Language of document : ECLI:EU:T:2019:67

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

7 février 2019 (*)

« Dessin ou modèle communautaire – Procédure de nullité – Dessin ou modèle communautaire enregistré représentant un appareil d’éclairage – Motif de nullité – Dessin ou modèle antérieur – Caractère individuel – Utilisateur averti – Degré de liberté du créateur – Article 6 du règlement (CE) no 6/2002 »

Dans l’affaire T‑767/17,

Eglo Leuchten GmbH, établie à Pill (Autriche), représentée par Me H. Lauf, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme A. Söder, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Briloner Leuchten GmbH & Co. KG, anciennement Briloner Leuchten GmbH, établie à Brilon (Allemagne), représentée par Me M.-H. Hoffmann, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l’EUIPO du 26 septembre 2017 (affaire R 746/2016-3), relative à une procédure de nullité entre Eglo Leuchten et Briloner Leuchten,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de M. S. Gervasoni, président, Mme K. Kowalik‑Bańczyk (rapporteur) et M. C. Mac Eochaidh, juges,

greffier : Mme R. Ukelyte, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 23 novembre 2017,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 2 février 2018,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 31 janvier 2018,

à la suite de l’audience du 8 novembre 2018,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 28 mars 2014, l’intervenante, Briloner Leuchten GmbH & Co. KG, a présenté une demande d’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1).

2        Le dessin ou modèle contesté est représenté comme suit :

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3        Le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué à des « appareils d’éclairage », relevant de la classe 26-05 au sens de l’arrangement de Locarno instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, du 8 octobre 1968, tel que modifié.

4        Le dessin ou modèle contesté a été enregistré en tant que dessin ou modèle communautaire sous le numéro 2435768-0036 et publié au Bulletin des dessins ou modèles communautaires no 98/2014, du 28 mai 2014.

5        Le 23 octobre 2015, la requérante, Eglo Leuchten GmbH, a introduit auprès de l’EUIPO une demande en nullité du dessin ou modèle contesté au titre de l’article 52 du règlement no 6/2002. Le motif invoqué au soutien de la demande en nullité était celui visé à l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002.

6        Dans sa demande en nullité, la requérante a fait valoir, notamment, que le dessin ou modèle contesté était dépourvu de caractère individuel au sens de l’article 6 du règlement no 6/2002. Pour ce faire, elle s’est fondée sur plusieurs documents censés établir la divulgation au public de dessins ou modèles antérieurs, à savoir, notamment :

–        un extrait du Bulletin des dessins ou modèles communautaires no 81/2008, du 23 avril 2008, relatif à la publication du dessin ou modèle enregistré sous le numéro 894126-0011, lequel était représenté comme suit :

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–        plusieurs pages d’un de ses catalogues intitulé « luminaires intérieurs 2009/10 » dans lesquelles figurent notamment les images suivantes :

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7        Par décision du 19 février 2016, la division d’annulation a fait droit à la demande en nullité.

8        Le 22 avril 2016, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

9        Par décision du 26 septembre 2017 (ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’annulation et rejeté la demande en nullité.

10      À cet égard, d’une part, la chambre de recours a considéré que les deux images du catalogue mentionné au point 6 ci-dessus constituaient une représentation du dessin ou modèle antérieur enregistré. D’autre part, la chambre de recours a estimé que les différences entre les dessins ou modèles en conflit étaient suffisantes pour déduire qu’ils produisaient des impressions globales différentes sur l’utilisateur averti. Elle en a conclu que l’impression globale du dessin ou modèle antérieur n’était pas de nature à priver le dessin ou modèle contesté de son caractère individuel conformément à l’article 6 du règlement no 6/2002.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et, à titre subsidiaire, l’intervenante aux dépens.

12      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 6 du règlement no 6/2002.

14      Ce moyen est divisé en deux branches. Par la première branche, tirée de la violation de l’article 6, paragraphe 2, du règlement no 6/2002, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir considéré que le degré de liberté du créateur était moyen. Par la seconde branche, tirée de la violation de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du même règlement, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir considéré que le dessin ou modèle contesté présentait un caractère individuel.

15      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

 Observations liminaires

16      Il ressort du libellé de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002 que le caractère individuel doit être apprécié, dans le cas d’un dessin ou modèle communautaire enregistré, au regard de l’impression globale produite sur l’utilisateur averti. L’impression globale produite sur l’utilisateur averti doit être différente de celle produite par tout dessin ou modèle divulgué au public avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou, si une priorité a été revendiquée, avant la date de priorité. L’article 6, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 précise qu’il convient de tenir compte, dans l’appréciation du caractère individuel, du degré de liberté du créateur dans l’élaboration de ce dessin ou modèle.

17      Conformément à la jurisprudence, le caractère individuel d’un dessin ou d’un modèle résulte d’une impression globale de différence, ou d’absence de « déjà vu », du point de vue de l’utilisateur averti, par rapport à toute antériorité au sein du patrimoine des dessins ou modèles, sans tenir compte des différences demeurant insuffisamment marquées pour affecter ladite impression globale, bien qu’excédant des détails insignifiants, mais en ayant égard à des différences suffisamment marquées pour créer des impressions d’ensemble dissemblables [voir arrêt du 7 novembre 2013, Budziewska/OHMI – Puma (Félin bondissant), T‑666/11, non publié, EU:T:2013:584, point 29 et jurisprudence citée].

18      Lors de l’appréciation du caractère individuel d’un dessin ou modèle par rapport à toute antériorité au sein du patrimoine des dessins ou modèles, il convient de tenir compte de la nature du produit auquel le dessin ou modèle s’applique ou dans lequel celui-ci est incorporé et, notamment, du secteur industriel dont il relève (voir considérant 14 du règlement no 6/2002), du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle, d’une éventuelle saturation de l’état de l’art, laquelle peut être de nature à rendre l’utilisateur averti plus sensible aux différences entre les dessins ou modèles comparés, ainsi que de la manière dont le produit en cause est utilisé, en particulier en fonction des manipulations qu’il subit normalement à cette occasion (voir arrêt du 7 novembre 2013, Félin bondissant, T‑666/11, non publié, EU:T:2013:584, point 31 et jurisprudence citée).

19      Enfin, lors de l’appréciation du caractère individuel d’un dessin ou modèle, il convient également de tenir compte du point de vue de l’utilisateur averti. Selon une jurisprudence constante, l’utilisateur averti est une personne dotée d’une vigilance particulière et qui dispose d’une certaine connaissance de l’état de l’art antérieur, c’est-à-dire du patrimoine des dessins ou modèles relatifs au produit en cause qui ont été divulgués à la date du dépôt du dessin ou modèle contesté, ou, le cas échéant, à la date de la priorité revendiquée [arrêts du 18 mars 2010, Grupo Promer Mon Graphic/OHMI – PepsiCo (Représentation d’un support promotionnel circulaire), T‑9/07, EU:T:2010:96, point 62 ; du 9 septembre 2011, Kwang Yang Motor/OHMI – Honda Giken Kogyo (Moteur à combustion interne), T‑11/08, non publié, EU:T:2011:447, point 23, et du 29 octobre 2015, Roca Sanitario/OHMI – Villeroy & Boch (Robinet à commande unique), T‑334/14, non publié, EU:T:2015:817, point 18].

20      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il convient d’examiner les deux branches du moyen unique invoqué par la requérante.

 Sur la première branche, tirée de la violation de l’article 6, paragraphe 2, du règlement no 6/2002

21      La requérante soutient que la chambre de recours aurait dû considérer que le degré de liberté du créateur était élevé en l’absence de preuves contraires produites par l’intervenante. Par ailleurs, elle fait valoir que, conformément aux observations concordantes des parties devant l’EUIPO, la liberté du créateur était, d’une part, quasiment inexistante s’agissant du dispositif de fixation et, d’autre part, élevée s’agissant de la tête d’éclairage.

22      À cet égard, il y a lieu de relever que le degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle est défini à partir, notamment, des contraintes liées aux caractéristiques imposées par la fonction technique du produit ou d’un élément du produit, ou encore des prescriptions légales applicables au produit. Ces contraintes conduisent à une normalisation de certaines caractéristiques, devenant alors communes aux dessins ou modèles appliqués au produit concerné (arrêt du 18 mars 2010, Représentation d’un support promotionnel circulaire, T‑9/07, EU:T:2010:96, point 67).

23      Partant, plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est grande, moins des différences mineures entre les dessins ou modèles en conflit suffisent à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti. À l’inverse, plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est restreinte, plus les différences mineures entre les dessins ou modèles en conflit suffisent à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti. Ainsi, un degré élevé de liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle renforce la conclusion selon laquelle les dessins ou modèles ne présentant pas de différences significatives produisent une même impression globale sur l’utilisateur averti (arrêt du 9 septembre 2011, Moteur à combustion interne, T‑11/08, non publié, EU:T:2011:447, point 33).

24      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que le degré de liberté du créateur était moyen s’agissant des appareils d’éclairage se fixant au mur ou au plafond dans la mesure où ceux-ci devaient nécessairement comporter une armature susceptible d’accueillir une ampoule ainsi qu’un dispositif de fixation au mur ou au plafond. La chambre de recours a également estimé que, en ce qui concerne les plafonniers à plusieurs lampes, le degré de liberté du créateur était moyen s’agissant du dispositif de fixation, de l’armature, du nombre et de la disposition des têtes d’éclairage. La chambre de recours a toutefois précisé que le degré de liberté du créateur n’était, en principe, soumis à aucune limitation s’agissant, respectivement, des armatures et des dispositifs de fixation, pris individuellement.

25      En premier lieu, il convient d’écarter l’argument de la requérante selon lequel, en substance, la chambre de recours aurait dû, en l’absence de preuves contraires produites par l’intervenante, présumer élevé le degré de liberté du créateur au motif qu’il était impossible, pour la requérante, de prouver que l’état de l’art n’était pas saturé.

26      En effet, d’une part, ainsi que l’a d’ailleurs reconnu la requérante lors de l’audience, une saturation de l’état de l’art ne saurait être considérée comme limitant la liberté du créateur [voir arrêt du 16 février 2017, Antrax It/EUIPO – Vasco Group (Thermosiphons pour radiateurs), T‑828/14 et T‑829/14, EU:T:2017:87, point 55 et jurisprudence citée]. D’autre part, eu égard à la jurisprudence citée au point 22 ci-dessus, il était loisible à la requérante de démontrer, le cas échéant, que les prescriptions légales applicables aux appareils d’éclairage ou les contraintes liées aux caractéristiques imposées par la fonction technique de ceux-ci, ou d’un élément de ceux-ci, n’étaient pas de nature à restreindre sensiblement le degré de liberté du créateur.

27      En deuxième lieu, il convient de noter que, comme l’a relevé, à juste titre, l’EUIPO, l’argumentation de la requérante est contradictoire dans la mesure où elle reproche à la chambre de recours, d’une part, de ne pas avoir retenu un degré élevé de liberté du créateur s’agissant des appareils d’éclairage et, d’autre part, d’avoir considéré que la liberté du créateur, s’agissant des dispositifs de fixation desdits appareils d’éclairage, était illimitée alors qu’elle aurait démontré que cette liberté était quasiment inexistante.

28      En troisième lieu, il convient d’écarter l’argument de la requérante selon lequel la liberté du créateur était quasiment inexistante s’agissant des dispositifs de fixation des appareils d’éclairage et des armatures de plafonniers à plusieurs têtes d’éclairage dans la mesure où la forme de ces dispositifs était standardisée.

29      En effet, il convient de rappeler que la question de savoir si un dessin ou modèle suit ou non une tendance générale en matière de design est sans pertinence dans le cadre de l’examen du caractère individuel du dessin ou modèle concerné qui consiste à vérifier si l’impression globale produite par ce dernier se différencie des impressions globales produites par les dessins ou modèles divulgués antérieurement, indépendamment des considérations esthétiques ou commerciales [arrêt du 22 juin 2010, Shenzhen Taiden/OHMI – Bosch Security Systems (Équipement de communication), T‑153/08, EU:T:2010:248, point 58]. Il s’ensuit que le degré de liberté du créateur ne saurait dépendre de l’existence d’une telle tendance.

30      En quatrième lieu, il convient de relever que la chambre de recours a apprécié le degré de liberté du créateur conformément à la jurisprudence citée au point 22 ci-dessus.

31      En effet, il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours a estimé, en substance, que la fonction technique des appareils d’éclairage, laquelle imposait de combiner une armature susceptible d’accueillir une ampoule à un dispositif de fixation, était de nature à limiter la liberté du créateur.

32      Par conséquent, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours a considéré, à juste titre, que si le degré de liberté du créateur était, en substance, élevé s’agissant, respectivement, des armatures et des dispositifs de fixation, ledit degré n’était en revanche que moyen s’agissant des appareils d’éclairage pris dans leur ensemble.

33      Il s’ensuit que la première branche du moyen unique invoqué par la requérante doit être écartée comme non fondée.

 Sur la seconde branche, tirée de la violation de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002

34      La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a considéré, à tort, que le dessin ou modèle contesté présentait un caractère individuel résultant des seules caractéristiques du dispositif de fixation au plafond, des barres courtes et des articulations oscillo-rotatives de l’appareil d’éclairage en cause.

35      En l’espèce, en premier lieu, il convient de relever que l’utilisateur averti a été défini, à juste titre, par la chambre de recours, sans que cela ne soit d’ailleurs contesté par la requérante, comme étant une personne habituée aux appareils d’éclairage ainsi qu’aux différents dessins ou modèles existant dans le secteur concerné.

36      En deuxième lieu, il convient de relever, ainsi que cela a été mentionné au point 30 ci-dessus, que la chambre de recours a estimé, à juste titre, que le degré de liberté du créateur était moyen.

37      En troisième lieu, il y a lieu de relever, à l’instar de la chambre de recours, que, même si les dessins ou modèles en conflit comprenaient chacun une tête d’éclairage en forme d’anneau, d’une part, ces têtes d’éclairage présentaient des différences en ce qui concerne l’intérieur desdits anneaux et, d’autre part, le dessin ou modèle contesté présentait un dispositif de fixation au plafond, une barre longue, deux barres courtes, deux articulations oscillo-rotatives et une seconde tête d’éclairage qui étaient absents du dessin ou modèle antérieur.

38      Dans ces conditions, il convient de relever que les caractéristiques visibles respectives des dessins ou modèles en conflit présentent d’importantes différences, de sorte que l’impression globale produite par le dessin ou modèle contesté se distingue de celle produite par le dessin ou modèle antérieur.

39      En outre, cette différence est d’autant plus marquée que l’impression produite sur l’utilisateur averti par un dessin ou modèle doit nécessairement être déterminée aussi au regard de la manière dont le produit en cause est utilisé [arrêts du 22 juin 2010, Équipement de communication, T‑153/08, EU:T:2010:248, point 66, et du 14 juin 2011, Sphere Time/OHMI – Punch (Montre attachée à une lanière), T‑68/10, EU:T:2011:269, point 78]. Or, en l’espèce, d’une part, le dessin ou modèle contesté représente un plafonnier dont les têtes d’éclairage peuvent être orientées, grâce aux articulations oscillo-rotatives, en fonction des besoins de l’utilisateur. D’autre part, il ressort du catalogue mentionné au point 6 ci-dessus que le dessin ou modèle antérieur peut être fixé sur un mur ou constituer un élément d’une lampe suspendue ou d’un lampadaire. Il s’ensuit qu’il ne peut être exclu que l’appareil d’éclairage représenté par le dessin ou modèle antérieur ne soit pas utilisé de la même manière que le plafonnier représenté par le dessin ou modèle contesté.

40      Par conséquent, il convient de considérer que la chambre de recours a conclu, à juste titre, que le dessin ou modèle contesté présentait un caractère individuel au sens de l’article 6 du règlement no 6/2002.

41      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante.

42      En effet, en premier lieu, la requérante fait valoir que, dans l’industrie des appareils d’éclairage, les dispositifs de fixation sont, en règle générale, banals, de sorte que ce sont les têtes d’éclairage qui déterminent l’impression globale des dessins ou modèles. La requérante relève d’ailleurs que deux des trois représentations du dessin ou modèle contesté portent spécifiquement sur les têtes d’éclairage alors qu’aucune ne porte spécifiquement sur le dispositif de fixation.

43      À cet égard, il convient de relever que, s’agissant de l’appréciation de l’impression globale produite par les dessins ou modèles sur l’utilisateur averti, ce dernier n’accorde qu’une attention limitée aux éléments qui sont totalement banals et communs à tous les exemples du type de produit en cause et se concentre sur les caractéristiques qui sont arbitraires ou qui diffèrent de la norme [voir arrêt du 21 juin 2017, Kneidinger/EUIPO – Topseat International (Abattant de toilettes), T‑286/16, non publié, EU:T:2017:411, point 45 et jurisprudence citée].

44      Toutefois, en l’espèce, il importe, premièrement, de noter que la requérante se borne à invoquer, au soutien de son allégation selon laquelle le dispositif de fixation de l’appareil d’éclairage représenté par le dessin ou modèle contesté serait banal, d’une part, que le degré de liberté du créateur est, en substance, faible s’agissant du dispositif de fixation et, d’autre part, que l’intervenante aurait admis, lors de la procédure devant l’EUIPO, que la forme ovale dudit dispositif était banale.

45      Or, d’abord, il convient de rappeler que, ainsi que cela a été mentionné au point 30 ci-dessus, le degré de liberté du créateur est élevé s’agissant du dispositif de fixation, pris individuellement. Ensuite, il résulte de la jurisprudence citée au point 23 ci-dessus que plus la liberté du créateur est restreinte, plus les différences mineures entre les dessins ou modèles en conflit suffisent à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti. Par conséquent, considérer que le degré de liberté du créateur est faible s’agissant du dispositif de fixation est de nature à rendre ledit dispositif moins banal pour l’utilisateur averti et non l’inverse. Enfin, la requérante ne conteste pas le fait que le dispositif de fixation ne saurait être considéré comme étant commun à tous les plafonniers de sorte que, eu égard à la jurisprudence citée au point 43 ci-dessus, il ne peut être présumé que ledit dispositif n’attire pas l’attention de l’utilisateur averti.

46      Il importe, deuxièmement, de relever que le fait que deux des trois représentations du dessin ou modèle contesté ne comprennent pas certains éléments de l’appareil d’éclairage en cause n’est pas de nature à modifier l’impression globale produite par ledit dessin ou modèle sur l’utilisateur averti dès lors que l’ensemble de ces éléments sont présents sur au moins une des représentations aptes à être reproduites, ce qui n’est pas contesté en l’espèce.

47      En deuxième lieu, d’une part, la requérante affirme, sans étayer davantage son propos, que les barres courtes ainsi que les articulations oscillo-rotatives sont banales de sorte qu’elles ne sauraient influencer l’impression globale produite par le dessin ou modèle contesté. Toutefois, il résulte du point 39 ci-dessus que les articulations oscillo-rotatives et, par voie de conséquence, les barres courtes dans lesquelles elles s’insèrent sont nécessaires pour orienter les têtes d’éclairage. Par conséquent, il y a lieu de noter que les articulations oscillo-rotatives et les barres courtes peuvent influer sur la manière dont l’appareil d’éclairage représenté par le dessin ou modèle contesté est utilisé, de sorte qu’elles ne sauraient être ignorées par l’utilisateur averti et qu’elles constituent ainsi un élément pertinent aux fins de l’appréciation de l’impression globale produite par ledit dessin ou modèle.

48      D’autre part, la requérante soutient que le nombre de têtes d’éclairage est sans incidence sur l’impression globale produite par le dessin ou modèle contesté dans la mesure où ce nombre est le résultat de considérations purement techniques relatives à la taille de la pièce que l’utilisateur souhaite éclairer. À cet égard, il suffit toutefois de constater, à l’instar de l’EUIPO, que le nombre de têtes d’éclairage dépend également de considérations esthétiques dès lors qu’il est possible d’adapter la puissance de l’ampoule à la taille de la pièce à éclairer sans pour autant devoir nécessairement modifier le nombre de têtes d’éclairage.

49      En troisième lieu, la requérante soutient que la chambre de recours a considéré, à tort, que l’appareil d’éclairage représenté par le dessin ou modèle contesté contenait des articulations oscillo-rotatives alors que les représentations « statiques » de ce dessin ou modèle ne permettraient pas de déduire que les différents éléments dudit appareil d’éclairage possédaient une faculté de mouvement les uns par rapport aux autres.

50      À cet égard, il suffit de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, les représentations du dessin ou modèle contesté montrent effectivement les articulations oscillo-rotatives sous plusieurs angles, de sorte qu’il peut être déduit desdites représentations que les têtes d’éclairage peuvent être orientées dans différentes directions par rapport aux barres courtes.

51      En quatrième lieu, la requérante soutient, en substance, que, dans la mesure où le produit représenté par le dessin ou modèle antérieur se limite à une tête d’éclairage, il convient, aux fins de déterminer si le dessin ou modèle contesté présente ou non un caractère individuel, de ne prendre en considération que la tête d’éclairage représentée par ledit dessin ou modèle, à l’exclusion du dispositif de fixation et de la seconde tête d’éclairage, et ce d’autant plus que ces derniers seraient banals.

52      À cet égard, il convient de rappeler que, pour qu’un dessin ou modèle puisse être considéré comme présentant un caractère individuel, l’impression globale que ce dessin ou modèle produit sur l’utilisateur averti doit être différente de celle produite sur un tel utilisateur non pas par une combinaison d’éléments isolés, tirés de plusieurs dessins ou modèles antérieurs, mais par un ou plusieurs dessins ou modèles antérieurs, pris individuellement (arrêt du 19 juin 2014, Karen Millen Fashions, C‑345/13, EU:C:2014:2013, point 35).

53      Or, en l’espèce, nonobstant le fait que certains éléments du dessin ou modèle contesté aient déjà pu faire l’objet d’une divulgation, il convient de prendre en considération, ainsi qu’il résulte des points 42 à 48 ci-dessus, tous les éléments dudit dessin ou modèle aux fins d’apprécier l’impression globale produite par celui-ci et ainsi de déterminer si cette impression globale diffère de celle produite par le dessin ou modèle antérieur.

54      Par conséquent, il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu d’écarter la seconde branche du moyen unique invoqué par la requérante et, partant, de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

55      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Eglo Leuchten GmbH est condamnée aux dépens.

Gervasoni

Kowalik-Bańczyk

Mac Eochaidh

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 février 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.