Language of document : ECLI:EU:F:2008:22

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (première chambre)

21 février 2008 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Échange de fonctionnaires entre la Commission et les États membres – Mise à disposition d’un fonctionnaire communautaire auprès de l’administration hellénique – Refus – Recours en indemnité – Préjudice moral – Procédure précontentieuse – Recevabilité – Conditions de fond pour l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté »

Dans l’affaire F‑4/07,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Eleni-Eleftheria Skoulidi, ancienne fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Me G. Vandersanden, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. D. Martin et Mme M. Velardo, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. H. Kreppel, président, H. Tagaras (rapporteur) et S. Gervasoni, juges,

greffier : Mme S. Cidéron, assistante,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 octobre 2007,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 19 janvier 2007 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 25 janvier suivant), Mme Skoulidi a introduit le présent recours tendant à la réparation du préjudice moral subi par elle du fait de la décision du directeur général de la direction générale (DG) « Personnel et administration » de la Commission des Communautés européennes, agissant en tant qu’autorité investie du pouvoir de nomination (ci‑après l’« AIPN »), du 28 mars 2006, de ne pas autoriser sa mise à disposition auprès du ministère grec de l’Éducation nationale et des Cultes, dans le cadre d’un échange de fonctionnaires entre la Commission et les États membres.

 Cadre juridique

2        L’article 35 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») énonce :

« Tout fonctionnaire est placé dans une des positions suivantes :

a)      l’activité ;

b)      le détachement ;

[…] »

3        L’article 36 du statut est rédigé comme suit :

« L’activité est la position du fonctionnaire qui exerce dans les conditions prévues au titre IV les fonctions correspondant à l’emploi auquel il a été affecté ou dont il assure l’intérim. »

4        L’article 37 du statut dispose :

« Le détachement est la position du fonctionnaire titulaire qui, par décision de l’[AIPN] :

a)      dans l’intérêt du service :

–        est désigné pour occuper temporairement un emploi en dehors de son institution

ou

–        est chargé d’exercer temporairement des fonctions auprès d’une personne remplissant un mandat prévu par les traités ou auprès d’un président élu d’une institution ou d’un organe des Communautés ou auprès d’un groupe politique du Parlement européen, ou auprès d’un groupe politique du Comité des régions [de l’Union européenne] ou d’un groupe du Comité économique et social européen ;

–        est désigné pour occuper temporairement un emploi compris dans le tableau des effectifs rémunérés sur les crédits de recherche et d’investissement et auquel les autorités budgétaires ont conféré un caractère temporaire.

b)      sur sa demande :

–        est mis à la disposition d’une autre institution des Communautés européennes,

–        est mis à la disposition d’un des organismes à vocation communautaire figurant sur une liste à établir du commun accord des institutions des Communautés, après avis du comité du statut.

[…] »

5        Le 5 janvier 1995, la Commission a adopté une « Décision relative à la mise à disposition de fonctionnaires communautaires » [C(94) 3895 final] (ci‑après la « décision du 5 janvier 1995 »). Elle prévoit :

« Article 1er      

Le régime des échanges de fonctionnaires vise à assurer une collaboration plus étroite entre les fonctions publiques de l’Union européenne, les organismes internationaux et la fonction publique communautaire par la mise à disposition de fonctionnaires de la Commission auprès des administrations nationales, des organismes assimilés à ces dernières et des organisations internationales.

[…]

Article 2

Le régime des échanges est ouvert aux fonctionnaires de catégories A et B comptant une ancienneté de service d’au moins trois années dans les [i]nstitutions communautaires et pouvant encore rester en fonction dans les [i]nstitutions communautaires pour une durée minimum de cinq années après leur réintégration, sauf dérogation accordée par le [d]irecteur [g]énéral du [p]ersonnel et de l’[a]dministration.

Article 3

Le fonctionnaire mis à disposition demeure en position d’activité au sens de l’article 35, [sous] a), du statut.

[…]

Article 7

L’autorité compétente pour décider de la mise à disposition d’un fonctionnaire, son rappel auprès des services de la [C]ommission avant l’expiration de la période normale de la mise à disposition ainsi que sa prolongation, est le [d]irecteur [g]énéral du [p]ersonnel et de l’[a]dministration.

Article 8

La mise à disposition est fixée par l’autorité compétente pour une durée comprise entre 3 mois et 2 ans. Elle ne pourra excéder cette durée.

[…] »

6        La décision du 5 janvier 1995 a été modifiée par la décision de la Commission du 24 juillet 1998 (ci‑après la « décision du 24 juillet 1998 »), qui a ajouté, à l’article 8, le paragraphe suivant :

« Lorsque la durée d’une mise à disposition est inférieure à neuf mois, aucun[e] prolongation ne pourra être accordée. »

7        L’article 52 du statut est rédigé comme suit :

« Sans préjudice des dispositions de l’article 50, le fonctionnaire est mis à la retraite :

a)      soit d’office, le dernier jour du mois durant lequel il atteint l’âge de 65 ans,

b)      soit sur sa demande, le dernier jour du mois pour lequel la demande a été présentée lorsqu’il est âgé d’au moins 63 ans ou que, ayant atteint un âge compris entre 55 et 63 ans, il réunit les conditions requises pour l’octroi d’une pension à jouissance immédiate, conformément à l’article 9 de l’annexe VIII. L’article 48, deuxième alinéa, deuxième phrase, s’applique par analogie.

Toutefois, à titre exceptionnel, à sa demande et uniquement lorsque l’[AIPN] considère que l’intérêt du service le justifie, un fonctionnaire peut rester en activité jusqu’à l’âge de 67 ans, auquel cas il est mis à la retraite d’office le dernier jour du mois au cours duquel il atteint cet âge. »

8        En ce qui concerne l’âge de l’admission au droit à pension, l’article 22 de l’annexe XIII du statut contient des dispositions transitoires, applicables aux fonctionnaires en service avant le 1er mai 2004. Aux termes de son paragraphe 1, premier alinéa, les fonctionnaires âgés de 50 ans ou plus ou ayant accompli 20 années de service ou plus au 1er mai 2004 ont droit à une pension d’ancienneté à l’âge de 60 ans.

 Faits à l’origine du litige

9        La requérante, ressortissante grecque née le 9 juin 1943, est entrée en fonctions à la Commission en 1983. Elle aurait également exercé, de 1980 à 1983, les tâches de « responsable de greffe pour les affaires [g]recques » au sein de la Cour de justice des Communautés européennes. Elle était, au moment des faits litigieux, fonctionnaire de la Commission de grade B*10.

10      Par décision du 10 mai 1990 de M. R. Hay, alors directeur général de la DG « Personnel et administration », la requérante a bénéficié d’une mise à disposition auprès du ministère grec de l’Agriculture, pour la période allant du 5 juin 1990 au 31 mai 1991. Cette mise à disposition a été prolongée jusqu’au 14 février 1992, par décision du 22 novembre 1991 de M. F. De Koster, alors directeur général de la DG « Personnel et administration ».

11      Affectée depuis le 16 juin 2001 auprès de la DG « Emploi et affaires sociales », devenue depuis la DG « Emploi, affaires sociales et égalité des chances » (ci‑après la « DG ‘Emploi’ »), la requérante a été mise à disposition du ministère grec de l’Éducation nationale et des Cultes (ci‑après le « ministère grec ») pour la période du 16 septembre 2004 au 15 mai 2005, par décision du 13 septembre 2004, prise par M. H. Reichenbach, alors directeur général de la DG « Personnel et administration » (ci‑après l’« ancien directeur général de la DG ‘Personnel et administration’ »).

12      Dès sa réintégration au sein de la Commission, à Bruxelles, la requérante a entrepris – à la demande, selon ses dires, de la ministre grecque de l’Éducation nationale et des Cultes (ci‑après la « ministre grecque ») – des démarches auprès de Mme I. Souka, directrice de la direction « Personnel et carrière » au sein de la DG « Personnel et administration » (ci‑après la « directrice de la DG ‘Personnel et administration’ »), en vue de bénéficier à nouveau d’une mise à disposition. Ainsi que les parties l’admettent, la requérante, afin d’obtenir des renseignements sur une telle possibilité, a eu un entretien, le 31 mai 2005, avec la directrice de la DG « Personnel et administration », laquelle aurait montré une certaine réticence sur une nouvelle mise à disposition de la requérante.

13      Par courriel du 18 juillet 2005, la requérante a confirmé à la directrice de la DG « Personnel et administration » que la ministre grecque souhaitait sa mise à disposition, dans le cadre d’un échange avec une fonctionnaire grecque.

14      Par courriel du 29 août 2005, la requérante a informé la directrice de la DG « Personnel et administration » qu’un entretien avait été fixé pour le 7 septembre 2005 entre la fonctionnaire grecque, destinée à remplacer la requérante dans le cadre de l’échange, et M. J. Vignon, directeur de la direction E « Protection et intégration sociales » au sein de la DG « Emploi » (ci‑après le « directeur de la DG ‘Emploi’ »), DG d’affectation de la requérante ; cette dernière demandait, en particulier, à la directrice de la DG « Personnel et administration », eu égard à ses réticences exprimées par le passé, s’il était possible d’obtenir une réponse claire, avant le 2 septembre suivant – date à laquelle la fonctionnaire grecque concernée achèterait son billet d’avion pour venir à Bruxelles afin de passer l’entretien susmentionné – sur les possibilités d’approbation de cet échange. Le même jour, la directrice de la DG « Personnel et administration » a répondu à la requérante, en lui demandant une position formelle de la DG « Emploi » sur un éventuel échange de fonctionnaires, tout en attirant son attention sur la circonstance qu’une mise à disposition ne pouvait pas être réglée sur « une base quasi-informelle ». Quelques heures plus tard, par un nouveau courriel, la requérante a affirmé que si la fonctionnaire grecque pressentie pour la remplacer réussissait l’entretien susmentionné, le ministère grec enverrait une demande formelle à la DG « Emploi », qui contacterait alors la DG « Personnel et administration ».

15      Par lettre du 18 novembre 2005, adressée à Mme O. Quintin, directrice générale de la DG « Emploi », la ministre grecque a demandé que la requérante soit mise, à nouveau, à la disposition de son cabinet, ce dans le cadre d’un échange avec la fonctionnaire grecque ayant passé un entretien avec le directeur de la DG « Emploi ».

16      Le 8 décembre 2005, la directrice générale de la DG « Emploi » a confirmé à la ministre grecque son accord quant à l’échange de fonctionnaires envisagé et quant à une prise d’effet de ce dernier au 16 janvier 2006.

17      Le même 8 décembre 2005, par une note adressée à M. C. Chêne, directeur général de la DG « Personnel et administration », la directrice générale de la DG « Emploi » a déclaré pouvoir marquer son accord pour que l’échange de fonctionnaires ait lieu dans les plus brefs délais et si possible à partir du 16 janvier 2006, pour une durée maximale de deux ans, et lui a demandé d’entamer les procédures administratives à cet effet.

18      Par courriel du 20 décembre 2005, une fonctionnaire de la DG « Personnel et administration » a informé la requérante que l’acte de mise à disposition avait été transmis au directeur général de la DG « Personnel et administration » pour qu’il le signe en sa qualité d’AIPN.

19      En date du 21 décembre 2005, la directrice de la DG « Personnel et administration » a fait savoir par courriel adressé à la DG « Emploi », laquelle l’a transmis à la requérante le lendemain, que la DG « Personnel et administration », « AIPN en la matière », avait refusé de marquer son accord sur l’échange de fonctionnaires envisagé, au motif qu’il n’interviendrait que quelques mois après la fin d’une mise à disposition de la requérante d’une durée de huit mois, alors que le régime d’échanges de fonctionnaires exclurait explicitement toute prolongation d’une mise à disposition dont la durée a été inférieure à neuf mois.

20      Par lettre du 17 janvier 2006, adressée à la directrice de la DG « Personnel et administration », avec copie à l’AIPN, le conseil de la requérante a manifesté sa volonté d’obtenir une réponse rapide concernant le dossier de sa cliente.

21      Par lettre du 25 janvier 2006, la requérante a informé le directeur de la DG « Emploi » des démarches de son conseil.

22      Par courrier du 28 mars 2006, la directrice de la DG « Personnel et administration » a transmis au conseil de la requérante copie de la décision de l’AIPN en date du 28 mars 2006 (ci‑après la « décision du 28 mars 2006 »), adressée à M. N. van der Pas, nouveau directeur général de la DG « Emploi » (ci‑après le « nouveau directeur général de la DG ‘Emploi’ »), informant ce dernier du refus de la mise à disposition de la requérante ; la motivation de la décision de l’AIPN reposait, en visant la réglementation applicable, sur l’interdiction formelle d’une prolongation d’une mise à disposition initiale d’une durée inférieure à neuf mois et sur l’impossibilité pour la requérante de justifier qu’elle pourrait effectuer une durée minimale de cinq années d’activité au sein des institutions une fois réintégrée dans les services de la Commission après sa mise à disposition. La requérante, sans être contredite sur ce point par la Commission, affirme que son conseil n’a réceptionné le courrier de la directrice de la DG « Personnel et administration » et la décision du 28 mars 2006 que le 31 mars suivant.

23      Par lettre du 18 avril 2006, la ministre grecque a fait part de son étonnement au nouveau directeur général de la DG « Emploi » quant à l’issue de sa demande d’échange de fonctionnaires. Ce dernier lui a répondu, par courrier du 5 mai 2006, en l’informant de l’irrévocabilité de la décision prise par l’AIPN.

24      En date du 30 juin 2006, la requérante a introduit une réclamation, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, contre la décision du 28 mars 2006. Dans sa réclamation, elle précise ne pas demander l’annulation de la décision du 28 mars 2006 mais la réparation du préjudice moral et matériel prétendument subi.

25      En sa qualité d’AIPN pour répondre à la réclamation, le vice‑président de la Commission a rendu, le 4 octobre 2006, une décision explicite de rejet, dont la requérante a eu connaissance le 11 octobre suivant.

26      Ayant présenté sa démission le 12 octobre 2006, la requérante a été admise à la retraite avec effet au 1er décembre suivant.

 Conclusions des parties et procédure

27      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le présent recours recevable ;

–        déclarer le présent recours fondé et accorder, en conséquence, la réparation du préjudice moral subi du fait de la décision du 28 mars 2006 ;

–        évaluer ce préjudice ex aequo et bono à 200 000 euros ;

–        condamner la Commission à l’ensemble des dépens.

28      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable et, en tout état de cause, comme non fondé ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

29      En vue d’assurer, dans les meilleures conditions, la mise en état de l’affaire et le déroulement de la procédure, le Tribunal a adopté des mesures d’organisation de celle‑ci. À cet effet, il n’a pas été procédé en application de son propre règlement de procédure (publié au JO L 225, p. 1), entré en vigueur le 1er novembre 2007, c’est-à-dire après les dates auxquelles le Tribunal a décidé des mesures d’organisation de la procédure, mais sur le fondement de l’article 64, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal de première instance des Communautés européennes, applicable mutatis mutandis au Tribunal en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement de procédure de ce dernier. Ainsi, par courriers en date du 22 juin 2007, le Tribunal a invité les parties à développer davantage leurs positions sur la recevabilité du recours et, s’agissant plus spécifiquement de la requérante, à expliciter également sa position sur la différenciation entre « mise à disposition » et « échange de fonctionnaires », en précisant le régime juridique applicable à chacune de ces deux situations.

30      Les réponses des parties aux questions du Tribunal sont parvenues, pour la requérante, par télécopie du 2 juillet 2007, l’original ayant été déposé le 5 juillet suivant et, pour la Commission, directement par dépôt de l’original le 2 juillet 2007.

 Arguments des parties

 Sur la recevabilité

31      La requérante soutient que son recours satisfait aux conditions de recevabilité tenant à la qualification d’acte faisant grief, en ce qui concerne la décision du 28 mars 2006, à l’épuisement de la procédure de réclamation préalable, au respect des délais et à son intérêt à contester une décision qui lui a causé un préjudice. Au cours de l’audience, elle a précisé que son recours en indemnité se fondait sur un acte décisionnel faisant grief et qu’il ne lui appartenait donc pas d’effectuer une demande préalable auprès de l’AIPN, mais de saisir directement cette dernière d’une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut. Dans ces conditions, le recours en indemnité serait recevable.

32      La Commission répond que, en l’espèce, la requérante a entendu fonder son action en indemnité sur un comportement illégal de l’institution qui l’emploie, comportement dépourvu de caractère décisionnel, et non sur un acte décisionnel faisant grief. Ainsi, en vertu d’une jurisprudence constante, la requérante aurait dû obligatoirement faire précéder sa réclamation d’une demande auprès de l’AIPN, conformément à l’article 90, paragraphe 1, du statut. La requérante ayant directement introduit une réclamation, sans adresser préalablement une demande à l’AIPN, le recours en indemnité devrait être déclaré irrecevable.

 Sur le bien-fondé

33      Afin d’apporter la preuve de la responsabilité de la Commission, la requérante invoque l’« attitude fautive » de l’institution, le préjudice qu’elle aurait subi et la relation de cause à effet ente les fautes commises et le préjudice.

34      La requérante se plaint de l’« attitude fautive » de la Commission, en formulant à cet égard quatre griefs. Tout d’abord, elle considère que la Commission, en n’examinant pas avant le mois de janvier 2006 la possibilité d’une éventuelle mise à disposition et en n’arrêtant sa position définitive qu’à la fin du mois de mars 2006, alors qu’elle était – selon la requérante – au courant dès le mois de mai 2005 de l’existence d’une telle éventualité, a manqué au respect de la diligence à laquelle toute administration est tenue. De plus, la requérante soutient que la Commission n’a pas respecté les engagements résultant de l’accord d’échange de fonctionnaires convenu entre ses services et les autorités helléniques, contrevenant de la sorte à la confiance légitime de la requérante et à l’intérêt général communautaire. Ensuite, la Commission se serait rendue coupable de propos, sinon injurieux, du moins déplacés à l’égard de la requérante. Enfin, la requérante prétend avoir souffert d’une discrimination du fait de la décision du 28 mars 2006, dans la mesure où deux fonctionnaires auraient bénéficié, contrairement à elle, l’un d’un détachement juste avant sa mise à la retraite, l’autre d’un renouvellement après une mise à disposition d’une durée inférieure à huit mois.

35      Dans ces conditions, la requérante aurait souffert d’un préjudice moral important. Ainsi, elle aurait été affectée par la décision du 28 mars 2006 et cela aurait eu des conséquences sur son état de santé ; à cet effet, elle s’appuie sur un rapport médical annexé à sa requête. La requérante aurait manqué, par ailleurs, certaines opportunités professionnelles.

36      Enfin, la requérante allègue que la relation de cause à effet entre l’attitude prétendument fautive de la Commission et le préjudice allégué est directe, dans la mesure où le préjudice moral subi par elle serait consécutif aux « fautes commises » par la Commission.

37      La Commission relève, à titre liminaire, que la position dont la requérante souhaitait bénéficier doit être juridiquement qualifiée, non de mise à disposition, mais de détachement dans l’intérêt du service, au sens de l’article 37, sous a), du statut.

38      La Commission nie avoir eu l’« attitude fautive » que la requérante lui reproche. Concernant l’absence de diligence invoquée par la requérante, la Commission relève que la procédure litigieuse, dont le premier acte formel aurait été la note de la directrice générale de la DG « Emploi », du 8 décembre 2005, et le dernier la décision du 28 mars 2006, a duré 2 mois et 18 jours, ce qui ne serait pas anormal, compte tenu de la complexité de ladite procédure ; elle ajoute que la requérante semble confondre le délai pour le traitement de la correspondance, qui serait de 15 jours, et la durée d’une procédure administrative qui mène à l’adoption d’une décision finale dans le seul intérêt de l’institution, cette dernière ayant d’ailleurs, dans le cas d’espèce, soigneusement examiné, dans un souci de sollicitude, toutes les voies légales pour permettre à la requérante de retourner en Grèce. Ensuite, en réponse au grief relatif au non-respect des engagements pris vis-à-vis des autorités helléniques, la Commission relève que les trois conditions posées par la jurisprudence pour se voir reconnaître le droit de réclamer la protection de la confiance légitime ne sont pas remplies dans le cas d’espèce, la requérante ne pouvant se prévaloir d’assurances précises, inconditionnelles et concordantes, de nature à faire naître une attente légitime dans son esprit, et données conformément aux normes applicables. Par ailleurs, la Commission conteste avoir tenu des propos injurieux à l’égard de la requérante. Enfin, elle renvoie, pour soutenir que la requérante ne peut invoquer une prétendue discrimination, à la réponse à la réclamation, du 4 octobre 2006, dans laquelle il est signalé que la requérante avait bénéficié d’une dérogation lors du détachement précédent ; en tout état de cause, la Commission se demande si le principe d’égalité de traitement peut être invoqué dans des procédures où, comme dans le cas d’espèce, le seul intérêt à apprécier est celui de l’institution. Dans ce contexte, la Commission considère que ni son comportement ni la décision du 28 mars 2006 ne sont illégaux.

39      En outre, le préjudice allégué par la requérante ne serait pas réel. Notamment, le rapport médical annexé à la requête serait loin de prouver un quelconque préjudice porté à la santé de la requérante et imputable à l’administration.

40      La Commission soutient, enfin, que le lien de causalité entre son comportement et le préjudice allégué par la requérante ferait défaut.

41      Par conséquent, aucune des conditions auxquelles est subordonné l’engagement de la responsabilité de la Commission ne saurait être remplie en l’espèce.

 Appréciation du Tribunal

42      À titre liminaire, il convient d’observer que la requérante demande la seule réparation du préjudice prétendument subi par elle du fait de la décision du 28 mars 2006, sans formuler en même temps des conclusions en annulation de cet acte, qui constitue cependant un acte faisant grief au sens de la jurisprudence communautaire, en ce qu’il produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts de la requérante, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celle‑ci (voir arrêt du Tribunal du 28 juin 2006, Grünheid/Commission, F‑101/05, non encore publié au Recueil, point 33) ; il convient également d’observer que la demande de la requérante vise la réparation d’un préjudice seulement moral, qui découlerait de la décision du 28 mars 2006.

 Sur la recevabilité

43      Il résulte d’une jurisprudence constante que pour l’engagement de la responsabilité de la Communauté européenne au sens de l’article 288 CE, il faut qu’un ensemble de trois conditions soit réuni, à savoir l’illégalité d’un acte ou d’un comportement des institutions, la réalité du préjudice et l’existence d’un lien de causalité entre l’acte ou le comportement et le préjudice invoqué (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 4 juillet 1989, Francesconi e.a./Commission, 326/86 et 66/88, Rec. p. 2087, point 8 ; arrêt du Tribunal du 9 octobre 2007, Bellantone/Cour des comptes, F‑85/06, non encore publié au Recueil, point 87).

44      Concernant la première condition, à savoir celle tenant à l’illégalité d’un acte ou d’un comportement des institutions, la requérante considère que son recours en indemnité repose sur l’illégalité de la décision du 28 mars 2006, qui lui aurait causé un préjudice, alors que la Commission soutient que le recours se fonde sur le comportement prétendument illégal de ses services.

45      Il convient de rappeler, à cet égard, la quadruple base de l’argumentation par laquelle la requérante tend à démontrer l’« attitude fautive » de la Commission à son encontre. Elle reproche, en effet, à la Commission, premièrement, le non‑respect de la diligence à laquelle toute administration serait tenue, deuxièmement, le non‑respect des engagements résultant de l’accord d’échange de fonctionnaires convenu entre la Commission et les autorités helléniques, la Commission contrevenant de la sorte – selon la requérante – à sa confiance légitime et à l’intérêt général communautaire, troisièmement, les propos, sinon injurieux, du moins déplacés que la Commission aurait tenus à son égard et, enfin, la discrimination dont elle aurait été victime du fait de la décision du 28 mars 2006.

46      En vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance, applicable au moment du dépôt de la requête, il appartient au requérant de définir, dans sa requête, l’objet du litige et les moyens invoqués. Or, s’il est vrai que la requérante se plaint dans sa requête de l’« attitude » fautive de la Commission et que, parmi les griefs soulevés afin d’établir l’existence d’une telle « attitude fautive », figurent ceux relatifs au prétendu manque de diligence de la Commission et aux propos tenus à l’égard de la requérante, griefs qui, de par leur nature, et au regard du contenu de la décision du 28 mars 2006, apparaissent plus liés à des comportements de la Commission dépourvus de caractère décisionnel qu’à la décision susmentionnée, il n’en demeure pas moins que les autres griefs sont essentiellement et intrinsèquement liés à la décision du 28 mars 2006 ; il en est en particulier ainsi des griefs tirés du non-respect du principe de la confiance légitime et de l’intérêt général communautaire, ainsi que du grief relatif à la discrimination dont la requérante aurait fait l’objet. Le Tribunal tient à préciser que l’appréciation effectuée dans le présent point serait également portée, en vertu de l’article 35, paragraphe 1, sous d) et e), de son propre règlement de procédure, entré en vigueur le 1er novembre 2007 (voir point 29 du présent arrêt), et qui, comme l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance, exige que le requérant, dans sa requête, détermine l’« objet » du litige et expose les « moyens » invoqués. En outre, en présence d’un acte faisant grief, le comportement de l’institution lié à l’adoption de cet acte ne peut servir de fondement à un recours indemnitaire, dont la procédure précontentieuse commence par une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, que si le comportement en question est dissociable de l’acte faisant grief ; toute autre interprétation pourrait, étant donné le délai beaucoup plus long prévu pour l'engagement d’une telle procédure précontentieuse (voir au point 70 du présent arrêt), d’une part, porter atteinte au principe de sécurité juridique, d’autre part, comporter des risques de contournement du délai statutaire de trois mois dans lequel l’acte faisant grief doit être contesté.

47      En toute hypothèse, lors de l’audience, la requérante a confirmé fonder son recours en indemnité sur l’illégalité de la décision du 28 mars 2006, laquelle lui aurait fait grief.

48      Dès lors, le Tribunal considère que, dans la présente affaire, la recevabilité du recours en indemnité doit être appréciée au regard des règles applicables dans les hypothèses selon lesquelles le préjudice résulte d’un acte décisionnel.

49      Dans ce contexte, le Tribunal estime qu’il y a lieu de rappeler d’emblée la jurisprudence suivant laquelle le recours en annulation et le recours en indemnité constituent des voies de recours autonomes et il est loisible à l’intéressé de choisir soit l’une, soit l’autre, soit les deux conjointement (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 22 octobre 1975, Meyer-Burckhardt/Commission, 9/75, Rec. p. 1171, points 10 et 11 ; arrêts du Tribunal de première instance du 24 janvier 1991, Latham/Commission, T‑27/90, Rec. p. II‑35, point 36 ; du 28 mai 1997, Burban/Parlement, T‑59/96, RecFP p. I‑A‑109 et II‑331, point 25 ; du 8 juillet 2004, Schochaert/Conseil, T‑136/03, RecFP p. I‑A‑215 et II‑957, point 24, et du 12 septembre 2007, Combescot/Commission, T‑249/04, non encore publié au Recueil, faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant la Cour, affaire C‑525/07 P, point 30 ; arrêt Bellantone/Cour des comptes, précité, point 80).

50      Il s’ensuit que, en présence d’un acte décisionnel faisant grief à un fonctionnaire, ce dernier est en droit, sans demander l’annulation de l’acte en question, d’introduire, sur le fondement d’une prétendue illégalité de cet acte, une action visant uniquement son indemnisation pour le préjudice que cet acte lui aurait causé.

51      Cette conclusion vaut à plus forte raison pour un cas comme celui de l’espèce.

52      En effet, ainsi que la requérante l’a relevé lors de l’audience, une action en annulation contre la décision du 28 mars 2006 serait très probablement irrecevable, faute d’intérêt à agir de l’intéressée, qui, mise à la retraite avec effet au 1er décembre 2006, ne serait plus en mesure de bénéficier d’une mise à disposition suite à une annulation éventuelle, par le juge communautaire, de ladite décision.

53      En l’espèce, la requérante avait donc la possibilité, contrairement à ce que la Commission a soutenu lors de l’audience, d’introduire une action indemnitaire en se fondant sur la décision du 28 mars 2006, sans même demander l’annulation de cette dernière.

54      Il convient, cependant, de relever que, selon une jurisprudence constante, les articles 90 et 91 du statut subordonnent la recevabilité d’un recours, y compris d’un recours indemnitaire, à la condition du déroulement régulier de la procédure administrative préalable prévue par ces articles (arrêt de la Cour du 27 juin 1989, Giordani/Commission, 200/87, Rec. p. 1877, point 22).

55      Par conséquent, pour que le recours puisse être déclaré recevable, la procédure précontentieuse doit avoir été suivie de manière régulière, en ce qui concerne tant les actes que la requérante devait accomplir au titre de cette procédure que le délai dans lequel ces actes étaient à accomplir.

56      Pour ce qui est de la première question, il convient de commencer par rappeler que, conformément à la jurisprudence, la procédure précontentieuse diffère selon que le dommage dont la réparation est demandée résulte d’un acte décisionnel faisant grief, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, ou d’un comportement de l’administration dépourvu de caractère décisionnel ; dans le premier cas, il appartient à l’intéressé de saisir l’AIPN, dans les délais impartis, d’une réclamation dirigée contre l’acte en cause, les conclusions indemnitaires pouvant être présentées soit dans cette réclamation soit pour la première fois dans la requête, tandis que dans le second cas, la procédure administrative doit débuter par l’introduction d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut visant à obtenir un dédommagement, et se poursuivre, le cas échéant, par une réclamation dirigée contre la décision de rejet de la demande (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 6 juillet 1995, Ojha/Commission, T‑36/93, RecFP p. I‑A‑161 et II‑497, point 117 ; du 28 juin 1996, Y/Cour de justice, T‑500/93, RecFP p. I‑A‑335 et II‑977, point 64, et du 6 novembre 1997, Liao/Conseil, T‑15/96, RecFP p. I‑A‑329 et II‑897, point 57 ; arrêt du Tribunal du 2 mai 2007, Giraudy/Commission, F‑23/05, non encore publié au Recueil, point 69).

57      La présente action étant basée sur la prétendue illégalité d’un acte décisionnel (voir en ce sens le point 48 du présent arrêt), il résulte de la jurisprudence exposée au point précédent que la procédure précontentieuse devait commencer par une réclamation, dirigée contre cet acte.

58      Il est vrai que la jurisprudence en question, relative aux actions ayant comme fondement l’illégalité alléguée d’un acte décisionnel, a été développée à l’occasion d’affaires dans lesquelles les requérants poursuivaient en premier lieu l’annulation de l’acte décisionnel concerné.

59      Rien ne s’oppose, cependant, à l’application de la même jurisprudence dans le cas où, en présence d’un acte décisionnel, le fonctionnaire décide de suivre uniquement la voie du recours en indemnité.

60      En particulier, dans la jurisprudence que la Commission invoque afin d’établir l’exigence de l’introduction préalable d’une demande (arrêt Giordani/Commission, précité, point 22 ; arrêt du Tribunal de première instance du 25 septembre 1991, Marcato/Commission, T‑5/90, Rec. p. II‑731, point 29 ; arrêt du Tribunal du 1er février 2007, Rossi Ferreras/Commission, F‑42/05, non encore publié au Recueil, point 59), cette exigence n’est posée que pour les seules affaires dans lesquelles le fondement de l’action indemnitaire consiste en un comportement illégal de l’institution. Or, ainsi qu’il a été précisé au point 48 du présent arrêt, le fondement de l’action indemnitaire de la requérante consiste en l’illégalité d’un acte décisionnel, même si la requérante ne poursuit pas l’annulation de cet acte, mais cherche uniquement à obtenir réparation pour le préjudice que cet acte – illégal selon elle – lui aurait causé.

61      Pour la Commission, cependant, ainsi qu’elle l’a fait valoir lors de la procédure orale, même dans une telle hypothèse, la procédure précontentieuse aurait dû débuter par une demande, au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut.

62      La position de la Commission ne saurait être retenue.

63      En effet, s’agissant des actions ayant comme fondement l’illégalité d’un comportement, l’obligation de l’introduction préalable d’une demande, au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, au lieu de l’introduction directe d’une réclamation, résulte des dispositions statutaires en matière de voies de recours. Force est en effet de constater que, en raison précisément de l’absence d’acte décisionnel, l’intéressé ne saurait introduire la réclamation requise par l’article 90, paragraphe 2, du statut, une réclamation ne pouvant être dirigée, aux termes de cette dernière disposition, que contre un acte faisant grief ; ainsi, l’introduction de la demande vise à faire émettre par l’AIPN un acte faisant grief, consistant dans le rejet explicite ou implicite de ladite demande.

64      De plus, dans l’hypothèse d’une action fondée sur l’illégalité d’un comportement, en l’absence d’un acte faisant grief, qui refléterait avec certitude et précision la position de l’AIPN, la mise en état et l’instruction de l’affaire nécessiterait une procédure précontentieuse plus longue, devant débuter par une demande.

65      Or, ni les conditions posées par les articles 90 et 91 du statut, ni les besoins d’instruction et de mise en état des affaires ne justifient de suivre, dans un cas comme celui de l’espèce, la procédure précontentieuse applicable aux actions indemnitaires ayant comme fondement un comportement dénué de caractère décisionnel.

66      De surcroît, selon la jurisprudence, en présence d’un acte faisant grief, le fonctionnaire doit utiliser la procédure de réclamation, prévue à l’article 90, paragraphe 2, du statut, l’introduction d’une simple demande n’ayant aucun sens (voir ordonnances du Tribunal de première instance du 7 juin 1991, Weyrich/Commission, T‑14/91, Rec. p. II‑235, points 32 et 34, et du 1er avril 2003, Mascetti/Commission, T‑11/01, RecFP p. I‑A‑117 et II‑579, point 33 ; arrêt du Tribunal du 28 juin 2006, Le Maire/Commission, F‑27/05, non encore publié au Recueil, point 36, et ordonnance du Tribunal du 27 mars 2007, Manté/Conseil, F‑87/06, non encore publiée au Recueil, point 19). Il est vrai que cette jurisprudence a été développée à l’occasion de recours en annulation. Il n’y a cependant pas de raisons pour qu’il ne puisse pas en aller de même dans le cadre d’actions à caractère purement indemnitaire. En effet, si, en vue d’obtenir l’annulation d’un acte décisionnel faisant grief, le fonctionnaire est dans l’obligation d’introduire directement une réclamation, la solution doit être la même quand il cherche la seule réparation du dommage que cet acte lui aurait causé.

67      Une telle interprétation satisfait aussi aux exigences de l’économie du procès, l’obligation d’introduire une demande préalable au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, apparaissant inutile, vu l’allongement de la procédure précontentieuse qui en découlerait et les coûts qui seraient engendrés par une telle obligation.

68      Dans ces conditions, la requérante devait réagir contre la décision du 28 mars 2006 en introduisant une réclamation, même si, tant par la réclamation que par le recours subséquent, elle ne demandait que la seule réparation du préjudice moral subi du fait de cet acte lui faisant grief.

69      Pour ce qui est de la deuxième question soulevée au point 55 du présent arrêt relativement à la procédure précontentieuse, question se rapportant aux délais, il y a lieu de rappeler qu’une exception a été posée au principe de l’autonomie des voies de recours, lorsque l’action en indemnité comporte un lien étroit avec l’action en annulation (voir arrêts Latham/Commission, précité, point 37, et Burban/Parlement, précité, point 26). À cet égard, la Cour a jugé que si une partie peut agir par le moyen d’une action en responsabilité, sans être astreinte par aucun texte à poursuivre l’annulation de l’acte illégal qui lui cause préjudice, elle ne saurait tourner par ce biais l’irrecevabilité d’une demande visant la même illégalité et tendant aux mêmes fins pécuniaires (arrêt de la Cour du 15 décembre 1966, Schreckenberg/Commission, 59/65, Rec. p. 785, 797). Cette jurisprudence a été développée dans le cadre de recours en indemnité ayant pour seul objet la réparation d’un préjudice matériel, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. En effet, l’action de la requérante ne vise que la réparation du préjudice moral. Il ne peut ainsi pas lui être reproché de contourner, par le biais de cette action indemnitaire, l’irrecevabilité d’une demande en annulation et de tenter de se procurer les mêmes avantages pécuniaires que lui aurait assurés une action en annulation à laquelle le juge communautaire aurait fait droit (voir arrêt Schochaert/Conseil, précité, point 26).

70      Il résulte cependant des arrêts cités au point précédent que la jurisprudence relative au « délai raisonnable » dans lequel une action en indemnité doit être introduite, délai à déterminer dans chaque affaire en fonction des circonstances propres de l’espèce et en tenant également compte du délai de prescription de cinq ans prévu par l’article 46 du statut de la Cour de justice, bien que cette disposition ne soit pas applicable en tant que telle dans les litiges entre la Communauté et ses agents (voir, en dernier lieu, ordonnance du Tribunal du 14 décembre 2007, Marcuccio/Commission, F‑21/07, non encore publiée au Recueil, points 18 à 20), ne peut remettre en cause les conditions de délai posées par les articles 90 et 91 du statut ; il s’ensuit que le fonctionnaire qui souhaite introduire une action indemnitaire sur le fondement des illégalités dont un acte faisant grief serait entaché doit initier la procédure précontentieuse dans les trois mois à compter de la notification de cet acte ou de la date à laquelle il a eu connaissance de l’existence de celui-ci, en ce qui concerne non seulement le préjudice matériel, mais aussi le préjudice moral.

71      En l’espèce, il n’est pas contesté que la réclamation de la requérante a été introduite dans le délai susmentionné de trois mois, prévu à l’article 90, paragraphe 2, du statut.

72      Il s’ensuit que, sous réserve des considérations exposées au point 82 du présent arrêt, le recours est recevable.

 Sur le bien-fondé

73      À titre liminaire, le Tribunal rappelle que la Commission, par la décision du 28 mars 2006, a refusé à la requérante le bénéfice d’une mise à disposition auprès du ministère grec. Ainsi, et cela ressort explicitement de cette même décision, le présent recours concerne le régime de mise à disposition, tel qu’il résulte de la décision du 5 janvier 1995, dont le principe repose sur la possibilité d’échanges de fonctionnaires entre l’Union européenne et les administrations nationales.

74      Concernant la légalité de la décision du 28 mars 2006, il apparaît, tout d’abord, en vertu de l’article 2 de la décision du 5 janvier 1995, que le régime des échanges est ouvert aux fonctionnaires pouvant encore rester en fonction dans les institutions communautaires pour une durée minimale de cinq années après leur réintégration, sauf dérogation accordée par le directeur général de la DG « Personnel et administration » en tant qu’AIPN. En l’espèce, la requérante, qui, indépendamment de sa démission et de sa mise à la retraite en 2006, aurait été en toute hypothèse, en raison de son âge, mise d’office à la retraite au cours de l’année 2008, a bénéficié d’une précédente mise à disposition, du 19 septembre 2004 au 15 mai 2005 ; pour consentir alors à cette mise à disposition, l’ancien directeur général de la DG « Personnel et administration » aurait pris en considération, ainsi que l’AIPN le fait remarquer dans la décision du 28 mars 2006, les années de service encore à fournir par la requérante, qui étaient de trois ans et demi à l’époque, et accordé à celle-ci une dérogation en application de l’article 2 de la décision du 5 janvier 1995. À l’inverse, dans la présente affaire, l’AIPN a considéré, dans sa décision du 28 mars 2006, que, après la réintégration de la requérante dans les services de l’institution une fois sa nouvelle mise à disposition achevée, il ne lui resterait que quelques mois d’activité avant sa mise en retraite, ce qui situerait sa demande de mise à disposition dans une perspective différente de sa demande précédente. Il est certain que, dans ce contexte, une mise à disposition de la requérante, au mois de mai 2005 ou ultérieurement, aurait contrevenu à l’article 2 de la décision du 5 janvier 1995, dans la mesure où l’intéressée ne pouvait justifier qu’elle aurait pu accomplir au moins cinq années de service après sa réintégration, cette dernière condition étant posée par la disposition en question. En toute hypothèse, la possibilité d’une dérogation relevait, en vertu de l’article 2 de la décision du 5 janvier 1995, de la seule appréciation de l’AIPN, qui, dans sa décision du 28 mars 2006, n’a pas souhaité accorder une telle dérogation ; or, la requérante, lorsqu’elle se plaint de l’« attitude fautive » de la Commission, ne soutient pas que l’AIPN, pour refuser d’accorder la dérogation, aurait méconnu la marge d’appréciation dont elle dispose en vertu de l’article 2 de la décision du 5 janvier 1995.

75      Ainsi, pour les raisons qui viennent d’être exposées, le Tribunal estime que la décision du 28 mars 2006 ne peut être considérée comme entachée d’illégalité et remplir, par conséquent, la première condition énoncée au point 43 du présent arrêt.

76      À titre surabondant, il convient de relever que, s’il est énoncé à l’article 8 de la décision du 5 janvier 1995 que la mise à disposition est fixée par l’autorité compétente pour une durée comprise entre trois mois et deux ans, la décision de la Commission du 24 juillet 1998, modifiant celle du 5 janvier 1995, a ajouté audit article 8 un paragraphe aux termes duquel lorsque la durée d’une mise à disposition est inférieure à neuf mois, aucune prolongation ne peut être accordée. Or, la requérante, qui avait bénéficié d’une mise à disposition du 19 septembre 2004 au 15 mai 2005, soit d’une durée de huit mois, a informé la DG « Personnel et administration », dès la fin du mois de mai 2005, de sa volonté de bénéficier, à nouveau, d’une mise à disposition. En outre, dans sa lettre du 18 novembre 2005, adressée à la directrice générale de la DG « Emploi », la ministre grecque a demandé que la requérante soit mise, à nouveau, à la disposition de son cabinet, en précisant expressément que cette demande visait à ce que la requérante puisse achever le travail de restructuration de la direction de l’Union européenne du ministère grec, travail qui aurait nécessité plus de huit mois pour le mener à bien. Dans ces circonstances, la demande de mise à disposition doit s’analyser comme une demande de prolongation de la période initiale. En conséquence, eu égard au fait qu’elle faisait suite à une mise à disposition inférieure à neuf mois, la demande de prolongation ne pouvait être acceptée. Ainsi, la décision du 28 mars 2006 est conforme aux dispositions de l’article 8 de la décision du 5 janvier 1995, telles que modifiées ; en revanche, une décision en sens inverse, à savoir une décision accordant la mise à disposition demandée, aurait été contraire aux dispositions susmentionnées.

77      En toute hypothèse, aucun des quatre griefs que la requérante formule à l’encontre de la Commission, en lui reprochant son « attitude fautive », ne peut tenir en échec la conclusion à laquelle le Tribunal aboutit au point 75 du présent arrêt.

78      Concernant le prétendu manque de diligence de la Commission, du fait que celle-ci n’aurait pas examiné avant le mois de janvier 2006 la possibilité d’une éventuelle mise à disposition et n’aurait arrêté sa position définitive qu’à la fin du mois de mars 2006, alors qu’elle était, selon la requérante, au courant d’une telle éventualité, dès le mois de mai 2005, il y a lieu de relever d’emblée que l’intéressée, ainsi qu’elle l’a d’ailleurs expressément confirmé lors de l’audience, vise, par ses reproches, la DG « Personnel et administration », sans aucunement mettre en cause la DG « Emploi ». Il y a lieu ensuite de relever, au vu des éléments du dossier, que la Commission, notamment les services de la DG « Personnel et administration », a toujours répondu dans un délai raisonnable aux courriers provenant de la DG « Emploi » et de la requérante. Ainsi, lorsque la requérante a souhaité obtenir des renseignements au mois de mai 2005 sur une éventuelle mise à disposition, la directrice de la DG « Personnel et administration » l’a reçue pour un entretien qui s’est déroulé le 31 mai 2005 et a, dès ce stade, exprimé une première position sur la question, en faisant part de ses réticences quant à la mise à disposition demandée. Également, lorsque la requérante a contacté par courriel du 29 août 2005 la directrice de la DG « Personnel et administration », cette dernière lui a répondu immédiatement par courriel du même jour, en lui demandant une position formelle de la DG « Emploi ». Or, pendant plusieurs mois, ni la requérante ni la DG « Emploi » n’ont pris contact avec la DG « Personnel et administration », préférant dialoguer directement avec la ministre grecque et le ministère grec. C’est seulement en date du 8 décembre 2005 que la directrice générale de la DG « Emploi » s’est adressée au directeur général de la DG « Personnel et administration », par une note dans laquelle elle déclarait pouvoir marquer son accord sur la mise à disposition de la requérante, avec, si possible, effet dès le 16 janvier 2006. Par la suite, une fonctionnaire de la DG « Personnel et administration » a informé la requérante, par courriel du 20 décembre 2005, que l’acte de mise à disposition avait été transmis au directeur général de la DG « Personnel et administration » pour qu’il le signe et, dès le lendemain, la directrice de la DG « Personnel et administration » a fait savoir par courriel adressé à la DG « Emploi », laquelle l’a transmis à la requérante, que la DG « Personnel et administration » avait refusé de marquer son accord sur cet échange, en donnant même la motivation de ce refus. Enfin, faisant suite au courrier du conseil de la requérante du 17 janvier 2006, demandant à l’AIPN de prendre une décision rapide, cette dernière a, par décision du 28 mars 2006, refusé la mise à disposition de la requérante. Cette décision est donc intervenue trois mois et demi après la demande formelle de la directrice générale de la DG « Emploi » et deux mois après le courrier du conseil de la requérante. Dans ces conditions, le Tribunal ne peut retenir un manque de diligence de la part de l’administration.

79      S’agissant du prétendu non-respect des engagements résultant de l’accord d’échange convenu entre la Commission et les autorités helléniques et de la prétendue atteinte, ce faisant, à la confiance légitime de la requérante et à l’intérêt général communautaire, le Tribunal tient à rappeler que, en vertu de l’article 7 de la décision du 5 janvier 1995, l’autorité compétente pour décider de la mise à disposition est le directeur général de la DG « Personnel et administration » et que cette autorité est compétente à plusieurs niveaux pour toutes les décisions qui peuvent intervenir dans le cadre de la procédure d’échange de fonctionnaires ; ainsi, les accords intervenus antérieurement à la décision du 28 mars 2006 ayant été conclus par le service d’affectation de la requérante, soit la DG « Emploi », incompétente en matière de mise à disposition, le grief tiré du prétendu non-respect des engagements résultant de l’accord d’échange convenu entre la Commission et les autorités helléniques doit être rejeté. En outre, tout comme au sujet du prétendu manque de diligence, la requérante visant, par ses reproches, la DG « Personnel et administration », sans aucunement mettre en cause la DG « Emploi », alors qu’aucune personne ou autorité de la DG « Personnel et administration » n’a, à aucun moment, pris le moindre engagement à l’égard des autorités helléniques, le grief tiré du prétendu non-respect des engagements ne saurait prospérer. S’agissant en particulier de la confiance légitime, le Tribunal relève, conformément à ce que soutient la Commission, que les conditions posées par la jurisprudence et donnant le droit de réclamer la protection de la confiance légitime ne sont pas remplies dans le cas d’espèce, la requérante ne pouvant se prévaloir d’assurances précises, inconditionnelles et concordantes fournies par l’administration (arrêts du Tribunal de première instance du 27 février 1996, Galtieri/Parlement, T‑235/94, RecFP p. I‑A‑43 et II‑129, points 63 et 65, et du 16 mars 2005, Ricci/Commission, T‑329/03, RecFP p. I‑A‑69 et II‑315, point 79). Il en va de même pour la prétendue atteinte portée à l’intérêt général communautaire ; en effet, et vu les circonstances particulières de l’espèce (telle que décrites dans le présent point, ainsi que dans le point précédent), le Tribunal ne voit pas en quoi la décision individuelle de refus de mise à disposition de la requérante, décision conforme aux règles en vigueur, pourrait affecter l’intérêt général communautaire.

80      En outre, concernant les propos injurieux ou, à tout le moins, déplacés, que la Commission aurait tenus à l’encontre de la requérante, il convient de relever que cette dernière se réfère essentiellement aux termes utilisés par la directrice de la DG « Personnel et administration », lorsque celle-ci a déclaré, dans son courriel du 21 décembre 2005, qu’accepter la mise à disposition demandée « pourrait donc paraître comme un détournement de la règle établie par la décision [du 5 janvier 1995 modifiée] ». Or, le Tribunal ne voit pas en quoi ces termes pourraient être considérés comme injurieux ou déplacés. En conséquence, leur utilisation ne saurait être fautive ; cela d’autant plus que, de par sa formulation, le courriel semble se référer à l’impression objective qu’un tiers ferait de la situation, sans aucunement prêter à la requérante une intention subjective de contourner les règles en vigueur. Le Tribunal ne relève pas non plus, contrairement à ce que soutient la requérante, de termes injurieux ou, à tout le moins, déplacés dans la décision du 28 mars 2006.

81      Par ailleurs, la requérante ne saurait alléguer avoir fait l’objet d’une discrimination, en fondant cette allégation sur le cas de deux autres fonctionnaires, et notamment de l’un d’entre eux qui aurait bénéficié d’une prolongation subséquemment à une mise à disposition d’une durée de huit mois. En effet, selon une jurisprudence constante, le respect du principe d’égalité de traitement doit se concilier avec celui du principe de légalité, ce qui implique que nul ne peut invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d’autrui, une telle approche équivalant à consacrer le principe de « l’égalité de traitement dans l’illégalité » (voir arrêt du Tribunal de première instance du 16 novembre 2006, Peróxidos Orgánicos/Commission, T‑120/04, Rec. p. II‑4441, point 77). En conséquence, la requérante ne saurait se fonder sur une décision illégale pour invoquer une atteinte au principe d’égalité de traitement. Certes, cette jurisprudence s’est essentiellement développée à l’occasion de recours en annulation. Il n’y a cependant pas de raison pour qu’elle ne puisse pas valoir par analogie pour les recours indemnitaires ; de surcroît, à supposer même qu’un grand nombre de décisions illégales aurait pu créer un préjudice moral pour la requérante, force est de constater que celle-ci ne cite que deux décisions, sans donner réellement de précisions sur les situations visées par celles-ci et encore moins effectuer une comparaison précise et concrète de sa situation personnelle avec celles des deux fonctionnaires en question. Concernant toujours ce grief, le Tribunal relève, à titre surabondant, que la requérante avait déjà bénéficié d’une mise à disposition, du 5 juin 1990 au 31 mai 1991, qui, à l’époque, avait été prolongée, mais aussi qu’une dérogation lui avait été accordée pour la dernière mise à disposition dont elle a bénéficié, du 16 septembre 2004 au 15 mai 2005.

82      À titre subsidiaire, le Tribunal rappelle (voir au point 46 du présent arrêt) que les griefs relatifs au manque de diligence de la Commission et aux propos que cette dernière auraient tenus à l’égard de la requérante apparaissent plus liés à des comportements de la Commission dépourvus de caractère décisionnel qu’à la décision du 28 mars 2006. Or, ainsi qu’il a été précisé au point 48 du présent arrêt, le fondement de l’action de la requérante consiste en l’illégalité alléguée de la décision susmentionnée, qui est un acte à caractère décisionnel. L’objet du litige étant le dédommagement de la requérante en raison d’un acte décisionnel et non d’un comportement, il en résulte que, à supposer que le comportement de la Commission visé par les deux griefs susmentionnés soit dissociable de la décision du 28 mars 2006 et puisse servir de fondement à une action indemnitaire, le Tribunal aurait pu décider, au vu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance, de ne pas statuer sur les griefs en question, dans la mesure où ils refléteraient un comportement de l’administration (voir, à ce sujet, notamment les points 46 à 48 du présent arrêt), ou, en toute hypothèse, conclure, pour deux motifs, à l'irrecevabilité du recours. D’abord, conformément à la jurisprudence exposée au point 56 du présent arrêt, la requérante, pour invoquer de manière recevable ces griefs, aurait dû faire débuter la procédure précontentieuse par l’introduction préalable d’une demande, au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, et la poursuivre, le cas échéant, par une réclamation dirigée contre la décision de rejet de ladite demande, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce. Ensuite, à supposer même que par l’introduction de la réclamation du 30 juin 2006 la requérante ait satisfait aux exigences de la procédure précontentieuse, non seulement dans la mesure où les deux griefs faisant l’objet du présent point se rapportent à la décision du 28 mars 2006 (voir aux points 79 et 80 du présent arrêt), mais également dans la mesure où ils reflètent un comportement de l’institution, la requête manquerait cependant aux exigences de clarté et de précision, posées par l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, applicable au moment du dépôt de la requête, le Tribunal n’étant pas ainsi en mesure d’exercer son contrôle juridictionnel (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 17 juin 2003, Seiller/BEI, T‑385/00, RecFP p. I‑A‑161, II‑801, point 40 ; arrêt Rossi Ferreras/Commission, précité, point 30) : en effet, la requête n’indique pas dans quelle mesure la réparation du préjudice évalué à 200 000 euros tient au comportement illégal de la Commission et quelle partie du montant de la réparation demandée correspond à l’illégalité de l’acte faisant grief ; or, il aurait appartenu à la requérante, après avoir précisé la nature du préjudice moral allégué, de l’évaluer, même de façon approximative, en distinguant le préjudice fondé sur la décision du 28 mars 2006 et celui fondé sur le comportement illégal de la Commission, afin que le Tribunal soit en mesure d’en apprécier l’étendue et le caractère (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 décembre 2007, N/Commission, F‑95/05, non encore publié au Recueil, point 91). Cette même appréciation serait portée en vertu de l’article 35, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, lequel article impose au moins les mêmes exigences de clarté et de précision que l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal de première instance. Ainsi, à supposer qu’il y ait eu manque de diligence de la part de la Commission, ainsi que des propos injurieux ou, à tout le moins, déplacés à l’encontre de la requérante, celle-ci ne saurait, en toute hypothèse, s’en prévaloir dans le cadre de ce recours, afin d’obtenir la condamnation de la Commission au paiement de dommages et intérêts.

83      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

84      En vertu de l’article 122 du règlement de procédure, les dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, relatives aux dépens et frais de justice, ne s’appliquent qu’aux affaires introduites devant le Tribunal à compter de l’entrée en vigueur de ce règlement de procédure, à savoir le 1er novembre 2007. Les dispositions du règlement de procédure du Tribunal de première instance pertinentes en la matière continuent à s’appliquer mutatis mutandis aux affaires pendantes devant le Tribunal avant cette date.

85      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. La requérante ayant succombé en son recours, il y a lieu de décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supporte ses propres dépens.

Kreppel

Tagaras

Gervasoni

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 février 2008.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       H. Kreppel

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions communautaires citées dans celle-ci et non encore publiées au Recueil sont disponibles sur le site internet de la Cour de justice : www.curia.europa.eu


* Langue de procédure : le français.