Language of document : ECLI:EU:F:2011:134

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)

13 septembre 2011 (*)

« Fonction publique – Notation – Rapports de notation – Avis du comité des rapports – Dégradation des appréciations analytiques – Dialogue entre le noté et le notateur – Consultation des différents supérieurs hiérarchiques – Connaissance du travail du noté par le deuxième notateur – Motivation – Prise en compte des congés de maladie »

Dans l’affaire F‑4/10,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

Christiana Nastvogel, fonctionnaire du Conseil de l’Union européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Mes S. Orlandi, A. Coolen, J.‑N. Louis et É. Marchal, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. M. Vitsentzatos et Mme K. Zieleśkiewicz, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre),

composé de M. P. Mahoney, président, M. H. Kreppel et Mme M. I. Rofes i Pujol (rapporteur), juges,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er décembre 2010,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 18 janvier 2010 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 27 janvier suivant), Mme Nastvogel a introduit le présent recours, tendant à l’annulation de son rapport de notation établi pour la période allant du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2007 (ci-après le « rapport attaqué »).

 Cadre juridique

2        L’article 43 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne, tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004 (JO L 124, p. 1), entré en vigueur le 1er mai 2004 (ci-après le « statut »), prévoit :

« La compétence, le rendement et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire font l’objet d’un rapport périodique établi au moins tous les deux ans, dans les conditions fixées par chaque institution conformément à l’article 110 [du statut]. Chaque institution arrête des dispositions prévoyant le droit de former, dans le cadre de la procédure de notation, un recours qui s’exerce préalablement à l’introduction d’une réclamation conformément à l’article 90, paragraphe 2[, du statut].

[…]

Ce rapport est communiqué au fonctionnaire. Celui-ci a la faculté d’y joindre toutes observations qu’il juge utiles. »

3        La décision du Conseil de l’Union européenne du 19 octobre 1981 fixant les dispositions d’exécution de l’article 43 du statut, relatives aux rapports de notation (ci-après les « DGE »), prévoit :

« Article 2

[…]

2. Tout fonctionnaire est noté par deux notateurs choisis de manière [à ce] que le premier soit suffisamment proche du fonctionnaire noté pour pouvoir apprécier en toute connaissance les mérites de celui-ci et que le deuxième bénéficie d’un recul suffisant pour pouvoir juger de l’ensemble du dossier.

[…]

4. Avant l’établissement du rapport de notation par le premier notateur, un entretien intervient entre celui-ci et le fonctionnaire à noter.

Article 3

1. Le rapport de notation est établi selon les procédures définies au chapitre II.

2. Si, à l’issue des procédures d’établissement du rapport de notation, le fonctionnaire noté n’accepte pas le contenu de ce dernier, il peut, dans un délai de trois mois, demander l’intervention du comité des rapports selon la procédure définie au chapitre III.

[…]

Article 7

Désaccord du fonctionnaire noté avec le premier notateur sur le rapport initial, mais acceptation des conclusions ultérieures du premier notateur par le fonctionnaire noté

1. Lorsque le fonctionnaire noté n’est pas d’accord sur le rapport établi par le premier notateur, il peut, dans un délai de dix jours ouvrables après réception du rapport :

–        demander un entretien avec le premier notateur, entretien qui doit avoir lieu dans les sept jours ouvrables à compter de la date de la demande,

et/ou

–        apporter des remarques sur le rapport et les accompagner d’une demande de révision de ce dernier.

Le rapport doit être envoyé au premier notateur dans un délai de dix jours ouvrables.

2. Après l’entretien ou après réception de la demande de révision, le premier notateur établit un nouveau rapport ou maintient le rapport initial et le transmet au fonctionnaire noté, dans un délai de sept jours ouvrables.

[…]

Article 8

Désaccord du fonctionnaire noté avec le premier notateur sur le rapport initial et non-acceptation des conclusions ultérieures du premier notateur par le fonctionnaire noté

1. La procédure commence conformément à l’article 7, paragraphes 1 et 2[, des DGE].

2. Lorsque le fonctionnaire noté n’accepte pas les conclusions du premier notateur, il signe le rapport, en y ajoutant une demande de révision par le deuxième notateur, et le retourne au premier notateur, dans un délai de sept jours ouvrables.

3. Le premier notateur transmet le rapport sans délai au deuxième notateur.

4. Le deuxième notateur établit un nouveau rapport, qui se référera expressément au rapport du premier notateur et aux remarques du fonctionnaire noté, et le transmet à ce dernier, dans un délai de quatorze jours ouvrables.

5. La procédure continue alors conformément à l’article 6, paragraphe 4[, des DGE].

Chapitre III

Intervention du comité des rapports

Article 9

Procédure

1. Le comité des rapports est chargé d’établir un avis motivé sur chaque demande d’intervention dont il est saisi. Une telle demande doit être introduite par le fonctionnaire noté dans le délai de trois mois visé à l’article 6, paragraphe 4[, sous b), des DGE] auprès du directeur général de l’[a]dministration qui la transmet au président du comité des rapports.

2. Le comité des rapports procède à toute audition et demande tout document ou renseignement écrit qu’il juge utiles à la formation de son avis. Le fonctionnaire noté et le deuxième notateur ont le droit d’être entendus.

3. Le comité des rapports communique dans un délai de deux mois son avis au directeur général de l’[a]dministration qui en transmet copie sans délai au deuxième notateur et au fonctionnaire noté.

4. Le deuxième notateur établit le rapport définitif en suivant l’avis du comité des rapports dans la mesure où il le partage.

5. Le deuxième notateur transmet le rapport au fonctionnaire noté dans un délai de quatorze jours ouvrables.

6. Le fonctionnaire noté signe le rapport et le transmet au directeur général de l’[a]dministration par voie hiérarchique dans un délai de dix jours ouvrables.

7. La durée de la procédure d’intervention ne peut dépasser trois mois à compter de la date d’introduction de la demande d’intervention, conformément au paragraphe 1 [du présent article]. »

4        Le guide de la notation porté à la connaissance du personnel du Conseil par la communication no 99/89 F, du 28 juillet 1989, et entré en vigueur à la date d’adoption du rapport attaqué, dispose dans sa première partie :

« C. Notateurs

[…]

II. Exceptions et cas particuliers

[…]

2. Cas particuliers

[…]

b) Changement d’affectation du fonctionnaire noté

–        Lorsque ce changement est intervenu depuis moins de six mois, la notation s’effectue selon la procédure définie sous a).

–        Lorsque ce même changement est intervenu depuis [six] mois ou plus, le premier notateur doit consulter les responsables du service ‘antérieur’, qui sont tenus d’apposer leur[s] visa et éventuelles remarques sous la rubrique appropriée du formulaire de notation.

c) Travail effectif dans un service autre que le service d’affectation

–        Pour toute la période couverte par la notation.

Dans ce cas, la notation est établie par les notateurs du service dans lequel le fonctionnaire exerce effectivement ses fonctions.

–        En cas de mise à disposition temporaire d’un autre service

Les procédures suivantes sont applicables selon les périodes en cause[ :]

–        mise à disposition pendant une durée d’au moins [six] mois :

même procédure que sous a) ;

–        mise à disposition pour une période comprise entre [trois] et [six] mois :

le premier notateur doit consulter les responsables du service à la disposition duquel le fonctionnaire noté a été mis ; ces responsables sont tenus d’apposer leur[s] visa et éventuelles remarques sous la rubrique appropriée du formulaire de notation ;

–        mise à disposition pour une période inférieure à [trois] mois :

le premier notateur peut consulter les responsables du service à la disposition duquel le fonctionnaire noté a été mis. Le fonctionnaire peut également demander que ces responsables soient consultés. Après consultation, ces mêmes responsables sont tenus d’apposer leur[s] visa et éventuelles remarques sous la rubrique appropriée du formulaire de notation.

[…]

D. Préparation de la notation

[…]

II. Consultations par les notateurs

1. Avant de noter le fonctionnaire, les notateurs procèdent à la consultation des fonctionnaires qui, en raison de leur compétence, de leur expérience et de leur collaboration directe et suivie avec le noté, sont à même de formuler en connaissance de cause une appréciation significative sur ses prestations. Le noté peut aussi demander la consultation expresse de fonctionnaires ayant les qualifications précitées.

[…]

III. Entretien entre le premier notateur et le fonctionnaire noté

1. Avant l’établissement du rapport de notation par le premier notateur, un entretien doit intervenir entre celui-ci et le fonctionnaire à noter. […] »

 Faits à l’origine du litige

5        La requérante, fonctionnaire de grade AST 4, est entrée au service des institutions de l’Union européenne le 1er avril 1986 et est affectée depuis le 1er novembre 2001 à l’unité « Policy » du secrétariat général du Conseil.

6        Le rapport de notation de la requérante établi pour la période d’évaluation comprise entre le 1er janvier 2005 et le 30 juin 2006 (ci-après le « rapport de notation établi au titre du précédent exercice d’évaluation ») lui attribuait une appréciation « très bon » et douze appréciations « bon ».

7        Pendant la période d’évaluation faisant l’objet du rapport attaqué, comprise entre le 1er juillet 2006 et le 31 décembre 2007, la requérante a travaillé à la task force « Nations unies, Amérique latine » relevant de l’unité « Policy » du secrétariat général du Conseil, sous l’autorité du premier notateur et occasionnellement sous celle de M. T. Elle a également travaillé au sein de la direction générale (DG) « Affaires extérieures et politico-militaires » (ci-après la « DG ‘Affaires extérieures’ ») sur le dossier Amérique latine sous l’autorité de Mme A. Selon la requérante, de juillet 2006 à septembre 2007, 90 % de son temps de travail aurait été consacré à l’unité « Policy » et 10 % à la DG « Affaires extérieures », puis à compter de septembre 2007, 30 % à l’unité « Policy » et 70 % à la DG « Affaires extérieures ». Selon le premier notateur, la requérante aurait travaillé à 80 % pour la DG « Affaires extérieures » sur l’ensemble de la période considérée.

8        Le 23 juin 2008, le premier notateur a signé le rapport de notation initial de la requérante pour la période allant du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2007 (ci-après le « rapport du premier notateur »). Ce rapport lui attribuait dix appréciations « bon » et trois appréciations « passables ». Il mentionnait notamment que, compte tenu du niveau et de la qualité des prestations fournies pendant la période de référence par la requérante, celle-ci pouvait prétendre à l’attestation prévue par l’article 10, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut.

9        Le 24 juin 2008, la requérante a eu un entretien avec le premier notateur au sujet de son rapport de notation.

10      Le 14 juillet 2008, la requérante a introduit une demande de révision du rapport du premier notateur.

11      Le 1er septembre 2008, le deuxième notateur a établi un rapport identique au rapport du premier notateur (ci-après le « rapport du deuxième notateur »).

12      Par note datée du 28 novembre 2008, reçue par l’administration le 2 décembre suivant, la requérante a saisi le comité des rapports.

13      Le 6 février 2009, le comité des rapports a rendu son avis, aux termes duquel il recommandait en conclusion « que le deuxième notateur établisse un rapport de notation final conformément à l’article 9, paragraphe 4, [des DGE] et [que] ce rapport contienne une appréciation générale suffisamment détaillée et claire, conformément au [g]uide de la notation, qui devrait, notamment, justifier [les] appréciation[s] analytique[s] […] et exposer les motifs de chaque modification par rapport à l’appréciation figurant dans les rapports antérieurs ». Les observations du comité des rapports étaient les suivantes :

« 20. Le comité déplore que les rapports de notation ne semblent pas revêtir un degré de priorité élevé pour les premier et deuxième notateurs. Cela ressort de la circonstance que le contenu du rapport concernant [la requérante] ainsi que les procédures suivies pour son élaboration ne sont pas conformes aux exigences [des DGE] ni au [g]uide de la notation.

21. Pour ce qui concerne la procédure, le premier notateur aurait dû avoir un entretien avec [la requérante] avant d’établir le rapport (article 2, paragraphe 4, [des DGE]). Il eût été opportun, comme le recommande le [g]uide [de la notation], même si ce n’était pas une obligation en l’occurrence, qu’il consultât ses collègues de la DG [‘Affaires extérieures’] pour qui [la requérante] avait travaillé également au cours de l’exercice de notation. Après la demande de révision, le deuxième notateur aurait dû établir un nouveau rapport (article 8, paragraphe 4, [des DGE]).

22. Pour ce qui concerne le contenu du rapport, le [c]omité ne dispose d’aucun élément lui permettant de suggérer une modification de l’appréciation analytique. Tant le premier notateur que [Mme A.] ont donné des exemples des raisons pour lesquelles ils estiment que l’appréciation ‘passable’ correspond à la qualité et à la rapidité d’exécution du travail. Leur position est moins claire s’agissant du sens des responsabilités. En effet, le [c]omité estime que [l’appréciation] ‘passable’ pourrait ne pas être une appréciation équitable de cette compétence. Il a entendu de la bouche de [M. T.] comment [la requérante] l’a assisté en l’absence de sa secrétaire alors que cette tâche ne relevait pas de sa description de fonctions. En outre, les faits montrent que [la requérante] n’avait pas reçu d’instructions claires quant à la manière [dont elle devait] répartir son temps de travail entre les différents collègues pour lesquels elle travaillait ou […] de classer son travail par priorités. Le [c]omité a également le sentiment que [la requérante] a une attitude responsable vis-à-vis de son travail et tente de mettre en œuvre au mieux ses aptitudes. Dans ces circonstances, il estime qu’une [appréciation] ‘bon’ serait plus appropriée pour ce qui est du sens des responsabilités.

23. Le contenu du rapport est d’avantage entaché d’erreurs s’agissant de l’appréciation générale. En fait, celle-ci devrait justifier la notation effectuée par le notateur et exposer les [aptitudes] du fonctionnaire noté ainsi que ses qualités et ses défauts. Le notateur devrait donner des éléments concrets permettant d’illustrer ses commentaires. L’appréciation générale figurant dans le rapport de notation de [la requérante] ne satisfait pas à ces critères. Il contient des considérations sommaires, obscures et contradictoires qui ne permettent pas de justifier [des] appréciation[s] analytique[s] moins favorable[s] que celle[s] du précédent rapport. S’il est vrai que le [g]uide de la notation prévoit que le notateur doit justifier chaque mention ‘excellent’ ou ‘laisse à désirer’, cela ne signifie pas que les autres notations ne doivent pas faire l’objet d’une justification. En effet, à défaut de justification de la [régression] de[s] appréciation[s] d’un rapport à l’autre, le lecteur [du rapport d’évaluation] devra présumer que le rendement de [la requérante] s’est dégradé. Toutefois, le premier notateur a déclaré au [c]omité qu’il n’en était rien. Au contraire, c’était son appréciation faite dans les rapports antérieurs qui ne reflétait pas la véritable situation.

24. Le [c]omité n’a pas de raison de mettre en doute l’affirmation du premier notateur [selon] laquelle les absences de [la requérante] n’ont pas eu d’incidence sur son appréciation. Toutefois, de manière générale, le [c]omité rappelle que les notateurs devraient faire en sorte d’éviter de donner l’impression que des absences justifiées ont une quelconque incidence sur le rapport de notation d’un fonctionnaire.

25. Le [c]omité a été frappé par les différences de perception du temps de travail consacré par [la requérante] respectivement à l’unité ‘Policy’ et à la DG [‘Affaires extérieures’]. Il préconise que, si un fonctionnaire travaille pour plus d’une unité ou d’un département, la répartition du temps de travail et les priorités fassent l’objet d’instructions claires. Il serait injuste que l’absence de structure claire implique une baisse d’appréciation de ceux qui ont dû faire face aux problèmes que cette carence engendre inévitablement.

26. En outre, il serait souhaitable, notamment dans les cas où un notateur a des raisons de croire qu’un rapport pourrait être contesté, de conserver une trace écrite des étapes de la procédure d’appréciation et des événements survenant au cours de l’exercice de notation et qui fondent le contenu du rapport.

27. Enfin, le rapport n’aurait pas dû mentionner la procédure d’attestation. À la différence de ce qui vaut pour la certification, la référence aux aptitudes du fonctionnaire dans le rapport d’évaluation n’est pas une condition préalable pour entrer en ligne de compte pour une attestation. Au contraire, mentionner cette référence est inutile voire indésirable car cela peut susciter des attentes irréalistes. »

14      Le 3 mars 2009, conformément à l’avis du comité des rapports, le deuxième notateur a établi le rapport attaqué. Ce rapport ne mentionne plus que, compte tenu du niveau et de la qualité des prestations fournies pendant la période de référence par la requérante, celle-ci pouvait prétendre à l’attestation prévue par l’article 10, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut.

15      Par lettre datée du 18 mars 2009, le rapport attaqué a été transmis à la requérante.

16      Le 18 juin 2008, la requérante a introduit une réclamation contre le rapport attaqué, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut.

17      Par décision du 8 octobre 2009, l’autorité investie du pouvoir de nomination a rejeté la réclamation.

 Conclusions des parties

18      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler le rapport attaqué ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

19      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter la demande en annulation comme irrecevable et non fondée ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

 En droit

 Sur la recevabilité

20      Selon le Conseil, le recours serait manifestement irrecevable, car la requérante n’ayant pas indiqué à quels moyens se rattachent les différents arguments qu’elle avance, il lui serait impossible de déterminer en quoi consiste concrètement chacun des moyens soulevés et de préparer ainsi sa défense. Pour sa part, la requérante relève que le Conseil a été capable de présenter une argumentation en défense pour chacun des moyens soulevés dans la requête et conclut, par voie de conséquence, au rejet de la fin de non-recevoir.

21      À cet égard, il convient de relever que, si les arguments de la requérante sont présentés dans sa requête sans que ne soient délimités les moyens que ceux-ci soutiennent, il est néanmoins possible pour un lecteur normalement avisé de rattacher ces différents arguments aux différents moyens invoqués par la requérante comme fondement juridique à son recours. D’ailleurs, comme le fait justement remarquer la requérante, le Conseil a été, pour l’essentiel, capable de présenter une argumentation en défense. En conséquence, même si la requête est quelque peu laconique, il convient de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par le Conseil.

 Sur le fond

22      Au soutien de ses conclusions, la requérante soulève formellement quatre moyens, tirés respectivement de l’erreur manifeste d’appréciation, de l’incohérence entre les commentaires et les appréciations analytiques, de la violation des formalités substantielles visant à garantir le respect du principe d’égalité de traitement, et de la violation de l’obligation de motivation. Toutefois, eu égard à la teneur des écrits de la requérante, ces quatre moyens doivent être compris comme n’en constituant en réalité que trois, tirés :

–        de l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation, ce dont témoigneraient notamment des incohérences entre les commentaires et les appréciations analytiques ;

–        de la violation des règles de procédure régissant l’établissement des rapports de notation et des droits de la défense ;

–        de l’absence de prise en compte des congés de maladie de la requérante et de la violation de l’obligation de motivation.

23      Dans un souci de bonne administration de la justice, le Tribunal estime qu’il convient d’examiner en premier lieu le moyen tiré de l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation, puis celui tiré de l’absence de prise en compte des congés de maladie de la requérante et de la violation de l’obligation de motivation, et enfin celui tiré de la violation des règles de procédure régissant l’établissement des rapports de notation et des droits de la défense.

 Sur le moyen tiré de l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation

–       Arguments des parties

24      Pour soutenir que le rapport attaqué est entaché d’erreurs manifestes d’appréciation, la requérante fait tout d’abord valoir qu’elle s’est vu attribuer l’appréciation « passable » à la rubrique « Sens des responsabilités », alors même que le comité des rapports avait recommandé que lui soit attribuée l’appréciation « bon » et qu’en reprenant son travail avant la date d’expiration de son congé de maladie prévue par le certificat médical elle a fait preuve d’un certain sens des responsabilités.

25      Ensuite, la requérante estime que les appréciations analytiques négatives figurant dans le rapport attaqué sont en contradiction avec la phrase contenue dans le rapport du premier notateur et dans le rapport du deuxième notateur, selon laquelle elle peut prétendre à la procédure d’attestation compte tenu du niveau et de la qualité des prestations qu’elle a fournies pendant la période de référence. Certes, la requérante relève que cette phrase ne figure plus dans le rapport attaqué, mais elle considère que, comme l’aurait relevé le Tribunal dans son arrêt du 23 février 2010, Faria/OHMI (F‑7/09, point 45), les versions successives d’un rapport de notation peuvent être prises en compte afin de démontrer l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation.

26      Lors de l’audience, la requérante a soutenu que le premier notateur n’avait pu, sans violer le principe de sécurité juridique, justifier la dégradation de ses appréciations devant le comité des rapports au motif que les appréciations qu’il avait portées sur les prestations de la requérante lors des précédents exercices d’évaluation étaient surévaluées.

27      Enfin, dans ses écrits, la requérante allègue que les appréciations analytiques négatives figurant dans le rapport attaqué sont également en contradiction avec les déclarations du premier notateur devant le comité des rapports, selon lesquelles elle n’a pas démérité au cours de la période de référence.

28      En défense, le Conseil relève que la phrase relative à la capacité de la requérante à bénéficier de la procédure d’attestation ne figure pas dans le rapport attaqué. Partant, il estime que la requérante ne saurait en tirer argument.

29      S’agissant du grief tiré de ce que le premier notateur ne pouvait, sans violer le principe de sécurité juridique, justifier auprès du comité des rapports de la dégradation des appréciations contenues dans son rapport final de notation, le Conseil le considère comme étant irrecevable, car constitutif d’un grief nouveau. Sur le fond, le Conseil estime que les affirmations du deuxième notateur figurant dans le rapport attaqué, selon lesquelles la performance de la requérante avait baissé, ne seraient pas entachées d’une erreur manifeste d’appréciation, car le deuxième notateur ne se serait pas uniquement fondé sur les appréciations du premier notateur pour rédiger le rapport attaqué, mais également sur l’avis du comité des rapports.

30      Pour le surplus, le Conseil conclut au rejet du moyen sans présenter d’arguments en défense.

–       Appréciation du Tribunal

31      S’agissant de la fin de non-recevoir opposée par le Conseil à l’égard du grief tiré de la violation du principe de sécurité juridique soulevé à l’audience par la requérante, il doit être rappelé que, selon une jurisprudence constante, le juge est en droit d’apprécier, suivant les circonstances de chaque espèce, si une bonne administration de la justice justifie de rejeter au fond un moyen, sans statuer préalablement sur sa recevabilité (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 28 octobre 2010, Kay/Commission, F‑113/05, point 31, et la jurisprudence citée). Dans les circonstances de l’espèce, le Tribunal estime qu’il n’y a pas lieu d’examiner la recevabilité dudit grief, dès lors que celui-ci doit en tout état de cause être rejeté pour les motifs qui seront exposés plus loin.

32      Sur le fond, il convient de rappeler, à titre liminaire, qu’il n’appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation à celle des personnes chargées d’évaluer le travail de la personne notée, les institutions de l’Union disposant d’un large pouvoir d’appréciation pour évaluer le travail de leurs fonctionnaires (arrêt Faria/OHMI, précité, point 44, et la jurisprudence citée). Ainsi, sauf en cas d’erreur de fait, d’erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir, il n’appartient pas au Tribunal de contrôler le bien-fondé de l’appréciation portée par l’administration sur les aptitudes professionnelles d’un fonctionnaire lorsqu’elle comporte des jugements complexes de valeur qui, par leur nature même, ne sont pas susceptibles d’une vérification objective (arrêt du Tribunal de première instance du 25 octobre 2005, Cwik/Commission, T‑96/04, point 41, et la jurisprudence citée).

33      S’agissant, premièrement, du grief selon lequel l’appréciation « bien » aurait dû lui être attribuée au lieu de celle de « passable » à la rubrique « Sens des responsabilités », au motif que le comité des rapports l’avait recommandé, il y a lieu de relever que, aux termes de l’article 9, paragraphe 3, des DGE, le second notateur n’est pas lié par l’avis du comité. En conséquence, selon une jurisprudence constante, ce n’est que dans l’hypothèse où l’avis du comité des rapports ferait état de circonstances spéciales, propres à jeter le doute sur la validité ou le bien-fondé d’une appréciation contenue dans le rapport de notation, qu’une divergence entre ledit avis et le contenu du rapport de notation serait susceptible d’entraîner l’annulation du rapport de notation attaqué (voir, par analogie, en ce qui concerne l’avis du comité paritaire des notations de la Commission, arrêts du Tribunal de première instance du 12 juin 2002, Mellone/Commission, T‑187/01, point 33, et du 5 novembre 2003, Lebedef-Caponi/Commission, T‑98/02, point 61 ; en ce qui concerne l’avis du comité des rapports du Parlement, arrêt du Tribunal du 10 septembre 2009, Behmer/Parlement, F‑124/07, point 60). Or, en l’espèce, il ne ressort pas du dossier que, dans son avis, le comité des rapports ait entendu faire état de circonstances spéciales, au sens de la jurisprudence susmentionnée.

34      En effet, pour commencer, l’avis du comité selon lequel « [l’appréciation] ‘bon’ serait plus appropriée pour ce qui est du sens des responsabilités » démontre, par l’utilisation du conditionnel « serait », que le comité a uniquement recommandé l’attribution de l’appréciation « bon » à la rubrique « Sens des responsabilités », sans pour autant exclure que l’appréciation « passable » puisse être valablement attribuée à la requérante.

35      Ensuite, il ressort de la lecture de l’avis en cause que les éléments mis en avant par le comité des rapports – à savoir que la requérante avait assuré des fonctions ne relevant pas de sa fiche de poste, qu’elle n’avait pas reçu des instructions claires sur la manière dont elle aurait dû répartir son travail pour les différents supérieurs hiérarchiques sous l’autorité desquels elle avait travaillé, et que l’impression générale qui se dégageait du dossier était qu’elle avait eu une attitude responsable – l’ont été dans le but d’étayer ce qui n’était pour le comité qu’une recommandation et non pour caractériser des circonstances spéciales propres à jeter le doute sur la validité de l’appréciation « passable » attribuée à la requérante au titre du rendement.

36      Quant à l’argument tiré de ce que la requérante avait repris son travail avant la date de fin de son congé de maladie prévue par son certificat médical, si ces faits témoignent d’un certain souci de bien faire, ils ne sauraient constituer à eux seuls un élément suffisant pour démontrer que l’appréciation « bon » aurait dû lui être attribuée au lieu de « passable » à la rubrique « Sens des responsabilités ».

37      Par suite, il y a lieu de rejeter le premier grief du premier moyen comme étant non fondé.

38      En ce qui concerne, deuxièmement, la contradiction qui existerait entre les appréciations analytiques du rapport attaqué et la phrase qui figurait dans le rapport du premier notateur, selon laquelle la requérante pouvait prétendre au bénéfice de la procédure d’attestation, il doit être relevé que les DGE prévoient expressément en leur article 8, paragraphe 4, que, saisi d’une demande de révision du rapport établi par le premier notateur, « le deuxième notateur établit un nouveau rapport » : le rapport rédigé par le premier notateur et celui rédigé par le deuxième notateur s’inscrivent certes dans une même procédure, mais ils sont néanmoins des actes distincts. Il en va de même du rapport de notation définitif établi par le deuxième notateur après avis du comité des rapports, prévu par les dispositions de l’article 9, paragraphe 4, des DGE, aux termes desquelles « [l]e deuxième notateur établit le rapport définitif en suivant l’avis du comité des rapports dans la mesure où il le partage », et pour la rédaction duquel le deuxième notateur a une pleine compétence. Partant, un commentaire figurant dans le rapport du premier notateur, ainsi d’ailleurs que dans le rapport de notation du deuxième notateur, mais non repris dans le rapport attaqué ne saurait être invoqué pour démontrer que ce dernier rapport serait entaché d’une erreur manifeste d’appréciation.

39      Cette constatation n’est pas remise en cause par l’arrêt Faria/OHMI, précité, auquel se réfère la requérante, ce dernier n’étant pas transposable au cas d’espèce. En effet, dans l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt Faria/OHMI, précité, les différentes versions du rapport de notation ayant permis de mettre en lumière des incohérences étaient toutes des versions finalisées. Or, en l’espèce, le rapport du premier notateur et le rapport du deuxième notateur ne constituaient pas des actes définitifs puisque, aux termes de l’article 9, paragraphe 4, des DGE, en cas de saisine du comité des rapports, seul le rapport de notation rédigé par le deuxième notateur après avis du comité, en l’espèce le rapport attaqué, est définitif.

40      En outre, bien que le premier notateur ait indiqué, lors de son audition par le comité des rapports, que le commentaire qu’il avait formulé concernant la procédure d’attestation était une erreur, ce commentaire figurant dans les rapports respectifs du premier et du deuxième notateur n’est pas nécessairement en contradiction avec les appréciations analytiques mentionnées dans le rapport attaqué. En effet, ces appréciations, bien que d’un niveau inférieur à celles du rapport de notation établi au titre du précédent exercice d’évaluation, restent globalement positives, ce qui pouvait justifier que le premier et le deuxième notateur aient considéré que la requérante pouvait prétendre au bénéfice de la procédure d’attestation.

41      Il s’ensuit que le deuxième grief du premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

42      Au sujet des troisième et quatrième griefs, tirés, respectivement, de ce que le premier notateur ne pouvait, sans violer le principe de sécurité juridique, justifier, devant le comité des rapports, la dégradation des appréciations contenues dans le rapport attaqué au motif que les rapports de notation établis au titre des précédents exercices d’évaluation étaient surévalués, et de ce que le premier notateur aurait admis devant le comité des rapports que la requérante n’avait pas démérité au cours de la période de notation, il convient de replacer l’affirmation formulée par le premier notateur dans le contexte qui était le sien, à savoir que celui-ci avait été appelé à justifier devant le comité des rapports de la dégradation de l’évaluation analytique de la requérante, et de rappeler à ce sujet que la procédure devant le comité des rapports a notamment pour but de permettre à l’administration de rectifier certaines erreurs ou omissions entachant le rapport de notation.

43      Devant le comité des rapports, le premier notateur a justifié la dégradation des appréciations analytiques en raison non pas d’une diminution des mérites de la requérante, mais d’une surévaluation de ses mérites à l’occasion des précédents rapports de notation. Or, s’il est regrettable que le premier notateur n’ait pas fait figurer cette explication dans son rapport, force est de constater qu’elle constitue néanmoins un motif de nature à justifier la régression de la notation de la requérante, le premier notateur ayant même l’obligation, dans cette hypothèse, d’agir ainsi, afin de mettre un terme à la surévaluation des mérites de la requérante.

44      Dès lors, il suffit de constater, pour écarter le troisième grief, que le principe de sécurité juridique ne saurait être valablement invoqué pour faire obstacle à ce qu’il soit mis fin par l’administration à une situation illicite.

45      En revanche, il doit être constaté, au sujet du quatrième grief, que la justification fournie par le premier notateur contredit celle fournie par le deuxième notateur et figurant dans le rapport attaqué, selon laquelle la performance de la requérante avait baissé pendant la période de référence. Sachant que le deuxième notateur a indiqué s’être fié aux informations qui lui avaient été fournies par le premier notateur pour rédiger le rapport attaqué et qu’il ressortait en outre de l’avis du comité des rapports, dont le deuxième notateur a disposé, que la requérante n’avait pas démérité, le deuxième notateur a commis une erreur manifeste d’appréciation en indiquant que la performance de la requérante avait baissé.

46      Cette erreur manifeste d’appréciation n’ayant entaché d’illégalité que partiellement le rapport attaqué, il convient de n’annuler ce dernier qu’en ce qu’il mentionne que la performance de la requérante avait baissé pendant la période de référence et, par suite, de poursuivre l’examen des moyens, griefs et arguments soulevés à l’encontre du rapport attaqué.

 Sur le moyen tiré de l’absence de prise en compte des congés de maladie de la requérante et de la violation de l’obligation de motivation

–       Arguments des parties

47      En premier lieu, la requérante fait grief au deuxième notateur de n’avoir indiqué aucun élément concret permettant d’expliquer pourquoi les appréciations analytiques portées sur son travail sont en régression par rapport à celles figurant dans le rapport de notation établi au titre du précédent exercice d’évaluation.

48      En deuxième lieu, la requérante estime que le deuxième notateur ne justifie pas à suffisance de droit pour quelle raison il s’est écarté de l’avis du comité des rapports, recommandant que lui soit attribuée l’appréciation « bon » à la rubrique « Sens des responsabilités ».

49      En troisième lieu, la requérante affirme que le rapport attaqué aurait dû faire apparaître, dans les commentaires de la rubrique « Rendement », si le deuxième notateur avait examiné la possibilité de tenir compte de ce que ses congés de maladie l’avaient placée dans une situation plus difficile que ses collègues exerçant des tâches comparables, ainsi que les raisons pour lesquelles il en avait ou non tenu compte.

50      En quatrième lieu, la requérante reproche au deuxième notateur de ne pas avoir expliqué la manière dont il a pris en compte les difficultés particulières auxquelles elle a été confrontée pendant la période de notation, difficultés résultant du fait qu’elle a travaillé pour plusieurs services sans recevoir de consignes quant aux priorités à respecter, de son régime de travail à mi-temps ainsi que de l’absence de redistribution de son travail pendant son congé de maladie.

51      En cinquième lieu, la requérante affirme que le rapport attaqué aurait dû contenir des indications sur les modalités d’évaluation des tâches qu’elle n’a pas exercées sous l’autorité hiérarchique directe du premier notateur.

52      En défense, le Conseil estime que le rapport attaqué est suffisamment motivé. Notamment, il observe que le rapport contient, pour chaque appréciation analytique, toute une série d’exemples concrets de comportements et de situations dans lesquelles la requérante a fait preuve d’un niveau de prestations insuffisant, tels que la rédaction de notes ou la gestion des appels téléphoniques.

53      En ce qui concerne les justifications à apporter en cas de régression de la notation, le Conseil rappelle que, selon la jurisprudence, il est notamment satisfait à cette obligation lorsque le notateur constate que l’intéressé n’a pas fait preuve pendant la période de référence de qualités exceptionnellement élevées dans l’accomplissement de certaines de ses tâches, ce qui serait le cas de la requérante.

54      Au sujet de l’avis du comité des rapports, le Conseil considère que le deuxième notateur n’avait pas à expliquer spécifiquement pour quelles raisons il s’en était écarté.

55      Pour ce qui est de la prise en compte des congés de maladie de la requérante, le Conseil relève que la jurisprudence à laquelle la requérante se réfère à savoir l’arrêt du Tribunal de première instance du 6 octobre 2009, Sundholm/Commission, T‑102/08 P, point 42, concerne, d’une part, l’application de dispositions internes spécifiques relatives à la notation du personnel de la Commission européenne, d’autre part, un fonctionnaire qui avait été absent pour cause de maladie pendant les deux tiers de la période d’évaluation. Les règles applicables à la notation étant différentes au Conseil et à la Commission, et la requérante n’ayant pas été absente pendant une période aussi longue que le fonctionnaire susmentionné, le Conseil estime que cette jurisprudence ne lui est pas applicable. En revanche, le Conseil considère pertinents les passages cités par la requérante de l’arrêt Sundholm/Commission, précité, point 40, selon lesquels, lorsque l’évaluateur et le validateur, lesquels jouent à la Commission un rôle voisin de celui imparti au premier et au deuxième notateur, n’ont aucune raison de considérer que des absences justifiées d’un fonctionnaire ont pu avoir une incidence significative sur son rendement pendant la période couverte par un rapport final de notation, il ne saurait leur être reproché de ne pas avoir mentionné ni pris en compte ces absences justifiées dans ses appréciations. En l’espèce, les absences pour congé de maladie de la requérante n’ayant pas eu d’incidence significative sur son rendement pendant la période de notation, le Conseil estime qu’il n’était pas nécessaire pour le deuxième notateur d’en faire état dans le rapport attaqué.

56      S’agissant des éventuelles difficultés auxquelles la requérante aurait été confrontée durant la période d’évaluation et la manière dont ont été évaluées les tâches qu’elle a exercées sous l’autorité d’autres supérieurs hiérarchiques que le premier notateur, le Conseil rappelle que, selon la jurisprudence, il n’est pas exigé que le rapport de notation comporte une motivation spécifiant tous les éléments de fait et de droit pertinents. En tout état de cause, il relève que le rapport attaqué tient compte des différentes tâches effectuées par la requérante au cours de la période de référence, leur description figurant dans la première partie du rapport attaqué.

–       Appréciation du Tribunal

57      À titre liminaire, il convient de rappeler que les rapports de notation ne constituent pas des décisions au sens de l’article 25 du statut, mais sont régis par les dispositions spéciales visées à l’article 43 du statut (arrêt du Tribunal de première instance du 21 octobre 1992, Maurissen/Cour des comptes, T‑23/91, point 39).

58      Il résulte néanmoins d’une jurisprudence constante que l’administration a l’obligation de motiver tout rapport de notation de façon suffisante et circonstanciée, afin de mettre l’intéressé en mesure de formuler des observations sur cette motivation, le respect de ces exigences étant d’autant plus important lorsque la notation connaît une régression par rapport à celle antérieure (arrêts du Tribunal de première instance, Mellone/Commission, précité, point 27, et du 25 octobre 2005, Micha/Commission, T‑50/04, point 36 ; arrêt du Tribunal du 10 novembre 2009, N/Parlement, F‑93/08, point 86). À cet égard, il a été jugé qu’il est satisfait à cette obligation lorsque le notateur constate que l’intéressé n’a pas fait preuve, pendant la période couverte par le rapport de notation contesté, de qualités exceptionnellement élevées dans l’accomplissement de certaines de ses tâches (arrêt du Tribunal de première instance du 16 juillet 1992, Della Pietra/Commission, T‑1/91, point 32)

59      En l’espèce, s’agissant du premier grief, tiré de ce que le rapport attaqué ne serait pas suffisamment motivé car ne comportant pas de justification de la dégradation des appréciations analytiques, il doit être relevé que la notation de la requérante a connu, entre le rapport de notation établi au titre du précédent exercice d’évaluation et le rapport attaqué, une régression, puisque, pour la période allant du 1er janvier 2005 au 30 juin 2006, elle avait eu une appréciation « très bon » et douze appréciations « bon », alors que pour la période allant du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2007 elle n’a eu que dix appréciations « bon » et trois appréciations « passable ». Aussi, conformément à la jurisprudence citée au point précédent, le notateur était-il tenu d’apporter une motivation particulière au rapport attaqué.

60      Cependant, force est de constater que le deuxième notateur a, de manière circonstanciée, motivé son évaluation. Le rapport attaqué indique en effet :

« […] la performance générale de la requérante pendant la période de référence s’est en quelque sorte dégradée par rapport aux précédents rapports [de notation]. Malgré des avertissements réitérés de la part [du premier notateur] afin qu’elle améliore son travail, [la requérante] manque encore de concentration et d’intérêt, ce qui a pour conséquence que la qualité de son travail est moins que satisfaisante.

[Le premier notateur] m’a également signalé, en ce qui concerne les connaissances requises pour la réalisation des tâches [qui lui ont été confiées], et malgré plusieurs années de travail à la task force [‘Nations unies, Amérique latine’] et à la DG ‘Affaires extérieures’ [sur] le dossier Amérique latine, que [la requérante] n’a pas encore acquis une connaissance suffisante des méthodes de travail et des procédures du secrétariat général du Conseil et des exigences du dossier. Le premier notateur a constaté que [la requérante] est incapable de définir des priorités : par exemple entre une démarche ou un document importants et un problème moins important […] En conséquence, des problèmes inattendus de dernière minute surviennent pour la task force. Ces éléments justifient une dégradation [des appréciations analytiques] depuis le [rapport de notation établi au titre du précédent exercice d’évaluation] (de ‘très bien’ à ‘bien’). »

61      En outre, il convient d’ajouter que, pour apprécier si un rapport de notation est suffisamment motivé, il y a lieu de tenir compte de l’ensemble des informations ayant été portées à la connaissance du fonctionnaire concerné et pas seulement des informations figurant dans ledit rapport (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 28 mai 1998, W/Commission, T‑78/96 et T‑170/96, point 141). Or, en l’espèce, la requérante a pu prendre connaissance, par la lecture de l’avis du comité des rapports, des explications fournies par le premier notateur concernant la dégradation de ses appréciations analytiques, à savoir que ses précédents rapports de notation avaient été surévalués. Par suite, le rapport attaqué doit être considéré comme suffisamment motivé en ce qui concerne la dégradation des appréciations analytiques par rapport à celles du rapport de notation établi au titre du précédent exercice d’évaluation.

62      En conséquence, il convient de rejeter le premier grief comme étant non fondé.

63      Pour ce qui est du deuxième grief, tenant à ce que le rapport attaqué ne contiendrait pas d’explication sur les raisons ayant conduit le deuxième notateur à s’écarter de l’avis du comité des rapports, si cette omission pouvait utilement être mise en exergue, dans la mesure où ledit avis étant particulièrement détaillé le deuxième notateur se devait d’y répondre minutieusement, afin de demander à ce que soit engagée la responsabilité non contractuelle du Conseil pour faute de service au regard du principe de bonne administration, elle n’est pas susceptible de fonder, en l’espèce, l’annulation du rapport attaqué pour violation de l’obligation de motivation. En effet, dès lors que le rapport attaqué comporte une motivation suffisante et que l’avis du comité ne fait pas état de circonstances spéciales propres à jeter le doute sur la validité ou le bien-fondé des appréciations portées par le premier notateur, il ne saurait être exigé du deuxième notateur qu’il fournisse des explications complémentaires sur les raisons qui le conduisent à ne pas suivre les recommandations du comité des rapports.

64      Partant, le deuxième grief doit être rejeté comme étant non fondé.

65      S’agissant du troisième grief, relatif à l’absence d’indication dans le rapport attaqué permettant de déterminer si le deuxième notateur a examiné la possibilité d’attribuer de meilleures appréciations à la requérante du fait qu’en raison de ses congés de maladie elle a bénéficié de moins de temps pour réaliser les tâches qui lui ont été confiées, il doit être rappelé que, si les appréciations attribuées à un fonctionnaire au titre du rendement peuvent être augmentées de manière à prendre en considération les conditions dans lesquelles il a exercé ses fonctions en dépit du fait qu’il a disposé de moins de temps effectif de travail en raison d’absences pour cause de maladie, cette prise en compte n’est pas automatique. Elle n’est qu’une faculté pour les rédacteurs du rapport de notation, laquelle ne se transforme en obligation que lorsque les circonstances le justifient (voir, par analogie, arrêt Sundholm/Commission, précité, points 39 et 40).

66      En outre, il convient d’ajouter qu’il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un rapport de notation satisfait aux dispositions spéciales visées à l’article 43 du statut doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais également de son contexte, ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, par analogie, arrêt du Tribunal de première instance du 8 mars 2005, Vlachaki/Commission, T‑277/03, point 83, et la jurisprudence citée). Partant, dans des circonstances où le notateur n’a pas de raison de considérer que les absences justifiées du noté ont pu avoir une incidence à la hausse significative sur son rendement, il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir mentionné, ni pris en compte, une telle circonstance dans son rapport de notation.

67      En l’espèce, la requérante a été absente pour cause de maladie 3 jours en 2006 et 47 jours en 2007, dont 14,5 en raison d’un mi-temps thérapeutique. Bien que ces chiffres soient élevés pour l’année 2007, il doit être relevé que la requérante ne se prévaut pas de ce que, en raison de ses absences pour cause de maladie, sa charge de travail aurait été plus importante ou qu’elle aurait eu moins de temps pour réaliser le travail qui lui avait été confié. Il ne ressort pas non plus du dossier que lesdites absences aient eu une incidence telle sur son rendement qu’il aurait été nécessaire de les prendre en compte de manière positive dans sa notation au titre du rendement. En revanche, il doit être relevé que, bien que la requérante se soit plainte auprès du comité des rapports de ce que ses absences médicalement justifiées auraient été la cause de la dégradation des appréciations contenues dans le rapport attaqué, le comité a estimé qu’il n’y avait pas de raison de mettre en doute l’affirmation du premier notateur selon laquelle les absences médicalement justifiées de la requérante n’avaient pas eu d’incidence sur son évaluation.

68      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer qu’en tout état de cause, les absences médicalement justifiées de la requérante n’ont pas pu avoir d’incidence à ce point manifeste sur son rendement pour qu’il faille annuler le rapport attaqué au motif que le deuxième notateur aurait dû prendre en compte cette circonstance ou seulement même en faire état.

69      En conséquence, il y a lieu de rejeter le troisième grief comme étant non fondé.

70      Concernant, quatrièmement, l’absence d’explication dans le rapport attaqué sur la manière dont le deuxième notateur a tenu compte du fait que la requérante a travaillé pour plusieurs services sans recevoir de consignes quant aux priorités à respecter, de son régime de travail à mi-temps et de l’absence de redistribution de son travail pendant son congé de maladie, il doit être rappelé que, le notateur disposant d’un large pouvoir d’appréciation pour évaluer le travail des notés, l’existence d’un tel pouvoir d’appréciation présuppose que le notateur n’ait pas l’obligation de faire figurer dans le rapport de notation tous les éléments de fait et de droit pertinents à l’appui de son évaluation, ni celle d’examiner et de répondre à tous les points contestés par le noté (arrêt du Tribunal du 10 septembre 2009, van Arum/Parlement, F‑139/07, point 88).

71      S’il est regrettable que les supérieurs hiérarchiques de la requérante n’aient pas pris le soin de lui donner des consignes sur la manière dont elle devait répartir son temps de travail entre les différents services pour lesquels elle travaillait, dès lors que cette absence de consigne a pu être source d’insécurité pour la requérante et qu’il est ambitieux d’espérer qu’un fonctionnaire relevant du parcours de carrière AST prenne l’initiative de fixer lui-même ses priorités, il doit être constaté que la requérante n’a pas soulevé le présent argument au soutien d’une erreur de droit, mais au soutien de la violation de l’obligation de motivation. Or, il ressort implicitement de la motivation du rapport attaqué, d’une part, que le deuxième notateur a pris en compte la circonstance que la requérante a travaillé pour plusieurs services sans recevoir de consignes quant aux priorités à respecter, puisqu’il a indiqué au début du rapport les différentes fonctions et affectations de la requérante pendant la période de notation concernée, d’autre part, qu’il a considéré qu’il revenait à la requérante d’établir ses priorités entre les différentes tâches qui lui étaient confiées, puisqu’il a repris à son compte l’affirmation du premier notateur selon laquelle précisément elle était incapable d’établir des priorités dans son travail.

72      Pour ce qui est de l’absence d’explication dans le rapport attaqué quant à la prise en considération par le deuxième notateur du régime de travail à mi-temps de la requérante, cet argument doit être rejeté dès lors qu’il se confond avec le troisième grief, relatif à la prise en compte des congés de maladie, lequel a été rejeté au point 69 du présent arrêt.

73      Enfin, s’agissant de l’absence d’explication dans le rapport attaqué sur la manière dont le deuxième notateur a tenu compte de ce que le travail de la requérante n’avait pas été redistribué pendant son absence pour congé de maladie, il y a lieu de relever que le dossier ne révélant l’existence d’aucune norme imposant à l’administration de redistribuer le travail de la requérante pendant son congé de maladie, la requérante ne saurait faire grief au deuxième notateur de ne pas avoir considéré qu’il devait apporter un surplus de motivation relatif à cette absence de redistribution dans le rapport attaqué.

74      Par suite, le quatrième grief doit être rejeté comme étant non fondé.

75      En ce qui concerne, cinquièmement, le grief tiré de ce que le rapport attaqué ne contiendrait pas d’indication sur la façon dont les tâches qui n’ont pas été exercées sous l’autorité hiérarchique directe du premier notateur ont été évaluées, il suffit, pour l’écarter, de rappeler qu’il ne saurait être exigé que la motivation du rapport de notation fasse état de toutes les circonstances factuelles s’étant produites pendant l’exercice de notation (voir point 70 du présent arrêt).

76      Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l’absence de prise en compte des congés de maladie de la requérante et de la violation de l’obligation de motivation doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur le moyen tiré de la violation des règles de procédure régissant l’établissement des rapports de notation ainsi que des droits de la défense

–       Arguments des parties

77      Premièrement, la requérante affirme que, conformément au guide de la notation, dès lors qu’elle a exercé ses fonctions dans plusieurs services, ses différents supérieurs hiérarchiques auraient dû être consultés pour l’établissement de sa notation, ce qui n’a pas été le cas. Sur ce point, la requérante conteste l’affirmation en défense du Conseil selon laquelle il lui appartenait de formuler une demande en ce sens, car selon elle l’administration ne pouvait pas ignorer qu’elle avait travaillé pour plusieurs unités.

78      Deuxièmement, la requérante reproche au deuxième notateur de ne pas avoir disposé de suffisamment d’informations et de s’être basé sur les seules déclarations du premier notateur pour établir le rapport attaqué. La requérante relève que le deuxième notateur n’a pas organisé d’autres auditions en plus de celles réalisées par le comité des rapports. Or, ce dernier aurait implicitement constaté qu’il n’avait pas disposé de suffisamment d’informations pour rendre son avis.

79      Troisièmement, la requérante fait grief au deuxième notateur de ne pas avoir eu d’entretien avec elle avant l’établissement du rapport attaqué, contrairement aux préconisations du comité des rapports. En outre, selon la requérante, une demande de révision devant s’interpréter aux termes de l’article 43 du statut comme étant un recours, une telle demande aurait un effet dévolutif qui obligerait le deuxième notateur à reprendre la procédure d’élaboration du rapport de notation ab nihilo. Enfin, la requérante estime qu’un entretien était nécessaire, afin de respecter les droits de la défense, car, à défaut, elle n’a pas pu faire valoir ses observations sur les éléments nouveaux qui ont été pris en compte par le deuxième notateur lorsqu’il a réécrit son rapport de notation après l’avis du comité des rapports.

80      En défense, le Conseil fait observer, en premier lieu, que l’avis du comité des rapports mentionnait uniquement que le deuxième notateur devait préparer un nouveau rapport de notation et non que ce dernier devait organiser un nouvel entretien. En outre, le Conseil observe que, en cas de demande de révision, le guide de la notation recommande uniquement la tenue d’un entretien avec le deuxième notateur et qu’il n’existe aucune autre norme en ce sens. De plus, le Conseil relève que, selon la jurisprudence, l’absence d’entretien du notateur avec le noté n’est pas susceptible d’entraîner l’annulation du rapport de notation lorsque le noté a eu, par ailleurs, l’occasion de présenter des observations écrites. Or, en l’espèce, il estime que la requérante a pu exposer son point de vue à plusieurs reprises, lors de son entretien avec le premier notateur le 24 juin 2008, dans sa demande de révision, dans sa demande d’intervention du comité des rapports et, également, lors de son audition devant ledit comité. Enfin, le Conseil souligne que le premier notateur entretenait avec son équipe un esprit de dialogue.

81      En deuxième lieu, le Conseil interprète le guide de la notation en ce qu’il appartenait à la requérante, si elle l’estimait utile, de demander à ce que tous les supérieurs hiérarchiques sous l’autorité desquels elle avait travaillé soient consultés, ce qu’elle n’a pas fait. En outre, le Conseil souligne qu’aucune obligation de procéder à ces consultations ne résultait de l’avis du comité des rapports, mais que, au contraire, ledit avis aurait implicitement admis qu’une telle consultation n’était pas nécessaire.

82      En troisième lieu, le Conseil conteste le fait que le comité n’aurait pas eu à sa disposition suffisamment d’informations. Pour ce qui est du deuxième notateur, le Conseil observe que celui-ci disposait de l’avis du comité des rapports, lequel faisait état de manière exhaustive des circonstances entourant la notation de la requérante. Il en déduit que le deuxième notateur disposait de suffisamment d’informations pour rédiger le rapport attaqué.

–       Appréciation du Tribunal

83      En ce qui concerne le défaut de consultation des supérieurs hiérarchiques sous l’autorité desquelles la requérante a travaillé, il ressort des pièces versées au dossier par les parties que la requérante n’a pas fait l’objet d’une mise à disposition au sens du guide de la notation, laquelle mise à disposition aurait nécessité que la requérante dévolue entièrement son temps de travail à une autre unité pendant une période déterminée, mais qu’elle a travaillé ponctuellement à l’unité « Policy » et à la DG « Affaires extérieures ». Or, il peut être déduit de la combinaison des dispositions du guide de la notation selon lesquelles « [l]es notateurs procèdent à la consultation des fonctionnaires qui, en raison de leur compétence, de leur expérience et de leur collaboration directe et suivie avec le noté, sont à même de formuler en connaissance de cause une appréciation significative sur ses prestations », avec celles de ce même guide selon lesquelles « [l]e noté peut aussi demander la consultation expresse de fonctionnaires ayant les qualifications précitées », que le rédacteur du guide de la notation n’a pas souhaité imposer à l’administration de procéder spontanément à la consultation de l’ensemble des personnes ayant pu superviser le travail du noté, mais uniquement à la demande de ce dernier.

84      En l’espèce, la requérante n’ayant pas demandé à ce que les différents supérieurs hiérarchiques sous l’autorité desquels elle avait travaillé durant la période de notation soient consultés, elle ne saurait faire grief au Conseil de ne pas avoir procédé à leur audition sur le fondement du guide de la notation.

85      Néanmoins, dès lors que l’article 43 du statut prévoit que la compétence, le rendement et la conduite dans le service de tout fonctionnaire doivent être évalués, tout notateur doit, afin d’apprécier pleinement les mérites d’un fonctionnaire sur l’ensemble de la période d’évaluation, interroger les supérieurs hiérarchiques sous l’autorité desquels un fonctionnaire a travaillé pendant un laps de temps significatif. Or, en l’espèce, il ressort du dossier que, si pendant la période de référence la requérante consacrait la majeure partie de son temps de travail à son unité d’affectation, l’unité « Policy », elle en a néanmoins dévolu une part significative à la DG « Affaires extérieures », puisque évaluée par les parties à un pourcentage compris entre 20 et 25 % de son temps de travail pendant la période de référence. En conséquence, afin de pouvoir apprécier pleinement les mérites de la requérante pendant la période d’évaluation, la notation ne pouvait être établie qu’après consultation du supérieur hiérarchique sous l’autorité duquel elle travaillait à la DG « Affaires extérieures ».

86      Cependant, il doit être relevé que le supérieur hiérarchique de la requérante à la DG « Affaires extérieures », ainsi d’ailleurs que M. T., sous l’autorité duquel elle avait occasionnellement travaillé dans son unité d’affectation, ont été auditionnés par le comité des rapports et que leurs opinions figurent dans l’avis du comité. Or, selon la jurisprudence, la transmission par écrit de l’opinion d’une personne équivaut à la consultation (voir arrêt de la Cour du 21 mars 1985, Turner/Commission, 263/83, points 18 et 20).

87      Au vu des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le premier grief de la requérante comme étant non fondé.

88      En ce qui concerne le grief selon lequel, en substance, le deuxième notateur n’aurait pas disposé de suffisamment d’informations sur les mérites de la requérante pour rédiger le rapport attaqué, dans la mesure où le comité des rapports n’ayant pas disposé lui-même de suffisamment d’informations, ce qui l’aurait obligé à s’en remettre aux seules appréciations du premier notateur, il y a lieu de relever que, contrairement à ce que prétend la requérante, il ne ressort ni de l’avis du comité des rapports que celui-ci aurait manqué d’informations, ni du dossier que le deuxième notateur aurait également manqué d’informations. Certes, ce dernier a indiqué dans le rapport attaqué que la requérante n’avait jamais travaillé sous son autorité directe et qu’il était incapable de juger de son travail, mais il a ajouté que le premier notateur lui avait fourni des informations sur la performance de la requérante. Or, aucune norme n’interdisait au deuxième notateur de s’en remettre aux observations qui avaient été formulées par le premier notateur au sujet du travail de la requérante.

89      Bien au contraire, il peut être déduit, d’une part, de l’article 2, paragraphe 2, des DGE relatif au deuxième notateur et selon lequel celui-ci doit bénéficier d’un recul suffisant pour juger de l’ensemble du dossier et non pas, contrairement au premier notateur, être suffisamment proche du fonctionnaire concerné pour pouvoir apprécier en connaissance de cause les mérites du noté, et, d’autre part, de l’article 8, paragraphe 4, des DGE qui impose au deuxième notateur, en cas de demande de révision du rapport établi par le premier notateur, de se référer expressément audit rapport pour rédiger le rapport de notation définitif, que la mission du deuxième notateur est de vérifier en toute indépendance les appréciations portées par le premier notateur, de sorte qu’il lui est loisible, s’il l’estime indiqué, de se limiter à confirmer l’appréciation du premier notateur (voir en ce sens, par analogie, arrêt de la Cour du 1er juin 1983, Seton/Commission, 36/81, 37/81 et 218/81, point 20 ; arrêt du Tribunal du 29 septembre 2009, Wenning/Europol, F‑114/07, point 100). En conséquence, le deuxième notateur, même s’il est un notateur de pleine compétence et bien que les rapports de notation du premier et du deuxième notateur soient des actes distincts, pouvait rédiger le rapport attaqué sur la base du travail d’évaluation réalisé par le premier notateur. Par suite, il convient de rejeter le deuxième grief soulevé.

90      S’agissant, enfin, du grief tiré de ce que le seul entretien que la requérante ait eu durant l’exercice de notation est intervenu postérieurement à l’établissement du rapport attaqué, il doit être rappelé que la tenue d’un dialogue entre le noté et son notateur, prévue par les DGE, procède des droits de la défense du fonctionnaire dans la procédure d’évaluation qui le concerne (arrêts du Tribunal de première instance du 13 décembre 2005, Cwik/Commission, T‑155/03, T‑157/03 et T‑331/03, point 156, et du 25 octobre 2006, Carius/Commission, T‑173/04, point 71) et qu’en conséquence, un rapport de notation ne peut être adopté sans que le fonctionnaire concerné ne se soit vu offrir la possibilité d’être utilement entendu.

91      En l’espèce, force est de constater qu’aucun dialogue en vue de l’établissement du rapport attaqué n’a utilement eu lieu entre la requérante et le premier notateur, puisque le seul entretien qui s’est tenu est intervenu après la signature du rapport du premier notateur par son auteur.

92      Afin de remédier à l’absence de dialogue entre la requérante et le premier notateur, et bien que les DGE et le guide de la notation ne le prévoient pas, l’administration aurait pu organiser un entretien entre le deuxième notateur et la requérante. Mais tel n’ayant pas été le cas, force est de constater que la requérante n’a pas pu utilement faire valoir son point de vue avant l’établissement de son rapport définitif de notation.

93      Cette absence de dialogue ne saurait être palliée par le fait que la requérante a pu exposer son point de vue dans sa demande de révision, dans sa demande d’intervention du comité des rapports, lors de son audition devant ledit comité ou par le fait que le premier notateur entretenait un esprit de dialogue avec son équipe. En effet, dans le cadre de la procédure de notation, la nature même du dialogue et son objet supposent un contact direct entre le noté et le notateur durant l’exercice d’évaluation. Sans un échange direct entre le notateur et le noté, la notation ne saurait remplir pleinement sa fonction d’outil de gestion des ressources humaines et d’instrument d’accompagnement du développement professionnel de l’intéressé. En outre, seul ce contact direct est de nature à favoriser un dialogue franc et approfondi entre le notateur et le noté, leur permettant, d’une part, de mesurer avec exactitude la nature, les raisons et la portée de leurs divergences éventuelles et, d’autre part, de parvenir à une meilleure compréhension réciproque (arrêt du Tribunal de première instance du 25 octobre 2007, Lo Giudice/Commission, T‑27/05, point 49). En conséquence, il y a lieu de relever que le rapport attaqué est entaché d’un vice de procédure.

94      Certes, si, pour annuler une décision en raison d’un vice de procédure, il est nécessaire qu’en l’absence de ce vice la procédure ait pu aboutir à un résultat différent, cette condition est satisfaite en l’espèce, dès lors qu’un rapport de notation est fondé sur des jugements de valeur subjectifs et donc par nature susceptibles d’être modifiés. En effet, si la requérante avait été entendue avant l’établissement du rapport attaqué, elle aurait pu faire valoir son point de vue et, ainsi, peut-être obtenir une modification des appréciations portées dans ledit rapport.

95      Par suite, il y a lieu de déclarer fondé le grief tiré du défaut d’entretien préalable avec le notateur et, en conséquence, d’annuler le rapport attaqué sur le moyen tiré de la violation des règles de procédure en matière de notation et de la violation des droits de la défense.

 Sur les dépens

96      Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe ne soit condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

97      Il résulte des motifs du présent arrêt que le Conseil est la partie qui succombe. En outre, la requérante a, dans ses conclusions, expressément demandé que le Conseil soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, il y a donc lieu de condamner le Conseil aux dépens exposés par la requérante dans la présente instance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le rapport de notation de Mme Nastvogel établi pour la période allant du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2007 est annulé.

2)      Le Conseil de l’Union européenne supporte l’ensemble des dépens.

Mahoney   Kreppel   Rofes i Pujol

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 septembre 2011.

Le greffier

 

          Le président

W. Hakenberg             P. Mahoney


* Langue de procédure : le français.