Language of document : ECLI:EU:F:2006:139

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)

14 décembre 2006 (*)

« Fonctionnaires – Agent auxiliaire – Agent interprète de conférence – Conditions pour le versement de l’indemnité forfaitaire de voyage »

Dans l’affaire F‑10/06,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Daniel André, agent interprète de conférence, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Me M. Jourdan, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. J. Currall et D. Martin, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. P. Mahoney, président, Mme I. Boruta et M. H. Tagaras (rapporteur), juges,

greffier : M. S. Boni, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 octobre 2006,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 5 janvier 2006 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 9 janvier suivant), M. André, agent interprète de conférence, demande, d’une part, l’annulation de la décision du 8 mars 2005 (ci-après la « décision attaquée ») par laquelle la Commission des Communautés européennes a refusé de lui verser, pour des prestations effectuées en dates des 12 et 13 janvier 2005 pour le compte et à la demande de la Cour de justice des Communautés européennes, l’indemnité forfaitaire prévue par l’article 7 de la convention, du 28 juillet 1999, fixant les conditions de travail et le régime pécuniaire des agents interprètes de conférence recrutés pas les institutions de l’Union européenne (ci-après la « convention »), ainsi que, d’autre part, la réparation du préjudice qu’il estime avoir subi.

 Cadre juridique

2        Aux termes de l’article 78 du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (ci-après le « RAA »), qui fait partie du titre III concernant les agents auxiliaires :

« Par dérogation aux dispositions du présent titre, les agents auxiliaires engagés par le Parlement européen pour la durée des travaux de ses sessions sont soumis aux conditions de recrutement et de rémunération prévues à l’accord intervenu entre cette institution, le Conseil de l’Europe et l’Assemblée de l’Union de l’Europe occidentale pour l’engagement de ce personnel.

Les dispositions de cet accord ainsi que toute modification ultérieure de ces dispositions sont portées à la connaissance des autorités budgétaires compétentes un mois avant leur mise en vigueur.

Les mêmes conditions de recrutement et de rémunération appliquées aux interprètes de conférence recrutés par le Parlement européen sont applicables aux agents auxiliaires engagés par la Commission en qualité d’interprètes de conférence pour le compte des institutions et organismes communautaires.

Les dispositions du présent article s’appliquent jusqu’au 31 décembre 2006, date à partir de laquelle les agents concernés sont soumis aux conditions arrêtées selon la procédure prévue à l’article 90 [du RAA]. »

3        L’article 90 du RAA, qui fait partie du titre IV concernant les agents contractuels, dispose :

« Par dérogation aux dispositions du présent titre, les interprètes de conférence engagés par le Parlement européen ou engagés par la Commission pour le compte des institutions et organismes communautaires sont soumis aux conditions prévues dans la convention du 28 juillet 1999 conclue entre le Parlement européen, la Commission et la Cour de justice, agissant au nom des institutions, d’une part, et les associations représentatives de la profession, d’autre part.

Les modifications de cette convention rendues nécessaires par l’entrée en vigueur du règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 sont adoptées avant le 31 décembre 2006, selon la procédure prévue à l’article 78, deuxième alinéa. Toute modification de la convention après le 31 décembre 2006 est adoptée par accord entre les institutions. »

4        En application du deuxième alinéa de l’article 90 du RAA, la convention, telle que complétée par ses modalités d’application (ci-après les « modalités d’application »), a été annotée le 13 octobre 2004. Dans ce contexte, les dénominations « interprètes de conférence auxiliaires de session » et « interprètes free-lance » ont été remplacées par l’expression « agents interprètes de conférence » (ci-après les « AIC »).

5        L’article 1er de la convention est libellé comme suit :

« La présente [c]onvention s’applique, quel que soit leur lieu d’affectation, aux AIC engagés par le Parlement européen ou la Commission pour leur propre compte et pour le compte des autres [i]nstitutions et [o]rganes de l’Union européenne ainsi que les organismes régis par le droit communautaire, créés par les [t]raités ou par un acte communautaire de droit dérivé (ci-après dénommés institutions).

L’engagement se fait aux conditions stipulées dans la réglementation concernant les AIC applicable pour l’[i]nstitution où ils effectuent leurs prestations.

Cette [c]onvention est de portée générale et n’est limitée par aucune considération géographique.

Toutes les parties signataires, dans le cadre de leurs compétences respectives, veillent au respect de l’ensemble de ces dispositions ainsi qu’à leur bonne exécution. »

6        L’article 5 de la convention prévoit :

« Dans l’intérêt des deux parties, les [i]nstitutions s’efforcent, dans toute la mesure du possible, de maintenir une certaine stabilité dans leurs politiques de recrutement, d’effectuer des engagements directs et individuels et d’éviter toute cessation brutale d’engagement. »

7        La rétribution journalière des AIC fait l’objet de l’article 6 de la convention, libellé comme suit :

« Le montant de la rétribution par journée de travail pour l’AIC expérimenté est indexé sur la rémunération d’un fonctionnaire affecté à Bruxelles de grade AD 12, échelon 5. Il est fixé à un vingtième du traitement de base d’un fonctionnaire de ce grade, multiplié par le coefficient 0,9392628.

Le montant de la rétribution par journée de travail pour l’AIC débutant est fixé à 72 % de la rémunération d’un AIC expérimenté.

La [d]irection générale de l’[i]nterprétation informe sans délai les autres parties signataires de la présente [c]onvention des adaptations de la rétribution résultant des dispositions ci-dessus. »

8        L’AIC reçoit également des rétributions pour les jours non ouvrés, conformément à l’article 11 de la convention :

« Lorsque l’intervalle (au maximum trois jours) entre deux engagements successifs ne permet pas à l’AIC de retourner à son domicile professionnel, il lui est versé pour chaque jour non ouvré les deux tiers de la rétribution prévue à l’article 6 ainsi que l’indemnité journalière prévue à l’article 9.

Pour autant que les montants prévus à l’alinéa précédent ne dépassent pas le prix du billet de voyage et des indemnités y afférentes, le même régime peut être appliqué à l’AIC qui préfère séjourner au lieu d’affectation.

La demande d’application de cet article doit être annoncée au(x) service(s) recruteur(s) par l’AIC préférant séjourner au lieu d’affectation, avant le début des jours non ouvrés. »

9        Outre leur rétribution, les AIC reçoivent une indemnité forfaitaire de voyage et une indemnité journalière.

10      Aux termes de l’article 7 de la convention, le montant de l’indemnité forfaitaire de voyage « est égal à la moitié du montant de la rétribution journalière ».

11      Les modalités d’application de l’article 7 disposent que cette indemnité est due « lorsque l’AIC ayant son domicile professionnel en dehors de son lieu d’affectation doit voyager la veille du premier jour de son engagement ou ne peut regagner son domicile qu’après 24 h 00 le dernier jour de l’engagement ».

12      L’indemnité journalière fait l’objet de l’article 9 de la convention, libellé comme suit :

« L’AIC affecté en dehors de la zone locale, c’est-à-dire à plus de 60 km de son domicile professionnel, perçoit une indemnité égale aux indemnités journalières de mission des fonctionnaires de l’[i]nstitution pour laquelle il a été recruté. L’AIC est, sur présentation de la note d’hôtel, remboursé de ses frais d’hôtel dans la limite du plafond fixé pour ces mêmes fonctionnaires.

Le cas échéant, l’AIC perçoit une indemnité journalière supplémentaire. »

13      Les frais de voyage sont remboursés selon l’article 10 de la convention :

« Pour les AIC résidant en dehors de la zone locale, le remboursement des frais de voyage nécessaires encourus se fera sur présentation des pièces justificatives. S’il est fait à titre d’avance, il se fera dans la monnaie dans laquelle le titre de transport a été payé. »

14      L’article 13 de la convention définit ainsi la notion de domicile professionnel :

« Aux fins de l’application du présent titre [relatif au régime pécuniaire], les AIC ne peuvent avoir plus d’un domicile professionnel à la fois. Ce domicile professionnel est déclaré au plus tard lors du premier contrat conclu ; tout changement doit être notifié par écrit et ne peut porter que sur des périodes continues de six mois au moins.

Le domicile professionnel est, en principe, le lieu de départ et/ou de retour de l’AIC à destination et/ou en provenance de son lieu d’affectation. »

15      Selon les modalités d’application de l’article 24 de la convention :

« 1. Les AIC sont à la disposition de l’[i]nstitution pour laquelle ils ont été engagés à l’heure qui leur a été indiquée par le service recruteur. En l’absence de toute indication, ils sont à disposition de l’[i]nstitution à partir de 9 heures le premier jour de leur engagement.

2. Pour la Commission et la Cour de justice

a)      le dernier jour de leur engagement, les AIC ayant leur domicile professionnel en un lieu tel qu’ils peuvent le regagner avant minuit en quittant Bruxelles à 19 h 30 au plus tôt, seront libérés 2 heures avant l’heure prévue pour le décollage du dernier avion ou 45 minutes avant l’heure prévue pour le départ du dernier train, même si la réunion à laquelle ils sont affectés se poursuit,

b)      le dernier jour de leur engagement, les AIC ayant leur domicile professionnel au lieu d’affectation

1)      sont libérés à 21 heures au plus tard ;

2)      peuvent, s’ils en font la demande avant le début de leur engagement, se voir appliquer mutatis mutandis le paragraphe 2.a) [ci-dessus] pour leur permettre d’honorer un engagement dans un autre lieu le lendemain. »

16      L’article 25 de la convention traite du lieu d’affectation et dispose :

« Le lieu d’affectation de l’AIC est fixé dans le contrat d’engagement. Si les nécessités de service l’imposent, l’[i]nstitution se réserve la possibilité, après consultation de l’interprète, de modifier le lieu d’affectation mentionné dans le contrat. L’AIC peut être affecté au lieu de son domicile professionnel au cas où une affectation en dehors du domicile serait annulée. »

17      Conformément à l’article 23 de la convention et à l’article 73 du RAA, les voies de recours prévues par le statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») sont applicables par analogie aux AIC.

18      L’article 29 de la convention prévoit que chaque institution adapte sa réglementation concernant les AIC en conformité avec la convention.

19      Les contrats conclus pour le compte de la Cour de justice sont par ailleurs régis par les dispositions de la décision de son comité administratif, du 30 juin 1999, relative aux conditions de travail et de rémunération des interprètes de conférence. Cette décision ne contient pas de dispositions de caractère pécuniaire.

20      En pratique, la liquidation et le paiement des prestations des AIC sont faits par la Commission, pour le compte de l’institution ou de l’organisme ayant bénéficié de ces prestations.

 Faits à l’origine du litige

21      M. André est interprète de profession et effectue, en tant qu’AIC, des prestations pour le compte des institutions communautaires. Son domicile professionnel au sens de la convention est situé à Bruxelles.

22      Les 10 et 11 janvier 2005, il a effectué des prestations à Bruxelles, pour le compte de la Commission, puis les 12 et 13 janvier 2005 à Luxembourg, pour la Cour de justice. Cette dernière institution avait engagé le requérant avant la Commission.

23      La lettre de confirmation d’engagement par la Cour de justice lui avait été adressée le 14 décembre 2004, par la division de l’interprétation, qui l’avait invité à se présenter le 12 janvier 2005, à 9 h 00, au secrétariat de la division. À cette fin il a voyagé de Bruxelles à Luxembourg, selon ses affirmations, non contredites par la partie défenderesse, dans la soirée du 11 janvier 2005.

24      Dans le cadre d’un échange de courriels, la Commission a, le 8 mars 2005, informé le requérant qu’elle refusait de lui verser l’indemnité forfaitaire de voyage pour ses prestations des 12 et 13 janvier 2005, en motivant ainsi ce refus :

« Bien que la [c]onvention stipule que l’AIC a droit à cette indemnité au cas où il est obligé de voyager la veille de son engagement, un tel paiement au titre d’un jour où ce même AIC avait reçu une pleine journée de rémunération de la part d’une des institutions, ne serait pas cohérent avec le principe de bonne gestion financière. Si nous regardons la ratio legis de cette disposition de la [c]onvention, il est clair que l’objectif de cette indemnité est de compenser l’AIC pour le fait qu’il ne pouvait pas travailler pour un employeur/client la veille de son engagement auprès d’une des institutions vu qu’il serait obligé de voyager ce même jour. L’objectif est donc de compenser un manque à gagner et pas de lui permettre de recevoir un paiement supplémentaire de la part des institutions pour un jour normal de travail. Le fait que les contrats sont de deux institutions différentes n’a rien à voir étant donné qu’[elles] appliquent tou[te]s les deux la même [c]onvention et agissent chacun[e] au nom de l’Union européenne qui a un budget unique. »

25      En date du 5 juin 2005, le requérant a introduit une réclamation contre le courriel du 8 mars 2005.

26      Par décision du 6 octobre 2005, l’autorité habilitée à conclure les contrats (ci-après l’« AHCC ») a rejeté cette réclamation.

 Procédure et conclusions des parties

27      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer sa requête recevable et fondée ;

–        annuler la décision attaquée ;

–        lui octroyer une indemnité de 241,99 euros en réparation du préjudice qu’il a subi, majorée de la prévoyance vieillesse-décès et de l’assurance maladie ainsi que des intérêts à compter de la date d’exigibilité du principal, mais diminuée des retenues personnelles relatives à la prévoyance vieillesse-décès, à l’assurance maladie et à l’impôt communautaire ;

–        condamner la partie défenderesse aux dépens.

28      La partie défenderesse conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

29      À titre de mesures d’organisation de la procédure, prévues par l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal de première instance des Communautés européennes, applicable mutatis mutandis au Tribunal, en application de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement de procédure de ce dernier, le Tribunal, par lettres du greffe des 8 juin et 14 juillet 2006, a invité les parties à produire copies de certains documents et à répondre à certaines questions. Par lettres parvenues au greffe respectivement les 13 et 14 juin 2006, les parties ont déféré à la première demande du Tribunal. Elles ont répondu à la deuxième lettre par des courriers qui sont parvenus au greffe respectivement les 24 et 25 août 2006.

 En droit

 Sur les conclusions en annulation

 Arguments des parties

30      À l’appui de ses conclusions en annulation, le requérant invoque un seul moyen, tiré de la violation de l’article 7 de la convention et résultant de l’exigence par la Commission d’une condition supplémentaire non prévue par cette disposition, telle qu’explicitée par ses modalités d’application. Ladite exigence serait tirée de la prétendue ratio legis de l’article 7 de la convention. Selon le requérant, ce dernier article, tel qu’explicité par ses modalités d’application, est suffisamment clair et précis, de sorte que la détermination exacte de sa finalité ne s’avère pas nécessaire à son application. En toute hypothèse, la finalité de l’indemnité forfaitaire de voyage serait la rémunération du temps de voyage et non pas celle que la Commission lui attribuerait, à savoir la compensation d’un manque à gagner. La circonstance que le requérant aurait bénéficié en l’espèce de contrats successifs avec deux institutions communautaires serait sans incidence sur l’interprétation de l’article 7 de la convention.

31      La Commission conteste en premier lieu le caractère clair de l’article 7 de la convention, tel qu’explicité par ses modalités d’application, rappelant à cet égard les divergences de vues entre les institutions de l’Union européenne, d’une part, et l’Association internationale des Interprètes de conférence, d’autre part, exprimées lors de la négociation de cette convention quant au sens et à la portée de cette disposition. Il s’avèrerait ainsi nécessaire de rechercher sa finalité. À cet effet, selon une jurisprudence constante, il faudrait tenir compte, non seulement des termes de l’article 7 de la convention, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont il fait partie. Οr, pour la Commission, l’indemnité qu’il prévoit, relevant par ailleurs du titre II de la convention portant sur le régime pécuniaire des AIC, vise la compensation du manque à gagner. En effet, si la finalité de cet article était celle avancée par le requérant, à savoir la rémunération du temps de voyage, le montant de l’indemnité ne serait pas fixé en pourcentage de la rétribution journalière prévue à l’article 6 de la convention, mais en fonction notamment de la durée du voyage.

32      En deuxième lieu, la partie défenderesse relève que la compensation des frais complémentaires liés au voyage et supportés par les AIC ferait l’objet d’une autre indemnité, prévue par la convention, à savoir l’indemnité journalière, et que, par conséquent, l’interprétation soutenue par le requérant permettrait à l’AIC d’obtenir une rétribution largement supérieure aux limites imposées par l’article 6 de la convention, ce qui serait constitutif d’un enrichissement sans cause de l’AIC concerné, en l’occurrence du requérant.

33      Enfin, la Commission considère que le parallélisme entre le régime des AIC et celui des interprètes permanents s’opposerait à l’octroi aux premiers d’un avantage dont ne bénéficieraient pas les seconds.

 Appréciation du Tribunal

34      Force est de constater d’emblée qu’une lecture littérale des modalités d’application de l’article 7 de la convention plaide clairement en faveur de la position du requérant. En effet, la restriction à laquelle la Commission souhaite soumettre l’octroi de l’indemnité forfaitaire de voyage ne trouve aucun appui dans le texte de la disposition concernée.

35      Certes, ainsi que la Commission le relève à juste titre, il est de jurisprudence constante que, aux fins de l’interprétation d’une disposition du droit communautaire, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (voir, notamment, arrêts de la Cour du 17 novembre 1983, Merck, 292/82, Rec. p. 3781, point 12 ; du 21 février 1984, St. Nikolaus Brennerei, 337/82, Rec. p. 1051, point 10, et du 7 juin 2005, VEMW e.a., C‑17/03, Rec. p. I‑4983, point 41). Cette jurisprudence vaut également pour l’interprétation d’un texte tel que la convention, qui présente les caractéristiques d’une convention collective visant à réglementer les rapports entre les institutions et une catégorie de travailleurs indépendants.

36      Il n’est cependant pas sans pertinence de constater que, dans les affaires ayant donné lieu à cette jurisprudence, le libellé des dispositions en cause était susceptible d’être interprété de plusieurs manières et présentait même des « difficultés d’interprétation » (arrêt St. Nikolaus Brennerei, précité, point 10). Or, tel n’est pas le cas du libellé de la disposition litigieuse en l’espèce, lequel, ainsi qu’il vient d’être constaté, n’est en principe susceptible que de l’interprétation soutenue par le requérant. Il est vrai que la portée que la Commission souhaiterait donner à l’article 7 de la convention n’est pas incompatible avec le contexte général de cette disposition ; il s’agit en effet d’une interprétation rationnelle, en termes de gestion administrative, des indemnités et des rémunérations. Toutefois, la finalité que le requérant attribue à cet article est également défendable et, contrairement à ce que soutient la Commission, la position selon laquelle l’indemnité forfaitaire de voyage constitue une compensation pour le désagrément personnel provoqué par l’obligation de voyager la veille du jour des prestations à effectuer, et, de surcroît à une heure tardive, après une journée complète de travail, ne saurait être qualifiée ni d’« absurde » ni de « surréaliste ».

37      En toute hypothèse, ni le contexte de l’article 7, ni les objectifs poursuivis par la réglementation dont il fait partie fournissent des arguments permettant d’écarter l’interprétation littérale.

38      S’agissant, d’une part, des objectifs poursuivis par la réglementation en cause, il convient de constater que les divergences d’opinions exprimées lors des négociations ayant précédé la conclusion de la convention, précisément quant à la finalité de son article 7, plaident dans le sens d’une interprétation littérale.

39      Certes, ainsi qu’il est rappelé dans la réponse à la réclamation du requérant, la direction générale (DG) de l’interprétation avait indiqué, lors desdites négociations, que l’indemnité forfaitaire de voyage n’était pas due à l’AIC « qui a la possibilité de travailler la veille tout en arrivant à une heure raisonnable à son lieu d’affectation, et qui, de ce fait, ne doit pas se voir compenser un manque à gagner fictif ». Cependant, selon la position exprimée par les représentants des interprètes lors de ces négociations, cette indemnité constitue une compensation du temps de voyage et non d’un manque à gagner éventuel. Il est clair que, si la première de ces deux approches devait prévaloir, on pourrait normalement s’attendre à ce qu’une condition supplémentaire figure à l’article 7 de la convention, tel qu’explicité par ses modalités d’application, précisant notamment que l’indemnité litigieuse ne serait pas versée aux AIC qui auraient pu travailler la veille de leur engagement. À l’inverse, la seconde approche n’impose pas un remaniement du texte de cet article, lequel n’est assorti d’aucune restriction ni condition relative à l’éventualité d’un travail exécuté par l’AIC pour le compte d’une institution communautaire la veille de son engagement par une autre institution communautaire. La version finale des modalités d’application de l’article 7 de la convention ne contenant que deux conditions, relatives respectivement à la localisation du domicile professionnel de l’AIC et à l’obligation pour lui soit d’avoir voyagé la veille du premier jour de son engagement soit d’avoir été dans l’impossibilité de regagner son domicile avant 24 h 00 le dernier jour de son engagement, elle offre un argument supplémentaire en faveur de l’interprétation soutenue par le requérant. En toute hypothèse, dans la mesure où le texte final de l’article 7, précité, ne reflète aucunement les divergences de vues apparues lors des négociations susmentionnées et où il ne contient pas d’expressions de nature à mettre en doute une lecture littérale ou pouvant être interprétées comme des réserves, on ne peut qu’en déduire que, quelles qu’aient été les thèses des différents participants auxdites négociations, la position qui a prévalu permet une interprétation aussi conforme que possible au libellé du texte adopté, sans restriction ni condition implicite.

40      D’autre part, le Tribunal déduit du contexte de l’article 7 de la convention un motif supplémentaire pour privilégier une interprétation littérale de cette disposition. En effet, s'il est vrai que, selon la jurisprudence, les dispositions du droit communautaire qui donnent droit à des prestations financières doivent être interprétées strictement (arrêts du Tribunal du 18 septembre 2003, Lebedef/Commission, T-221/01, RecFP p.-A-211 et II-1317, point 38, et du 16 décembre 2004, Pappas/Commission, T-11/02, RecFP p. I-A-381 et II-1773, point 53), il n'en reste pas moins que lorsque, comme dans les conditions de l'espèce, une prestation financière est explicitement et clairement accordée par une institution à ses fonctionnaires ou agents, les limitations éventuelles à son octroi doivent en principe être également énoncées de manière explicite et claire dans le texte prévoyant cette prestation, ne serait-ce que pour des considérations liées au principe de sécurité juridique. Pour que l’existence d’une telle condition ou d’une telle limitation soit exceptionnellement considérée comme implicite, il faut que le libellé du texte soit suffisamment ouvert pour le permettre. Or, le libellé des modalités d’application de l’article 7 soumet explicitement l’octroi de l’indemnité forfaitaire de voyage à deux conditions seulement, à savoir d’une part, que l’AIC ait son domicile professionnel en dehors de son lieu d’affectation, et d’autre part, qu’il doive voyager la veille du premier jour de son engagement ou qu’il ne puisse regagner son domicile qu’après 24 h 00 le dernier jour de l’engagement. En outre, l’indemnité en question est qualifiée de « forfaitaire », sans aucune autre mention permettant de soumettre son octroi à l’existence de conditions particulières, y compris une condition tenant au manque à gagner effectif subi par l’AIC.

41      Par ailleurs, une interprétation conforme aux textes apparaît davantage justifiée au vu du contexte de l’article 7 de la convention, dès lors que non seulement le texte de la convention se réfère expressément à la possibilité de contrats consécutifs entre institutions et AIC, mais qu’il tente même de faciliter de tels contrats. En effet, l’article 24, paragraphe 2, sous b), point 2, des modalités d’application permet à l’AIC de se voir libérer suffisamment tôt le dernier jour de son engagement pour pouvoir honorer un engagement dans un autre lieu d’affectation le lendemain. La circonstance que, tout en facilitant les contrats successifs, les rédacteurs de la convention se sont abstenus de toute limitation de la portée de son article 7, et en particulier de toute disposition permettant de le rendre inapplicable aux contrats successifs, constitue un argument supplémentaire, à la fois littéral et systématique, voire logique, en faveur de l’interprétation avancée par l’AIC.

42      En somme, la thèse de la Commission ne conduit pas à choisir, sur la base du sens ordinaire de ses termes, ainsi que de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie, l’interprétation la plus appropriée d’une disposition qui se prêterait à diverses interprétations. Par cette thèse, la Commission demande que soit ajoutée au texte une condition négative implicite.

43      Compte tenu de la clarté du texte des modalités d’application de l’article 7 de la convention, lequel n’est pas de nature à suggérer l’existence de limitations implicites, et eu également égard au contexte de cet article et aux objectifs poursuivis par la réglementation dont il fait partie, le Tribunal ne s’estime pas confronté à un choix interprétatif. Sans pour autant nier les intentions affichées par les institutions de l’Union européenne lors des négociations de la convention, il n’en demeure pas moins que la Commission est liée par le libellé des textes qu’elle a librement signés.

44      Il est d’ailleurs de jurisprudence constante, d’une part, que, à défaut de travaux préparatoires exprimant clairement l’intention des auteurs d’une disposition, il convient de ne se baser que sur la portée du texte, tel qu’il a été établi, et lui donner le sens qui ressort de son interprétation littérale et logique (arrêt de la Cour du 1er juin 1961, Simon/Cour de justice, 15/60, Rec. p. 225, 244), et, d’autre part, que, à l’interprétation d’une disposition d’un texte réglementaire résultant de son libellé même, on ne saurait substituer une interprétation différente, s’appuyant sur la déclaration unilatérale de l’auteur du texte (arrêt de la Cour du 23 février 1988, Commission/Italie, 429/85, Rec. p. 843, points 8 et 9).

45      Cette interprétation littérale se trouve corroborée par la pratique constatée dans l’application de la convention. De manière générale, la pratique peut également constituer un élément important à prendre en compte en matière d’interprétation d’un texte juridique. En effet, selon un principe général d’interprétation des contrats, les parties qui interprètent et appliquent une stipulation contractuelle d’une certaine manière et pendant un certain temps ne pourraient déroger à cette pratique qu’en présence de circonstances nouvelles et substantielles. Ce principe vaut a fortiori pour les avantages accordés par l’employeur dans le cadre de contrats de travail et il devrait en aller de même pour les contrats conclus en application de conventions collectives.

46      La pratique de l’application de la convention par les parties permet au Tribunal d’aboutir à deux constatations importantes pour l’interprétation de l’article 7 de la convention en vue de la solution du présent litige.

47      D’une part, ainsi que le requérant l’a indiqué en réponse à une question posée par le Tribunal lors de l’audience, sans être contredit sur ce point par la partie défenderesse, la Commission, lors de la liquidation des montants dus aux AIC pour leurs prestations, ne les interroge jamais sur leur emploi du temps de la veille de leur engagement par une institution communautaire. Or, si la partie défenderesse considère que l’indemnité forfaitaire de voyage n’est pas due dans les cas où l’AIC a travaillé pour une autre institution la veille de son engagement, elle devrait leur poser systématiquement cette question, afin de ne pas procéder à des paiements indus à charge du budget communautaire. Certes, la Commission n’aurait pas toujours les moyens de vérifier la véracité des déclarations des AIC. Une telle circonstance ne la dispense cependant pas de l’obligation de se conformer aux textes applicables, tels qu’elle les interprète, la responsabilité des AIC pour d’éventuelles fausses déclarations étant une question étrangère au présent litige. Ainsi, en s’abstenant d’exiger une telle déclaration, elle fournit un indice en faveur de l’interprétation de la convention soutenue par le requérant. Parallèlement, elle conforte ce dernier dans sa certitude que, pour la Commission, l’indemnité forfaitaire de voyage n’est soumise qu’aux seules conditions expressément énoncées dans l’article 7 de la convention, tel qu’explicité par ses modalités d’application.

48      D’autre part, il résulte des réponses des parties à la lettre du greffe du Tribunal du 14 juillet 2006, que, en règle générale, la Commission, antérieurement aux faits litigieux, payait au requérant l’indemnité forfaitaire de voyage, quand bien même ce dernier avait travaillé la veille pour une autre institution communautaire. Le requérant cite en ce sens quatre exemples, non contredits par la Commission, tandis que cette dernière se réfère à deux autres exemples, dont l’un abonde dans le sens de l’argumentation dudit requérant, la partie défenderesse ayant soutenu, sur ce dernier point, que ce paiement avait été fait par erreur. Certes, pour la période postérieure aux faits litigieux, la Commission cite de nombreux exemples qui vont dans le sens de son interprétation de l’article 7 de la convention et qui concernent tant le requérant que d’autres AIC. Elle précise à cet égard qu’il n’est devenu possible de vérifier les contrats successifs conclus entre AIC et institutions communautaires qu’à partir de janvier 2005, consécutivement à la fusion des bureaux de paiement de la DG « Interprétation » et de l’office « Gestion et liquidation des droits individuels », ainsi qu’à la centralisation de l’ensemble des opérations de paiement par la DG « Interprétation ». Ces affirmations, sans doute exactes, peuvent tout au plus illustrer clairement la position de la Commission quant à l’interprétation que l’article 7 de la convention devrait recevoir, question sur laquelle son comportement avait pu faire naître antérieurement une incertitude chez les AIC et, en toute hypothèse, chez le requérant. De telles affirmations ne sont toutefois pas déterminantes pour l’issue du présent litige, ni même pour l’interprétation que devrait, en règle générale, recevoir l’article 7 de la convention, car elles visent à justifier le changement de comportement de la Commission par des considérations relatives à l’organisation interne de ses services. Dans ce contexte, le Tribunal relève que, si le représentant de la partie défenderesse a confirmé à l’audience que la fusion susmentionnée permettait dorénavant à la Commission de déceler tous les cas de contrats consécutifs conclus entre un AIC et une ou plusieurs institutions et de refuser, en conséquence, le paiement de l’indemnité forfaitaire de voyage pour le deuxième contrat, en revanche, il n’a pas été en mesure de confirmer que cette indemnité était dorénavant refusée aux AIC qui, la veille d’un contrat avec une institution, avaient travaillé non pas pour une autre institution, mais pour une entreprise tierce, aucune déclaration n’étant, dans une telle hypothèse, exigée de leur part aux fins de supprimer le paiement de l’indemnité.

49      Dans ces conditions, à supposer même, à titre subsidiaire, que la principale raison d’être de l’indemnité forfaitaire de voyage soit, ainsi que la Commission le prétend, la compensation du manque à gagner subi par l’AIC, force est de constater que, au moins jusqu’au début de l’année 2005, les personnes concernées par l’application de la convention, et en tout état de cause le requérant et la Commission, lui ont reconnu une portée générale, avec une compensation systématique et forfaitaire du phénomène du manque à gagner, sans obligation de vérifier au cas par cas la réalité d’un tel manque à gagner, ce probablement eu égard à la lourde charge de travail administratif qu’aurait exigé la vérification de la condition supplémentaire à laquelle, selon la Commission, l’octroi de ladite indemnité était soumise. Par ailleurs, si la finalité de cette indemnité était la compensation d’un manque à gagner effectif subi par l’AIC, la Commission n’aurait pas dû se satisfaire de la preuve que ce dernier n’avait pas travaillé la veille de son engagement, mais aurait dû exiger la preuve qu’il disposait d’une offre d’emploi qu’il avait dû rejeter, car, à proprement parler, un manque à gagner ne peut se concevoir que dans ce dernier cas.

50      L’argument de la Commission doublement tiré, d'une part, de l’insertion de l’article 7 dans le titre II de la convention, relatif au régime pécuniaire des AIC, et, d'autre part, de ce que l’indemnité litigieuse est calculée en pourcentage de la rémunération, doit aussi être écarté. Non seulement toutes les dispositions ouvrant droit à des prestations pécuniaires font partie du même titre de la convention, mais la circonstance que le montant de l’indemnité forfaitaire de voyage est le même, quelle que soit la distance à parcourir par l'AIC, revêt un caractère objectif et permet de simplifier le travail administratif lié au calcul des droits pécuniaires des AIC, sans plaider nécessairement dans le sens suggéré par la Commission, à savoir la compensation par cette indemnité du manque à gagner subi par l’AIC. En outre, le Tribunal considère comme inopérant l'argument de la Commission suivant lequel, si la finalité de l'article 7 était celle suggérée par le requérant, le montant de l'indemnité devrait être calculé en fonction de la durée du voyage. En effet, un tel mode de calcul du montant de l'indemnité litigieuse pourrait aussi refléter la finalité que la Commission attribue à cette indemnité, car, plus la distance à parcourir par l’AIC est grande, plus son manque à gagner pourrait s’avérer élevé, le temps passé à voyager sans pouvoir travailler étant, dans cette hypothèse, plus long.

51      Quant à l’argument tiré, premièrement, du double emploi que l'indemnité litigieuse ferait avec l'indemnité journalière, deuxièmement, de la méconnaissance de l’article 6 de la convention et, troisièmement, de l’enrichissement sans cause du requérant, le Tribunal considère que lui aussi est à écarter, à supposer même que la finalité de l’article 7 de la convention soit celle que la Commission avance et non pas la compensation du désagrément du voyage effectué par l’AIC. En effet, le caractère forfaitaire du paiement prévu à l’article 7 de la convention peut tout aussi bien être l’expression d’un système de compensation systématique d’un manque à gagner présumé, sans que ladite compensation soit liée aux circonstances de chaque engagement pris isolément. Par ailleurs, l'indemnité journalière a un objet bien distinct de celui que le requérant ou la Commission attribuent à l'indemnité litigieuse, tandis que l'article 6 ne vise que la rémunération, à proprement parler, de l'AIC et ne peut pas être interprété comme comportant des limites implicites aux indemnités prévues par la convention.

52      La Commission invoque par ailleurs un argument tiré de l’absence d’avantage pécuniaire analogue pour les interprètes permanents. Cet argument est à écarter. En effet, les divergences entre le régime auquel ceux-ci sont soumis et celui dont relèvent les AIC sont trop importantes pour rendre décisif un tel argument. Les interprètes permanents bénéficient d’une sécurité d’emploi, mais sont en même temps liés par une obligation de disponibilité envers leurs institutions, de telles caractéristiques ne se retrouvant pas pour les AIC, ce qui pourrait justifier que l’indemnité forfaitaire de voyage leur soit réservée. Cette indemnité pourrait, d’une part, compenser partiellement la situation désavantageuse dans laquelle ils se trouvent par rapport aux interprètes permanents, et d’autre part, constituer une motivation pour que les AIC, à conditions d’emploi égales, ne préfèrent pas les employeurs tiers aux institutions.

53      Un élément de nature à plaider en faveur de la position de la Commission pourrait résulter de la façon dont est appliqué l’article 24, paragraphe 2, de la convention, tel qu’explicité par ses modalités d’application. Conformément à ces dispositions, le dernier jour de son engagement, l’AIC peut se voir libérer plus tôt, afin de pouvoir regagner son domicile dans la soirée, de manière à lui permettre d’honorer un autre engagement le lendemain. Une telle possibilité est expressément prévue au paragraphe 2, sous b), point 2, des modalités d’application de cet article. Si l’application pratique de cette disposition était réservée, en règle générale, aux cas où l’autre engagement à honorer a été conclu avec une institution, cela constituerait un argument dans le sens de la position de la Commission. Or, interrogée à ce sujet par le Tribunal, celle-ci n’a pas été en mesure de confirmer l’existence d’une telle pratique.

54      Il résulte de tout ce qui précède que l’argumentation de la Commission, fondée essentiellement sur la finalité de l’indemnité forfaitaire de voyage, doit être écartée.

 Sur les conclusions indemnitaires

55      La partie défenderesse soulève l’irrecevabilité de la demande d’indemnité correspondant aux sommes dues au titre de l’indemnité forfaitaire de voyage, au motif que, selon une jurisprudence constante, il n’appartient pas à la juridiction communautaire d’adresser des injonctions aux institutions communautaires et qu’en cas d’annulation de la décision attaquée, il incombe à ces dernières de prendre les mesures que comporte l’exécution d’un tel arrêt.

56      S’il est vrai que le Tribunal n’a pas compétence pour adresser des injonctions aux institutions, en revanche dans les litiges de caractère pécuniaire, il possède une compétence de pleine juridiction, conformément à l’article 91, paragraphe 1, deuxième phrase, du statut. Dans la mesure où le requérant conclut à ce qu’il soit ordonné à la Commission de lui verser le montant qui correspond à l’indemnité forfaitaire de voyage qui ne lui a pas été payée, le Tribunal estime qu’il s’agit de conclusions de caractère pécuniaire, pour lesquelles, ainsi qu’il vient d’être dit, il dispose d’une compétence de pleine juridiction (arrêt du Tribunal de première instance du 30 novembre 1993, Vienne/Parlement, T‑15/93, Rec. p. II‑1327, point 41). Partant, ces conclusions sont recevables.

57      Cette constatation n’est pas infirmée par le fait que le requérant, tout en quantifiant avec précision le montant de cette indemnité à 241,99 euros, ajoute que ce montant doit, d’une part, être majoré de la prévoyance vieillesse-décès et de l’assurance maladie et, d’autre part, être diminué des retenues personnelles au titre de la prévoyance vieillesse-décès, de l’assurance maladie et de l’impôt communautaire, ces montants étant objectivement déterminables (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 23 mars 2000, Rudolph/Commission, T‑197/98, RecFP p. I‑A‑55 et II‑241, point 33). Il appartiendra à la Commission, lors du paiement à effectuer en exécution de l’arrêt du Tribunal, de procéder aux retenues requises par les règles en vigueur.

58      Par ailleurs, la somme à payer sera majorée des intérêts moratoires, au taux fixé par la Banque centrale européenne pour les principales opérations de refinancement et applicable durant la période concernée, majoré de deux points (arrêts du Tribunal de première instance du 18 septembre 2002, Puente Martín/Commission, T‑29/01, RecFP p. I‑A‑157 et II‑833, point 88, et du 9 juillet 2003, Efthymiou/Commission, T‑22/01, RecFP p. I‑A‑177 et II‑891, point 45). Conformément à l’article 18 de la convention, ces intérêts courent à compter du 14 février 2005.

 Sur les dépens

59      Ainsi que le Tribunal l’a jugé dans son arrêt du 26 avril 2006, Falcione/Commission (F‑16/05, non encore publié au Recueil, points 77 à 86), aussi longtemps que le règlement de procédure du Tribunal et, notamment, les dispositions particulières relatives aux dépens ne sont pas entrés en vigueur, il y a lieu de faire seulement application du règlement de procédure du Tribunal de première instance.

60      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure de ce dernier Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé en ses moyens dans la présente instance, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la Commission des Communautés européennes, en date du 8 mars 2005, refusant à M. André l’indemnité forfaitaire de voyage pour la prestation effectuée les 12 et 13 janvier 2005 pour le compte de la Cour de justice des Communautés européennes à Luxembourg, est annulée.

2)      La Commission des Communautés européennes est condamnée à payer au requérant le montant de cette indemnité, majoré des intérêts moratoires au taux fixé par la Banque centrale européenne pour les principales opérations de refinancement et applicable durant la période concernée, majoré de deux points, ce à compter du 14 février 2005.

3)      La Commission des Communautés européennes est condamnée aux dépens.

Mahoney

Boruta

Tagaras

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 décembre 2006.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

      P. Mahoney



* Langue de procédure : le français.