Language of document : ECLI:EU:C:2019:768

ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

19 septembre 2019 (*)

« Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Recours en annulation et en indemnité – Classement d’une plainte portant sur la législation italienne en matière d’énergies renouvelables – Méconnaissance alléguée du droit de l’Union européenne – Responsabilité extracontractuelle de la République italienne – Pourvoi manifestement irrecevable »

Dans l’affaire C‑325/19 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 17 avril 2019,

Renew Consorzio Energie Rinnovabili, établi à Rome (Italie), représenté par Me G. Passalacqua, avvocato,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Commission européenne,

République italienne,

parties défenderesses en première instance,

LA COUR (sixième chambre),

composée de Mme C. Toader, présidente de chambre, MM. A. Rosas (rapporteur) et M. Safjan, juges,

avocat général : M. P. Pikamäe,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Renew Consorzio Energie Rinnovabili demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 20 février 2019, Renew Consorzio Energie Rinnovabili/Commission et Italie (T‑39/19, non publiée, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2019:111), par laquelle celui-ci a rejeté, en partie comme étant manifestement irrecevable et, en partie, pour cause d’incompétence manifeste, son recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision Ares (2018) 5957391 de la Commission, du 21 novembre 2018, portant refus d’engager une procédure en constatation de manquement au titre de l’article 258 TFUE à l’encontre de la République italienne (ci-après la « décision litigieuse »), et, d’autre part, à la condamnation de la République italienne à réparer le préjudice qu’il aurait subi du fait de cette violation.

 La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

2        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 janvier 2019, le requérant a introduit, au titre de l’article 263, quatrième alinéa, et de l’article 268 TFUE, un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse et à la condamnation de cette dernière à la réparation du préjudice prétendument subi du fait de ce manquement.

3        Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal a, en application de l’article 126 de son règlement de procédure, rejeté ce recours en partie comme étant manifestement irrecevable et, en partie, pour cause d’incompétence manifeste.

4        En premier lieu, le Tribunal a rejeté comme étant manifestement irrecevable la demande du requérant tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

5        À cet égard, au point 6 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a rappelé que les particuliers ne sont pas recevables à attaquer un refus de la Commission d’engager une procédure en constatation de manquement à l’encontre d’un État membre.

6        Au point 7 de cette ordonnance, le Tribunal a jugé qu’une décision de la Commission, telle que la décision litigieuse, qui revêt un caractère négatif, doit être appréciée en fonction de la nature de la demande à laquelle elle constitue une réponse.

7        Le Tribunal a rappelé que l’article 263, quatrième alinéa, TFUE prévoit que toute personne physique ou morale peut former, dans les conditions prévues à l’article 263, premier et deuxième alinéas, TFUE, un recours en annulation contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement, ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution.

8        À cet égard, le Tribunal a constaté, au point 9 de l’ordonnance attaquée, que, dans le cadre de la procédure en constatation de manquement régie par l’article 258 TFUE, les seuls actes que la Commission peut être amenée à prendre sont adressés aux États membres. En outre, il a relevé qu’il résulte du système prévu à l’article 258 TFUE que ni l’avis motivé ni la saisine de la Cour par le dépôt effectif d’un tel recours ne sauraient, selon lui, constituer des actes concernant de manière directe les personnes physiques ou morales.

9        En second lieu, le Tribunal a rejeté pour cause d’incompétence manifeste la demande du requérant visant à obtenir réparation du préjudice subi du fait du manquement allégué de la République italienne.

10      Au point 12 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a rappelé, d’une part, que sa compétence en matière de responsabilité non contractuelle est régie, notamment, par l’article 268 et par l’article 340, deuxième et troisième alinéas, TFUE et que, d’autre part, il ressort de ces dispositions que le Tribunal est uniquement compétent pour connaître des recours en réparation de dommages causés par les institutions, les organes et les organismes de l’Union ou par leurs agents dans l’exercice de leurs fonctions.

11      Au point 13 de cette ordonnance, le Tribunal a constaté que l’auteur des actes qui ont prétendument causé un préjudice au requérant n’est ni une institution ni un organe ou un organisme de l’Union.

 Les conclusions du requérant devant la Cour

12      Le requérant demande, en substance, à la Cour :

–        d’annuler l’ordonnance attaquée ;

–        d’annuler la décision litigieuse ;

–        de condamner la République italienne à réparer le préjudice qu’il aurait subi du fait de l’adoption du decreto legislativo n. 28 – Attuazione della direttiva 2009/28/CE sulla promozione dell’uso dell’energia da fonti rinnovabili, recante modifica e successiva abrogazione delle direttive 2001/77/CE e 2003/30/CE (décret législatif no 28 portant transposition de la directive 2009/28/CE relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE), du 3 mars 2011 (supplément ordinaire à la GURI no 81, du 28 mars 2011), et du decreto ministeriale – Incentivazione della produzione di energia elettrica da impianti solari fotovoltaici (décret ministériel portant incitation à la production d’électricité par des installations solaires photovoltaïques), du 5 mai 2011 (GURI no 109, du 12 mai 2011, p. 103), modifiant in pejus le régime tarifaire concernant les aides aux énergies recouvrables, et

–        de condamner la Commission et la République italienne aux dépens.

 Sur le pourvoi

13      En vertu de l’article 181 de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de le rejeter, totalement ou partiellement, par voie d’ordonnance motivée.

14      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre du présent pourvoi.

 Argumentation du requérant

15      À l’appui de son pourvoi, le requérant invoque un moyen unique, tiré de la violation, lors de la transposition dans le droit national, par la République italienne, de la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009, relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE (JO 2009, L 140, p. 16), ainsi que des principes généraux de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et de non-discrimination.

16      Ce pourvoi peut être considéré comme contenant deux arguments visant l’ordonnance attaquée.

17      D’une part, le requérant reproche au Tribunal d’avoir interprété d’une manière erronée l’article 263, quatrième alinéa, TFUE en jugeant qu’il n’était pas recevable à attaquer la décision litigieuse. En s’appuyant sur l’arrêt du 17 janvier 1985, Piraiki-Patraiki e.a./Commission (11/82, EU:C:1985:18), le requérant considère que le refus de la Commission d’engager une procédure en constatation de manquement devrait être considéré comme affectant la situation juridique d’un sujet de droit, indépendamment de la qualification juridique de ce refus par le Tribunal. En outre, le requérant fait valoir que ce refus entraîne également une violation du principe de confiance légitime, tel qu’il ressort de l’arrêt du 16 février 1977, Töpfer e.a. (72/76, EU:C:1977:27).

18      D’autre part, le requérant reproche au Tribunal de s’être déclaré incompétent pour statuer sur la demande de dommages et intérêts qu’il avait présentée contre la République italienne. À cet égard, il fait référence à la jurisprudence issue des arrêts du 19 novembre 1991, Francovich e.a. (C‑6/90 et C‑9/90, EU:C:1991:428) ; du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame (C‑46/93 et C‑48/93, EU:C:1996:79), ainsi que du 8 octobre 1996, Dillenkofer e.a. (C‑178/94, C‑179/94 et C‑188/94 à C‑190/94, EU:C:1996:375), qui démontrerait clairement que la Cour est compétente pour statuer sur la demande de réparation du préjudice allégué.

 Appréciation de la Cour

19      En vue de statuer sur le présent pourvoi, il convient de rappeler qu’il résulte de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169 du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt ou de l’ordonnance dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi (voir, notamment, arrêt du 5 mars 2015, Ezz e.a./Conseil, C‑220/14 P, EU:C:2015:147, point 111 et jurisprudence citée ; ordonnance du 24 novembre 2016, Petraitis/Commission, C‑137/16 P, non publiée, EU:C:2016:904, point 16 et jurisprudence citée, ainsi que arrêt du 23 janvier 2019, Deza/ECHA, C‑419/17 P, EU:C:2019:52, point 93 et jurisprudence citée).

20      Ainsi, les éléments du pourvoi qui ne contiennent aucune argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entachée l’ordonnance attaquée ne répondent pas à cette exigence et doivent être écartés comme étant manifestement irrecevables (ordonnance du 18 octobre 2018, Alex/Commission, C‑696/17 P, non publiée, EU:C:2018:848, point 23 et jurisprudence citée).

21      De même, doivent être écartés comme manifestement irrecevables les arguments difficilement compréhensibles et confus, dès lors qu’ils ne permettent pas à la Cour d’exercer la mission qui lui incombe et d’effectuer son contrôle de la légalité (ordonnance du 24 novembre 2016, Petraitis/Commission, C‑137/16 P, non publiée, EU:C:2016:904, point 18 et jurisprudence citée).

22      En l’occurrence, il y a lieu de relever, en premier lieu, qu’une grande partie du pourvoi est confuse et se limite à des affirmations générales, selon lesquelles la Commission aurait dû engager une procédure en constatation de manquement à l’encontre de la République italienne concernant la mise en œuvre de la directive 2009/28. Le pourvoi contient également un grand nombre d’arguments qui semblent tendre à démontrer l’existence de ce manquement et à établir le préjudice prétendument subi par le requérant du fait de celui-ci. L’ensemble de ces arguments, qui ne visent aucunement l’ordonnance attaquée, doivent être rejetés comme étant manifestement irrecevables.

23      S’agissant, en deuxième lieu, de l’argument tiré de l’interprétation erronée de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, le requérant se borne à affirmer que la décision litigieuse affecte sa situation juridique, de telle sorte que son recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse aurait dû être déclaré recevable par le Tribunal. Dans ce cadre, le requérant fait, certes, référence aux arrêts du 16 février 1977, Töpfer e.a. (72/76, EU:C:1977:27), et du 17 janvier 1985, Piraiki-Patraiki e.a./Commission (11/82, EU:C:1985:18). Toutefois, force est de constater que celui-ci ne tire aucune argumentation spécifique de ces arrêts aux fins de critiquer l’ordonnance attaquée. Dans ces conditions, cet argument doit être écarté comme étant également manifestement irrecevable.

24      En ce qui concerne, en troisième lieu, l’argument selon lequel le Tribunal a commis une erreur de droit en se déclarant incompétent pour statuer sur la demande du requérant tendant à la condamnation de la République italienne à lui verser des dommages et intérêts, ce dernier se borne à affirmer, en faisant référence à la jurisprudence issue des arrêts du 19 novembre 1991, Francovich e.a. (C‑6/90 et C‑9/90, EU:C:1991:428) ; du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame (C‑46/93 et C‑48/93, EU:C:1996:79), ainsi que du 8 octobre 1996, Dillenkofer e.a. (C‑178/94, C‑179/94 et C‑188/94 à C‑190/94, EU:C:1996:375), que la Cour est compétente pour connaître de sa demande de réparation du préjudice allégué. Cependant, il n’explique nullement comment le Tribunal aurait pu, par l’ordonnance attaquée, méconnaître cette jurisprudence, qui concerne la responsabilité des États membres pour des violations du droit de l’Union, et non pas la compétence du Tribunal en matière de responsabilité non contractuelle de l’Union. Dès lors, il y a lieu de considérer que cet argument est manifestement irrecevable.

25      En conséquence, le pourvoi doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable.

 Sur les dépens

26      En application de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance. En l’espèce, la présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi ne soit signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que Renew Consorzio Energie Rinnovabili supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) ordonne :

1)      Le pourvoi est rejeté comme étant manifestement irrecevable.

2)      Renew Consorzio Energie Rinnovabili supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.