Language of document : ECLI:EU:C:2007:253

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JÁN MAZÁK

présentées le 26 avril 2007 (1)

Affaire C‑451/05

Européenne et Luxembourgeoise d’investissements SA (Elisa)

contre

Directeur général des impôts

et

Ministère public

[demande de décision préjudicielle formée par la Cour de cassation (France)]

«Impôts directs – Taxe sur la valeur vénale des immeubles possédés en France – Libre circulation des capitaux – Justification – Efficacité du contrôle fiscal – Lutte contre la fraude et l’évasion fiscales»





1.        Le présent renvoi préjudiciel vise essentiellement à déterminer si une législation nationale telle que la législation française prévoyant une taxe de 3 % sur la valeur vénale des immeubles (ci‑après la «taxe litigieuse») est compatible avec le droit communautaire, en particulier les dispositions du traité CE relatives à la liberté d’établissement et à la libre circulation des capitaux, et à résoudre certaines autres questions d’interprétation qui se posent dans ce contexte.

2.        La législation nationale accorde aux personnes morales étrangères une exonération de la taxe de 3 % à condition qu’il existe une convention d’assistance administrative ou de non‑discrimination en matière fiscale conclue avec l’État membre où la personne morale a son siège de direction effective (2). Le but déclaré de la législation nationale est d’assurer un contrôle fiscal efficace et de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales en ce qui concerne l’impôt de solidarité sur la fortune prélevé en France.

I –    Législation pertinente

A –    Législation communautaire

3.        L’article 1er de la directive 77/799/CEE du Conseil, du 19 décembre 1977, concernant l’assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs (3) (ci‑après la «directive 77/799» ou la «directive»), est formulé comme suit:

«Dispositions générales

1. Les autorités compétentes des États membres échangent, conformément à la présente directive, toutes les informations susceptibles de leur permettre l’établissement correct des impôts sur le revenu et sur la fortune.

2. Sont considérés comme impôts sur le revenu et sur la fortune, quel que soit le système de perception, les impôts perçus sur le revenu total, sur la fortune totale ou sur des éléments du revenu ou de la fortune, y compris les impôts sur les gains provenant de l’aliénation de biens mobiliers ou immobiliers, les impôts sur le montant des salaires payés par les entreprises, ainsi que les impôts sur les plus-values.

3. Les impôts actuels visés au paragraphe 2 sont notamment les suivants: […] en France: impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés, taxe professionnelle, taxe foncière sur les propriétés bâties, taxe foncière sur les propriétés non bâties […]

4. Le paragraphe 1 est également applicable aux impôts de nature identique ou analogue qui viendraient s’ajouter aux impôts visés au paragraphe 3 ou à les remplacer. Les autorités compétentes des États membres se communiquent entre elles, ainsi qu’à la Commission, les dates d’entrée en vigueur de ces impôts.

[…]»

4.        L’article 8 de la directive 77/799 dispose:

«Limites de l’échange d’informations

1. La présente directive n’impose pas l’obligation de faire effectuer des recherches ou de transmettre des informations lorsque la législation ou la pratique administrative de l’État membre qui devrait fournir les informations n’autorisent l’autorité compétente ni à effectuer ces recherches, ni à recueillir ou à utiliser ces informations pour les propres besoins de cet État.

2. La transmission d’informations peut être refusée dans le cas où elle conduirait à divulguer un secret commercial, industriel ou professionnel ou un procédé commercial, ou une information dont la divulgation serait contraire à l’ordre public.

3. L’autorité compétente d’un État membre peut refuser la transmission d’informations lorsque l’État intéressé n’est pas en mesure de fournir une transmission d’informations équivalentes pour des raisons de fait ou de droit.»

5.        L’article 11 de la directive 77/799 dispose:

«Applicabilité de dispositions plus larges en matière d’assistance

Les dispositions qui précèdent ne portent pas atteinte à l’exécution d’obligations plus larges quant à l’échange d’informations qui résulteraient d’autres actes juridiques.»

B –    Législation nationale

1.      Taxe de 3 % sur les actifs immobiliers détenus par des personnes morales

6.        En vertu de l’article 990 D, premier alinéa, du code général des impôts français (ci‑après le «CGI»), les personnes morales qui, directement ou par personne interposée, possèdent un ou plusieurs immeubles situés en France ou sont titulaires de droits réels portant sur ces biens sont redevables d’une taxe annuelle égale à 3 % de la valeur vénale de ces immeubles ou droits.

7.        Cette taxe s’applique à toutes les formes de personnes morales, y compris les sociétés, les fondations et les associations, mais les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé en sont exonérées (4).

8.        La taxe est due à raison des biens immobiliers possédés au 1er janvier d’une année d’imposition donnée.

9.        Des exonérations de cette taxe sont prévues à l’article 990 E du CGI, qui dispose:

«La taxe prévue à l’article 990 D n’est pas applicable:

[…]

2º Aux personnes morales qui, ayant leur siège dans un pays ou territoire ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, déclarent chaque année, au plus tard le 15 mai, au lieu fixé par l’arrêté prévu à l’article 990 F, la situation, la consistance et la valeur des immeubles possédés au 1er janvier, l’identité et l’adresse de leurs associés à la même date ainsi que le nombre des actions ou parts détenues par chacun d’eux;

3º Aux personnes morales qui ont leur siège de direction effective en France et aux autres personnes morales qui, en vertu d’un traité, ne doivent pas être soumises à une imposition plus lourde, lorsqu’elles communiquent chaque année, ou prennent et respectent l’engagement de communiquer à l’administration fiscale, sur sa demande, la situation et la consistance des immeubles possédés au 1er janvier, l’identité et l’adresse de leurs actionnaires, associés ou autres membres, le nombre des actions, parts ou autres droits détenus par chacun d’eux et la justification de leur résidence fiscale. […]»

10.      En vertu de l’article 990 E, 1°, une exonération est également accordée aux personnes morales dont les actifs immobiliers situés en France représentent moins de 50 % de leurs actifs totaux situés en France (c’est‑à‑dire les sociétés qui ne sont pas des «sociétés à prépondérance immobilière») (5).

2.      Impôt de solidarité sur la fortune (6)

11.      D’après le dossier de la présente affaire et les observations du gouvernement français, la taxe imposée par la législation nationale en cause vise à assurer un contrôle fiscal efficace et à empêcher la fraude et l’évasion fiscales en ce qui concerne l’impôt de solidarité sur la fortune.

12.      La notion d’impôt sur la fortune est connue de la Cour, qui l’a décrit comme un impôt direct établi en fonction de la capacité contributive du contribuable, comme l’impôt sur le revenu, et a indiqué que l’impôt sur la fortune est souvent considéré comme un complément de l’impôt sur le revenu, portant notamment sur le capital (7).

13.      Les dispositions pertinentes relatives à l’impôt de solidarité sur la fortune (ci‑après aussi l’«impôt sur la fortune») figurent aux articles 885 A et suivants du CGI. Il s’agit d’un impôt annuel, dû par les personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France (au 1er janvier d’une année donnée), si leurs actifs ont une valeur supérieure à un certain seuil (750 000 euros en 2006). Il est perçu selon un tarif progressif applicable à la partie des actifs qui dépasse le seuil.

14.      En ce qui concerne le champ d’application territorial de l’impôt, il est dû sur tous les actifs appartenant aux personnes concernées, y compris ceux situés à l’étranger (en l’absence d’une convention fiscale qui en dispose autrement). Les personnes dont le domicile fiscal est situé hors de France (c’est‑à‑dire les non‑résidents) sont assujetties à l’impôt sur la fortune uniquement à raison de leurs actifs situés en France, si la valeur de ces derniers dépasse le seuil (8). Ici aussi, une convention fiscale peut en disposer autrement, en particulier en répartissant le droit à l’impôt entre les deux États concernés. En outre, les investissements sont exonérés pour les non‑résidents, sauf lorsqu’ils concernent des actifs immobiliers (par exemple les participations dans des sociétés à prépondérance immobilière).

15.      Sauf exonération expressément prévue par la loi, tous les actifs appartenant à des particuliers sont imposables, y compris les actifs immobiliers (terrains, maisons, appartements), les entreprises non constituées en société, les obligations et actions, les créances, les voitures, l’or et les devises. Les actifs immobiliers doivent être évalués selon leur valeur vénale, c’est‑à‑dire le prix auquel ils auraient pu normalement être vendus au début de l’année.

C –    Droit international

16.      L’article 21, paragraphe 1, de la convention conclue le 1er avril 1958 entre la République française et le Grand‑Duché de Luxembourg, tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative réciproque en matière d’impôts sur le revenu et sur le capital (ci‑après la «convention»), prévoit que les nationaux, les sociétés ou les autres groupements de l’un des États contractants ne sont pas soumis dans l’autre État à des impôts autres ou plus élevés que ceux qui frappent les nationaux, les sociétés ou les autres groupements de ce dernier État.

17.      En vertu de l’article 22, paragraphe 1, de la convention, les autorités administratives supérieures des deux États peuvent, sur demande, échanger les renseignements nécessaires pour une application régulière de la convention que les législations fiscales des deux États permettent d’obtenir, dans le cadre de la pratique administrative normale.

18.      Par un échange de lettres du 8 septembre 1970, les deux États ont exclu du champ d’application de la convention les sociétés holdings, au sens de la législation luxembourgeoise relative à ces sociétés (aux fins de la présente procédure, la loi du 31 juillet 1929 et l’arrêté‑loi du 27 décembre 1937) et les revenus qu’une personne ayant son domicile fiscal en France tire de ces sociétés ainsi que les participations qu’elle a dans de telles sociétés.

II – Contexte factuel, procédure et questions préjudicielles

19.      La société Européenne et Luxembourgeoise d’investissements SA (ci‑après «Elisa») est une société holding de droit luxembourgeois, relevant de la loi du 31 juillet 1929 sur le régime fiscal des sociétés de participations.

20.      D’après la décision de renvoi, Elisa possède indirectement des immeubles sur le territoire français et est donc soumise aux dispositions de l’article 990 D du CGI imposant une taxe sur la valeur vénale des immeubles possédés en France par des personnes morales.

21.      La décision de renvoi indique ensuite qu’Elisa a souscrit les déclarations fiscales prescrites par la loi, mais qu’elle n’a pas acquitté les taxes correspondantes. Après avoir notifié des redressements de taxe le 18 décembre 1997, l’administration des impôts a procédé à leur recouvrement le 10 juin 1998. Sa réclamation ayant été rejetée, Elisa a fait assigner le directeur général des impôts devant le tribunal de grande instance de Paris afin d’obtenir la décharge des taxes litigieuses.

22.      Après deux décisions négatives, l’une rendue par le tribunal de grande instance de Paris, l’autre par la cour d’appel de Paris, qui tous deux ont estimé qu’Elisa ne remplissait pas les conditions énoncées à l’article 990 E, 2° et 3°, du CGI prévoyant l’exonération de la taxe litigieuse, Elisa a formé un pourvoi devant la Cour de cassation.

23.      Par une ordonnance du 13 décembre 2005, reçue au greffe de la Cour le 19 décembre 2005, la Cour de cassation a décidé de surseoir à statuer et de renvoyer l’affaire à la Cour pour qu’elle se prononce à titre préjudiciel sur les questions suivantes:

«1)      Les articles 52 et suivants et 73 B et suivants du traité CE s’opposent-ils à une législation telle que celle prévue par les articles 990 D et suivants du Code général des impôts qui accorde aux personnes morales qui ont leur siège de direction effective en France la faculté de bénéficier de l’exonération de la taxe sur la valeur vénale des immeubles possédés en France et qui subordonne cette faculté, en ce qui concerne les personnes morales qui ont leur siège de direction effective sur le territoire d’un autre pays, quand bien même s’agirait-il d’un État membre de l’Union européenne, à l’existence d’une convention d’assistance administrative conclue entre la France et cet État en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ou à la circonstance que, par application d’un traité comportant une clause de non-discrimination selon la nationalité, ces personnes morales ne doivent pas être soumises à une imposition plus lourde que celle à laquelle sont assujetties les personnes morales ayant leur siège de direction effective en France?

2)      Une taxe telle que la taxe litigieuse constitue-t-elle un impôt sur la fortune au sens de l’article 1er de la directive du Conseil du 19 décembre 1977 concernant l’assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs et indirects?

3)      Dans l’affirmative, les obligations mises à la charge des Ėtats membres en matière d’assistance mutuelle fiscale par la directive du 19 décembre 1977, précitée, s’opposent-elles à l’application par les États membres, en vertu d’une convention bilatérale d’assistance administrative fiscale, d’obligations de même nature excluant une catégorie de contribuables telle que les sociétés holdings luxembourgeoises?

4)      Les articles 52 et suivants et 73 B et suivants du traité CE imposent-ils à un État membre qui a conclu avec un autre pays, membre ou non de l’Union européenne, une convention comportant une clause de non-discrimination en matière fiscale d’accorder à la personne morale ayant son siège de direction effective sur le territoire d’un autre État membre, lorsque cette personne morale possède un ou plusieurs immeubles sur le territoire du premier État membre et que le second Ėtat membre n’est pas lié au premier par une clause équivalente, les mêmes avantages que ceux prévus par cette clause?»

III – Procédure devant la Cour

24.      Elisa, la Commission des Communautés européennes et les gouvernements français, hellénique, italien et néerlandais ont présenté des observations écrites conformément à l’article 20 du statut de la Cour de justice.

25.      Le 24 janvier 2007 a eu lieu une audience au cours de laquelle les représentants d’Elisa ainsi que les agents des gouvernements français, hellénique, néerlandais et du Royaume-Uni ont présenté leurs observations orales.

IV – Remarques préliminaires

 Ordre des réponses aux questions déférées

26.      Pour comprendre le contenu et l’ordre des questions posées par la Cour de cassation, il peut être utile de noter que l’administration française des impôts et les juridictions inférieures ont estimé que les conditions énoncées aux articles 990 D et 990 E n’étaient pas remplies. Sur ce point, elles ont considéré que la directive 77/799 n’était pas pertinente, en particulier en raison de l’existence d’une convention d’assistance administrative entre la République française et le Grand‑Duché de Luxembourg, qui excluait expressément les «holdings 1929» de son champ d’application.

27.      Dans ce contexte, la Cour de cassation demande si les dispositions du traité relatives au droit d’établissement (articles 43 CE et suivants) et à la libre circulation des capitaux (articles 56 CE et suivants) s’opposent à ce qu’un État membre maintienne une taxe sur la valeur vénale des immeubles dont sont exonérées les personnes morales ayant leur domicile fiscal en France, alors que, pour les personnes morales dont le domicile est situé dans un autre État membre, l’exonération est subordonnée à l’existence d’une convention bilatérale comportant soit une clause d’assistance administrative visant à lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, soit une clause de non‑discrimination selon la nationalité, en vertu de laquelle les personnes morales non résidentes ne peuvent pas être soumises à une imposition plus lourde que les personnes morales ayant leur siège de direction effective en France.

28.      Les deuxième et troisième questions ont pour but de déterminer si une clause d’assistance administrative visant à lutter contre la fraude et l’évasion fiscales est susceptible de s’appliquer en l’espèce. La directive 77/799 et la convention conclue entre la République française et le Grand‑Duché de Luxembourg prévoient toutes deux une assistance administrative.

29.      Puisque, pour justifier la taxe litigieuse, le gouvernement français invoque l’absence d’une assistance administrative appropriée entre la République française et le Grand‑Duché de Luxembourg en ce qui concerne les holdings 1929, il sera utile de clarifier la question de savoir si un instrument de coopération administrative est applicable – sous la forme soit de la directive 77/799, soit de la convention – avant de répondre à la question plus générale de la compatibilité du mécanisme fiscal litigieux avec les libertés fondamentales. Nous examinerons donc les deuxième et troisième questions avant la première.

V –    Deuxième question

30.      Par sa deuxième question, la Cour de cassation souhaite, en substance, savoir si la taxe litigieuse entre dans le champ d’application de la directive 77/799, tel qu’il est défini par son article 1er.

A –    Principales conclusions des parties

31.      Selon Elisa, le gouvernement hellénique et la Commission, la taxe litigieuse relève des impôts visés par la directive 77/799.

32.      Le gouvernement français est de l’avis contraire. Il soutient, en particulier, que la taxe n’est pas mentionnée à l’article 1er, paragraphe 3, de la directive comme étant incluse parmi les impôts nationaux entrant dans le champ d’application matériel de la directive. En outre, elle ne frappe pas les personnes physiques mais les personnes morales sur leurs biens immobiliers. Enfin, son objet est d’empêcher la fraude et l’évasion fiscales et non de taxer le capital pour accroître les recettes fiscales de l’État.

B –    Appréciation juridique

33.      Pour situer le contexte, il peut être utile d’observer que la directive 77/799, concernant l’assistance mutuelle dans le domaine des impôts directs, a été adoptée pour lutter contre la fraude et l’évasion fiscales (9). Elle établit un mécanisme de coopération renforcée entre les administrations fiscales des États membres et facilite l’échange d’informations qui peuvent être utiles pour l’établissement correct des impôts sur le revenu et sur la fortune (10).

34.      En vertu de l’article 1er, paragraphe 1, de la directive, les informations dont l’échange est pertinent aux fins de la directive sont celles concernant les «impôts sur le revenu et sur la fortune». L’article 1er, paragraphe 2, indique que «[s]ont considérés comme impôts sur le revenu et sur la fortune, quel que soit le système de perception, les impôts perçus sur le revenu total, sur la fortune totale ou sur des éléments du revenu ou de la fortune, y compris les impôts sur les gains provenant de l’aliénation de biens mobiliers ou immobiliers, les impôts sur le montant des salaires payés par les entreprises, ainsi que les impôts sur les plus-values». Étant donné l’usage des termes «y compris», il est évident que la liste présentée n’est pas censée être exhaustive.

35.      Il résulte de l’article 1er, paragraphe 4, qui indique que «[l]e paragraphe 1 est également applicable aux impôts de nature identique ou analogue qui viendraient s’ajouter aux impôts visés au paragraphe 3 ou à les remplacer», que la liste, figurant à l’article 1er, paragraphe 3, des impôts nationaux entrant dans le champ d’application de la directive n’est pas censée non plus être exhaustive. À cet égard, il y a lieu de noter que la taxe litigieuse n’est pas mentionnée parmi les impôts français énumérés, mais que, selon le gouvernement français, l’impôt de solidarité sur la fortune, qui n’existait pas au moment de l’adoption de la directive, a été ajouté ultérieurement.

36.      Sur ce point, il convient de faire observer que la taxe litigieuse est étroitement liée à l’impôt de solidarité sur la fortune. En effet, la taxe litigieuse a été introduite dans le but de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales en matière d’impôt de solidarité sur la fortune, impôt qui, en tant que tel, entre dans le champ d’application de la directive 77/799. Selon le gouvernement français, la taxe litigieuse vise à inciter les personnes morales qui possèdent des immeubles en France ou sont titulaires d’autres droits réels sur ces biens, mais qui n’ont pas leur domicile fiscal en France, à fournir des informations relatives à l’identité de leurs actionnaires et, par ce moyen, à dissuader les personnes physiques de se dissimuler derrière ces personnes morales pour échapper à l’impôt de solidarité sur la fortune. Cela signifie que l’existence de l’impôt de solidarité sur la fortune et la volonté d’assurer sa perception correcte et complète sont la raison d’être de la taxe litigieuse.

37.      En outre, la taxe peut être considérée, en fait, comme une sorte de compensation forfaitaire pour les recettes perdues par l’État français en matière d’impôt de solidarité sur la fortune du fait de la fraude et de l’évasion fiscales. Donc, bien que, selon les observations du gouvernement français, la taxe ne vise pas principalement à accroître les recettes fiscales de l’État, mais à empêcher la fraude et l’évasion fiscales, l’État français, en percevant la taxe litigieuse, compense, néanmoins, dans une certaine mesure, la perte subie en matière d’impôt de solidarité sur la fortune et espère, par ce moyen, dissuader les personnes physiques de mettre en œuvre des stratégies de fraude et d’évasion fiscales.

38.      Il en résulte que la taxe litigieuse peut être considérée comme un complément à l’impôt de solidarité sur la fortune et, comme telle, il serait illogique d’exclure la première du champ d’application de la directive, alors que le second y demeure soumis.

39.      On peut aussi ajouter que la taxe litigieuse est manifestement prélevée sur un élément de la fortune, à savoir les actifs immobiliers. Il ressort de l’arrêt Halliburton Services que, du moins en ce qui concerne les taxes sur les actifs immobiliers, la Cour interprète la notion d’impôt sur la fortune de manière relativement large lorsqu’elle définit le champ d’application matériel de la directive 77/799 (11).

40.      De plus, le principe de l’interprétation uniforme du droit communautaire (12) implique que le nom que le droit national donne à une taxe particulière ne peut être considéré comme significatif pour déterminer si cette taxe doit être tenue pour un impôt sur la fortune au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de la directive.

41.      Enfin, il résulte de l’article 1er, paragraphe 2, que la manière dont la taxe est perçue n’est pas non plus pertinente à cette fin. Donc, le fait que la taxe litigieuse soit due par une personne morale n’est pas, à notre avis, d’une grande importance.

42.      Dans ces circonstances, il y a lieu de répondre à la deuxième question qu’une taxe telle que celle en cause en l’espèce constitue un impôt sur la fortune au sens de l’article 1er de la directive 77/799.

VI – Troisième question

43.      Par sa troisième question, la Cour de cassation demande, en substance, si les obligations imposées aux États membres par la directive 77/799 en matière d’assistance mutuelle dans le domaine fiscal s’opposent à ce que les États membres exécutent, au titre d’une convention bilatérale d’assistance administrative dans le domaine fiscal, des obligations de même nature excluant une catégorie de contribuables telle que les sociétés holdings luxembourgeoises.

44.      En l’espèce, comme il ressort de notre réponse à la deuxième question, la taxe litigieuse entre dans le champ d’application de la directive 77/799, qui institue des procédures harmonisées de coopération administrative entre les États membres en ce qui concerne l’établissement correct des impôts sur le revenu et sur la fortune. Les dispositions de cette directive concernant la coopération administrative sont donc applicables.

45.      En même temps, une convention bilatérale conclue entre la République française et le Grand‑Duché de Luxembourg prévoit une assistance administrative, mais exclut certaines catégories de contribuables, à savoir les holdings 1929, de son champ d’application, et donc du bénéfice de la clause de coopération administrative.

46.      À la lumière de ce qui précède, nous répondrons à la troisième question en déterminant la relation existant entre la directive 77/799, qui est applicable en l’espèce, et les dispositions de la convention bilatérale conclue entre la République française et le Grand‑Duché de Luxembourg, qui prévoit, en principe, une assistance administrative, mais exclut certaines catégories de contribuables, à savoir les holdings 1929.

A –    Principales conclusions des parties

47.      La Commission estime que la directive 77/799 peut, conformément à la jurisprudence constante de la Cour, être invoquée par un État membre pour obtenir des autorités compétentes d’un autre État membre toutes les informations qu’il estime nécessaires pour déterminer le montant exact de l’impôt dont le contribuable est redevable. Comme cette directive a été mise en œuvre dans tous les États membres, un système d’échange d’informations est opérationnel entre la France et le Luxembourg.

48.      Le principe de la primauté du droit communautaire exige aussi que les dispositions de la directive 77/799 soient appliquées par préférence à celles d’une convention bilatérale conclue avec un autre État membre. En effet, conformément à la jurisprudence de la Cour, un État membre ne peut pas ignorer les exigences d’une directive ou d’une autre mesure communautaire contraignante au motif qu’un accord ou une convention conclue avec un autre État membre en dispose autrement.

49.      Elisa considère que les obligations imposées aux États membres par la directive 77/799 font obstacle à ce que les États membres exécutent, au titre d’une convention bilatérale d’assistance administrative dans le domaine fiscal, des obligations de même nature excluant une catégorie de contribuables, telles les sociétés holdings luxembourgeoises. La directive ne permet l’application de la convention que si cette application ne réduit pas l’effet de la directive.

50.      Le gouvernement français considère que les obligations contenues dans la directive 77/799 ne s’opposent pas à ce qu’un État membre conclue une convention sur la même matière excluant une certaine catégorie de contribuables, tels les holdings 1929, de son champ d’application. À l’appui de cette opinion, le gouvernement français fait, en particulier, référence au fait que, conformément à l’article 8 de la directive 77/799, lu en combinaison avec la législation luxembourgeoise pertinente, le Grand‑Duché de Luxembourg a le droit de refuser de satisfaire à des demandes d’informations qui lui sont adressées par d’autres autorités fiscales concernant des renseignements qui seraient nécessaires pour la taxation des holdings 1929. Donc, ni la directive 77/799 ni la convention ne peuvent obliger les autorités luxembourgeoises à fournir à d’autres États membres des informations relatives aux holdings 1929. Par conséquent, c’est donc à bon droit que le gouvernement français refuse d’accorder à ces sociétés le bénéfice de l’exonération qui est subordonnée à l’existence d’une convention d’assistance administrative, puisque les lois luxembourgeoises privent la directive 77/799 de son efficacité sur ce point en ce qui concerne les holdings 1929.

B –    Appréciation juridique

51.      La directive 77/799 est un instrument communautaire qui vise à garantir l’existence d’un niveau minimal d’harmonisation quant à l’assistance et à la coopération administratives entre tous les États membres. Comme telle, elle doit recevoir plein effet et être interprétée et appliquée de manière uniforme dans toute la Communauté (13).

52.      L’article 11 de la directive 77/799 comporte des dispositions expresses régissant la relation de la directive avec d’autres instruments juridiques prévoyant des «obligations plus larges quant à l’échange d’informations». Par une telle disposition, le législateur communautaire avait pour objectif de clarifier les effets juridiques des conventions bilatérales ayant le même objet que la directive que les États membres avaient conclues ou concluraient. Cela était particulièrement important, puisque la directive s’ajoutait à un réseau de conventions bilatérales (ou multilatérales) déjà existantes prévoyant une coopération administrative dans le domaine fiscal (14), et la directive n’avait pas pour objectif de limiter des obligations ou des possibilités existantes en matière d’assistance mutuelle, mais plutôt de créer de telles obligations ou possibilités (15).

53.      Dans ce contexte, une disposition telle que l’article 11 de la directive 77/799 permet aux États membres de maintenir ou de conclure en particulier des accords bilatéraux ayant le même objet que la directive et donc de maintenir ou d’établir une forme de coopération allant au‑delà de celle prévue par la directive. À la lumière des principes d’effectivité et d’application uniforme du droit communautaire, il résulte de l’article 11 de la directive qu’une convention fiscale bilatérale ne peut s’appliquer que dans la mesure où elle comporte, quant à l’échange d’informations, des obligations plus larges que celles imposées par la directive.

54.      À cet égard, on ne peut pas raisonnablement soutenir qu’une disposition dont une certaine catégorie de contribuables est exclue, en l’espèce les holdings 1929, pourrait être considérée, au moins en ce qui concerne les contribuables exclus, comme imposant une obligation plus large que les dispositions de la directive, dont le champ d’application ne comporte pas de telles exclusions. Par conséquent, les dispositions d’une convention bilatérale conclue entre la République française et le Grand‑Duché de Luxembourg, qui prévoit, en principe, une assistance administrative, mais exclut certaines catégories de contribuables, à savoir les holdings 1929, ne peut être applicable en l’espèce.

55.      La conclusion selon laquelle la convention ne peut être appliquée que dans la mesure où elle ne limite en aucune manière l’applicabilité de la directive 77/799, y compris son application aux holdings 1929, est confirmée par la jurisprudence de la Cour, selon laquelle les États membres ne peuvent exciper d’une convention fiscale bilatérale aux fins d’échapper aux obligations qui leur incombent en vertu du traité (16). Il ne serait, donc, pas possible, par exemple, d’exclure certains contribuables du champ d’application de la directive par application d’une convention fiscale bilatérale.

56.      Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de répondre à la troisième question que les obligations imposées aux États membres par la directive 77/799 en ce qui concerne l’assistance mutuelle dans le domaine fiscal ne s’opposent à l’application par les États membres, en vertu d’une convention bilatérale d’assistance administrative dans le domaine fiscal, d’obligations de même nature excluant une catégorie de contribuables telle que les holdings 1929 luxembourgeois que dans la mesure où la mise en œuvre de la convention bilatérale ferait obstacle à l’application de la directive à ces contribuables.

VII – Première question

57.      Par sa première question, la Cour de cassation demande, en substance, si les dispositions du traité relatives au droit d’établissement (articles 43 CE et suivants) et à la libre circulation des capitaux (articles 56 CE et suivants) s’opposent à ce qu’un État membre maintienne une taxe sur la valeur vénale des immeubles, dont les personnes morales résidant en France sont exonérées, alors que, pour les personnes morales résidant dans un autre État membre, l’exonération est subordonnée à l’existence d’une convention bilatérale comportant soit une clause d’assistance administrative pour lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, soit une clause interdisant les discriminations fondées sur la nationalité dans le domaine fiscal, signifiant que les personnes morales résidant dans un État membre autre que la France ne peuvent être imposées plus lourdement que les personnes morales résidant en France.

A –    Principales conclusions des parties

58.      Selon les gouvernements français, hellénique, italien et du Royaume-Uni, les articles 43 CE et 56 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne font pas obstacle à l’existence d’une législation telle que la législation française en cause.

59.      La Commission et Elisa sont d’un avis contraire. En particulier, la Commission considère que seules les dispositions relatives à la libre circulation des capitaux (articles 56 CE et suivants) sont pertinentes en l’espèce. Elle estime que l’article 56 CE s’oppose à l’existence d’une législation nationale telle que celle contenue dans les articles 990 D et 990 E du CGI. Elisa considère que les articles 43 CE et 56 CE s’opposent tous deux à l’existence d’une législation nationale telle que celle contenue dans les articles 990 D et 990 E du CGI.

B –    Quelle(s) est (sont) la (les) liberté(s) fondamentale(s) concernée(s)?

60.      À titre préliminaire, il y a lieu de noter que, bien que la fiscalité directe relève de la compétence des États membres, ceux‑ci doivent néanmoins exercer cette compétence dans le respect du droit communautaire (17), y compris les dispositions énonçant les principes de la liberté d’établissement et de la libre circulation des capitaux.

61.      En l’espèce, les questions posées par la juridiction nationale concernent à la fois la liberté d’établissement (article 43 CE) et la libre circulation des capitaux (articles 56 CE et suivants). Dans ses observations écrites, la Commission a contesté cette approche et a soulevé la question de savoir si la liberté d’établissement avait vraiment un rapport avec le présent litige. Le gouvernement italien paraît partager cet avis. Par conséquent, il est nécessaire d’examiner si, à la lumière des faits de l’espèce, Elisa peut invoquer les règles relatives au droit d’établissement et/ou les règles régissant la libre circulation des capitaux.

62.      La liberté d’établissement, que l’article 43 CE confère aux ressortissants communautaires et qui inclut le droit d’accéder aux activités non salariées et de les exercer ainsi que de constituer et de gérer des entreprises, dans les conditions définies par la législation du pays d’établissement pour ses propres ressortissants, implique, conformément à l’article 48 CE, pour les sociétés constituées en conformité de la législation d’un État membre et ayant leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur principal établissement à l’intérieur de la Communauté européenne, le droit d’exercer leur activité dans l’État membre concerné par l’intermédiaire d’une filiale, d’une succursale ou d’une agence (18).

63.      Conformément à la jurisprudence de la Cour, la notion d’établissement, au sens du traité, est une notion très large, impliquant la possibilité pour un ressortissant communautaire de participer, de façon stable et continue, à la vie économique d’un État membre autre que son État d’origine, et d’en tirer profit, favorisant ainsi l’interpénétration économique et sociale à l’intérieur de la Communauté dans le domaine des activités non salariées (19). Toutefois, pour que les dispositions relatives au droit d’établissement puissent s’appliquer, il est en principe nécessaire qu’une présence permanente dans l’État membre d’accueil soit assurée et, en cas d’acquisition et de possession de biens immobiliers, que la gestion de ces biens soit active (20).

64.      Il semblerait qu’Elisa, en tant que société holding, n’exerce aucune activité commerciale si ce n’est celle consistant à détenir des droits de propriété sur des immeubles en France, mais l’exposé de la juridiction de renvoi et les informations fournies par les parties à la procédure devant la Cour ne sont pas entièrement concluants à cet égard.

65.      En tout cas, il y a lieu de noter que la Cour a constamment considéré les dispositions relatives à l’acquisition et/ou à l’exploitation d’immeubles dans le contexte de la libre circulation des capitaux, même si la juridiction de renvoi, comme dans les affaires Konle (21), Centro di Musicologia Walter Stauffer (22) et Festersen (23), avait aussi fait référence à la liberté d’établissement (24).

66.      Dans ce contexte, la Cour a estimé que le droit d’acquérir, d’exploiter et d’aliéner des biens immobiliers sur le territoire d’un autre État membre constituait le complément nécessaire de la liberté d’établissement (25).

67.      Comme il ressort de la nomenclature des mouvements de capitaux figurant à l’annexe I de la directive 88/361/CEE du Conseil, du 24 juin 1988, pour la mise en œuvre de l’article 67 du traité (article abrogé par le traité d’Amsterdam) (26), les mouvements de capitaux incluent les investissements immobiliers effectués sur le territoire d’un État membre par des non‑résidents. Cette nomenclature a toujours la même valeur indicative pour définir la notion de mouvements de capitaux (27).

68.      Il s’ensuit que la libre circulation des capitaux couvre à la fois la possession et la gestion d’immeubles. Il n’est pas contesté qu’Elisa, dont le siège est situé au Luxembourg, possède des immeubles en France. La situation en cause relève donc des dispositions du traité régissant la libre circulation des capitaux et Elisa peut, en tout cas, invoquer ces dispositions aux fins de la présente procédure.

69.      En outre, l’objet véritable de la disposition en question est, comme nous l’expliquerons ci‑après, d’empêcher la fraude et l’évasion fiscales de la part des personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France, où elles devraient normalement acquitter l’impôt sur la fortune à raison des immeubles situés en France si elles les possédaient en leur nom propre, en tant que personnes physiques. Par conséquent, la taxe litigieuse vise en particulier les investissements immobiliers transfrontaliers, qui n’impliquent pas nécessairement un établissement sur le territoire français. C’est donc le caractère transfrontalier de l’investissement qui peut être affecté par la législation nationale en cause. Les effets restrictifs sur la liberté d’établissement sont simplement la conséquence inéluctable de la restriction imposée à l’égard de la libre circulation des capitaux (28).

70.      Nous estimons, par conséquent, que, en l’espèce, la libre circulation des capitaux doit être le principal critère d’appréciation.

71.      En tout cas, si la juridiction de renvoi devait, eu égard aux circonstances de fait de l’affaire pendante devant elle, parvenir à la conclusion que les dispositions relatives à la liberté d’établissement sont également applicables, il faudrait tenir compte du fait que les considérations exposées ci‑après, en particulier celles concernant l’examen du principe de proportionnalité, devraient aussi s’appliquer en ce qui concerne la liberté d’établissement (29).

C –    Principe de la libre circulation des capitaux

72.      Avant de déterminer si une législation nationale telle que celle en cause est conforme au principe de la libre circulation des capitaux, il s’avère utile de rappeler les caractéristiques de cette liberté fondamentale qui est, peut‑être, la moins connue des libertés fondamentales consacrées par le traité.

73.      Pour commencer, il y a lieu de noter que la libre circulation des capitaux diffère des autres libertés fondamentales quant à sa formulation, qui peut donner lieu à la question de savoir si cette formulation entraîne des conséquences pratiques.

74.      Alors que l’article 56 CE contient une interdiction générale des restrictions de la libre circulation des capitaux, l’article 58, paragraphe 1, sous a), CE précise que cette interdiction ne porte pas atteinte au droit qu’ont les États membres d’appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables en fonction de leur résidence ou du lieu où leurs capitaux sont investis. Ce droit est, cependant, limité en lui‑même par l’article 58, paragraphe 3, CE, qui précise que les distinctions opérées par les États membres entre les contribuables en fonction de leur résidence ou du lieu où leurs capitaux sont investis ne peuvent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée à la libre circulation des capitaux (30).

75.      C’est dans l’affaire Manninen que la Cour a eu, pour la première fois (31), l’occasion d’examiner le pouvoir des États membres de légiférer dans le domaine de la fiscalité directe à la lumière du principe de la libre circulation des capitaux, consacré par les articles 56 CE et 58 CE. Un des principes essentiels énoncés par la Cour dans cet arrêt est celui selon lequel, pour qu’une législation fiscale nationale comportant une distinction entre les contribuables en fonction du lieu où ils investissent leurs capitaux soit compatible avec les dispositions du traité, la différence de traitement doit concerner des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou être justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général, telle que la nécessité de sauvegarder la cohérence du régime fiscal et l’efficacité des contrôles fiscaux (32).

76.      En outre, pour être justifiée, la différence de traitement entre les personnes morales dont le siège est établi en France et celles dont le siège est établi dans d’autres États membres ne doit pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour que l’objectif poursuivi par la législation en cause soit atteint (33).

77.      Il ressort de ce qui précède que la notion de «restriction» en matière de libre circulation des capitaux correspond à la notion de «restriction» que la Cour a dégagée en relation avec les autres libertés fondamentales. Par conséquent, toute mesure qui complique le transfert transfrontalier de capitaux ou le rend moins attrayant et est de nature à dissuader l’investisseur de l’effectuer constitue une restriction aux mouvements de capitaux (34).

78.      En outre, bien qu’il soit vrai que l’article 56, paragraphe 1, CE ne comporte aucune interdiction des discriminations et qu’une telle interdiction ne résulte au mieux qu’indirectement de l’article 58, paragraphe 3, CE (35), la libre circulation des capitaux implique aussi une interdiction des discriminations, comme toutes les libertés fondamentales. Cela suppose l’interdiction des différences de traitement des acteurs du marché financier fondées, sans justifications objectives, sur leur nationalité, leur domicile ou sur le lieu de l’investissement.

D –    Caractéristiques juridiques de la taxe litigieuse

79.      Quant à la réponse à la première question, il découle de ce qui précède qu’il y a lieu de vérifier, pour commencer, si le mécanisme fiscal français litigieux constitue une restriction aux mouvements de capitaux.

80.      En vertu de la législation litigieuse, la situation qui donne lieu à l’obligation de payer la taxe est la possession d’immeubles situés en France ou de droits réels portant sur ces biens au 1er janvier d’une année donnée.

81.      Les personnes morales qui ont leur siège de direction effective en France (désignées ci‑après également comme «résidentes») sont exonérées de la taxe litigieuse. Les personnes morales qui n’ont pas leur siège de direction effective en France (désignées ci‑après également comme «non résidentes») sont assimilées aux personnes morales résidentes, si, en vertu d’une convention, elles ne peuvent pas être soumises à une imposition plus lourde. Il résulte de la décision de renvoi que cette condition fait référence à une situation où la République française a conclu avec le pays où la personne morale non résidente a son siège de direction effective une convention comportant une clause de non‑discrimination en matière fiscale. Les personnes morales résidentes et les personnes morales non résidentes assimilées sont exonérées à condition de respecter l’engagement de faire certaines déclarations à l’administration fiscale. En particulier, elles doivent communiquer chaque année à l’administration fiscale, sur sa demande, la situation et la consistance des immeubles possédés au 1er janvier d’une année donnée, l’identité et l’adresse de leurs actionnaires, associés ou autres membres, le nombre des actions, parts ou autres droits détenus par chacun d’eux et la justification de leur résidence fiscale.

82.      De plus, les personnes morales non résidentes peuvent être exonérées si le pays ou le territoire dans lequel elles ont leur siège a conclu avec la République française une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales. Ces personnes morales doivent déclarer chaque année, au plus tard le 15 mai, la situation, la consistance et la valeur des immeubles possédés au 1er janvier, l’identité et l’adresse de leurs associés à la même date ainsi que le nombre des actions ou des parts détenues par chacun d’eux.

83.      Il résulte de ce qui précède que, alors qu’une personne morale résidente est, par principe, exonérée de la taxe, une personne morale non résidente doit avoir son siège de direction effective dans un pays qui a conclu avec la République française une convention comportant une clause de non‑discrimination en matière fiscale ou une convention comportant une clause d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales. Cela implique une différence de traitement entre les personnes morales soumises à la taxe litigieuse en fonction du lieu où se situe leur siège de direction effective.

84.      En même temps, le mécanisme fiscal litigieux peut avoir pour effet de rendre les investissements immobiliers en France moins attrayants pour les personnes morales non résidentes. Lorsqu’une personne morale non résidente a son siège de direction effective dans un État membre qui n’a pas conclu avec République française une convention comportant une clause de non‑discrimination en matière fiscale ou une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, l’immeuble possédé directement ou indirectement en France par cette personne morale non résidente peut être soumis à la taxe litigieuse. Cela s’applique aussi aux personnes morales qui ont été exclues du bénéfice de telles clauses, comme c’est le cas des holdings 1929, qui ont été exclus du champ d’application de la convention conclue entre la République française et le Grand‑Duché de Luxembourg.

85.      La taxe litigieuse constitue donc une restriction à la libre circulation des capitaux qui est, par principe, interdite par l’article 56 CE.

E –    La situation des résidents et celle des non‑résidents sont‑elles objectivement comparables?

86.      Comme nous l’avons indiqué ci‑dessus, selon la jurisprudence de la Cour, une législation fiscale nationale telle que celle en cause dans la procédure au principal peut être considérée comme compatible avec les dispositions du traité relatives à la libre circulation des capitaux si la différence de traitement concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables.

87.      La Commission estime que la situation des résidents et celle des non‑résidents pourraient être considérées comme différentes lorsque, dans le cas de certains pays, il n’y a pas moyen d’obtenir des informations appropriées concernant les associés de certaines personnes morales possédant des immeubles. Selon la Commission, une telle différence n’existe pas en ce qui concerne les États membres de l’Union européenne, parce que des mesures visant à renforcer la coopération, telles que la directive 77/799, assurent un niveau minimal d’échange d’informations.

88.      Il s’avère, toutefois, que la Cour apprécie la situation objective de contribuables au regard de la règle fiscale (36), plutôt que sur la base des objectifs qu’une telle règle peut viser à poursuivre par le biais des exonérations qu’elle comporte.

89.      En l’espèce, il s’avère que, en ce qui concerne la situation qui donne lieu à l’obligation de payer la taxe, à savoir la possession, directe ou indirecte, d’immeubles situés en France ou de droits réels portant sur ces biens au 1er janvier d’une année donnée par des personnes morales, les personnes morales ayant leur siège de direction effective en France et les personnes morales ayant leur siège de direction effective en dehors de France sont sur un pied d’égalité en ce qui concerne la taxation des immeubles.

90.      Ces règles ne peuvent, sans créer de discrimination, traiter ces personnes différemment en ce qui concerne l’octroi d’un avantage relatif à la même taxe, tel qu’une exonération. En traitant les deux types de personnes morales de manière identique aux fins de l’imposition de leurs immeubles, le législateur français a, en fait, admis que, au regard des modalités et des conditions de cette imposition, il n’existait entre leurs situations aucune différence objective pouvant justifier une différence de traitement (37).

91.      En conséquence, dans des circonstances telles que celles de la procédure au principal, la législation nationale en cause a pour effet de traiter différemment des personnes morales se trouvant dans des situations objectivement comparables.

92.      Il en résulte qu’une telle mesure fiscale ne peut, en principe, constituer un traitement inégal autorisé par l’article 58, paragraphe 1, sous a), CE, à moins qu’elle ne puisse être justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général (38).

F –    Justification par des raisons impérieuses d’intérêt général

93.      Le gouvernement français invoque des raisons relatives à l’efficacité des contrôles fiscaux et à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales pour justifier la taxe litigieuse.

94.      Selon une jurisprudence constante de la Cour, la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales (39) et l’efficacité des contrôles fiscaux (40) figurent parmi les raisons impérieuses d’intérêt public susceptibles de justifier une restriction à l’exercice de libertés fondamentales (41).

95.      À la lumière de l’objectif poursuivi par la disposition nationale en cause en l’espèce, ces justifications coïncident dans une certaine mesure, parce que la disposition en question vise à assurer la collecte des informations nécessaires à la perception de l’impôt sur la fortune et, par ce moyen, à lutter contre la fraude et l’évasion fiscales en ce qui concerne cette taxe.

96.      Il y a lieu de noter, pour commencer, que, alors que la Cour a, à maintes reprises, affirmé que l’efficacité des contrôles fiscaux constituait une exigence impérieuse d’intérêt général susceptible de justifier une restriction à l’exercice des libertés fondamentales garanties par le traité (42), elle a été relativement réticente à accepter une telle justification dans la pratique, puisqu’elle n’a été invoquée avec succès par un État membre que dans une seule affaire concernant la fiscalité directe, à savoir l’affaire Futura Participations et Singer (43). Il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’un État membre ne peut appliquer que des mesures qui lui permettent de contrôler, de façon claire et précise, les contribuables soumis à une taxe donnée et le montant dû par eux (44).

97.      La même réticence peut être observée en ce qui concerne les justifications fondées sur la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Tout en reconnaissant que la lutte contre la fraude fiscale constitue une raison impérieuse d’intérêt général susceptible de justifier une restriction à l’exercice des libertés fondamentales (45), la Cour a, en pratique, circonscrit dans des limites relativement strictes la possibilité d’invoquer une justification fondée sur la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales (46).

98.      En effet, selon une phrase utilisée fréquemment dans la jurisprudence, une restriction à une liberté garantie par le traité ne peut être justifiée sur la base de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales que si la législation en question a pour objet spécifique d’exclure d’un avantage fiscal les montages purement artificiels ayant pour but de contourner la législation nationale (47).

99.      Il s’ensuit que, pour être proportionnée, la portée effective d’une mesure visant à lutter contre la fraude et l’évasion fiscales doit être limitée, autant que possible, aux cas présentant un risque réel de fraude fiscale basée sur le recours à des montages purement artificiels (48) et n’avoir vocation, au regard de l’ensemble de ses conditions d’application et d’exemption, à s’appliquer que dans des circonstances très spécifiques, qui correspondent à des cas dans lesquels le risque d’évasion fiscale existe avec le plus de probabilité (49).

100. Selon la jurisprudence de la Cour, les «montages purement artificiels» sont ceux qui ne reflètent pas la réalité économique (50). Dans le cas de la liberté d’établissement, la Cour a estimé que la réalité économique présupposait une implantation réelle de la société concernée dans l’État d’accueil et l’exercice d’une activité économique effective dans celui-ci (51).

101. Si nous appliquons ce raisonnement à la libre circulation des capitaux, cela semble suggérer qu’une mesure restrictive ne doit pas aller au‑delà de l’imposition effective des immeubles des personnes morales qui sont formellement établies dans un autre État membre, lorsque cet établissement n’a aucune réalité économique.

102. En ce qui concerne la charge de la preuve, selon la jurisprudence de la Cour, c’est, en principe, à l’administration fiscale de l’État membre concerné de prouver, au cas par cas, qu’il existe un risque de fraude ou d’évasion fiscales (52). On ne peut déduire du fait qu’un contribuable use de ses libertés fondamentales pour établir sa résidence dans un autre État membre qu’il poursuit un objectif frauduleux (53). Une présomption générale d’évasion ou de fraude fiscales ne peut justifier une mesure fiscale portant atteinte aux objectifs du traité (54). La Cour est allée jusqu’à considérer que l’institution d’une règle générale excluant automatiquement certaines catégories d’opérations d’un avantage fiscal, qu’il y ait ou non effectivement évasion ou fraude fiscales, ne peut être considérée comme proportionnée (55).

103. Plus récemment, la Cour semble avoir affiné son approche concernant les présomptions générales d’évasion ou de fraude fiscales dans le domaine de la fiscalité directe. Dans l’affaire Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, elle a estimé qu’une telle présomption pourrait être acceptable, à condition qu’elle n’ait vocation, au regard des conditions précises qu’elle définit, à s’appliquer que dans des circonstances très spécifiques, qui correspondent à des cas dans lesquels le risque d’évasion fiscale existe avec le plus de probabilité. Dans ce cas, c’est au contribuable non résident, qui est le mieux placé à cette fin, qu’il incombe de prouver la réalité de ses activités lui permettant de prétendre au bénéfice des libertés fondamentales (56).

104. À la lumière de ces considérations, nous examinerons si la mesure nationale en cause est appropriée pour assurer l’efficacité des contrôles fiscaux et lutter contre la fraude et l’évasion fiscales et si elle ne va pas au‑delà de ce qui est nécessaire pour réaliser ces objectifs.

105. L’intention du législateur, lorsqu’il a imposé la taxe litigieuse, était de dissuader les contribuables assujettis à l’impôt français sur la fortune d’échapper à une telle imposition en créant, dans des États n’ayant pas conclu avec la République française une convention fiscale comportant une clause d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, des sociétés qui deviennent propriétaires d’immeubles situés en France (57).

106. Le mécanisme fiscal litigieux paraît donc viser, en particulier, les pratiques ayant pour but d’échapper à l’impôt sur la fortune qui serait normalement dû sur les immeubles. Plus précisément, selon les observations écrites et orales du gouvernement français, la pratique contre laquelle il s’agit de lutter consiste dans la création, par des personnes physiques qui ont leur domicile fiscal en France et dont les immeubles seraient normalement soumis à l’impôt sur la fortune, de personnes morales qui ont leur domicile fiscal hors de France à seule fin d’éviter le paiement de l’impôt sur la fortune. Il semblerait que des personnes physiques résidant en France transfèrent leurs droits de propriété ou les autres droits réels qu’elles possèdent sur des immeubles situés en France à des personnes morales qui, en tant que telles, ne sont pas soumises à l’impôt français sur la fortune.

107. Les cas qui paraissent susciter des difficultés sont ceux où les autorités fiscales françaises ne peuvent vérifier l’identité et les participations des personnes physiques pouvant être les actionnaires de ces personnes morales. Selon le gouvernement français, tel est le cas lorsque ces personnes morales ont leur siège de direction effective dans un pays avec lequel la République française n’a pas conclu de convention comportant une clause d’assistance administrative. Dans un tel cas, il est indiqué que les autorités fiscales françaises se heurtent à des difficultés lorsqu’elles vérifient par recoupement les déclarations remplies par les personnes morales concernant, en particulier, l’identité et les participations de leurs actionnaires et les déclarations à l’impôt sur la fortune des personnes physiques résidant en France, qui sont tenues de déclarer toutes les participations qu’elles détiennent dans des sociétés établies en France ou à l’étranger, telles que les holdings 1929. Dans ces circonstances, des personnes physiques peuvent réussir à se dissimuler derrière des personnes morales pour éviter de payer l’impôt sur la fortune qu’elles devraient normalement acquitter sur leurs immeubles si elles les détenaient en leur nom propre.

108. Pour lutter contre ces pratiques, la taxe prévue par les articles 990 D et 990 E du CGI vise, en particulier, les personnes morales qui ont leur siège de direction principal dans des pays dont la République française ne peut obtenir les informations appropriées sur les personnes physiques détenant des participations dans des personnes morales. Ainsi, la législation française en cause exonère de la taxe les personnes morales non résidentes en fonction de l’existence d’une convention comportant une clause d’assistance administrative ou de non‑discrimination en matière fiscale. En ce qui concerne cette dernière clause, le gouvernement français a fait observer qu’une convention fiscale comportant une clause de non‑discrimination implique a fortiori l’existence d’une assistance administrative.

109. Il paraît, dès lors, que le critère essentiel d’exonération est, en fait, l’assurance que, en vertu d’une convention fiscale bilatérale, l’administration fiscale française peut demander directement à des autorités fiscales étrangères toutes les informations nécessaires pour recouper les déclarations faites par des personnes morales détenant des droits de propriété ou d’autres droits réels sur des immeubles situés en France conformément à l’article 990 E du CGI, ainsi que les déclarations faites par des personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France concernant leurs immeubles soumis à l’impôt sur la fortune.

110. En taxant toutes les personnes morales qui ne satisfont pas à cette condition, la législation française en cause a pour effet de taxer les immeubles détenus par des personnes morales utilisées comme «écrans» par des personnes physiques qui seraient autrement soumises à l’impôt sur la fortune. La taxe litigieuse permet donc de lutter contre les pratiques qui n’ont pas d’autre but que d’éviter le paiement de l’impôt sur la fortune qui, autrement, serait dû par les personnes physiques en France, ou du moins de rendre ces pratiques moins attrayantes. Elle est donc appropriée à l’objectif consistant à assurer l’efficacité des contrôles fiscaux et à lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.

111. Il reste, cependant, à déterminer si la taxe litigieuse va au‑delà de ce qui est nécessaire pour réaliser cet objectif.

112. La législation nationale en cause paraît partir de l’hypothèse que tous les pays avec lesquels la République française n’a pas conclu une convention fiscale bilatérale comportant soit une clause d’assistance administrative, soit une clause de non‑discrimination en matière fiscale sont susceptibles d’accueillir des personnes légales utilisées comme instruments pour éviter à des personnes physiques de payer l’impôt sur la fortune. La même hypothèse vaut pour les entités constituées en sociétés, telles que les holdings 1929, qui ont été exclues du champ d’application des conventions fiscales bilatérales.

113. Le gouvernement français paraît justifier cette hypothèse en invoquant, en particulier, le caractère dommageable que présentent, d’une manière générale, les holdings 1929.

114. À cet égard, il y a lieu de faire observer que le caractère dommageable de ce régime légal a, en effet, été reconnu par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) (58), ainsi que par le Conseil «Affaires économiques et financières» (Conseil Ecofin) lors de l’adoption du code de conduite sur la fiscalité des entreprises (59). Le régime légal luxembourgeois applicable aux holdings 1929 a été cité dans le rapport du groupe «code de conduite», chargé d’évaluer les mesures nationales susceptibles de relever de ce code, parce qu’elles constituent des mesures dommageables. Ce régime fiscal devait, dès lors, être progressivement supprimé (60).

115. Cependant, ces facteurs ne peuvent avoir une incidence sur la portée des droits conférés aux opérateurs économiques par les libertés fondamentales. D’après son préambule, le code de conduite est un engagement politique et n’affecte pas les droits et obligations des États membres ni les compétences respectives des États membres et de la Communauté telles qu’elles découlent du traité (61). La mention des holdings 1929 parmi les mesures fiscales dommageables pour le marché unique ne peut limiter le droit conféré à un investisseur par le traité au titre de l’article 56 CE d’effectuer des investissements dans un État membre particulier, tout en ayant son siège de direction effective dans un autre État membre, même si, du fait de sa structure, sa société est soumise à un système fiscal qui est considéré comme dommageable pour le marché unique.

116. Le fait que les holdings 1929 aient été considérés comme un régime d’aides d’État incompatible avec le marché commun (62) ne change rien à cette analyse. En effet, le traité contient, aux articles 87 CE et 88 CE, des dispositions spécifiques destinées à apprécier la compatibilité d’une telle mesure avec le marché commun et à éliminer ses effets dommageables pour ce marché. Le fait qu’une telle forme de société et son régime fiscal ne soient pas conformes aux règles du traité ne peut donc habiliter un État membre à prendre des mesures unilatérales visant à parer à ses effets en limitant la liberté de circulation (63).

117. En conséquence, un argument fondé sur le caractère dommageable d’un régime fiscal national spécifique ou d’une forme de société ne peut certainement pas être accepté comme tel pour justifier le refus généralisé d’un avantage fiscal prenant la forme d’une exonération à une catégorie entière de personnes morales résidant dans un autre État membre.

118. Pour justifier la législation nationale en cause, le gouvernement français invoque aussi les difficultés à obtenir des informations de pays avec lesquels il n’existe aucune coopération administrative effective.

119. En particulier, le gouvernement français, soutenu par les gouvernements néerlandais, italien, hellénique et du Royaume-Uni, affirme qu’une approche restrictive de l’exonération de la taxe litigieuse est rendue nécessaire par la difficulté qu’ont les autorités fiscales françaises à prouver la fraude ou l’évasion fiscales en l’absence d’informations fiables permettant de recouper les informations fournies par les contribuables dans leurs déclarations fiscales. La difficulté réside dans le fait que c’est normalement aux autorités fiscales qu’il incombe d’administrer la preuve de la fraude. Faute de possibilité de recouper les informations avec celles que les autorités françaises sont en mesure d’obtenir par leurs propres moyens, ce qui peut impliquer la coopération administrative d’autorités fiscales étrangères, la présomption de fraude fiscale existante est justifiée.

120. Cet argument soulève la question de l’efficacité de la coopération administrative entre États membres que prévoit la directive 77/799.

121. Il résulte de nos réponses aux deuxième et troisième questions que la taxe litigieuse relève de la directive 77/799, qui est applicable à la situation de fait qui est à l’origine du litige dont est saisie la juridiction de renvoi.

122. Selon la Commission et Elisa, la directive permet aux autorités fiscales françaises d’obtenir toutes les informations nécessaires à la perception de l’impôt sur la fortune.

123. Cependant, selon le gouvernement français et tous les autres États membres qui ont participé à la procédure, dans le cas particulier des holdings 1929, l’efficacité de la directive 77/799 est contestable, en raison des termes de l’article 8, paragraphe 1. Conformément à l’article 8 de la directive, un État membre à qui il est demandé de fournir des informations n’est pas tenu de le faire lorsque la législation ou la pratique administrative de cet État membre ne l’autorisent pas à recueillir ou à utiliser ces informations pour ses propres besoins. Sur ce point, le gouvernement français fait référence à la législation luxembourgeoise pertinente (64), qui se borne à exiger que ces holdings fournissent des informations au sujet de leur statut légal et prévoit qu’aucun renseignement ne peut être demandé aux holdings 1929 à des fins de taxation.

124. En réponse à cet argument, il convient de faire observer que, selon une jurisprudence constante de la Cour, la directive 77/799 peut être invoquée par un État membre afin d’obtenir des autorités compétentes d’un autre État membre toutes les informations nécessaires pour lui permettre d’établir correctement le montant des taxes couvertes par la directive (65).

125. En l’espèce, on ne peut pas exclure que, eu égard à l’article 8 de la directive 77/799, il puisse être difficile pour les autorités françaises, du fait de la législation nationale luxembourgeoise, d’obtenir directement des autorités luxembourgeoises certains types d’informations nécessaires pour lutter contre la fraude ou l’évasion fiscales, en particulier concernant la structure juridique et l’identité des actionnaires des holdings 1929.

126. Il convient, toutefois, de noter que, dans des cas similaires où des États membres ont soutenu que la directive était inefficace à l’égard d’États membres pratiquant le secret bancaire, la Cour a, dans le passé, rejeté cet argument. Elle a considéré que, bien que l’article 8, paragraphe 1, de la directive n’oblige pas les autorités fiscales des États membres à collaborer lorsque leurs lois ou leurs pratiques administratives n’autorisent pas les autorités compétentes à effectuer des recherches ou à recueillir ou à utiliser des informations pour les propres besoins de ces États, l’impossibilité de solliciter cette collaboration ne peut justifier le refus d’un avantage fiscal. Rien n’empêche les autorités fiscales concernées d’exiger de l’intéressé les preuves qu’elles jugent nécessaires et, le cas échéant, de refuser l’avantage fiscal, y compris une exonération, si ces preuves ne sont pas fournies (66). En effet, on ne peut pas exclure a priori la possibilité que le contribuable soit en mesure de fournir les pièces justificatives pertinentes permettant aux autorités fiscales de l’État membre d’imposition de vérifier, de façon claire et précise, qu’il ne tente pas d’éviter ou d’éluder le paiement de taxes (67).

127. Dans le contexte du cas de l’espèce, cela donne à penser que, bien qu’un «obstacle juridique» de ce type, dont il résulte qu’il est impossible de solliciter directement la coopération des autorités fiscales luxembourgeoises, puisse rendre la vérification des informations plus difficile, il ne justifie pas le refus catégorique d’accorder un avantage fiscal pour les investissements effectués par des investisseurs provenant de cet État membre. En effet, lorsque des holdings 1929 sollicitent l’exonération de la taxe litigieuse, les autorités fiscales françaises pourraient demander à ces holdings eux‑mêmes les éléments de preuve qu’elles estiment nécessaires pour assurer pleinement la transparence de leurs droits de propriété et de la structure de leur actionnariat (68). Les autorités françaises pourraient, par exemple, demander des preuves officielles appropriées pour percer le voile de l’anonymat derrière lequel certaines personnes physiques tentent de dissimuler leurs droits de propriété.

128. On peut ajouter sur ce point qu’il y a lieu de s’assurer que les exigences relatives aux pièces justificatives demandées ne vont pas au‑delà de ce qui est nécessaire pour atteindre le but d’information recherché (69).

129. En l’espèce, il s’avère que ces conditions ne sont pas remplies parce que la législation française en cause ne permet pas aux personnes morales qui sont exclues du champ d’application d’une convention fiscale prévoyant une assistance administrative, mais qui investissent dans des immeubles situés en France, de fournir des pièces justificatives pour établir l’identité de leurs actionnaires et toute autre information que les autorités fiscales françaises estiment nécessaires. En conséquence, il s’avère qu’il est fait obstacle, en toutes circonstances, à ce qu’elles prouvent qu’elles ne poursuivent pas un objectif frauduleux (70).

130. La législation en cause peut donc entraîner un dommage «collatéral» substantiel, parce que, alors qu’elle pénalise à juste titre les holdings 1929 qui ont été constitués par des personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France pour leur permettre d’éviter le paiement de l’impôt français sur la fortune sur leurs immeubles situés en France, elle pénalise aussi d’autres holdings 1929 qui possèdent des immeubles en France.

131. En conséquence, le nombre de personnes morales qui devront payer la taxe litigieuse est susceptible d’être supérieur à celui des personnes morales qui tentent d’éviter le paiement de l’impôt sur la fortune en demeurant les actionnaires anonymes de personnes morales qui ont leur siège dans un pays avec lequel la République française n’a pas conclu une convention comportant une clause d’assistance administrative ou qui ont été, par convention, exclues du bénéfice d’une telle clause, comme les holdings 1929.

132. Il en résulte que le gouvernement français aurait pu adopter des mesures moins restrictives pour atteindre l’objectif consistant à assurer des contrôles fiscaux efficaces et à lutter contre la fraude et l’évasion fiscales. La différence de traitement, prévue par la législation nationale en cause, entre les personnes morales résidentes et non résidentes n’est donc pas proportionnée à l’objectif poursuivi.

133. Il y a donc lieu de répondre à la première question que les dispositions du traité relatives à la libre circulation des capitaux (articles 56 CE et suivants) s’opposent à ce qu’un État membre maintienne une taxe sur la valeur vénale des immeubles dont les personnes morales ayant leur domicile fiscal en France sont exonérées, alors que l’exonération des personnes morales non résidentes est subordonnée à l’existence d’une convention bilatérale comportant une clause d’assistance administrative visant à lutter contre l’évasion et la fraude fiscales ou une clause interdisant les discriminations fondées sur la nationalité, selon laquelle les personnes morales non résidentes ne peuvent être imposées plus lourdement que les personnes morales résidentes.

VIII – Quatrième question

134. Par la quatrième question, la juridiction nationale demande essentiellement si la République française, ayant conclu avec un État une convention comportant une clause de non-discrimination permettant aux personnes morales établies dans cet État de prétendre avec succès au bénéfice de l’exonération prévue à l’article 990 E, paragraphe 3, du CGI, doit, conformément aux articles 56 CE et 43 CE, étendre cet avantage fiscal de manière à inclure les personnes morales établies dans un autre État membre, tel que le Grand‑Duché de Luxembourg, qui n’est pas lié à la République française par une convention comportant une telle clause de non‑discrimination, lorsque ces personnes morales possèdent des immeubles en France. En d’autres termes, la question vise à déterminer si les articles 56 CE et 43 CE ont pour effet d’étendre aux personnes morales ayant leur domicile fiscal dans un autre État membre et possédant des immeubles en République française le bénéfice d’une clause de non‑discrimination conclue entre la République française et un autre État membre ou un pays tiers.

135. À la lumière des réponses que nous avons données aux questions précédentes, nous estimons qu’il n’est pas nécessaire de répondre à la quatrième question.

IX – Conclusion

136. À la lumière de ce qui précède, nous proposons à la Cour de répondre dans les termes suivants aux questions déférées:

«1)      Les dispositions du traité CE relatives à la libre circulation des capitaux (articles 56 CE et suivants) s’opposent à ce qu’un État membre maintienne une taxe sur la valeur vénale des immeubles dont les sociétés ayant leur domicile fiscal en France sont exonérées, alors que l’exonération des sociétés ayant leur domicile fiscal dans un autre État membre est subordonnée à l’existence d’une convention bilatérale comportant une clause d’assistance administrative visant à lutter contre l’évasion et la fraude fiscales ou une clause interdisant les discriminations fondées sur la nationalité, lorsque les sociétés ayant leur domicile fiscal dans un État membre autre que la France sont imposées plus lourdement que les personnes morales ayant leur siège de direction effective en France.

2)      Une taxe telle que la taxe litigieuse constitue un impôt sur la fortune au sens de l’article 1er de la directive 77/799/CEE du Conseil, du 19 décembre 1977, concernant l’assistance mutuelle des autorités compétentes des Ėtats membres dans le domaine des impôts directs.

3)      Les obligations mises à la charge des Ėtats membres en matière d’assistance mutuelle fiscale par la directive 77/799 ne s’opposent à l’application par les Ėtats membres, en vertu d’une convention bilatérale d’assistance administrative dans le domaine fiscal, d’obligations de même nature excluant une catégorie de contribuables tels que les sociétés holdings luxembourgeoises, que dans la mesure où la mise en œuvre de la convention bilatérale ferait obstacle à l’application de la directive à ces contribuables.»


1 – Langue originale: l’anglais.


2 – Les dispositions pertinentes utilisent les termes «siège» ou «siège de direction effective». Il ressort, en particulier, des éclaircissements fournis oralement par le gouvernement français que ces termes peuvent être utilisés comme synonymes aux fins de la présente procédure.


3 – JO L 336, p. 15.


4 – Pour cette dernière exonération, voir article 990 E, 4°, du CGI.


5 – Un actif immobilier affecté par la personne morale à sa propre activité professionnelle autre qu’immobilière n’est pas inclus aux fins du calcul du seuil de 50 %.


6 – Voir, pour davantage de détails, Mémento pratique Francis Lefebvre, 2006, p. 989 et suiv., et Lamy fiscal, 2006, vol. 2, p. 1255 et suiv.


7 – Voir arrêts du 13 avril 2000, Baars (C‑251/98, Rec. p. I‑2787, points 4 et suiv.), et du 5 juillet 2005, D. (C‑376/03, Rec. p. I‑5821, point 32).


8 – Voir, pour un système similaire, l’exemple de l’impôt sur la fortune néerlandais: les «non‑résidents» sont soumis à l’impôt sur la fortune de manière limitée, à savoir uniquement sur la partie de leur fortune située aux Pays-Bas (arrêt D., précité à la note 7, point 21).


9 – Conclusions de l’avocat général Alber dans l’affaire W. N. (arrêt du 13 avril 2000, C‑420/98, Rec. p. I‑2847), point 7.


10 – En vertu de la directive 2004/106/CE du Conseil, du 16 novembre 2004 (JO L 359, p. 30), et la directive s’applique également à toutes les informations relatives à l’établissement des taxes sur les primes d’assurance.


11 – Arrêt du 12 avril 1994 (C‑1/93, Rec. p. I‑1137, point 22). Dans cette affaire, la Cour a considéré que la directive 77/799 était applicable aux taxes sur l’aliénation de biens immeubles. Une telle taxe est due par l’acquéreur à l’occasion de l’acquisition d’un bien immeuble. Elle ne frappe pas la détention d’un tel bien ou les revenus qu’il peut procurer à son propriétaire.


12 – Voir, en ce sens, entre autres, arrêts du 17 décembre 1970, Internationale Handelsgesellschaft (11/70, Rec. p. 1125); du 22 octobre 1987, Foto-Frost (314/85, Rec. p. 4199), et, plus récemment, du 15 septembre 2005, Intermodal Transports (C‑495/03, Rec. p. I‑8151).


13 – Voir en ce sens, entre autres, arrêts précités à la note 12 Foto-Frost, Internationale Handelsgesellschaft, et, plus récemment, Intermodal Transports.


14 – Voir, en particulier, troisième considérant de la directive 77/799, qui indique que «la collaboration entre administrations, sur la base d’accords bilatéraux, est également incapable de faire face aux formes nouvelles de fraude et d’évasion fiscales, qui prennent de plus en plus un caractère multinational». La nécessité d’une telle directive découlait du fait que toutes les relations bilatérales entre tous les États membres n’étaient pas couvertes par des accords bilatéraux concernant la coopération administrative. De même, la portée et l’importance des obligations en matière de coopération administrative sont susceptibles de différer d’un accord bilatéral à l’autre.


15 – Voir Terra, B., et Wattel, P., European Tax Law, Kluwer, 2005, p. 681.


16 – Arrêt du 14 décembre 2006, Denkavit Internationaal et Denkavit France (C‑170/05, Rec. p. I‑11949, point 53).


17 – Voir, entre autres, arrêts du 11 août 1995, Wielockx (C‑80/94, Rec. p. I‑2493, point 16); du 10 mars 2005, Laboratoires Fournier (C‑39/04, Rec. p. I‑2057, point 14); du 23 février 2006, van Hilten-van der Heijden (C‑513/03, Rec. p. I‑1957, point 36), et du 14 septembre 2006, Centro di Musicologia Walter Stauffer (C‑386/04, Rec. p. I‑8203, point 15).


18 – Voir arrêts du 21 septembre 1999, Saint-Gobain ZN (C‑307/97, Rec. p. I‑6161, point 34); du 13 décembre 2005, Marks & Spencer (C‑446/03, Rec. p. I‑10837, point 30), et Centro di Musicologia Walter Stauffer, précité à la note 17, point 17.


19 – Voir arrêt Centro di Musicologia Walter Stauffer, précité à la note 17, point 18 et jurisprudence citée.


20 – Ibidem, point 19.


21 – Arrêt du 1er juin 1999 (C‑302/97, Rec. p. I‑3099, points 39 et suiv.).


22 – Précitée à la note 17, points 16 et suiv.


23 – Arrêt du 25 janvier 2007 (C‑370/05, Rec. p. I‑1129, points 20 et suiv.).


24 – Une exception à cette approche a été faite dans un arrêt antérieur, à savoir l’arrêt du 6 novembre 1984, Fearon (182/83, Rec. p. 3677), qui, cependant, avait un lien évident avec la liberté d’établissement sur la base des faits de cette affaire.


25 – Voir arrêts Konle, précité à la note 21, point 22, et du 5 mars 2002, Reisch e.a. (C‑515/99, C‑519/99 à C‑524/99 et C‑526/99 à C‑540/99, Rec. p. I‑2157, points 29 et 30).


26 – JO L 178, p. 5.


27 – Voir, plus récemment, arrêts Centro di Musicologia Walter Stauffer, précité à la note 17, point 22 et jurisprudence citée, et Festersen, précité à la note 23, point 23.


28 – Voir, par analogie, arrêts du 12 septembre 2006, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas (C‑196/04, Rec. p. I‑7995, point 33), et du 3 octobre 2006, Fidium Finanz (C‑452/04, Rec. p. I‑9521, point 49).


29 – Voir conclusions de l’avocat général Stix‑Hackl dans l’affaire Festersen, précitée à la note 23, point 30.


30 – En relation avec la fiscalité directe, ces principes ont été répétés, entre autres, dans les arrêts du 7 septembre 2004, Manninen (C‑319/02, Rec. p. I‑7477, point 28), et Centro di Musicologia Walter Stauffer, précité à la note 17, point 31.


31 – Dans l’arrêt du 6 juin 2000, Verkooijen (C‑35/98, Rec. p. I‑4071, points 43 à 45), la Cour avait déjà fourni quelques indications au sujet de la signification de ces dispositions, mais elles concernaient celle qui les avait précédées immédiatement (article 67 du traité).


32 – Voir, en ce sens, arrêts Verkooijen, précité à la note 31, point 43; Manninen, précité à la note 30, point 29, et Centro di Musicologie Walter Stauffer, précité à la note 17, point 32.


33 – Voir, en ce sens, arrêts Verkooijen, précité à la note 31, point 43; Manninen, précité à la note 30, point 29, et Centro di Musicologie Walter Stauffer, précité à la note 17, point 32.


34 – Voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Bouanich (arrêt du 19 janvier 2006, C‑265/04, Rec. p. I‑923, point 30).


35 – Voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Bouanich, précitée à la note 34, point 31.


36 – Voir, en ce sens, arrêt Manninen, précité à la note 30, point 36.


37 – Voir, en ce sens, arrêt du 28 janvier 1986, Commission/France (270/83, Rec. p. 273, point 20). Voir aussi conclusions de l’avocat général Lenz dans l’affaire Futura Participations et Singer (arrêt du 15 mai 1997, C‑250/95, Rec. p. I‑2471, points 38 et 39).


38 – Voir, en ce sens, arrêts Verkooijen, précité à la note 31, point 46; Manninen, précité à la note 30, point 29; Bouanich, précité à la note 34, point 38, et Centro di Musicologie Walter Stauffer, précité à la note 17, point 32.


39 – Voir, entre autres, arrêts du 16 juillet 1998, ICI (C‑264/96, Rec. p. I‑4695, point 26); du 8 mars 2001, Metallgesellschaft e.a. (C‑397/98 et C‑410/98, Rec. p. I‑1727, point 57); du 21 novembre 2002, X et Y (C‑436/00, Rec. p. I‑10829, point 61); du 12 décembre 2002, Lankhorst-Hohorst (C‑324/00, Rec. p. I‑11779, point 37), et Marks & Spencer, précité à la note 18, point 57.


40 – Voir, en particulier, arrêt Futura Participations et Singer, précité à la note 37, point 31.


41 – Voir, par exemple, arrêt du 4 mars 2004, Commission/France (C‑334/02, Rec. p. I‑2229, point 27). Voir aussi conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, précitée à la note 28, point 85.


42 – Voir, entre autres, arrêt du 4 mars 2004, Commission/France, précité à la note 41, point 27.


43 – Précitée à la note 37, point 31.


44 – Voir, en ce sens, arrêts du 8 juillet 1999, Baxter e.a. (C‑254/97, Rec. p. I‑4809, point 18), et Laboratoires Fournier, précité à la note 17, point 24.


45 – Voir, entre autres, arrêts ICI, précité à la note 39, point 26; Metallgesellschaft e.a., précité à la note 39, point 57; X et Y, précité à la note 39, point 61; Lankhorst-Hohorst, précité à la note 39, point 37, et Marks & Spencer, précité à la note 18, point 57.


46 – Voir conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, précitée à la note 28, point 87.


47 – Voir, entre autres, arrêts ICI, précité à la note 39, point 26; X et Y, précité à la note 39, point 61; Lankhorst-Hohorst, précité à la note 39, point 37; du 11 mars 2004, de Lasteyrie du Saillant (C‑9/02, Rec. p. I‑2409, point 50), et Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, précité à la note 28, point 51.


48 – Voir, en ce sens, arrêts ICI, précité à la note 39, point 26; Lankhorst-Hohorst, précité à la note 39, point 37; de Lasteyrie du Saillant, précité à la note 47, point 50; Marks & Spencer, précité à la note 18, point 57, et Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, précité à la note 28, point 51.


49 – Voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, précitée à la note 28, point 137.


50 – Voir, en ce sens, arrêt Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, précité à la note 28, point 55.


51 – Ibidiem, point 54.


52 – Voir conclusions de l’avocat général Mischo dans l’affaire de Lasteyrie du Saillant, précitée à la note 47, point 59.


53 – Voir, en ce sens, arrêts ICI, précité à la note 39, point 26; Metallgesellschaft e.a., précité à la note 39, point 57; X et Y, précité à la note 39, points 61 et 62; Lankhorst-Hohorst, précité à la note 39, point 37, et de Lasteyrie du Saillant, précité à la note 47, points 50 et 51.


54 – Voir, en ce sens, arrêts du 26 septembre 2000, Commission/Belgique (C‑478/98, Rec. p. I‑7587, point 45), et du 4 mars 2004, Commission/France, précité à la note 41, point 27.


55 – Voir, en ce sens, arrêt du 17 juillet 1997, Leur-Bloem (C‑28/95, Rec. p. I‑4161, point 44).


56 – Voir, en ce sens, arrêt Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, précité à la note 28, point 70.


57 – Selon les observations du gouvernement français, c’est ce qu’a indiqué le Conseil constitutionnel dans une décision du 29 décembre 1989.


58 – Le régime légal des holdings 1929 a constamment été cité par l’OCDE comme une pratique fiscale dommageable. Voir rapport d’étape 2006 relatif au projet de l’OCDE sur les pratiques fiscales dommageables, disponible à l’adresse: http://www.oecd.org/dataoecd/1/17/37446434.pdf.


59 – Résolution du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil, du 1er décembre 1997, sur un code de conduite dans le domaine de la fiscalité des entreprises (JO 1998, C 2, p. 2). Ce dernier vise «les mesures ayant, ou pouvant avoir, une incidence sensible sur la localisation des activités économiques au sein de la Communauté» et contient un engagement des États membres concernant le gel et le démantèlement de ces mesures.


60 – Ce rapport est disponible sur l’Internet à l’adresse http://ec.europa.eu/taxation_customs/resources/documents/primarolo_fr.pdf.


61 – Voir conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, précitée à la note 28, point 57.


62 – Décision 2006/940/CE de la Commission, du 19 juillet 2006, concernant le régime d’aide C 3/2006 mis en œuvre par le Luxembourg en faveur des sociétés holdings 1929 et des holdings milliardaires (JO L 366, p. 47).


63 – Voir conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, précitée à la note 28, point 58.


64 – En particulier: règlement grand-ducal du 24 mars 1989 précisant le secret bancaire en matière fiscale et délimitant le droit d’investigation des administrations fiscales (Mém. A‑15 du 28 mars 1989). L’article 4 prévoit qu’aucun renseignement aux fins de l’imposition du contribuable ne peut être demandé aux sociétés de participations financières au sens de la loi du 31 juillet 1929.


L’article 5 indique que, en ce qui concerne ces sociétés de participations financières, le droit de contrôle et d’investigation appartient à l’administration de l’enregistrement et se limite à la recherche et à l’examen des faits et données concernant le statut fiscal de la société ainsi que des éléments requis pour assurer et vérifier la juste et exacte perception des taxes et droits à charge de la société.


65 – Voir, entre autres, arrêts du 28 janvier 1992, Bachmann (C‑204/90, Rec. p. I‑249, point 18); Halliburton Services, précité à la note 11, point 22; du 3 octobre 2002, Danner (C‑136/00, Rec. p. I‑8147, point 49); du 26 juin 2003, Skandia et Ramstedt (C‑422/01, Rec. p. I‑6817, point 42); du 4 mars 2004, Commission/France, précité à la note 41, point 31; Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, précité à la note 28, point 71, et du 30 janvier 2007, Commission/Danemark (C‑150/04, Rec. p. I‑1163, point 52).


66 – Voir arrêts Bachmann, précité à la note 65, point 20; du 28 janvier 1992, Commission/Belgique (C‑300/90, Rec. p. I‑305, point 13); du 4 mars 2004, Commission/France, précité à la note 41, point 32, et Commission/Danemark, précité à la note 65, point 54.


67 – Voir, en ce sens, arrêts Laboratoires Fournier, précité à la note 17, point 25, et Baxter e.a., précité à la note 44, points 19 et 20.


68 – Voir, en ce sens, arrêt Centro di Musicilogia Walter Stauffer, précité à la note 17, point 48.


69 – Voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Poiares Maduro dans l’affaire Marks & Spencer, précitée à la note 18, point 81.


70 – Il paraît découler de l’«Instruction administrative» du 13 octobre 2000 (Bulletin officiel des impôts 7 Q‑1‑00) qu’une personne sera tenue d’acquitter la taxe litigieuse, même si l’identité de ses actionnaires est connue des autorités fiscales françaises.