Language of document : ECLI:EU:F:2010:131

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

28 octobre 2010 (*)

« Fonction publique — Fonctionnaires — Nomination — Fonctionnaires accédant à un groupe de fonctions supérieur par concours général — Candidats inscrits sur une liste de réserve antérieurement à l’entrée en vigueur du nouveau statut — Règles transitoires de classement en grade lors du recrutement — Classement en grade en application des nouvelles règles moins favorables — Article 5, paragraphe 2, et article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut »

Dans l’affaire F‑85/05,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Susanne Sørensen, fonctionnaire de la Commission européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Mes S. Orlandi, A. Coolen, J.-N. Louis et É. Marchal, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. J. Currall et H. Krämer, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mmes M. Arpio Santacruz et M. Simm, en qualité d’agents,

partie intervenante,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre),

composé de MM. P. Mahoney, président, H. Tagaras et S. Van Raepenbusch (rapporteur), juges,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 mars 2010,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal de première instance des Communautés européennes le 5 septembre 2005 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 6 septembre suivant), Mme Sørensen demande, d’une part, l’annulation de la décision de la Commission des Communautés européennes du 6 août 2004 la nommant à un poste d’assistant, en ce que cette décision la classe au grade B*3, échelon 2 (ci-après la « décision attaquée »), et, d’autre part, l’annulation de la décision supprimant l’ensemble des points de promotion qu’elle avait accumulés.

 Cadre juridique

2        Le statut des fonctionnaires de l’Union européenne, tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil du 22 mars 2004 (JO L 124, p. 1, ci-après le « statut »), et le régime applicable aux autres agents de l’Union, tel que modifié par le même règlement (ci-après le « RAA »), sont entrés en vigueur, ainsi que prévu par l’article 2 dudit règlement, le 1er mai 2004.

3        Le règlement no 723/2004 a introduit un nouveau système de carrières dans la fonction publique de l’Union en substituant les nouveaux groupes de fonctions d’administrateurs (AD) et d’assistants (AST) aux anciennes catégories de fonctionnaires A, B, C et D.

4        Aux termes de l’article 5, paragraphe 5, du statut :

« Les fonctionnaires appartenant au même groupe de fonctions sont soumis à des conditions identiques de recrutement et de déroulement de carrière. »

5        L’article 29, paragraphe 1, du statut dispose :

« En vue de pourvoir aux vacances d’emploi dans une institution, l’autorité investie du pouvoir de nomination, après avoir examiné :

a) les possibilités de pourvoir l’emploi par voie de :

i) mutation ou

ii) nomination conformément à l’article 45 bis ou

iii) promotion

au sein de l’institution ;

b) les demandes de transfert de fonctionnaires du même grade d’autres institutions et/ou les possibilités d’organiser un concours interne à l’institution ouvert uniquement aux fonctionnaires et aux agents temporaires visés à l’article 2 du [RAA] ;

ouvre la procédure de concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves. La procédure de concours est déterminée à l’annexe III.

Cette procédure peut être ouverte également en vue de constituer une réserve de recrutement. »

6        L’article 31, paragraphe 1, du statut dispose :

« Les candidats […] sont nommés au grade du groupe de fonctions indiqué dans l’avis du concours auquel ils ont été reçus. »

7        L’annexe XIII du statut envisage les mesures transitoires consécutives à l’entrée en vigueur du règlement no 723/2004.

8        L’article premier, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut prévoit :

« 1. Pendant la période comprise entre le 1er mai 2004 et le 30 avril 2006, les paragraphes 1 et 2 de l’article 5 du statut sont remplacés par le texte suivant :

‘1. Les emplois relevant du statut sont classés, suivant la nature et le niveau des fonctions auxquelles ils correspondent, en quatre catégories désignées dans l’ordre hiérarchique décroissant par les lettres A*, B*, C*, D*.

2. La catégorie A* comprend douze grades, la catégorie B* neuf grades, la catégorie C* sept grades et la catégorie D* cinq grades.’ »

9        L’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut dispose :

« Les fonctionnaires inscrits avant le 1er mai 2006 sur une liste de candidats aptes à passer dans une autre catégorie sont classés, si le passage dans la nouvelle catégorie a lieu après le 1er mai 2004 dans le même grade et le même échelon que ceux qu’ils détenaient dans l’ancienne catégorie et, à défaut, au premier échelon du grade de base de la nouvelle catégorie. »

10      Aux termes de l’article 10, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut :

« Les fonctionnaires en fonction dans les catégories C ou D avant le 1er mai 2004 sont affectés à compter du 1er mai 2006 aux parcours de carrière permettant des promotions :

a) dans l’ancienne catégorie C, jusqu’au grade AST 7 ;

[…] »

11      Selon l’article 10, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut,

« Les fonctionnaires auxquels le paragraphe 1 s’applique peuvent devenir membre du groupe de fonctions des assistants sans restriction après avoir réussi un concours général ou sur la base d’une procédure d’attestation. La procédure d’attestation est fondée sur l’ancienneté, l’expérience, le mérite et le niveau de formation des fonctionnaires et sur la disponibilité des postes dans le groupe de fonctions AST. Un comité paritaire examine les candidatures des fonctionnaires en vue de l’attestation. Les institutions arrêtent les modalités de mise en œuvre de ladite procédure avant le 1er mai 2004. Le cas échéant, les institutions adoptent des dispositions spécifiques pour tenir compte des passages qui ont pour effet de modifier les taux de promotion applicables. »

12      En vertu de l’article 10, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut

« Le présent article ne s’applique pas aux fonctionnaires qui ont changé de catégorie après le 1er mai 2004. »

13      L’article 12 de l’annexe XIII du statut prévoit :

« 1. Pendant la période allant du 1er mai 2004 au 30 avril 2006, toute référence faite aux grades des groupes de fonctions AST et AD à l’article 31, paragraphe[s] 2 et 3, du statut doit être comprise selon les modalités qui suivent :

–        AST 1 à AST 4 : C*1 à C*2 et B*3 à B*4

–        AD 5 à AD 8 : A*5 à A*8

–        AD 9, AD 10, AD 11, AD 12 : A*9, A*10, A*11, A*12.

2. Les dispositions de l’article 5, paragraphe 3, du statut, ne s’appliquent pas aux fonctionnaires recrutés sur des listes d’aptitude établies à la suite de concours publiés avant le 1er mai 2004.

3. Les fonctionnaires inscrits sur une liste d’aptitude avant le 1er mai 2006 et recrutés entre le 1er mai 2004 et le 30 avril 2006 sont classés :

–        lorsque la liste a été établie pour la catégorie A*, B* ou C*, dans le grade publié dans l’avis de concours,

–        lorsque la liste a été établie pour la catégorie A, LA, B ou C, selon le tableau suivant :

Grade du concours

Grade du recrutement

A/LA 8

A*5

A/LA 7 et A/LA 6

A*6

A/LA 5 et A/LA 4

A*9

A/LA 3

A*12

A 2

A*14

A 1

A*15

B 5 et B 4

B*3

B 3 et B 2

B*4

C 5 et C 4

C*1

C 3 et C 2

C*2

 »

 Faits à l’origine du litige

14      La requérante est entrée au service de la Commission le 16 avril 1987, en qualité de fonctionnaire de la catégorie C, au grade C 7, échelon 1.

15      La Commission a publié au Journal officiel des Communautés européennes du 5 février 2002 l’avis de concours général COM/B/1/02 visant à constituer des réserves de recrutement d’assistants adjoints de carrière B 5/B 4 dans les domaines de la gestion financière et de la gestion des contrats et projets (JO C 32 A, p. 13).

16      Un rectificatif à l’avis de concours général COM/B/1/02, publié le 18 juillet 2003 (JO C 168 A, p. 1), a notamment précisé :

« Après la date de publication du concours [sus]mentionné, la Commission a formellement transmis au Conseil [de l’Union européenne] une proposition de réforme du statut qui modifie notamment la structure de carrière et, partant, les conditions de recrutement des candidats auxquels un emploi pourra être offert. »

17      Alors qu’elle était classée C 3, échelon 3, la requérante s’est portée candidate à ce concours dans le domaine de la gestion des contrats et projets.

18      La liste de réserve dudit concours a été publiée le 18 mai 2004 (JO C 138, p. 18). Le nom de la requérante figurait sur la liste des lauréats.

19      Par une décision du 6 août 2004, prenant effet le 1er juillet précédent, la requérante, qui était classée C*5, échelon 4, depuis l’entrée en vigueur de la réforme du statut le 1er mai 2004, a été nommée dans l’emploi alors vacant d’assistant à la direction « Service extérieur » de la direction générale (DG) « Relations extérieures » de la Commission, et classée B*3, échelon 2.

20      La requérante a pris connaissance de la décision attaquée le 12 octobre 2004.

21      Par ailleurs, les points de promotion qu’elle avait accumulés en qualité de fonctionnaire de catégorie C ou C* ont été supprimés. Elle a pris connaissance de cette suppression à une date non déterminée.

22      Le 14 octobre 2004, la requérante a adressé une note au chef d’unité de la DG « Personnel et administration » signataire de la décision attaquée pour lui demander des éclaircissements concernant son classement en grade, son traitement et ses droits à pension. Dans cette note, la requérante écrivait notamment qu’elle souhaitait connaître la base de son classement, dès lors qu’elle s’était attendue à être nommée au grade B*5, échelon 4, en vertu de l’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut. Elle souhaitait également savoir si elle conserverait le salaire mensuel dont elle bénéficiait avant son changement de catégorie et si elle aurait droit à un avancement automatique d’échelon.

23      Aucune suite n’a été réservée à cette note.

24      Le 13 janvier 2005, la requérante a adressé à l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») un courrier intitulé « Réclamation — Article 90, paragraphe 2 » concernant son classement en grade et son salaire, auquel elle avait joint copie de la note du 14 octobre 2004 adressée au signataire de la décision attaquée. Dans ce courrier la requérante indiquait que, « n’ayant pas encore d’indication claire quant à sa situation » en raison du défaut de réponse à sa note du 14 octobre 2004 ainsi qu’à d’autres contacts épistolaires avec la DG « Personnel et administration », elle se sentait, par conséquent, obligée d’introduire une réclamation formelle afin de préserver ses droits. Elle demandait que son classement en grade soit revu et mis en conformité avec l’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut et faisait valoir qu’elle était victime d’un traitement discriminatoire par rapport à ses collègues de catégorie C qui avaient réussi un concours interne et qui avaient été recrutés avant le 1er mai 2004.

25      L’AIPN a rejeté la réclamation par une décision du 17 mai 2005.

 Conclusions des parties et procédure

26      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler la décision de supprimer l’ensemble de ses points de promotion ;

–        condamner la Commission à l’ensemble des dépens.

27      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

28      Par courrier parvenu au greffe du Tribunal de première instance le 6 octobre 2005, le Conseil a demandé à intervenir dans l’affaire au soutien des conclusions de la Commission. Le président de la quatrième chambre du Tribunal de première instance a fait droit à cette demande par ordonnance du 8 décembre 2005.

29      Par ordonnance du 15 décembre 2005, le Tribunal de première instance, en application de l’article 3, paragraphe 3, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), a renvoyé la présente affaire devant ce dernier. Le recours a été enregistré au greffe du Tribunal sous la référence F‑85/05.

30      Par ordonnance du 23 février 2006, le président de la deuxième chambre du Tribunal a décidé de suspendre la procédure jusqu’au prononcé de la décision du Tribunal de première instance mettant fin à l’instance dans l’affaire T‑58/05, Centeno Mediavilla e.a./Commission.

31      Après le prononcé de l’arrêt du Tribunal de première instance du 11 juillet 2007, Centeno Mediavilla e.a./Commission (T‑58/05, Rec. p. II‑2523, ci-après l’« arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla ») et au vu du pourvoi introduit devant la Cour de justice des Communautés européennes, le 21 septembre 2007, le président de la deuxième chambre du Tribunal a, par ordonnance du 8 novembre 2007, décidé de suspendre à nouveau la procédure jusqu’au prononcé de la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans l’affaire C‑443/07 P, Centeno Mediavilla e.a./Commission.

32      Après le prononcé de l’arrêt de la Cour du 22 décembre 2008, Centeno Mediavilla e.a./Commission (C‑443/07 P, Rec. p. I‑10945, ci-après l’« arrêt de la Cour Centeno Mediavilla »), et à la demande du Tribunal, les parties ont été invitées, par lettre du greffe du Tribunal du 19 mars 2009, à faire part de leurs observations sur les conséquences éventuelles dudit arrêt sur la suite de la procédure. La Commission, le Conseil et la requérante ont déféré à cette demande, respectivement les 27 mars, 14 avril et 16 avril 2009.

33      Par son mémoire en intervention, le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal déclarer non fondée l’exception d’illégalité soulevée par la requérante à l’appui de son recours.

 En droit

 Quant à la recevabilité

34      Sans soulever formellement une exception d’irrecevabilité, la Commission soutient que la note de la requérante du 14 octobre 2004 n’est pas une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut. Elle ne comporterait aucune référence à cette disposition ni la moindre allusion à une « réclamation ». La requérante se serait limitée à y demander des renseignements quant à la base légale de son classement et aux conséquences pécuniaires de cette décision, sans contester la légalité de celle-ci. D’ailleurs, dans sa réclamation introduite le 13 janvier 2005, la requérante aurait elle-même exposé que le but de la note susmentionnée était d’obtenir des clarifications. La réclamation du 13 janvier 2005 serait, quant à elle, tardive.

35      La Commission prétend, en toute hypothèse, que le recours n’est pas recevable en tant qu’il est dirigé contre la décision de supprimer les points de promotion de la requérante, parce que celle-ci ne l’aurait pas contestée dans sa réclamation.

36      À cet égard, selon une jurisprudence constante, le juge est en droit d’apprécier, suivant les circonstances de chaque espèce, si une bonne administration de la justice justifie de rejeter au fond le recours sans statuer préalablement sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la partie défenderesse (arrêts de la Cour du 26 février 2002, Conseil/Boehringer, C‑23/00 P, Rec. p. I‑1873, points 51 et 52, ainsi que du 22 novembre 2007, Cofradía de pescadores « San Pedro » de Bermeo e.a./Conseil, C‑6/06 P, non publié au Recueil, point 21 ; arrêt du Tribunal de première instance du 30 mars 2006, Yedaş Tarim ve Otomotiv Sanayi ve Ticaret/Conseil et Commission, T‑367/03, Rec. p. II‑873, point 30 ; arrêt du Tribunal du 8 avril 2008, Bordini/Commission, F‑134/06, RecFP p. I‑A‑1‑87 et II‑A‑1‑435, point 56). Dans les circonstances de la cause, le Tribunal estime qu’il n’y a pas lieu d’examiner la recevabilité du recours dans son ensemble, dès lors que celui-ci doit en tout état de cause être rejeté sur le fond pour les motifs qui suivent.

37      S’agissant du chef de conclusions dirigé contre la suppression des points de promotion accumulés par la requérante en tant que fonctionnaire de la catégorie C, force est, toutefois, de constater d’emblée que celle-ci n’a, à aucun moment, contesté cette décision dans le cadre de la procédure précontentieuse. Aussi, ce chef de conclusions est-il irrecevable. De plus, la requérante considère elle-même que la décision de lui retirer ces points « n’est [...] pas un acte autonome » et qu’elle « ne justifie pas d’un intérêt distinct à [son] annulation ». Il y a dès lors lieu de conclure qu’elle renonce à demander, distinctement, l’annulation de la décision de lui supprimer ses points de promotion. Par voie de conséquence, le moyen contestant spécifiquement le retrait de ces points est en tant que tel irrecevable.

 Quant au fond

38      Au vu de l’ensemble de la requête, la requérante doit être regardée comme invoquant quatre moyens à l’appui de son recours contre son classement en grade, tirés respectivement :

–        de la violation de l’avis de vacance et de l’avis de concours, du principe de vocation à la carrière et du principe de protection de la confiance légitime ;

–        du principe d’égalité de traitement et de non-discrimination ;

–        de l’illégalité de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut au regard du principe de vocation à la carrière, du principe d’égalité et de non-discrimination, des articles 29 et 31 du statut, de l’absence de motivation et du principe de sécurité juridique ;

–        d’une erreur dans la base légale de la décision attaquée et d’un défaut de motivation.

39      Dans ses observations sur l’arrêt de la Cour Centeno Mediavilla la requérante a, toutefois, informé le Tribunal qu’elle « se désist[ait] de son moyen tiré de l’illégalité de l’article 12 de l’annexe XIII du statut ». Il s’ensuit qu’il n’y a plus lieu d’examiner le troisième moyen. Par ailleurs, la requérante a renoncé, lors de l’audience, au premier moyen, en ce qu’il est tiré de la violation de l’avis de vacance et de l’avis de concours.

40      Ne restent donc à examiner que le premier moyen, en ce qu’il est pris de la violation du principe de vocation à la carrière et du principe de protection de la confiance légitime, ainsi que les deuxième et quatrième moyens.

41      Il convient d’examiner en premier lieu le quatrième moyen.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une erreur dans la base légale de la décision attaquée et d’un défaut de motivation

–       Arguments des parties

42      La requérante prétend qu’il aurait fallu déterminer son classement, non sur la base de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, mais en application de l’article 5, paragraphe 2, de la même annexe, car cette disposition respecterait mieux le principe de la vocation à faire carrière.

43      Les champs d’application respectifs de l’article 5, paragraphe 2, et de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut devraient être distingués selon que les intéressés étaient déjà fonctionnaires ou pas lors de leur nomination et non pas au vu du type de concours, interne ou général, à l’origine des nominations. L’objectif poursuivi par le législateur en adoptant l’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut aurait été d’assurer un même traitement entre, d’une part, les fonctionnaires changeant de catégorie par le truchement de concours et, d’autre part, ceux qui démontrent des mérites comparables par la procédure d’attestation visée à l’article 45 bis du statut. L’article 10, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, qui aurait assimilé l’attestation à la réussite d’un concours général, démontrerait, d’ailleurs, que le législateur n’a pas voulu distinguer les fonctionnaires lauréats d’un concours général de ceux qui passent dans la catégorie supérieure par une autre voie. De plus, l’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut envisagerait le passage « dans une autre catégorie » et non le passage « dans la catégorie supérieure » qu’autorise seulement la réussite d’un concours interne. Cette disposition aurait donc une portée plus large et viserait aussi les fonctionnaires ayant réussi un concours général.

44      La requérante fait encore observer que sa nomination au grade B*3 implique, dans son cas, une perte de traitement et que les conséquences de l’application à sa situation de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut sont, ainsi, disproportionnées.

45      Elle fait enfin valoir qu’aucune raison justifiant son recrutement à un grade inférieur aux grades B 5 et B 4, annoncés dans l’avis de concours COM/B/1/02, ne lui a été fournie. Elle en déduit que la décision attaquée n’est pas correctement motivée.

46      La Commission concède que la solution consistant à appliquer l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut conduit à traiter différemment les fonctionnaires selon qu’ils sont lauréats d’un concours interne ou d’un concours général, mais elle relève que l’article 5, paragraphe 2, de la même annexe aboutit aussi à traiter différemment les lauréats d’un concours général recrutés au même moment.

47      Le législateur aurait, dès lors, choisi de traiter de la même manière les lauréats d’un concours général recrutés après le 1er mai 2004.

48      Ainsi, l’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut viserait-il uniquement les fonctionnaires inscrits avant le 1er mai 2006 « sur une liste de candidats aptes à passer dans une autre catégorie », c’est-à-dire des fonctionnaires ayant réussi des concours internes ayant pour vocation de permettre un changement de catégorie. En effet, ces concours constitueraient le seul cas où la liste des lauréats est exclusivement constituée de candidats « aptes à passer dans une autre catégorie ». En revanche, le terme « recrutés » figurant à l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut serait utilisé dans le sens que la jurisprudence lui attribue et engloberait tant le premier recrutement comme fonctionnaire que le changement de catégorie à la suite de la réussite d’un concours général. Quant à l’article 10, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, dont la requérante tire argument, il ne concernerait pas le classement initial en grade mais la possibilité de devenir assistant sans restriction de carrière. Il viserait donc une hypothèse étrangère au cas d’espèce.

49      De plus, imputer au législateur la volonté d’appliquer l’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut aux fonctionnaires s’étant présentés à un concours général pour accéder à une catégorie supérieure aurait pour conséquence d’augmenter le nombre des fonctionnaires restant soumis à l’ancien statut après le 1er mai 2004, et cela dans une mesure qu’il n’aurait pu déterminer, puisque cette extension dépendrait du nombre de fonctionnaires inscrits à des concours généraux. Or, il serait contraire au fait même de modifier le statut de prêter au législateur l’intention d’adopter de nouvelles dispositions sans mesurer l’exacte portée de dérogations à celles-ci.

50      Le Tribunal aurait, certes, jugé, dans son arrêt du 28 juin 2007, Da Silva/Commission, (F‑21/06, RecFP p. I‑A‑1‑179 et II‑A‑1‑981, point 74), que le principe de la vocation à faire carrière s’opposait à une rétrogradation de fait du requérant. Toutefois, dans cette affaire, la situation du requérant n’était réglée par aucune disposition, alors que, en l’espèce, celle de la requérante serait régie par l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut.

51      La Commission conclut de ce qui précède que, la requérante s’étant présentée à un concours général, l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut lui était applicable alors même qu’elle était fonctionnaire lors de sa candidature.

–       Appréciation du Tribunal

52      Il convient d’emblée d’écarter le grief tiré du défaut de motivation.

53      La décision attaquée en tant qu’elle fixe le grade et l’échelon de la requérante n’est certes pas motivée, puisqu’elle ne mentionne même pas l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut parmi ses fondements juridiques. Cependant, l’AIPN n’est en principe pas tenue de motiver une décision de nomination, qui, en règle générale, ne fait pas grief à son destinataire. De surcroît, force est d’observer que la décision du 17 mai 2005 rejetant la réclamation de la requérante révèle que cette dernière a été classée au grade B*3 parce que l’AIPN a considéré, d’une part, qu’il y avait lieu de lui appliquer l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut plutôt que l’article 5 de la même annexe et, d’autre part, parce qu’il existerait une « différence décisive et objective entre un recrutement avant et après le 1er mai 2004 ». Cette motivation est suffisante.

54      Il convient, dès lors, d’examiner, au plan de la légalité interne, si, ainsi que le prétend la requérante, alors que l’article 5, paragraphe 2, de la même annexe lui aurait été applicable au moment de son passage en catégorie B*, l’AIPN a commis une erreur de droit en se basant sur l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut.

55      Pour répondre à la question posée au point 54 il faut commencer par délimiter le champ d’application personnel de ces deux dispositions.

56      L’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut vise les fonctionnaires qui étaient inscrits, avant le 1er mai 2006, « sur une liste de candidats aptes à passer dans une autre catégorie » et qui sont effectivement passés dans une autre catégorie après le 1er mai 2004. À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 45, paragraphe 2, du statut, dans sa version applicable jusqu’au 30 avril 2004, le passage de fonctionnaires ou d’agents dans une autre catégorie ne pouvait avoir lieu qu’après un concours. Par nature, ce concours ne peut être qu’un concours interne. Il convient dès lors d’admettre, ainsi que l’a fait observer la Commission, que, en mentionnant précisément les fonctionnaires « inscrits sur une liste de candidats aptes à passer dans une autre catégorie », le législateur a entendu viser les candidats ayant passé avec succès ce type spécifique de concours.

57      Certes, l’article 5, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut vise, pour sa part, non seulement les agents temporaires « inscrits sur une liste de candidats aptes à passer dans une autre catégorie », mais aussi ceux qui sont inscrits « sur une liste de candidats lauréats d’un concours interne ». On ne saurait pour autant en déduire que les concours de « passage de catégorie », ainsi que ceux visés au paragraphe 2 du même article, engloberaient les concours généraux. En effet, seuls les concours internes de « passage de catégorie » conduisent à l’établissement de listes composées exclusivement de « candidats aptes à passer dans une autre catégorie ». Dans ces conditions, l’expression « passage de catégorie » ne saurait être interprétée plus largement afin de couvrir également les concours généraux. Une telle interprétation méconnaîtrait le principe selon lequel une disposition transitoire est d’interprétation stricte. De plus, la circonstance que le législateur a expressément mentionné les « concours internes » à l’article 5, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut s’explique par son intention de viser les concours dits de titularisation, dont l’objet est de permettre, dans le respect de l’ensemble des dispositions statutaires régissant l’accès à la fonction publique européenne, le recrutement, en tant que fonctionnaires, d’agents qui ont déjà une certaine expérience de l’institution et qui ont fait preuve de leur aptitude à occuper les postes à pourvoir (voir, en ce qui concerne la portée des concours de titularisation, arrêts du Tribunal de première instance du 6 mars 1997, de Kerros et Kohn-Bergé/Commission, T‑40/96 et T‑55/96, RecFP p. I‑A‑47 et II‑135, points 45 et 46, et du 12 novembre 1998, Carrasco Benítez/Commission, T‑294/97, RecFP p. I‑A‑601 et II‑1819, point 51).

58      En outre, contrairement à ce que plaide la requérante, l’article 10, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut ne constitue pas un indice de l’intention du législateur de réserver un régime identique à tout fonctionnaire changeant de catégorie par quelque voie que ce soit. L’existence même de cette disposition, qui envisage expressément l’hypothèse de fonctionnaires ayant réussi un concours général afin de leur permettre d’accéder, sans restriction, à tous les grades du groupe de fonctions AST, tend à démontrer que l’assimilation de ces concours aux concours internes de « passage de catégorie » n’est pas de droit. Une mise en perspective des paragraphes 3 et 5 de l’article 10 susmentionné confirme, d’ailleurs, que le législateur n’a pas entendu inclure les concours généraux parmi les épreuves permettant à des fonctionnaires de changer de catégorie. Au demeurant, la Commission fait pertinemment observer que l’article 10, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut concerne la possibilité de développer une carrière d’assistant jusqu’au grade AST 11, et non le classement initial en grade qui résulte de l’inscription sur une liste de candidats aptes à passer dans une autre catégorie au sens de l’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut.

59      Il découle de ce qui précède que l’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut concerne seulement les fonctionnaires changeant de catégorie par le truchement d’un concours interne.

60      Or, en l’espèce, force est de constater que la requérante a réussi un concours général organisé en vue de la constitution d’une réserve de recrutement aux grades B 5 et B 4 et non un concours interne. L’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut ne lui était donc pas applicable.

61      Dans la mesure où l’AIPN s’est fondée sur l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut pour déterminer le classement litigieux et où cette disposition vise les lauréats « recrutés entre le 1er mai 2004 et le 30 avril 2006 », il incombe au Tribunal d’examiner si la requérante pouvait être recrutée au sens de cette disposition, alors qu’elle était déjà fonctionnaire lorsque la décision attaquée a été prise.

62      Il importe de relever, à cet égard, que la jurisprudence a déjà admis que la notion de recrutement soit utilisée dans un sens large pour désigner également l’engagement de personnes ayant déjà la qualité de fonctionnaires. Toutefois, elle n’a procédé à cette extension de la définition du recrutement strictement entendu qu’à titre exceptionnel et seulement parce que la personne recrutée pouvait en retirer un certain intérêt en terme de carrière (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 14 juin 1988, Lucas/Commission, 47/87, Rec. p. 3019, point 14 ; arrêt du Tribunal de première instance du 28 septembre 1993, Baiwir e.a./Commission, T‑103/92, T‑104/92 et T‑105/92, Rec. p. II‑987, points 36, 41, 43 et 44).

63      En l’occurrence, à la suite de la réussite par la requérante d’un concours lui permettant d’accéder à des emplois d’un niveau a priori supérieur à celui qu’elle occupait, l’application de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut a conduit l’AIPN à lui attribuer un classement en grade qui, ainsi que le concède la Commission, lui a, à tout le moins, fait « perd[re] l’espoir d’un meilleur classement, [en l’espèce celui] annoncé dans l’avis [de concours] initial ».

64      Dans ces conditions, le changement de catégorie résultant de la décision attaquée ne saurait être assimilé à un « recrutement » sur la base de la jurisprudence précitée.

65      Il convient, néanmoins, de tenir compte des termes employés par le législateur dans l’annexe XIII du statut. Il ressort, en effet, d’une lecture combinée de l’article 1er, paragraphe 2, et de l’article 12, paragraphe 3, de cette annexe que le terme « recrutés » figurant dans cette dernière disposition revêt un sens précis et qu’il doit être compris comme visant les fonctionnaires entrés en service entre le 1er mai 2004 et le 30 avril 2006 dans un emploi rendu accessible à la suite de leur inscription, avant le 1er mai 2006, sur une liste d’aptitude clôturant un concours publié sous le régime de l’ancien statut.

66      Tel étant le cas de la requérante, c’est à bon droit que l’administration a fait application de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut.

67      En outre, le législateur a pu considérer que les inconvénients résultant d’une extension de la règle figurant à l’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut aux fonctionnaires changeant de catégorie par le truchement d’un concours général annoncé avant le 1er mai 2004 auraient été trop importants, en ce qu’il ignorait le nombre de fonctionnaires tentant d’accéder à une catégorie supérieure par le biais d’un concours général et en ce qu’il aurait ainsi écarté dans une mesure indéterminable l’application des nouvelles règles du statut relatives, en particulier, aux grades de recrutement.

68      De plus, si l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut conduit à traiter différemment les fonctionnaires selon qu’ils sont lauréats d’un concours interne ou d’un concours général, le recours à l’article 5, paragraphe 2, de la même annexe, préconisé par la requérante, aurait abouti aussi à traiter distinctement les lauréats d’un concours général recrutés au même moment. Aussi, le législateur a-t-il pu considérer, dans le cadre de son large pouvoir d’appréciation, qu’il convenait de privilégier l’égalité de traitement entre lauréats d’un même concours auquel les fonctionnaires, comme la requérante, ont librement choisi de s’inscrire.

69      Enfin, l’AIPN ne saurait se voir reprocher une violation du principe de proportionnalité dans la mesure où elle a classé la requérante au grade B*3 conformément à l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut qui ne lui laissait, en l’espèce, aucune marge d’appréciation autonome.

70      Il découle de tout ce qui précède que le moyen tiré d’une erreur dans la base légale de la décision attaquée et d’un défaut de motivation n’est pas fondé.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation du principe de vocation à la carrière et du principe de protection de la confiance légitime

–       Arguments des parties

71      La requérante relève qu’alors que l’avis de concours COM/B/1/02 précisait que le niveau des emplois à pourvoir correspondait à la carrière B 5/B 4, ou B*5/B*6 depuis le 1er mai 2004, ce classement a été modifié au dernier stade de la procédure de recrutement en violation du principe de vocation à la carrière. Elle ajoute que ce procédé méconnaît également le principe de protection de la confiance légitime dès lors qu’elle pouvait légitimement s’attendre à voir son classement fixé au grade B*5 ou B*6.

72      La Commission répond que le règlement no 723/2004 a eu pour effet de remplacer les anciens grades par de nouveaux grades. En conséquence, les avis de vacance et les avis de concours publiés avant le 1er mai 2004 seraient devenus caducs en ce qu’ils visaient le recrutement dans des grades déterminés ayant disparu avec la réforme statutaire. Ce constat s’imposerait d’autant plus que le concours litigieux portait sur une carrière de deux grades en application de l’article 5 de l’ancien statut et que, à compter du 1er mai 2004, le statut ne ferait plus référence à cette notion de carrière. Selon la Commission, le législateur devait, dès lors, adopter des règles de transition en fixant lui-même le nouveau grade auquel serait classé un fonctionnaire recruté à la suite d’un concours dont l’avis avait été publié avant le 1er mai 2004. Tel serait l’objet de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut.

73      La Commission estime, en outre, que la requérante ne démontre pas que l’administration lui aurait fourni des assurances précises, inconditionnelles et concordantes que son classement en grade serait déterminé conformément à l’ancien statut. L’avis de concours mentionnerait, au contraire, que la nomination des lauréats se ferait probablement sur la base de nouvelles dispositions. Elle rappelle aussi que la confiance légitime ne peut naître que d’assurances conformes aux normes applicables et que l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut ne lui laissait aucune marge de manœuvre.

–       Appréciation du Tribunal

74      La requérante prétend, en substance, que, classée au grade C*5 et ayant réussi le concours général COM/B/1/02 qui visait à constituer une réserve de recrutement d’assistants adjoints de grades B 5 ou B 4, elle aurait dû être nommée au grade B*5 ou B*6 en vertu du principe de vocation à la carrière.

75      Cependant, dans le contexte de la réforme statutaire caractérisée par une profonde modification de la structure des grades, elle ne saurait utilement invoquer ledit principe.

76      Il est, en effet, établi que, en cas de modification de dispositions d’application générale et, singulièrement, de dispositions statutaires, une règle nouvelle s’applique immédiatement aux effets futurs de situations juridiques, qui sont nées, sans être cependant entièrement constituées, sous l’empire de la règle antérieure (arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, point 51). Or le statut ne confère aucun droit à accéder à un grade de la catégorie supérieure par le truchement d’un concours général, même pour les fonctionnaires qui réunissent toutes les conditions pour être ainsi nommés, parce que l’inscription des lauréats sur les listes de réserve dressées à l’issue des opérations de sélection n’emporte au profit des intéressés qu’une simple vocation à être nommés à l’un des postes auxquels le concours tendait à pourvoir et parce que cette vocation est nécessairement exclusive de tout droit acquis (arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, points 52 et 53).

77      De plus, dès lors qu’aucun droit acquis n’est en cause, le principe de vocation à la carrière ne saurait faire obstacle à la liberté du législateur d’apporter à tout moment aux règles statutaires les modifications qu’il estime conformes à l’intérêt du service, même si ces nouvelles dispositions s’avèrent moins favorables que les anciennes pour les fonctionnaires (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 29 novembre 2006, Campoli/Commission, T‑135/05, RecFP p. I‑A‑2‑297 et II‑A‑2‑1527, point 105, et Centeno Mediavilla, points 86 et 113 ; arrêt du Tribunal du 19 juin 2007, Davis e.a./Conseil, F‑54/06, RecFP p. I‑A‑1‑165 et II‑A‑1‑911, point 81).

78      De surcroît, pour revendiquer un classement à un des grades B*5 ou B*6, la requérante s’appuie sur les grades B 5 et B 4 annoncés dans l’avis de concours COM/B/1/02 et sur la nouvelle dénomination donnée à ceux-ci par l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut.

79      Or, d’une part, il ressort de l’arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla (point 109) que la détermination du niveau des postes à pourvoir, à laquelle l’administration avait procédé dans le cadre des dispositions de l’ancien statut, en rédigeant l’avis de concours litigieux, n’a pu prolonger ses effets au-delà de la date du 1er mai 2004. Sur pourvoi, la Cour a confirmé que le droit des lauréats de concours, résultant de l’article 31, paragraphe 1, du statut, de se voir attribuer le grade indiqué dans l’avis de concours ne peut s’appliquer qu’à droit constant, puisque la légalité d’une décision s’apprécie en fonction des éléments de droit en vigueur au moment où elle est adoptée et que cette disposition ne peut, dès lors, faire obligation à l’AIPN de prendre une décision non conforme au statut tel que modifié par le législateur et, partant, illégale (arrêt de la Cour Centeno Mediavilla, point 100).

80      D’autre part, l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut a seulement eu pour objet de convertir, au 1er mai 2004, les grades dont étaient titulaires ceux qui avaient la qualité de fonctionnaire le 30 avril 2004 dans la perspective de leur rendre applicable la nouvelle structure de carrières appelée à entrer pleinement en vigueur le 1er mai 2006. D’interprétation stricte, comme toute disposition transitoire, il ne saurait se voir reconnaître une portée s’étendant au-delà de l’établissement de cette relation intermédiaire (voir, en ce sens arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, points 112 à 115). Il n’avait donc pas vocation à s’appliquer pour fixer le classement en grade de la requérante en vertu de sa nouvelle nomination, seulement intervenue le 6 août 2004, au vu de sa qualité de lauréate d’un concours antérieur au 1er mai 2004.

81      S’agissant du principe de la confiance légitime, les arrêts Centeno Mediavilla de la Cour (points 90 et 91) et du Tribunal de première instance (point 95) ont rappelé qu’un fonctionnaire ne saurait se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime pour s’opposer à la légalité d’une disposition réglementaire nouvelle, surtout dans un domaine dans lequel le législateur dispose, comme en l’espèce, d’un large pouvoir d’appréciation quant à la nécessité de réformes statutaires.

82      Le Tribunal de première instance a ajouté (points 96 et 97 de son arrêt Centeno Mediavilla) que le droit de réclamer la protection de la confiance légitime s’étend à tout particulier qui se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l’administration a fait naître chez lui des espérances fondées, en lui fournissant des assurances précises sous la forme de renseignements précis, inconditionnels et concordants, émanant de sources autorisées et fiables, et que, en revanche, nul ne peut invoquer une violation de ce principe en l’absence d’assurances précises que lui aurait fournies l’administration.

83      Or, les faits démontrent que la requérante ne pouvait fonder sa confiance dans des assurances précises, inconditionnelles et concordantes que lui aurait fournies une source autorisée de la Commission.

84      Dans sa réclamation du 14 octobre 2004, la requérante prétend, certes, que l’unité des ressources humaines de la DG « Relations extérieures » lui aurait indiqué qu’elle serait classée au grade B*5, échelon 4. Toutefois, elle n’étaye pas cette allégation et, à la supposer établie, l’affirmation en cause n’émanerait, en toute hypothèse, pas de l’AIPN qui, seule, est habilitée à arrêter le classement des fonctionnaires.

85      De plus, le rectificatif à l’avis de concours COM/B/1/02, publié le 18 juillet 2003, a averti les futurs lauréats qu’ils pourraient se voir proposer un recrutement sur la base des nouvelles dispositions statutaires.

86      Le premier moyen, tiré de la violation du principe de vocation à la carrière et du principe de protection de la confiance légitime, n’est donc pas fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré du principe d’égalité de traitement et de non-discrimination

–       Arguments des parties

87      La requérante observe que certains lauréats du concours COM/B/1/02 ont été recrutés, avant le 1er mai 2004, aux grades correspondant à la carrière B 5/B 4 qui sont plus avantageux que le grade B*3 qui lui a été attribué. Or, le principe d’égalité exigerait que les fonctionnaires appartenant à une même catégorie ou à un même groupe de fonctions soient soumis à des conditions identiques de recrutement et de déroulement de carrière. De plus, le Tribunal de première instance aurait jugé, dans un arrêt du 9 juillet 1997, Monaco/Parlement (T‑92/96, RecFP p. I‑A‑195 et II‑573), qu’appliquer à un fonctionnaire recruté par concours des dispositions contenues dans des nouvelles directives internes, postérieures à ce concours, reviendrait à traiter ce fonctionnaire de manière différente par rapport à ceux qui ont été nommés à l’issue du même concours mais avant l’entrée en vigueur de ces directives. La requérante en déduit que les lauréats d’un même concours se trouvent dans une situation comparable et qu’ils doivent bénéficier du même traitement. Au vu de ce qui précède, elle conclut que la date de son recrutement ne peut justifier une différence de classement en grade et en échelon avec d’autres lauréats du même concours.

88      La requérante prétend, en outre, avoir été discriminée par rapport à des fonctionnaires de la Cour des comptes de l’Union européenne auxquels cette institution aurait appliqué l’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut en considérant qu’il constituait une disposition spéciale dérogeant à l’article 12, paragraphe 3, de la même annexe.

89      La Commission répond que la jurisprudence relative aux lignes directrices, citée par la requérante, n’est pas transposable en l’espèce, dans la mesure où les nouvelles règles de classement sont l’œuvre non pas de l’administration mais du législateur. Celui-ci serait, au contraire, à tout moment, en droit d’adopter pour l’avenir des modifications aux dispositions statutaires qu’il estime conformes à l’intérêt du service, même si ces nouvelles dispositions aboutissent à une situation moins favorable pour les fonctionnaires que ne l’était celle découlant des anciennes dispositions. De plus, toute réglementation nouvelle s’appliquerait aux effets futurs d’une situation née sous l’empire d’une réglementation antérieure.

–       Appréciation du Tribunal

90      Il y a lieu de rappeler que le principe d’égalité est méconnu lorsque deux catégories de personnes dont les situations factuelles et juridiques ne présentent pas de différence essentielle se voient appliquer un traitement différent lors de leur recrutement et qu’une telle différence de traitement n’est pas objectivement justifiée (arrêt de la Cour Centeno Mediavilla, point 76).

91      De plus, ainsi qu’il a déjà été exposé au point 77 ci-dessus, sous peine d’empêcher toute évolution législative, le principe d’égalité ne saurait entraver la liberté du législateur d’apporter à tout moment aux règles statutaires les modifications qu’il estime conformes à l’intérêt du service, même si ces nouvelles dispositions s’avèrent moins favorables que les anciennes pour les fonctionnaires.

92      Par ailleurs, il ressort de l’article 3 du statut que la nomination d’un fonctionnaire trouve nécessairement son origine dans un acte unilatéral de l’AIPN et que ce n’est qu’après avoir fait l’objet d’une telle décision que le lauréat d’un concours peut revendiquer la qualité de fonctionnaire et, partant, réclamer le bénéfice des dispositions statutaires (arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, points 54 et 55).

93      Il découle de ce qui précède que le classement en grade de fonctionnaires qui, comme la requérante, ont été nommés à compter du 1er mai 2004, ne pouvait être légalement déterminé qu’en application des nouveaux critères en vigueur à cette date (arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, point 77). Durant la période transitoire s’étendant du 1er mai 2004 au 30 avril 2006, ces critères étaient fixés par l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, ainsi que cela ressort des points 61 et suivants du présent arrêt.

94      Partant, le grief que la requérante tire de la comparaison de sa situation avec celle des lauréats du concours COM/B/1/02 nommés avant le 1er mai 2004 manque en droit.

95      Cette conclusion n’est pas infirmée par l’arrêt Monaco/Parlement, précité, dont la requérante déduit que les lauréats d’un même concours se trouvent dans une situation comparable et qu’ils doivent bénéficier du même traitement, indépendamment de la date de leur recrutement.

96      En effet, il résulte des arrêts Centeno Mediavilla de la Cour et du Tribunal de première instance que les lauréats d’un concours peuvent être traités différemment selon que la date de leur nomination est ou non postérieure à l’entrée en vigueur d’une réforme statutaire opérée par le législateur de l’Union, parce qu’une telle différenciation se justifie objectivement par la nécessité, déjà rappelée (voir points 77 et 91 ci-dessus), de préserver la liberté de celui-ci d’apporter à tout moment aux règles statutaires les modifications qu’il estime conformes à l’intérêt du service (arrêt de la Cour Centeno Mediavilla, point 79 ; arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, point 86).

97      La Cour a d’ailleurs jugé que deux fonctionnaires qui sont reclassés à un grade supérieur sous l’empire de règles statutaires différentes se trouvent, de ce fait même, dans des situations différentes (arrêt de la Cour du 4 mars 2010, Angé Serrano/Parlement, C‑496/08 P, Rec. p. I‑1793, point 108).

98      De plus, l’idée selon laquelle tous les fonctionnaires recrutés par une institution à partir d’un même concours se trouveraient dans des situations comparables n’a été avancée au point 55 de l’arrêt Monaco/Parlement, précité, qu’aux fins de constater l’illégalité de l’application à un lauréat d’un concours général de directives internes de classement en grade plus sévères adoptées par l’institution employeur elle-même, postérieurement à l’inscription de l’intéressé sur la liste d’aptitude, en vue de l’application de critères de classement statutaires demeurés inchangés. En l’occurrence, et en tout état de cause, c’est au contraire le législateur de l’Union qui, dans l’exercice d’un droit que la requérante ne conteste pas, a choisi de modifier les critères statutaires de classement en grade (arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, points 84 et 85).

99      La conclusion figurant au point 94 ci-dessus n’est pas davantage remise en cause par l’affirmation de la requérante selon laquelle la Cour des comptes aurait mieux traité que la Commission les fonctionnaires accédant à une catégorie supérieure par la voie d’un concours général, dans la mesure où cette institution leur aurait appliqué l’article 5, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut.

100    En effet, il ressort du point 66 ci-dessus que l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut était la disposition applicable à la situation de la requérante. Aussi, à supposer que la Cour des comptes ait fait usage de l’article 5, paragraphe 2, de la même annexe du statut, il ne pourrait qu’être rappelé que nul ne peut invoquer, à son profit, une illégalité commise en faveur d’autrui (arrêts du Tribunal de première instance du 20 mars 2002, LR AF 1998/Commission, T‑23/99, Rec. p. II‑1705, point 367, et du 22 décembre 2005, Gorostiaga Atxalandabaso/Parlement, T‑146/04, Rec. p. II‑5989, point 141).

101    Il résulte de ce qui précède que le deuxième moyen, tiré du principe d’égalité de traitement et de non-discrimination, n’est pas fondé.

102    Aucun moyen n’étant fondé, le recours doit, par conséquent, être rejeté.

 Sur les dépens

103    En vertu de l’article 122 du règlement de procédure, les dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, relatives aux dépens et frais de justice, ne s’appliquent qu’aux affaires introduites devant le Tribunal à compter de l’entrée en vigueur de ce règlement de procédure, à savoir le 1er novembre 2007. Les dispositions du règlement de procédure du Tribunal de l’Union pertinentes en la matière continuent à s’appliquer mutatis mutandis aux affaires pendantes devant le Tribunal avant cette date.

104    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de l’Union, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre l’Union et ses agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

105    Selon l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal de l’Union, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs propres dépens.

106    La requérante ayant succombé en son recours, il y a lieu de décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours de Mme Sørensen est rejeté.

2)      Chaque partie supporte ses propres dépens.

Mahoney

Tagaras

Van Raepenbusch

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 octobre 2010.

Le greffier

 

      Le président

W. Hakenberg

 

      P. Mahoney


* Langue de procédure : le français.