Language of document : ECLI:EU:C:2016:321

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MANUEL CAMPOS SÁNCHEZ-BORDONA


présentées le 3 mai 2016 (1)

Affaire C‑525/14

Commission européenne

contre

République tchèque

« Manquement d’État – Libre circulation des marchandises – Article 34 TFUE – Restrictions quantitatives à l’importation – Mesures d’effet équivalent – Métaux précieux poinçonnés dans un pays tiers conformément à la législation néerlandaise – Importation en République tchèque après mise en libre pratique dans un État membre pouvant être différent du Royaume des Pays-Bas – Refus de reconnaissance dudit poinçon – Protection des consommateurs – Recevabilité »






1.        La République tchèque conteste le manquement qui lui est reproché par la Commission européenne et affirme que les articles 34 et 36 TFUE n’interdisent pas la pratique administrative de son bureau national de garantie, dans la mesure où les poinçons du bureau de garantie WaarborgHolland (Pays-Bas) sont apposés à la fois aux Pays-Bas et dans des établissements de pays tiers (Chine et Thaïlande).

2.        La jurisprudence de la Cour est à ce jour constante en ce qui concerne la reconnaissance mutuelle des poinçons nationaux des États membres. La nouveauté du présent recours réside dans le fait qu’il y a lieu de décider si cette jurisprudence est également applicable aux ouvrages en métaux précieux qui, provenant de pays tiers, sont importés et mis en libre pratique dans l’Union européenne, alors qu’ils sont revêtus du poinçon du bureau de garantie néerlandais WaarborgHolland apposé dans ces pays tiers.

3.        Il est vrai que la mise en libre pratique implique l’assimilation des produits provenant de pays tiers aux marchandises intracommunautaires. Cette assimilation peut toutefois ne pas suffire pour l’obtention de la reconnaissance mutuelle : la commercialisation préalable du produit dans un État membre, conformément à ses règles nationales, est une condition requise pour qu’un autre État membre (l’État d’importation) accepte l’équivalence et n’impose pas l’application de ses propres règles. Afin de définir jusqu’à quel point et dans quelles circonstances cette condition est requise, il convient, en l’espèce, de procéder à une explication plus détaillée.

I –    Déroulement de la procédure en manquement

4.        Le 30 septembre 2011, la Commission a envoyé à la République tchèque une mise en demeure dans laquelle elle demandait des explications sur le refus de celle-ci de reconnaître les poinçons néerlandais, et en particulier ceux du bureau de garantie WaarborgHolland.

5.        Dans sa réponse du 30 novembre 2011, la République tchèque a admis qu’elle ne reconnaissait pas ces poinçons néerlandais, qui, selon elle, posaient un problème de libre prestation des services et non de libre circulation des marchandises. Le gouvernement tchèque a justifié son rejet par l’impossibilité de distinguer les produits revêtus des poinçons WaarborgHolland apposés aux Pays‑Bas de ceux revêtus des poinçons WaarborgHolland apposés dans des pays tiers, puis importés dans l’Union.

6.        La Commission, n’étant pas convaincue par les explications données par les autorités tchèques, a envoyé à la République tchèque un avis motivé le 30 mai 2013, dans lequel elle a indiqué que les dispositions du TFUE sur la libre circulation des marchandises s’appliquaient aux marchandises mises en libre pratique sur le territoire douanier de l’Union et, partant, aux marchandises des pays tiers importés dans un État membre, en vertu de l’article 29 TFUE. La Commission a invité la République tchèque à se conformer à l’article 34 TFUE dans un délai de deux mois.

7.        Dans sa réponse du 23 juillet 2013 à l’avis motivé, la République tchèque a maintenu sa position et a insisté sur le fait que son refus de commercialiser les ouvrages en métaux précieux revêtus des poinçons WaarborgHolland était justifié par la nécessité de protéger ses consommateurs.

8.        Devant l’attitude de la République tchèque, la Commission a formé le présent recours en manquement le 20 novembre 2014, en réitérant les arguments exposés au cours de la procédure préalable. Dans son mémoire en défense, la République tchèque a maintenu la position qu’elle avait défendue devant la Commission.

9.        Le 26 février 2015, la République française a présenté au président de la Cour une demande d’intervention au présent recours, au soutien de la position défendue par la République tchèque. Le 9 avril 2015, le greffe de la Coura informé la République française que sa demande avait été acceptée conformément à l’article 130 du règlement de procédure de la Cour de justice et celle-ci a présenté son mémoire en intervention le 26 mai 2015.

10.      Tant la Commission que la République tchèque ont maintenu leurs positions antagonistes dans le mémoire en réplique et dans le mémoire en duplique, ainsi que lors de l’audience qui s’est tenue le 17 février 2016 devant la Cour.

II – Recevabilité du recours

11.      Pour la République tchèque, le recours est partiellement irrecevable dans la mesure où la Commission lui a reproché un manquement de manière imprécise et équivoque, en faisant allusion à son refus de reconnaître « certains poinçons néerlandais » et, « en particulier, les poinçons WaarborgHolland », alors que, durant la phase précontentieuse et dans sa requête, elle n’avait fait référence qu’aux poinçons WaarborgHolland, sans en citer aucun autre. Partant, le recours devrait se limiter à cette dernière pratique des autorités tchèques.

12.      La Commission s’oppose à l’exception d’irrecevabilité partielle, en affirmant qu’elle n’a pas élargi l’objet du recours, dans la mesure où, lors de la procédure précontentieuse (et notamment dans l’avis motivé), elle a reproché à la République tchèque une violation de l’article 34 TFUE au motif que celle-ci n’avait pas reconnu « certains poinçons néerlandais ».

13.      Selon une jurisprudence constante de la Cour, dans le cadre d’un recours en manquement, toute requête introductive d’instance doit indiquer de manière claire et précise l’objet du litige ainsi que l’exposé sommaire des moyens invoqués pour permettre à la défenderesse de préparer sa défense et à la Cour d’exercer son contrôle. Il en découle que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours est fondé doivent ressortir d’une façon cohérente et compréhensible du texte même de la requête et que les conclusions de cette dernière doivent être formulées de manière non équivoque afin d’éviter que la Cour ne statue ultra petita ou bien n’omette de statuer sur un grief.

14.      La Cour a également considéré que, dans le cadre d’un recours en manquement, la Commission devait présenter les griefs de façon cohérente et précise, afin de permettre à l’État membre et à la Cour d’appréhender exactement la portée de la violation du droit de l’Union reprochée. Cette condition est nécessaire pour que ledit État puisse faire valoir utilement ses moyens de défense et pour que la Cour puisse vérifier l’existence du manquement allégué (2).

15.      À la lumière de ces conditions, je crois que l’argument de la République tchèque est fondé et qu’il convient de déclarer le recours introduit par la Commission comme partiellement irrecevable. La délimitation de l’objet du manquement est imprécise lorsqu’elle parle du refus de la République tchèque de reconnaître « certains poinçons néerlandais » et la Commission ne parle que des ouvrages marqués par le bureau de garantie WaarborgHolland, basé à Gouda (Pays-Bas), le seul ayant délocalisé ses activités dans des États tiers (à savoir en Chine et en Thaïlande), et elle n’ajoute des informations que sur ces ouvrages.

16.      La Commission n’a présenté aucun indice établissant que les autorités tchèques refusent de reconnaître le poinçon apposé par l’autre bureau de garantie néerlandais (Edelmetaal Waarborg Nederland B.V., établi à Joure, Pays-Bas). En outre la République tchèque affirme, sans être contredite par la Commission, qu’elle n’exige l’apposition du poinçon tchèque que sur les ouvrages en métaux précieux revêtus du poinçon WaarborgHolland.

17.      Bien qu’il existe une certaine cohérence entre l’attitude adoptée par la Commission durant la phase précontentieuse et au stade du recours, j’estime que la Commission a manqué de précision dans ses griefs à l’encontre de la République tchèque en ce qui concerne le refus de cette dernière de reconnaître des poinçons néerlandais différents de ceux apposés par WaarborgHolland. Partant, il convient de déclarer le recours formé par la Commission comme partiellement irrecevable en ce qui concerne ces poinçons, et comme recevable en ce qui concerne le rejet par les autorités tchèques des ouvrages en métaux précieux revêtus des poinçons WaarborgHolland.

III – Analyse du fond de l’affaire

18.      Avant d’analyser le manquement reproché par la Commission à la République tchèque, il convient de présenter certains points de la réglementation juridique du commerce des ouvrages en métaux précieux, dans l’Union et au niveau international.

A –    Considérations préalables sur le commerce des ouvrages en métaux précieux

19.      La commercialisation de ces ouvrages est l’un des domaines dans lequel les obstacles techniques (générés par l’existence de règles différentes dans les États membres de l’Union) n’ont pas pu être éliminés par l’harmonisation des législations. Devant l’échec des propositions successives de la Commission (3), la technique juridique de la reconnaissance mutuelle a été appliquée par la jurisprudence de la Cour et proposée par la Commission elle-même comme une alternative à l’absence d’harmonisation (4).

20.      Le fait qu’il n’existe pas encore de véritable marché intérieur, ni de libre circulation, pour les ouvrages en métaux précieux, découle de ce que, dans de nombreux États membres, il existe des bureaux nationaux de garantie qui apposent différents marquages et poinçons pour garantir leur origine et leur titre (5). Ces poinçons ont pour objectif de protéger les consommateurs, de prévenir les fraudes et de garantir la loyauté des transactions commerciales.

21.      Le panorama des réglementations nationales relatives aux ouvrages en métaux précieux est très hétérogène. Quinze États (parmi lesquels la République tchèque et le Royaume des Pays-Bas) ont instauré un système de marquage obligatoire, effectué par leur bureau national de garantie, pour indiquer que l’ouvrage a été soumis à des analyses de manière satisfaisante. Sept États membres ont un système de marquage volontaire et cinq autres n’ont aucun système.

22.      La majeure partie des obstacles techniques au commerce de ces ouvrages provient de l’existence d’une procédure de contrôle du produit par un bureau officiel de garantie (assay office) avant son introduction sur le marché national, ainsi que de l’exigence d’un marquage obligatoire (6), appelé poinçon, sur lequel figure le nom du fabricant, la nature du métal et son titre. Les poinçons les plus répandus sont les suivants :

–        le poinçon du bureau officiel de garantie (ci-après le « poinçon de garantie »), informant que l’objet a été soumis à des analyses de manière satisfaisante, qui, en général, précise également la nature du métal et son titre ;

–        le poinçon de responsabilité (d’origine) du fabricant ou de l’importateur, qui est habituellement enregistré dans le pays où l’ouvrage en métal précieux est contrôlé ;

–        le poinçon de titre (ou poinçon du métal) (7), qui indique la nature du métal précieux et son degré de pureté, exprimé en carats ou en millièmes ;

–        le poinçon commun de contrôle, établi par la convention sur le contrôle et le poinçonnement des ouvrages en métaux précieux, signée à Vienne le 15 novembre 1972 et entrée en vigueur en 1975 (ci-après la « convention de Vienne ») (8).

23.      Compte tenu des obstacles techniques générés par les différences entre les réglementations nationales sur les poinçons des ouvrages en métaux précieux, la Cour de justice a appliqué en la matière sa jurisprudence relative aux articles 34 et 36 TFUE. Elle l’a fait, notamment, en se référant à l’obligation de reconnaissance mutuelle des poinçons équivalents.

24.      Le raisonnement de la Cour a été clair dans les arrêts Robertson e.a., Houtwipper, Commission/Irlande et Juvelta (9), dans des affaires portant sur le commerce au sein de l’Union de ces marchandises. Les réglementations nationales constituent des mesures d’effet équivalant à l’importation (de sorte qu’elles sont contraires à l’article 34 TFUE), si elles exigent que des ouvrages en métaux précieux importés d’autres États membres, dans lesquels ils sont légalement commercialisés et poinçonnés, soient soumis à un nouveau poinçonnage dans l’État membre d’importation, dans la mesure où cette condition a pour effet de rendre les importations au sein de l’Union de ces ouvrages plus difficiles et coûteuses.

25.      La Cour a, toutefois, accepté que, en l’absence d’harmonisation réalisée au niveau de l’Union, l’exigence de l’apposition du poinçon national de garantie et la non-reconnaissance du poinçon de l’État d’origine puissent être reconnues comme étant nécessaires pour satisfaire aux exigences impératives tenant à la loyauté des transactions commerciales et à la défense des consommateurs, développées sur la base de l’arrêt Rewe-Zentral (10). Le poinçon de garantie assure que le consommateur n’est pas induit en erreur, dans la mesure où il est incapable de déterminer, au toucher, à la vue ou au poids, le degré exact de pureté d’un objet en métal précieux (11). Ainsi que le dit le vieil adage, « tout ce qui brille n’est pas or ».

26.      Or, le poinçon de garantie de l’État d’importation ne saurait être exigé pour un objet importé d’un autre État membre déjà revêtu d’un poinçon dès lors que les indications fournies par celui-ci, quelle qu’en soit la forme, sont équivalentes à celles prescrites par l’État membre d’importation et compréhensibles pour les consommateurs de cet État (12). Cela implique, par conséquent, une application spécifique du principe de reconnaissance mutuelle des réglementations commerciales nationales équivalentes, à laquelle la Cour a fréquemment fait appel, comme alternative à l’absence d’harmonisation des législations, pour éliminer les obstacles techniques dans le commerce au sein de l’Union.

27.      En ce qui concerne le commerce (d’ouvrages en métaux précieux) de l’Union avec des pays tiers, les règles applicables sont très rares et l’existence d’obstacles techniques est même plus grande que sur le marché intracommunautaire, à cause de la grande diversité des régimes juridiques nationaux. Logiquement, ces échanges commerciaux sont soumis à l’application de la réglementation générale de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et, notamment, de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) et de l’accord sur les obstacles techniques au commerce (13). Dans le cadre de la politique commerciale commune, l’Union n’a pas conclu d’accords relatifs au trafic d’ouvrages en métaux précieux ni incorporé dans ses traités avec des pays tiers de dispositions concernant ce dernier.

28.      Une tentative d’éliminer les obstacles techniques au commerce international de ces ouvrages a été menée au moyen de la convention de Vienne, dont font partie seize États membres de l’Union, en plus de la Confédération suisse, du Royaume de Norvège et de l’État d’Israël (14). Pour la République tchèque, cette convention est en vigueur depuis l’année 1994 et pour le Royaume des Pays-Bas depuis l’année 1999.

29.      La convention de Vienne effectue une harmonisation minimale des règles applicables aux poinçons, pour favoriser leur reconnaissance mutuelle entre les pays qui en font partie. Les bureaux nationaux de garantie désignés par la convention de Vienne peuvent apposer le poinçon commun de contrôle aux ouvrages en or, en argent et en platine, après avoir vérifié leur titre conformément à des méthodes d’analyses approuvées. Chaque État partie à la convention de Vienne autorise l’importation des produits revêtus du poinçon commun de contrôle (15) sur son territoire sans procéder à aucune analyse et sans apposer de poinçon supplémentaire. L’apposition du poinçon commun de contrôle est effectuée sur une base volontaire et un exportateur peut choisir de la demander à son bureau national de garantie ou d’envoyer la marchandise telle quelle au pays importateur qui le fera apposer si elle respecte sa réglementation et celle de la convention de Vienne. Les objets revêtus du poinçon commun de contrôle et des trois autres poinçons prévus par la convention de Vienne sont acceptés par les États parties sans qu’il soit besoin de procéder à aucune analyse ou d’apposer de poinçon supplémentaire.

30.      La réticence de certains États européens (notamment ceux qui disposent de bureaux officiels de garantie traditionnellement bien implantés et expérimentés) à intégrer la convention de Vienne a donné lieu à la conclusion de traités bilatéraux de reconnaissance réciproque des poinçons avec des pays tiers très actifs dans le commerce international de ces objets (16).

B –    Sur le manquement reproché par la Commission à la République tchèque

1.      Sur l’existence d’une restriction à la libre circulation des marchandises

31.      La Commission considère que la pratique de la République tchèque, qui exige l’apposition du poinçon de garantie tchèque sur les ouvrages en métaux précieux revêtus du poinçon WaarborgHolland, constitue une mesure d’effet équivalant à l’importation, interdite par les articles 34 et 36 TFUE.

32.      Pour la Commission, la jurisprudence de la Cour sur la reconnaissance des poinçons est pleinement applicable à la pratique de la République tchèque, dans la mesure où la liberté de circulation s’applique tant aux marchandises provenant d’un État membre qu’à celles provenant de pays tiers, qui ont été mises en libre pratique, conformément à l’article 29 TFUE. La République tchèque ne pourrait pas reconnaître les poinçons de garantie de certains États membres de l’Union et traiter différemment les objets revêtus du poinçon WaarborgHolland au motif que ce bureau de garantie appose physiquement son poinçon dans des pays tiers, après avoir délocalisé certaines de ses activités en dehors des Pays-Bas et de l’Union.

33.      La République tchèque réplique que sa pratique est compatible avec l’article 34 TFUE, étant donné que la reconnaissance mutuelle des poinçons de garantie ne serait valable que pour les marchandises intracommunautaires et pour les produits de pays tiers mis en libre pratique dans l’Union, s’ils ont déjà été commercialisés dans un État membre conformément à sa législation nationale. Les objets revêtus des poinçons WaarborgHolland dans des pays tiers, mis en libre pratique dans l’Union et qui ne sont pas légalement commercialisés dans un État membre de l’Union, ne bénéficieraient donc pas de la reconnaissance mutuelle, bien que l’activité de poinçonnage de WaarborgHolland à l’extérieur de l’Union soit réalisée conformément à la législation néerlandaise.

34.      En premier lieu, j’estime qu’il doit être clair que la pratique administrative du bureau de garantie tchèque est imputable à la République tchèque, de sorte qu’elle peut être qualifiée de mesure d’effet équivalant à une restriction quantitative à l’importation, selon la jurisprudence de la Cour (17).

35.      En deuxième lieu, je ne partage pas l’argument de la République tchèque (qu’elle a invoqué lors de la phase précontentieuse de la procédure) selon lequel sa pratique doit être analysée à la lumière des règles et de la jurisprudence sur la libre prestation des services. Ainsi que l’a indiqué la Commission, les restrictions imposées par la République tchèque affectent directement le commerce des ouvrages en métaux précieux et non la prestation des services de poinçonnage. Le poinçon est apposé sur la marchandise, et il en fait partie, de sorte que la pratique tchèque a un effet sur la libre circulation des marchandises et non sur la libre circulation des services. C’est la pratique administrative d’un État membre, appliquée sans distinction, qui affecte la commercialisation d’un type de marchandises.

36.      En troisième lieu, je considère que la pratique administrative tchèque relève clairement de la définition de mesure d’« effet équivalant à une restriction quantitative à l’importation », adoptée par la jurisprudence de la Cour dans le cadre de l’interprétation de l’article 34 TFUE. Toute réglementation commerciale des États membres susceptible d’entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce au sein de l’Union doit être considérée comme telle (18).

37.      La Cour a considéré que constituaient des mesures d’effet équivalent, interdites par l’article 34 TFUE, les obstacles à la libre circulation des marchandises résultant, en l’absence d’harmonisation des législations, de l’application à des marchandises en provenance d’autres États membres, où elles sont légalement fabriquées et commercialisées, de règles relatives aux conditions auxquelles doivent répondre ces marchandises, même si ces règles sont indistinctement applicables à tous les produits, dès lors que cette application ne peut être justifiée par un but d’intérêt général de nature à primer sur les exigences de la libre circulation des marchandises (19).

38.      Le fait d’exiger que soit apposé le poinçon de garantie tchèque sur les ouvrages revêtus des poinçons WaarborgHolland affecte leur commercialisation sur le territoire tchèque, en leur imposant l’apposition d’un double poinçon ; en outre, cela nécessite le paiement d’une rémunération à l’organisme de contrôle de l’État d’importation et entraîne des retards dans la commercialisation des produits, qui se répercutent dans les coûts respectifs de ceux-ci (20).

39.      En principe, et je nuancerai cela ci-après, l’interdiction de l’article 34 TFUE affecte tant les marchandises du commerce intracommunautaire que celles provenant de pays tiers qui ont été mises en libre pratique dans l’Union. La Cour a précisé que, en ce qui concerne la libre circulation des marchandises à l’intérieur de l’Union, les produits bénéficiant de la libre pratique sont définitivement et totalement assimilés aux produits originaires des États membres (21).

40.      La mesure tchèque viole donc l’article 34 TFUE si elle porte sur des ouvrages en métaux précieux produits et commercialisés aux Pays‑Bas et revêtus du poinçon WaarborgHolland. Elle constitue également une violation de ce dernier article si elle s’applique à ce type d’objets lorsqu’ils sont fabriqués dans des pays tiers, dans lesquels ils ont été revêtus du poinçon WaarborgHolland, et qu’ils sont importés et mis en libre pratique dans n’importe quel État membre de l’Union, avant d’être importés en République tchèque.

2.      Sur la justification de la restriction

41.      La République tchèque, soutenue par la République française, tente de justifier sa pratique administrative en invoquant l’exigence impérative de protection des consommateurs. Elle estime, en outre, respecter le principe de proportionnalité, dans la mesure où il n’existe aucun moyen de différencier les objets poinçonnés par WaarborgHolland sur le territoire néerlandais de ceux qui ont été marqués par ce bureau de garantie dans des pays tiers. Ainsi qu’elle l’affirme dans son mémoire en défense, les tentatives d’établir, par des discussions avec WaarborgHolland, des moyens sûrs de distinguer les uns des autres ont été infructueuses.

42.      La Cour a admis, ainsi que je l’ai déjà dit, que, en l’absence d’harmonisation réalisée au niveau de l’Union, l’exigence de l’apposition du poinçon national de garantie et la non-reconnaissance du poinçon de l’État d’origine puissent être reconnues comme étant nécessaires pour satisfaire aux exigences impératives tenant à la loyauté des transactions commerciales et à la défense des consommateurs. Selon ce critère, la République tchèque pourrait invoquer la protection des consommateurs pour légaliser sa pratique qui consiste à exiger le poinçon tchèque et à rejeter les poinçons WaarborgHolland.

43.      Or, cette pratique administrative tchèque relèverait uniquement de la défense des consommateurs si les conditions cumulatives suivantes étaient remplies : a) si les poinçons WaarborgHolland n’offraient pas une protection équivalant aux poinçons de garantie tchèque et b) si cette pratique respectait le principe de proportionnalité.

a)      Sur l’équivalence et la reconnaissance mutuelle des poinçons de garantie tchèque et néerlandais

44.      Pour la Commission, les poinçons de garantie tchèque et néerlandais offrent aux consommateurs une protection similaire, de sorte que la République tchèque devrait accepter leur reconnaissance mutuelle, en vertu de la jurisprudence de la Cour (22). En réalité, les autorités tchèques ne contestent pas cette affirmation de la Commission et elles acceptent l’équivalence entre leur poinçon de garantie et le poinçon de garantie néerlandais, mais seulement pour les objets qui ont été poinçonnés par WaarborgHolland sur le territoire du Royaume des Pays-Bas et non pour ceux qui ont été poinçonnés par ce bureau de garantie dans des pays tiers, puis mis en libre pratique dans l’Union et importés en République tchèque.

45.      La Commission soutient que la reconnaissance mutuelle des poinçons de garantie tchèque et néerlandais ne saurait être exclue au motif que WaarborgHolland a délocalisé une partie de son activité dans des pays tiers, étant donné que les autorités néerlandaises continuent à la contrôler en vertu de leur législation nationale. À cet égard, les objets poinçonnés par WaarborgHolland sur le territoire du Royaume des Pays-Bas et ceux qui ont été poinçonnés par ce bureau de garantie dans des pays tiers seraient comparables, une fois mis en libre pratique dans n’importe lequel des États membres de l’Union.

46.      Au contraire, la République tchèque, soutenue par la République française, considère que la reconnaissance mutuelle n’est possible pour les ouvrages en métaux précieux que lorsque ceux-ci ont été poinçonnés sur le territoire d’un État membre de l’Union ; elle n’est pas possible pour les objets précieux poinçonnés dans des pays tiers, même s’ils le sont par le bureau de garantie d’un État membre et, vraisemblablement, conformément à la législation de cet État. Ces objets seraient des marchandises de pays tiers et le principe de reconnaissance mutuelle ne leur serait pas applicable, même si elles ont été mises en libre pratique dans un État de l’Union, sauf si elles sont commercialisées dans cet État conformément à sa législation nationale.

47.      Pour résoudre le litige, il est nécessaire, à mon avis, d’appliquer le principe de reconnaissance mutuelle des poinçons de garantie en l’ajustant aux différentes situations de fait. En premier lieu, j’estime que le principe est pleinement applicable aux objets fabriqués et commercialisés légalement aux Pays-Bas puis exportés en République tchèque. La jurisprudence de la Cour de justice relative à la reconnaissance mutuelle de poinçons de garantie équivalents s’impose très clairement dans ces circonstances.

48.      En deuxième lieu, le principe est également applicable aux ouvrages en métaux précieux qui ont été fabriqués dans des pays tiers, revêtus par WaarborgHolland du poinçon de garantie néerlandais dans ses bureaux en Chine ou en Thaïlande, puis importés et mis en libre pratique dans l’Union et commercialisés légalement aux Pays-Bas, avant d’être exportés en République tchèque. Dans ce cas, également, la reconnaissance mutuelle entre les poinçons de garantie tchèque et néerlandais s’impose, étant donné que les autorités néerlandaises auraient procédé à la vérification de la compatibilité avec leur législation nationale des objets importés de pays tiers où ils ont été revêtus des poinçons WaarborgHolland.

49.      En troisième lieu, se pose le problème des ouvrages en métaux précieux qui ont été fabriqués dans des pays tiers, revêtus par WaarborgHolland du poinçon de garantie néerlandais dans ses bureaux en Chine ou en Thaïlande, puis importés et mis en libre pratique dans l’Union et commercialisés légalement dans un État membre différent du Royaume des Pays-Bas, dont la législation nationale prévoit l’utilisation de poinçons semblables au poinçon tchèque. Dans cette hypothèse, je préconise que la reconnaissance mutuelle opère de la même manière que dans le cas précédent, dans la mesure où l’État membre d’origine vérifierait la compatibilité avec sa propre législation des poinçons WaarborgHolland apposés dans un pays tiers. La République tchèque devrait se fier à cette vérification et appliquer la reconnaissance mutuelle des poinçons de garantie aux objets exportés sur son territoire dans ces conditions.

50.      Il existe, au contraire, trois situations dans lesquelles l’application du principe de reconnaissance mutuelle (entre les poinçons de garantie néerlandais et tchèque) ne saurait avoir lieu, à savoir : a) les articles importés directement en République tchèque ; b) les objets poinçonnés par WaarborgHolland dans ses bureaux en Chine ou en Thaïlande, importés et mis en libre pratique dans un État de l’Union sans être commercialisés dans ce dernier puis exportés en République tchèque, et c) les objets poinçonnés par WaarborgHolland dans ses bureaux en dehors de l’Union, importés, mis en libre pratique et commercialisés dans un État de l’Union dans lequel il n’existe pas de règle nationale exigeant l’apposition d’un poinçon de garantie et, enfin, exportés en République tchèque.

51.      En ce qui concerne ces trois catégories, se pose le problème, qui n’a pas encore été résolu définitivement, de l’application, aux marchandises importées d’États tiers, du principe de reconnaissance mutuelle développé par la jurisprudence de la Cour pour le commerce au sein de l’Union.

52.      Selon la Commission, la mise en libre pratique assimile les objets importés revêtus du poinçon néerlandais apposé par WaarborgHolland dans des pays tiers à ceux qui ont été poinçonnés par ce bureau de garantie sur le territoire néerlandais. La République tchèque soutient, au contraire, que la reconnaissance mutuelle des poinçons de garantie exige la mise en libre pratique de ces objets et, en outre, leur commercialisation conformément à sa législation nationale.

53.      L’article 28, paragraphe 2, TFUE précise que les dispositions sur la libre circulation des marchandises « s’appliquent aux produits qui sont originaires des États membres, ainsi qu’aux produits en provenance de pays tiers qui se trouvent en libre pratique dans les États membres ». L’article 29 TFUE dispose que « sont considérés comme étant en libre pratique dans un État membre les produits en provenance de pays tiers pour lesquels les formalités d’importation ont été accomplies et les droits de douane et taxes d’effet équivalent exigibles ont été perçus dans cet État membre, et qui n’ont pas bénéficié d’une ristourne totale ou partielle de ces droits et taxes ». Tant l’article 79 du règlement (CEE) n° 2913/92 que l’article 129 du règlement (CE) n° 450/2008 (23), applicable à partir du 16 avril 2016, établissent que la mise en libre pratique confère le statut douanier de marchandise de l’Union à une marchandise qui n’est pas de l’Union.

54.      Ces règles assimilent les marchandises de l’Union aux marchandises en provenance de pays tiers, mises en libre pratique après l’accomplissement des formalités douanières et de politique commerciale, ce que la jurisprudence de la Cour a corroboré depuis l’arrêt Donckerwolke et autres (24). Or, l’assimilation ne garantit pas, à elle seule, aux marchandises importées de pays tiers et mises en libre pratique dans un État membre la totale liberté de circulation dans les autres États membres(25). Les marchandises importées doivent respecter la réglementation de l’État membre dans lequel elles sont initialement commercialisées afin de pouvoir bénéficier plus tard de la liberté de circulation et, enfin, de l’application du principe de reconnaissance mutuelle (26).

55.      La Cour a maintenu ce critère dans l’arrêt Expo Casa Manta (27), en indiquant que « [l]a mise sur le marché constitue une phase postérieure à l’importation. De même qu’un produit légalement fabriqué dans la Communauté ne peut être mis sur le marché en raison de cette seule circonstance, l’importation légale d’un produit n’implique pas que celui-ci est automatiquement admis sur le marché » ; et « [d]ans la mesure où il n’existe pas une réglementation communautaire harmonisant les conditions de commercialisation des produits concernés, l’État membre où ils sont introduits en libre pratique peut s’opposer à leur mise sur le marché s’ils ne remplissent pas les conditions fixées à cet effet par le droit national ».

56.      Ces affirmations de la Cour ont influencé les articles 27 à 29 du règlement (CE) n° 765/2008 (28), qui déterminent les contrôles que les autorités nationales de surveillance du marché et les autorités douanières peuvent exercer sur les produits importés d’États tiers avant leur mise en libre pratique, afin d’assurer le respect des règles de l’Union harmonisées. Les contrôles se limitent à la détection des risques graves pour la santé et la sécurité, parmi lesquels ne figure pas la fraude sur les ouvrages en métaux précieux.

57.      En outre, la logique du principe de reconnaissance mutuelle me conduit à interpréter que son application doit être circonscrite : a) au commerce au sein de l’Union de marchandises originaires de l’Union, légalement fabriquées et commercialisées dans un État membre conformément à sa législation nationale, et b) au commerce de marchandises en provenance de pays tiers, en libre pratique, qui ont été commercialisées légalement dans un État membre et qui sont exportées dans un autre (29).

58.      À l’inverse de ce qui précède, les importateurs ne sauraient bénéficier de la reconnaissance mutuelle pour commercialiser dans l’Union des marchandises en provenance de pays tiers qui ne respectent la réglementation d’aucun État membre (30). L’applicabilité de la technique de la reconnaissance mutuelle au commerce international de l’Union avec des pays tiers exige la conclusion d’un traité international spécifique (31) ou l’incorporation de dispositions pertinentes dans un accord commercial plus large, qui soit compatible avec les règles de l’OMC.

59.      En vertu de ces remarques préliminaires, il convient de répondre à la question de savoir si la République tchèque peut rejeter l’application de la reconnaissance mutuelle, en se fondant sur la protection de ses consommateurs, et imposer l’apposition de son propre poinçon de garantie aux objets que WaarborgHolland a marqués dans ses bureaux en dehors de l’Union. À mon avis, et compte tenu des raisonnements qui précèdent, la République tchèque est habilitée à le faire dans les trois situations citées plus haut (32), auxquelles il est impossible d’appliquer la jurisprudence de la Cour sur la reconnaissance mutuelle des poinçons de garantie entre les États membres.

60.      En effet, si l’ouvrage en métal précieux ne respecte la législation nationale d’aucun État membre sur la commercialisation de ce type de marchandises (qui n’est pas harmonisée) ou s’il est importé directement depuis un État tiers, il ne pourra pas bénéficier de la reconnaissance mutuelle des poinçons de garantie. Cela est uniquement applicable, je le répète, aux objets qui respectent les règles d’un État membre dont la législation exige l’apposition de poinçons ou d’autres mécanismes similaires, dans la mesure où ils sont fondés sur la confiance mutuelle entre États membres dans l’efficacité de leurs mesures respectives de lutte contre la fraude vis-à-vis des consommateurs sur les produits d’orfèvrerie.

61.      Cette confiance n’existe pas lorsque le commerce d’ouvrages en métaux précieux a lieu entre l’Union et des États tiers, dans lesquels l’utilisation des poinçons de garantie n’est pas généralisée, exception faite des signataires de la convention de Vienne. L’Union n’est pas signataire de la convention de Vienne, dont font, en revanche, partie seize de ses États membres, y compris le Royaume des Pays-Bas et la République tchèque. La convention de Vienne, extérieure au droit de l’Union, ne saurait fonder l’application du principe de reconnaissance mutuelle, qui trouve précisément son origine dans ce dernier ordre juridique.

62.      La Commission soutient que, dans ces trois situations également, la jurisprudence de la Cour sur la reconnaissance mutuelle des poinçons de garantie devrait être applicable. Selon sa théorie, les objets importés d’États tiers et mis en libre pratique dans les États de l’Union respectent la réglementation néerlandaise, dans la mesure où WaarborgHolland, en apposant ses poinçons dans des bureaux situés dans des États tiers, s’appuie sur cette législation et soumet ses bureaux au contrôle des autorités néerlandaises, semblable à celui auquel ces dernières procèdent sur les activités effectuées aux Pays-Bas. La délocalisation des services de poinçonnage dans des États tiers, qui est autorisée par la législation néerlandaise (33), ne devrait pas empêcher l’application du principe de reconnaissance mutuelle.

63.      La Commission a déclaré, dans ce même sens, que WaarborgHolland disposait d’un certificat délivré par l’organisme néerlandais d’accréditation (34), qui l’autorisait à pratiquer son activité de poinçonnage en dehors du territoire néerlandais. Lors de l’audience, la Commission a argumenté que, conformément à l’article 11, paragraphe 2, du règlement n° 765/2008 (35), les autorités tchèques devaient reconnaître l’équivalence des attestations établies par les organismes d’évaluation de la conformité (WaarborgHolland en l’espèce) dûment autorisés par l’organisme d’accréditation nationale [en l’espèce, le Raad voor Accrediatie (Conseil d’accréditation, Pays-Bas)].

64.      La Commission a, en outre, souligné les facultés de contrôle dont disposent les autorités néerlandaises, dans le cadre de l’application de leur législation nationale, sur l’activité de WaarborgHolland dans des pays tiers, bien qu’elle n’ait apporté aucune preuve relative à la fréquence et à la portée de ces contrôles.

65.      Toutefois, je ne crois pas que ces facteurs suffisent à valider l’argument de la Commission. D’une part, la reconnaissance mutuelle prévue par le règlement n° 765/2008 pour les attestations établies par les organismes d’évaluation de la conformité, dûment autorisés par un organisme national d’accréditation, n’opère que lorsque ces attestations sont établies sur le territoire d’un État membre de l’Union. À titre d’exception, l’article 7 du règlement n° 765/2008 admet, dans certains cas, l’accréditation transfrontalière, mais il ne fait pas référence à la possibilité d’établir des attestations à l’extérieur du territoire de l’Union, dans le respect de la pratique selon laquelle il ne les accepte que lorsque l’Union a conclu un traité international avec le pays tiers (36). L’Union n’a conclu avec la République populaire de Chine et le Royaume de Thaïlande aucun accord international de reconnaissance mutuelle des évaluations de conformité pouvant s’appliquer aux poinçons apposés par WaarborgHolland dans ces pays.

66.      D’autre part, ainsi que l’ont affirmé la République tchèque et la République française, les facultés de contrôle de l’organisme national d’accréditation néerlandais qui supervise les activités des bureaux de garantie ne sauraient être les mêmes sur le territoire néerlandais que dans un pays tiers. Le contrôle des fraudes sur les ouvrages en métaux précieux exige une collaboration interadministrative, entre les bureaux de garantie, qui les détectent par l’analyse chimique des produits, et d’autres autorités publiques (services douaniers et fiscaux, autorités policières, pouvoir judiciaire), qui les poursuivent et les condamnent. L’exercice de ces pouvoirs de contrôle est couplé avec l’éventuelle mise en œuvre de sanctions administratives et pénales, qui ont les unes et les autres un caractère nécessairement territorial, de sorte que les autorités néerlandaises ne pourraient les mettre en œuvre dans un pays tiers.

67.      En définitive, le poinçonnage obligatoire, dans les pays qui l’appliquent, est une activité administrative liée à l’exercice de la souveraineté étatique, qui n’est pas compatible avec la possibilité de délocalisation dans des États tiers, sauf existence d’un accord international (37).

68.      Le caractère administratif de l’activité de poinçonnage garantit également une plus grande indépendance aux bureaux dans l’exercice de cette activité par rapport aux entreprises du secteur. La délocalisation dans des pays tiers est susceptible de porter atteinte à cette indépendance dans la mesure où, ainsi que l’a indiqué la République française lors de l’audience, la protection du droit administratif dans le pays tiers peut ne pas être la même que celle dont il bénéficie dans l’État de l’Union.

69.      En résumé, en respectant l’article 34 TFUE et la jurisprudence de la Cour qui l’interprète en lien avec la reconnaissance mutuelle des poinçons de garantie, la République tchèque pourrait imposer l’apposition de son propre poinçon de garantie aux ouvrages en métaux précieux en provenance de pays tiers, et revêtus du poinçon néerlandais par WaarborgHolland à l’extérieur de l’Union, dans les trois cas suivants :

–        s’ils sont importés directement en République tchèque ;

–        s’ils sont importés et mis en libre pratique, mais qu’ils ne sont pas commercialisés légalement dans un autre État membre avant d’être exportés sur le territoire tchèque,

–        s’ils sont importés, mis en libre pratique et commercialisés légalement dans un État membre qui n’utilise pas de poinçon de garantie.

70.      Au contraire, compte tenu de l’équivalence substantielle existant entre le poinçon de garantie tchèque et le poinçon néerlandais apposé par WaarborgHolland, la République tchèque viole l’article 34 TFUE et la jurisprudence de la Cour qui l’interprète en exigeant l’apposition du poinçon tchèque sur ces catégories d’ouvrages en métaux précieux :

–        les objets fabriqués et commercialisés légalement aux Pays-Bas, revêtus du poinçon néerlandais apposé par WaarborgHolland et qui sont exportés vers la République tchèque ;

–        les objets fabriqués dans des pays tiers, revêtus du poinçon néerlandais par WaarborgHolland dans ses bureaux en dehors de l’Union, importés, mis en libre pratique et commercialisés légalement aux Pays-Bas puis exportés en République tchèque,

–        les objets fabriqués dans des pays tiers, revêtus du poinçon de garantie néerlandais par WaarborgHolland dans ses bureaux à l’extérieur de l’Union, qui sont importés, mis en libre pratique dans l’Union et commercialisés légalement dans un État membre différent du Royaume des Pays-Bas, dont la législation nationale prévoit l’utilisation de poinçons de garantie semblables au poinçon tchèque.

b)      Sur la proportionnalité de la mesure

71.      Dans les situations dans lesquelles, à mon avis, la République tchèque viole l’article 34 TFUE, il faut encore déterminer si sa pratique serait susceptible d’être considérée comme respectueuse du principe de proportionnalité, c’est-à-dire s’il n’existe pas des mesures moins attentatoires à la libre circulation des marchandises pour protéger les consommateurs contre les fraudes dans la commercialisation de ces objets (38).

72.      Ainsi que l’indique la République française dans son mémoire en intervention, si WaarborgHolland avait utilisé, dans le cadre de ses activités dans les pays tiers, un poinçon différent de celui qui est employé sur le territoire du Royaume des Pays-Bas, cela aurait pu constituer une alternative moins attentatoire à la libre circulation des marchandises. De cette manière, la République tchèque aurait pu limiter l’exigence du poinçon de garantie tchèque aux seuls objets poinçonnés par WaarborgHolland dans ses succursales en dehors de l’Union, et elle aurait pu en même temps reconnaître l’équivalence du poinçon de garantie néerlandais apposé par WaarborgHolland aux Pays-Bas. Il semble que cette voie ait été explorée par la République tchèque mais que WaarborgHolland ne l’ait pas acceptée (39), de sorte que, compte tenu de l’impossibilité de différencier les objets marqués par WaarborgHolland aux Pays-Bas, d’une part, de ceux marqués dans ses bureaux extérieurs à l’Union, d’autre part, la République tchèque a imposé à tous l’obligation de revêtir le poinçon de garantie tchèque, comme condition pour être commercialisés sur son territoire.

73.      À mon avis, cette pratique ne respecte pas le principe de proportionnalité, dans la mesure où il existe des mesures moins attentatoires à la liberté de circulation des marchandises, comme le serait, en particulier, le fait pour les autorités tchèques d’exiger une preuve de l’origine de l’objet. Ainsi, par exemple, les autorités tchèques pourraient exiger que les objets marqués par WaarborgHolland soient revêtus d’un poinçon de responsabilité donnant des informations sur leur lieu de fabrication (40). Avec cette méthode, les autorités tchèques auraient pu reconnaître le poinçon néerlandais apposé par WaarborgHolland sur les objets fabriqués aux Pays-Bas et, en même temps, n’exiger l’apposition du poinçon tchèque que sur les objets poinçonnés par WaarborgHolland dans des pays tiers.

74.      Toutefois, la mesure décrite ne permettrait pas d’identifier les objets poinçonnés par WaarborgHolland dans des pays tiers puis importés et commercialisés aux Pays-Bas (ou dans des États membres dotés de systèmes semblables au système tchèque de poinçon de garantie), et exportés par la suite en République tchèque. Dans ces situations, la commercialisation légale préalable dans un État membre pourrait être démontrée par l’importateur par différents moyens de preuve, tels que des factures ou des étiquettes de produits, des registres fiscaux ou de vente, ou bien par la confirmation écrite de l’autorité compétente de l’État membre de commercialisation (41). Tous ces moyens sont moins attentatoires à la libre circulation des ouvrages en métaux précieux que celui d’exiger l’apposition du poinçon tchèque sur les objets revêtus du poinçon WaarborgHolland.

IV – Conclusion

75.      Compte tenu des arguments qui précèdent, je propose à la Cour :

1)         de déclarer le recours comme irrecevable, au motif qu’il manque de précision, en ce qui concerne les griefs de la Commission européenne contre la République tchèque portant sur son refus de reconnaître les poinçons de garantie néerlandais qui n’ont pas été apposés par WaarborgHolland ;

2)         d’accueillir partiellement le recours de la Commission et déclarer que la République tchèque a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 34 TFUE, en exigeant l’apposition du poinçon de garantie tchèque sur les ouvrages en métaux précieux :

–        fabriqués et commercialisés légalement aux Pays-Bas, revêtus du poinçon néerlandais apposé par WaarborgHolland et qui sont exportés vers la République tchèque ;

–        fabriqués dans des pays tiers, revêtus du poinçon de garantie néerlandais par WaarborgHolland dans ses bureaux en dehors de l’Union européenne, importés, mis en libre pratique et commercialisés légalement aux Pays-Bas, puis exportés en République tchèque ;

–        fabriqués dans des pays tiers, revêtus du poinçon de garantie néerlandais par WaarborgHolland dans ses bureaux à l’extérieur de l’Union, qui sont importés et mis en libre pratique dans l’Union et commercialisés légalement dans un État membre différent du Royaume des Pays-Bas, dont la législation interne prévoit l’utilisation de poinçons de garantie équivalant au poinçon tchèque, et qui sont ensuite exportés en République tchèque ;

3)         de rejeter le recours pour le surplus ;

4)         de condamner à ses propres dépens chacune des parties intervenantes à la procédure.


1 – Langue originale : l’espagnol.


2 – Arrêts du 10 mai 2012, Commission/Estonie (C-39/10, EU:C:2012:282, points 24 à 26) ; du 15 juin 2010, Commission/Espagne (C-211/08, EU:C:2010:340, point 32) ; du 18 novembre 2010, Commission/Portugal (C‑458/08, EU:C:2010:692, point 49) ; du 19 décembre 2013, Commission/Pologne (C-281/11, EU:C:2013:855, points 121 à 123) ; du 14 janvier 2010, Commission/République tchèque (C-343/08, EU:C:2010:14, point 25), et du 24 mars 2011, Commission/Espagne (C-375/10, EU:C:2011:184, points 10 et 11).


3 – Proposition de directive du Conseil, du 1er décembre 1975, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux ouvrages en métaux précieux [COM(1975) 607 final (JO 1976, C 11, p. 2)], retirée en 1977. Proposition de directive du Conseil, du 14 octobre 1993, concernant les ouvrages en métaux précieux [COM(93) 322 final], modifiée par la proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 1994 concernant les ouvrages en métaux précieux [COM(94) 267 final (JO 1994, C 209, p. 4), retirée en 2005.


4 – Voir document d’orientation de la Commission, Application du règlement sur la reconnaissance mutuelle aux ouvrages en métaux précieux, 1er février 2010.


5 – Selon les données disponibles, au cours de la période comprise entre le 13 mai 2009, date d’entrée en vigueur du règlement (CE) n° 764/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 9 juillet 2008, établissant les procédures relatives à l’application de certaines règles techniques nationales à des produits commercialisés légalement dans un autre État membre et abrogeant la décision n° 3052/95/CE (JO 2008, L 218, p. 21), et le 31 décembre 2011, sur les 1 524 notifications de rejet de reconnaissance mutuelle, 90 % concernaient des ouvrages en métaux précieux. Voir communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil – Premier rapport sur l’application du règlement (CE) n° 764/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 9 juillet 2008, établissant les procédures relatives à l’application de certaines règles techniques nationales à des produits commercialisés légalement dans un autre État membre et abrogeant la décision nº 3052/95/CE [COM(2012) 292 final, p. 8].


6 – Voir les informations contenues sur le site Internet de l’International Association of Assay Offices [Association internationale des bureaux de garantie] www.theiaao.com/hallmarking/.


7 – Selon les données fournies par la Commission, il existe actuellement dans l’Union 18 titres pour l’or dont seulement deux sont communs à tous les États membres (585 à 750). En ce qui concerne l’argent, il existe quinze titres nationaux dans toute l’Union et seuls les titres 800 et 925 sont acceptés dans tous les États membres. Pour le platine, il existe cinq titres dans l’Union et ce métal n’est pas considéré comme un métal précieux en Bulgarie, à Chypre et en Allemagne (document d’orientation de la Commission, Application du règlement sur la reconnaissance mutuelle aux ouvrages en métaux précieux, 1er février 2010, p. 9).


8 – Le texte de la convention, modifié à plusieurs reprises, ainsi que la liste des États signataires peuvent être consultés sur le site www.hallmarkingconvention.org/documents.php.


9 – Arrêts du 22 juin 1982, Robertson e.a. (220/81, EU:C:1982:239) ; du 15 septembre 1994, Houtwipper (C-293/93, EU:C:1994:330) ; du 21 juin 2001, Commission/Irlande (C-30/99, EU:C:2001:346), ainsi que du 16 janvier 2014, Juvelta (C-481/12, EU:C:2014:11).


10 – Arrêt du 20 février 1979, Rewe-Zentral, dit « Cassis de Dijon » (120/78, EU:C:1979:42).


11 – Voir arrêts du 22 juin 1982, Robertson e.a. (220/81, EU:C:1982:239, points 9 et 11), ainsi que du 15 septembre 1994, Houtwipper (C-293/93, EU:C:1994:330, points 11 et 14).


12 – Arrêts du 22 juin 1982, Robertson e.a. (220/81, EU:C:1982:239, point 12) ; du 15 septembre 1994, Houtwipper (C-293/93, EU:C:1994:330, point 15) ; du 21 juin 2001, Commission/Irlande (C-30/99, EU:C:2001:346, points 30 et 69), ainsi que du 16 janvier 2014, Juvelta (C-481/12, EU:C:2014:11, point 22).


13 – Toutefois, les mesures « relatives à l’importation et à l’exportation d’or ou d’argent » ayant été incluses parmi les exceptions générales de l’article XX du GATT, les États peuvent facilement justifier leurs réglementations nationales restrictives.


14 – La liste des États parties et des États ayant le statut d’observateur (République de Croatie, République italienne, République de Serbie, République socialiste démocratique de Sri Lanka et Ukraine) figure sur le site Internet www.hallmarkingconvention.org/members-observers.php.


15 – L’annexe II, paragraphe 4, de la convention de Vienne dispose que, outre le poinçon commun de contrôle, les objets doivent être revêtus du poinçon de garantie du pays d’origine ou d’importation, du poinçon de responsabilité du fabricant ou poinçon d’origine et du poinçon de titre.


16 – Convention entre le Conseil fédéral suisse et le gouvernement de la République française relative à la reconnaissance réciproque des poinçons officiels apposés sur les ouvrages en métaux précieux, publié comme annexe au décret n° 89-216 du 10 avril 1989 (JORF du 14 avril 1989, p. 4741), conclue le 2 juin 1987, en vigueur depuis le 1er mai 1989 ; convention entre la Confédération suisse et la République italienne relative à la reconnaissance réciproque des poinçons apposés sur les ouvrages en métaux précieux (RO 1974 753), conclue le 15 janvier 1970, en vigueur depuis le 30 mars 1974.


17 – Arrêts du 29 avril 2004, Commission/Allemagne (C-387/99, EU:C:2004:235, point 42), et du 5 mars 2009, Commission/Espagne (C-88/07, EU:C:2009:123, point 54).


18 – Voir, en particulier, arrêts du 11 juillet 1974, Dassonville (8/74, EU:C:1974:82, point 5) ; du 2 décembre 2010, Ker‑Optika (C-108/09, EU:C:2010:725, point 47), et du 16 janvier 2014, Juvelta (C-481/12, EU:C:2014:11, point 16).


19 – Voir arrêts du 22 juin 1982, Robertson e.a. (220/81, EU:C:1982:239, point 9) ; du 15 septembre 1994, Houtwipper (C-293/93, EU:C:1994:330, point 11) ; du 21 juin 2001, Commission/Irlande (C-30/99, EU:C:2001:346, point 26), et du 16 janvier 2014, Juvelta (C‑481/12, EU:C:2014:11, point 17).


20 – Arrêts du 15 septembre 1994, Houtwipper (C-293/93, EU:C:1994:330, point 13) ; du 21 juin 2001, Commission/Irlande (C-30/99, EU:C:2001:346, point 27), et du 16 janvier 2014, Juvelta (C-481/12, EU:C:2014:11, point 18).


21 – Voir, en ce sens, arrêts du 5 mars 1986, Tezi Textiel/Commission (59/84, EU:C:1986:102, point 26), et du 16 juillet 2015, UNIC ainsi que Uni.co.pel (C-95/14, EU:C:2015:492, point 41).


22 – Selon laquelle un État membre viole l’article 34 TFUE s’il impose que des produits importés d’autres États membres, dans lesquels ils sont légalement commercialisés et poinçonnés, soient soumis à un nouveau poinçonnage dans l’État membre d’importation.


23 – Règlement du Conseil du 12 octobre 1992 établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1) et règlement du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 établissant le code des douanes communautaire (code des douanes modernisé) (JO 2008, L 145, p. 1).


24 – Dans cet arrêt, la Cour de justice expose, en ce qui concerne la libre circulation des marchandises à l’intérieur de la Communauté, que les produits en « libre pratique » sont définitivement et totalement assimilés aux produits originaires des États membres. En outre, elle a souligné qu’il résultait de cette assimilation que les dispositions de l’article 30, relatives à l’élimination des restrictions quantitatives et de toutes mesures d’effet équivalent, sont indistinctement applicables aux produits originaires de la Communauté et à ceux qui ont été mis en libre pratique à l’intérieur de l’un quelconque des États membres, quelle que soit l’origine première de ces produits (arrêt du 15 décembre 1976, Donckerwolcke et Schou, 41/76, EU:C:1976:182, points 17 et 18). Voir, également, arrêts du 13 mars 1979, Grandes distilleries Peureux (119/78, EU:C:1979:66, point 26) ; du 5 mars 1986, Tezi Textiel/Commission (59/84, EU:C:1986:102, point 26) ; du 18 novembre 2003, Budějovický Budvar (C-216/01, EU:C:2003:618, point 95, ainsi que du 16 juillet 2005, UNIC et Uni.co.pel (C-95/14, EU:C:2015:492, point 41).


25 – La question est débattue dans la doctrine et je renvoie aux travaux de Ankersmit, L., « What if Cassis de Dijon were Cassis de Québec ? The assimilation of goods of third country origin in the internal market », Common Market Law Review, 2013, n° 6, p. 1387 à 1410 ; Tegeder, J.,  « Applying the Cassis de Dijon doctrine to goods originating in third countries », European Law Review, 1994, n° 1, p. 86 à 94.


26 – Voir Enchelmaier S., « Article 36 TFUE, General », dans Oliver, P., Oliver on the Free Movement of Goods in the European Union, 5e édition, Hart, Oxford, 2010, p. 233.


27 – Arrêts du 30 mai 2002, Expo Casa Manta (C-296/00, EU:C:2002:316, points 31 et 32), ainsi que du 12 juillet 2005, Alliance for Natural Health e.a. (C‑154/04 et C‑155/04, EU:C:2005:449, point 95).


28 – Règlement du Parlement européen et du Conseil du 9 juillet 2008 fixant les prescriptions relatives à l’accréditation et à la surveillance du marché pour la commercialisation des produits et abrogeant le règlement (CEE) n° 339/93 du Conseil (JO 2008, L 218, p. 30).


29 – Il est indiqué au considérant 3 du règlement n° 764/2008 que le principe de reconnaissance mutuelle, qui résulte de la jurisprudence de la Cour de justice, implique « qu’un État membre ne peut pas interdire la vente sur son territoire de produits qui sont commercialisés légalement dans un autre État membre, et ce même si ces produits ont été fabriqués selon des règles techniques différentes de celles auxquelles sont soumis les produits fabriqués sur son territoire. Les seules exceptions à ce principe sont des restrictions justifiées par les motifs énoncés à l’article 30 du traité ou d’autres raisons impérieuses d’intérêt public et proportionnées à l’objectif qu’elles poursuivent ».


      La Commission elle-même avertit que « en ce qui concerne les produits importés de pays tiers, ceux-ci doivent être commercialisés légalement dans un État membre ou dans un État de [l’Association européenne de libre-échange (AELE)] partie à l’accord EEE pour pouvoir bénéficier de la reconnaissance mutuelle » (document d’orientation du 18 août 2013 concernant la notion de produit « commercialisé légalement » dans le règlement (CE) n° 764/2008 relatif à la reconnaissance mutuelle [COM(2013) 592 final, p. 6).


30 – Pour Gardeñes Santiago, dans le commerce avec les États tiers, « la règle applicable n’est pas celle de la reconnaissance mutuelle, mais précisément la règle contraire, c’est-à-dire celle de la stricte application de la loi de l’État d’importation ou d’accueil. Cela signifie que lorsqu’un produit ou un service d’un État tiers est importé dans la Communauté, il devra respecter les règles communautaires harmonisées, si elles existent, et celles de l’État membre dans lequel il est introduit, le respect de la réglementation de l’État d’origine n’étant pas suffisant » (Gardeñes Santiago, M., La aplicación de la regla del reconocimiento mutuo y su incidencia en el comercio de mercancías y servicios en el ámbito comunitario e internacional, Eurolex, Madrid, 1999, p. 314).


31 – L’Union a conclu plusieurs accords de reconnaissance mutuelle des évaluations de conformité avec des pays économiquement développés comme les États-Unis d’Amérique, le Canada, le Commonwealth d’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon, la Confédération suisse et l’État d’Israël. Tous ces accords et leur régime d’application peuvent être consultés sur le site Internet de la Commission à l’adresse http://ec.europa.eu/growth/index_en.htm.


32 – Il s’agit a) des objets importés et mis en libre pratique en République tchèque ; b) des objets importés et mis en libre pratique dans un État de l’Union sans être commercialisés dans ce dernier, puis exportés en République tchèque, et c) des objets importés, mis en libre pratique et commercialisés dans un État membre dans lequel il n’existe pas de règle nationale exigeant l’apposition d’un poinçon par un bureau de garantie et, enfin, exportés en République tchèque.


33 – Le College van Beroep voor het Bedrijfsleven (cour d’appel du contentieux administratif en matière économique, Pays-Bas) a statué sur un litige relatif à l’application du droit néerlandais en la matière, litige qui opposait les deux bureaux de garantie, à cause de la délocalisation de l’activité de WaarborgHolland dans des États tiers, délocalisation qui a été considérée comme légale par le College van Beroep voor het Bedrijfsleven (cour d’appel du contentieux administratif en matière économique) dans l’arrêt rendu le 29 janvier 2008. Le texte en langue anglaise est disponible sur le site Internet www.hallmarking.com/downloads/decision_by_the_netherlands_and_industriy_appeals_tribunal_ewn_versus_min_ea.pdf.


34 – C’est ainsi qu’elle l’a exprimé dans la réponse à la question qui lui a été posée par la Cour.


35 – La lettre de cette disposition est la suivante : « [l]es autorités nationales reconnaissent l’équivalence des services fournis par les organismes d’accréditation qui ont fait l’objet avec succès de l’évaluation par les pairs visée à l’article 10, acceptant ainsi, sur la base de la présomption visée au paragraphe 1 du présent article, les certificats d’accréditation desdits organismes et les attestations établies par les organismes d’évaluation de la conformité qu’ils ont accrédités ».


36 – Voir par exemple l’accord entre l’Union et l’Australie portant modification de l’accord sur la reconnaissance mutuelle en matière d’évaluation de la conformité, de certificats et de marquages entre la Communauté européenne et l’Australie (JO 2012, L 359, p. 2).


37 – Cette circonstance justifie, à mon avis, le rejet par les États membres de la convention de Vienne dudit offshore hallmarking ou délocalisation des activités des bureaux de garantie. Tous les États parties à la convention de Vienne, sauf le Royaume des Pays‑Bas, se sont opposés à la délocalisation lors de la réunion du comité permanent de la convention de Vienne, qui s’est tenue en 2008 à Londres (Royaume-Uni) (www.hallmarkingconvention.org/2008-spring-meeting-in-london-2.htm).


38 – Arrêt du 2 décembre 2010, Ker-Optika (C-108/09, EU:C:2010:725, point 65).


39 – Pour WaarborgHolland, l’usage d’un poinçon spécifique différent du poinçon néerlandais (dans ses bureaux situés dans des États tiers) pourrait entraîner une perte de valeur commerciale inhérente à la réputation de son poinçon sur le marché. Dans ces conditions, la délocalisation de son activité de poinçonnage ne l’aurait probablement pas intéressée.


40 – Le poinçon de responsabilité est habituellement exigé et il est désigné, par exemple, dans la convention de Vienne.


41 – La Commission indique ces moyens de preuve ainsi que d’autres dans son document d’orientation du 18 août 2013 concernant la notion de produit « commercialisé légalement » dans le règlement (CE) n° 764/2008 relatif à la reconnaissance mutuelle [COM(2013) 592 final, p. 7].