Language of document : ECLI:EU:F:2011:180

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

10 novembre 2011 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Promotion – Classement en grade – Agents locaux nommés fonctionnaires – Article 10 de l’annexe XIII du statut – Article 3 de l’annexe du RAA – Exercice de promotion 2008 – Examen comparatif des mérites entre fonctionnaires relevant du parcours de carrière AST – Procédure basée sur les rapports de notation 2005/2006 – Critère du niveau des responsabilités exercées »

Dans l’affaire F‑18/09,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Mohamed Merhzaoui, fonctionnaire du Conseil de l’Union européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Mes S. Orlandi, A. Coolen, J.‑N. Louis et É. Marchal, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. M. Bauer et Mme G. Kimberley, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre),

composé de Mme I. Boruta, faisant fonction de président (rapporteur), M. S. Van Raepenbusch et Mme M. I. Rofes i Pujol, juges,

greffier : M. J. Tomac, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 juin 2011,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 2 mars 2009 (le dépôt de l’original étant intervenu le 11 mars suivant), M. Merhzaoui demande, en substance, l’annulation des décisions du Conseil de l’Union européenne de l’affecter au parcours de carrière du groupe de fonctions des assistants AST 1 à AST 7 et de ne pas le promouvoir au grade AST 2 au titre de l’exercice de promotion 2008.

 Cadre juridique

2        L’article 45, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne, tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, entré en vigueur le 1er mai 2004 (ci-après le « statut » ou le « nouveau statut »), prévoit :

« La promotion est attribuée par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination en considération de l’article 6, paragraphe 2. Elle entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur du groupe de fonctions auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d’un minimum de deux ans d’ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. Aux fins de l’examen comparatif des mérites, l’autorité investie du pouvoir de nomination prend en considération, en particulier, les rapports dont les fonctionnaires ont fait l’objet, l’utilisation dans l’exercice de leurs fonctions des langues autres que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie conformément à l’article 28, [sous] f) et, le cas échéant, le niveau des responsabilités exercées. »

3        L’article 10 de l’annexe XIII du statut, relative aux mesures de transition nécessitées par l’entrée en vigueur du règlement no 723/2004, énonce :

« 1. Les fonctionnaires en fonction dans les catégories C ou D avant le 1er mai 2004 sont affectés à compter du 1er mai 2006 aux parcours de carrière permettant des promotions :

a)      dans l’ancienne catégorie C, jusqu’au grade AST 7 ;

b)      dans l’ancienne catégorie D, jusqu’au grade AST 5 ;

[….] »

4        L’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut dispose que [l]es fonctionnaires inscrits sur une liste [de réserve] avant le 1er mai 2006 et recrutés entre le 1er mai 2004 et le 30 avril 2006 sont classés […] lorsque la liste a été établie pour la catégorie A*, B* ou C*, dans le grade publié dans l’avis de concours ».

5        L’article 1er, paragraphe 1, de l’annexe du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne tel que modifié par le règlement no 723/2004 (ci-après le « RAA »), relative aux mesures de transition rendues nécessaires par l’entrée en vigueur dudit règlement, prévoit :

« Les dispositions de l’annexe XIII du statut s’appliquent par analogie aux autres agents en fonction au 30 avril 2004. »

6        L’article 3 de l’annexe du RAA dispose :

« Pendant une durée de cinq ans à compter du 1er mai 2004, les agents locaux et les agents contractuels du secrétariat général du Conseil qui avaient le statut d’agents locaux dudit secrétariat général avant le 1er mai 2004 sont admis à se présenter aux concours internes du Conseil dans les mêmes conditions que les fonctionnaires et agents temporaires de l’institution. »

 Faits à l’origine du litige

7        Le 14 décembre 1994, le requérant est entré en service auprès du secrétariat général du Conseil en tant qu’agent intérimaire. Il a été affecté initialement à un poste d’huissier puis réaffecté, à compter du 1er juin 1995, au service du tri du courrier.

8        Le 1er janvier 2002, le requérant a été engagé comme agent local.

9        Le 29 avril 2004, le Conseil a publié l’avis de concours interne Conseil/C/275 ouvert aux fonctionnaires et autres agents du secrétariat général du Conseil visant à la constitution d’une liste de réserve de commis adjoints, lequel précisait qu’en cas de réussite la nomination s’effectuerait au grade C 5. Cependant, ledit avis mentionnait dans un nota bene que, « [s]uite à l’adoption par le Conseil du statut modifié, qui comporte notamment un nouveau système de carrière », la nomination des lauréats se ferait « selon les nouvelles dispositions en vigueur ».

10      Le 25 mai 2004, le Conseil a publié un corrigendum à l’avis de concours Conseil/C/275 précisant qu’il était destiné au recrutement de commis adjoints de la catégorie C* et que la nomination des lauréats s’effectuerait « au grade de base, premier échelon, de la catégorie C*, sauf pour les fonctionnaires, qui conserveront leur grade et leur échelon ».

11      Suite à l’entrée en vigueur du nouveau statut le 1er mai 2004, le grade C 5 a été, à cette date, renommé C*1, puis, le 1er mai 2006, AST 1.

12      Le 7 octobre 2004, le Conseil a publié une note à l’attention des candidats au concours interne Conseil/C/275, laquelle précisait que pour pouvoir progresser dans la carrière au-delà du grade AST 7 les lauréats devraient faire l’objet d’une attestation.

13      Le 26 avril 2005, la liste de réserve établie à l’issue du concours interne Conseil/C/275 a été publiée. Cette dernière comportait le nom du requérant.

14      Par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») du 14 juillet 2005, prenant effet le 1er juin 2005, le requérant, qui entre-temps avait été engagé comme agent contractuel du groupe de fonctions I de grade 1, échelon 1, a été nommé fonctionnaire stagiaire de grade C*1, échelon 2 et affecté à un emploi de commis. À l’issue de son stage, par décision de l’AIPN du 30 mars 2006, avec effet au 1er mars 2006, il a été titularisé dans ses emploi et grade.

15      Par communication au personnel no 39/08 du 29 février 2008 (ci-après la « CP no 39/08 »), le secrétaire général adjoint du Conseil, en sa qualité d’AIPN, a informé le personnel de l’institution des modalités de l’exercice de promotion 2008 et des noms des fonctionnaires promouvables au grade supérieur. Le nom du requérant figurait sur la liste des fonctionnaires de grade AST 1, relevant du parcours de carrière AST 1 à AST 7 et promouvables au grade AST 2. Par ailleurs, le secrétaire général du Conseil indiquait dans la CP no 39/08 :

« J’attire l’attention des fonctionnaires promouvables sur le fait que les commissions consultatives de promotion disposent, pour chaque fonctionnaire promouvable, des rapports de notation dont il a fait l’objet (depuis son entrée dans le grade jusqu’au dernier disponible), ainsi que d’un historique de carrière. Les derniers rapports de notation ([1er janvier] 2005[/30 juin] 2006) ont été établis au début de l’année 2007. Même si un nouvel exercice de notation vient de commencer, il y aura un certain délai avant que les rapports soient établis. L’AIPN a, dès lors, décidé de baser l’exercice de promotion 2008 sur les rapports 2005[/]2006 pour permettre de le terminer avant fin avril, ce qui n’aurait pas été possible en utilisant les nouveaux rapports. Toutes les démarches nécessaires ont été faites pour garantir la comparaison des mérites sur une base égale dans les cas où aucun rapport n’avait été rédigé pour cette période. »

16      L’auteur de la CP no 39/08 indiquait également ce sur quoi portaient les historiques de carrière de chaque fonctionnaire mis à la disposition des commissions de promotion et ajoutait que celles-ci disposaient également des relevés récapitulatifs des congés pour raison de maladie ou d’accident portant sur les trois dernières années.

17      La CP no 39/08 comportait en outre une note explicative sur les modalités de l’exercice de promotion 2008 et notamment sur l’incidence des règles du nouveau statut. Il y était mentionné que l’AIPN avait décidé de prévoir des commissions consultatives de promotion distinctes pour les fonctionnaires du groupe de fonctions des assistants selon que leur parcours de carrière autorisait des promotions jusqu’au grade 5, 7 ou 11.

18      Par communication au personnel no 35/08 du 3 mars 2008, le secrétaire général adjoint du Conseil a porté à la connaissance du personnel de l’institution les orientations données aux notateurs pour l’exercice de notation concernant la période comprise entre le 1er juillet 2006 et le 31 décembre 2007 (ci-après la « CP no 35/08 »). L’auteur y indiquait notamment :

« À l’occasion du lancement de cet exercice de notation, je tiens à féliciter les services qui, au cours de l’exercice de notation précédent, ont respecté les orientations reprises dans mon message du 8 novembre 2006[…]. Malheureusement, j’ai dû constater une nouvelle fois que, lors de ce dernier exercice, ces orientations n’ont pas été respectées uniformément au sein du [s]ecrétariat général. Une telle situation nuit à la comparabilité des rapports de notation et peut conduire à des inégalités de traitement, notamment dans le cadre de la promotion et des procédures d’attestation, de certification et d’octroi de la pension immédiate sans réduction. Ce risque d’inégalités rend difficile une gestion efficace et équitable des ressources humaines au [secrétariat général du Conseil]. »

19      Par communication au personnel no 75/08 du 24 avril 2008, le secrétaire général du Conseil a publié la liste des fonctionnaires du groupe de fonctions AST et relevant du parcours de carrière AST 1 à AST 11 proposés pour une promotion par la commission consultative de promotion compétente, liste établie par grade. À la fin de la communication, il était indiqué que l’AIPN avait décidé de suivre la proposition de ladite commission.

20      Par communication au personnel no 76/08 du 29 avril 2008, le secrétaire général adjoint, a publié la liste des fonctionnaires du groupe de fonctions AST et relevant du parcours de carrière AST 1 à AST 7 proposés pour une promotion au grade supérieur au titre de l’exercice de promotion 2008 par la commission consultative de promotion compétente, liste établie par grade. À la fin de la communication, il était indiqué qu’il avait décidé de suivre, en tant qu’AIPN, la proposition de ladite commission, laquelle ne comportait pas la promotion du requérant au grade AST 2.

21      Le 29 mai 2008, le requérant a introduit une réclamation, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, dirigée contre la décision de l’AIPN de ne pas le promouvoir au grade AST 2 au titre de l’exercice de promotion 2008 et, en substance, contre la décision de le classer dans le parcours de carrière AST 1-AST 7. Cette réclamation, réceptionnée par le Conseil le 30 mai 2008, a fait l’objet d’une décision de rejet implicite le 30 septembre suivant.

22      Par lettre du 24 juillet 2008, réceptionnée le 29 juillet suivant, le requérant a introduit une seconde réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2 du statut contre la décision de l’AIPN de ne pas le promouvoir au grade AST 2 au titre de l’exercice de promotion 2008 et, pour autant que de besoin, contre les décisions de l’AIPN de promouvoir à ce grade des fonctionnaires moins méritants. Cette seconde réclamation a été traitée par l’AIPN, en accord avec le requérant, comme étant ampliative de la première réclamation.

23      Par décision du 10 novembre 2008, dont le requérant a accusé réception le 20 novembre suivant, l’AIPN a rejeté explicitement les réclamations du requérant.

 Conclusions des parties et procédure

24      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision, publiée le 29 février 2008, de l’affecter au parcours de carrière AST 1 à AST 7 ;

–        annuler la décision, publiée le 29 avril 2008, de ne pas promouvoir le requérant au grade AST 2 au titre de l’exercice de promotion 2008 ;

–        annuler, « pour autant que besoin », les décisions de promouvoir au grade AST 2 des fonctionnaires moins méritants ;

–        condamner la partie défenderesse aux dépens

25      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la partie requérante à l’ensemble des dépens.

26      Par ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal du 20 avril 2010, la procédure dans la présente affaire a été suspendue dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice jusqu’au prononcé de la décision du Tribunal mettant fin à l’instance dans l’affaire Noël/Conseil enregistrée sous la référence F‑31/09 (ci-après l’« arrêt Nöel »).

27      Suite à l’arrêt du Tribunal du 28 octobre 2010 mettant fin à l’instance dans l’affaire F‑31/09, Noël/Conseil, la reprise de la procédure dans la présente affaire a été signifiée aux parties le 7 décembre 2010. Les parties ont présenté leurs observations sur les conséquences de l’arrêt Noël sur la présente affaire par lettre du Conseil du 21 décembre 2010 et de la partie requérante du 10 janvier 2011.

28      Par ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal du 11 avril 2011, la présente affaire a été jointe, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice à l’affaire F‑20/09, Juvyns/Conseil, aux fins de la procédure orale.

 En droit

 Sur les conclusions en annulation de la décision d’affecter le requérant au parcours de carrière AST 1 à AST 7

 Arguments des parties

29      Au soutien de ses conclusions en annulation, le requérant soulève dans sa requête un moyen unique tiré de ce que l’administration aurait commis une erreur de droit en lui appliquant l’article 10, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut, selon lequel les fonctionnaires en fonction dans la catégorie C avant le 1er mai 2004 sont affectés à compter du 1er mai 2006 au parcours de carrière permettant uniquement des promotions jusqu’au grade AST 7. Le requérant fait valoir que, avant le 1er mai 2004, il était agent local et non fonctionnaire. Or, aucune disposition du statut ne prévoirait que l’article 10 de l’annexe XIII du statut serait applicable aux agents locaux.

30      En défense, le Conseil estime que l’article 10, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut est applicable par analogie aux agents locaux devenus fonctionnaires suite à leur réussite à un concours interne, car la situation factuelle des agents locaux ne présenterait pas de différence essentielle par rapport à celle des fonctionnaires des anciennes catégories C et D.

31      À l’audience, le requérant a indiqué au sujet de l’incidence de l’arrêt Noël sur la présente affaire, que, à considérer que les dispositions de l’article 10, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut lui soient applicables, l’administration aurait commis une erreur manifeste d’appréciation lorsque, pour les besoins de l’application desdites dispositions, elle a apprécié les fonctions qu’il occupait afin de déterminer à quelle catégorie de fonctionnaires prévue par l’ancienne nomenclature, à savoir B, C ou D, il devait être assimilé. En effet, le requérant relève que, dès lors que son rapport de notation 2005/2006 faisait état de ce qu’il exerçait des fonctions de coordinateur d’équipe, lesquelles fonctions correspondaient, selon lui, à celles de chef d’équipe, il aurait dû être assimilé à un fonctionnaire de l’ancienne catégorie B et, par suite, être affecté au parcours de carrière AST 1 à AST 11 et classé au grade le plus bas possible prévu dans la nouvelle nomenclature pour les fonctionnaires relevant de l’ancienne catégorie B, à savoir AST 5. En tout état de cause, le requérant affirme que, dès lors que l’administration l’avait assimilé à un fonctionnaire de l’ancienne catégorie C, il aurait dû être nommé au grade AST 2, puisqu’en vertu de l’article 2 de l’annexe XIII du statut, les fonctionnaires de grade C 5, en exercice au 1er mai 2004, ont vu leur grade renommé, suite à la réforme statutaire, en grade AST 2.

32      Pour sa part, le Conseil a estimé que la solution dégagée par le Tribunal dans l’arrêt Noël devrait également être appliquée en l’espèce et que, par suite, il conviendrait de rejeter les présentes conclusions en annulation.

 Appréciation du Tribunal

33      À titre liminaire, il doit être relevé que le requérant a attendu le 29 mai 2008 pour introduire sa première réclamation contre la décision de l’affecter au parcours de carrière AST 1 à AST 7. Or, cette décision, dès lors qu’elle constitue l’exécution de l’article 10, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut, doit être considérée comme ayant été adoptée à la date à laquelle celui-ci est devenu d’application, soit le 1er mai 2006.

34      Cependant, il doit également être relevé que le Conseil n’a pas expressément informé le requérant de l’adoption de la décision, du 1er mai 2006, de l’affecter au parcours de carrière AST 1 à AST 7 et que l’existence de cette décision ne pouvait être déduite de la seule lecture des dispositions statutaires pertinentes. Par suite, il y a lieu de considérer que le requérant a pu ne prendre connaissance de la décision l’affectant au parcours de carrière AST 1 à AST 7 qu’à l’occasion de l’exercice de promotion 2008, premier exercice de promotion depuis sa titularisation pour lequel il disposait de l’ancienneté requise par l’article 45 du statut pour être promu. Dans ces conditions, la réclamation et le présent recours ont été introduits dans les délais statutaires.

35      Sur le fond, et ainsi que l’a relevé le Tribunal aux points 19 et suivants de l’arrêt Noël, il doit être constaté que, contrairement aux affirmations du requérant, l’article 10, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut est applicable aux agents locaux, puisqu’aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, de l’annexe du RAA, les dispositions de l’annexe XIII du statut sont applicables par analogie aux autres agents en fonction au 30 avril 2004, y inclus donc les agents locaux. Or, ainsi qu’il a été dit plus haut, à la date du 30 avril 2004 le requérant était agent local. Ainsi, du fait de son statut d’agent local à la date du 30 avril 2004, l’article 10 de l’annexe XIII du statut lui est applicable par analogie. Aussi, c’est à bon droit que le requérant a été assimilé à un fonctionnaire de l’ancienne catégorie C, catégorie qui correspondait « à des fonctions d’exécution nécessitant des connaissances du niveau de l’enseignement moyen », dès lors qu’il ressort du dossier que celui-ci, affecté au service du tri du courrier du secrétariat général du Conseil, avait pour tâches, selon les indications figurant dans son rapport de notation 2005/2006, d’« identifier les destinataires des plis envoyés au Conseil[, ainsi que de] veiller à leur envoi correct par ses collègues » et « à ce que les permanences soient assurées pendant la pause de midi et le soir, lorsque cela est nécessaire ». Partant, c’est également à bon droit que le requérant a été affecté au parcours de carrière permettant des promotions uniquement jusqu’au grade AST 7.

36      Cette constatation n’est pas remise en cause par le moyen soulevé lors de l’audience par le requérant selon lequel l’administration aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation des fonctions qu’il exerçait en tant qu’agent local, ce moyen étant irrecevable. En effet, dans sa requête, le requérant s’est borné à soulever un moyen tiré d’une erreur de droit en ce que l’administration lui aurait appliqué à tort l’article 10, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, sans soulever de moyen subsidiaire tiré d’une erreur d’appréciation dans l’application à sa situation personnelle desdites dispositions, ce qu’il aurait pu faire dès lors qu’à l’occasion du rejet de la réclamation il avait pu prendre connaissance du raisonnement suivi par l’administration. Partant, le requérant ne saurait soulever à l’audience un second moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation sans que celui-ci ne soit considéré comme un moyen nouveau, car insusceptible de se rattacher à l’un de ceux soulevés dans la requête. Or, l’article 43, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal interdit la production de moyens nouveaux après le premier échange de mémoires, à moins que ceux-ci ne se fondent sur des éléments qui se sont révélés pendant la procédure. Certes, l’arrêt Noël, à l’occasion duquel le Tribunal a constaté que l’article 10, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut s’appliquait aux agents locaux, n’avait pas encore été rendu lorsque le requérant a introduit son recours, mais il est constant que le prononcé d’un arrêt, à l’occasion duquel le Tribunal explicite l’interprétation à donner à une règle de droit ne fait que révéler une situation juridique préexistante de sorte qu’il ne saurait être considéré comme un élément nouveau (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 20 mai 2003, Diehl-Leistner/Commission, T‑80/01, point 38).

37      En tout état de cause, il doit être relevé que le rapport de notation 2005/2006 du requérant indique que celui-ci exerce, non pas comme il le soutient, les fonctions de chef d’équipe, mais celles de coordinateur d’équipe. Or, ces fonctions ne figurent pas parmi celles expressément prévues par le statut. Certes, ce qualificatif employé de « coordinateur d’équipe du tri courrier », suggère que le requérant a notamment pour tâche d’organiser le travail de certains de ses collègues, mais, pour autant, l’emploi de ce terme par l’évaluateur ne démontre pas que, à l’instar d’un chef d’unité, le requérant ait disposé à leur égard d’un pouvoir de direction. Au contraire, il ressort des précisions apportées par le Conseil en cours d’audience que la fonction de coordinateur d’équipe au sein du service du tri du courrier que remplissait le requérant lui avait été attribuée de façon informelle et qu’elle correspondait à celle d’une personne jouant le rôle, eu égard à son expérience, d’un primus inter pares.

38      Enfin, quant aux griefs dirigés par le requérant contre son classement en grade, il y a lieu d’observer que l’avis de concours Conseil/C/275, modifié par le corrigendum du 25 mai 2004, auquel le requérant a été reçu, mentionnait expressément que la nomination des lauréats se ferait au grade correspondant au grade C 5 dans la nouvelle nomenclature. Dès lors que, comme l’a relevé l’AIPN dans le rejet de la réclamation, l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, rendu applicable au requérant par l’article 1er de l’annexe du RAA, dispose que les fonctionnaires inscrits sur une liste de réserve avant le 1er mai 2006 et recrutés entre le 1er mai 2004 et le 30 avril 2006, sont classés, lorsque la liste a été établie pour la catégorie C*, dans le grade publié dans l’avis de concours, c’est à juste titre que le requérant a été nommé au grade C*1, lequel est devenu, par application des dispositions transitoires contenues à l’annexe XIII, du statut, le grade AST 1.

39      Il résulte de ce qui précède qu’il convient de rejeter les conclusions en annulation dirigées contre la décision d’affecter le requérant au parcours de carrière AST 1 à AST 7.

 Sur les conclusions en annulation de la décision de ne pas promouvoir le requérant au grade AST 2 au titre de l’exercice de promotion 2008 et, « pour autant que besoin », des décisions de promouvoir au grade AST 2 des fonctionnaires moins méritants

40      À l’appui de ses conclusions, le requérant soulève deux moyens qui doivent être compris, eu égard à ses écrits, comme étant tirés :

–        le premier, de la violation de l’article 45 du statut, de la violation des principes d’égalité de traitement dans le déroulement de la carrière et de bonne administration, ainsi que de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation ;

–        le deuxième, de la violation de l’obligation de motivation.

 Sur la recevabilité des moyens et des griefs soulevés par le requérant

41      Le Conseil soulève, à titre liminaire, une exception d’irrecevabilité à l’égard, d’une part, du grief, présenté dans le cadre du premier moyen, tiré de la violation du principe d’égalité de traitement dans le déroulement de la carrière et, d’autre part, du deuxième moyen au motif que le requérant ne développerait nullement ce grief et ce moyen.

42      À cet égard, s’agissant du grief tiré de la violation du principe d’égalité de traitement, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 35, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure, la requête doit contenir l’exposé des moyens et arguments de fait et de droit invoqués. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations.

43      Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un grief soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent de façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même.

44      Il en est d’autant plus ainsi que, selon l’article 7, paragraphe 3, de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, la phase écrite de la procédure devant le Tribunal ne comporte, en principe, qu’un seul échange de mémoires, sauf décision contraire du Tribunal. Cette particularité de la procédure devant le Tribunal explique que, à la différence de ce qui est prévu devant la Cour ou le Tribunal de l’Union européenne par l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour, l’exposé des moyens et arguments dans la requête ne saurait être sommaire (arrêt du Tribunal du 9 mars 2010, N/Parlement, F‑26/09, point 70).

45      En l’espèce, il ressort des écrits du requérant que, pour soutenir l’existence d’une violation du principe d’égalité de traitement, ce dernier allègue que les orientations données aux notateurs par le secrétaire général adjoint du Conseil n’ont pas été suivies uniformément au sein du secrétariat général, ce dont témoignerait la CP no 35/08. Cependant, le requérant ne précise pas laquelle de ces orientations n’aurait pas été respectée par les notateurs. Or, il n’appartient pas au juge de dégager de la CP no 35/08 les arguments susceptibles de constituer le fondement du grief tiré de la violation du principe de l’égalité de traitement.

46      En outre, ledit grief concerne le rapport de notation du requérant établi pour la période allant du 1er janvier 2005 au 30 juin 2006 et non la décision de ne pas promouvoir celui-ci au titre de l’exercice de promotion 2008. Or, il ne ressort pas du dossier que le requérant ait contesté ce rapport de notation, soit par réclamation, soit, ainsi qu’il était en droit de le faire, en introduisant directement un recours (arrêt de la Cour du 15 mars 1989, Bevan/Commission, 140/87, point 11 ; arrêt du Tribunal de première instance du 29 février 1996, Lopes/Cour de justice, T‑547/93, point 163). Au surplus, le présent recours a été introduit après qu’un délai bien supérieur à quatre mois se soit écoulé depuis non seulement la date de la finalisation du rapport de notation concerné par le grief en cause, à savoir celui établi pour la période allant du 1er janvier 2005 au 30 juin 2006, mais également depuis la date de la publication de la CP no 35/08, laquelle, selon le requérant, lui aurait permis de se rendre compte de la prétendue illégalité dont serait entaché ledit rapport de notation. En conséquence, le grief présenté dans le cadre du premier moyen, tiré de la violation du principe d’égalité de traitement, doit être rejeté comme irrecevable.

47      En ce qui concerne le second moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, il y a lieu de rappeler qu’il est de jurisprudence constante qu’un défaut de motivation constitue un moyen d’ordre public qui peut, en tout état de cause, être examiné d’office par le juge de l’Union (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 20 février 1997, Commission/Daffix, C‑166/95 P, point 24 ; arrêt du Tribunal de première instance du 3 octobre 2006, Nijs/Cour des comptes, T‑171/05, point 31). Il s’ensuit qu’un grief tiré de la violation de l’obligation de motivation ne saurait être irrecevable au motif qu’il est insuffisamment développé dans la requête.

48      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que les premier et second moyens sont recevables, mais, pour ce qui est du premier, uniquement en ce qu’il est tiré de la violation de l’article 45 du statut, du principe de bonne administration et de l’erreur manifeste d’appréciation.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 45 du statut, de la violation du principe de bonne administration et de l’erreur manifeste d’appréciation

–       Arguments des parties

49      Dans une première branche du moyen, le requérant soutient que les termes « le cas échéant » figurant à l’article 45 du statut signifieraient non pas que l’AIPN peut, pour la promotion, prendre en compte le niveau des responsabilités exercées uniquement à titre accessoire, mais qu’elle doit en tenir compte dès lors qu’un fonctionnaire exerce des responsabilités d’un niveau supérieur à celui des responsabilités correspondant à son grade. Or, en l’espèce, l’AIPN n’aurait tenu compte du niveau des responsabilités exercées qu’à titre subsidiaire.

50      Dans une deuxième branche du moyen, le requérant affirme que l’AIPN a commis une erreur manifeste dans l’appréciation du niveau des responsabilités qu’il exerçait ainsi que de ses mérites, ce dont témoignerait la circonstance que des fonctionnaires ayant un niveau de responsabilités et des mérites manifestement inférieurs aux siens ont été promus.

51      Dans une troisième et dernière branche du moyen, le requérant soutient que le Conseil a violé l’article 45 du statut ainsi que le principe de bonne administration en ne prenant pas les dispositions nécessaires à l’établissement, en temps utile, des rapports de notation de ses fonctionnaires pour la période allant du 1er juillet 2006 au 31 janvier 2007. En effet, le requérant relève que la commission consultative de promotion et l’AIPN ont procédé à l’examen comparatif des fonctionnaires promouvables sur le seul fondement des rapports de notation portant sur la période allant du 1er janvier 2005 au 30 juin 2006 (ci-après les « rapports de notation 2005/2006 ») sans attendre l’établissement des rapports de notation pour la période allant du 1er juillet 2006 au 31 janvier 2007 (ci-après les « rapports de notation 2006/2007 »), ni même prendre en considération d’autres éléments susceptibles de refléter le mérite des fonctionnaires promouvables pour cette dernière période.

52      Selon le requérant, l’absence de prise en considération par l’AIPN des rapports de notation 2006/2007 l’aurait particulièrement pénalisé, car si tel avait été le cas lors de l’examen comparatif des fonctionnaires promouvables, l’AIPN aurait constaté l’excellence de ses mérites pendant cette période ainsi que le niveau important des responsabilités qu’il exerçait, puisque, bien qu’étant fonctionnaire de grade AST 1, il assumait les fonctions de coordinateur d’équipe au sein du service du tri du courrier. En outre, le seul rapport de notation le concernant que l’administration aurait eu à sa disposition portait sur la période comprise entre le 1er mai 2005 et le 30 juin 2006, soit une période plus courte que celle visée dans les rapports de notation de ses collègues dont disposait l’AIPN et de surcroît une période pendant laquelle il était encore fonctionnaire stagiaire.

53      En défense le Conseil a fait état, dans ses écrits, de ce que le niveau des responsabilités exercées par les fonctionnaires promouvables n’avait été pris en compte par l’AIPN qu’à titre subsidiaire, mais que, pour autant, il n’en résultait aucune irrégularité, car, en substance, les termes « le cas échéant », figurant à l’article 45 du statut, devraient être compris comme signifiant que le niveau des responsabilités exercées ne doit être pris en considération que dans des cas spécifiques, par exemple, lorsque le fonctionnaire en cause a accepté d’exercer un emploi relevant d’un parcours de carrière supérieur au sien. Or, tel n’était pas le cas en l’espèce.

54      Lors de l’audience, le Conseil a cependant indiqué avoir commis une erreur de plume dans ses écrits et a finalement soutenu que le niveau des responsabilités exercées avait été pris en compte par l’AIPN à titre principal.

55      En ce qui concerne la deuxième branche du moyen, le Conseil conteste que des fonctionnaires de niveaux de responsabilités et de mérites inférieurs à ceux du requérant ont été promus au titre de l’exercice de promotion 2008. L’AIPN a indiqué dans le rejet de la réclamation que, après examen comparatif des appréciations analytiques et d’ordre général des rapports de notation 2005/2006, des connaissances et des niveaux de responsabilités, les mérites des quatre fonctionnaires proposés pour une promotion au titre de l’exercice 2008 avaient tous été considérés comme égaux ou supérieurs à ceux du requérant. Le Conseil soutient que, en tout état de cause, il n’existerait pas de faisceau d’indices suffisant pour démontrer que l’AIPN aurait commis une erreur d’appréciation.

56      En ce qui concerne la troisième branche du moyen, le Conseil allègue que celle-ci est irrecevable, car la décision de baser l’exercice de promotion 2008 sur les rapports de notation 2005/2006, sans attendre que soient établis les rapports de notation 2006/2007, ne ferait pas personnellement grief au requérant puisque cette décision concernerait, de façon non discriminatoire, l’ensemble du personnel du secrétariat général.

57      À titre subsidiaire, le Conseil estime qu’aucune règle ne lui imposait, dans la perspective d’adopter les décisions de promotion au titre de l’exercice 2008, d’établir les rapports de notation pour la période allant du 1er juillet 2006 au 31 janvier 2007 afin de pouvoir tenir compte des 18 derniers mois précédant l’exercice de promotion. En outre, il fait valoir que l’article 43 du statut admet que les rapports de notation ne soient établis que tous les deux ans. Le Conseil ayant décidé d’établir des rapports de notation tous les 18 mois et l’exercice de promotion étant, quant à lui, annuel, il serait inévitable qu’à un moment donné les mêmes rapports de notation soient pris en compte pour deux exercices de promotion consécutifs.

58      En tout état de cause, le Conseil fait valoir qu’attendre l’achèvement complet de l’exercice de notation 2006/2007 l’aurait conduit, soit à retarder considérablement l’exercice de promotion 2008, soit à prendre le risque de ne pas recueillir tous les rapports de notation 2006/2007 en temps utile. Dans cette dernière hypothèse, les commissions consultatives de promotion auraient été dans l’impossibilité de comparer les mérites des fonctionnaires promouvables sur une base égalitaire. Aussi, en décidant de fonder l’exercice de promotion 2008 sur les rapports de notation 2005/2006, le Conseil estime que l’AIPN a agi dans les limites de ses pouvoirs et en conformité avec le principe de bonne administration.

–       Appréciation du Tribunal

59      En ce qui concerne la première branche du moyen, tirée de ce que l’AIPN aurait commis une erreur de droit en ne tenant compte qu’à titre subsidiaire du niveau des responsabilités exercées par les fonctionnaires promouvables, il convient de rappeler que, comme l’a jugé le Tribunal dans son arrêt du 5 mai 2010, Bouillez e.a./Conseil (F‑53/08, points 56 et suivants), l’expression « le cas échéant », figurant à l’article 45 du statut, signifie que, dans la mesure où, en principe, les agents d’un même grade sont censés occuper des fonctions de responsabilités équivalentes, lorsque tel n’est pas le cas, cette circonstance doit être prise en considération lors de la procédure de promotion et que, par conséquent, l’administration est tenue, lorsqu’elle procède à l’examen comparatif des fonctionnaires promouvables, de tenir compte du niveau des responsabilités exercées par un fonctionnaire promouvable lorsque celles-ci excèdent celles normalement dévolues à un fonctionnaire de son grade.

60      En l’espèce, si le Conseil a initialement indiqué que l’AIPN n’avait pris en considération le niveau des responsabilités exercées par les fonctionnaires promouvables qu’à titre subsidiaire, avant de se raviser lors de l’audience, il ressort en tout état de cause du rejet de la réclamation, dont la motivation est supposée coïncider avec celle de la décision de ne pas promouvoir le requérant au grade AST 2 (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 11 juin 1996, Anacoreta Correia/Commission, T‑118/95, point 82) que « les rapports de notation […], l’utilisation dans l’exercice de leurs fonctions des langues autre que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie […] ainsi que, le cas échéant, le niveau des responsabilités exercées, ont constitué des éléments déterminants dans l’examen [par la commission consultative de promotion] des mérites aux fins de la promotion ». L’AIPN s’étant fondée, pour adopter les décisions de promotion, sur les travaux de la commission consultative de promotion, dont il vient d’être rappelé qu’ils ont comporté à titre principal, et non à titre subsidiaire, l’examen comparatif des niveaux des responsabilités exercées par les fonctionnaires promouvables, il s’ensuit que le requérant n’établit pas à suffisance de droit que le niveau des responsabilités exercées n’a pas été pris en compte par l’AIPN, à titre principal, dans le cadre de l’examen comparatif des mérites. En conséquence, la première branche du premier moyen doit être rejetée.

61      S’agissant de la deuxième branche du premier moyen, il suffit de relever, pour la rejeter, que le requérant ne fournit aucun indice au soutien de son allégation, selon laquelle l’AIPN aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation du niveau des responsabilités qu’il exerçait ainsi que de ses mérites, ce dont témoignerait la circonstance qu’auraient été promus des fonctionnaires de niveau de responsabilités et de mérites manifestement inférieurs aux siens, susceptible de démontrer que l’AIPN aurait effectivement promu de tels fonctionnaires. Or, selon une jurisprudence constante, d’une part, un acte administratif jouit d’une présomption de légalité et, d’autre part, la charge de la preuve pèse, par principe, sur celui qui allègue, de sorte qu’il incombe au requérant de fournir à tout le moins des indices suffisamment précis, objectifs et concordants de nature à soutenir la véracité ou la vraisemblance des faits à l’appui de sa prétention (arrêt du Tribunal du 4 février 2010, Wiame/Commission, F‑15/08, point 21). Par conséquent, un requérant ne disposant ni de preuve ni, à tout le moins, d’un faisceau d’indices doit accepter la présomption de légalité attachée aux décisions adoptées en matière de promotion et ne saurait exiger du Tribunal qu’il prenne lui-même connaissance de tous les rapports de notation des autres candidats à la promotion et qu’il procède à l’examen des niveaux de responsabilités exercées par les candidats à la promotion afin de déterminer si l’AIPN a commis une erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle a décidé de ne pas promouvoir le requérant.

62      Il en est d’autant plus ainsi lorsque, comme en l’espèce, l’AIPN a indiqué dans le rejet de la réclamation qu’il ressortait « d’un examen comparatif des appréciations analytiques et d’ordre général des rapports de notation, des connaissances et des niveaux de responsabilités que les mérites des autres fonctionnaires proposés pour la promotion pouvaient être considérés comme égaux ou supérieurs » à ceux du requérant.

63      Pour ce qui est de l’exception d’irrecevabilité soulevée par le Conseil à l’encontre de la troisième branche du premier moyen au motif que le fait que l’AIPN ait procédé à l’exercice de promotion 2008 sans attendre l’établissement des rapports de notation 2006/2007 ne ferait pas personnellement grief au requérant dès lors qu’il a concerné l’ensemble du personnel du secrétariat général, il y a lieu d’observer que, si, selon une jurisprudence constante, un fonctionnaire n’est pas habilité à agir dans l’intérêt de la loi ou des institutions et ne peut faire valoir, à l’appui d’un recours en annulation, que les griefs qui lui sont personnels (arrêt du Tribunal du 23 janvier 2007, Chassagne/Commission, F‑43/05, point 100), il suffit que l’illégalité alléguée ait eu des conséquences sur la situation juridique du requérant, pour que le grief qu’il en tire soit considéré comme un grief personnel. Or, en l’espèce, la situation juridique personnelle du requérant a été affectée par le comportement collectif de l’administration, de sorte que le grief que celui-ci formule à l’égard de ce comportement doit être considéré comme recevable.

64      Sur le fond, il convient de faire observer que, si, selon une jurisprudence constante, le rapport de notation constitue un élément indispensable d’appréciation chaque fois que la carrière d’un fonctionnaire est prise en considération en vue de l’adoption d’une décision concernant sa promotion (voir, notamment, arrêt de la Cour du 17 décembre 1992, Moritz/Commission, C‑68/91, point 16), l’article 43 du statut n’impose l’établissement d’un rapport de notation que tous les deux ans. Sachant que le statut ne prévoit pas que l’exercice de promotion doit avoir la même périodicité que l’exercice de notation, force est de constater que le statut n’exclut pas qu’une promotion puisse être décidée sans que l’AIPN ne dispose d’un rapport de notation récent.

65      Certes, ce dont le requérant fait grief à l’administration n’est pas tant d’avoir omis de tenir compte d’une période travaillée pour décider des promotions mais de ne pas avoir retardé l’exercice de promotion afin de disposer du rapport de notation portant sur une période d’évaluation close et précédant immédiatement l’exercice de promotion. Néanmoins, compte tenu de ce que ni le statut ni les règles internes au Conseil n’imposent de synchronisation entre les exercices de notation et de promotion et que l’administration dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour organiser la procédure de promotion, il y a lieu de considérer que, même s’il aurait été souhaitable que l’administration s’efforce de disposer des rapports de notation 2006/2007 pour l’exercice de promotion 2008, l’absence de prise en compte, à titre exceptionnel, desdits rapports ne constitue pas une illégalité, particulièrement lorsque, comme en l’espèce, l’ensemble des fonctionnaires promouvables ont été traités de façon identique.

66      Il en est d’autant plus ainsi que, selon la jurisprudence, le fait pour l’AIPN de ne pas disposer du rapport de notation le plus récent d’un des candidats, lorsqu’elle procède à l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables, n’est pas susceptible d’entacher la procédure de promotion d’une irrégularité lorsque cette absence de rapport de notation est due au déroulement normal de la procédure de notation (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 15 novembre 2001, Sebastiani/Commission, T‑194/99, points 45, 46 et 49).

67      Ainsi, le Conseil ayant pu, à bon droit, procéder, pour l’exercice de promotion 2008, à l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables au grade AST 2 sur le fondement des seuls rapports de notation 2005/2006, le requérant ne saurait tirer argument, pour demander l’annulation de la décision de ne pas le promouvoir au titre de cet exercice, de ce que l’AIPN n’a disposé dans son seul cas que d’un rapport de notation établi pour une période de seulement treize mois au cours de laquelle, en outre, il était fonctionnaire stagiaire. En effet, la nomination d’un fonctionnaire étant susceptible d’intervenir, selon les besoins du service, indépendamment de la date de début de la période d’évaluation dans le cadre de l’exercice de notation, il est inévitable que les fonctionnaires nouvellement nommés soient évalués sur une période plus courte que celle retenue pour l’évaluation de leurs collègues.

68      Enfin, à considérer que le requérant soulèverait également une erreur manifeste d’appréciation en ce que l’administration aurait mal apprécié son niveau de responsabilités au motif qu’elle n’aurait pas disposé des rapports de notation 2006/2007, il y aurait lieu également de rejeter ce grief. En effet, dès lors que, à titre exceptionnel, l’AIPN peut baser un exercice de promotion sur des rapports établis pour une période expirant, comme en l’espèce, environ 19 mois avant la date de lancement de l’exercice de promotion en question, il doit être admis qu’elle est en droit d’apprécier les autres critères de l’article 45 en se référant uniquement à cette même période. En toute hypothèse le grief ne pourrait qu’être rejeté, car les responsabilités prétendument omises de l’appréciation de l’administration, à savoir celles de coordinateur d’équipe au sein du service du tri du courrier, figuraient déjà dans son rapport de notation 2005/2006 de sorte que l’AIPN a pu en tenir compte.

69      Il s’ensuit que la troisième branche du premier moyen et, par voie de conséquence, l’ensemble du premier moyen doit être rejeté.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

70      Le requérant soutient, sans autre explication, que la décision de ne pas le promouvoir au grade AST 2 au titre de l’exercice de promotion 2008 est insuffisamment motivée.

71      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, si l’AIPN n’est pas tenue de faire figurer dans les décisions de non-promotion, la motivation de ces décisions, elle est, en revanche, tenue d’apporter cette motivation au stade du rejet de la réclamation d’un candidat non promu (voir, en ce sens, arrêt Anacoreta Correia/Commission, précité, point 82 ; arrêt du Tribunal du 8 octobre 2008, Barbin/Parlement, F‑81/07, point 27).

72      De plus, il doit être précisé que l’obligation de motivation suppose que le destinataire d’une décision faisant grief soit mis à même de comprendre, d’une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l’administration. Ainsi, l’administration est tenue, en fonction de ces circonstances, de fournir à l’intéressé des éléments d’information spécifiques à son cas, sans pouvoir se contenter de considérations générales ou d’une simple référence à la régularité de la procédure suivie, étant rappelé qu’en tout état de cause, les pures clauses de style et les énonciations abstraites, dépourvues de lien direct avec les détails de l’affaire, ne satisfont pas aux exigences de motivation (voir, notamment, arrêt du Tribunal de première instance du 1er mars 2005, Smit/Europol, T‑143/03, points 37 et 38).

73      En l’espèce, force est de constater que les explications fournies par le Conseil dans le rejet de la réclamation au sujet des raisons ayant conduit l’AIPN à adopter la décision de ne pas promouvoir le requérant au titre de l’exercice de promotion 2008 sont stéréotypées puisqu’elles se limitent à l’affirmation selon laquelle la décision de ne pas promouvoir le requérant satisfait aux conditions légales pour le motif qu’« il ressort d’un examen comparatif des appréciations analytiques et d’ordre général des rapports de notation, des connaissances et des niveaux de responsabilités que les mérites des quatre fonctionnaires proposés pour la promotion pouvaient être considérés comme supérieurs [à ceux du requérant] ».

74      Pour autant, la décision de ne pas promouvoir le requérant au grade AST 2 au titre de l’exercice de promotion 2008 ne saurait être annulée pour violation de l’obligation de motivation. En effet, il convient de rappeler que, si l’obligation de motivation a pour but de permettre au destinataire de l’acte d’en apprécier le bien-fondé et, par suite, l’opportunité d’introduire un recours devant le Tribunal et, à ce dernier, de pouvoir exercer son contrôle sur la légalité dudit acte (voir, arrêt du Tribunal du 10 septembre 2009, Behmer/Parlement, F‑124/07, point 58, et la jurisprudence citée), une décision est suffisamment motivée si elle est intervenue dans un contexte connu du fonctionnaire concerné, susceptible de lui permettre de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir, notamment, arrêt du Tribunal 23 novembre 2010, Gheysens/Conseil, F‑8/10, point 63).

75      L’étendue de l’obligation de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances concrètes, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications (arrêts du Tribunal de première instance du 26 janvier 1995, Pierrat/Cour de justice, T‑60/94, points 31 et 32 ; du 27 avril 1999, Thinus/Commission, T‑283/97, point 73, du 25 octobre 2005, Salazar Brier/Commission, T‑83/03, point 78 et du 23 novembre 2006, Lavagnoli/Commission, T‑422/04, point 69). Ainsi, s’agissant de la motivation d’une décision adoptée dans le cadre d’une procédure affectant un grand nombre d’individus, telle une procédure de promotion, il ne saurait être exigé de l’AIPN qu’elle motive sa décision à l’occasion du rejet de la réclamation au-delà des griefs invoqués dans ladite réclamation, en expliquant notamment pour quelles raisons chacun des fonctionnaires promouvables avaient des mérites supérieurs à ceux de l’auteur de la réclamation.

76      En l’espèce, il est constant que, dans sa réclamation, le requérant a soulevé, de façon suffisamment détaillée pour que l’administration en comprenne la portée, un grief tiré de ce que l’AIPN n’a tenu compte que de façon facultative du niveau des responsabilités exercées par chaque fonctionnaire promouvable, un grief tiré de ce que certains fonctionnaires auraient été promus alors que le niveau des responsabilités qu’ils exerçaient était inférieur au niveau des responsabilités exercées par le requérant, ainsi qu’un grief tiré de ce que le Conseil n’aurait pas pris les dispositions nécessaires à l’établissement, en temps utile, des rapports de notation 2006/2007, ce qui aurait eu pour conséquence que l’AIPN n’aurait pas pu tenir compte de l’excellence de ses mérites et du niveau effectif des responsabilités qu’il a exercées pendant la période allant du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2007.

77      Or, le Tribunal estime que le rejet de la réclamation contenait, en réponse aux différents points soulevés dans la réclamation, des précisions suffisantes pour permettre au requérant d’apprécier le bien-fondé des griefs qu’il avait présentés et, par suite, l’opportunité d’introduire un recours devant le Tribunal. En effet, le rejet de la réclamation mentionnait, comme il a été relevé au point 59 du présent arrêt, que « les rapports de notation […], l’utilisation dans l’exercice de leurs fonctions des langues autre que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie […] ainsi que, le cas échéant, le niveau des responsabilités exercées, ont constitué des éléments déterminants dans l’examen [par la commission consultative de promotion] des mérites aux fins de la promotion ». En outre, le rejet de la réclamation a notamment rappelé que la CP no 39/08 avait expliqué les raisons du choix de l’AIPN de baser l’exercice de promotion sur les rapports de notation 2005/2006, à savoir qu’« attendre l’achèvement complet de l’exercice de notation 2006/2007, commencé le 22 février 2008 par la publication de la [communication au personnel] no 14/08, aurait conduit l’AIPN à exagérément retarder l’exercice de promotion 2008 et même à prendre le risque de ne pas recueillir tous les rapports de notation [de sorte que d]ans cette dernière hypothèse, les commissions consultatives de promotion n’auraient pas pu effectuer la comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables sur une base égale, en violation du principe d’égalité de traitement et de la jurisprudence ».

78      Par conséquent, il convient de rejeter le deuxième moyen comme étant non fondé.

79      Aucun des moyens soulevés n’étant fondé, il convient de rejeter les conclusions en annulation de la décision de ne pas promouvoir le requérant au grade AST 2 au titre de l’exercice de promotion 2008.

80      Le requérant ayant fondé ses conclusions tenant à l’annulation, « pour autant que de besoin », des décisions de promouvoir au grade AST 2 des fonctionnaires supposés moins méritants que lui sur la prémisse que la décision de ne pas le promouvoir au grade AST 2 au titre de l’exercice de promotion 2008 serait illégale, il convient, par voie de conséquence, de rejeter lesdites conclusions.

81      Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

82      Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

83      Il résulte des motifs énoncés ci-dessus que le requérant a succombé en son recours. En outre, le Conseil a, dans ses conclusions, expressément demandé que le requérant soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, il y a donc lieu de condamner le requérant à supporter, outre ses propres dépens, les dépens exposés par le Conseil.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Merhzaoui supporte ses dépens et ceux du Conseil de l’Union européenne.

Boruta

Van Raepenbusch

Rofes i Pujol

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 novembre 2011.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       S. Van Raepenbusch


* Langue de procédure : le français.