Language of document : ECLI:EU:C:2020:818

ORDONNANCE DE LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR

8 octobre 2020 (*)

« Pourvoi – Référé – Droit institutionnel – Membres du Parlement européen – Déchéance de mandat à la suite d’une condamnation pénale – Décision du Président du Parlement européen constatant la vacance du siège – Recours en annulation– Fumus boni juris »

Dans l’affaire C‑201/20 P(R),

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 57, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 13 mai 2020,

Oriol Junqueras i Vies, demeurant à Sant Joan de Vilatorrada (Espagne), représenté par Me A. Van den Eynde Adroer, abogado,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Parlement européen, représenté par M. N. Lorenz et Mme C. Burgos, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

soutenu par :

Royaume d’Espagne, représenté par Mme S. Centeno Huerta, en qualité d’agent,

partie intervenante,

LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR,

l’avocat général, M. M. Szpunar, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, M. Oriol Junqueras i Vies demande l’annulation de l’ordonnance du vice-président du Tribunal du 3 mars 2020, Junqueras i Vies/Parlement (T‑24/20 R, non publiée, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2020:78), par laquelle celui‑ci a rejeté sa demande tendant, notamment, au sursis à l’exécution de la décision du Parlement, du 13 janvier 2020, constatant la vacance du siège du requérant à compter du 3 janvier 2020 (ci-après la « décision constatant la vacance), et du rejet de la demande de mesures urgentes visant à protéger son immunité parlementaire présentée le 20 décembre 2019 (ci-après « le rejet de la demande du 20 décembre 2019 »).

 Le cadre juridique

 Le protocole sur les privilèges et immunités de l’Union

2        Le chapitre III du protocole (no 7) sur les privilèges et immunités de l’Union, annexé aux traités UE et FUE (ci-après le « protocole sur les privilèges et immunités de l’Union »), relatif aux « [m]embres du Parlement européen », comprend notamment l’article 9 de celui-ci, qui énonce :

« Pendant la durée des sessions du Parlement européen, les membres de celui-ci bénéficient :

a)      sur leur territoire national, des immunités reconnues aux membres du parlement de leur pays,

b)      sur le territoire de tout autre État membre, de l’exemption de toute mesure de détention et de toute poursuite judiciaire.

L’immunité les couvre également lorsqu’ils se rendent au lieu de réunion du Parlement européen ou en reviennent.

L’immunité ne peut être invoquée dans le cas de flagrant délit et ne peut non plus mettre obstacle au droit du Parlement européen de lever l’immunité d’un de ses membres. »

 L’acte électoral

3        L’article 6, paragraphe 2, de l’acte portant élection des membres du Parlement européen au suffrage universel direct, annexé à la décision 76/787/CECA, CEE, Euratom du Conseil, du 20 septembre 1976 (JO 1976, L 278, p. 1), tel que modifié par la décision 2002/772/CE, Euratom du Conseil, du 25 juin et du 23 septembre 2002 (JO 2002, L 283, p. 1) (ci-après l’« acte électoral »), prévoit :

« Les membres du Parlement européen bénéficient des privilèges et immunités qui leur sont applicables en vertu du [protocole sur les privilèges et immunités de l’Union]. »

4        L’article 13 dudit acte dispose :

« 1. Un siège devient vacant quand le mandat d’un membre du Parlement européen expire en cas de sa démission ou de son décès ou de déchéance de son mandat.

[...]

3. Lorsque la législation d’un État membre établit expressément la déchéance du mandat d’un membre du Parlement européen, son mandat expire en application des dispositions de cette législation. Les autorités nationales compétentes en informent le Parlement européen.

4. Lorsqu’un siège devient vacant par démission ou décès, le président du Parlement européen en informe sans retard les autorités compétentes de l’État membre concerné. »

 Le règlement intérieur

5        Sous l’intitulé « Durée du mandat parlementaire », l’article 4 du règlement intérieur du Parlement (ci-après le « règlement intérieur ») prévoit :

« [...]

4.      Lorsque les autorités compétentes des États membres ou de l’Union ou le député concerné notifient au Président une nomination ou une élection à des fonctions incompatibles avec la qualité de député au Parlement européen, aux termes de l’article 7, paragraphe 1 ou 2, de [l’acte électoral], le Président en informe le Parlement, qui constate la vacance à compter de la date de l’incompatibilité.

Lorsque les autorités compétentes des États membres notifient au Président la fin du mandat d’un député au Parlement européen en raison soit d’une incompatibilité supplémentaire en vertu de la législation de l’État membre en question, conformément à l’article 7, paragraphe 3, de [l’acte électoral], soit de la déchéance du mandat dudit député en application de l’article 13, paragraphe 3, du même acte, le Président informe le Parlement du fait que le mandat de ce député a pris fin à la date communiquée par les autorités compétentes de l’État membre. Lorsqu’aucune date n’est communiquée, la date de la fin du mandat est celle de la notification par l’État membre.

[...]

7.      Dans le cas où l’acceptation du mandat ou sa résiliation paraissent entachées soit d’inexactitude matérielle, soit de vice du consentement, le Parlement peut déclarer non valable le mandat examiné ou refuser de constater la vacance du siège. »

6        Aux termes de l’article 5 du règlement intérieur :

« 1.      Les députés jouissent des privilèges et immunités prévus par le [protocole sur les privilèges et immunités de l’Union].

2.      Dans l’exercice de ses pouvoirs relatifs aux privilèges et aux immunités, le Parlement s’emploie à conserver son intégrité en tant qu’assemblée législative démocratique et à assurer l’indépendance des députés dans l’exercice de leurs fonctions. L’immunité parlementaire n’est pas un privilège personnel du député, mais une garantie d’indépendance du Parlement dans son ensemble et de ses députés.

[...] »

7        L’article 6, paragraphe 1, de ce règlement prévoit :

« Toute demande de levée de l’immunité est examinée conformément aux articles 7, 8 et 9 du [protocole sur les privilèges et immunités de l’Union] ainsi qu’aux principes visés à l’article 5, paragraphe 2, du présent règlement intérieur. »

8        L’article 8, paragraphe 1, du même règlement est libellé comme suit :

« Dans les cas où un député est arrêté ou privé de sa liberté de déplacement en violation apparente de ses privilèges et immunités, le Président peut prendre d’urgence, après consultation du président et du rapporteur de la commission compétente, une initiative visant à confirmer les privilèges et immunités du député concerné. Le Président communique son initiative à la commission et en informe le Parlement. »

 Les antécédents du litige

9        Le requérant était vice-président du Gobierno autonómico de Cataluña (gouvernement autonome de Catalogne, Espagne) au moment de l’adoption de la Ley 19/2017 del Parlamento de Cataluña, reguladora del referéndum de autodeterminación (loi 19/2017 du Parlement de Catalogne, portant réglementation du référendum d’autodétermination), du 6 septembre 2017 (DOGC no 7449A, du 6 septembre 2017, p. 1), et de la Ley 20/2017 del Parlamento de Cataluña, de transitoriedad jurídica y fundacional de la República (loi 20/2017 du Parlement de Catalogne, de transition juridique et constitutive de la République), du 8 septembre 2017 (DOGC no 7451A, du 8 septembre 2017, p. 1), ainsi que de la tenue, le 1er octobre 2017, du référendum d’autodétermination prévu par la première de ces deux lois, dont les dispositions avaient, dans l’intervalle, été suspendues par une décision du Tribunal Constitucional (Cour constitutionnelle, Espagne).

10      À la suite de l’adoption desdites lois et de la tenue dudit référendum, le Ministerio fiscal (ministère public, Espagne), l’Abogado del Estado (avocat de l’État, Espagne) et le Partido político VOX (parti politique VOX) ont engagé une procédure pénale contre plusieurs personnes, dont le requérant, en considérant que celles-ci avaient pris part à un processus de sécession et commis, dans ce cadre, des faits relevant de trois infractions pénales, à savoir, premièrement, celle de « rébellion » ou de « sédition », deuxièmement, celle de « désobéissance » et, troisièmement, celle de « détournement de fonds ».

11      Le requérant a été placé en détention provisoire pendant la phase d’instruction de cette procédure pénale, en application d’une décision adoptée le 2 novembre 2017 sur le fondement de l’article 503 de la Ley de Enjuiciamiento Criminal (code de procédure pénale).

12      Pendant la phase de jugement de ladite procédure, le requérant s’est présenté comme candidat aux élections au Parlement européen organisées le 26 mai 2019. À l’issue de celles-ci, il a été élu au Parlement, ainsi qu’il résulte de la proclamation officielle des résultats électoraux effectuée par la Junta Electoral Central (Commission électorale centrale, Espagne) dans une décision du 13 juin 2019, portant « Proclamation des députés élus au Parlement européen aux élections organisées le 26 mai 2019 » (BOE no 142, du 14 juin 2019, p. 62477), conformément à l’article 224, paragraphe 1, de la Ley orgánica 5/1985, de Régimen Electoral General (loi organique 5/1985, portant régime électoral général), du 19 juin 1985 (BOE no 147, du 20 juin 1985, p. 19110) (ci-après la « loi électorale »). Dans cette décision, la Commission électorale centrale a par ailleurs procédé, comme le prévoit la même disposition, à l’attribution aux personnes élues, en ce compris le requérant, des sièges dont dispose le Royaume d’Espagne au sein du Parlement.

13      Par ordonnance du 14 juin 2019, le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne) a rejeté une demande du requérant tendant à ce que lui soit accordée une autorisation extraordinaire de sortie de prison, sous surveillance policière, afin de lui permettre de se présenter devant la Commission électorale centrale et d’y prononcer le serment ou la promesse de respecter la Constitution espagnole requis par l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale.

14      Le 20 juin 2019, la Commission électorale centrale a adopté une décision dans laquelle elle a constaté que le requérant n’avait pas prononcé le serment ou la promesse en question et a, conformément à l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale, déclaré la vacance du siège attribué au requérant au Parlement ainsi que la suspension de toutes les prérogatives qui pourraient lui revenir du fait de ses fonctions.

15      Le requérant a introduit, devant le Tribunal Supremo (Cour suprême), un recours contre l’ordonnance mentionnée au point 13 de la présente ordonnance, dans le cadre duquel il se prévalait des immunités prévues à l’article 9 du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union.

16      Le 1er juillet 2019, le Tribunal Supremo (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer sur le recours visé au point précédent et d’adresser à la Cour des questions préjudicielles (affaire C‑502/19, Junqueras Vies).

17      Le 2 juillet 2019, le président du Parlement a ouvert la première session de la législature issue des élections au Parlement organisées le 26 mai 2019. Le requérant n’y a pas assisté.

18      Le 4 juillet 2019, Mme Riba i Giner, députée européenne, a demandé, au nom du requérant, au président du Parlement, sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur, de prendre des mesures urgentes afin de garantir l’immunité parlementaire du requérant.

19      Le 22 août 2019, le président du Parlement a rejeté cette demande.

20      Par arrêt du 14 octobre 2019, le Tribunal Supremo (Cour suprême) a, dans la procédure pénale engagée, entre autres personnes, contre le requérant, prononcé à l’égard de ce dernier, d’une part, une peine de treize années de privation de liberté et, d’autre part, une peine de treize années d’incapacité absolue entraînant la perte définitive de toutes ses charges et fonctions publiques, y compris électives, ainsi que l’impossibilité d’en obtenir ou d’en exercer de nouvelles.

21      Par arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), la Cour a répondu aux questions visées au point 16 de la présente ordonnance. Elle a ainsi dit pour droit qu’une personne qui avait été officiellement proclamée élue au Parlement alors qu’elle faisait l’objet d’une mesure de placement en détention provisoire dans le cadre d’une procédure pour infractions pénales graves, mais qui n’avait pas été autorisée à se conformer à certaines exigences prévues par le droit interne à la suite d’une telle proclamation ainsi qu’à se rendre au Parlement en vue de prendre part à la première session de celui-ci, devait être regardée comme bénéficiant d’une immunité en vertu de l’article 9, deuxième alinéa, du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union. La Cour a précisé que cette immunité impliquait de lever la mesure de placement en détention provisoire imposée à la personne concernée, afin de lui permettre de se rendre au Parlement et d’y accomplir les formalités requises. La Cour a enfin indiqué que, si la juridiction nationale compétente estimait qu’il y avait lieu de maintenir cette mesure après l’acquisition, par ladite personne, de la qualité de membre du Parlement, elle devrait demander dans les plus brefs délais la levée de ladite immunité au Parlement, sur le fondement de l’article 9, troisième alinéa, du même protocole.

22      Le 20 décembre 2019, Mme Riba i Gener, députée européenne, a demandé au président du Parlement de prendre, sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur, des mesures urgentes pour confirmer l’immunité du requérant (ci-après la « demande du 20 décembre 2019 »).

23      Par décision du 3 janvier 2020, la Commission électorale centrale a déclaré l’inéligibilité du requérant, en raison de sa condamnation à une peine privative de liberté. Le requérant a introduit un recours contre cette décision devant le Tribunal Supremo (Cour suprême), en demandant le sursis à l’exécution de celle-ci.

24      Par ordonnance du 9 janvier 2020, le Tribunal Supremo (Cour suprême) s’est prononcé sur les effets de l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), sur la procédure pénale concernant le requérant. Il a estimé qu’il n’y avait pas lieu d’adresser au Parlement une demande de levée de l’immunité parlementaire du requérant, en se fondant notamment sur le fait que, lorsque le requérant avait été proclamé élu, la procédure pénale le concernant était arrivée à son terme et le délibéré avait débuté. Ainsi, dès lors que le requérant avait obtenu la qualité de député européen alors que la procédure pénale se trouvait dans la phase de jugement, il ne pouvait invoquer une immunité pour faire obstacle à la poursuite de cette procédure. Dans le dispositif de ladite ordonnance, le Tribunal Supremo (Cour suprême) a considéré, en particulier, qu’il n’y avait pas lieu d’autoriser le déplacement du requérant au siège du Parlement, ni d’autoriser sa libération, ni de déclarer la nullité de l’arrêt qu’il a prononcé le 14 octobre 2019, ni d’adresser de demande de levée d’immunité parlementaire au Parlement. Il a également décidé de communiquer cette ordonnance à la Commission électorale centrale et au Parlement. Le même jour, cette juridiction a décidé d’examiner la demande de sursis à l’exécution de la décision de la Commission électorale centrale du 3 janvier 2020 selon la procédure ordinaire et a rejeté les demandes de mesures d’extrême urgence présentées dans ce cadre par le requérant.

25      Les 10 et 13 janvier 2020, Mme Riba i Gener a complété, au nom du requérant, la demande du 20 décembre 2019, d’une part, en sollicitant le président du Parlement, notamment, pour qu’il refuse de déclarer le siège du requérant vacant et, d’autre part, en fournissant des documents supplémentaires.

26      Lors de la session plénière du 13 janvier 2020, le Parlement a pris acte, à la suite de l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), de l’élection au Parlement du requérant avec effet au 2 juillet 2019. Il a également constaté, à la suite de la décision de la Commission électorale centrale du 3 janvier 2020 et de l’ordonnance du Tribunal Supremo (Cour suprême) du 9 janvier 2020, la vacance du siège du requérant à compter du 3 janvier 2020.

 La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

27      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 janvier 2020, le requérant a demandé l’annulation de la décision constatant la vacance et du rejet de la demande du 20 décembre 2019.

28      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, le requérant a introduit une demande en référé, sur le fondement des articles 278 et 279 TFUE, dans laquelle il a conclu, en substance, à ce que le vice‑président du Tribunal, sur le fondement de l’article 157, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal ou, à titre subsidiaire, du paragraphe 1 dudit article, jusqu’à ce qu’il soit statué sur le recours dans l’affaire principale :

–        sursoie à l’exécution de la décision constatant la vacance ;

–        sursoie à l’exécution du rejet de la demande du 20 décembre 2019 ;

–        enjoigne au Parlement de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger et rendre effectifs ses privilèges et immunités ;

–        enjoigne au Parlement de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger ses droits fondamentaux à exercer pleinement sa qualité de membre du Parlement, et

–        enjoigne au Royaume d’Espagne de le libérer immédiatement afin qu’il puisse exercer pleinement ses fonctions de membre du Parlement.

29      Le 3 mars 2020, le vice-président du Tribunal a adopté l’ordonnance attaquée, par laquelle il a rejeté la demande en référé présentée par le requérant.

30      À ces fins, après avoir déclaré, au point 38 de cette ordonnance, l’irrecevabilité des deuxième à cinquième chefs de conclusions, le vice‑président du Tribunal a examiné si, au regard des quatre moyens soulevés par le requérant afin d’établir la condition relative au fumus boni juiris, cette condition était satisfaite.

31      S’agissant du premier moyen, tiré de la violation et de la non‑application de l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), ainsi que de la violation du principe de coopération loyale, de l’article 9, paragraphe 2, du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union et de l’article 6 du règlement intérieur, le vice‑président du Tribunal a estimé, au point 54 de l’ordonnance attaquée, que la déchéance du mandat d’un député, découlant de l’application de la législation nationale, impliquait automatiquement, conformément à l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral, l’expiration du mandat du député concerné, en application des dispositions de cette législation, ainsi que, conformément à l’article 13, paragraphe 1, dudit acte, la vacance du siège de ce député. Au point 55 de l’ordonnance attaquée, le vice‑président du Tribunal a ajouté que le Parlement était simplement informé, d’une part, de l’expiration du mandat par les autorités nationales et, d’autre part, de la date de fin de celui-ci par son président, en application, respectivement, de l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral et de l’article 4, paragraphe 4, du règlement intérieur.

32      Ainsi, en se fondant sur le point 91 de l’arrêt du Tribunal du 10 avril 2003, Le Pen/Parlement (T‑353/00, EU:T:2003:112), le vice-président du Tribunal a, au point 56 de l’ordonnance attaquée, considéré que le Parlement ne semblait bénéficier d’aucune marge d’appréciation concernant les conséquences à tirer de la déchéance du mandat d’un député, découlant de l’application de la législation nationale, en particulier s’agissant de la vacance du siège de ce député qu’elle impliquait. À cet égard, le vice-président du Tribunal a estimé qu’aucune disposition ne permettait au Parlement de refuser, ou d’opérer un contrôle, de la vacance d’un siège, lorsque celle‑ci découlait de l’expiration du mandat d’un député en raison de la déchéance de celui‑ci, dont les autorités nationales compétentes l’avaient informé. Dans ce contexte, le vice-président du Tribunal a souligné, en particulier, que rien n’apparaissait imposer au Parlement de vérifier le bien-fondé de la décision nationale ayant conduit à la déchéance ou le respect de la procédure nationale prévue à cet égard, de tels pouvoirs appartenant exclusivement aux juridictions nationales compétentes.

33      Dans ces conditions, le vice-président du Tribunal a, au point 57 de l’ordonnance attaquée, jugé que, a priori, le Parlement n’apparaissait pas compétent pour remettre en cause la régularité de la vacance du siège découlant de la déchéance du mandat, cette institution étant simplement informée de cette situation qui résulte exclusivement d’une décision des autorités nationales compétentes. Par voie de conséquence, il a, aux points 59 et 60 de cette ordonnance, considéré, à première vue, d’une part, que le président du Parlement devait, en vertu de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, du règlement intérieur, informer le Parlement du fait que le mandat du requérant avait pris fin au 3 janvier 2020 et, d’autre part, qu’il ne lui appartenait pas de contrôler la régularité de la procédure nationale ayant conduit à la déchéance du mandat du requérant, au regard du droit de l’Union, et en particulier de l’article 9 du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union, de l’article 6 de l’acte électoral ainsi que de l’article 5 du règlement intérieur.

34      Le vice-président du Tribunal a, par ailleurs, au point 61 de l’ordonnance attaquée, rejeté l’argumentation du requérant tirée de la violation de l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur, au motif que cette disposition était inapplicable en l’espèce. Il a également écarté, au point 62 de cette ordonnance, l’allégation du requérant selon laquelle le Parlement pouvait constater le non-respect de la procédure et du droit de l’Union, du principe de coopération loyale, des droits du requérant et de ses propres compétences, sans entrer dans l’examen du droit national.

35      Ainsi, le vice-président du Tribunal a estimé, au point 65 de l’ordonnance attaquée, que le premier moyen était, à première vue, dépourvu de fondement sérieux.

36      En ce qui concerne le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 41, paragraphes 1 et 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), le vice-président du Tribunal a, au point 67 de l’ordonnance attaquée, jugé que, faute pour le Parlement de disposer d’une marge d’appréciation, ce dernier devant se contenter de prendre acte de la situation découlant exclusivement de l’application de la législation espagnole, telle que communiquée par les autorités du Royaume d’Espagne, il n’y avait pas lieu, pour cette institution, de mettre en œuvre une procédure dans le cadre de laquelle le requérant aurait été entendu, aurait eu accès au dossier et aurait pu faire valoir des arguments. Il a alors considéré, au point 68 de cette ordonnance, que le deuxième moyen paraissait être, à première vue, dépourvu de fondement sérieux.

37      Quant au troisième moyen, tiré de la violation de l’article 39, paragraphes 1 et 2, de la Charte, de l’article 9 du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union ainsi que des articles 6 et 8 du règlement intérieur, le vice‑président du Tribunal a constaté, au point 70 de l’ordonnance attaquée, que l’argumentation du requérant était vague, générale et imprécise et ne suffisait pas à établir un fumus boni juris. Au point 71 de cette ordonnance, il a ajouté que, en tout état de cause, cette argumentation, d’une part, était irrecevable en tant qu’elle se rapportait à la demande du 20 décembre 2019 et, d’autre part, n’était pas de nature à établir un fumus boni juris pour les motifs exposés dans le cadre de l’examen du premier moyen, en tant qu’elle se rapportait à la décision constatant la vacance. Par conséquent, le vice-président du Tribunal a, au point 72 de l’ordonnance attaquée, jugé que le troisième moyen était irrecevable et, en tout état de cause, à première vue, dépourvu de fondement sérieux.

38      Enfin, en ce qui concerne le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 39, paragraphe 1, de la Charte et de l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur, le vice-président du Tribunal a, aux points 74 et 75 de l’ordonnance attaquée, constaté que cette dernière disposition n’était pas applicable dans les circonstances de l’espèce et que, en ce qui concerne l’article 39, paragraphe 1, de la Charte, le requérant n’avait avancé aucune argumentation s’y rapportant, si bien que le quatrième moyen était dépourvu de fondement.

39      Dans ces conditions, le vice-président du Tribunal a rejeté la demande en référé présentée par le requérant, au motif que celui-ci n’était pas parvenu à démontrer l’existence d’un fumus boni juris, considérant par ailleurs qu’il n’était pas nécessaire d’examiner la condition relative à l’urgence ni de procéder à la mise en balance des intérêts en présence.

 La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

40      Par décision du président de la Cour du 29 juin 2020, le Royaume d’Espagne a été admis à intervenir au soutien des conclusions du Parlement.

41      Par son pourvoi, le requérant demande à la Cour :

–        d’annuler l’ordonnance attaquée ;

–        d’adopter les mesures provisoires sollicitées jusqu’à ce que le Tribunal ait statué sur le recours formé dans l’affaire principale, et

–        de condamner le Parlement tant aux dépens afférents au pourvoi qu’à ceux afférents à la procédure de référé dans l’affaire T‑24/20 R.

42      Le Parlement, ainsi que le Royaume d’Espagne, demandent à la Cour :

–        de rejeter le pourvoi dans son intégralité, et

–        de condamner le requérant aux dépens afférents au présent pourvoi.

 Sur le pourvoi

43      À l’appui de son pourvoi, le requérant soulève sept moyens. Il convient d’examiner, en premier lieu, les quatrième à septième moyens.

 Sur le quatrième moyen

 Argumentation

44      Par le quatrième moyen du pourvoi, le requérant soutient que le vice‑président du Tribunal, en estimant que le moyen tiré de la violation par le Parlement de l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), du principe de coopération loyale prévu à l’article 4, paragraphe 3, TUE, de l’article 9, paragraphe 2, du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union ainsi que de l’article 6 du règlement intérieur était, à première vue, dépourvu de fondement sérieux, a interprété de manière erronée la condition relative au fumus boni juris ainsi que les effets de cet arrêt et les dispositions du droit de l’Union susmentionnées.

45      En particulier, le requérant conteste le motif figurant au point 62 de l’ordonnance attaquée, selon lequel, en l’espèce, le Parlement ne pouvait pas constater le non‑respect du droit de l’Union sans procéder à une appréciation de la procédure nationale de déchéance du mandat.

46      Le requérant, estime que ce motif est dépourvu de motivation et que le vice-président du Tribunal s’est contenté de rappeler qu’il n’y avait pas lieu d’examiner le droit national.

47      Ce motif serait également erroné. En effet, le Parlement n’ayant pas été saisi d’une demande de levée de l’immunité du requérant, la violation de l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), tout comme celles du principe de coopération loyale et des propres compétences du Parlement, ainsi que des droits à l’immunité dont bénéficiait M. Junqueras i Vies, auraient pu être constatées directement par cette institution, sans réviser la procédure nationale de déchéance ou examiner la régularité, au regard du droit national, de la décision de déchéance du mandat adoptée par la Commission électorale centrale.

48      Le requérant fait valoir, à titre subsidiaire, que, même si le constat de telles violations exigeait de réviser la décision nationale déclarant la déchéance du mandat, le Parlement serait néanmoins fondé, en raison de l’entrée en vigueur de la Charte en tant que droit primaire de l’Union, à procéder à une telle révision. Il invoque notamment l’article 39 de celle‑ci, dont il estime qu’il empêcherait cette institution « d’adopter une décision contraire au droit de l’Union en acceptant sans aucune critique des décisions nationales relatives au mandat des députés européens ».

49      Le requérant conteste également l’appréciation du vice-président du Tribunal, figurant au point 61 de l’ordonnance attaquée, relatif à l’inapplicabilité de l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur en l’espèce.

50      Selon le requérant, cette appréciation est dénuée de toute motivation, notamment en ce que les raisons pour lesquelles l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur ne concernerait que la situation visée à l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, de ce règlement et non pas celle visée au second alinéa de cette disposition n’apparaissent pas.

51      Par ailleurs, ladite appréciation serait erronée en ce qu’il ressortirait de l’interprétation littérale, systématique et téléologique de l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur que cette disposition est applicable aux deux alinéas de l’article 4, paragraphe 4, dudit règlement. Ainsi, selon le requérant, le Parlement pouvait refuser de déclarer la vacance du siège du requérant, conformément à l’article 4, paragraphe 7, de ce règlement.

52      Le Parlement et le Royaume d’Espagne contestent cette argumentation.

 Appréciation

53      Il convient de rappeler que, dans le cadre du premier moyen soulevé par le requérant devant le Tribunal afin d’établir l’existence d’un fumus boni iuris, le requérant a allégué que l’ordonnance du Tribunal Supremo (Cour suprême) du 9 janvier 2020 et la décision de la Commission électorale centrale du 3 janvier 2020 violaient l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), le principe de coopération loyale, consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE, le droit du requérant à l’immunité reconnue à l’article 9, paragraphe 2, du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union ainsi que les compétences du Parlement prévues à l’article 6 du règlement intérieur.

54      Ainsi, devant le Tribunal, le requérant a en substance fait valoir que le Parlement, en ayant pris acte de cette ordonnance et de cette décision alors qu’il connaissait les effets de l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), qu’il n’avait pas été saisi d’une demande de levée de l’immunité du requérant et qu’il pouvait, dès lors, constater les violations par le Tribunal Supremo (Cour suprême) et par la Commission électorale centrale du droit de l’Union énoncées au point précédent, a, à première vue, violé le caractère contraignant et obligatoire de cet arrêt ainsi que les dispositions du droit de l’Union susmentionnées.

55      Il convient de relever que le Parlement a, le 13 janvier 2020, sur la base de l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral, pris acte de l’ordonnance du Tribunal Supremo (Cour suprême) du 9 janvier 2020 et de la décision de la Commission électorale centrale du 3 janvier 2020 déclarant, en application de la législation espagnole, la déchéance du mandat du requérant.

56      Le premier moyen invoqué par le requérant devant le Tribunal afin d’établir l’existence d’un fumus boni juris soulève ainsi la question de l’étendue des pouvoirs dont dispose le Parlement, en vertu de l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral, en ce qui concerne la vacance d’un siège qui découle de la déchéance du mandat d’un de ses membres résultant de l’application du droit national, et, notamment, celle de savoir si cette disposition du droit de l’Union doit être interprétée en ce sens qu’elle attribue au Parlement la compétence, d’une part, de vérifier si la décision des autorités nationales déclarant une telle déchéance viole le droit de l’Union et, d’autre part, lorsque cette institution constate l’existence d’une telle violation, de refuser de prendre acte d’une telle décision.

57      En premier lieu, il ressort du libellé de l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral que, lorsque la vacance d’un siège découle de la déchéance du mandat d’un membre du Parlement résultant de l’application du droit national, cette institution est uniquement informée de l’expiration dudit mandat par les autorités nationales. Il en va de même de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, du règlement intérieur, ainsi que cela ressort du libellé de cette disposition.

58      En deuxième lieu, conformément à l’article 5, paragraphe 1, TUE et à l’article 13, paragraphe 2, TUE, le Parlement agit dans les limites des compétences qui lui sont conférées par les traités.

59      À cet égard, il découle de l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral que, lorsqu’un État membre règlemente expressément la déchéance du mandat des membres du Parlement, il lui appartient non seulement de déterminer les motifs entraînant une telle déchéance mais également de procéder, selon la procédure nationale, à la constatation de ladite déchéance.

60      Par ailleurs, veiller au respect, par les États membres, des dispositions du traité incombe, notamment, à la Commission, qui est habilitée, en vertu de l’article 258 TFUE, à introduire devant la Cour une procédure en manquement si elle estime qu’un État membre a manqué à ses obligations. En outre, le contrôle du respect de ces dispositions est assuré par le mécanisme de renvoi préjudiciel prévu à l’article 267 TFUE (voir arrêt du 30 avril 2009, Italie et Donnici/Parlement, C‑393/07 et C‑9/08, EU:C:2009:275, point 65).

61      Ce cadre réglementaire ne laisse pas apparaitre que le Parlement dispose d’une compétence générale pour apprécier la conformité, au regard du droit de l’Union, de dispositions nationales établissant la déchéance du mandat d’un membre du Parlement et leur application au cas d’espèce.

62      Il en résulte qu’une interprétation de l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral en ce sens qu’il instituerait au profit du Parlement une compétence générale de contrôle de la décision des autorités d’un État membre déclarant, en application du droit national, la déchéance du mandat d’un membre du Parlement serait, à première vue, non seulement contraire au libellé de cette disposition, mais également incompatible avec le principe consacré à l’article 5, paragraphe 1, TUE et à l’article 13, paragraphe 2, TUE, selon lesquels les compétences de l’Union et de ses institutions sont des compétences d’attribution.

63      En troisième lieu, il importe de rappeler que la Cour a interprété l’article 12, paragraphe 2, de l’acte électoral dans sa version initiale, devenu l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral, en ce sens que cette disposition excluait toute marge d’appréciation du Parlement même en cas de déchéance du mandat d’un de ses membres résultant de l’application de dispositions nationales ayant une incidence sur la composition de cette institution (voir arrêt du 30 avril 2009, Italie et Donnici/Parlement, C‑393/07 et C‑9/08, EU:C:2009:275, point 56).

64      En particulier, la Cour a précisé que, dans l’hypothèse particulière de vacance de siège résultant de l’application des dispositions nationales en vigueur dans un État membre, le rôle du Parlement ne consistait pas à constater la vacance du siège, mais à prendre simplement acte de la vacance de siège déjà constatée par les autorités nationales, alors que, dans les autres hypothèses relatives, notamment, à la démission ou au décès de l’un de ses membres, cette institution avait un rôle plus actif puisqu’elle constatait elle-même la vacance du siège et informait l’État membre concerné de cette vacance (arrêt du 7 juillet 2005, Le Pen/Parlement, C‑208/03 P, EU:C:2005:429, point 50).

65      Or, la Cour a ajouté que cette interprétation était confortée par le libellé d’autres dispositions de l’acte électoral dans sa version initiale, portant sur la vérification des pouvoirs des membres du Parlement, et que ces dispositions, qui avaient été reprises dans l’acte électoral, dans sa version actuellement en vigueur, corroboraient, « en l’état actuel du droit de l’Union », l’absence totale de marge d’appréciation du Parlement s’agissant d’une vacance de siège résultant de l’application de dispositions nationales (voir, en ce sens, arrêt du 7 juillet 2005, Le Pen/Parlement, C‑208/03 P, EU:C:2005:429, point 51).

66      Eu égard aux considérations qui précèdent, il apparaît, à première vue, que, en cas de déchéance du mandat d’un membre du Parlement résultant de l’application du droit national, cette institution ne peut, conformément à l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral, que prendre acte de la constatation, par les autorités nationales, de l’expiration du mandat du membre concerné, à savoir d’une situation juridique préexistante et résultant exclusivement d’une décision de ces autorités. Il n’appartient notamment pas au Parlement de vérifier le respect de la procédure prévue par le droit national à cet égard, un tel pouvoir appartenant exclusivement aux juridictions nationales compétentes, ni de vérifier la conformité de cette procédure au regard du droit de l’Union, un tel pouvoir appartenant également aux juridictions nationales compétentes, le cas échéant après un renvoi préjudiciel à la Cour au sens de l’article 267 TFUE, ou à cette dernière, dans le cadre d’un recours en manquement.

67      Dans ces conditions, c’est à bon droit que le vice‑président du Tribunal a, au point 57 de l’ordonnance attaquée, estimé que, a priori, le Parlement n’apparaissait pas compétent pour remettre en cause la régularité de la vacance du siège découlant de la déchéance du mandat, cette institution étant simplement informée de cette situation qui résulte exclusivement d’une décision des autorités nationales compétentes. C’est également à bon droit que, eu égard aux faits de l’espèce énoncés au point 58 de cette ordonnance, le vice-président du Tribunal a pu, aux points 59 et 60 de ladite ordonnance, considérer, à première vue, que le président du Parlement devait, en vertu de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, du règlement intérieur, informer le Parlement du fait que le mandat du requérant avait pris fin au 3 janvier 2020 et qu’il n’appartenait pas à cette institution de contrôler la conformité, au regard du droit de l’Union, de la procédure nationale ayant conduit à la déchéance de ce mandat.

68      Quant à l’argument du requérant dirigé contre le point 61 de l’ordonnance attaquée, selon lequel le vice-président du Tribunal a manqué à son obligation de motivation lorsqu’il a, à ce point, jugé que l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur n’était pas applicable dans les circonstances de l’espèce, il est dépourvu de fondement.

69      En effet, il ressort clairement dudit point 61, que le vice-président du Tribunal a rappelé le libellé de cette disposition, aux termes de laquelle le Parlement peut refuser de constater la vacance du siège lorsque la résiliation du mandat paraît entachée d’inexactitude matérielle ou de vice du consentement. Il a exposé que l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement intérieur vise les situations dans lesquelles le Parlement « constate » la vacance, alors que l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de ce règlement ne concerne que la situation dans laquelle le Parlement est uniquement « informé » de la vacance. Le vice‑président du Tribunal en a déduit que l’article 4, paragraphe 7, dudit règlement, qui se réfère explicitement à la faculté du Parlement de refuser de « constater » la vacance, n’était applicable que dans les situations relevant du premier alinéa de cet 4, paragraphe 4.

70      Le requérant soutient également que cette interprétation de l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur est erronée.

71      À cet égard, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort de son libellé même, cette disposition n’envisage la possibilité pour le Parlement de refuser de constater la vacance du siège d’un de ses membres que dans le cas où la résiliation du mandat paraît entachée soit d’inexactitude matérielle soit de vice du consentement. Le pouvoir de vérification dont dispose le Parlement en vertu de cette disposition est ainsi limité au contrôle de l’exactitude matérielle de la vacance du siège et, lorsque le siège devient vacant par démission, du consentement libre du député concerné.

72      Or, une irrégularité résultant du non‑respect du droit national ou de la violation du droit de l’Union ne constitue pas un vice du consentement et ne peut être regardée comme une inexactitude matérielle. Ainsi, l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur ne confère pas, à première vue, au Parlement le pouvoir de contrôler une telle irrégularité.

73      Par conséquent, même à supposer que, comme le soutient le requérant, l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur était applicable dans les situations de déchéance du mandat d’un membre du Parlement résultant de l’application du droit national, cette disposition ne saurait, à première vue, conférer au Parlement le pouvoir de vérifier la conformité de la décision des autorités nationales déclarant la déchéance du mandat du membre concerné au regard de la procédure prévue par le droit national ou la conformité de cette procédure au droit de l’Union, ni de refuser de prendre acte de ladite décision et de la vacance du siège qui en résulte.

74      En outre, si, en dépit de son libellé, l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur devait être interprété en ce sens qu’il confère au Parlement un pouvoir tel que celui évoqué au point précédent, à première vue, cette disposition serait, ainsi qu’il découle des points 57 à 66 de la présente ordonnance, contraire à l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral.

75      Or, une disposition du règlement intérieur ne peut, conformément au principe de hiérarchie des normes, déroger aux dispositions de l’acte électoral et conférer au Parlement des compétences plus étendues que celles qu’il tient de celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2009, Italie et Donnici/Parlement, C‑393/07 et C‑9/08, EU:C:2009:275, points 47 ainsi que 48).

76      Dans ces conditions, l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur ne saurait, à première vue, être invoqué pour soutenir que le Parlement disposait d’un pouvoir tel que celui évoqué au point 73 de la présente ordonnance.

77      Dès lors, même à supposer que le vice-président du Tribunal a commis une erreur de droit lorsqu’il a estimé que l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur n’était pas applicable dans les circonstances de l’espèce, cette erreur ne saurait être de nature à remettre en cause les appréciations figurant aux points 59 et 60 de l’ordonnance attaquée.

78      Partant, l’argument du requérant concernant le point 61 de l’ordonnance attaquée doit être rejeté.

79      Le requérant reproche au vice-président du Tribunal d’avoir commis une erreur de droit lorsqu’il a, au point 62 de l’ordonnance attaquée, rejeté son allégation selon laquelle le Parlement pouvait constater le non‑respect du droit de l’Union sans procéder à une appréciation de la procédure nationale de déchéance du mandat. Toutefois, il y a lieu d’écarter cet argument pour les motifs exposés aux points 57 à 66 de la présente ordonnance.

80      Par ailleurs, dès lors qu’il ressort du point 62 de l’ordonnance attaquée que, pour rejeter cette allégation, le vice‑président du Tribunal s’est fondé sur les appréciations figurant aux points 56 et 60 de l’ordonnance attaquée, c’est en vain que le requérant fait valoir que le rejet de ladite allégation n’est pas motivé.

81      Enfin, l’article 39 de la Charte, invoqué par le requérant, qui consacre le droit de vote et d’éligibilité aux élections au Parlement européen, ne saurait fonder le pouvoir du Parlement de vérifier la régularité de la décision nationale déclarant la déchéance de son mandat.

82      En effet, il suffit de rappeler que, selon l’article 6, paragraphe 1, TUE, les dispositions de la Charte n’étendent en aucune manière les compétences de l’Union telles que définies dans les traités. De même, en vertu de l’article 51, paragraphe 2, de la Charte, cette dernière n’étend pas le champ d’application du droit de l’Union au-delà des compétences de l’Union, ni ne crée aucune compétence ni aucune tâche nouvelle pour l’Union et ne modifie pas les compétences et les tâches définies dans les traités (arrêt du 11 novembre 2014, Dano, C‑333/13, EU:C:2014:2358, point 88 et jurisprudence citée).

83       Il s’ensuit que l’ensemble de l’argumentation du requérant dirigée contre le point 62 de l’ordonnance attaquée doit être rejetée.

84      Il résulte de tout ce qui précède que le vice-président du Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’il a, au point 65 de l’ordonnance attaquée, jugé que le premier moyen soulevé par le requérant devant le Tribunal afin d’établir l’existence d’un fumus boni juris était, à première vue, dépourvu de fondement sérieux.

85      Par conséquent, le quatrième moyen du pourvoi doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le cinquième moyen

 Argumentation

86      Par le cinquième moyen du pourvoi, le requérant soutient que le vice‑président du Tribunal, en estimant que le moyen tiré de la violation par le Parlement de l’article 41, paragraphes 1 et 2, de la Charte était dépourvu de fondement sérieux, a interprété de manière erronée la condition relative au fumus boni juris.

87      En particulier, le requérant, qui réitère que l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur est applicable dans les circonstances de l’espèce, fait valoir que l’article 13 de l’acte électoral et l’article 4 du règlement intérieur doivent être interprétés conformément aux droits fondamentaux prévus à l’article 41, paragraphes 1 et 2, de la Charte, en ce sens qu’il y aurait lieu de prévoir une procédure contradictoire dans le cadre de laquelle le député concerné pourrait avoir accès à son dossier, être entendu et faire valoir des causes empêchant de déclarer la vacance du siège, afin que son affaire soit traitée de manière impartiale et équitable.

88      Le Parlement et le Royaume d’Espagne contestent cette argumentation.

 Appréciation

89      L’article 41 de la Charte, intitulé « Droit à une bonne administration », prévoit, à son paragraphe 1, que « [t]oute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l’Union ».

90      L’article 41, paragraphe 2, de la Charte dispose que le droit à une bonne administration comporte notamment, tout d’abord, « le droit de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son [égard], » ensuite, « le droit d’accès de toute personne au dossier qui la concerne, dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité et du secret professionnel et des affaires », ainsi que, enfin, « l’obligation pour l’administration de motiver ses décisions ».

91      En particulier, le droit d’être entendu garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative et avant l’adoption de toute décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts (arrêt du 4 avril 2019, OZ/BEI, C‑558/17 P, EU:C:2019:289, point 53).

92      Or, ainsi que cela ressort de l’examen du quatrième moyen du pourvoi, lorsqu’un siège devient vacant en raison de la déchéance du mandat d’un membre du Parlement résultant de l’application du droit national, à première vue, le Parlement ne dispose pas, conformément à l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral, de marge d’appréciation, cette institution ne pouvant que prendre acte de la constatation, par les autorités nationales, de la déchéance de ce mandat. En particulier, il n’appartient pas au Parlement de vérifier le respect du droit national par les autorités nationales ayant adopté la décision déclarant la déchéance du mandat du membre concerné, ou la conformité au regard du droit de l’Union de la procédure nationale ayant conduit à cette décision. Enfin, un tel pouvoir ne peut pas non plus, à première vue, être fondé sur l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur.

93      Ainsi, eu égard à l’absence totale de marge d’appréciation du Parlement s’agissant de la vacance d’un siège résultant de l’application de dispositions nationales établissant la déchéance du mandat d’un membre du Parlement, toute argumentation du membre concerné aux fins de contester la vacance de ce siège, tirée de la violation du droit de l’Union par les autorités nationales ayant déclaré une telle déchéance, est dépourvue de pertinence, le Parlement étant tenu, en tout état de cause, de prendre acte de cette décision.

94      Dès lors, un membre du Parlement qui, conformément à l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral, a été déchu de son mandat en application du droit national, tel que le requérant, ne peut se prévaloir auprès du Parlement des garanties découlant de l’article 41, paragraphes 1 et 2, de la Charte.

95      Partant, c’est à bon droit que le vice-président du Tribunal a, au point 67 de l’ordonnance attaquée, constaté que, faute de marge d’appréciation pour le Parlement, qui se contente de prendre acte de la situation de vacance, laquelle découle exclusivement de l’application de la législation espagnole, telle que communiquée par les autorités du Royaume d’Espagne, il n’y avait pas lieu, pour cette institution, de mettre en œuvre une procédure dans le cadre de laquelle le requérant aurait été entendu, aurait eu accès au dossier et aurait pu faire valoir des arguments. C’est également à juste titre qu’il en a déduit qu’il appartenait au requérant de faire valoir, devant les autorités espagnoles, les droits qu’il invoquait en l’espèce.

96      Dans ces conditions, le vice-président du Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’il a, au point 68 de l’ordonnance attaquée, considéré que le deuxième moyen soulevé par le requérant afin d’établir l’existence d’un fumus boni juris était, à première vue, dépourvu de fondement sérieux.

97      Par conséquent le cinquième moyen du pourvoi doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le sixième moyen

 Argumentation

98      Par le sixième moyen du pourvoi, le requérant soutient que le vice‑président du Tribunal, en estimant que le moyen tiré de la violation par le Parlement de l’article 39, paragraphes 1 et 2, de la Charte, de l’article 9 du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union ainsi que des articles 6 et 8 du règlement intérieur était irrecevable, a commis une erreur de droit. Il fait également valoir que le vice‑président du Tribunal, en considérant que, en tout état de cause, ledit moyen était, à première vue, dépourvu de fondement sérieux, a interprété de manière erronée la condition relative au fumus boni juris.

99      Le requérant conteste, en particulier, l’appréciation du vice-président du Tribunal figurant au point 70 de l’ordonnance attaquée, selon laquelle les arguments qu’il a soulevés à l’appui de cette allégation sont vagues, générales et imprécises. Il conteste également l’appréciation du vice‑président du Tribunal selon laquelle ces arguments sont en tout état de cause irrecevables, en tant qu’ils se rapportent à la demande du 20 décembre 2019.

100    Le Parlement et le Royaume d’Espagne contestent cette argumentation.

 Appréciation

101    À titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément à l’article 156, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, les demandes en référé doivent spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent. Ainsi, selon une jurisprudence constante de la Cour, le sursis à exécution et les autres mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents, en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts de la partie qui les sollicite, qu’ils soient édictés et produisent leurs effets dès avant la décision sur le recours au fond. Ces conditions sont cumulatives, de telle sorte que les demandes de mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut. Le juge des référés procède également, le cas échéant, à la mise en balance des intérêts en présence [ordonnance de la vice-présidente de la Cour du 20 décembre 2019, Puigdemont i Casamajó et Comín i Oliveres/Parlement, C‑646/19 P(R), non publiée, EU:C:2019:1149, point 51 ainsi que jurisprudence citée].

102    La Cour a jugé qu’une demande en référé doit en outre permettre, à elle seule, à la partie défenderesse de préparer ses observations et au juge des référés de statuer sur cette demande, le cas échéant, sans autres informations à l’appui, les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celle-ci se fonde devant ressortir du texte même de ladite demande (ordonnance du vice-président de la Cour du 6 septembre 2016, Inclusion Alliance for Europe/Commission, C‑378/16 P‑R, non publiée, EU:C:2016:668, point 17 et jurisprudence citée).

103    Il convient de rappeler que, pour établir que la condition relative au fumus boni juris est remplie, la partie qui sollicite les mesures provisoires doit réussir à faire apparaître que les moyens invoqués pour contester la légalité de la décision litigieuse, dans le cadre du recours en annulation, sont de nature à justifier, à première vue, l’octroi des mesures sollicitées (voir, en ce sens, ordonnance du vice-président de la Cour du 2 mars 2016, Evonik Degussa/Commission, C‑162/15 P‑R, EU:C:2016:142, point 24 et jurisprudence citée).

104    La Cour a précisé que cette condition est remplie lorsqu’au moins un des moyens invoqués par la partie qui sollicite les mesures provisoires à l’appui du recours au fond apparaît, à première vue, non dépourvu de fondement sérieux (ordonnance du 8 avril 2020, Commission/Pologne, C‑791/19 R, EU:C:2020:277, point 52 et jurisprudence citée).

105    Dès lors que l’examen de la condition relative au fumus boni juris impose au juge des référés d’exercer un contrôle, à première vue, du bien‑fondé des moyens invoqués par la partie qui sollicite les mesures provisoires dans le cadre du recours au fond, les demandes d’octroi de telles mesures doivent, aux fins de répondre aux exigences énoncées aux points 102 et 103 de la présente ordonnance et de permettre au juge des référés d’exercer un tel contrôle, exposer de manière précise les arguments en fait et en droit visant à établir que lesdits moyens ne sont pas, à première vue, dépourvus de fondement juridique.

106    Or, en l’occurrence, le requérant, aux fins d’établir l’existence du fumus boni juris en ce qui concerne le troisième moyen qu’il a soulevé devant le Tribunal, s’est borné à affirmer qu’il était aisé de constater que le Parlement, en ayant adopté la décision constatant la vacance et la décision de rejet de la demande du 20 décembre 2019, et en n’ayant dès lors pas protégé l’immunité de M. Junqueras i Vies, avait empêché ce dernier d’exercer les droits qu’il tirait de l’article 39, paragraphes 1 et 2, de la Charte ainsi que de l’article 9 du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union. Le requérant a en outre affirmé que le Parlement, en ayant adopté ces décisions, avait méconnu l’étendue de ses propres compétences, telle qu’elle résulte de l’article 6 du règlement intérieur. Il a ajouté qu’il était également évident de constater que M. Sassoli n’avait pris aucune mesure aux fins de donner suite à la demande du 20 décembre 2019, présentée conformément à l’article 8 du règlement intérieur, de telle sorte que cet article avait été violé en ce qui concernait les droits fondamentaux que M. Junqueras i Vies tirait de l’article 39, paragraphes 1 et 2, de la Charte.

107    Ce moyen reposait ainsi sur de simples affirmations, comme le vice‑président du Tribunal l’a, à juste titre, constaté, au point 70 de l’ordonnance attaquée, aucun argument juridique n’étant à cet égard invoqué.

108    C’est dès lors à bon droit que le vice-président du Tribunal a, au point 72 de l’ordonnance attaquée, estimé que le troisième moyen soulevé par le requérant afin d’établir la condition relative au fumus boni juris était irrecevable.

109    Par ailleurs, dès lors que, ainsi qu’il a été constaté, le Parlement est, à première vue, tenu, en application de l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral, de prendre acte de la décision des autorités nationales déclarant, en application du droit national, la déchéance du mandat d’un membre du Parlement, même lorsque cette décision méconnaît le droit de l’Union, il ne saurait lui être reproché d’avoir violé les dispositions du droit de l’Union invoquées par le requérant à l’appui de ce moyen, lorsqu’il a pris acte de la décision de la Commission électorale centrale du 3 janvier 2020 constatant la déchéance du mandat du requérant et de la vacance subséquente du siège attribué à ce dernier.

110    Par conséquent, en tout état de cause, le troisième moyen soulevé par le requérant devant le Tribunal était, à première vue, dépourvu de fondement sérieux, ainsi que le vice-président du Tribunal l’a à juste titre considéré au point 72 de l’ordonnance attaquée.

111    Partant, le sixième moyen du pourvoi doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le septième moyen

 Argumentation

112    Par le septième moyen du pourvoi, le requérant soutient que le vice‑président du Tribunal, en estimant, au point 75 de l’ordonnance attaquée, que le moyen tiré de la violation par le Parlement de l’article 39, paragraphe 1, de la Charte et de l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur était dépourvu de fondement, a interprété de manière erronée la condition relative au fumus boni juris.

113    En particulier, le requérant estime que, contrairement à l’appréciation portée par le vice-président du Tribunal, l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur est applicable en l’espèce et renvoie à l’argumentation exposée au soutien du quatrième moyen du pourvoi.

114    Selon le requérant, dès lors, d’une part, que le vice-président du Tribunal n’a pas contesté le fait que les décisions nationales qui constituaient le fondement de la décision constatant la vacance n’étaient pas définitives et que, d’autre part, le Parlement pouvait, en application de l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur, refuser de déclarer la vacance du siège attribué au requérant, les conditions tenant à l’existence d’un fumus boni juris en ce qui concerne ledit caractère non définitif de ces décisions nationales étaient réunies en l’espèce.

115    Le Parlement et le Royaume d’Espagne contestent cette argumentation.

 Appréciation

116    Il importe de relever que le point 75 de l’ordonnance attaquée est fondé sur deux motifs, énoncés au point 74 de cette ordonnance, à savoir, d’une part, que l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur n’est pas applicable dans les circonstances de l’espèce et, d’autre part, que le requérant n’a avancé aucune argumentation au soutien de sa demande en référé se rapportant à l’article 39, paragraphe 1, de la Charte.

117    Le requérant n’ayant pas contesté le deuxième motif susmentionné ni avancé d’argument visant à remettre en cause ce motif, le présent moyen du pourvoi doit être considéré comme étant irrecevable en tant qu’il s’y rapporte.

118    Quant à l’argumentation du requérant dirigée contre le premier motif énoncé au point 74 de l’ordonnance attaquée, il n’appartient pas, à première vue, au Parlement, conformément à l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral, eu égard à l’absence de marge d’appréciation dont il dispose s’agissant de la vacance d’un siège qui découle de la déchéance du mandat d’un de ses membres résultant de l’application du droit national de vérifier si la décision des autorités nationales déclarant une telle déchéance est exécutoire en vertu du droit national et de refuser de prendre acte d’une telle décision ainsi que de la vacance qui en résulte, si tel n’est pas le cas.

119    À supposer même que l’article 4, paragraphe 7, du règlement intérieur était applicable dans les circonstances de l’espèce, en tout état de cause, cette disposition ne saurait, à première vue, conférer un tel pouvoir au Parlement, pour les raisons énoncées aux points 71 à 75 de la présente ordonnance.

120    C’est dès lors sans commettre d’erreur de droit que le vice-président du Tribunal a, au point 75 de l’ordonnance attaquée, estimé que le quatrième moyen soulevé par le requérant devant le Tribunal afin d’établir l’existence du fumus boni juris était, à première vue, dépourvu de fondement.

121    Par conséquent, il y a lieu de rejeter le septième moyen du pourvoi.

 Sur les premier à troisième moyens

 Argumentation

122    Par ses premier à troisième moyens du pourvoi, qu’il y a lieu d’examiner ensemble, le requérant conteste, en substance, les appréciations du vice-président du Tribunal qui l’on conduit à déclarer irrecevables, au point 38 de l’ordonnance attaquée, les deuxième à cinquième chefs de conclusions de sa demande de mesures provisoires.

123    Le Parlement et le Royaume d’Espagne font valoir que l’argumentation du requérant doit être rejetée.

 Appréciation

124    Les quatrième à septième moyens du pourvoi ayant été rejetés, il résulte de la jurisprudence invoquée au point 104 de la présente ordonnance que c’est à bon droit que le vice-président du Tribunal a, au point 76 de l’ordonnance attaquée, jugé que le requérant n’était pas parvenu à démontrer l’existence d’un fumus boni juris.

125    Or, ainsi qu’il a été rappelée au point 101 de la présente ordonnance, les conditions pour l’octroi des mesures provisoires sont cumulatives, de telle sorte que la demande de telles mesures doit être rejetée dès lors que l’une de ces conditions fait défaut.

126    Il s’ensuit que, en l’espèce, le rejet de la demande de mesures provisoires est suffisamment justifiée par les points 48 à 76 de l’ordonnance attaquée.

127    Ainsi, les griefs qui critiquent les motifs déclarant irrecevables les deuxième à cinquième chefs de conclusions de ladite demande sont dirigés contre des motifs surabondants et ne sauraient, partant, entraîner l’annulation de cette ordonnance.

128    Par conséquent, les premier à troisième moyens du pourvoi doivent être écartés comme étant inopérants.

129    Aucun des moyens soulevés par le requérant à l’appui de son pourvoi n’ayant été accueilli, il y a lieu de rejeter celui-ci dans son intégralité.

 Sur les dépens

130    En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

131    Conformément à l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

132    La Parlement ayant conclu à la condamnation du requérant et celui-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de condamner ce dernier à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par le Parlement.

133    Conformément à l’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, les États membres et les institutions intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Par conséquent, le Royaume d’Espagne, en tant que partie intervenante dans le cadre du présent pourvoi, supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la vice-présidente de la Cour ordonne :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      M. Oriol Junqueras i Vies supporte, outre ses propres dépens, ceux exposés par le Parlement.

3)      Le Royaume d’Espagne supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’espagnol.