Language of document : ECLI:EU:C:2019:648

CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

MME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 29 juillet 2019 (1)

Affaire C360/18

Cargill Deutschland GmbH

contre

Hauptzollamt Krefeld

[demande de décision préjudicielle formée par le Finanzgericht Düsseldorf (tribunal des finances de Düsseldorf, Allemagne)]

« Renvoi préjudiciel – Agriculture – Organisation commune des marchés dans le secteur du sucre – Cotisations à la production – Remboursement de sommes versées indûment – Interprétation du règlement (UE) no 1360/2013 – Règles nationales relatives aux délais de prescription – Principe d’effectivité »






1.        Par le présent renvoi préjudiciel, le Finanzgericht Düsseldorf (tribunal des finances de Düsseldorf, Allemagne) s’interroge sur le point de savoir si le remboursement de cotisations à la production dans le secteur du sucre, au titre du règlement (UE) no 1360/2013 du Conseil (2), doit être effectué conformément au droit national (compte tenu des principes d’équivalence et d’effectivité) et notamment dans le respect du délai de prescription prévu par celui‑ci. Cette question se pose dans le cadre d’un litige opposant Cargill Deutschland GmbH, un producteur d’isoglucose, aux autorités nationales compétentes. Cargill Deutschland demande le remboursement des cotisations sur le sucre qu’elle a payées en application d’un acte que la Cour a par la suite invalidé. Les autorités compétentes soutiennent que cette demande est prescrite en vertu des règles nationales établissant un délai de forclusion pour l’introduction de telles demandes.

 Le droit de l’Union

 Organisation commune des marchés dans le secteur du sucre

2.        Au moment des faits (3), l’organisation commune des marchés du sucre comprenait principalement des règles sur les prix, les quotas de production et les échanges avec les pays tiers. Le système était autofinancé. Le régime d’aide communautaire au secteur concerné qui existait à l’époque prévoyait un prix minimal pour la betterave sucrière, payé par les fabricants de sucre aux agriculteurs communautaires, et un prix d’intervention du sucre auquel les organismes d’intervention achetaient l’ensemble du sucre qui leur était proposé par les producteurs communautaires. Des cotisations à la production étaient perçues auprès des producteurs de sucre pour financer le coût du soutien financier à la production de sucre qui était réparti en différentes catégories (4). Les cotisations à la production étaient notamment destinées à couvrir le coût pour la Communauté des restitutions à l’exportation, c’est‑à‑dire des paiements dont bénéficiaient dans certaines conditions les producteurs de sucre pour compenser le fait que les prix mondiaux du sucre étaient, en règle générale, inférieurs au prix de soutien communautaire. Le principe applicable était que le secteur devait financer lui‑même les pertes résultant de l’écoulement de l’excédent de production (5).

 Jurisprudence

3.        Dans l’affaire Jülich I (6), plusieurs producteurs de sucre ont contesté la légalité de certains aspects du mode de calcul des cotisations à la production de sucre. Selon eux, le mode de calcul utilisé par la Commission européenne avait pour conséquence que les producteurs de sucre payaient un montant plus élevé que le coût représenté par l’écoulement de l’excédent de production communautaire. La Cour a été interrogée sur le point de savoir si le mode de calcul appliqué par la Commission était valable. Elle s’est prononcée en faveur des producteurs de sucre. La Cour a invalidé le règlement (CE) no 1762/2003 de la Commission (7) et le règlement (CE) no 1775/2004 de la Commission (8).

4.        Dans son arrêt du 29 septembre 2011, rendu dans l’affaire Pologne/Commission (9), le Tribunal a indiqué qu’il n’existait pas de base juridique appropriée justifiant un coefficient différencié pour la cotisation complémentaire dans le secteur du sucre et a annulé l’article 2 du règlement (CE) no 1686/2005 de la Commission (10).

5.        Dans l’affaire Jülich II (11), la Cour a une nouvelle fois été saisie de questions relatives au calcul des cotisations sur la production de sucre. La principale question portait désormais sur l’incertitude quant au « montant total des restitutions » en cause. L’incertitude était due au fait que, pour certaines quantités de sucre contenues dans des produits transformés exportés, les restitutions à l’exportation, auxquelles elles ouvraient droit, n’ont jamais été demandées, ni payées. Dans les règlements fixant les montants des cotisations à la production au titre des campagnes de commercialisation 2003 à 2006, la Commission a inclus ces quantités dans l’« excédent exportable », mais non dans les « engagements à l’exportation à réaliser ». Interrogée au sujet de la validité de ce mode de calcul, la Cour avait jugé, en 2008, dans l’arrêt Jülich I, que toutes les quantités exportées auraient dû être prises en compte dans les deux cas, que des restitutions aient ou non été payées, et que les règlements en cause étaient de ce fait invalides. En revanche, elle ne s’est pas prononcé sur la question de savoir si le « montant total des restitutions » aurait pareillement dû inclure toutes les restitutions susceptibles d’être octroyées, qu’elles aient été payées ou non, ou uniquement les restitutions effectivement payées (12).

6.        En 2009, afin de se conformer aux arrêts de la Cour, la Commission a adopté un nouveau règlement, rectifiant les règlements déclarés invalides (13). Dans ses nouveaux calculs, la Commission a inclus dans le « montant total des restitutions » toutes les restitutions susceptibles d’être octroyées, qu’elles aient été payées ou non. Les montants des cotisations à la production ainsi recalculées différaient peu de ceux initialement fixés, mais étaient plus élevés qu’ils ne l’auraient été si seules les restitutions effectivement payées avaient été prises en compte dans le « montant total des restitutions ». Plusieurs producteurs de sucre ont contesté cette démarche. Dans l’arrêt Jülich II, la Cour a déclaré le règlement no 1193/2009 invalide, en jugeant que, en vue de la détermination de la perte moyenne prévisible par tonne de produit, il convenait d’interpréter l’article 15, paragraphe 1, sous d), du règlement no 1260/2001 en ce sens que le montant total des restitutions n’inclut que le montant total de restitutions à l’exportation effectivement payées.

7.        En guise de réponse, le Conseil de l’Union européenne a alors adopté le règlement no 1360/2013 (14).

 Le règlement no 1360/2013

8.        Les considérants 1 à 10 du règlement nº 1360/2013 exposent le fondement sur lequel les cotisations avaient été calculées pour les campagnes de commercialisation en cause ainsi que les arrêts de la Cour ayant déclaré invalides les règlements pertinents antérieurs de la Commission (ayant établi ces cotisations). Le considérant 11 indique que, « en conséquence, il convient de déterminer les cotisations dans le secteur du sucre au niveau approprié. Pour les exportations définies en conformité avec l’article 6, paragraphe 5, du règlement (CE) no 314/2002 de la Commission, il convient de calculer la “perte moyenne” au sens de l’article 15, paragraphe 1, point d), du [règlement no 1260/2001] en divisant les restitutions effectivement payées par les quantités exportées, qu’une restitution ait ou non été versée ». Ces indications dans les considérants confirment que les cotisations corrigées devaient s’appliquer rétroactivement aux campagnes de commercialisation en cause, c’est‑à‑dire à partir de la date à laquelle les cotisations ont été déclarées invalides (15). Le considérant 23 indique que « pour des motifs de sécurité juridique et afin de garantir l’égalité de traitement des opérateurs concernés dans les différents États membres, il est nécessaire de fixer une date commune à laquelle il convient d’établir les cotisations fixées par le présent règlement, au sens de l’article 2, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement (CE, Euratom) no 1150/2000 du Conseil [(16)]. Toutefois, ce délai ne devrait pas s’appliquer lorsque les États membres sont tenus, en vertu du droit national, de rembourser les opérateurs concernés après cette date ».

9.        L’article 1er de ce règlement dispose que les cotisations à la production dans le secteur du sucre pour les campagnes de commercialisation 2001/2002, 2002/2003, 2003/2004, 2004/2005 et 2005/2006 figurent au point 1) de l’annexe (17). Les coefficients nécessaires au calcul de la cotisation complémentaire pour les campagnes de commercialisation 2001/2002 et 2004/2005 figurent au point 2) de l’annexe. Enfin, les montants à payer par les fabricants de sucre aux vendeurs de betteraves en raison des cotisations A ou B pour les campagnes de commercialisation 2002/2003, 2003/2004 et 2005/2006 figurent au point 3) de l’annexe.

10.      L’article 2 dudit règlement dispose que « la date d’établissement des cotisations fixées par le [règlement no 1360/2013], visée à l’article 2, paragraphe 2, deuxième alinéa, du [règlement no 1150/2000], est au plus tard le 30 septembre 2014, sauf lorsque les États membres ne peuvent pas respecter ce délai en raison de l’application de dispositions nationales concernant la récupération par les opérateurs économiques de sommes indûment versées ».

11.      L’article 3 fixe les dates auxquelles le règlement no 1360/2013 entre en vigueur pour chaque campagne de commercialisation en cause :

« [...]

L’article 1er, paragraphe 1, s’applique à compter du :

–        16 octobre 2002 pour la campagne de commercialisation 2001/2002,

–        8 octobre 2003 pour la campagne de commercialisation 2002/2003,

–        15 octobre 2004 pour la campagne de commercialisation 2003/2004,

–        18 octobre 2005 pour la campagne de commercialisation 2004/2005, et

–        23 février 2007 pour la campagne de commercialisation 2005/2006.

L’article 1er, paragraphe 2, s’applique à compter du :

–        16 octobre 2002 pour la campagne de commercialisation 2001/2002, et

–        18 octobre 2005 pour la campagne de commercialisation 2004/2005.

[...] »

 Le règlement (UE) 2018/264 du Conseil

12.      Le règlement (UE) 2018/264 du Conseil (18) n’est pas, en tant que tel, en cause dans le présent litige. La juridiction de renvoi cite néanmoins ce règlement dans sa demande de décision préjudicielle. Dans l’affaire Raffinerie Tirlemontoise (19), la Cour avait déclaré invalides les règlements (CE) no 2267/2000 (20) et (CE) no 1993/2001 de la Commission (21). Les objectifs poursuivis par le règlement 2018/264 incluent la mise en œuvre de cet arrêt et la fixation de la cotisation complémentaire pour la campagne de commercialisation 1999/2000 et la cotisation à la production pour la campagne de commercialisation 2000/2001 aux niveaux appropriés (22).

13.      L’article 2, paragraphe 2, de ce règlement dispose que « la différence entre les cotisations fixées par les règlements (CE) no 2267/2000 et (CE) no 1993/2001 et les cotisations prévues à l’article 1er du présent règlement est remboursée aux opérateurs économiques qui ont payé des cotisations pour les campagnes de commercialisation 1999/2000 et 2000/2001, sur la base d’une demande dûment justifiée présentée par ceux‑ci ».

 Le droit allemand

14.      L’article 12, paragraphe 1, du Gesetz zur Durchführung der Gemeinsamen Marktorganisationen und der Direktzahlungen (loi relative à la mise en œuvre des organisations communes de marché et des paiements directs, ci‑après la « MOG ») dispose que les dispositions du code des impôts sont applicables mutatis mutandis aux cotisations prélevées au titre des organisations communes de marché, à moins qu’une règle dérogatoire à ces dispositions ne soit prévue par la MOG ou par une ordonnance adoptée en application de la MOG.

15.      L’article 169, paragraphes 1 et 2, de l’Abgabeordnung (code des impôts, Allemagne, ci‑après l’« AO ») dispose que « la liquidation d’une taxe, son annulation ou sa modification ne sont plus autorisées après l’expiration du délai de liquidation. [...] Le délai de liquidation est de : 1. un an pour les droits d’accise et leur remboursement, 2. quatre ans pour les impôts et leur remboursement qui ne sont pas des impôts ou des remboursements au sens du point 1) ni des droits à l’importation et à l’exportation conformément à l’article 5, points 20 et 21, du code des douanes de l’Union ».

16.      L’article 170, paragraphe 1, de l’AO indique que le délai de liquidation court à partir de la fin de l’année civile au cours de laquelle est né l’impôt.

17.      Conformément à l’article 172, paragraphe 1, lu en combinaison avec l’article 172, paragraphe 1, sous d), de l’AO, dans la mesure où il n’a pas été émis à titre provisoire ou sous réserve de vérification, un avis d’imposition ne peut être annulé ou modifié que dans les autres cas autorisés par la loi.

18.      Aux termes de l’article 175, paragraphe 1, de l’AO, un avis d’imposition doit être établi, annulé ou modifié si un événement survient qui a un effet fiscal pour le passé.

 Les faits, la procédure au principal et la question préjudicielle

19.      Le Hauptzollamt Krefeld (bureau principal des douanes de Krefeld, Allemagne) a adressé les avis d’imposition suivants à Cargill Deutschland sur la base des obligations lui incombant au titre de sa production d’isoglucose : i) un avis du 23 octobre 2002 pour la campagne de commercialisation 2001/2002 fixant le montant de la cotisation définitive à la production à 832 677,71 euros et le montant de la cotisation complémentaire à 69 270,46 euros ; ii) un avis du 20 octobre 2003 pour la campagne de commercialisation 2002/2003 fixant le montant de la cotisation définitive à la production à 525 236,03 euros ; iii) un avis du 30 mars 2004 pour la campagne de commercialisation 2003/2004 fixant le montant des acomptes à verser sur la cotisation à la production à 115 084,15 euros ; et iv) un avis du 18 octobre 2005 pour la campagne de commercialisation 2004/2005 fixant le montant de la cotisation définitive à la production à 778 800,52 euros et le montant de la cotisation complémentaire à 124 101,86 euros (23). Cargill Deutschland n’a pas contesté ces avis d’imposition (ci‑après, les « avis d’imposition initiaux »).

20.      À la suite de l’adoption du règlement no 1360/2013, Cargill Deutschland a demandé au bureau principal des douanes de Krefeld de fixer à nouveau les cotisations pour les campagnes de commercialisation en cause et de lui rembourser les montants indûment versés pour celles‑ci. Ce bureau a rejeté cette demande par décision du 18 avril 2016. Selon lui, l’annulation, la modification ou la rectification des décisions devenues définitives n’était possible que dans le délai de liquidation prévu à l’article 169, paragraphe 2, première phrase, point 2, de l’AO. Selon ledit bureau, ce délai avait cependant expiré pour les campagnes de commercialisation du sucre cause.

21.      Cargill Deutschland a engagé une procédure devant la juridiction de renvoi en vue d’obtenir le remboursement des cotisations qu’elle a prétendument payées indûment en application de calculs fondés sur un acte ultérieurement déclaré invalide et corrigé par le règlement no 1360/2013. Cargill Deutschland soutient que le droit au remboursement découle du droit de l’Union et du droit national.

22.      Le bureau principal des douanes de Krefeld réplique qu’il convient de rejeter le recours de Cargill Deutschland. Selon lui, les dispositions de droit fiscal général relatives à la prescription sont applicables, dans le respect des principes généraux d’équivalence et d’effectivité tirés du droit de l’Union.

23.      La juridiction de renvoi considère que Cargill Deutschland ne peut prétendre au remboursement des cotisations afférentes aux campagnes de commercialisation en cause en application du droit national, dès lors que, compte tenu des dates des différents avis d’imposition, ces demandes de remboursement sont désormais prescrites.

24.      S’agissant de l’application des règles nationales relatives aux délais de prescription, la juridiction de renvoi déclare qu’en vertu des dispositions combinées de l’article 12, paragraphe 1, première phrase, de la MOG et de l’article 169, paragraphe 2, première phrase, point 2, de l’AO, un délai de liquidation de quatre ans s’applique.

25.      La juridiction de renvoi indique que les modifications du calcul des cotisations introduites par le règlement no 1360/2013 avec effet rétroactif ne déclenchent pas, en droit national, l’application de l’article 175, paragraphe 1, point 2), de l’AO.

26.      La juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si, lorsque les avis d’imposition sont définitifs en application du droit national, cette circonstance s’oppose au remboursement des cotisations payées indûment, dès lors que l’article 2, paragraphe 2, du règlement 2018/264 autorise le remboursement des cotisations afférentes aux campagnes de commercialisation 1999/2000 et 2000/2001 sur la base d’une demande dûment justifiée. La juridiction de renvoi souhaite savoir si cette interprétation de l’article 2, paragraphe 2, du règlement 2018/264 a une incidence sur le remboursement des cotisations dues en vertu du règlement no 1360/2013.

27.      Par conséquent, la juridiction de renvoi a saisi la Cour de la question préjudicielle suivante :

« Le remboursement des cotisations à la production dans le secteur du sucre, lesquelles doivent être soumises à de nouveaux calculs conformément au [règlement no 1360/2013], doit-il être effectué conformément au droit national et, notamment, en appliquant les règles de prescription prévues par ce dernier, dans le respect des principes d’équivalence et d’effectivité ? »

28.      Des observations écrites ont été présentées par Cargill Deutschland, le gouvernement belge et la Commission. Les mêmes parties ont présenté des observations orales lors de l’audience du 2 mai 2019. En outre, le bureau principal des douanes de Krefeld (qui n’a pas présenté d’observations écrites) a également participé à l’audience et a présenté des observations orales à la Cour.

 Appréciation de la question préjudicielle

29.      La juridiction de renvoi demande en substance si Cargill Deutschland reste tenue de payer les cotisations à la production de sucre calculées en vertu d’un acte de l’Union qui a, par la suite, été invalidé par la Cour et si les règles nationales relatives aux délais de prescription s’opposent à la réalisation de nouveaux calculs en application du règlement no 1360/2013, faisant naître un droit au remboursement pour la partie des cotisations payée indûment.

 Remarques liminaires

30.      Il est constant que la situation de Cargill Deutschland relève du champ d’application du règlement no 1360/2013 de sorte qu’elle peut, en principe, prétendre au remboursement (sous réserve de l’application des dispositions du droit procédural national, notamment des règles de prescription).

31.      Cargill Deutschland soutient que son droit au remboursement des cotisations payées indûment est confirmé par l’article 2, paragraphe 2, du règlement 2018/264. Par conséquent, la juridiction de renvoi demande également s’il convient de tenir compte de cette disposition dans l’interprétation du règlement no 1360/2013. Je partage la position de la Commission, dans la mesure où elle soutient que le libellé du règlement 2018/264 n’est pas pertinent. Premièrement, les campagnes de commercialisation en cause en l’espèce n’incluent pas les années 1999/2000 et 2000/2001, les deux campagnes de commercialisation régies par le règlement 2018/264. Deuxièmement, il convient d’interpréter le règlement no 1360/2013 en tenant compte de son libellé, de ses finalités et de son contexte.

 Sur le règlement no 1360/2013

32.      Cargill Deutschland soutient qu’elle dispose d’un droit au remboursement des cotisations indûment payées pour les campagnes de commercialisation en cause au titre du règlement no 1360/2013. Selon elle, ce droit découle de plusieurs arrêts de la Cour ainsi que des articles 264 et 267 TFUE, lesquels doivent être lus à la lumière de l’article 4, paragraphe 3, TUE et de l’article 291 TFUE.

33.      Le bureau principal des douanes de Krefeld soutient, au contraire, que le règlement no 1360/2013 ne confère aux producteurs de sucre aucun droit direct au remboursement. Il estime que, pour d’introduire une demande de remboursement au titre de ce règlement, les producteurs de sucre doivent se prévaloir des règles procédurales nationales.

34.      Le gouvernement belge indique que la question préjudicielle appelle une réponse affirmative. Le délai de prescription ne peut commencer à courir qu’à la date à laquelle les règlements constituant la base juridique des cotisations indûment payées ont été abrogés ou déclarés invalides.

35.      La Commission fait valoir que, selon une jurisprudence constante, en l’absence de dispositions harmonisées au niveau de l’Union, la procédure de remboursement est encadrée par les règles procédurales nationales.

36.      Le règlement no 1360/2013 confère-t-il en tant que tel aux opérateurs économiques un droit au remboursement des cotisations payées indûment pour les campagnes de commercialisation en cause ou un tel droit découle-t-il des règles et des modalités procédurales nationales ?

37.      Selon moi, le droit au remboursement des cotisations payées indûment pour les campagnes de commercialisation en cause résulte indubitablement du droit de l’Union. Ce droit découle logiquement des arrêts de la Cour déclarant invalides les actes sur base desquels ces cotisations ont été payées (24). Le règlement no 1360/2013 ne confère, en soi, aucun droit aux opérateurs économiques. En revanche, le règlement rectifie, avec effet rétroactif, les erreurs commises dans le calcul des cotisations à la production pour les campagnes de commercialisation en cause et fixe de nouveaux montants pour ces cotisations, de sorte que les opérateurs économiques et les autorités compétentes des États membres puissent déterminer les montants payés indûment sous l’égide de l’ancien système (25).

38.      L’article 1er du règlement no 1360/2013 met en vigueur les cotisations à la production (nouvelles et rectifiées) pour les campagnes de commercialisation en cause et renvoie au point 1) de son annexe. Ce point contient un tableau reprenant, pour chaque campagne de commercialisation, les cotisations à la production pour le secteur du sucre (exprimées sous la forme d’un montant en euros par tonne du produit en cause) (26).

39.      Conformément à son article 2, la date de constatation (27) des cotisations fixées par le règlement no 1360/2013 est au plus tard le 30 septembre 2014. Il découle de cet article que le système de gestion partagée est applicable aux cotisations à la production de sucre (28). Les producteurs n’adressent pas leurs demandes à la Commission. Au contraire, celles-ci doivent être adressées aux autorités nationales compétentes, en vertu de dispositions nationales.

40.      L’article 3 contient les règles relatives à l’application rétroactive du règlement no 1360/2013 et fixe les dates à partir desquelles les cotisations à la production et le coefficient de calcul de la cotisation complémentaire s’appliquent pour les campagnes de commercialisation en cause (29).

41.      La finalité du règlement no 1360/2013 est de rectifier les cotisations calculées et exigées erronément sur le fondement de règlements de la Commission qui ont par la suite été invalidés (30). Ainsi, un objectif nécessairement poursuivi par cette mesure est d’assurer que le système de cotisations à la production de sucre soit autofinancé plutôt que de générer des fonds excédentaires (31). Le considérant 11 du règlement no 1360/2013 indique que les cotisations à la production de sucre doivent être fixées à un niveau approprié (32).

42.      Le règlement no 1360/2013 ne contient aucune disposition relative aux procédures et aux modalités devant être appliquées par les États membres pour mettre en œuvre l’obligation de rembourser aux opérateurs économiques les cotisations à la production de sucre payées indûment pour les campagnes commerciales en cause. Ce règlement constitue un acte de portée générale, obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre conformément à l’article 288 TFUE. Par conséquent, il serait surprenant que le règlement no 1360/2013 présente de telles lacunes si ces questions étaient effectivement destinées à être réglées directement par celui‑ci.

43.      Les procédures par lesquelles les autorités nationales compétentes modifient les avis d’imposition et remboursent les montants payés indûment relèvent intégralement du champ d’application des règles procédurales nationales. Naturellement, ces règles doivent respecter les principes généraux d’équivalence (elles ne doivent pas être moins favorables que celles concernant des recours similaires de droit interne) et d’effectivité (elles ne doivent pas rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union) consacrés par le droit de l’Union (33). Il importe de bien garder à l’esprit que l’objectif principal du règlement no 1360/2013 est d’établir des règles mettant en œuvre différents arrêts rendus par la Cour.

44.      Bien que les opérateurs économiques tirent manifestement du droit de l’Union un droit au remboursement des cotisations indûment payées, je ne souscris pas à l’argumentation de Cargill Deutschland, dans la mesure où je considère que le règlement no 1360/2013 ne prévoit pas, en soi, de dispositions ou de règles procédurales dont les producteurs de sucre pourraient se prévaloir pour réclamer le remboursement des cotisations indûment payées.

 Délais de prescription

45.      Les règles nationales relatives à la prescription, en cause dans l’affaire au principal, sont-elles conformes aux principes d’équivalence et d’effectivité ?

46.      Cargill Deutschland soutient que les dispositions régissant les délais de prescription sont une composante essentielle du droit au remboursement découlant du règlement no 1360/2013 et doivent faire l’objet d’une interprétation autonome. Selon Cargill Deutschland, ces dispositions n’ont aucun rapport avec des règles procédurales nationales. En l’espèce, le délai de prescription a commencé à courir lors de l’entrée en vigueur du règlement no 1360/2013, le 20 décembre 2013. Cargill Deutschland considère que aux fins de l’interprétation de ce règlement, la Cour devrait raisonner par analogie avec les règles en matière de remboursement prévues par l’article 236 du code des douanes (34).

47.      Le bureau principal des douanes de Krefeld soutient que les règles nationales en cause respectent les principes d’équivalence et d’effectivité et ajoute qu’il est essentiel d’appliquer un délai de prescription. Il est nécessaire de limiter dans le temps la possibilité d’introduire les demandes dans l’intérêt de la sécurité juridique.

48.      Le gouvernement belge soutient que les demandes de remboursement sont soumises aux règles procédurales nationales, sous réserve des principes d’équivalence et d’effectivité. Lors de l’audience, il a expliqué que ses dispositions nationales n’étaient pas identiques à celles de l’Allemagne. En Belgique, les demandes en répétition de l’indu naissent à la date où le paiement a été effectué ou à la date à laquelle la partie concernée a eu connaissance du caractère « indu » de celui‑ci. Le délai de prescription à partir de cette date est de 10 ans. Priver les opérateurs économiques de tout droit au remboursement est contraire au principe d’effectivité.

49.      La Commission soutient que le règlement no 1360/2013 ne contient pas de dispositions relatives au remboursement des cotisations à la production payées indûment, aux délais de prescription ou aux intérêts éventuellement dus. Selon la Commission, il s’ensuit que l’ensemble de ces questions relèvent du droit procédural national.

50.      Je commencerai par relever que je ne souscris pas à l’affirmation de Cargill Deutschland selon laquelle l’article 236 du code des douanes permet de développer utilement un raisonnement par analogie. J’ai déjà indiqué que, selon moi, le règlement no 1360/2013 ne contient en soi aucune disposition relative aux modalités permettant aux opérateurs économiques de réclamer le remboursement des cotisations à la production sur le sucre payées indûment (35). En revanche, la version du code des douanes applicable à l’époque des campagnes de commercialisation en cause contenait des règles spécifiques (dans le Titre VII) en matière de « dette[s] douanière[s] » qui incluaient des dispositions relatives aux « délais et procédures relatives au montant des droits » ainsi qu’au « remboursement et [à la] remise des droits » (dans le chapitre 5 comprenant l’article 236). Toutes ces dispositions faisaient partie d’un régime de modalités spécifiques adopté au niveau de l’Union.

51.      Puisque le législateur de l’Union a choisi de laisser aux États membres les modalités de perception et de remboursement précises des cotisations sur le sucre, aucune analogie utile ne peut être effectuée avec le régime harmonisé du code des douanes.

52.      Dans sa demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi indique que le bureau principal des douanes de Krefeld a calculé et a émis les avis d’imposition initiaux pour les campagnes de commercialisation en cause et que ces avis d’imposition n’ont pas été contestés. Par décision du 18 avril 2016, ledit bureau a rejeté la demande de Cargill Deutschland (du 13 février 2014) d’adopter de nouveaux avis d’imposition conformément au règlement no 1360/2013 et de rembourser les montants payés indûment en application des avis d’imposition initiaux. Cargill Deutschland ne peut prétendre au remboursement en vertu des règles nationales pertinentes en raison des règles de prescription applicables à de telles demandes. Un délai de quatre ans est applicable à la liquidation et à la modification des cotisations à la production de sucre. S’agissant de la dernière campagne de commercialisation en cause (2004/2005), ce délai a commencé à courir au plus tard le 31 décembre 2006. Pour ce motif, la demande de réexamen et de remboursement formée par Cargill Deutschland le 13 février 2014 ne saurait prospérer. A fortiori, il en va de même des campagnes de commercialisation antérieures.

53.      La juridiction de renvoi estime également que les règles procédurales nationales sont conformes aux principes d’équivalence et d’effectivité.

54.      Je ne suis pas convaincue que la position de la juridiction de renvoi soit correcte.

55.      Dès 1970, la Cour a reconnu que les règles procédurales relatives aux délais de prescription doivent être fixées à l’avance et être conformes aux exigences de sécurité juridique (36). Il existe de solides raisons de logique procédurale permettant de considérer que les dispositions relatives aux délais de prescription doivent comprendre un ensemble de règles précisant la durée du délai de prescription, la date à laquelle celui‑ci commence à courir et les événements ayant un effet interruptif ou suspensif. Il convient, à cet égard, de tenir compte aussi bien des intérêts des autorités compétentes des États membres et des opérateurs économiques que du rôle de surveillance de la Commission dans la protection des intérêts financiers de l’Union.

56.      Il est de jurisprudence constante qu’en l’absence d’une règlementation de l’Union, il appartient à l’ordre juridique interne de chaque État membre de désigner les juridictions compétentes et de régler les modalités procédurales des recours en justice destinés à assurer la pleine sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union. C’est donc dans le cadre du droit national de la responsabilité qu’il incombe à l’État membre de réparer les conséquences du préjudice causé, étant entendu que les conditions, notamment de délai, fixées par les législations nationales en matière de réparation des dommages, ne sauraient être moins favorables que celles qui concernent des réclamations semblables de nature interne (principe d’équivalence) et ne sauraient être aménagées de manière à rendre en pratique impossible ou excessivement difficile l’obtention de la réparation (principe d’effectivité) (37).

57.      Afin de vérifier si le principe d’équivalence est respecté dans l’affaire au principal, la juridiction nationale, qui est seule à avoir une connaissance directe des modalités procédurales des recours dans le domaine en cause, doit examiner tant l’objet que les éléments essentiels des recours prétendument similaires de nature interne. Chaque cas où se pose la question de savoir si une disposition procédurale nationale est moins favorable que celles concernant des recours similaires de nature interne doit être analysé par la juridiction nationale en tenant compte de la place de cette disposition dans l’ensemble de la procédure, de son déroulement et de ses particularités devant les diverses instances nationales (38).

58.      Le principe d’équivalence est une émanation du principe général de non-discrimination. À cet égard, il n’est pas certain que des recours similaires de nature interne soient effectivement formés ou, même, existent. Le contexte dans lequel s’inscrit le litige au principal est délicat et complexe et la situation qui s’est posée est très spécifique. L’affaire au principal est profondément ancrée dans le droit de l’Union. Le calcul des cotisations sur le sucre a donné lieu à de nombreux litiges au niveau de l’Union et a conduit les juridictions de l’Union à déclarer invalide la réglementation en cause (39). Les tentatives initiales du législateur de rectifier la situation ont échoué, comme l’indiquent les considérants 1 à 22 du règlement no 1360/2013. Compte tenu de ces circonstances, il serait surprenant que des situations véritablement similaires de nature interne puissent être identifiées. La circonstance que le règlement no 1360/2013 produise des effets rétroactifs ne suffit pas, en soi, à rendre équivalents les recours internes concernant des mesures fiscales qui produisent également de tels effets.

59.      La fixation de délais de recours raisonnables à peine de forclusion satisfait, en principe, à l’exigence d’effectivité, dans la mesure où elle constitue une application du principe fondamental de la sécurité juridique. Toutefois, de tels délais ne doivent pas rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union (40).

60.      Il résulte clairement des déclarations effectuées par la juridiction de renvoi dans sa demande de décision préjudicielle concernant l’application des règles de prescription nationales qu’il aurait été impossible pour Cargill Deutschland de former une demande de remboursement dans le délai de prescription prévu à cet effet (41). Ce délai a expiré avant l’entrée en vigueur du règlement n o 1360/2013, le 20 décembre 2013, et avant que le législateur de l’Union n’ait précisé les cotisations à la production, les coefficients de calcul de la cotisation complémentaire et les montants dus par les producteurs de sucre aux vendeurs de betteraves en vertu de l’article 1er et de l’annexe de ce règlement. Par conséquent, il aurait été pratiquement impossible pour des opérateurs économiques tels que Cargill Deutschland de quantifier le montant des cotisations payées indûment et de réclamer leur remboursement. Ces demandes étaient déjà prescrites avant que le règlement no 1360/2013 n’entre en vigueur.

61.      Le bureau principal des douanes de Krefeld a soutenu (lors de l’audience) qu’un opérateur économique prudent aurait pu contester les avis d’imposition initiaux, ce qui aurait eu pour conséquence de sauvegarder les intérêts de Cargill Deutschland en empêchant la liquidation définitive des cotisations.

62.      Cette question relève du droit procédural national. Il s’agit également d’un choix et d’un jugement commercial pouvant légitimement différer d’un opérateur économique à un autre. Toutefois, il ne s’agit pas là de la question relative au droit de l’Union soulevée dans le cadre de la présente procédure, qui est la question de savoir si les règles nationales en cause privent de facto les opérateurs économiques tels que Cargill Deutschland de leur droit de réclamer un remboursement.

63.      En effet, selon un principe général commun aux systèmes juridiques des États membres, la personne lésée, au risque de devoir supporter elle‑même le dommage, doit faire preuve d’une diligence raisonnable pour limiter la portée du préjudice subi (42). Il serait toutefois contraire au principe d’effectivité d’imposer aux personnes lésées d’avoir systématiquement recours à toutes les voies de droit éventuellement à leur disposition quand bien même cela engendrerait des difficultés excessives ou ne pourrait être raisonnablement exigé d’eux.

64.      De plus, l’interprétation des règles nationales en cause par la juridiction de renvoi prive le règlement no 1360/2013 de son effet utile. L’objectif explicite de ce règlement est de permettre aux autorités nationales de mettre en œuvre les arrêts des juridictions de l’Union relatifs à l’application correcte du régime de cotisations à la production de sucre. Ces arrêts visent à assurer la bonne application du régime qui sous-tend ces cotisations. La finalité de ce régime était d’assurer son autofinancement, afin que le secteur finance lui‑même les pertes résultant de l’excédent de production de sucre. Permettre aux autorités compétentes de conserver des cotisations additionnelles indûment perçues va à l’encontre de toute la philosophie qui sous-tend ce régime.

65.      Étant donné que le délai de prescription relatif au remboursement de cotisations payées indûment n’est pas fixé par le législateur de l’Union, le point de départ de ce délai doit être déterminé au regard du droit national et diffèrera nécessairement d’un État membre à un autre (43). De même, l’application des règles procédurales nationales est manifestement une question relevant de la compétence des juridictions nationales.

66.      Toutefois, dans la mesure où les opérateurs économiques ne pouvaient pas quantifier le montant d’une éventuelle demande de remboursement des cotisations indûment payées avant l’entrée en vigueur du règlement no 1360/2013, des règles nationales prévoyant que le délai de prescription pertinent expire avant l’entrée en vigueur de ce règlement empêchent en pratique ces opérateurs économiques de demander le remboursement des cotisations sur le sucre indûment payées en vertu d’une législation qui a été invalidée par la Cour.

 Conclusion

67.      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre comme suit à la question posée par le Finanzgericht Düsseldorf (tribunal des finances de Düsseldorf, Allemagne) :

Lorsque des cotisations à la production de sucre ont été payées indûment, des règles nationales régissant les délais de prescription, qui privent les opérateurs économiques de la possibilité de demander le remboursement des cotisations nouvellement calculées sur la base du règlement (UE) no 1360/2013 du Conseil, du 2 décembre 2013, fixant les cotisations à la production dans le secteur du sucre pour les campagnes de commercialisation 2001/2002, 2002/2003, 2003/2004, 2004/2005 et 2005/2006, le coefficient nécessaire au calcul de la cotisation complémentaire pour les campagnes de commercialisation 2001/2002 et 2004/2005 et les montants à payer par les fabricants de sucre aux vendeurs de betteraves en raison de la différence entre la cotisation maximale et la cotisation à percevoir pour les campagnes de commercialisation 2002/2003, 2003/2004 et 2005/2006, ne peuvent être admises, lorsque l’application de ces règles rend pratiquement impossible l’introduction de telles demandes de remboursement.


1      Langue originale : l’anglais.


2      Règlement du 2 décembre 2013 fixant les cotisations à la production dans le secteur du sucre pour les campagnes de commercialisation 2001/2002, 2002/2003, 2003/2004, 2004/2005 et 2005/2006, le coefficient nécessaire au calcul de la cotisation complémentaire pour les campagnes de commercialisation 2001/2002 et 2004/2005 et les montants à payer par les fabricants de sucre aux vendeurs de betteraves en raison de la différence entre la cotisation maximale et la cotisation à percevoir pour les campagnes de commercialisation 2002/2003, 2003/2004 et 2005/2006 (JO 2013, L 343, p. 2).


3      Les avis d’imposition relatifs aux cotisations sur le sucre sur lesquels porte la demande de remboursement ont été émis entre octobre 2002 et octobre 2005 (voir point 19 des présentes conclusions).


4      Le sucre était réparti en trois catégories. Pendant chaque campagne de commercialisation, la production de sucre A et B était égale à des quotas correspondant, en principe, respectivement à la demande sur le marché intérieur et aux exportations du sucre excédentaire bénéficiant de restitutions à l’exportation. Le sucre C était produit en dehors de ces quotas, ne pouvait pas être commercialisé librement dans l’Union européenne et était exporté sans bénéficier d’un soutien financier.


5      Considérants 11 à 15 du règlement (CE) no 1260/2001 du Conseil, du 19 juin 2001, portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (JO 2001, L 178, p. 1). Ce règlement a été abrogé et remplacé à plusieurs reprises. Les marchés du sucre sont désormais régis par le règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) no 922/72, (CEE) no 234/79, (CE) no 1037/2001 et (CE) no 1234/2007 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 671).


6      Arrêt du 8 mai 2008, Zuckerfabrik Jülich e.a. (C‑5/06 et C‑23/06 à C‑36/06, EU:C:2008:260) (ci‑après l’arrêt « Jülich I »).


7      Règlement du 7 octobre 2003 fixant, pour la campagne de commercialisation 2002/2003, les montants des cotisations à la production pour le secteur du sucre (JO 2003, L 254 p. 4).


8      Règlement du 14 octobre 2004 fixant, pour la campagne de commercialisation 2003/2004, les montants des cotisations à la production pour le secteur du sucre (JO 2004, L 316 p. 4).


9      Arrêt du 29 septembre 2011, Pologne/Commission (T‑4/06, non publié, EU:T:2011:546).


10      Règlement du 14 octobre 2005 fixant, pour la campagne de commercialisation 2004/2005, les montants des cotisations à la production ainsi que le coefficient de la cotisation complémentaire dans le secteur du sucre (JO 2005, L 271 p. 12).


11      Arrêt du 27 septembre 2012, Zuckerfabrik Jülich e.a. (C‑113/10, C‑147/10 et C‑234/10, EU:C:2012:591) (ci‑après l’arrêt « Jülich II »).


12      En effet, la Cour n’a pas été invitée à se prononcer sur ce point ; voir mes conclusions dans les affaires jointes Zuckerfabrik Jülich e.a. (C‑113/10, C‑147/10 et C‑234/10, EU:C:2011:701, point 82).


13      Règlement (CE) no 1193/2009 de la Commission, du 3 novembre 2009, rectifiant les règlements (CE) no 1762/2003, (CE) no 1775/2004, (CE) no 1686/2005, (CE) no 164/2007 et fixant, pour les campagnes de commercialisation 2002/2003, 2003/2004, 2004/2005 et 2005/2006, les montants des cotisations à la production pour le secteur du sucre (JO 2009, L 321 p. 1).


14      Dans l’intervalle, le règlement no 1260/2001 avait été abrogé et remplacé. Dès lors, ce règlement ne constituait plus une base légale permettant à la Commission d’adopter un acte rectifiant le montant des contributions.


15      Considérants 12 à 22.


16      Règlement du 22 mai 2000 portant application de la décision 94/728/CE, Euratom relative au système des ressources propres des Communautés (JO 2000, L 130, p. 1).


17      Les points c) à f) concernent l’isoglucose.


18      Règlement du 19 février 2018 fixant les montants des cotisations à la production ainsi que le coefficient de calcul de la cotisation complémentaire dans le secteur du sucre pour la campagne de commercialisation 1999/2000 et fixant les montants des cotisations à la production dans le secteur du sucre pour la campagne de commercialisation 2000/2001 (JO 2018, L 51, p. 1).


19      Arrêt du 9 février 2017, Raffinerie Tirlemontoise (C‑585/15, EU:C:2017:105).


20      Règlement du 12 octobre 2000 fixant, pour la campagne de commercialisation 1999/2000, les montants des cotisations à la production ainsi que le coefficient de calcul de la cotisation complémentaire dans le secteur du sucre (JO 2000, L 259, p. 29).


21      Règlement du 11 octobre 2001 fixant, pour la campagne de commercialisation 2000/2001, les montants des cotisations à la production dans le secteur du sucre (JO 2001, L 271, p. 15).


22      Considérants 1 à 9.


23      Dans les présentes conclusions, ces campagnes de commercialisation seront dénommées conjointement les « campagnes de commercialisation en cause ».


24      Voir points 3 à 6 des présentes conclusions.


25      Voir point 41 des présentes conclusions.


26      Voir point 9 des présentes conclusions.


27      La date de constatation est définie à l’article 2, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 1150/2000. Les États membres ont l’obligation : i) de constater les ressources propres de l’Union (article 2, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000) ; ii) d’inscrire celles‑ci au crédit du compte bancaire de l’Union européenne ; et, en cas de non-respect de ces obligations, iii) de payer des intérêts de retard sur les sommes dues. Les cotisations à la production font partie des ressources propres de l’Union européenne. « Constater » les ressources propres signifie que ces montants sont inscrits au compte et non qu’ils sont perçus : voir arrêt du 15 novembre 2005, Commission/Danemark (C‑392/02, EU:C:2005:683, point 67).


28      Pour les fonds faisant l’objet d’une « gestion partagée », la Commission charge les États membres de mettre en œuvre les programmes de l’Union au niveau national. Les autorités compétentes allouent alors les fonds aux bénéficiaires (en l’espèce, les opérateurs économiques du secteur du sucre).


29      Voir point 11 des présentes conclusions.


30      Considérants 1 à 10 du règlement no 1360/2013 : voir également page 3 de l’exposé des motifs du document COM(2013) 527, la proposition de la Commission relative à un règlement du Conseil, qui indique : « Cependant, la Cour a statué que la Commission a commis des erreurs répétées dans le calcul des cotisations annuelles fixées pour la période en question en vertu du [règlement no 1260/2001]. Enfin, la Cour a constaté que la méthode figurant dans le [règlement no 1193/2009] utilisée par la Commission pour déterminer les cotisations n’était pas correcte, car elle conduisait à une surestimation des coûts à couvrir et par conséquent elle surchargeait les producteurs de sucre. Étant donné la non-validité du [règlement no 1193/2009], la Cour a estimé que les justiciables avaient droit à un remboursement des montants indûment versés dans le cadre des cotisations à la production injustement prélevées par les États membres durant la période en question, et au paiement d’intérêts sur ces montants. L’arrêt a entraîné un vide juridique concernant le montant exact des cotisations pour les campagnes de commercialisation 2002/2003, 2003/2004, 2004/2005 et 2005/2006. Dès lors, pour respecter l’arrêt rendu par la Cour, il convient de remplacer les cotisations fixées pour les campagnes de commercialisation susmentionnées par de nouvelles cotisations, calculées conformément à la méthode validée par la Cour, avec effet rétroactif. »


31      Considérant 5 du règlement no 1360/2013 ; voir également point 2 des présentes conclusions.


32      Voir point 8 des présentes conclusions.


33      L’arrêt du 17 mai 2018, Specializuotas transportas (C‑531/16, EU:C:2018:324, point 36) contient une déclaration récente de la Cour relative à ces principes généraux du droit de l’Union.


34      Règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1). Ce règlement a été modifié à plusieurs reprises. Le règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union régit désormais les questions en matière de douanes de l’Union. Les articles 116, 117 et 121 sont les dispositions du règlement no 952/2013 correspondant à l’article 236 du code des douanes communautaire.


35      Voir points 42 à 44 des présentes conclusions.


36      Voir arrêt du 15 juillet 1970, ACF Chemiefarma/Commission (41/69, EU:C:1970:71, points 19 et 20).


37      Voir arrêt du 24 mars 2009, Danske Slagterier (C‑445/06, EU:C:2009:178, point 31 et jurisprudence citée).


38      Voir arrêt du 8 juillet 2010, Bulicke (C‑246/09, EU:C:2010:418, points 28 et 29 et jurisprudence citée).


39      Voir points 3 à 6 et note en bas de page 30 des présentes conclusions.


40      Voir arrêt du 8 juillet 2010, Bulicke (C‑246/09, EU:C:2010:418, point 36 et jurisprudence citée).


41      Voir points 23 à 25 des présentes conclusions.


42      Voir arrêt du 24 mars 2009, Danske Slagterier (C‑445/06, EU:C:2009:178, point 61 et jurisprudence citée).


43      Voir point 48 des présentes conclusions.