par rapport à la notation antérieure, l’administration n’aurait pas motivé le REC de manière à permettre au fonctionnaire d’en apprécier le bien-fondé.

33      En quatrième lieu, le requérant fait valoir que le REC est entaché d’erreurs manifestes d’appréciation. D’une part, l’évaluateur et le validateur, pour évaluer son rendement, auraient pris en considération les activités qu’il a exercées non au cours de l’ensemble de l’exercice d’évaluation, mais seulement à partir du mois de septembre 2007. D’autre part, l’administration n’aurait pas pris en compte la circonstance que la charge de travail du requérant aurait augmenté au titre de l’exercice en litige, en raison de la prise en charge de deux pays supplémentaires par rapport aux années précédentes et du travail supplémentaire de coordination lié à l’élargissement de la Communauté européenne à deux nouveaux États membres. Par ailleurs, le requérant aurait assumé des tâches plus importantes que lors de l’exercice précédent, en raison du départ de membres de l’équipe à la suite de la création de l’Agence exécutive du réseau transeuropéen de transport (TEN-T EA).

34      La Commission fait valoir, en premier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 8, paragraphe 5, troisième alinéa, des DGE, en raison de la non-participation du validateur lors du dialogue formel, ne peut être qu’écarté, dès lors qu’aucune demande en ce sens n’aurait été présentée par le titulaire de poste, l’évaluateur ou le validateur.

35      En deuxième lieu, la Commission estime que le REC est suffisamment motivé. En effet, la diminution de la notation serait motivée par une moins bonne appréciation du travail du requérant par ses supérieurs hiérarchiques. Par ailleurs, eu égard au caractère très limité de la diminution de la notation, la Commission ne serait pas tenue de procéder à une motivation spécifique plus importante.

36      En troisième lieu, la Commission rappelle que, en matière d’évaluation, elle dispose d’un large pouvoir d’appréciation. Elle souligne, à cet égard, que la circonstance que la charge de travail du requérant se serait accrue au titre de l’exercice en litige, à la supposer établie, ne signifierait pas nécessairement que le rendement de ce dernier se serait accru, celui-ci dépendant du niveau d’accomplissement et de réussite des objectifs fixés. La diminution de la note du requérant se justifierait par une moins bonne appréciation des prestations de celui-ci.

 Appréciation du Tribunal

–       Sur le moyen tiré de l’absence du validateur lors du dialogue formel

37      Il résulte des dispositions de l’article 8, paragraphe 5, troisième alinéa, des DGE que lorsque le grade du titulaire de poste est également celui de son évaluateur, le validateur peut participer au dialogue formel, si le titulaire de poste, l’évaluateur ou le validateur en fait la demande.

38      En l’espèce, il n’est toutefois pas établi que l’une des personnes susmentionnées ait demandé la présence du validateur lors du dialogue formel.

39      En conséquence, le requérant n’est pas fondé à soutenir que les dispositions susmentionnées auraient été méconnues du fait de l’absence du validateur lors du dialogue formel.

–       Sur les moyens tirés de la violation de l’article 43 du statut, de l’article 1er, paragraphes 1 et 2, et de l’article 6, paragraphe 3, sous c), des DGE, de la méconnaissance des principes de bonne administration et de sécurité juridique et du détournement de pouvoir

40      En vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 7, paragraphe 1, de l’annexe du même statut, la requête doit, notamment, contenir l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués.

41      Aux termes de l’article 35, paragraphe 1, sous d) et e), du règlement de procédure, la requête visée à l’article 21 du statut de la Cour contient l’objet du litige ainsi que les moyens et arguments de fait et de droit invoqués.

42      Il est de jurisprudence constante que de tels éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours le cas échéant sans autre information (voir, notamment, ordonnance du Tribunal du 30 juin 2006, Ott e.a./Commission, F‑87/05, RecFP p. I‑A‑1‑73 et II‑A‑1‑263, point 38 ; arrêt du Tribunal du 14 mai 2008, Taruffi/Commission, F‑95/06, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, points 121 à 125).

43      Or, en l’espèce, les moyens susmentionnés ne sont pas même sommairement argumentés. Le requérant se borne à les invoquer de manière abstraite et ne permet ainsi pas à la Commission de préparer utilement sa défense ni au Tribunal de statuer sur lesdits moyens.

44      Il s’ensuit que ces moyens doivent être écartés comme irrecevables.

–       Sur le moyen tiré de l’insuffisance de motivation

45      Il convient de rappeler que les rapports d’évolution de carrière, qui ne constituent pas des décisions au sens de l’article 25 du statut, sont régis par les dispositions spéciales visées à son article 43 (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 25 novembre 1976, Küster/Parlement, 122/75, Rec. p. 1685, points 24 et 25 ; arrêt du Tribunal de première instance du 25 octobre 2005, Micha/Commission, T‑50/04, RecFP p. I‑A‑339 et II‑1499, point 36 ; arrêt du Tribunal du 10 novembre 2009; N/Parlement, F‑93/08, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 82). Cependant, il résulte d’une jurisprudence constante que l’administration a l’obligation de motiver tout rapport d’évolution de carrière de façon suffisante et circonstanciée et de mettre l’intéressé en mesure de formuler des observations sur cette motivation, le respect de ces exigences étant d’autant plus important lorsque la notation connaît une régression par rapport à la notation antérieure (arrêt du Tribunal de première instance du 12 juin 2002, Mellone/Commission, T‑187/01, RecFP p. I‑A‑81 et II‑389, point 27, et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal du 13 décembre 2007, Sequeira Wandschneider/Commission, F‑65/05, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 96). Lorsque la régression de la notation est limitée, l’administration peut s’acquitter de son obligation de motivation en justifiant cette régression de manière concise, par exemple en introduisant des nuances dans les appréciations analytiques des prestations fournies par l’intéressé par rapport aux appréciations figurant dans le précédent rapport d’évolution de carrière (voir, en ce sens, à propos d’une évaluation demeurant positive, passant d’« exceptionnel » à « supérieur », arrêt du Tribunal de première instance du 30 septembre 2004, Ferrer de Moncada/Commission, T‑16/03, RecFP p. I‑A‑261 et II‑1163, point 56).

46      En l’espèce, il n’est pas contesté que, pour les rubriques « Aptitudes » et « Conduite dans le service », les notes figurant dans le REC et relatives à ces rubriques n’ont pas connu de régression par rapport à celles de l’exercice précédent.

47      Certes, il ressort des pièces du dossier que la note du requérant pour la rubrique « Rendement » est passée de 6,5 au titre de l’exercice 2006 à 6 au titre de l’exercice 2007. Toutefois, ces notes correspondent l’une comme l’autre au niveau « bien » dans l’échelle d’appréciation des prestations, telle que figurant dans le formulaire ad hoc de rapport d’évolution de carrière. Ainsi, eu égard au caractère très limité de la régression de la notation de cette rubrique par rapport à l’année précédente, l’administration pouvait satisfaire à son obligation de motivation en la justifiant de manière succincte. Or, précisément, de légères nuances concernant les appréciations analytiques de la rubrique concernée du REC ont été apportées par rapport à celles existant dans la même rubrique du rapport d’évolution de carrière de l’année précédente. Ainsi, l’évaluateur a indiqué que « les objecti[f]s établis ont été accomplis de manière satisfaisante » alors que l’année précédente il avait précisé qu’ils « [avaie]nt été accomplis de manière tout à fait satisfaisante ». En outre, l’évaluateur n’a plus fait état, au titre de l’exercice 2007, des prestations du requérant en qualité de coordonnateur de programme. Ces nuances permettent au requérant de comprendre les raisons de la légère diminution de sa note.

48      Il s’ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l’obligation de motivation ne peut être accueilli.

–       Sur le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation

49      Il convient, en premier lieu, d’examiner la première branche de ce moyen, tirée de ce que la Commission aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation du rendement du requérant en ne prenant en compte que les prestations effectuées pendant une partie de l’exercice d’évaluation.

50      Le Tribunal relève, à titre liminaire, que cette branche, d’une part, constitue l’ampliation d’un grief déjà présent dans la réclamation et, d’autre part, est expressément soulevée dans la requête contrairement à ce qu’a soutenu la Commission à la barre. En effet, le requérant, après avoir rappelé la jurisprudence selon laquelle l’administration dispose d’un large pouvoir d’appréciation en matière d’évaluation de ses fonctionnaires, le contrôle du juge étant limité à la censure d’erreurs manifestes, a soutenu que, « [e]n l’espèce, […] la personne chargée d’évaluer son rendement au travail est arrivée au mois de septembre 2007 [et] n’a pu de ce fait – l’évaluateur le souligne d’ailleurs – apprécier l’ensemble des activités menées par le requérant pour cette année 2007 » et il a considéré « que cette personne n’a pas été en mesure d’évaluer correctement le rendement de son travail durant toute l’année [et que] [l]es mêmes remarques peuvent être relevées en ce qui concerne le validateur ».

51      Il est de jurisprudence constante que les notateurs disposent d’un très large pouvoir dans l’appréciation du travail des personnes qu’ils ont la charge de noter. Il n’appartient pas au juge communautaire, sauf cas d’erreur de fait, d’erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir, de contrôler le bien-fondé de l’appréciation portée par l’administration sur les aptitudes professionnelles d’un fonctionnaire, lorsqu’elle comporte des jugements complexes de valeur qui, par leur nature même, ne sont pas susceptibles d’une vérification objective (arrêt de la Cour du 15 mars 1989, Bevan/Commission, 140/87, Rec. p. 701, publication sommaire, point 30 ; arrêt du Tribunal de première instance du 28 novembre 2007, Vounakis/Commission, T‑214/05, RecFP p. I‑A‑2‑0000 et II‑A‑2‑0000, point 62).

52      Il est de jurisprudence tout aussi constante que le rapport d’évolution de carrière a pour fonction première d’assurer à l’administration une information périodique aussi complète que possible sur les conditions d’accomplissement de leur service par ses fonctionnaires. Le rapport d’évolution de carrière ne peut véritablement remplir ce rôle si les supérieurs hiérarchiques sous les ordres desquels l’intéressé a exercé ses fonctions durant la période de notation ne sont pas consultés au préalable par le notateur et mis en mesure de consigner d’éventuelles observations. L’absence d’une telle consultation constitue une irrégularité substantielle de procédure de nature à entacher la validité du rapport de notation (arrêt du Tribunal de première instance du 24 janvier 1991, Latham/Commission, T‑63/89, Rec. p. II‑19, point 27). Il résulte par ailleurs, des dispositions de l’article 1er des DGE que le rapport d’évolution de carrière, qui a pour objet d’évaluer le rendement, les compétences et la conduite dans le service d’un fonctionnaire, doit porter sur l’ensemble de la période d’évaluation et non seulement sur une partie de celle-ci (voir arrêts du Tribunal du 13 décembre 2007, Sequeira Wandschneider/Commission, F‑28/06, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 48, et du 15 décembre 2008, Skareby/Commission, F‑34/07, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 58, faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant le Tribunal de première instance, affaire T‑91/09 P).

53      En l’espèce, il est précisé dans le REC, à la rubrique « Rendement » :

« Commentaires de l’évaluateur d’appel :

Me référant à l’avis du [CPE], j’ai décidé de confirmer votre rapport d’évolution de carrière.

Commentaires du validateur lors de la révision :

[…] J’aimerais également préciser que je connais bien les prestations du titulaire de poste pendant la plus grande partie de l’exercice d’évaluation.

Une comparaison précise des termes utilisés par l’évaluateur dans son appréciation qualitative des prestations du titulaire de poste au titre de l’exercice 2007 et de ceux utilisés par l’évaluateur au titre de l’exercice 2006, fait apparaître que le second évaluateur a donné une appréciation moins bonne que celle de son prédécesseur. En conséquence, la note attribuée par l’évaluateur reflète cette appréciation plus faible. Je suis entièrement d’accord avec cette note plus faible, compte tenu de ma propre appréciation des prestations du titulaire de poste, lesquelles, selon moi, ne correspondent pas totalement à ses capacités indubitables […] (Traduction libre.) (I would also note that I am familiar with the jobholder’s performance throughout most of the reporting period. A careful comparison of the language used by the evaluator in his qualitative assessment of the jobholder’s performance in 2007 with that used by his evaluator for 2006, shows that the former has given a lesser evaluation than his predecessor. The mark attributed by the evaluator therefore correctly reflects this lower assessment. I entirely concur with this lower mark, on the basis of my own appreciation of the jobholder’s performance, which I consider not to be fully consistent with his undoubted abilities. […]).

Commentaires de l’évaluateur :

Même s’il ne m’a pas été possible, n’étant arrivé que le 16 [septembre] 2007, d’apprécier directement l’ensemble des activités menées par [le requérant], et reprises dans l’[autoévaluation], j’ai pu constat[er que le requérant], étant donné sa longue expérience dans le domaine [du réseau transeuropéen de transport], était capable de bien gérer ses tâches avec efficacité et de démontrer un bon niveau de réalisations. […]

Il travaille de façon autonome et fournit un résultat de bonne qualité. Au[-]delà de ses tâches de [‘desk officer’] pour la Pologne, la Slovaquie, la [R]épublique tchèque et la Bulgarie, il a assuré, au cours de la première moitié de l’année, des tâches horizontales importantes pour l’unité. […] »

54      Le requérant soutient que le REC serait entaché d’une erreur manifeste d’appréciation, dans la mesure où l’évaluation de son rendement au titre de l’année 2007 n’aurait pas été fondée sur le travail effectué sur l’ensemble de la période. Ce moyen manque toutefois en fait.

55      En effet, si, dans les commentaires de l’évaluateur du REC, il est précisé « il ne m’a pas été possible, n’étant arrivé que le 16 [septembre] 2007, d’apprécier directement l’ensemble des activités menées par le [requérant] », cette remarque ne signifie nullement que l’évaluateur aurait limité son évaluation du rendement du requérant à la période postérieure au 16 septembre 2007. Il ressort au contraire, des commentaires de l’évaluateur que ce dernier, pour évaluer le rendement du requérant, a bien pris en considération le travail produit sur l’ensemble de l’année. L’évaluateur a d’ailleurs, dans ses appréciations, expressément fait référence au début de l’année 2007 en précisant que « [le requérant] a[vait] assuré au cours de la première moitié de l’année, des tâches horizontales importantes pour l’unité ».

56      En tout état de cause, à supposer que l’évaluateur ait commis une erreur manifeste en limitant son appréciation du rendement du requérant à la période allant du 16 septembre au 31 décembre 2007, cette irrégularité ne serait de nature à entraîner l’annulation du REC que dans la mesure où elle n’aurait pas été rectifiée par le validateur ou l’évaluateur d’appel (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 5 novembre 2003, Lebedef/Commission, T‑326/01, RecFP p. I‑A‑273 et II‑1317, point 61, et du 25 octobre 2005, Fardoom et Reinard/Commission, T‑43/04, RecFP p. I‑A‑329 et II‑1465, point 90 ; arrêt du Tribunal du 25 avril 2007, Lebedef-Caponi/Commission, F‑71/06, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 48), ces derniers étant des évaluateurs de plein exercice (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 13 décembre 2007, Sequeira Wandschneider/Commission, F‑28/06, précité, point 43).

57      Or, en l’espèce, il ressort des appréciations citées au point 53 du présent arrêt que le validateur a apprécié les prestations du requérant sur la plus grande partie de l’exercice. En outre, la Commission a relevé, lors de l’audience, que ledit validateur connaissait parfaitement le requérant dans la mesure où il avait été préalablement son supérieur hiérarchique direct pendant plus de la moitié de l’année 2007.

58      S’il est vrai que, pour les deux premiers mois de l’année 2007, le requérant avait un supérieur hiérarchique dont l’avis n’a pas été sollicité, cette circonstance ne permet pas, à elle seule, d’établir que le REC est entaché d’illégalité pour ce motif. En effet, il ressort, d’une part, de l’article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, des DGE, qu’un rapport simplifié n’a pas à être rédigé en cas de changement de supérieur hiérarchique moins de quatre mois après la fin de la période pour laquelle a été établi le dernier rapport d’évolution de carrière. D’autre part, il n’est pas établi ni même soutenu par le requérant qu’il aurait exercé au cours de ces deux mois d’autres fonctions que celles exécutées pendant le reste de l’année 2007 ni qu’il les aurait accomplies de manière différente.

59      Ainsi, dans les circonstances particulières de l’espèce, la première branche du moyen doit, en tout état de cause, être écartée.

60      Dans la seconde branche du moyen, le requérant soutient que la Commission aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation de son rendement en ne tenant pas compte de la circonstance que sa charge de travail aurait augmenté au titre de l’exercice en litige, en raison notamment de la prise en charge de deux pays supplémentaires par rapport aux années précédentes et du travail supplémentaire de coordination lié à l’élargissement de la Communauté européenne à deux nouveaux États membres.

61      Toutefois, il ressort des commentaires de l’évaluateur, dont le contenu a été repris par le validateur et l’évaluateur d’appel, que l’attribution de nouvelles missions a bien été prise en considération lors de l’évaluation du rendement du requérant. En outre, en se bornant à des allégations générales, le requérant n’a pas établi à suffisance de droit que l’attribution de nouvelles fonctions aurait eu pour conséquence une augmentation de son rendement ni qu’il aurait eu à supporter une surcharge de travail affectant la qualité de ses prestations.

62      Ainsi, la seconde branche du moyen doit, elle aussi, être écartée.

63      Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins d’annulation ne sont pas fondées. Le recours doit, dès lors, être rejeté.

 Sur les dépens

64      Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

65      Il résulte des motifs énoncés ci-dessus que le requérant est la partie qui succombe. En outre, la Commission a, dans ses conclusions, expressément conclu à ce que le requérant soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, il y a donc lieu de condamner le requérant aux dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. de Britto Patrício-Dias est condamné aux dépens.

Gervasoni

Kreppel

Van Raepenbusch

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 novembre 2009.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       S. Gervasoni


1* Langue de procédure : le français.