Language of document : ECLI:EU:F:2007:18

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

1er février 2007 (*)

« Fonctionnaires – Promotion – Examen comparatif des mérites de fonctionnaires de services différents – Demande en indemnité – Recevabilité – Délai raisonnable – Honoraires d’avocat – Procédure précontentieuse – Préjudice moral »

Dans l’affaire F‑125/05,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Vassilios Tsarnavas, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Athènes (Grèce), représenté par Me N. Lhoëst, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme C. Berardis-Kayser et M. D. Martin, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de M. S. Van Raepenbusch (rapporteur), président, Mme I. Boruta et M. H. Kanninen, juges,

greffier : M. S. Boni, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 7 décembre 2006,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 19 décembre 2005 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 22 décembre suivant), M. Tsarnavas a demandé, notamment, d’une part, l’annulation de la décision de la Commission des Communautés européennes, du 1er avril 2005, portant rejet de sa demande visant à l’obtention d’une indemnisation, à concurrence de 72 000 euros, pour le dommage matériel et moral subi du fait des irrégularités ou des fautes de service commises par cette institution dans le cadre des exercices de promotion 1998 et 1999, ainsi que, d’autre part, la condamnation de la Commission au versement de l’indemnisation susmentionnée.

 Faits à l’origine du litige

2        Le requérant a été recruté par le Parlement européen, le 1er avril 1981, en qualité de fonctionnaire de grade LA 7. Au 1er avril 1982, il a été transféré à la Commission, où il a été promu au grade LA 6 l’année suivante.

3        En 1985, le requérant a été nommé administrateur de grade A 6 au sein de la direction générale (DG) « Concurrence » où, au 1er novembre 1992, il a été promu au grade A 5 (devenu A*11 au 1er mai 2004).

4        Par décision du 21 juin 1995, le requérant a été détaché dans l’intérêt du service, avec effet au 24 février 1995, de la DG « Concurrence » à la DG « Personnel et administration », afin d’exercer, au sein du comité du personnel, des fonctions en qualité de vice-président de la section locale de Bruxelles.

5        Par décision du 2 juillet 1997, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») l’a réaffecté, avec effet rétroactif au 1er mai 1997, à sa direction générale d’origine, la DG « Concurrence », que le requérant a effectivement réintégrée le 21 octobre 1997.

6        Le requérant a été mis en invalidité à compter du 1er mai 2002.

 Sur l’exercice de promotion 1998

7        Pour l’exercice de promotion 1998, la date pivot, c’est-à-dire la date permettant de déterminer de quelle direction générale dépendent, pour les propositions en vue d’une promotion, les fonctionnaires ayant fait l’objet d’une mobilité au cours de l’année, a été fixée au 5 mai 1997, date à laquelle le requérant ne dépendait plus, en principe, de la DG « Personnel et administration », mais de la DG « Concurrence ».

8        Le requérant n’a pas été inclus dans la liste des fonctionnaires jugés les plus méritants pour obtenir une promotion pour l’exercice 1998.

9        Dans le courant de l’année 1998, le requérant a invité l’administration à revoir la date de prise d’effet de la décision prononçant sa réaffectation à la DG « Concurrence » afin qu’elle coïncide, sinon avec la date de réaffectation réelle, à savoir le 21 octobre 1997, du moins avec celle de la prise de décision, soit le 2 juillet 1997.

10      N’ayant pas reçu de réponse à cette demande, le requérant a introduit, le 13 janvier 1999, une réclamation, en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut »).

11      N’ayant pas non plus reçu de réponse à sa réclamation, le requérant a introduit, le 6 août 1999, un recours en annulation devant le Tribunal de première instance des Communautés européennes (affaire T‑180/99).

12      Le 13 septembre 1999, l’AIPN a adopté une réponse explicite à cette réclamation, dans laquelle elle a, d’une part, fixé au 2 juillet 1997 la date de réaffectation du requérant à la DG « Concurrence » et, d’autre part, a placé ce dernier en sixième rang sur la liste des propositions de promotion pour les « petites unités », catégorie à laquelle le requérant appartenait au titre de la représentation du personnel au sein de la DG « Personnel et administration ». Cette position ne lui a cependant pas permis d’être promu dans le cadre de l’exercice de promotion 1998.

13      Le requérant a maintenu son recours en annulation dans l’affaire T‑180/99. Toutefois, le 13 avril 2000, le Tribunal de première instance a adopté dans cette affaire une ordonnance de radiation entérinant un accord conclu entre les parties, aux termes duquel il a été convenu que :

–        la Commission retirerait sa décision du 13 septembre 1999 en ce qu’elle classait le requérant en sixième position sur la liste des propositions de promotion pour les « petites unités » au titre de l’exercice de 1998 ;

–        la Commission procéderait à un réexamen de la situation du requérant pour l’exercice de promotion 1998 à l’occasion de l’exercice de promotion 2000 ;

–        la composition des groupes et du comité participant à l’exercice de promotion serait celle de l’exercice de promotion en cours.

14      Le 13 juin 2000, la Commission a informé le requérant que le groupe paritaire chargé de l’exercice de promotion pour les « petites unités » avait, conformément à l’accord intervenu devant le Tribunal de première instance, réexaminé sa situation concernant sa promotion vers le grade A 4 dans le cadre de l’exercice 1998. Au terme de cet examen, il a été décidé de le placer en sixième position sur la liste des propositions de promotion des « petites unités » vers le grade A 4, sans que cela soit accompagné de points de priorité, ce qui n’a pas permis au requérant d’être effectivement promu.

15      Le 23 juin 2000, le requérant a contesté cet ordre de proposition devant le groupe paritaire restreint qui, le 29 juin suivant, est parvenu à la conclusion qu’il n’y avait pas lieu de réserver une suite favorable à cette contestation. Le comité de promotion pour la catégorie A, lors de sa réunion du 18 juillet 2000, a entériné cette conclusion.

16      Par décision du 21 septembre 2000, la Commission a, dès lors, décidé de ne pas ajouter le nom du requérant à la liste des fonctionnaires de grade A 5 jugés les plus méritants pour obtenir une promotion au titre de l’exercice 1998 et, par voie de conséquence, de ne pas le promouvoir au grade A 4 dans le cadre de cet exercice.

17      Le 27 décembre 2000, le requérant a introduit à l’encontre de cette dernière décision une nouvelle réclamation, suivie d’un nouveau recours, introduit le 5 août 2001, devant le Tribunal de première instance (affaire T‑188/01).

18      Par arrêt du 19 mars 2003, Tsarnavas/Commission (T‑188/01 à T‑190/01, RecFP p. I‑A‑95 et II‑495, ci-après l’« arrêt Tsarnavas/Commission I »), le Tribunal de première instance a annulé la décision de la Commission du 21 septembre 2000 au motif que la Commission n’avait pas effectué d’examen comparatif des mérites du requérant avec ceux de tous les fonctionnaires promouvables du même grade, y compris les fonctionnaires des autres services (ci-après l’« examen comparatif élargi des mérites »).

19      La Commission a dès lors soumis une nouvelle fois le cas du requérant au comité de promotion pour la catégorie A.

20      À l’issue de l’examen effectué par ce comité, l’AIPN a, en date du 23 décembre 2003, décidé de ne pas ajouter le nom du requérant à la liste des fonctionnaires jugés les plus méritants pour obtenir une promotion vers le grade A 4 au titre de l’exercice 1998 et, par conséquent, de ne pas le promouvoir.

21      Cette décision a été portée à la connaissance du requérant le 15 mars 2004.

22      Le 9 avril 2004, le requérant a introduit une nouvelle réclamation, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut, contre la décision de l’AIPN du 23 décembre 2003.

23      Cette réclamation a fait l’objet d’une décision explicite de rejet de l’AIPN datée du 5 août 2004. Le requérant a introduit, le 20 novembre 2004, un recours devant le Tribunal de première instance qui, par arrêt du 23 janvier 2007, Tsarnavas/Commission (T‑472/04, non encore publié au Recueil, ci-après l’« arrêt Tsarnavas/Commission II »), a annulé la décision du 23 décembre 2003 au motif que la Commission n’avait pas effectué d’examen comparatif des mérites du requérant avec ceux de tous les fonctionnaires promouvables au grade A 4 au titre des exercices de promotion 1998 et 1999, y compris ceux qui, sans avoir été promus, avaient été inscrits sur les listes des fonctionnaires les plus méritants pour obtenir une promotion à ce grade et, en particulier, ceux qui, promus ou inscrits sur lesdites listes, avaient, au cours des exercices de promotion concernés, reçu une notation comparable ou inférieure à celle de l’intéressé. En tout état de cause, la décision du 23 décembre 2003 a été annulée pour défaut de motivation quant à ce dernier aspect.

 Sur l’exercice de promotion 1999

24      Le nom du requérant n’a figuré, dans le cadre de l’exercice de promotion 1999 vers le grade A 4, ni sur la liste des propositions de promotion, ni sur la liste des fonctionnaires jugés les plus méritants pour obtenir une promotion, ni sur la liste des fonctionnaires promus.

25      Le 12 novembre 1999, le requérant a introduit une réclamation en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, à l’encontre de la liste des fonctionnaires promus au titre de l’exercice 1999, au motif que son nom n’y figurait pas.

26      Cette dernière réclamation n’ayant fait l’objet d’aucune réponse, le requérant a introduit, le 14 juin 2000, un recours en annulation et en indemnité, pour préjudice moral, devant le Tribunal de première instance (affaire T‑161/00).

27      Le 20 juin 2000, la Commission a informé le requérant qu’elle avait décidé de retirer la décision de non-promotion vers le grade A 4 prise à son encontre au titre de l’exercice 1999 et que le comité de promotion pour la catégorie A réexaminerait son cas.

28      Par ordonnance du 6 juillet 2001, Tsarnavas/Commission (T‑161/00, RecFP p. I‑A‑155 et II‑721), le Tribunal de première instance a estimé qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur les conclusions en annulation du requérant et que le recours en indemnité était irrecevable pour non-respect de la procédure administrative préalable.

29      Le 29 juin 2000, le groupe paritaire restreint a considéré que les éléments relatifs à la situation administrative du requérant au terme de l’exercice de promotion 1998 n’étaient pas de nature à modifier l’appréciation qui avait été faite en son temps lors de l’exercice 1999. Le comité de promotion pour la catégorie A est arrivé à la même conclusion.

30      En conséquence, le 22 septembre 2000, l’AIPN a décidé de ne pas ajouter le nom du requérant à la liste des fonctionnaires de grade A 5 jugés les plus méritants pour obtenir une promotion au titre de l’exercice 1999 et, par conséquent, de ne pas le promouvoir au grade A 4 dans le cadre de cet exercice.

31      Le 27 décembre 2000, le requérant a introduit contre cette dernière décision une réclamation, suivie d’un nouveau recours, introduit le 5 août 2001, devant le Tribunal de première instance (affaire T‑189/01).

32      Par son arrêt Tsarnavas/Commission I, précité, ledit Tribunal a annulé la décision de la Commission, du 22 septembre 2000, au motif que celle-ci n’avait pas effectué d’examen comparatif élargi des mérites.

33      À l’issue d’un réexamen du cas du requérant par le comité de promotion pour la catégorie A, l’AIPN a adopté, le 23 décembre 2003, la décision de ne pas ajouter le nom de l’intéressé à la liste des fonctionnaires jugés les plus méritants pour obtenir une promotion vers le grade A 4 au titre de l’exercice 1999 et, par conséquent, de ne pas le promouvoir.

34      Cette décision a été portée à la connaissance du requérant le 15 mars 2004. Celui-ci l’a contesté, tout d’abord, par la réclamation susvisée du 9 avril 2004, rejetée par la décision de l’AIPN du 5 août 2004, puis par le recours T‑472/04, susmentionné.

35      Par son arrêt Tsarnavas/Commission II, précité, le Tribunal de première instance a annulé la décision de la Commission du 23 décembre 2003 pour les motifs résumés au point 23 du présent arrêt.

 Sur l’exercice de promotion 2000

36      Dans le cadre de l’exercice de promotion 2000 vers le grade A 4, le nom du requérant n’a pas figuré sur la liste des propositions de promotions. L’intéressé a saisi, le 8 juin 2000, le groupe paritaire restreint qui a, le 29 juin suivant, rejeté sa contestation, décision ensuite confirmée par le comité de promotion pour la catégorie A lors de sa réunion du 18 juillet 2000.

37      Le 14 août 2000, a été publiée sur le site intranet de la Commission la liste des fonctionnaires promus vers le grade A 4, sur laquelle le nom du requérant ne figurait pas.

38      Le 27 décembre 2000, le requérant a introduit une réclamation contre la décision de ne pas le promouvoir au titre de l’exercice 2000, suivie d’un recours en annulation devant le Tribunal de première instance (affaire T‑190/01). Par arrêt Tsarnavas/Commission I, précité, ce recours a été déclaré irrecevable en raison de la tardiveté de ladite réclamation.

 Sur le rapport de notation concernant la période 1997-1999

39      Le 29 juin 2002, le requérant a introduit un recours en indemnité en raison de l’établissement tardif de son rapport de notation pour la période 1997-1999 (affaire T‑200/02). Par ordonnance du 8 juillet 2004, non publiée, le Tribunal de première instance a déclaré ce recours irrecevable au motif que la procédure précontentieuse ne s’était pas déroulée conformément aux articles 90 et 91 du statut.

40      Le 6 août 2004, le requérant a introduit un recours en annulation à l’encontre dudit rapport de notation ainsi qu’un recours en indemnité pour le préjudice moral qu’il aurait subi en raison de l’établissement tardif de ce rapport de notation et du harcèlement moral dont il aurait été victime (affaire T‑343/04). Ce recours est pendant devant le Tribunal de première instance.

 Sur la demande indemnitaire relatives aux irrégularités commises dans le cadre des exercices de promotion 1998 et 1999

41      Le requérant a introduit, le 31 décembre 2004, au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, une demande d’indemnisation du préjudice matériel et moral subi du fait des fautes de service répétées commises par la Commission dans le cadre des exercices de promotion 1998 et 1999.

42      Cette demande a été rejetée par décision de l’AIPN du 1er avril 2005.

43      Le 8 juin 2005, le requérant a introduit une réclamation, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut, contre la décision de rejet de sa demande.

44      Par décision du 7 octobre 2005, l’AIPN a rejeté cette réclamation. Suite à ce rejet, le présent recours a été introduit.

 Conclusions des parties

45      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de l’AIPN, du 1er avril 2005, portant rejet de sa demande indemnitaire,

–        pour autant que de besoin, annuler la décision de l’AIPN, du 7 octobre 2005, portant rejet de sa réclamation,

–        condamner la partie défenderesse au paiement d’une indemnité de 72 000 euros pour le dommage matériel et moral subi du fait des irrégularités ou des fautes de service répétées, commises par la Commission dans le cadre des exercices de promotion 1998 et 1999,

–        condamner la partie défenderesse aux dépens de l’instance.

46      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours irrecevable,

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé,

–        statuer sur les dépens comme de droit.

 En droit

 Sur la recevabilité du recours

 Arguments des parties

47      La Commission estime que le recours est irrecevable pour deux motifs.

48      En premier lieu, la demande indemnitaire, en date du 31 décembre 2004, n’aurait pas été introduite dans un délai raisonnable. En effet, tous les faits reprochés se seraient produits entre le 13 septembre 1999 et le 19 mars 2003, date du prononcé de l’arrêt Tsarnavas/Commission I, précité, annulant les décisions des 21 et 22 septembre 2000 relatives aux exercices de promotion 1998 et 1999. Au 19 mars 2003 au plus tard, le requérant aurait eu connaissance de tous les éléments de fait et de droit lui permettant d’apprécier s’il convenait d’introduire une demande d’indemnisation pour les fautes de service prétendument commises par la Commission.

49      Or, le respect d’un délai raisonnable serait requis dans tous les cas où, dans le silence des textes, les principes de sécurité juridique ou de protection de la confiance légitime font obstacle à ce que les institutions communautaires et les personnes physiques ou morales agissent sans aucune limite de temps, risquant ainsi, notamment, de mettre en péril la stabilité de situations juridiques acquises.

50      Selon la jurisprudence, le caractère raisonnable d’un délai doit être apprécié en fonction des circonstances propres à chaque affaire et, notamment, de l’enjeu du litige pour l’intéressé, de la complexité de l’affaire et du comportement des parties en présence (arrêt du Tribunal de première instance du 5 octobre 2004, Eagle e.a./Commission, T‑144/02, Rec. p. II‑3381, point 66). Le délai de cinq ans considéré dans ce dernier arrêt comme raisonnable, en raison de la spécificité de l’affaire, ne saurait être transposé en l’espèce, le présent litige n’étant pas complexe et le retard pris pour déposer la demande indemnitaire étant la conséquence de l’inaction du requérant.

51      Le fait que ce dernier ait introduit un nouveau recours en novembre 2004 (affaire T‑472/04) ne modifierait en rien cette conclusion, dans la mesure où ce recours, dépendant de la seule volonté du requérant, ne constituerait pas un « fait nouveau et substantiel » justifiant la réouverture d’un délai (voir ordonnance du Tribunal de première instance du 25 mars 1998, Koopman/Commission, T‑202/97, RecFP p. I‑A‑163 et II‑511, point 23).

52      En second lieu, la Commission rappelle que, dans les affaires T‑188/01 à T‑190/01, le requérant a demandé l’annulation des décisions de la Commission de ne pas ajouter son nom sur la liste des fonctionnaires jugés les plus méritants pour obtenir une promotion vers le garde A 4 pour les exercices 1998, 1999 et 2000. Si le requérant estimait que la Commission, en adoptant ces décisions, avait commis à son encontre des fautes de service, il aurait dû, dans ces trois requêtes, inclure une demande visant à faire réparer les préjudices résultant desdites fautes.

53      Selon la Commission, il découle de la jurisprudence qu’un recours en indemnité doit être précédé d’une phase précontentieuse divisée en deux étapes uniquement lorsque ce recours vise à obtenir un dédommagement consécutif à un comportement non décisionnel (voir, en ce sens, ordonnance du 8 juillet 2004, Tsarnavas/Commission, précitée, points 46 à 48). De plus, selon la jurisprudence de la Cour, lorsqu’une action en indemnité peut être rattachée à l’action en annulation dont elle est l’accessoire, elle devrait, pour être recevable, être introduite en parallèle avec cette dernière (voir, en ce sens, arrêt du 13 juillet 1972, Heinemann/Commission, 79/71, Rec. p. 579, point 7).

54      En l’espèce, la demande indemnitaire serait l’accessoire du recours en annulation, puisque le dommage allégué aurait été causé par des actes faisant grief au sens de l’article 90 du statut.

55      La circonstance que le requérant ait omis « d’annexer » un recours en indemnité à ses recours en annulation, dans les affaires T‑188/01 à T‑190/01, ne l’autoriserait pas à créer, de manière artificielle, une possibilité de rouvrir des délais de recours en introduisant une demande en indemnité.

56      Le requérant rétorque, en ce qui concerne, en premier lieu, le prétendu non-respect d’un délai raisonnable, que l’action en responsabilité d’une institution n’est soumise à aucun délai de forclusion.

57      En l’occurrence, la demande en indemnité, du 31 décembre 2004, aurait été présentée dans un délai parfaitement raisonnable.

58      Entre 1998 et le 19 mars 2003, date du prononcé de l’arrêt Tsarnavas/Commission I, précité, la Commission aurait commis une impressionnante série d’irrégularités et de fautes de service, ce qui l’aurait contrainte à examiner la candidature du requérant à trois reprises pour l’exercice de promotion 1998 et à deux reprises pour celui de 1999. Le requérant ajoute que, suite à l’arrêt Tsarnavas/Commission I, précité, la Commission a examiné sa candidature une quatrième fois pour l’exercice de promotion 1998 et une troisième fois pour celui de 1999.

59      Ces réexamens auraient entraîné de nouvelles irrégularités de la part de la Commission, ce qui aurait justifié l’introduction d’un nouveau recours (affaire T‑472/04).

60      Devant la persistance de la Commission à commettre des irrégularités et fautes de service, le requérant n’aurait eu d’autre choix que d’introduire sa demande d’indemnisation du 31 décembre 2004. Il ajoute que, selon l’arrêt Eagle e.a./Commission, précité (points 57 à 71), un délai de cinq ans pour introduire une action en indemnité devrait être considéré comme raisonnable.

61      Par ailleurs, le requérant ne voit pas en quoi sa demande d’indemnisation mettrait en péril la stabilité de « situations juridiques acquises » dès lors que ladite demande a trait à des irrégularités et des fautes de service commises sans discontinuer par la Commission depuis 1998, dans le cadre des exercices de promotion 1998 et 1999, à tel point que ces procédures ne sont toujours pas clôturées. L’expression « situations juridiques acquises » semblerait donc peu appropriée en l’espèce, de sorte que la mise en péril d’une telle situation serait totalement exclue. Le requérant ne voit pas non plus à quelles espérances fondées nourries par des particuliers il aurait été porté atteinte en l’espèce.

62      Enfin, le requérant souligne qu’il n’a jamais prétendu que le recours introduit dans l’affaire T‑472/04 constituerait un fait nouveau justifiant la réouverture d’un quelconque délai, étant rappelé que le présent recours est un recours en indemnisation et non pas en annulation.

63      En ce qui concerne, en second lieu, le prétendu non-respect de la procédure, le requérant fait valoir que, contrairement à ce qu’affirme la Commission, le préjudice n’a pas été uniquement provoqué par des actes faisant grief au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, mais également par la répétition d’actes dépourvus de caractère décisionnel et qu’il qualifie de fautes de service.

64      Par conséquent, les dispositions des articles 90 et 91 du statut auraient imposé au requérant de suivre une procédure précontentieuse en deux phases.

65      En tout état de cause, même dans l’hypothèse où l’objet de la présente procédure serait la réparation d’un préjudice causé exclusivement par des actes faisant grief, rien n’aurait imposé à l’intéressé de joindre sa demande d’indemnisation à sa demande en annulation.

66      À cet égard, il ressort de la jurisprudence qu’un recours tendant à la réparation d’un préjudice causé par un acte faisant grief est subordonné à l’introduction d’un recours en annulation contre ce même acte dans les délais requis. Or, en l’espèce, le requérant a précisément introduit des recours en annulation contre les décisions de non-promotion au titre des exercices 1998 et 1999, recours qui ont conduit à l’arrêt d’annulation Tsarnavas/Commission I, précité.

67      S’il est vrai que, dans un souci d’économie de procédure, le requérant avait la faculté de joindre des recours en indemnisation aux différents recours en annulation qu’il avait introduits, il n’avait aucune obligation en ce sens et conservait la possibilité d’introduire une demande d’indemnisation séparément de ses demandes d’annulation.

68      Enfin, l’affirmation de la Commission selon laquelle le requérant aurait, de manière artificielle, tenté de rouvrir des délais de recours en introduisant une demande en indemnité, manquerait de pertinence dès lors que, en l’espèce, il a obtenu l’annulation des décisions de non‑promotion pour les exercices 1998 et 1999, de sorte qu’il n’avait nullement besoin de rouvrir lesdits délais.

 Appréciation du Tribunal

69      Il convient de rappeler à titre liminaire que, selon la jurisprudence, il incombe aux fonctionnaires ou agents de saisir dans un délai raisonnable l’institution de toute demande tendant à obtenir de la Communauté une indemnisation en raison d’un dommage qui serait imputable à celle-ci, ce à compter du moment où ils ont eu connaissance de la situation dont ils se plaignent (arrêt Eagle e.a./Commission, précité, points 65 et 66).

70      Le caractère raisonnable du délai doit être apprécié en fonction des circonstances propres à chaque affaire et, notamment, de l’enjeu du litige pour l’intéressé, de la complexité de l’affaire et du comportement des parties en présence (arrêt Eagle e.a./Commission, précité, point 66).

71      Il convient également, à cet égard, de tenir compte du point de comparaison offert par le délai de prescription de cinq ans prévu en matière d’action en responsabilité non contractuelle par l’article 46 du statut de la Cour de justice. Le Tribunal de première instance en a conclu, au point 71 de l’arrêt Eagle e.a./Commission, précité, que les intéressés, dès lors qu’ils estimaient faire l’objet d’un traitement discriminatoire illégal, auraient dû adresser une demande à l’institution communautaire tendant à ce qu’elle prît les mesures propres à réparer cette situation et à y mettre fin dans un délai raisonnable qui n’aurait pu excéder cinq ans à compter du moment où ils avaient eu connaissance de la situation dont ils se plaignaient.

72      En l’espèce, le requérant se plaint, s’agissant du préjudice matériel, d’avoir été contraint de faire appel à un conseil juridique pour introduire ses réclamations en dates des 13 janvier 1999, 12 novembre 1999 et 27 décembre 2000 (deux réclamations ayant été introduites à cette dernière date) et, s’agissant du préjudice moral, de l’état d’incertitude et d’inquiétude dans lequel il se serait trouvé, durant une longue période, quant à sa promotion éventuelle dans le cadre des exercices de promotion 1998 et 1999, ainsi que de la perte de confiance à l’égard de l’institution au service de laquelle il avait travaillé durant 25 ans.

–       Sur le préjudice matériel

73      S’agissant, en premier lieu, du préjudice matériel, il convient de constater qu’il recouvre les honoraires et frais réclamés par l’avocat du requérant dans le cadre de différentes procédures précontentieuses (réclamations du 13 janvier 1999, du 12 novembre 1999 et du 27 décembre 2000) relatives à des exercices de promotion distincts. Dans ces conditions, il y a lieu d’apprécier, au regard de chacune des procédures précontentieuses, le caractère raisonnable du délai dans lequel le requérant a introduit, le 31 décembre 2004, auprès de l’AIPN, son unique demande indemnitaire, laquelle se rapportait à l’ensemble desdites procédures précontentieuses.

74      En ce qui concerne la réclamation du 13 janvier 1999, force est de constater que presque six années se sont écoulées entre le moment où le requérant a confié la défense de ses intérêts à un avocat et où il a donc eu connaissance de la situation dont il se plaint dans le présent recours et l’introduction de sa demande indemnitaire. Un tel délai doit être considéré comme déraisonnable. Non seulement il est supérieur au délai de cinq ans visé à l’article 46 du statut de la Cour de justice, lequel, ainsi qu’il ressort du point 71 du présent arrêt, offre un point de comparaison pertinent, mais, de surcroît, ni l’enjeu du litige en cause ni la complexité de l’affaire ni encore le comportement des parties concernées ne justifient une durée aussi longue pour l’introduction de ladite demande indemnitaire.

75      Les mêmes considérations doivent conduire à reconnaître le caractère tardif de la demande indemnitaire du 31 décembre 2004 par rapport à la réclamation du 12 novembre 1999. En effet, plus de cinq ans s’étaient écoulés depuis l’introduction de celle-ci, date à partir de laquelle le requérant avait connaissance de la situation dont il se plaint dans le présent recours, sans que l’enjeu du litige ni la complexité de l’affaire ni encore le comportement des parties ne puissent justifier une période aussi longue.

76      Quant aux deux réclamations du 27 décembre 2000 concernant les décisions de la Commission, des 21 et 22 septembre 2000, de ne pas ajouter le nom du requérant à la liste des fonctionnaires de grade A 5 jugés les plus méritants pour obtenir une promotion au titre, d’une part, de l’exercice 1998 et, d’autre part, de l’exercice 1999, il convient de constater que quatre années et plus de trois mois se sont écoulés entre la date à laquelle le requérant avait connaissance de la situation dont il se plaint dans le présent recours et la demande indemnitaire du 31 décembre 2004.

77      Un tel délai doit également être considéré comme déraisonnable. En effet, d’abord, dans la mesure où les prétentions indemnitaires sont étroitement liées à l’illégalité des décisions attaquées, finalement constatée par le Tribunal de première instance dans son arrêt du 19 mars 2003, rien n’empêchait le requérant de formuler une demande indemnitaire dès le stade des recours contentieux T‑188/01 et T‑189/01.

78      Après le prononcé dudit arrêt, l’affaire ne présentait plus une complexité et le litige, un enjeu, de nature à justifier que plus de 21 mois se soient encore écoulés avant l’introduction de la demande indemnitaire, alors même que les données factuelles et pécuniaires de la demande d’indemnité pour préjudice matériel étaient, quant à elles, connues depuis le dépôt des différentes réclamations en 1999 et en 2000.

79      Enfin, le requérant n’a avancé aucun élément de nature à démontrer que le délai considérable à l’issue duquel il a saisi la Commission de sa demande indemnitaire s’expliquait par le comportement de cette dernière institution.

80      Il y a donc lieu de conclure que, en ce qu’il tend à la réparation du préjudice matériel, le présent recours doit être considéré comme irrecevable, la demande indemnitaire n’ayant pas été adressée à la Commission dans un délai raisonnable à compter du moment où le requérant a eu connaissance des diverses situations dont il se plaint.

–       Sur le préjudice moral

81      S’agissant, en second lieu, du préjudice moral, il convient de constater que le requérant ne cherche pas à obtenir, par ses conclusions en indemnité, la réparation des seuls effets des actes annulés par l’arrêt Tsarnavas/Commission I, précité, à savoir sa non-promotion au grade A 4 à l’occasion des exercices 1998 et 1999, mais la réparation d’un préjudice causé par un ensemble d’actes et de comportements de la Commission qui doivent faire l’objet d’une appréciation globale, dont la légalité et les effets ne peuvent être perçus que dans leur ensemble (ordonnance du 6 juillet 2001, Tsarnavas/Commission, précitée, point 37).

82      Ainsi, le préjudice prétendument subi par le requérant ne résultant pas d’actes dont l’annulation est demandée ou a été obtenue devant le juge communautaire, mais de plusieurs fautes et omissions prétendument commises par la Commission, le requérant a respecté, comme il se doit, avant l’introduction du présent recours, la procédure administrative en deux étapes, au sens de l’article 90 du statut, en invitant dans un premier temps, le 31 décembre 2004, l’AIPN à réparer le préjudice invoqué et en introduisant, dans un second temps, le 8 juin 2005, une réclamation (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 24 janvier 1991, Latham/Commission, T‑27/90, Rec. p. II‑35, points 38 et 39 ; ordonnances du Tribunal de première instance du 28 janvier 1993, Piette de Stachelski/Commission, T‑53/92, Rec. p. II‑35, points 17 et 18, et du 6 juillet 2001, Tsarnavas/Commission, précitée, point 38).

83      Pour apprécier le caractère raisonnable du délai d’introduction de la demande indemnitaire, le prononcé de l’arrêt du 19 mars 2003, Tsarnavas/Commission I, précité, constitue une étape importante dans la perception que le requérant pouvait avoir du préjudice moral dont il se plaint dans le cadre du présent recours. Dans ces conditions, un délai de 23 mois à compter de cette date, au terme duquel la demande indemnitaire a été introduite, ne saurait être considéré comme déraisonnable.

84      En conséquence, il y a lieu de considérer que le présent recours, en ce qu’il tend à la réparation d’un préjudice moral consécutif à une faute de service, est recevable.

 Sur le fond

 Arguments des parties

85      En ce qui concerne le préjudice moral allégué, le requérant invoque, d’une part, l’état d’incertitude et d’inquiétude dans lequel il se serait trouvé, durant une longue période, de 5 à 6 ans, quant à sa promotion éventuelle dans le cadre des exercices de promotion 1998 et 1999, et, d’autre part, sa grave perte de confiance à l’égard de l’institution au service de laquelle il a travaillé durant 25 ans.

86      Ce n’est dès lors pas l’absence de promotion que le requérant reproche à la Commission, mais bien la répétition des irrégularités qui auraient nécessité plusieurs réexamens de sa candidature à une telle promotion, à tel point qu’après plus de cinq ans, il n’aurait toujours pas été fixé quant à sa promotion éventuelle dans le cadre des exercices 1998 et 1999.

87      Le requérant conteste la position de la Commission selon laquelle la longueur de la procédure d’examen serait le résultat direct des recours qu’il aurait introduits. Une telle position reviendrait à considérer que le requérant aurait lui-même causé son propre dommage et aurait dû accepter de bonne grâce les décisions irrégulières. Toute infraction statutaire qui provoque un dommage créerait, chez la victime, un droit au dédommagement selon les conditions applicables en matière de responsabilité.

88      Par ailleurs, le fait que le requérant soit actuellement en invalidité, situation à laquelle les sentiments d’inquiétude et d’incertitude qu’il aurait été amené à ressentir ne seraient d’ailleurs pas étrangers, n’enlèverait rien à son droit à ce que sa vocation à la promotion soit examinée d’une manière équitable et régulière. De plus, il aurait toujours vocation à la carrière, plus précisément lorsque sa mise en invalidité prendra fin et qu’il réintègrera la Commission.

89      Enfin, la circonstance que le requérant obtienne gain de cause dans l’affaire T‑472/04 (ce qui s’est réalisé après le prononcé de l’arrêt du 23 janvier 2007, Tsarnavas/Commission II, précité) ne serait pas de nature à éliminer le préjudice moral subi.

90      Le requérant propose d’évaluer le préjudice moral subi à 10 000 euros par année pour les deux exercices de promotion confondus, soit, au total, 60 000 euros.

91      La Commission réfute l’analyse du requérant.

92      Elle observe que celui-ci ne disposerait d’aucun droit à une promotion, ce qui distinguerait fondamentalement l’exercice de promotion de l’établissement des rapports de notation.

93      Ce serait en raison de l’existence d’une obligation pour l’institution d’établir un rapport de notation que le Tribunal de première instance a jugé que l’absence ou le retard dans l’établissement d’un tel rapport peut constituer une « faute de service » susceptible d’entraîner un état d’incertitude et d’inquiétude chez le fonctionnaire concerné quant à son avenir professionnel, justifiant dès lors l’octroi d’une indemnisation pour préjudice moral. Il n’en irait pas de même en ce qui concerne les promotions.

94      La Commission observe que, en l’occurrence, à la suite de l’arrêt du Tribunal de première instance du 19 mars 2003, l’AIPN a de nouveau procédé à l’examen comparatif élargi des mérites, en s’appuyant sur l’avis du comité de promotion, et a décidé de ne pas ajouter le nom du requérant sur la liste des fonctionnaires les plus méritants pour obtenir une promotion au titre des exercices 1998 et 1999. La Commission n’aurait donc pas, contrairement à ce que soutient le requérant, laissé ce dernier dans un état d’incertitude ou d’inquiétude puisqu’elle a adopté des décisions concernant sa promotion.

95      Selon la Commission, l’annulation d’une décision de non-promotion constitue en elle-même une réparation du préjudice moral dont s’estimerait victime le fonctionnaire concerné.

96      Pour le surplus, la Commission note que l’intéressé est en invalidité depuis le 1er mai 2002 et qu’il ne peut dès lors plus, depuis cette date, prétendre se trouver dans un état d’incertitude quant à son avenir professionnel (voir arrêt du Tribunal de première instance du 31 mai 2005, Dionyssopoulou/Conseil, T‑105/03, RecFP p. II‑621, point 39). La Commission ajoute que le préjudice allégué n’est devenu réel et certain qu’à la date du prononcé de l’arrêt Tsarnavas/Commission I, précité. Or, à cette date, le requérant était en invalidité depuis près d’un an. De plus, sa réintégration au sein de la Commission serait purement hypothétique, de telle sorte que, pour ce motif également, le préjudice moral allégué ne serait ni réel ni certain.

97      Enfin, la Commission s’étonne du montant réclamé par le requérant au titre de son prétendu préjudice moral. Un tel montant ne serait pas raisonnable.

 Appréciation du Tribunal

98      Il ressort du dossier que la décision de l’AIPN, du 23 décembre 2003, de n’ajouter le nom du requérant à la liste des fonctionnaires les plus méritants pour obtenir une promotion vers le grade A 4 ni au titre de l’exercice 1998 ni au titre de l’exercice 1999 a été précédée de plusieurs litiges ayant opposé l’intéressé à la Commission, dont notamment les suivants :

–        le premier litige concernait la date à prendre en compte pour sa réaffectation au sein de la DG « Concurrence », pour l’exercice de promotion 1998 : selon que cette date était antérieure ou postérieure au 5 mai 1997, date retenue par l’administration comme étant la date charnière pour déterminer quelle était la DG compétente en matière de promotions, le requérant aurait dépendu de la DG « Personnel et administration » (où il espérait pouvoir figurer sur la liste des propositions de promotion pour les « petites unités ») ou de la DG « Concurrence » (où il n’aurait pas été inclus sur la liste des propositions de promotion). Ce litige a donné lieu à une réclamation, suivie d’un recours (affaire T‑180/99) et, finalement, à l’ordonnance de radiation du 13 avril 2000, Tsarnavas/Commission, précitée, entérinant un accord entre les parties (le requérant ayant été classé en sixième position sur la liste des propositions de promotion pour les « petites unités » relevant de la DG « Personnel et administration ») ;

–        le deuxième litige concernait la décision de la Commission, du 21 septembre 2000, de ne pas ajouter le nom du requérant à la liste des fonctionnaires de grade A jugés les plus méritants et, par voie de conséquence, de ne pas le promouvoir au grade A 4 dans le cadre de l’exercice de promotion 1998. Ce litige a donné lieu à une réclamation, suivie d’un recours (affaire T‑188/01) et à l’arrêt Tsarnavas/Commission I, précité, annulant ladite décision au motif que la Commission n’avait pas effectué d’examen comparatif élargi des mérites ;

–        le 12 novembre 1999, le requérant a introduit une réclamation, puis, le 14 juin 2000, un recours (affaire T‑161/00) contre la liste des fonctionnaires promus au titre de l’exercice 1999, au motif que son nom n’y figurait pas. La Commission ayant retiré la décision de non-promotion vers le grade A 4 prise à son encontre, le Tribunal de première instance a estimé, notamment, qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur les conclusions en annulation dans l’affaire T‑161/00 ;

–        le 22 septembre 2000, l’AIPN a décidé de ne pas ajouter le nom du requérant à la liste des fonctionnaires de grade A 5 jugés les plus méritants au titre de l’exercice 1999 et, par conséquent, de ne pas le promouvoir au grade A 4. Le requérant a introduit une réclamation, suivie d’un nouveau recours devant le Tribunal de première instance (affaire T‑189/01) qui, par arrêt Tsarnavas/Commission I, précité, a annulé la décision susmentionnée, au motif que la Commission n’avait pas effectué un examen comparatif élargi des mérites.

99      Il y a lieu de constater que les diverses réclamations introduites par le requérant, rappelées ci-dessus, ont donné lieu tantôt à un accord entre les parties, tantôt au retrait de l’acte attaqué, ou encore à un arrêt d’annulation du Tribunal de première instance. Une telle succession de contestations émanant du requérant et s’étant révélées, à tout le moins, en partie justifiées, est le résultat d’un manque de bonne gestion administrative de la part des services de la Commission, ce qui est de nature à constituer une faute de service. Celle-ci a eu pour effet d’entraîner un retard dans le déroulement des exercices de promotion concernés pour le requérant ainsi qu’un état d’incertitude et d’inquiétude chez ce dernier quant à son avenir professionnel, justifiant l’octroi d’un dédommagement pour préjudice moral.

100    La circonstance que le requérant soit en invalidité depuis le 1er mai 2002 n’est pas de nature à éliminer un tel préjudice, subi du fait du comportement de la Commission en rapport avec la promotion éventuelle de l’intéressé au grade A 4 pour les exercices 1998 et 1999.

101    Quant à la réparation du préjudice moral, évaluée par le requérant à 60 000 euros, il y a lieu de considérer un tel montant, qui ne repose sur aucune démonstration, comme excessif. Au vu des circonstances de l’espèce, il sera fait une juste appréciation dudit préjudice en l’évaluant à 3 000 euros.

 Sur les dépens

102    Ainsi que le Tribunal l’a jugé dans son arrêt du 26 avril 2006, Falcione/Commission (F‑16/05, non encore publié au Recueil, points 77 à 86), aussi longtemps que le règlement de procédure du Tribunal et, notamment, les dispositions particulières relatives aux dépens ne sont pas entrés en vigueur, il y a lieu, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice et afin de garantir aux justiciables une prévisibilité suffisante quant aux règles relatives aux frais de l’instance, de faire seulement application du règlement de procédure du Tribunal de première instance.

103    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure de ce dernier Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, les frais exposés par les institutions dans les recours des agents des Communautés restent à la charge de celles-ci. Lorsque les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, le Tribunal peut, en application de l’article 87, paragraphe 3, premier alinéa, du même règlement, répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

104    Ainsi, le recours n’ayant été que partiellement accueilli, il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en décidant que la Commission supporte ses propres dépens ainsi qu’un tiers des dépens exposés par le requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La Commission des Communautés européennes est condamnée à payer à M. Tsarnavas une somme de 3 000 euros à titre de réparation du préjudice moral.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission des Communautés européennes supporte ses propres dépens et le tiers des dépens exposés par M. Tsarnavas.

4)      M. Tsarnavas supporte deux tiers de ses propres dépens.

Van Raepenbusch

Boruta

Kanninen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 1er février 2007.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

      S. Van Raepenbusch      


* Langue de procédure : le français.