Language of document : ECLI:EU:F:2011:160

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)

28 septembre 2011 (*)

« Fonction publique – Promotion – Exercice de promotion 2009 – Examen comparatif des mérites – Erreur manifeste d’appréciation »

Dans l’affaire F‑9/10,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

AC, fonctionnaire du Conseil de l’Union européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Mes S. Rodrigues et C. Bernard-Glanz, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. M. Bauer et Mme K. Zieleśkiewicz, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre),

composé de MM. P. Mahoney (rapporteur), président, H. Kreppel et S. Van Raepenbusch, juges,

greffier : M. J. Tomac, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 19 octobre 2010,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 29 janvier 2010 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 4 février suivant), le requérant demande, en substance, l’annulation de la décision du Conseil de l’Union européenne de ne pas l’inscrire sur la liste des fonctionnaires promus au grade AD 13 au titre de l’exercice de promotion 2009.

 Cadre juridique

2        Aux termes de l’article 11 bis du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») :

« 1. Dans l’exercice de ses fonctions, le fonctionnaire ne traite aucune affaire dans laquelle il a, directement ou indirectement, un intérêt personnel, notamment familial ou financier, de nature à compromettre son indépendance, sous réserve du paragraphe 2.

2. Le fonctionnaire auquel échoit, dans l’exercice de ses fonctions, le traitement d’une affaire telle que visée au paragraphe 1 en avise immédiatement l’autorité investie du pouvoir de nomination. Celle-ci prend les mesures qui s’imposent et peut notamment décharger le fonctionnaire de ses responsabilités dans cette affaire.

[…] »

3        L’article 45, paragraphe 1, du statut dispose :

« La promotion est attribuée par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination en considération de l’article 6, paragraphe 2, [du statut]. Elle entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur du groupe de fonctions auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d’un minimum de deux ans d’ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. Aux fins de l’examen comparatif des mérites, l’autorité investie du pouvoir de nomination prend en considération, en particulier, les rapports dont les fonctionnaires ont fait l’objet, l’utilisation dans l’exercice de leurs fonctions des langues autres que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie conformément à l’article 28, [sous] f), et, le cas échéant, le niveau des responsabilités exercées. »

 Faits à l’origine du litige

4        Le requérant est entré au service du Conseil le 1er octobre 1991 en tant que fonctionnaire de grade A 7. Il a été promu, en dernier lieu, le 1er mars 2002 au grade A 4, lequel est devenu, à la suite de la modification du statut entrée en vigueur le 1er mai 2004, le grade AD 12.

5        Le requérant occupe le 5e échelon du grade AD 12.

6        Dans le cadre de l’exercice de promotion 2009, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a fait état, par communication au personnel no 94/09 du 27 avril 2009, de sa décision de faire suite à la proposition de la commission consultative de promotion pour le groupe de fonctions des administrateurs (AD) et de promouvoir 19 fonctionnaires au grade AD 13. Le requérant ne figurait pas sur la liste des fonctionnaires promus.

7        Par réclamation du 23 juillet 2009, le requérant a contesté la décision établissant cette liste dans la mesure où son nom n’y figurait pas.

8        Par décision du 12 octobre 2009 l’AIPN a rejeté la réclamation du requérant (ci-après le « rejet de la réclamation »).

 Conclusions des parties

9        Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de l’AIPN de ne pas l’inscrire sur la liste des fonctionnaires promus au grade AD 13 au titre de l’exercice de promotion 2009 ;

–        annuler, en tant que de besoin, le rejet de la réclamation ;

–        condamner le Conseil à lui verser la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

10      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 Sur les conclusions aux fins d’annulation

11      Le requérant soulève, en premier lieu, le moyen tiré de la violation de l’article 45, paragraphe 1, du statut, en ce que l’administration n’aurait pas procédé à un examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables, en deuxième lieu, le moyen tiré de la violation de l’article 45, paragraphe 1, du statut, en ce que l’administration aurait commis une erreur manifeste d’appréciation, en troisième lieu, le moyen tiré de la violation de l’article 45, paragraphe 1, du statut, en ce que l’administration n’aurait pas pris en compte son ancienneté tant dans le grade que dans le service, en quatrième lieu, le moyen tiré du détournement de pouvoir et du détournement de procédure et, en cinquième lieu, le moyen tiré de la violation du droit à recevoir une réponse rédigée dans la langue utilisée pour la réclamation.

 Sur la violation de l’article 45, paragraphe 1, du statut, en ce que l’administration n’aurait pas procédé à un examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables

 Arguments des parties

12      Le requérant soutient que l’administration n’établit pas qu’elle a procédé, lors de l’exercice de promotion 2009, à un examen véritablement comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables, ainsi que le prévoient les dispositions de l’article 45, paragraphe 1, du statut.

13      Le Conseil soutient que le moyen doit être écarté.

 Appréciation du Tribunal

14      À titre liminaire, il convient de rappeler que le large pouvoir d’appréciation dont dispose l’administration aux fins de l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables est limité par la nécessité de procéder à cet examen avec soin et impartialité, dans l’intérêt du service et conformément au principe d’égalité de traitement. En pratique, cet examen doit être conduit sur une base égalitaire et à partir de sources d’informations et de renseignements comparables (arrêt du Tribunal de première instance du 15 septembre 2005, Casini/Commission, T‑132/03, point 53).

15      Le Conseil a précisé dans ses écrits les modalités selon lesquelles il applique les dispositions de l’article 45 du statut. Ainsi, la méthode qu’il pratique pour l’examen des mérites des fonctionnaires promouvables « se caractérise par un lien beaucoup moins ‘mathématique’ entre la notation et la promotion que celle d’autres institutions », et le choix qu’il opère entre les différents fonctionnaires promouvables est « basé sur une évaluation globale des mérites des candidats » ; par suite « une certaine marge d’appréciation [est laissée] aux commissions consultatives de promotion qui, sous la responsabilité de l’AIPN, doivent mettre en balance tous les éléments du dossier de manière raisonnable ».

16      Or, compte tenu de la liberté de choix dont jouit une institution pour mettre en œuvre, conformément à ses propres besoins d’organisation et de gestion de son personnel, les objectifs de l’article 45 du statut, il n’existe pas d’obligation, pour cette institution, d’adopter un système particulier d’évaluation et de promotion (arrêt du Tribunal de première instance du 14 février 2007, Simões Dos Santos/OHMI, T‑435/04, point 132).

17      Par suite, il ne peut être déduit du simple fait que l’appréciation comparative des mérites a été réalisée, ainsi que l’indique le Conseil dans le rejet de la réclamation, sur la base d’un système « beaucoup moins ‘mathématique’ » que celui appliqué dans d’autres institutions de l’Union, qu’un tel système doive être considéré comme étant arbitraire ou contraire aux exigences de l’article 45 du statut.

18      Par ailleurs, il n’est pas contesté par le requérant que la commission consultative de promotion pour le groupe de fonctions AD – dont la proposition a été suivie par l’AIPN – avait à sa disposition un grand nombre de documents relatifs à chaque fonctionnaire promouvable. Il s’agissait, notamment, des rapports de notation depuis l’entrée dans le grade, de l’historique de carrière et des relevés de congé pour raison de maladie ou d’accident. Étaient également à la disposition de la commission consultative des statistiques concernant les rapports de notation relatif à l’exercice de notation 2006/2007.

19      En conséquence, eu égard à ces éléments et à leur caractère suffisamment pertinent et exhaustif, il n’est pas établi, contrairement à ce que soutient le requérant, que le Conseil ne s’expliquerait pas sur les sources d’informations et de renseignements comparables à partir desquelles il a procédé à l’examen des mérites des fonctionnaires promouvables.

20      Le moyen tiré de ce que l’administration n’aurait pas procédé à un examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables, tel qu’exigé par l’article 45, paragraphe 1, du statut, doit donc être écarté.

 Sur la violation de l’article 45, paragraphe 1, du statut, en ce que l’administration aurait commis une erreur manifeste d’appréciation

21      Aux fins de l’examen du moyen susmentionné, le Tribunal, après avoir indiqué quelle marge d’appréciation est reconnue à l’administration en la matière et précisé les motifs de la décision de ne pas promouvoir le requérant, examinera les différents arguments invoqués par ce dernier.

 Marge d’appréciation de l’administration

22      Il convient de rappeler, en premier lieu, qu’aux fins de l’examen comparatif des mérites à prendre en considération dans le cadre d’une décision de promotion prévue à l’article 45 du statut, l’AIPN dispose d’un large pouvoir d’appréciation et que, dans ce domaine, le contrôle du juge doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux voies et moyens qui ont pu conduire l’administration à son appréciation, celle-ci s’est tenue dans des limites non critiquables et n’a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée. Le Tribunal ne saurait donc substituer son appréciation des qualifications et mérites des fonctionnaires à celle de l’AIPN (arrêt Casini/Commission, précité, point 52).

23      À cet égard, pour préserver l’effet utile de la marge d’appréciation que le législateur a entendu confier à l’AIPN en matière de promotion, le juge ne peut annuler une décision pour le seul motif qu’il se considère en présence de faits suscitant des doutes plausibles quant à l’appréciation portée par l’AIPN, voire établissant l’existence d’une erreur d’appréciation. Une annulation pour erreur manifeste d’appréciation n’est possible que s’il ressort des pièces du dossier que l’AIPN a outrepassé les limites encadrant ladite marge d’appréciation.

24      Il n’appartient donc pas au Tribunal de procéder à un réexamen détaillé de tous les dossiers des candidats promouvables afin de s’assurer qu’il partage la conclusion à laquelle est parvenue l’AIPN, car, s’il entreprenait un tel exercice, il sortirait du cadre du contrôle de légalité qui est le sien, substituant ainsi sa propre appréciation des mérites des candidats promouvables à celle de l’AIPN.

25      En deuxième lieu, l’article 45, paragraphe 1, du statut laisse aux institutions une certaine liberté quant aux éléments factuels à prendre en compte pour procéder à l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables, car, sur ce point, il ne dresse pas une liste exhaustive. En effet, en prévoyant que l’AIPN « prend en considération, en particulier, les rapports dont les fonctionnaires ont fait l’objet, l’utilisation dans l’exercice de leurs fonctions des langues autres que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie […], et, le cas échéant, le niveau des responsabilités exercées », l’article 45, paragraphe 1, du statut précise, par l’emploi de l’expression « en particulier », quels sont les trois éléments factuels principaux qui doivent obligatoirement être pris en considération dans l’examen comparatif des mérites. Il n’exclut pas pour autant la prise en compte d’autres éléments factuels susceptibles également de donner une indication des mérites des fonctionnaires promouvables. Cette conclusion n’est pas remise en cause par le fait que, en matière de promotion, l’AIPN ne peut, qu’à titre subsidiaire – en cas d’égalité de mérites entre les fonctionnaires promouvables au regard en particulier des trois éléments visés expressément à l’article 45, paragraphe 1, du statut – prendre en considération l’âge des candidats et leur ancienneté dans le grade ou le service (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 5 mai 2010, Bouillez e.a./Commission, F‑53/08, point 50). En effet, ni l’âge ni l’ancienneté ne sont par eux-mêmes susceptibles de donner une indication sur les mérites des candidats à la promotion. C’est donc pour cette raison qu’ils ne peuvent être pris en compte que pour départager des candidats de mérites équivalents.

26      De plus, ainsi qu’il a été dit plus haut (voir points 15 à 17 du présent arrêt), la comparaison des mérites est réalisée au sein du Conseil sur la base d’une méthode « beaucoup moins ‘mathématique’ » que celle appliquée dans d’autres institutions de l’Union, le choix opéré entre les différents fonctionnaires promouvables étant « basé sur une évaluation globale des mérites des candidats ». Le Conseil n’a donc pas entendu restreindre – ce qu’il aurait pu faire par la voie de mesures d’application de l’article 45 du statut – l’importante marge d’appréciation dont il dispose dans le choix des fonctionnaires à promouvoir.

27      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’examiner si la décision de ne pas promouvoir le requérant est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

28      Afin d’être en mesure de procéder à un tel examen, il convient de préciser sur la base de quels motifs l’administration a décidé de ne pas promouvoir le requérant.

 Motifs sur le fondement desquels l’administration a décidé de ne pas promouvoir le requérant

29      II est de jurisprudence constante que l’AIPN n’est pas tenue de motiver les décisions de promotion à l’égard des candidats évincés et il en va de même en ce qui concerne les décisions de l’AIPN de ne pas retenir une candidature. Néanmoins, l’AIPN doit motiver sa décision portant rejet d’une réclamation déposée, en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, par un candidat non promu, la motivation de cette décision de rejet étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation était dirigée (arrêt du Tribunal de première instance du 29 mai 1997, Contargyris/Conseil, T‑6/96, point 147).

30      Ainsi, lorsque le litige porte sur la contestation d’une décision de non-promotion, les motifs d’une telle décision sont révélés par le rejet de la réclamation.

31      Il convient donc, en l’espèce, de reprendre les motifs exposés dans le rejet de la réclamation.

32      En premier lieu, il apparaît que la commission consultative de promotion a examiné les appréciations analytiques des fonctionnaires promouvables et il est précisé que la sévérité des différents notateurs a été prise en compte.

33      En deuxième lieu, il est indiqué que la commission consultative de promotion a complété son examen sur la base des appréciations d’ordre général, pour lesquelles ont été pris en compte le « style et […] l’approche générale » de chaque notateur. Il est également précisé sur ce point que « les appréciations générales de tous les promus au grade AD 13 sont particulièrement élogieuses ».

34      En troisième lieu, il est mentionné, d’une part, qu’il « ressort des rapports de notation des 19 fonctionnaires promus que ceux-ci maîtrisent parfaitement l’anglais et le français, qu[i] sont les langues de travail utilisées par le [secrétariat général du Conseil] et qu’ils utilisent couramment dans leur travail de tous les jours » et, d’autre part, que « [t]ous les fonctionnaires promus au grade AD 13 qui ont l’anglais ou le français comme langue maternelle maîtrisent au moins une troisième langue ».

35      En quatrième lieu, il est indiqué que « le niveau des responsabilités de chaque fonctionnaire promouvable a été examiné et évalué par la commission consultative de promotion ».

36      Il ressort en dernier lieu des explications données par l’AIPN que d’autres éléments ont été pris en compte pour compléter l’évaluation des mérites des fonctionnaires, notamment, « l’engagement et la polyvalence ».

37      Sur la base de ces différents éléments, l’AIPN concluait qu’il « ressort[ait] d’un examen comparatif des appréciations analytiques et d’ordre général des rapports de notation, des connaissances linguistiques et des niveaux de responsabilité que les mérites des 19 fonctionnaires proposés pour la promotion [avaient pu] être considérés comme supérieurs [à ceux du requérant] ».

38      Par ailleurs, l’AIPN écartait certains arguments avancés par le requérant dans sa réclamation et rappelait les dispositions applicables en matière de promotion, ainsi que la jurisprudence rendue en ce domaine.

39      Les motifs sur le fondement desquels le Conseil a décidé de ne pas promouvoir le requérant ayant été précisés, il convient d’en examiner la régularité au regard de l’argumentation du requérant, lequel soutient, dans le cadre du moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation, d’une part, que ses mérites n’ont pas été suffisamment pris en compte et, d’autre part, que les mérites de certains des fonctionnaires promus n’auraient pas été supérieurs aux siens.

 Sur l’argument tiré de l’insuffisante prise en compte des mérites du requérant

40      Le requérant soutient que l’administration n’a pas suffisamment pris en compte ses mérites, tels qu’ils ressortent des appréciations analytiques et générales dans ses rapports de notations, des compétences linguistiques qu’il a utilisées et du niveau des responsabilités exercées et qu’elle a donc commis une erreur manifeste d’appréciation en ne le promouvant pas.

41      Il appartient donc au Tribunal de s’assurer que l’AIPN n’a pas outrepassé les limites de son pouvoir d’appréciation en estimant que les mérites des 19 fonctionnaires promus au grade AD 13 lors de l’exercice de promotion 2009 étaient supérieurs à ceux du requérant.

42      Le requérant a produit plusieurs rapports de notation concernant des périodes antérieures à l’exercice de promotion 2009, notamment le rapport de notation pour la période comprise entre le 1er janvier 2005 et le 30 juin 2006 et le rapport de notation pour la période comprise entre le 1er juillet 2006 et le 31 décembre 2007.

43      De plus, suite à une mesure d’organisation de la procédure diligentée par le Tribunal, le Conseil a communiqué un ensemble d’éléments contenus dans les deux derniers rapports de notation de chacun des 19 fonctionnaires promus au grade AD 13 lors de l’exercice de promotion 2009. Il s’agit des appréciations analytiques, des appréciations générales – pour le moins, du premier notateur –, des informations relatives aux compétences linguistiques ainsi que de la description détaillée des tâches accomplies au cours de la période de référence.

44      En premier lieu, s’agissant de l’insuffisante prise en compte des mérites du requérant tels qu’ils ressortent des appréciations analytiques, il convient de préciser que lesdites appréciations se divisent en treize rubriques qui doivent être cotées avec les mentions « excellent », « très bon », « bon », « passable » et « laisse à désirer ».

45      Dans la communication au personnel no 54/09 du 10 mars 2009 présentant les statistiques générales concernant les rapports de notation pour la période allant du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2007 (ci-après la « période 2006/2007 »), il était précisé qu’à la mention « excellent » correspondait la cote « 1 », qu’à la mention « très bon » correspondait la cote « 2 », qu’à la mention « bon » correspondait la cote « 3 », qu’à la mention « passable » correspondait la cote « 4 » et qu’à la mention « laisse à désirer » correspondait la cote « 5 ».

46      La cote moyenne obtenue par le requérant pour la période 2006/2007 était de 2. Par ailleurs, la cote moyenne obtenue par le requérant pour la période allant du 1er janvier 2005 au 30 juin 2006 (ci-après la « période 2005/2006 ») était de 2,15.

47      Or, il ressort du tableau synoptique transmis par le Conseil et reprenant les informations découlant des rapports de notation des 19 fonctionnaires promus au grade AD 13 lors de l’exercice de promotion 2009 que huit des fonctionnaires promus ont obtenu une cote moyenne moins bonne que celle du requérant s’agissant du rapport de notation pour la période 2006/2007.

48      Cependant, l’écart entre la cote moyenne du requérant et les cotes moyennes respectives des fonctionnaires en cause n’est sensible que pour un seul fonctionnaire, M, lequel a obtenu une cote moyenne de 2,61. Mais il s’agit d’un fonctionnaire ayant changé de poste et de direction à compter du 1er octobre 2006, c’est-à-dire au cours de l’exercice de notation en cause, élément devant être pris en compte pour relativiser la « faiblesse » de sa cote moyenne.

49      Par ailleurs, il ressort du même tableau synoptique que quatre des fonctionnaires promus ont obtenu une cote moyenne moins bonne que celle du requérant s’agissant du rapport de notation pour la période 2005/2006.

50      Cependant, l’écart entre la cote moyenne du requérant et les cotes moyennes respectives des fonctionnaires en cause n’est sensible pour aucun fonctionnaire, puisque l’écart maximal observé n’est que de 0,23.

51      Sur la base de ce seul critère « mathématique », il n’apparaît donc pas de manière manifeste que les mérites des 19 fonctionnaires promus au grade AD 13 lors de l’exercice de promotion 2009 n’auraient pas été supérieurs à ceux du requérant, au point que l’AIPN puisse être regardée comme ayant outrepassé les limites de son pouvoir d’appréciation.

52      S’agissant en deuxième lieu de l’insuffisante prise en compte des mérites du requérant tels qu’ils ressortent des appréciations d’ordre général, les appréciations qui figurent dans les rapports de notation produits par le requérant sont particulièrement élogieuses.

53      Par exemple, dans le rapport de notation pour la période 2006/2007, il est indiqué :

« Au cours de la période couverte par le présent rapport, [le requérant] a confirmé les qualités qui font de lui un élément très solide et fiable du [s]ecrétariat général du Conseil. Sa profonde connaissance du droit de l’Union européenne, couplée à sa rigueur ainsi qu’à sa capacité de travail et de recherche d[e] solutions juridiquement et politiquement correctes, lui ont valu l’appréciation renouvelée des délégations, qui ont montré à plusieurs reprises leur reconnaissance pour la bonne entente qu’il réussi[t] à créer. Sa capacité d’organisation et son sens de l’initiative, réussissant à créer des protocoles et des procédures très efficaces pour les buts à atteindre, se sont encore révélés extrêmement utiles et très précieux lors de la réorganisation des activités des membres de l’équipe IV, qui a donné comme résultat une parfaite synchronisation des tâches et une souplesse remarquable pour l’interchangeabilité des composants de l’équipe. En outre, l’approfondissement de la réforme introduite sous son égide du traitement des questions parlementaires a permis de rassembler de façon très réussi[e] et performante les contributions des délégations et des différents services du [s]ecrétariat général, en donnant comme résultat un notable raccourcissement des délais de réponse pour ces questions. La systématisation, rationalisation et discipline qu’il a réussi à établir dans tout le processus et pour tous les acteurs est tout à fait remarquable.

[Le requérant] fait preuve d’un grand engagement pour son travail et d’une grande disponibilité ; il est extrêmement consciencieux et fournit un travail de très haut niveau. Il a d[e] très bonnes capacités pour le management d’une équipe. Ses performances, unies à ses capacités et à son expérience font augurer pour lui un brillant avenir. »

54      Pour autant, comme en témoigne le fait que les appréciations générales figurant dans les rapports de notation des 19 fonctionnaires promus au grade AD 13 lors de l’exercice de promotion 2009 étaient également élogieuses, il n’apparaît pas de manière manifeste, s’agissant de la prise en compte de ces appréciations générales, que les mérites de ces 19 fonctionnaires n’auraient pas été supérieurs à ceux du requérant, au point que l’AIPN puisse être regardée comme ayant outrepassé les limites de son pouvoir d’appréciation.

55      S’agissant en troisième lieu de l’insuffisante prise en compte des compétences linguistiques du requérant, les rapports de notation du requérant font état de ce que celui-ci, dont la langue maternelle est l’espagnol, utilise dans ses fonctions d’une manière régulière, oralement et par écrit, l’anglais, le français et l’italien, langues pour lesquelles ses capacités de compréhension, ainsi que d’expression orale et écrite, font l’objet de la mention « très bien », c’est-à-dire la meilleure mention pouvant être attribuée. Il ressort aussi des rapports de notation du requérant qu’il utilise également deux autres langues – l’allemand et le portugais – dans ses fonctions, sans toutefois que lesdits rapports de notation ne donnent de précision sur l’usage qui en est fait au cours de l’exercice des fonctions ; cependant, l’ensemble des capacités du requérant en portugais fait l’objet de la mention « très bien » tandis que l’ensemble de ses capacités en allemand obtient la mention « bien ».

56      S’il est vrai que le tableau dans lequel figurent les cotes relatives aux compétences linguistiques du fonctionnaire est rempli par le fonctionnaire lui-même, ce tableau est intégré dans le rapport de notation ; par suite, en l’absence de contestation sur ce point par l’administration, les mentions qu’il indique ne doivent en principe pas être mises en doute. Or, en l’espèce, les mentions dudit tableau ne sont nullement contestées par le Conseil.

57      Ainsi, en plus de l’espagnol, le requérant maîtrise parfaitement quatre langues. Il a également une bonne connaissance d’une cinquième langue.

58      Le requérant a soutenu, tant dans sa requête qu’à l’audience, que le fait qu’il connaisse six langues constituait un atout pour le service, s’agissant de la réponse aux questions parlementaires, de la participation à des affaires plaidées devant la Cour de justice de l’Union européenne ou des rapports avec les représentations des États membres.

59      Cependant, le Conseil a précisé à l’audience que les langues de travail les plus couramment utilisées, tant pour la communication interne au sein du secrétariat général que pour la communication avec les représentations des États membres, la présidence du Conseil et les autres institutions, sont l’anglais et le français. Par suite, selon le Conseil, il est extrêmement rare – à l’exception des emplois de linguistes – que le profil d’un poste exige réellement l’utilisation d’une autre langue que ces deux langues et, lorsque tel est le cas, cela doit donc apparaître dans la description du poste en cause. En l’espèce, la description du poste occupé par le requérant ne ferait pas mention d’une telle exigence.

60      De plus, le Conseil a également indiqué, toujours à l’audience, d’une part, que les courriers rédigés dans d’autres langues que l’anglais et le français sont traduits quelques semaines seulement après leur réception et, d’autre part, que dans les contacts avec les présidences successives du Conseil l’anglais ou le français sont utilisés pour que l’ensemble des interlocuteurs puisse suivre les échanges.

61      Or, au regard des termes dans lesquels est formulé l’article 45 du statut, à savoir « [a]ux fins de l’examen comparatif des mérites, l’[AIPN] prend en considération, en particulier, […] l’utilisation dans l’exercice de[s] fonctions des langues », il n’est pas contraire audit article de n’inclure dans l’appréciation des mérites des fonctionnaires que les langues dont l’utilisation, compte tenu des exigences réelles du service, apporte une valeur ajoutée suffisamment importante pour apparaître nécessaire au bon fonctionnement de celui-ci.

62      Ainsi, compte tenu des précisions apportées par le Conseil à l’audience, convient-il de considérer que celui-ci a pu à bon droit prendre en compte principalement l’utilisation de l’anglais et du français, c’est-à-dire des langues qu’il considère comme apportant une valeur ajoutée nécessaire au bon fonctionnement du service.

63      Par suite, il n’apparaît pas de manière manifeste, s’agissant du critère des compétences linguistiques, que les mérites des 19 fonctionnaires promus au grade AD 13 lors de l’exercice de promotion 2009 n’auraient pas été supérieurs à ceux du requérant, au point que l’AIPN puisse être regardée comme ayant outrepassé les limites de son pouvoir d’appréciation, alors qu’il n’est pas contesté que ces 19 fonctionnaires maîtrisaient de manière suffisante l’anglais et le français.

64      En tout état de cause, à supposer même qu’il ressorte des pièces du dossier que sur la base du critère des compétences linguistiques, les mérites du requérant aient été supérieurs à ceux de certains des fonctionnaires promus, une telle circonstance ne permettrait pas, à elle seule, de conclure à une erreur manifeste d’appréciation dans l’examen comparatif de l’ensemble des mérites des fonctionnaires promouvables.

65      En effet, comme l’indique le Conseil dans son mémoire en défense, l’administration jouit d’une certaine marge de manœuvre quant à l’importance respective qu’elle accorde à chacun des trois éléments factuels, mentionnés à l’article 45 du statut, qui sont à prendre en considération pour l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables, les dispositions de cet article n’excluant pas la possibilité d’une pondération entre lesdits critères, lorsque celle-ci est justifiée.

66      Or, le Conseil a précisé, dans sa réponse aux mesures d’organisation de la procédure, que, compte tenu du nombre limité de langues couramment utilisées par ses fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions, le choix de l’AIPN était basé sur une évaluation globale des mérites des fonctionnaires dans laquelle les rapports de notation pris dans leur ensemble ainsi que le niveau des responsabilités ont le poids le plus important, le critère de l’utilisation des langues ayant été pris en considération dans l’examen comparatif des mérites avec un poids « bien inférieur » aux deux autres éléments précités.

67      En quatrième lieu, s’agissant de l’insuffisante prise en compte des mérites du requérant au regard du niveau des responsabilités qu’il a exercées, s’il apparaît, au vu des pièces du dossier, que le requérant a exercé des responsabilités d’un niveau relativement élevé – impliquant, notamment, l’encadrement d’une équipe composée de 17 personnes – celles-ci semblent en rapport avec le grade occupé.

68      De plus, le Conseil, dans son mémoire en défense, observe que tous les fonctionnaires promus exerçaient des fonctions impliquant un niveau de responsabilité élevé, comparable, voire supérieur, à celui du requérant et il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant se soit particulièrement distingué, à cet égard, des fonctionnaires promus.

69      Sur la base du seul critère du niveau des responsabilités, il n’apparaît donc pas de manière manifeste que les mérites des 19 fonctionnaires promus au grade AD 13 lors de l’exercice de promotion 2009 n’auraient pas été supérieurs à ceux du requérant, au point que l’AIPN puisse être regardée comme ayant outrepassé les limites de son pouvoir d’appréciation.

70      Pour conclure, la grande qualité des mérites du requérant est donc établie, mais, pour chacun des critères examinés ci-dessus, lorsqu’ils sont pris en compte séparément, il n’apparaît pas pour autant, de façon évidente, que les mérites des 19 fonctionnaires promus au grade AD 13 lors de l’exercice de promotion 2009 n’auraient pas été supérieurs à ceux du requérant. Cependant, cela pourrait éventuellement être établi, s’agissant d’un ou plusieurs des fonctionnaires promus, en prenant en compte l’ensemble desdits critères.

 Sur l’argument tiré du fait que les mérites de certains des fonctionnaires promus n’auraient pas été supérieurs aux mérites du requérant

71      Le requérant n’a pas, de lui-même, identifié les fonctionnaires promus dont il prétend que les mérites n’auraient pas été, de manière manifeste, supérieurs aux siens. Cependant, interrogé par le Tribunal sur ce point à l’audience, il a finalement mentionné trois fonctionnaires, désignés ci-après F, K et L.

72      En ce qui concerne F, la cote moyenne ressortant de son rapport de notation pour la période 2006/2007 est de 2,08, ce qui représente une différence négligeable par rapport à la cote moyenne de 2 du requérant pour la même période. De plus, la cote moyenne de F ressortant de son rapport de notation pour la période 2005/2006 est de 2,15, c’est-à-dire qu’elle est identique à celle du requérant pour la même période.

73      En ce qui concerne K, ce fonctionnaire a fait l’objet d’un rapport de notation pour la période allant du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2006 puis d’un autre rapport de notation pour la période allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2007. Sa cote moyenne pour l’ensemble de la période couverte par ces deux rapports est de 2,19 selon le tableau synoptique transmis par le Conseil (ou de 2,25 si une pondération est appliquée en fonction de la durée respective des périodes couvertes par chacun des deux rapports). Ce fonctionnaire a fait l’objet de deux rapports de notation successifs pour la période 2006/2007 du fait de son changement de poste, de direction et de fonctions (quittant des fonctions de réviseur et de traducteur pour traiter des dossiers relatifs à la coopération judiciaire civile) à compter du 1er janvier 2007, élément devant être pris en compte pour relativiser la différence existant entre la cote moyenne (pondérée ou non) dont il vient d’être fait état et la cote moyenne de 2 attribuée au requérant pour la même période. De plus, la cote moyenne de K ressortant du rapport de notation pour la période 2005/2006 est de 2, c’est-à-dire qu’elle est meilleure que celle du requérant pour cette période, soit 2,15.

74      En ce qui concerne L, la cote moyenne ressortant de son rapport de notation pour la période 2006/2007 est de 1,92, ce qui constitue une meilleure cote que celle du requérant pour la même période. De plus, la cote moyenne de L ressortant de son rapport de notation pour la période 2005/2006 est de 2,15, c’est-à-dire qu’elle est identique à celle du requérant.

75      Par ailleurs, il n’apparaît pas de manière manifeste que les mérites de F, K et L n’auraient pas été supérieurs à ceux du requérant, s’agissant non seulement des appréciations d’ordre général, qui sont élogieuses, mais aussi des responsabilités exercées.

76      Enfin, ces trois fonctionnaires utilisent le français et l’anglais dans le cadre de leurs fonctions. Sur ce point, eu égard à la manière dont le critère des compétences linguistiques est pris en compte par le Conseil et, en tout état de cause, à la pondération appliquée audit critère par le Conseil, la supériorité éventuelle des mérites du requérant dans ce domaine n’apparaît pas suffisante, au regard de ce qui a été constaté s’agissant des autres critères, pour retenir l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation de l’AIPN.

77      En conclusion de l’examen des deux arguments avancés par le requérant au soutien du moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation, il n’apparaît pas que le Conseil, en décidant de ne pas le promouvoir au titre de l’exercice de promotion 2009, ait usé du pouvoir d’appréciation dont il dispose en matière de promotion (voir points 22 à 26 du présent arrêt) de manière manifestement erronée. Par suite, ledit moyen doit être écarté.

78      Certes, compte tenu des mérites évidents du requérant, l’AIPN n’aurait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation si elle avait décidé de l’inclure dans le groupe des fonctionnaires promus. Toutefois, ce constat ne signifie pas que la décision contraire, de ne pas le promouvoir, soit entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

 Sur la violation de l’article 45, paragraphe 1, du statut, en ce que l’administration n’aurait pas pris en compte l’ancienneté du requérant tant dans le grade que dans le service

79      Le requérant soutient que le critère de l’ancienneté jouerait un rôle important, voire décisif, dans le déroulement des exercices de promotion au Conseil. Or, selon lui, son ancienneté n’aurait pas été prise en compte, alors même qu’il disposait d’une ancienneté plus grande que certains des fonctionnaires promus.

80      L’argument du requérant se fonde donc, tout d’abord, sur le fait que l’ancienneté constituerait un des critères principaux pris en compte par le Conseil au titre de l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables.

81      Pour démontrer que le critère de l’ancienneté serait un critère principal, et non un critère subsidiaire, le requérant se prévaut d’un texte émanant du comité du personnel du Conseil, intitulé « Lignes directrices pour les représentants du [p]ersonnel au sein des [c]ommissions de [p]romotion », lequel prévoit que l’ancienneté est prise en compte au titre des mérites des fonctionnaires.

82      Le requérant se prévaut également du point IV 1, sous d), du protocole codifié, signé le 26 mai 1988 par le secrétaire général du Conseil et l’Union syndicale, selon lequel l’ancienneté est prise en compte au titre des mérites.

83      Cependant, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la portée normative de l’un ou l’autre des textes dont se prévaut le requérant, il ressort des motifs mêmes de la décision de ne pas le promouvoir, tels qu’ils sont révélés dans le rejet de la réclamation, que l’administration n’a pas fait usage, à titre principal, du critère de l’ancienneté pour comparer ses mérites à ceux des autres fonctionnaires promouvables.

84      En effet, il est indiqué dans le rejet de la réclamation que « [c]omme exigé par la jurisprudence, l’ancienneté dans le grade n’a pas constitué un critère de comparaison des mérites, mais n’est intervenu[e] que pour départager – dans un nombre de cas extrêmement limité en l’espèce – des fonctionnaires de mérites égaux ».

85      Ainsi, sur ce point, le moyen du requérant doit être écarté comme manquant en fait puisque la prémisse sur laquelle se fonde son raisonnement n’est pas établie.

86      Par ailleurs, il convient de rappeler que, dans l’appréciation comparative des mérites des fonctionnaires promouvables, l’AIPN peut, à titre subsidiaire, en cas d’égalité de mérites établie sur la base, en particulier, des trois éléments factuels visés expressément à l’article 45, paragraphe 1, du statut, prendre d’autres éléments en considération, tels que l’âge des candidats et leur ancienneté dans le grade ou le service (voir, notamment, arrêt Bouillez e.a./Commission, précité, point 50).

87      Or, le requérant soutient également que l’administration, aurait dû faire usage de la condition relative à l’ancienneté dans le grade et dans le service pour départager des fonctionnaires ayant des mérites équivalents, ce qui l’aurait conduite à constater que son ancienneté dans le grade et dans le service était supérieure à celle de certains des fonctionnaires promus.

88      Cependant, comme il a été rappelé au point 37 du présent arrêt, la décision de ne pas promouvoir le requérant a pour motif, en substance, le fait que les mérites des fonctionnaires promus étaient supérieurs aux siens.

89      Par suite, le Tribunal n’a pas à contrôler si l’ancienneté du requérant lui aurait permis de bénéficier d’une promotion dans l’hypothèse où ses mérites auraient été équivalents à ceux de certains des fonctionnaires finalement promus.

90      En effet, soit l’administration a pu considérer à bon droit que les mérites des fonctionnaires promus étaient supérieurs à ceux du requérant et, dans ce cas, elle n’avait pas à prendre en considération son ancienneté, ce qui conduit à écarter le moyen examiné ici ; soit l’administration a commis une erreur manifeste d’appréciation en estimant que les mérites des fonctionnaires promus étaient supérieurs à ceux du requérant et, dans ce cas, le motif de la décision de ne pas promouvoir le requérant étant irrégulier, cette décision doit être annulée sans qu’il y ait lieu d’examiner le critère subsidiaire tiré de l’ancienneté dans le service et dans le grade.

91      Or, en l’espèce, ainsi qu’il a été dit plus haut, il n’est pas établi que l’administration ait entaché la décision de ne pas promouvoir le requérant d’une erreur manifeste d’appréciation en considérant que les mérites des fonctionnaires promus étaient supérieurs aux siens. Ainsi, le requérant ne peut utilement se prévaloir du critère subsidiaire tiré de son ancienneté dans le grade et le service. Son moyen doit donc être également écarté sur ce point.

 Sur le détournement de pouvoir et le détournement de procédure

92      Ainsi qu’il a été jugé à maintes reprises, un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été pris exclusivement, ou à tout le moins de manière déterminante, à des fins autres que celles dont il est excipé ou dans le but d’éluder une procédure spécialement prévue par les traités (arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, Wils/Parlement, F‑105/05, point 119, et la jurisprudence citée).

93      En l’espèce, le requérant se fonde sur un ensemble d’indices qu’il convient d’examiner, en particulier, d’une part, l’existence de « relations tendues » entre lui-même et le second notateur, d’autre part, la méconnaissance par la commission consultative de promotion de « pratiques internes » habituelles.

94      En premier lieu, le requérant invoque l’existence de « relations tendues » entre lui-même et le second notateur de son rapport de notation pour la période 2006/2007 (ci-après le « second notateur »). Il écrit dans sa requête :

« […] suite au processus de sélection pour le poste de [d]irecteur de la [d]irection [‘R]elations interinstitutionnelles[’], à laquelle le requérant était affecté, [le second notateur] a accusé le requérant de faire partie d’un complot ourdi par des délégations du Conseil contre la candidate qui avait été proposée pour le poste par un comité de sélection composé de trois personnes, dont [le second notateur] en tant que président et où siégeait également le [d]irecteur qui était supérieur hiérarchique direct de la candidate retenue ; celle-ci était d’ailleurs une ancienne assistante [du second notateur]. De fait, les délégations en question auraient été d’avis que les autres candidats écartés étaient objectivement plus méritants. »

95      Sur ce point, il ressort des déclarations mêmes du Conseil à l’audience que, suite à la nomination d’un nouveau directeur à la direction à laquelle le requérant était affecté, « les relations de travail dans le service juridique du requérant se sont dégradées à un point que [le second notateur] trouvait intolérable ». Le Conseil a également précisé que c’est dans ce contexte que le second notateur a fait, dans le rapport de notation pour la période 2006/2007, la remarque suivante :

« Toujours des points faibles pour le sens du travail en équipe et les relations humaines. »

96      Le représentant du requérant a réagi lors de l’audience en observant – sans être contesté par le Conseil – que les évènements reconnus par le Conseil comme étant à l’origine de la remarque faite par le second notateur (nomination d’un directeur à la direction à laquelle le requérant était affecté et ses suites) ne relevaient pas de la période couverte par le rapport de notation et que, par suite, le second notateur avait inscrit dans ce rapport une remarque qui concernaient des évènements postérieurs à la période couverte par ledit rapport de notation.

97      L’argument du requérant mentionné au point précédent pourrait être invoqué, mais seulement pour mettre en cause la légalité du rapport de notation en question. Or, la légalité dudit rapport, qui est un acte distinct de la décision de ne pas promouvoir le requérant, ne fait l’objet d’aucune contestation dans le cadre du présent litige, que ce soit par voie d’action ou par voie d’exception. Cet argument ne peut donc être utilement invoqué en l’espèce.

98      Par ailleurs, l’existence de « relations tendues » entre le requérant et le second notateur, même si elle est établie, ne permet pas à elle seule de retenir le moyen tiré du détournement de pouvoir ou de procédure.

99      Il est vrai que les « relations tendues » avec le second notateur sont mises en avant par le requérant pour démontrer que la présence de celui-ci au sein de la commission consultative de promotion serait irrégulière.

100    À cet égard, le Conseil a répondu, sans être contesté sur ce point, que la procédure interne appliquée en matière de promotion imposait que le second notateur – du fait qu’il avait la plus grande ancienneté en tant que directeur général – présidât la commission consultative de promotion.

101    La présence du second notateur au sein de la commission consultative de promotion et le fait qu’il l’ait présidée ne résultaient donc pas d’un choix délibéré de celui-ci.

102    De plus, s’il est constant que le second notateur présidait la commission consultative de promotion pour le groupe de fonctions AD, il n’est pas contesté, d’une part, qu’il ne disposait pas d’un droit de vote et, d’autre part, qu’au sein de la commission huit fonctionnaires – quatre directeurs généraux ou directeurs généraux adjoints et quatre fonctionnaires désignés par le comité du personnel – participaient aux votes.

103    Au vu de ce qui précède, et même s’il est établi qu’il existait des « relations tendues » entre le requérant et le second notateur, il n’apparaît pas que la décision de ne pas promouvoir le requérant puisse être regardée comme ayant été adoptée exclusivement, ou à tout le moins de manière déterminante, à des fins autres que celles dont il est excipé.

104    De même, il n’est pas établi, ni d’ailleurs allégué, que la décision de ne pas promouvoir le requérant ait été adoptée dans le but d’éluder une procédure spécialement prévue par les traités.

105    À supposer même que le requérant ait entendu se fonder sur ses « relations tendues » avec le second notateur pour invoquer, sur le fondement de l’article 11 bis du statut, l’existence d’un conflit d’intérêts, ce moyen ne serait pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé et devrait, par conséquent, être écarté.

106    En tout état de cause sur ce point, les « relations tendues » entre le requérant et le second notateur, bien que leur existence soit établie, ne suffisent pas, à elles seules, pour conclure à l’existence d’un conflit d’intérêts justifiant, sur le fondement, notamment, de l’article 11 bis du statut, que le second notateur n’ait traité d’aucune affaire dans laquelle le requérant était impliqué.

107    En effet, s’il doit être remédié, dans toute la mesure du possible, à l’existence de relations difficiles entre un fonctionnaire et l’un de ses supérieurs hiérarchiques, il ne s’agit pas pour autant d’une situation exceptionnelle au point qu’il soit interdit au supérieur hiérarchique en question de participer à toute procédure administrative, collective ou individuelle, dans laquelle ledit fonctionnaire est impliqué. Il convient donc d’examiner les autres éléments mis en avant par le requérant pour justifier l’existence d’un conflit d’intérêts.

108    Or, si le requérant fait état de ce que le second notateur l’aurait accusé « de faire partie d’un complot ourdi par des délégations du Conseil » et de ce que des « témoignages reçus […] allaient dans le sens d’une volonté persistante [du second notateur] de nuire à sa carrière », il ne produit aucune pièce susceptible d’établir de telles allégations. Par suite, l’existence d’un conflit d’intérêts n’est en tout état de cause pas établie.

109    En second lieu, le requérant prétend que la commission consultative de promotion n’a pas respecté les « pratiques internes » habituelles, dont l’application aurait dû conduire à ce qu’il soit promu.

110    Selon le requérant, la commission consultative de promotion ne ferait qu’« appliquer » des « cotes de notation et d’appréciation » figurant sur une fiche d’analyse propre à chaque fonctionnaire, et « en application des cotes le concernant […] il devait quasi-mathématiquement figurer parmi les fonctionnaires à proposer à la promotion ».

111    Cependant les allégations du requérant ne sont étayées par aucune pièce probante. Il se borne, s’agissant en particulier de l’affirmation selon laquelle il devait « quasi-mathématiquement figurer parmi les fonctionnaires à proposer à la promotion », à faire référence à « certaines sources », sans apporter plus de précision. Ainsi, non seulement les allégations du requérant ne sont pas établies, mais, de plus, celui-ci n’a pas été en mesure de produire un ensemble d’éléments suffisamment probants qui aurait permis que des mesures d’organisation de la procédure soient ordonnées afin de vérifier ses dires sur ce point.

112    Au final, au regard de tous les éléments invoqués par le requérant, que ceux-ci soient pris en compte séparément ou conjointement, il ne peut être conclu qu’il existe des indices objectifs, pertinents et concordants tendant à démontrer que la décision de ne pas le promouvoir aurait été prise exclusivement, ou à tout le moins de manière déterminante, à des fins autres que celles dont il est excipé ou dans le but d’éluder une procédure spécialement prévue par les traités. Par suite, le moyen tiré du détournement de pouvoir et du détournement de procédure doit être écarté.

113    Par ailleurs, à supposer que le requérant ait entendu, sous l’intitulé du détournement de pouvoir, également soulever le moyen tiré de la méconnaissance du principe d’impartialité, il convient de rappeler que, lorsqu’elle s’applique à un tribunal, l’exigence d’impartialité recouvre deux aspects. En premier lieu, le tribunal doit être subjectivement impartial, c’est-à-dire qu’aucun de ses membres ne doit manifester de parti pris ou de préjugé personnel, l’impartialité personnelle se présumant jusqu’à preuve du contraire. En second lieu, le tribunal doit être objectivement impartial, c’est-à-dire qu’il doit offrir des garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute légitime (voir, sur la distinction entre impartialité subjective et objective, arrêt de la Cour du 19 février 2009, Gorostiaga Atxalandabaso/Parlement, C‑308/07 P, point 46).

114    Cependant, il y a lieu de relever que la procédure de promotion des fonctionnaires du Conseil n’étant pas judiciaire, mais administrative, le Conseil ne saurait être qualifié de « tribunal » au sens de la jurisprudence citée au point précédent. Dès lors, le respect de toutes les caractéristiques que cette jurisprudence impose à un « tribunal » ne saurait être exigé du Conseil lorsque, dans le cadre d’une procédure de promotion, il procède à la comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables (voir, s’agissant de la notion de « tribunal » telle qu’elle résulte de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, arrêt du Tribunal de première instance du 19 mars 1998, Tzoanos/Commission, T‑74/96, point 339).

115    En tout état de cause, s’il a été admis par le juge de l’Union qu’une « obligation d’impartialité » puisse s’imposer à l’administration (voir, en matière de procédure de sélection, arrêt du Tribunal de première instance du 10 juin 2008, Ceuninck/Commission, T‑282/03, point 73), il faut rappeler que les décisions en matière de promotion sont adoptées, notamment, sur la base de la connaissance préalable que les supérieurs hiérarchiques des fonctionnaires promouvables ont pu acquérir des mérites de ces derniers au cours de la relation professionnelle qu’ils ont entretenue avec eux. Il s’agit donc moins, en ce domaine, d’exclure toute opinion préétablie – y compris négative – que de s’assurer que la comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables présente un caractère objectif permettant, d’une part, d’éviter l’arbitraire et la discrimination, d’autre part, d’assurer le traitement égal de tous les candidats à la promotion. En l’espèce, l’absence de caractère objectif de la comparaison des mérites pratiquée n’est pas établie malgré l’existence de « relations tendues » entre le requérant et le second notateur, ce, compte tenu, en particulier, des garanties apportées par la composition paritaire de la commission consultative de promotion et l’absence de droit de vote du second notateur qui présidait cette commission.

 Sur la violation du droit à recevoir une réponse rédigée dans la langue utilisée pour la réclamation

116    Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il incombe aux institutions, en vertu du devoir de sollicitude, d’adresser à un fonctionnaire une décision individuelle libellée dans une langue que celui-ci maîtrise de façon approfondie (arrêts du Tribunal de première instance du 23 mars 2000, Rudolph/Commission, T‑197/98, point 46, et du 17 mai 2006, Lavagnoli/Commission, T‑95/04, point 48). Ainsi, le fait que des documents adressés par l’administration à un de ses fonctionnaires sont rédigés dans une langue autre que la langue maternelle de ce fonctionnaire ou la première langue étrangère choisie par lui n’est constitutif d’aucune violation des droits dudit fonctionnaire, s’il possède une maîtrise de la langue utilisée par l’administration lui permettant de prendre effectivement et facilement connaissance du contenu des documents en question (arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 3 février 2011, Italie/Commission, T‑205/07, points 54 et 55).

117    Or, en l’espèce, il ressort des pièces du dossier et en particulier des rapports de notation produits par le requérant lui-même, d’une part, que ses capacités de compréhension et d’expression orale et écrite en langue française sont cotées avec la mention « très bien », c’est-à-dire la meilleure mention pouvant être attribuée et, d’autre part, qu’il utilise cette langue de façon régulière dans le cadre de ses fonctions.

118    Il ne saurait donc être reproché au Conseil d’avoir rédigé le rejet de la réclamation en langue française.

119    Une telle conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument selon lequel il existerait, sur la base de l’article 21, troisième alinéa, CE et de l’article 41, paragraphe 4, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, proclamée le 7 décembre 2000 à Nice (JO C 364, p. 1), un droit pour un fonctionnaire de recevoir les réponses aux lettres qu’il envoie dans la langue de la correspondance initiale.

120    Tout d’abord, il convient de constater qu’à la date du rejet de la réclamation ce sont les versions des articles du traité CE et de la charte des droits fondamentaux qui viennent d’être mentionnées au point précédent qui étaient applicables et non les versions auxquelles le requérant fait référence, lesquelles sont postérieures à l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne le 1er décembre 2009.

121    Ensuite, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les nombreuses références dans les traités à l’emploi des langues dans l’Union ne peuvent être considérées comme étant la manifestation d’un principe général du droit de l’Union assurant à chaque citoyen le droit à ce que tout ce qui serait susceptible d’affecter ses intérêts soit rédigé dans sa langue en toutes circonstances. Un tel principe ne saurait non plus être déduit du règlement no 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385). En effet, ce règlement n’est pas applicable aux relations entre les institutions et leurs fonctionnaires et agents, en ce qu’il fixe uniquement le régime linguistique applicable entre les institutions de l’Union et un État membre ou une personne relevant de la juridiction de l’un des États membres. Or, les fonctionnaires de l’Union relèvent de la seule juridiction de celle-ci, s’agissant de l’application des dispositions du statut (ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 18 octobre 2010, Marcuccio/Commission, T‑516/09 P, point 68 ; arrêt Italie/Commission, précité, points 30, 31 et 50).

122    De plus, si l’article 21, troisième alinéa, CE dispose que « [t]out citoyen de l’Union peut écrire à toute institution ou organe visé au présent article ou à l’article 7 dans l’une des langues visées à l’article 314 et recevoir une réponse rédigée dans la même langue », le requérant ne saurait se prévaloir utilement, dans le cadre du présent recours, d’une telle disposition, cette dernière ne s’appliquant aux relations entre les institutions et leurs agents que lorsque ceux-ci adressent une correspondance aux institutions en leur seule qualité de citoyens de l’Union et non en leur qualité de fonctionnaire ou agent de l’Union. Au demeurant, l’interprétation de l’article 21, troisième alinéa, CE telle que la propose le requérant, selon laquelle les institutions seraient tenues de répondre à la réclamation d’un fonctionnaire dans la même langue que celle utilisée dans ladite réclamation, aboutirait à des difficultés insurmontables pour les institutions (ordonnance du Tribunal du 7 octobre 2009, Marcuccio/Commission, F‑122/07, point 63).

123    Enfin, le requérant ne saurait non plus invoquer utilement la charte des droits fondamentaux, dont l’article 41, paragraphe 4, prévoit que « [t]oute personne peut s’adresser aux institutions de l’Union dans une des langues des traités et doit recevoir une réponse dans la même langue », une telle disposition ne concernant pas, pour les mêmes raisons que celles exposées au point précédent, les relations entre les institutions de l’Union et leurs agents mais les relations entre les institutions et les citoyens de l’Union.

124    Par ailleurs, il est vrai que les dispositions invoquées par le requérant ont vocation, d’une part, à faciliter les relations entre les institutions et les citoyens de l’Union et, d’autre part, à éviter que les droits de ces derniers ne soient méconnus. Cependant, s’agissant du premier aspect, le requérant, qui, en tant que fonctionnaire de l’Union, a choisi d’évoluer dans un environnement professionnel multiculturel et multilingue, ne saurait se prévaloir de la charte des droits fondamentaux pour exiger que son institution, en tant qu’employeur, réponde à ses demandes dans sa langue maternelle. S’agissant du second aspect, en l’espèce, eu égard, d’une part, aux compétences élevées du requérant dans la langue française et, d’autre part, au fait qu’il utilise régulièrement cette langue dans l’exercice de ses fonctions, il est clair qu’en répondant à la réclamation dans cette langue, l’administration n’a pas porté atteinte aux droits du requérant et en particulier à ses droits de la défense.

125    En conclusion, il y a lieu d’écarter le dernier moyen et, l’ensemble des moyens soulevés ayant ainsi été écartés, de rejeter les conclusions aux fins d’annulation présentées par le requérant.

 Sur les conclusions aux fins d’indemnisation

126    Le requérant conclut à la condamnation du Conseil à lui verser la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral qu’il aurait subi. Il soutient qu’il a été contraint d’introduire une procédure judiciaire pour connaître la motivation de la décision de ne pas le promouvoir et qu’ainsi il a été placé – du fait d’un rejet de sa réclamation insuffisamment motivé – dans une situation d’incertitude qui aurait perduré plusieurs mois à la suite de l’introduction de sa réclamation.

127    Il suffit de constater que la décision de ne pas le promouvoir a fait l’objet, dans le rejet de la réclamation, d’une motivation suffisamment détaillée, laquelle a été présentée plus haut aux points 32 à 39 du présent arrêt et que, par suite, aucune faute tenant à une méconnaissance par l’administration de l’obligation de motivation n’est établie.

128    Par ailleurs, les conclusions aux fins d’annulation dirigées contre la décision de ne pas promouvoir le requérant ayant été rejetées sur le fond, les conclusions indemnitaires, dans la mesure où elles auraient pour fondement une illégalité de cette décision résultant d’un des moyens déjà écartés lors de l’examen des conclusions aux fins d’annulation, doivent être rejetées.

129    Enfin, à supposer même que le requérant entende fonder sa demande sur un comportement illégal de l’administration sans lien direct avec la légalité de la décision de ne pas le promouvoir, ses conclusions indemnitaires ne pourraient être recevables que s’il avait préalablement introduit une demande indemnitaire au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, demande suivie, en cas de rejet, d’une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut. Or, tel n’a pas été le cas en l’espèce. De telles conclusions indemnitaires devraient donc être rejetées comme irrecevables.

130    Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins d’indemnisation présentées par le requérant doivent être rejetées.

 Sur les dépens

131    Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

132    Il résulte des motifs énoncés ci-dessus que le requérant est la partie qui succombe. En outre, le Conseil a, dans ses conclusions, expressément conclu à ce qu’il soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, il y a donc lieu de condamner le requérant aux dépens exposés par le Conseil.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      AC supporte l’ensemble des dépens.

Mahoney

Kreppel

Van Raepenbusch

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 septembre 2011.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       P. Mahoney


* Langue de procédure : le français.