Language of document : ECLI:EU:C:2018:238

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MELCHIOR WATHELET

présentées le 12 avril 2018 (1)

Affaire C99/17 P

Infineon Technologies AG

contre

Commission européenne

« Pourvoi – Ententes – Marché européen des puces pour cartes – Réseau de contacts bilatéraux en vue de coordonner les réponses à apporter aux clients désireux d’obtenir des baisses de prix – Contestation de l’authenticité des preuves – Étendue du contrôle juridictionnel – Compétence de pleine juridiction »






1.        Par le présent pourvoi, Infineon Technologies AG (ci-après la « requérante ») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 15 décembre 2016, Infineon Technologies/Commission (T‑758/14, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2016:737), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant, à titre principal, à l’annulation de la décision C(2014) 6250 final de la Commission, du 3 septembre 2014, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord [sur l’Espace économique européen (EEE)] (affaire AT.39574 – Puces pour cartes) (ci-après la « décision litigieuse »), et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l’amende infligée à la requérante.

2.        Conformément à la demande de la Cour, les présentes conclusions seront ciblées sur deux questions de droit soulevées par la requérante à l’appui de son pourvoi. Ces deux questions portent, d’une part, sur les conditions d’exercice de la compétence de pleine juridiction et, d’autre part, sur la contestation de l’authenticité des éléments de preuve retenus par la Commission européenne.

I.      Le cadre juridique

A.      Le règlement nº 1/2003

3.        Aux termes de l’article 31 du règlement (CE) nº 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101 TFUE] et [102 TFUE] (2), « [l]a Cour de justice statue avec compétence de pleine juridiction sur les recours formés contre les décisions par lesquelles la Commission a fixé une amende ou une astreinte. Elle peut supprimer, réduire ou majorer l’amende ou l’astreinte infligée ».

B.      Les lignes directrices pour le calcul des amendes

4.        Les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003 (3) (ci-après les « lignes directrices pour le calcul des amendes ») énoncent, sous l’intitulé « Ajustement du montant de base [de l’amende] » :

« [...]

B. Circonstances atténuantes

29. Le montant de base de l’amende peut être réduit lorsque la Commission constate l’existence de circonstances atténuantes, telles que :

–        [...]

–        [...]

–        lorsque l’entreprise concernée apporte la preuve que sa participation à l’infraction est substantiellement réduite et démontre par conséquent que, pendant la période au cours de laquelle elle a adhéré aux accords infractionnels, elle s’est effectivement soustraite à leur application en adoptant un comportement concurrentiel sur le marché ; le seul fait qu’une entreprise a participé à une infraction pour une durée plus courte que les autres ne sera pas considéré comme une circonstance atténuante, puisque cette circonstance est déjà reflétée dans le montant de base ;

[...] »

II.    Les antécédents du litige

5.        Les antécédents du litige et les éléments essentiels de la décision litigieuse ont été exposés aux points 1 à 40 de l’arrêt attaqué. Ils peuvent se résumer comme suit.

6.        La Commission a été informée, le 22 avril 2008, de l’existence d’une entente dans le secteur des puces pour cartes par Renesas Technology Corp. et ses filiales (ci-après « Renesas »), laquelle a demandé à bénéficier de l’immunité d’amendes au titre de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (4) (ci‑après la « communication sur la coopération »). Après avoir procédé à des inspections inopinées dans les locaux de plusieurs sociétés de ce secteur et après leur avoir adressé des demandes de renseignements, la Commission a, le 28 mars 2011, ouvert la procédure, conformément à l’article 11, paragraphe 6, du règlement nº 1/2003, à l’encontre de Koninklijke Philips NV et Philips France (ci‑après « Philips »), de Renesas ainsi que de Samsung Electronics CO., Ltd, et de Samsung Semiconductor Europe GmbH (ci-après, prises ensemble, « Samsung »).

7.        Au mois d’avril 2011, la Commission a engagé des discussions en vue d’une transaction au sens de l’article 10 bis du règlement (CE) nº 773/2004 de la Commission, du 7 avril 2004, relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission en application des articles [101 TFUE] et [102 TFUE] (5), avec Renesas, Samsung et Philips. Ces discussions ont été suspendues au mois d’octobre 2012.

8.        Le 18 avril 2013, la Commission a envoyé une communication des griefs à Renesas, Hitachi, Mitsubishi Electric Corp., Samsung, la requérante et Philips. L’audition s’est tenue le 20 novembre 2013.

9.        Le 3 septembre 2014, la Commission a adopté la décision litigieuse. Par cette décision, la Commission a constaté que quatre entreprises, à savoir la requérante, Philips, Renesas et Samsung, avaient participé à une infraction unique et continue à l’article 101, paragraphe 1, TFUE et à l’article 53 de l’accord EEE dans le secteur des puces pour cartes couvrant l’EEE (ci-après l’« infraction en cause »). Cette infraction, qui se serait déroulée entre le 24 septembre 2003 et le 8 septembre 2005, aurait porté sur les puces pour cartes, qui sont utilisées dans les cartes SIM des téléphones portables, les cartes bancaires, les cartes d’identité et les passeports, les cartes de télévision à péage et diverses autres applications.

10.      Au moment de l’infraction en cause, le marché des puces pour cartes, qui comportait deux segments – à savoir les puces pour cartes SIM (utilisées essentiellement pour les téléphones mobiles) et les puces pour cartes non SIM (utilisées pour la banque, la sécurité et l’identification) –, était caractérisé par une chute constante des prix, la pression exercée sur les prix par les principaux clients des producteurs de cartes à puces, des déséquilibres de l’offre par rapport à la demande résultant de l’augmentation de la demande et de l’évolution technologique constante et rapide ainsi que la structure des négociations contractuelles avec les clients.

11.      L’infraction en cause s’appuyait sur un réseau de contacts bilatéraux entre les destinataires de la décision litigieuse soit lors de réunions, soit lors d’entretiens téléphoniques, qui étaient hebdomadaires pour les années 2003 et 2004. Selon la Commission, les participants à l’infraction ont coordonné leur politique de prix en matière de puces pour cartes au moyen de contacts portant sur la fixation de prix, notamment les prix spécifiques proposés aux principaux clients, les prix minimaux et les prix indicatifs, le partage des points de vue sur l’évolution des prix pour le semestre suivant et les intentions en matière de fixation de prix, mais aussi sur la capacité de production et l’utilisation de celle-ci, le comportement futur sur le marché ainsi que les négociations de contrats de clients communs. Le calendrier des contacts collusoires, dont la liste figure au tableau nº 4 de la décision litigieuse, suivrait le calendrier du cycle économique. Considérant leur objet et le moment où ils avaient lieu, la Commission a constaté des liens entre ces contacts bilatéraux. En outre, à l’occasion de ceux-ci, les entreprises auraient parfois fait ouvertement mention d’autres contacts bilatéraux entre les participants à l’infraction en cause et des informations collectées auraient été transmises aux concurrents.

12.      La Commission a qualifié l’infraction en cause d’infraction unique et continue. En effet, les contacts collusoires seraient liés et de nature complémentaire. Par leur interaction, ils auraient contribué à la réalisation de l’ensemble des effets anticoncurrentiels dans le cadre d’un plan global ayant un objectif unique.

13.      Selon la Commission, Samsung, Renesas et Philips avaient connaissance de l’infraction dans son intégralité. En revanche, la requérante n’a été tenue pour responsable de cette infraction que dans la mesure où elle a participé à des pratiques collusoires avec Samsung et Renesas, en l’absence de preuves qu’elle ait également eu des contacts avec Philips ou qu’elle ait eu l’impression subjective de participer à l’ensemble de l’infraction en cause.

14.      Enfin, la Commission a estimé que le comportement des entreprises en cause avait pour objet de restreindre le jeu de la concurrence à l’intérieur de l’Union et a eu un effet appréciable sur le commerce entre les États membres et entre les parties contractantes à l’accord EEE.

15.      Aux fins du calcul des amendes infligées conformément à l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003 et aux lignes directrices pour le calcul des amendes, la Commission a précisé que l’infraction en cause avait été commise intentionnellement. Pour le calcul du montant de base, elle a pris un indicateur pour la valeur annuelle des ventes reposant sur la valeur réelle des ventes des produits cartellisés, réalisées par les entreprises au cours des mois de leur participation active à l’infraction en cause. Elle a fait application d’un coefficient de gravité de l’infraction en cause de 16 %. Elle a tenu compte d’une durée de 11 mois et 17 jours pour Philips, de 18 mois et 7 jours pour la requérante, de 23 mois et 2 jours pour Renesas et de 23 mois et 15 jours pour Samsung. Elle a appliqué un coefficient de 16 % de la valeur des ventes au titre du montant additionnel.

16.      Au titre des circonstances atténuantes, la Commission a accordé une réduction de 20 % du montant de l’amende à la requérante en raison du fait que cette dernière n’était responsable de l’infraction en cause que pour autant qu’elle avait participé à des arrangements collusoires avec Samsung et Renesas, et non avec Philips. Au titre de la communication sur la coopération, elle a accordé l’immunité d’amendes à Renesas et une réduction de 30 % du montant de l’amende à Samsung.

17.      À l’article 1er de la décision litigieuse, la Commission a constaté que les entreprises suivantes ont participé à une infraction unique et continue à l’article 101, paragraphe 1, TFUE et à l’article 53 de l’accord EEE dans le secteur des puces pour cartes couvrant l’EEE :

–        la requérante, du 24 septembre 2003 au 31 mars 2005, « en raison de sa coordination avec Samsung et Renesas » [article 1er, sous a)] ;

–        Philips, du 26 septembre 2003 au 9 septembre 2004 [article 1er, sous b)] ;

–        Renesas, du 7 octobre 2003 au 8 septembre 2005 [article 1er, sous c)], et

–        Samsung, du 24 septembre 2003 au 8 septembre 2005 [article 1er, sous d)].

18.      À l’article 2 de la décision litigieuse, la Commission a imposé des amendes d’un montant de 82 784 000 euros à la requérante [article 2, sous a)], de 20 148 000 euros à Philips [article 2, sous b)], de 0 euro à Renesas [article 2, sous c)], et de 35 116 000 euros à Samsung [article 2, sous d)].

III. La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

19.      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 novembre 2014 (ci-après la « requête en annulation »), la requérante a introduit un recours tendant, à titre principal, à l’annulation de la décision litigieuse et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l’amende qui lui avait été infligée.

20.      À l’appui de son recours, la requérante invoquait six moyens. Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté ces moyens et, partant, le recours de la requérante dans son intégralité.

21.      Par ses deux premiers moyens soulevés devant le Tribunal, qui avaient trait au respect de ses droits de la défense et du principe de bonne administration, la requérante a notamment critiqué le traitement procédural d’un élément de preuve produit par Samsung en 2012, à savoir un courriel interne de cette société en date du 3 novembre 2003, dont elle contestait par ailleurs l’authenticité.

22.      Dans ce contexte, au titre de l’appréciation du deuxième grief soulevé à l’appui du premier moyen, le Tribunal a, en substance, constaté, aux points 76 à 80 de l’arrêt attaqué, que la Commission aurait dû communiquer à la requérante, durant la procédure administrative, ses propres « appréciations scientifiques » sur l’authenticité de ce courriel. En effet, ces appréciations auraient constitué des éléments à charge dès lors qu’elles ont conduit la Commission à conclure que ledit courriel constituait une preuve crédible de la participation de la requérante à l’infraction en cause. Cependant, le Tribunal a jugé, au point 85 de cet arrêt, que l’omission de communiquer lesdites appréciations à la requérante est restée sans influence sur le résultat auquel la Commission est parvenue dans la décision litigieuse, de sorte qu’il a rejeté le grief de la requérante au point 86 dudit arrêt.

23.      Dans la mesure où la requérante contestait la valeur probatoire d’une déclaration d’un employé de Samsung en ce qu’une fausse déclaration ne constituait pas une infraction pénale en République de Corée et que, après l’échec de la transaction, Samsung aurait eu un intérêt spécifique à « embellir les faits », le Tribunal, au point 93 de l’arrêt attaqué, a, en substance, considéré que Samsung, en tant que demandeur au titre de la communication sur la coopération, s’exposait à perdre le bénéfice de cette coopération en cas de fausse déclaration.

24.      Le Tribunal a également écarté un argument soulevé par la requérante dans le cadre du deuxième moyen et tiré de ce que la Commission aurait dû demander une expertise indépendante de la version électronique du courriel du 3 novembre 2003 en l’absence de preuve valable de son authenticité. Au point 118 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a fondé sa réponse à cet argument sur le motif que la Commission dispose d’une certaine marge d’appréciation pour décider des mesures supplémentaires à prendre et que, en l’espèce, la requérante n’a pas établi, compte tenu des expertises qui lui avaient été fournies et de ses propres appréciations scientifiques, qu’une telle demande s’imposait.

25.      Dans le cadre de l’examen du troisième moyen, pris d’une violation de l’article 101, paragraphe 1, TFUE et sous-divisé en quatre branches, le Tribunal a, notamment, examiné des allégations de la requérante relatives à l’absence de crédibilité des preuves fournies par Samsung et à la preuve de l’existence d’une infraction commise par la requérante.

26.      À cet égard, aux points 143 à 158 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné les arguments de la requérante tendant à contester, dans le cadre de la deuxième branche soulevée à l’appui du troisième moyen, la crédibilité des preuves fournies par Samsung.

27.      Premièrement, le Tribunal a écarté ces arguments, aux points 143 et 144 de cet arrêt, comme étant non fondés au motif que, à supposer même qu’il faille considérer que Samsung ne constitue pas un témoin crédible et qu’il faille écarter toutes les déclarations et les preuves documentaires qu’elle a fournies, cela ne remettrait pas en cause les appréciations de la Commission, qui reposent sur les déclarations et les preuves documentaires apportées par Renesas, établissant que la requérante a eu des contacts anticoncurrentiels avec cette dernière, tels que celui qui s’est tenu le 31 mars 2005. Le Tribunal a renvoyé, à cet égard, aux points 193 à 201 de son arrêt, étant précisé que, aux points 197 à 206 dudit arrêt, le Tribunal a examiné et a écarté les arguments de la requérante tendant à contester ce dernier contact.

28.      Deuxièmement, « et à titre surabondant », le Tribunal a examiné et a écarté, aux points 145 à 157 de l’arrêt attaqué, les griefs de la requérante tendant à contester la crédibilité de Samsung en tant que témoin et la crédibilité des déclarations et des preuves de cette dernière.

29.      Dans ce contexte, d’une part, le Tribunal a notamment relevé que, la requérante n’ayant pas contesté les appréciations de la Commission selon lesquelles les déclarations et les preuves de Samsung étaient corroborées par d’autres membres du cartel, en particulier par Renesas et NXP (6), tous les arguments tendant à discréditer Samsung en tant que témoin fiable devaient être rejetés comme étant inopérants (points 146 à 149 de l’arrêt attaqué). D’autre part, le Tribunal a répondu aux griefs de la requérante, relatifs à la fiabilité des preuves retenues par la Commission pour établir les contacts des 3 et 7 novembre 2003 (points 152 à 157 de l’arrêt attaqué).

30.      Aux points 159 à 208 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné la troisième branche soulevée à l’appui de ce moyen et relative à la preuve de l’existence d’une infraction à l’article 101 TFUE. La requérante alléguait qu’aucun des onze contacts qu’elle aurait eus avec ses concurrents ne violait cette disposition. Dans ce contexte, le Tribunal a précisé, au point 160 de l’arrêt attaqué, que « la requérante ne contest[ait] pas l’appréciation de la Commission selon laquelle les prix étaient déterminés, en principe, sur une base annuelle, ce qui ressort d’ailleurs des discussions auxquelles la requérante a pris part. Dans ces conditions, il suffit d’examiner, pour les années 2003 à 2005, si la requérante a participé à une ou, le cas échéant, à deux discussions anticoncurrentielles, durant chacune de ces trois années, avec Samsung ou Renesas, pour conclure à l’existence ou non d’une infraction à l’article 101 TFUE ».

31.      Dans ces conditions, le Tribunal a estimé opportun d’examiner, à titre liminaire, cinq contacts entre la requérante et Samsung ou Renesas, à savoir les contacts du 24 septembre 2003 (premier contact), du 3 novembre 2003 (deuxième contact), du 18 mars 2004 (sixième contact), du 1er au 8 juin 2004 (septième contact) et du 31 mars 2005 (onzième contact), ces premier et dernier contacts marquant, selon la Commission, respectivement, le début et la fin de la participation de la requérante à l’infraction en cause.

32.      Selon le Tribunal, ce n’était donc que dans l’hypothèse où ces cinq contacts ne permettaient pas d’établir l’existence de l’infraction en cause qu’il aurait dû examiner si les autres contacts, tels que celui du 17 novembre 2003, dont la requérante soutenait qu’ils n’étaient pas illicites, contribuaient ou non à établir l’existence de cette infraction.

33.      Le Tribunal a ensuite examiné et a écarté l’ensemble des arguments avancés par la requérante au sujet de ces cinq contacts.

34.      En particulier, s’agissant du contact du 24 septembre 2003 entre la requérante et Samsung, examiné aux points 161 à 176 de l’arrêt attaqué, d’une part, le Tribunal a considéré, aux points 164 à 166 de son arrêt, que l’échange des informations en cause au sujet des prix, des capacités actuelles et futures et de l’évolution technologique envisagée était de nature, en particulier sur un marché où l’offre et la demande sont concentrées, à influer directement sur la stratégie commerciale des concurrents. Le Tribunal a précisé, au point 168 de cet arrêt, qu’aucun des arguments de la requérante ne permettait d’infirmer le constat selon lequel, à tout le moins, celle-ci et Samsung avaient échangé sur les prévisions de prix de l’année suivante.

35.      D’autre part, aux points 173 à 175 dudit arrêt, le Tribunal a qualifié cet échange d’informations, sensibles selon lui, d’infraction par objet, compte tenu du contexte économique et juridique du marché en cause, tel qu’exposé, sans que la requérante l’ait contesté devant lui, au considérant 59 de la décision litigieuse.

36.      S’agissant plus spécifiquement des discussions relatives à la capacité de production, le Tribunal a ajouté, au point 176 du même arrêt, que, d’une part, dès lors que la Commission avait identifié les raisons pour lesquelles elle considérait que l’échange d’informations sur les capacités était, au regard des caractéristiques du marché, de nature à restreindre la concurrence, elle n’était pas tenue de démontrer l’existence d’effets anticoncurrentiels sur le marché pour qualifier la pratique en cause d’infractionnelle. D’autre part, à supposer même que l’échange d’informations sur les capacités n’ait pas été à lui seul suffisant pour constater une infraction par objet, il n’en demeure pas moins, selon le Tribunal, que la requérante ne remettait pas en cause le fait que la Commission avait constaté à bon droit que l’échange d’informations sur les prix futurs constituait une infraction par objet.

37.      S’agissant du contact du 3 novembre 2003 entre la requérante et Samsung, examiné aux points 177 à 185 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé, d’une part, que la requérante n’avait pas prouvé que les raisons objectives avancées par la Commission pour justifier l’existence de plusieurs versions du courriel de la même date, dont la requérante contestait le caractère authentique, étaient erronées. En tout état de cause, il existerait un faisceau d’indices résultant d’autres preuves selon lesquelles les discussions illicites mentionnées dans ledit courriel s’étaient tenues. Le Tribunal a examiné le courriel d’un employé de Renesas du 7 octobre 2003 et le courriel d’un employé de Samsung du 7 novembre 2003 (points 181 à 183 de l’arrêt attaqué).

38.      D’autre part, en réponse à une argumentation selon laquelle le contact du 3 novembre 2003 ne constituait pas une restriction de la concurrence par objet, le Tribunal a estimé qu’il suffisait de constater que la Commission n’est pas tenue d’établir pour chaque discussion illicite que cette dernière constitue une telle restriction, dès lors qu’elle établit que les pratiques en cause, prises dans leur ensemble, constituent une restriction de la concurrence par objet (point 185 de l’arrêt attaqué).

39.      S’agissant du contact du 1er au 8 juin 2004 entre la requérante et Samsung, le Tribunal a écarté, aux points 192 à 196 de l’arrêt attaqué, les arguments de la requérante. Par référence au considérant 216 de la décision litigieuse, il s’est appuyé sur un document émanant de Samsung pour constater l’existence d’un échange d’informations sensibles.

40.      Aux termes de l’examen des cinq contacts susvisés, le Tribunal a conclu, au point 207 de l’arrêt attaqué, « que la Commission n’a pas commis d’erreur en considérant que la requérante avait participé à des discussions anticoncurrentielles avec Samsung et Renesas entre le 24 septembre 2003 et le 31 mars 2005 ».

41.      En réponse à la quatrième branche soulevée par la requérante à l’appui du troisième moyen et tirée de ce que, compte tenu du caractère indivisible de l’infraction en cause, le Tribunal ne pourrait qu’annuler la décision litigieuse dans son ensemble s’il concluait en particulier que les contacts des 3 et 17 novembre 2003 n’étaient pas anticoncurrentiels, le Tribunal a estimé, au point 211 de l’arrêt attaqué : « comme il a été constaté au point 160 [de l’arrêt attaqué], la requérante n’a pas contesté que la fixation des prix sur le marché en cause était en principe annuelle. Dès lors qu’il a été constaté […] que la Commission n’avait commis aucune erreur en constatant la participation de la requérante à cinq contacts illégaux entre 2003 et 2005, le fait qu’elle ait conclu à tort que les autres contacts qu’elle a retenus, tels que celui du 17 novembre 2003, n’étaient en réalité pas [concurrentiels] ne modifierait pas le constat selon lequel la requérante a participé à une infraction unique et continue pendant ces trois années. Dès lors, contrairement à ce que soutient la requérante lors de l’audience, quand bien même les contacts autres que les cinq susmentionnés ne violeraient pas l’article 101 TFUE, il n’en demeurerait pas moins que la Commission a prouvé à suffisance de droit qu’elle avait participé à l’infraction en cause. »

42.      S’agissant du quatrième moyen soulevé par la requérante à titre subsidiaire et tiré d’une application erronée de la notion d’« infraction unique et continue », le Tribunal a, au point 215 de l’arrêt attaqué, résumé les considérants 285 à 315 de la décision litigieuse. Il a également rappelé, aux points 216 à 223 de cet arrêt, la jurisprudence relative au constat de l’existence d’une telle infraction et à la participation d’une entreprise à une telle infraction.

43.      C’est à la lumière de cette jurisprudence que le Tribunal a, ensuite, examiné les cinq griefs de la requérante. En particulier, d’une part, le Tribunal a écarté, aux points 226 à 232 de l’arrêt attaqué, un grief pris d’une contradiction dans la décision litigieuse. Au terme d’une analyse des motifs et du dispositif de cette décision, il a constaté que, « si, dans son dispositif, la Commission a conclu, sans faire de distinctions entre les quatre destinataires de ladite décision, que tous avaient participé à l’infraction en cause, les motifs de ladite décision indiquent sans ambiguïté que la Commission a considéré que ces entreprises avaient participé à une infraction unique et continue, sans préjudice du fait que la requérante ne pouvait pas, à la différence des trois autres entreprises sanctionnées, être tenue pour responsable de l’infraction en cause dans sa totalité » (point 229 de cet arrêt). Cependant, interprétant le dispositif de la décision litigieuse en tenant compte de ses motifs, le Tribunal a jugé, au point 231 de cet arrêt, « que le dispositif doit être compris en ce sens que [la Commission] n’impute pas à la requérante la responsabilité de l’infraction en cause dans son ensemble, à la différence des autres destinataires de la décision [litigieuse], mais lui impute la responsabilité de cette infraction pour autant qu’elle a entretenu des contacts illicites avec Samsung et Renesas. S’il existe certes une maladresse dans la rédaction du libellé du dispositif de la décision [litigieuse], […] il n’en demeure pas moins que le dispositif de ladite décision n’est pas en contradiction avec ses motifs ».

44.      D’autre part, aux points 236 à 240 de cet arrêt, le Tribunal a également écarté un grief pris d’une violation des principes d’égalité de traitement et de proportionnalité dans le calcul de l’amende. Au point 239 de cet arrêt, il a notamment écarté la contestation de la réduction de 20 % de l’amende que la Commission avait accordée à la requérante au titre de circonstances atténuantes en raison de sa participation limitée à l’infraction en cause, au motif que « la requérante n’avance aucun argument spécifique permettant de considérer qu’une réduction de 20 % du montant de l’amende ne serait pas proportionnée, en l’espèce, au fait qu’elle n’avait participé que partiellement à l’infraction en cause ».

45.      Le calcul de l’amende a encore été examiné par le Tribunal dans le cadre des cinquième et sixième moyens soulevés par la requérante.

46.      Dans le cadre de l’examen, aux points 255 à 259 de l’arrêt attaqué, du cinquième moyen pris d’une erreur de calcul de l’amende en ce que la requérante n’aurait pas participé à des contacts touchant les puces non SIM, le Tribunal a relevé, d’une part, que les prix de ces puces avaient été évoqués lors du contact avec Samsung du 24 septembre 2003 et que les arguments de la requérante ne permettaient pas de remettre cela en cause (points 255 et 256 de cet arrêt). D’autre part, le Tribunal a ajouté, « en toute hypothèse […] que la requérante n’avance aucun argument dans ses écritures visant à s’opposer à l’appréciation de la Commission, figurant au considérant 221 de la décision [litigieuse] et dans ses observations, selon laquelle il existe une corrélation entre les puces SIM et les puces non SIM » (point 257 dudit arrêt) et a rejeté comme inopérant l’argument de la requérante selon lequel ces deux types de puces n’appartenaient pas un même marché de produits (point 258 du même arrêt).

47.      Dans le cadre du sixième moyen, pris d’une violation des lignes directrices pour le calcul des amendes et du principe de proportionnalité, le Tribunal a notamment constaté, au point 270 de l’arrêt attaqué, que l’amende infligée à la requérante ne violait pas le principe de proportionnalité. En substance, le Tribunal a fondé cette conclusion sur le motif, énoncé au point 269 de cet arrêt, que le montant de l’amende infligée à la requérante s’explique au regard de son chiffre d’affaires beaucoup plus important que celui des autres entreprises sanctionnées et n’est que le reflet de l’importance économique de sa propre participation à l’infraction en cause, étant précisé que la partie du chiffre d’affaires global provenant de la vente des produits qui font l’objet de l’infraction en cause est la mieux à même de refléter l’importance économique de cette infraction.

IV.    Les conclusions des parties et la procédure devant la Cour

48.      Par son pourvoi, la requérante demande à la Cour :

–        d’annuler l’arrêt attaqué ;

–        d’annuler la décision litigieuse dans la mesure où elle concerne la requérante ;

–        à titre subsidiaire, de réduire l’amende d’un montant de 82 874 000 euros infligée à la requérante par le considérant 457, sous a), de la décision litigieuse à un montant proportionné ;

–        à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire au Tribunal pour réexamen, et

–        de condamner la Commission aux dépens.

49.      La Commission demande à la Cour :

–        de rejeter le pourvoi ;

–        à titre subsidiaire, de rejeter la demande de réduction de l’amende infligée à la requérante, et

–        de condamner la requérante aux dépens.

V.      Sur le pourvoi

50.      À l’appui de son pourvoi, la requérante soulève trois moyens qui correspondent, en substance, aux« trois questions de droit » formulées au point 2 de sa requête en pourvoi. C’est ainsi que le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 263 TFUE en raison d’un contrôle juridictionnel incomplet et sélectif. C’est dans le cadre de ce moyen que la question particulière de l’authenticité de certaines preuves et des conséquences qui en découlent en termes de charge de la preuve est soulevée. Ce premier moyen est intrinsèquement lié au troisième, lequel est tiré d’erreurs de droit quant au calcul de l’amende infligée à la requérante et d’une méconnaissance de la compétence de pleine juridiction. Enfin, le deuxième moyen vise l’application de l’article 101 TFUE et, plus précisément, des notions de restriction de la concurrence par objet et d’infraction unique et continue.

51.      Les questions de droit que la Cour souhaite voir traitées dans les présentes conclusions sont abordées dans les deux premières branches du premier moyen en lien avec le troisième moyen. En effet, comme cela est indiqué au point 2 des présentes conclusions, elles se rapportent, d’une part, à l’exigence de contrôle juridictionnel effectif, cette question étant liée, en l’espèce, à l’exercice de la compétence de pleine juridiction, et, d’autre part, à la contestation de l’authenticité des éléments de preuve retenus par la Commission.

A.      Sur le contrôle juridictionnel effectif et la compétence de pleine juridiction (première branche du premier moyen en lien avec le troisième moyen)

1.      Argumentation des parties

52.      Par la première branche du premier moyen de son pourvoi, la requérante conteste en particulier les conclusions du point 160 de l’arrêt attaqué, lequel constitue le point de départ d’un contrôle que la requérante estime insuffisant.

53.      En substance, elle reproche au Tribunal de n’avoir examiné que cinq des onze contacts prétendument illégaux constatés par la Commission alors qu’elle les avait tous contestés. Or, l’illégalité des appréciations de la Commission relatives à l’un ou l’autre des contacts contestés aurait dû conduire à l’annulation des conclusions correspondantes de la Commission dans la décision litigieuse.

54.      La requérante estime donc que le contrôle juridictionnel effectué par le Tribunal est, dans les conditions énoncées au point 160 de l’arrêt attaqué, incomplet et sélectif, et qu’il est, par conséquent, contraire à l’article 263 TFUE. Ce contrôle partiel entacherait également l’arrêt attaqué d’un défaut de motivation.

55.      En outre, les contacts examinés seraient insuffisants pour étayer le constat d’une infraction unique et continue dans le chef de la requérante.

56.      Enfin, un tel contrôle sélectif n’aurait pas non plus permis au Tribunal d’apprécier pleinement la gravité de l’infraction alléguée ni de contrôler suffisamment l’amende infligée. Ce dernier argument est repris et développé dans le cadre du troisième moyen du pourvoi relatif aux erreurs de droit que le Tribunal aurait commises dans la détermination du montant de l’amende.

57.      La Commission conteste le bien-fondé de l’ensemble des arguments invoqués par la requérante.

58.      En ce qui concerne de façon plus précise la critique du point 160 de l’arrêt attaqué, la Commission estime que, dès lors que la requérante n’a pas contesté la conclusion selon laquelle les prix des puces pour cartes étaient déterminés, en principe, sur une base annuelle, le Tribunal pouvait se limiter à vérifier que la requérante avait participé à au moins un contact anticoncurrentiel par an pendant la période comprise entre les années 2003 et 2005. En effet, il suffirait que les résultats économiques des contacts anticoncurrentiels poursuivent leurs effets au-delà de la date à laquelle ils ont eu lieu. Dans ces conditions, le Tribunal n’aurait pas été tenu de justifier son choix des cinq contacts qu’il a examinés ni l’absence d’examen de la participation de la requérante aux six autres contacts. La requérante n’aurait aucun intérêt à recevoir des explications à ce titre.

59.      En outre, contrairement à ce que soutient la requérante, l’approche du Tribunal ne l’aurait pas empêché de répondre correctement aux arguments relatifs à la gravité de l’infraction et au montant de l’amende.

2.      Analyse

a)      Sur le caractère bicéphale du contrôle juridictionnel des décisions de la Commission relatives aux procédures d’application des articles 101 TFUE et 102 TFUE

60.      Aux termes du point 160 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé que la requérante ne contestait pas l’appréciation de la Commission selon laquelle les prix étaient déterminés, en principe, sur une base annuelle. Sur la base de ce constat, il a jugé qu’il « suffi[sai]t d’examiner, pour les années 2003 à 2005, si la requérante a[vait] participé à une ou, le cas échéant, à deux discussions anticoncurrentielles, durant chacune de ces trois années, avec Samsung ou Renesas, pour conclure à l’existence ou non d’une infraction à l’article 101 TFUE. Dans ces conditions, le Tribunal [a] estim[é] opportun d’examiner, à titre liminaire, cinq contacts entre la requérante et Samsung ou Renesas [...], [l]es premier et dernier contacts marquant, selon la Commission, respectivement le début et la fin de la participation de la requérante à l’infraction en cause. Ce n’est donc que dans l’hypothèse où ces cinq contacts ne permettraient pas d’établir l’existence de l’infraction en cause que le Tribunal examinera si les autres contacts, tels que celui du 17 novembre 2003, dont la requérante soutient dans ses écritures et lors de l’audience qu’ils n’étaient pas illicites, contribuent ou non à établir l’existence de cette infraction ».

61.      Le Tribunal ayant validé les conclusions tirées par la Commission à propos des cinq contacts qu’il avait choisi de contrôler, il a confirmé la participation de la requérante à l’infraction en cause sans examiner les arguments invoqués à propos des autres contacts.

62.      En effet, au point 211 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé que « la Commission n’a[yan]t commis aucune erreur en constatant la participation de la requérante à cinq contacts illégaux entre 2003 et 2005, le fait qu’elle ait conclu à tort que les autres contacts qu’elle a retenus, tels que celui du 17 novembre 2003, n’étaient en réalité pas [concurrentiels] ne modifierait pas le constat selon lequel la requérante a participé à une infraction unique et continue pendant ces trois années. Dès lors, contrairement à ce que soutient la requérante lors de l’audience, quand bien même les contacts autres que les cinq susmentionnés ne violeraient pas l’article 101 TFUE, il n’en demeurerait pas moins que la Commission a prouvé à suffisance de droit qu’elle avait participé à l’infraction en cause ».

63.      Le point 160 de l’arrêt attaqué constitue donc le cœur de la critique formulée par la requérante. Contrairement au « choix » qu’il a effectué à ce point du jugement attaqué, le Tribunal aurait dû procéder à un contrôle exhaustif de tous les contacts contestés par la requérante.

64.      Le système de contrôle juridictionnel des décisions de la Commission relatives aux procédures d’application des articles 101 TFUE et 102 TFUE comporte deux volets. Il repose, d’une part, sur le contrôle « classique » de légalité des actes des institutions établi à l’article 263 TFUE et il peut être, d’autre part, complété par l’exercice d’une compétence de pleine juridiction, sur la base de l’article 261 TFUE et sur demande des requérants, en ce qui concerne les sanctions infligées en ce domaine par la Commission (7).

b)      Sur l’étendue du contrôle de légalité

65.      En l’espèce, la Commission a constaté dans la décision litigieuse l’existence d’une infraction unique et continue. Une telle infraction peut être définie comme la résultante d’un comportement continu formé de plusieurs actions qui s’inscrivent dans un « plan d’ensemble » en raison d’un objet identique faussant le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun, bien que l’un ou plusieurs des éléments puissent constituer, également, en eux-mêmes et pris isolément, une violation de l’article 101 TFUE. Dans le cadre d’une telle infraction, la Commission est en droit d’imputer la responsabilité de ces actions en fonction de la participation à l’infraction considérée dans son ensemble (8).

66.      Par ailleurs, la Cour a précisé qu’une « entreprise ayant participé à une telle infraction unique et complexe par des comportements qui lui étaient propres, qui relevaient des notions d’accord ou de pratique concertée ayant un objet anticoncurrentiel au sens de l’article [101, paragraphe 1, TFUE] et qui visaient à contribuer à la réalisation de l’infraction dans son ensemble, peut ainsi être également responsable des comportements mis en œuvre par d’autres entreprises dans le cadre de la même infraction pour toute la période de sa participation à ladite infraction » (9).

67.      C’est dans le contexte d’une telle infraction unique et continue que le Tribunal a estimé pouvoir contrôler la légalité de la décision litigieuse en limitant son examen à la vérification de la participation de la requérante « à une ou, le cas échéant, à deux discussions anticoncurrentielles, durant chacune de ces trois années [(c’est-à-dire de l’année 2003 à l’année 2005)] » (10), dont les contacts marquant, selon la Commission, le début et la fin de l’infraction commise par la requérante.

68.      Puisque le Tribunal avait relevé, en prémisse à ce choix, que la requérante ne contestait pas l’appréciation de la Commission selon laquelle les prix étaient déterminés, en principe, sur une base annuelle, je ne vois là aucune dénaturation des caractéristiques de l’infraction en cause.

69.      En effet, le fait qu’une entreprise n’a pas participé à tous les éléments constitutifs d’une entente ou qu’elle a joué un rôle mineur dans les aspects auxquels elle a participé n’est pas pertinent pour établir l’existence d’une infraction dans son chef ; ces éléments seront pris en considération lors de l’appréciation de la gravité de l’infraction et, le cas échéant, de la détermination de l’amende (11). C’est donc sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a pu, au stade du contrôle de légalité, limiter son examen à cinq discussions anticoncurrentielles réparties sur les trois années de la période infractionnelle.

70.      Certes, dans le cadre de la cinquième branche du premier moyen, la requérante conteste la constatation liminaire du Tribunal relative à l’annalité de la détermination des prix (12). Toutefois, l’argument me paraît irrecevable puisque le caractère erroné de l’allégation n’a pas été soulevé devant le Tribunal alors que la Commission fondait expressément la décision litigieuse sur le fait que les prix des puces pour cartes étaient déterminés, en principe, sur une base annuelle (13). Il est, en tout état de cause, non fondé puisque la requérante ne démontre pas de dénaturation à cet égard. En précisant, au point 160 de l’arrêt attaqué, que « les prix étaient déterminés, en principe, sur une base annuelle » (14), le Tribunal n’a certainement pas circonscrit la fixation des prix à une périodicité exclusivement annuelle.

c)      Sur l’étendue du contrôle de pleine juridiction

71.      En revanche, la question de l’étendue du contrôle que devait opérer le Tribunal me semble se poser dans des termes différents dans le cadre du second aspect du système de contrôle juridictionnel des décisions de la Commission relatives aux procédures d’application des articles 101 TFUE et 102 TFUE.

72.      En effet, comme je l’ai rappelé au point 64 des présentes conclusions, le contrôle de légalité fondé sur l’article 263 TFUE peut être complété par l’exercice d’une compétence de pleine juridiction, sur la base de l’article 261 TFUE et sur demande des requérants, en ce qui concerne les sanctions infligées en droit de la concurrence par la Commission (15). 

73.      Or, si la pleine juridiction n’est pas un recours autonome, elle doit néanmoins s’exercer de manière détachée du contrôle de légalité (16). En d’autres termes, ce n’est pas parce que le contrôle de légalité n’a pas révélé d’illégalité qu’un contrôle spécifique ne doit pas être exercé dans le cadre de la compétence de pleine juridiction (17). Comme rappelé au point 69 des présentes conclusions, c’est, notamment, lors de ce deuxième contrôle que le fait qu’une entreprise n’a pas participé à tous les éléments constitutifs d’une entente ou qu’elle a joué un rôle mineur dans les aspects auxquels elle a participé doivent être pris en considération.

74.      En effet, il est désormais fermement établi que c’est « afin de satisfaire aux exigences d’un contrôle de pleine juridiction au sens de l’article 47 de la Charte en ce qui concerne l’amende, [que] le juge de l’Union est tenu, dans l’exercice des compétences prévues aux articles 261 TFUE et 263 TFUE, d’examiner tout grief, de droit ou de fait, visant à démontrer que le montant de l’amende n’est pas en adéquation avec la gravité et la durée de l’infraction » (18).

75.      Cette exigence de contrôle exhaustif s’explique également par les principes d’individualisation et de gradation de la « peine » qui sont, pour reprendre les termes de l’avocat général Tizzano, deux principes cardinaux de tout système de sanctions en matières administrative et pénale (19) et s’inscrivent en filigrane de la jurisprudence de la Cour relative à la détermination du montant des amendes en droit de la concurrence.

76.      En effet, la Cour juge de façon constante que, pour déterminer le montant des amendes, « il y a lieu de tenir compte de la durée [de l’infraction] et de tous les éléments de nature à entrer dans l’appréciation de la gravité [de l’infraction] tels que le comportement de chacune des entreprises, le rôle joué par chacune d’elles dans l’établissement des pratiques concertées, le profit qu’elles ont pu tirer de ces pratiques, leur taille et la valeur des marchandises concernées ainsi que le risque que des infractions de ce type représentent pour les objectifs de [l’Union] » (20).

77.      Il ne saurait d’ailleurs en aller différemment puisque, toujours selon la Cour, « la gravité de l’infraction doit faire l’objet d’une appréciation individuelle » (21).

78.      À mon sens, le Tribunal ne pourrait donc être dispensé d’exercer le deuxième volet du contrôle juridictionnel que lorsque les circonstances invoquées aux fins de la détermination du montant de l’amende sont identiques à celles sur lesquelles se fondent les arguments avancés dans le cadre du contrôle de légalité et à la condition que le Tribunal les aient tous rejetés à cette occasion (22).

79.      Or, en l’espèce, la seconde de ces conditions ne me semble pas avoir été respectée puisque le Tribunal a choisi de ne vérifier dans le cadre du contrôle de légalité que cinq des onze contacts qui étaient contestés de façon détaillée par la requérante.

80.      Certes, dans la partie de sa requête relative à la demande de réduction de l’amende, la requérante se fondait sur les constatations de la Commission selon lesquelles il était avéré qu’elle avait participé à sept contacts sur les quarante et un répertoriés (23). Toutefois, il me semble que cette attitude s’explique par la nature subsidiaire de sa demande. Dès lors que la requérante réclamait, à titre principal, l’annulation de la décision litigieuse en invoquant l’absence de preuve d’un comportement infractionnel dans son chef, sa demande subsidiaire part, implicitement mais logiquement, du principe selon lequel ses arguments principaux n’ont pas été retenus.

81.      Cette méthodologie procédurale ne retire rien au fait que les arguments relatifs au caractère infractionnel des onze contacts identifiés par la Commission dans la décision litigieuse pouvaient, éventuellement, avoir une incidence sur l’appréciation de l’amende infligée s’ils apparaissaient fondés puisque le fait qu’une entreprise a joué un rôle mineur dans les aspects de l’infraction auxquels elle a participé est un élément qui doit être pris en considération lors de l’appréciation de la gravité de l’infraction et, le cas échéant, de la détermination de l’amende (24).

82.      Or, il apparaît que le Tribunal n’a pas répondu à tous les arguments soulevés par la requérante, que ce soit au stade du contrôle de légalité – en vérifiant uniquement la participation de la requérante à cinq discussions anticoncurrentielles alors qu’elle contestait de façon motivée le caractère illicite des onze contacts identifiés par la Commission dans la décision litigieuse – ou lors de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction en affirmant alors que la requérante « se contente [...] de faire valoir qu’elle a joué un rôle mineur dans l’infraction en cause » (25) et que « la raison pour laquelle [elle] se voit infliger l’amende dont le montant est le plus élevé est qu’elle a réalisé un chiffre d’affaires beaucoup plus important que ceux des autres entreprises sanctionnées » (26), le montant de l’amende reflétant l’importance économique de sa participation à l’infraction en cause.

83.      Sans remettre ici en cause la pertinence de cette dernière affirmation et sans pouvoir affirmer que le Tribunal serait arrivé à une autre conclusion s’il avait examiné tous les griefs formulés par la requérante, il apparaît que le Tribunal n’a pas pris en considération, d’une manière juridiquement correcte, tous les facteurs essentiels pour apprécier la gravité du comportement reproché à la requérante et qu’il n’a pas répondu à suffisance de droit à l’ensemble des arguments invoqués par la requérante tendant à la suppression ou à la réduction de l’amende. Or, tel est précisément l’objet du contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (27).

3.      Conclusion sur la première branche du premier moyen en lien avec le troisième moyen

84.      Au terme de mon analyse de la première branche du premier moyen en lien avec le troisième moyen, je considère que le Tribunal a commis une erreur de droit en n’examinant pas chacun des arguments qui avait été exposé par la requérante pour démontrer la légalité des contacts retenus à sa charge par la Commission.

B.      Sur la question de l’authenticité des éléments de preuve

1.      Argumentation des parties

85.      Par la deuxième branche de son premier moyen, la requérante reproche au Tribunal de lui avoir attribué, au point 118 de l’arrêt attaqué, la charge de la preuve du caractère inauthentique d’un courriel interne de Samsung du 3 novembre 2003. À défaut pour la Commission, à qui revient la charge d’établir l’infraction, d’avoir établi l’authenticité de ce courriel conformément au principe de bonne administration et eu égard aux doutes sérieux soulevés par la requérante, cet élément de preuve aurait dû être déclaré irrecevable.

86.      La requérante estime à tout le moins que, compte tenu des observations présentées par elle-même et par Samsung, la Commission était tenue de désigner un expert professionnel indépendant aux fins de l’évaluation de l’authenticité du courriel. Il en irait d’autant plus ainsi dans les procédures en matière d’entente en raison de leur nature pénale.

87.      La Commission conteste la position de la requérante. En cas de contestation de l’authenticité d’un élément de preuve, la crédibilité serait le seul critère pertinent et sa valeur probante serait appréciée à la lumière de toutes les circonstances de l’espèce.

88.      Le devoir de bonne administration ne lui imposerait pas de démontrer l’authenticité d’un élément de preuve, de sorte qu’elle ne serait pas tenue de nommer un expert informatique professionnel indépendant.

89.      En l’occurrence, le Tribunal se serait conformé à ces exigences aux fins d’évaluer la crédibilité du courriel interne à la lumière de toutes les circonstances de l’espèce et en considérant que le courriel interne de Samsung du 3 novembre 2003 pouvait être invoqué en tant qu’élément du faisceau de preuves. La Commission ajoute que, sauf dénaturation des éléments de preuve, les constatations de fait ainsi effectuées par le Tribunal ne sont pas soumises au contrôle de la Cour.

2.      Analyse

a)      Sur la distinction entre l’authenticité d’une preuve et sa crédibilité

90.      Lorsque la Commission a pu établir qu’une entreprise avait participé à des réunions entre entreprises à caractère manifestement anticoncurrentiel, c’est à l’entreprise qu’il incombe de fournir une autre explication du contenu de ces réunions (28).

91.      À cet égard, « il ne suffit pas à l’entreprise concernée d’évoquer la possibilité qu’une circonstance s’est produite qui pourrait affecter la valeur probante [des] éléments de preuve [sur lesquels se fonde la Commission] pour que [celle-ci] supporte la charge de prouver que cette circonstance n’a pas pu affecter [leur valeur] probante. Au contraire, sauf dans les cas où une telle preuve ne pourrait pas être fournie par l’entreprise concernée en raison du comportement de la Commission elle-même, il appartient à l’entreprise concernée d’établir à suffisance de droit, d’une part, l’existence de la circonstance qu’elle invoque et, d’autre part, que cette circonstance met en cause la valeur probante des éléments de preuve sur lesquels se fonde la Commission » (29).

92.      De façon plus générale, le principe qui prévaut en droit de l’Union est celui de la libre administration des preuves. Il découle de ce principe que le seul critère pertinent pour apprécier les preuves produites réside dans leur crédibilité (30).

93.      Pour ce faire, dans le cadre d’appréciations économiques complexes, la Cour a précisé que le juge de l’Union devait notamment vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence (31).

94.      Sans remettre en cause ces paramètres, je considère que la question de l’authenticité d’une preuve se situe nécessairement en amont de l’évaluation de sa crédibilité : une preuve qui n’est pas authentique ne peut être considérée comme crédible quand bien même elle en aurait l’apparence.

95.      Il convient donc de revenir au principe de base qui veut que, en ce compris dans le domaine du droit de la concurrence, en cas de litige sur l’existence d’une infraction, il appartient à la Commission de rapporter la preuve des infractions qu’elle constate et d’établir les éléments de preuve propres à démontrer, à suffisance de droit, l’existence des faits constitutifs d’une infraction (32). S’il subsiste un doute dans l’esprit du juge, il doit alors profiter à l’entreprise destinataire de la décision constatant une infraction (33).

96.      Cela signifie concrètement que, si la Cour constate qu’il subsiste un doute sur le caractère complet d’un document contesté et/ou sur la question de savoir s’il a été obtenu par des moyens légitimes, le document doit être écarté (34). Il s’agit ni plus ni moins d’une question d’admissibilité de la preuve. Or, ce n’est qu’une fois que les éléments de preuve apportés par la Commission sont admissibles que leur appréciation peut s’effectuer au regard de leur crédibilité (35).

b)      Application au cas d’espèce

97.      En l’espèce, la requérante conteste l’authenticité d’un courriel interne à Samsung envoyé par l’un de ses employés le 3 novembre 2003. D’une part, il existe plusieurs versions imprimées de ce courriel et, d’autre part, les deux rapports d’expertise déposés par la requérante ont conclu, en substance, qu’il n’était pas possible d’affirmer son authenticité.

98.      Ces arguments étaient développés de façon détaillée par la requérante aux points 68 à 86 de sa requête en annulation. Premièrement, elle faisait état d’une première version imprimée sans destinataire ni destinataire « en copie » et d’un envoi prétendu à 3 h 27 du matin (heure européenne) alors que l’appel téléphonique du salarié d’Infineon mentionné dans le courriel incriminé aurait eu lieu le même jour. Deuxièmement, elle mettait en avant les différences entre la première version du courriel communiquée et les deux autres versions ultérieures, lesquelles faisaient apparaître, contrairement à la première version, un destinataire et six autres destinataires en copie ainsi que des heures d’envoi différentes. Troisièmement, la requérante invoquait un rapport d’expertise au terme duquel l’expert indépendant consulté estimait que le courriel du 3 novembre 2003 ne pouvait pas être considéré comme authentique au-delà de tout doute raisonnable, ce qui fut confirmé par le même expert dans un second rapport.

99.      Malgré ces éléments, le Tribunal a considéré, aux point 181 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait « pu légitimement conclure que la requérante avait participé à [des] discussions [illicites] » en se fondant, notamment, sur le fait « qu’aucune expertise n’a[vait] conclu que le courriel du 3 novembre 2003 ne constituait pas une preuve contemporaine authentique, ce que la requérante n’établi[ssai]t d’ailleurs pas devant [lui] ». Il ajoutait, au point 182 de l’arrêt attaqué, que la requérante n’avait pas apporté « la preuve que les raisons objectives avancées par la Commission pour justifier qu’il existerait plusieurs versions de ce courriel seraient erronées ».

100. Ce faisant, j’estime que le Tribunal a commis une erreur de droit en ne respectant pas le standard probatoire exigé en matière d’amendes pour infraction au droit de la concurrence. En effet, sans même avoir de considération pour les différences relatives à des éléments essentiels d’un courriel comme les destinataires ou l’heure d’envoi, il ressort des rapports d’expertise, déposés par la requérante, qu’il n’était pas possible d’affirmer de façon certaine l’authenticité du courriel du 3 novembre 2003. Face à ces éléments, le Tribunal aurait dû écarter cette preuve : il appartenait à la Commission d’établir positivement l’authenticité du courriel du 3 novembre 2003 en recourant, le cas échéant, à la mesure d’expertise sollicitée par la requérante.

101. Toutefois, le Tribunal a également estimé que le fait que les discussions illicites mentionnées dans le courriel du 3 novembre 2003 s’étaient tenues résultait également d’autres preuves, l’ensemble constituant un « faisceau d’indices » (36).

102. Or, contrairement à la question de savoir si les règles en matière de charge et d’administration de la preuve ont été respectées, la Cour n’est pas compétente pour constater les faits ni, en principe, pour examiner les preuves que le Tribunal a retenues à l’appui de ces faits. En effet, dès lors que ces preuves ont été obtenues régulièrement, que les principes généraux du droit et les règles de procédure applicables en matière de charge et d’administration de la preuve ont été respectés, il appartient au seul Tribunal d’apprécier la valeur qu’il convient d’attribuer aux éléments qui lui ont été soumis. Cette appréciation ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant le Tribunal, une question de droit soumise au contrôle de la Cour (37).

103. Par conséquent, même si les éléments retenus par le Tribunal sont sujets à discussion, il s’agit d’appréciations factuelles qui échappent au pouvoir de contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi. Le Tribunal ayant constaté que d’autres documents confirment la tenue de discussions illicites entre les concurrents impliqués dans l’infraction en cause, l’argument relatif à l’authenticité du courriel du 3 novembre 2003 se révèle, en tout état de cause, inopérant.

VI.    Sur le renvoi de l’affaire au Tribunal

104. Au terme de mon analyse de la première branche du premier moyen en lien avec le troisième moyen, je suis arrivé à la conclusion que le Tribunal avait commis une erreur de droit en n’examinant pas chacun des arguments qui avait été exposé par la requérante pour démontrer la légalité des contacts retenus à sa charge par la Commission.

105. Conformément à l’article 61 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lorsque le pourvoi est fondé, la Cour annule la décision du Tribunal. Elle peut, alors, soit statuer elle-même définitivement sur le litige lorsque celui-ci est en état d’être jugé, soit renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue.

106. En l’occurrence, je considère que le litige n’est pas en état d’être jugé. En effet, l’examen du bien-fondé des arguments de la requérante conduirait la Cour à statuer sur des questions de fait sur la base d’éléments qui n’ont pas été appréciés par le Tribunal dans l’arrêt attaqué. En outre, les allégations factuelles quant au fond du litige n’ont pas été débattues devant la Cour.

107. Il y a donc lieu de renvoyer l’affaire au Tribunal et de réserver les dépens.

VII. Conclusion

108. Eu égard aux considérations qui précèdent et sans préjudice de l’examen des autres moyens, je propose à la Cour :

–        d’annuler l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 15 décembre 2016, Infineon Technologies/Commission (T‑758/14, non publié, EU:T:2016:737), en ce que le Tribunal n’a pas examiné chacun des arguments qui avait été exposé par la requérante pour démontrer la légalité des contacts retenus à sa charge par la Commission, et

–        de renvoyer l’affaire au Tribunal et de réserver les dépens.


1      Langue originale : le français.


2      JO 2003, L 1, p. 1.


3      JO 2006, C 210, p. 2.


4      JO 2006, C 298, p. 17.


5      JO 2004, L 123, p. 18.


6      Il ressort de la décision litigieuse que NXP a repris les activités de Philips à compter de sa création le 29 septembre 2006. La Commission a considéré que NXP n’avait pas participé à l’infraction en cause.


7      Voir, en ce sens, arrêts du 10 juillet 2014, Telefónica et Telefónica de España/CommissionTelefónica et Telefónica de España/CommissionTelefónica et Telefónica de España/CommissionTelefónica et Telefónica de España/Commission (C‑295/12 P, EU:C:2014:2062, point 42) ; du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./CommissionGalp Energía España e.a./CommissionGalp Energía España e.a./CommissionGalp Energía España e.a./CommissionGalp Energía España e.a./CommissionGalp Energía España e.a./Commission (C‑603/13 P, EU:C:2016:38, point 71), ainsi que du 26 janvier 2017, Aloys F. Dornbracht/CommissionAloys F. Dornbracht/CommissionAloys F. Dornbracht/CommissionAloys F. Dornbracht/Commission (C‑604/13 P, EU:C:2017:45, point 52).


8      Voir, en ce sens, arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./CommissionAalborg Portland e.a./CommissionAalborg Portland e.a./Commission (C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 258) ; du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen CoppensCommission/Verhuizingen CoppensCommission/Verhuizingen Coppens (C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 41), ainsi que du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./CommissionTeam Relocations e.a./CommissionTeam Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, non publié, EU:C:2013:464, point 49).


9      Arrêts du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen CoppensCommission/Verhuizingen CoppensCommission/Verhuizingen Coppens (C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 42), et du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./CommissionTeam Relocations e.a./CommissionTeam Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, non publié, EU:C:2013:464, point 50).


10      Point 160 de l’arrêt attaqué.


11      Voir, en ce sens, arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./CommissionAalborg Portland e.a./CommissionAalborg Portland e.a./Commission (C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 86), et du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen CoppensCommission/Verhuizingen CoppensCommission/Verhuizingen Coppens (C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 45).


12      Voir points 57 et 58 du pourvoi.


13      Voir, dans la description des faits, points 38 à 41 de la décision litigieuse ; dans la description des événements (principes de base de l’organisation du cartel), points 68, 76 et 77 de la décision litigieuse ; dans l’application de l’article 101 TFUE au cas d’espèce, points 246 et 297 de la décision litigieuse. Sur l’irrecevabilité d’un moyen nouveau, voir, arrêt du 12 mai 2016, Bank of Industry and Mine/ConseilBank of Industry and Mine/ConseilBank of Industry and Mine/Conseil (C‑358/15 P, non publié, EU:C:2016:338, point 91).


14      C’est moi qui souligne.


15      Une telle demande ne me semble pas discutable en l’espèce. En effet, en demandant au Tribunal d’annuler ou de diminuer l’amende qui lui était infligée, la requérante a incontestablement demandé au Tribunal d’exercer sa compétence de pleine juridiction (voir, notamment, points 189 et 192 de sa requête en annulation). Voir, en ce sens, arrêt du 27 avril 2017, FSL e.a./CommissionFSL e.a./CommissionFSL e.a./Commission (C‑469/15 P, EU:C:2017:308, point 72), ainsi que conclusions de l’avocat général Sharpston dans l’affaire KME Germany e.a./CommissionKME Germany e.a./CommissionKME Germany e.a./Commission (C‑272/09 P, EU:C:2011:63, point 78).


16      Voir, en ce sens, Muguet-Poullennec, G., « Sanctions prévues par le règlement n° 1/2003 et droit à une protection juridictionnelle effective : les leçons des arrêts KME et Chalkor de la CJUE », Revue Lamy de la concurrence : droit, économie, régulation, 2012, n° 32, p. 57 à 78.


17      Voir, en ce sens, Van Cleynenbreugel, P., « Constitutionalizing Comprehensively Tailored Judicial Review in EU Competition Law », The Columbia Journal of European Law, 2012, p. 519 à 545, spéc. p. 535 et 536 ; Forrester, I. S., « A challenge for Europe’s judges : the review of fines in competition cases », European Law Review, 2011, vol. 36, n° 2, p. 185 à 207, spéc. p. 195.


18      Arrêt du 10 juillet 2014, Telefónica et Telefónica de España/CommissionTelefónica et Telefónica de España/CommissionTelefónica et Telefónica de España/CommissionTelefónica et Telefónica de España/Commission (C‑295/12 P, EU:C:2014:2062, point 200 ; c’est moi qui souligne). Voir, également, en ce sens, arrêt du 27 avril 2017, FSL e.a./CommissionFSL e.a./CommissionFSL e.a./Commission (C‑469/15 P, EU:C:2017:308, point 75). La doctrine n’a pas manqué de souligner que la nécessité de procéder à un examen approfondi et exhaustif de l’ensemble des faits contestés était une exigence qui découlait de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et intégrait, de ce fait, le droit fondamental à une protection juridictionnelle effective (voir, en ce sens, Wesseling, R., et van der Woude, M., « The Lawfulness and Acceptability of Enforcement of European Cartel Law », World Competition, 35, 2012/4, p. 573 à 598, spéc. p. 582). Sur les exigences du droit à la protection juridictionnelle effective en droit de la concurrence, voir, également, Van Cleynenbreugel, P., « Constitutionalizing Comprehensively Tailored Judicial Review in EU Competition Law », The Columbia Journal of European Law, 2012, p. 519 à 545, spéc. p. 5 ; Bellis, J.-Fr., « La charge de la preuve en matière de concurrence devant les juridictions de l’Union européenne », dans Mahieu, St. (dir.), Contentieux de l’Union européenne. Questions choisies, Bruxelles, Larcier, coll. Europe(s), 2014, p. 217 à 233, spéc. p. 217 et 218).


19      Voir conclusions de l’avocat général Tizzano dans l’affaire Dansk Rørindustri e.a./CommissionDansk Rørindustri e.a./CommissionDansk Rørindustri e.a./CommissionDansk Rørindustri e.a./CommissionDansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, EU:C:2004:415, point 130).


20      Arrêt du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./CommissionMusique Diffusion française e.a./CommissionMusique Diffusion française e.a./Commission (100/80 à 103/80, EU:C:1983:158, point 129 ; c’est moi qui souligne). Voir, plus récemment, arrêt du 8 décembre 2011, Chalkor/CommissionChalkor/Commission (C‑386/10 P, EU:C:2011:815, point 56).


21      Arrêt du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./CommissionTeam Relocations e.a./CommissionTeam Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, non publié, EU:C:2013:464, point 102).


22      Voir, en ce sens, arrêt du 26 janvier 2017, Aloys F. Dornbracht/CommissionAloys F. Dornbracht/CommissionAloys F. Dornbracht/CommissionAloys F. Dornbracht/Commission (C‑604/13 P, EU:C:2017:45, points 55 et 56).


23      Voir points 167 et 191 de la requête en annulation.


24      Voir, en ce sens, arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./CommissionAalborg Portland e.a./CommissionAalborg Portland e.a./Commission (C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 86), et du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen CoppensCommission/Verhuizingen CoppensCommission/Verhuizingen Coppens (C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 45). La gravité relative de la participation d’une entreprise à une infraction peut, notamment, être prise en compte lors de l’appréciation des circonstances atténuantes (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./CommissionTeam Relocations e.a./CommissionTeam Relocations e.a./Commission, C‑444/11 P, non publié, EU:C:2013:464, points 104 et 106).


25      Point 263 de l’arrêt attaqué.


26      Point 269 de l’arrêt attaqué.


27      Voir, en ce sens, arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./CommissionDansk Rørindustri e.a./CommissionDansk Rørindustri e.a./CommissionDansk Rørindustri e.a./CommissionDansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 244).


28      Voir, en ce sens, arrêt du 22 novembre 2012, E.ON Energie/Commission (C‑89/11 P, EU:C:2012:738, point 75).


29      Voir, en ce sens, arrêt du 22 novembre 2012, E.ON Energie/Commission (C‑89/11 P, EU:C:2012:738, point 76).


30      Voir, en ce sens, arrêts du 19 décembre 2013, Siemens e.a./CommissionSiemens e.a./CommissionSiemens e.a./Commission (C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866, point 128), et du 27 avril 2017, FSL e.a./CommissionFSL e.a./CommissionFSL e.a./Commission (C‑469/15 P, EU:C:2017:308, point 38).


31      Voir, en ce sens, arrêt du 8 décembre 2011, Chalkor/CommissionChalkor/Commission (C‑386/10 P, EU:C:2011:815, point 54).


32      Voir, en ce sens, arrêt du 22 novembre 2012, E.ON Energie/Commission (C‑89/11 P, EU:C:2012:738, point 71).


33      Voir, en ce sens, arrêt du 22 novembre 2012, E.ON Energie/Commission (C‑89/11 P, EU:C:2012:738, points 72 et 73).


34      Voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 1981, Ludwigshafener Walzmühle Erling e.a./Conseil et CommissionLudwigshafener Walzmühle Erling e.a./Conseil et CommissionLudwigshafener Walzmühle Erling e.a./Conseil et CommissionLudwigshafener Walzmühle Erling e.a./Conseil et CommissionLudwigshafener Walzmühle Erling e.a./Conseil et CommissionLudwigshafener Walzmühle Erling e.a./Conseil et CommissionLudwigshafener Walzmühle Erling e.a./Conseil et CommissionLudwigshafener Walzmühle Erling e.a./Conseil et Commission (197/80 à 200/80, 243/80, 245/80 et 247/80, EU:C:1981:311, point 16).


35      Voir, en ce sens, Bellis, J.-Fr., « La charge de la preuve en matière de concurrence devant les juridictions de l’Union européenne », dans Mahieu, St. (dir.), Contentieux de l’Union européenne. Questions choisies, Bruxelles, Larcier, coll. Europe(s), 2014, p. 217 à 233, spéc. p. 221. J’ajoute que, si la Cour n’a jamais reconnu expressément le caractère pénal des amendes sanctionnant les infractions au droit de la concurrence, la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après la « Cour EDH ») a jugé qu’une amende infligée pour sanctionner une infraction au droit de la concurrence « a[vait] un caractère pénal, de sorte que l’article 6 § 1 [de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales] trouv[ait] à s’appliquer, en l’occurrence, sous son volet pénal » (Cour EDH, arrêt du 27 septembre 2011, A. Menarini Diagnostics/Italie, requête nº 43509/08, CE:ECHR:2011:0927JUD004350908, point 44). Malgré le fait que la Cour EDH limite son examen au cas d’espèce soumis à son appréciation, les fondements de sa motivation autorisent une généralisation de la conclusion à laquelle elle aboutit.


36      Point 181 de l’arrêt attaqué. Voir, également, point 183 de l’arrêt attaqué.


37      Voir, en ce sens, arrêts du 25 janvier 2007, Sumitomo Metal Industries et Nippon Steel/CommissionSumitomo Metal Industries et Nippon Steel/CommissionSumitomo Metal Industries et Nippon Steel/CommissionSumitomo Metal Industries et Nippon Steel/CommissionSumitomo Metal Industries et Nippon Steel/Commission (C‑403/04 P et C‑405/04 P, EU:C:2007:52, points 38 et 56), ainsi que du 19 décembre 2013, Siemens e.a./CommissionSiemens e.a./CommissionSiemens e.a./Commission (C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866, points 39, 76, 77 et 129).