Language of document : ECLI:EU:F:2013:193

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)

11 décembre 2013 (*)

« Fonction publique – Sécurité sociale – Accident ou maladie professionnelle – Article 73 du statut – Invalidité permanente partielle – Demande d’indemnité »

Dans l’affaire F‑142/12,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

A, ancien fonctionnaire de la Commission européenne, demeurant à S. (France), représenté par Mes B. Cambier, A. Paternostre et G. Ladrière, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. V. Joris, en qualité d’agent, assisté de Me C. Mélotte, avocat,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre),

composé de MM. S. Van Raepenbusch (rapporteur), président, R. Barents et K. Bradley, juges,

greffier : M. J. Tomac, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 3 juillet 2013,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 16 novembre 2012, A a introduit le présent recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision de la Commission européenne du 11 janvier 2012 lui reconnaissant un taux d’invalidité permanente partielle (ci-après le « taux d’IPP ») de 20 % et fixant la date de consolidation des séquelles de sa maladie professionnelle au 25 février 2010 et, d’autre part, à la condamnation de la Commission à l’indemniser de différents préjudices subis en raison, d’une part, de la longueur excessive de la procédure ayant conduit à la décision du 11 janvier 2012 et, d’autre part, de sa maladie professionnelle.

 Cadre juridique

1.     Dispositions relatives à la couverture des risques de maladie professionnelle et d’accident

2        L’article 73 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») dispose :

« 1.      Dans les conditions fixées par une réglementation établie d’un commun accord des institutions […], après avis du comité du statut, le fonctionnaire est couvert, dès le jour de son entrée en service, contre les risques de maladie professionnelle et les risques d’accident. […]

[…]

2.      Les prestations garanties sont les suivantes :

a)      […]

b)      [e]n cas d’invalidité permanente totale :

[p]aiement à l’intéressé d’un capital égal à huit fois son traitement de base annuel calculé sur la base des traitements mensuels alloués pour les douze mois précédant l’accident ;

c)      [e]n cas d’[IPP] :

[p]aiement à l’intéressé d’une partie de l’indemnité prévue [sous b),] calculée sur la base du barème fixé par la réglementation prévue au paragraphe 1 […].

[…] »

3        Le 13 décembre 2005, les institutions ont arrêté une réglementation commune relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires, laquelle est entrée en vigueur le 1er janvier 2006 (ci-après la « réglementation de couverture » ou la « nouvelle réglementation de couverture »). Avant cette date était applicable la réglementation commune relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires, modifiée en dernier lieu le 18 juillet 1997 (ci-après l’« ancienne réglementation de couverture »).

4        En vertu de l’article 11, paragraphe 1, de la nouvelle réglementation de couverture, l’invalidité permanente totale et l’IPP sont mesurées par l’atteinte à l’intégrité physico-psychique (ci-après l’« AIPP ») telle que fixée par le barème européen d’évaluation à des fins médicales des AIPP, annexé à ladite réglementation (ci-après le « barème » ou le « nouveau barème »).

5        L’article 11, paragraphe 2, de la nouvelle réglementation de couverture dispose que, en cas d’invalidité permanente totale de l’assuré résultant d’un accident ou d’une maladie professionnelle, l’AIPP est de 100 % et le capital prévu à l’article 73, paragraphe 2, sous b), du statut est versé à l’assuré. Selon l’article 11, paragraphe 3, de la nouvelle réglementation de couverture, en cas d’IPP de l’assuré résultant d’un accident ou d’une maladie professionnelle, le capital prévu à l’article 73, paragraphe 2, sous c), du statut et déterminé en fonction des taux prévus au nouveau barème est versé à l’intéressé.

6        L’article 12 de l’ancienne réglementation de couverture était rédigé comme suit :

« 1.      En cas d’invalidité permanente totale du fonctionnaire résultant d’un accident ou d’une maladie professionnelle, le capital prévu à l’article 73, paragraphe 2, [sous] b), du statut lui est versé.

2.      En cas d’[IPP] du fonctionnaire résultant d’un accident ou d’une maladie professionnelle, le capital déterminé en fonction des taux prévus au barème d’invalidité figurant en annexe lui est versé. »

7        L’article 13 de la nouvelle réglementation de couverture prévoit :

« Sur avis des médecins désignés par les institutions ou de la commission médicale visée à l’article 22, une indemnité complémentaire à l’IPP est accordée à l’assuré pour le préjudice esthétique, le préjudice sexuel (hormis la reproduction), les douleurs exceptionnelles non objectivées mais médicalement plausibles, l’atteinte aux activités de loisirs spécifiques à l’assuré.

[…] »

8        En vertu de l’article 16, paragraphe 1, premier alinéa, première phrase, de la nouvelle réglementation de couverture, le fonctionnaire qui demande l’application de ladite réglementation pour cause de maladie professionnelle doit faire une déclaration à l’administration dans un délai raisonnable suivant le début de la maladie ou la date de la première constatation médicale.

9        Aux termes de l’article 16, paragraphe 2, de la réglementation de couverture, l’administration procède à une enquête en vue de recueillir tous les éléments permettant d’établir la nature de l’affection, son origine professionnelle ainsi que les circonstances dans lesquelles elle s’est produite.

10      En vertu de l’article 17, premier alinéa, de la réglementation de couverture, l’administration peut solliciter toute expertise médicale nécessaire pour l’application de ladite réglementation.

11      L’article 18 de la réglementation de couverture prévoit que les décisions relatives à la reconnaissance de l’origine accidentelle d’un événement ou à la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie, ainsi qu’à la fixation du degré d’invalidité permanente, sont prises par l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») suivant la procédure prévue à l’article 20 de cette même réglementation, sur la base des conclusions émises par le ou les médecins désignés par les institutions et, si l’assuré le requiert, après consultation de la commission médicale prévue à l’article 22 de ladite réglementation.

12      En vertu de l’article 19, paragraphes 3, 4 et 5, de la réglementation de couverture :

« 3.      La décision portant fixation du degré d’invalidité intervient après la consolidation des lésions de l’assuré. Les séquelles de l’accident ou de la maladie professionnelle sont consolidées lorsque ces séquelles sont stabilisées ou qu’elles ne s’atténueront que très lentement et d’une façon très limitée. […]

Lorsque, après cessation du traitement médical, le degré d’invalidité ne peut pas encore être fixé définitivement, l’avis du ou des médecins visés à l’article 18 ou, le cas échéant, le rapport de la commission médicale prévue à l’article 22 doit préciser la date à laquelle le dossier de l’assuré doit être réexaminé au plus tard.

4.      En cas de maladie professionnelle reconnue, l’[AIPN] alloue une indemnité provisionnelle correspondant à la fraction non litigieuse du taux d’invalidité permanente. Cette indemnité est imputée sur les prestations définitives.

5.      La disposition prévue au paragraphe 4 est d’application pour les décisions relatives aux accidents si le degré d’invalidité s’élève à 20 % au moins. »

13      L’article 20 de la réglementation de couverture dispose :

« 1.      Avant de prendre une décision en vertu de l’article 18, l’[AIPN] notifie à l’assuré ou à ses ayants droit le projet de décision, accompagné des conclusions du ou des médecins désignés par l’institution. L’assuré ou ses ayants droit peuvent demander que le rapport médical complet soit transmis au médecin de leur choix ou que celui[-]ci leur soit communiqué.

2.      L’assuré ou ses ayants droit peuvent, dans un délai de [60] jours, demander que la commission médicale prévue à l’article 22 donne son avis. La demande de saisine de la commission médicale doit préciser le nom du médecin représentant l’assuré ou ses ayants droit [et être] accompagnée du rapport de ce médecin précisant les questions médicales contestées au médecin ou aux médecins désignés par l’institution aux fins de l’application des dispositions de la présente réglementation.

3.      Si, à l’expiration de ce délai, aucune demande de consultation de la commission médicale n’a été déposée, l’[AIPN] prend la décision telle que le projet en a été notifié. »

14      Aux termes de l’article 22 de la réglementation de couverture :

« 1.      La commission médicale est composée de trois médecins désignés :

–        le premier, par l’assuré ou ses ayants droit,

–        le deuxième, par l’[AIPN],

–        le troisième, du commun accord des deux médecins ainsi désignés.

[…]

3.      […]

Au terme de ses travaux, la commission médicale consigne ses conclusions dans un rapport qui est adressé à l’[AIPN].

Sur la base de ce rapport, l’[AIPN] notifie à l’assuré ou ses ayants droit sa décision accompagnée des conclusions de la commission médicale […]

[…] »

15      L’article 25 de la réglementation de couverture précise que la reconnaissance d’une invalidité permanente totale ou partielle, en application de l’article 73 du statut et de cette même réglementation, ne préjuge en aucune façon de l’application de l’article 78 du statut et réciproquement.

16      L’annexe B de la réglementation de couverture fixe les modalités pratiques d’utilisation du barème et définit notamment les notions d’invalidité permanente et de taux d’invalidité.

17      Pour l’application du barème, l’invalidité permanente est définie comme « la réduction définitive du potentiel physique et/ou psychique médicalement constatable ou médicalement explicable, à laquelle s’ajoutent les douleurs et les répercussions psychiques que le médecin sait normalement liées à la séquelle ainsi que les conséquences dans la vie de tous les jours habituellement et objectivement liées à cette séquelle ».

18      Le taux d’invalidité est défini comme « l’ordre de grandeur, rapporté à un maximum théorique de 100 %, de la difficulté que ressent tout sujet dont les séquelles sont ainsi quantifiées à effectuer les gestes et actes habituels de la vie quotidienne ».

2.     Dispositions relatives aux prestations servies en cas d’invalidité

19      Selon l’article 53 du statut, le fonctionnaire reconnu par la commission d’invalidité comme remplissant les conditions prévues à l’article 78 du statut est mis d’office à la retraite le dernier jour du mois au cours duquel est prise la décision de l’AIPN constatant l’incapacité définitive pour le fonctionnaire d’exercer ses fonctions.

20      L’article 78, premier alinéa, du statut énonce :

« […] [L]e fonctionnaire a droit à une allocation d’invalidité lorsqu’il est atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de son groupe de fonctions. »

21      Selon l’article 78, troisième alinéa, du statut, le taux de l’allocation d’invalidité est fixé à 70 % du dernier traitement de base du fonctionnaire.

22      L’article 78, quatrième alinéa, du statut précise que l’allocation d’invalidité est soumise à la contribution au régime de pensions, calculée sur la base de ladite allocation.

23      En vertu de l’article 78, cinquième alinéa, du statut, lorsque l’invalidité résulte d’une maladie professionnelle, l’institution prend à sa charge la totalité de la contribution au régime de pensions à laquelle l’allocation d’invalidité est soumise.

24      Aux termes de l’article 13 de l’annexe VIII du statut, intitulée « Modalités du régime de pensions » :

« 1.      Sous réserve des dispositions de l’article 1er, paragraphe 1, [de la présente annexe], le fonctionnaire âgé de moins de 65 ans qui, au cours de la période durant laquelle il acquérait des droits à pension, est reconnu par la commission d’invalidité comme atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière et qui, pour ce motif, est tenu de suspendre son service […], a droit, tant que dure cette incapacité, à l’allocation d’invalidité visée à l’article 78 du statut.

[…] »

 Faits à l’origine du litige

25      Le requérant est un ancien fonctionnaire de grade AD 15, entré au service de la Commission en 1979.

26      Le 18 mars 2003, le requérant a été inculpé par un juge d’instruction du tribunal de première instance de Bruxelles (Belgique) pour faux en écriture et escroquerie, en même temps que Mme Cresson, alors membre de la Commission, un collaborateur de Mme Cresson et sept autres fonctionnaires et agents de la Commission (ci-après l’« affaire Berthelot »). Cette instruction pénale a été clôturée le 30 juin 2004 par une ordonnance de non-lieu. Cette ordonnance constatait en particulier que, si le dossier d’instruction permettait de retenir des charges en ce qui concerne l’existence de faux et d’escroqueries, aucun indice ne permettait de se tourner à coup sûr vers un des inculpés mis en cause par l’instruction.

27      À la suite de son inculpation par la justice belge, le requérant a subi une dépression nerveuse nécessitant plusieurs arrêts de travail.

28      Deux procédures administratives ont été ouvertes en raison de cette maladie du requérant, la première au titre de l’article 73 du statut, la seconde au titre de l’article 78 du statut.

1.     La procédure ouverte au titre de l’article 73 du statut

29      Le 25 juillet 2003, le requérant a adressé à la Commission une déclaration tendant à la reconnaissance de l’origine professionnelle de sa maladie. Le 31 juillet suivant, la Commission a accusé réception de cette déclaration et informé le requérant qu’une enquête serait menée afin d’établir la nature et l’origine de son affection.

30      Le 16 mars 2007, la Commission a notifié au requérant un projet de décision refusant de reconnaître l’origine professionnelle de sa maladie, sur la base des conclusions adoptées par le médecin désigné par l’institution.

31      Le 3 mai 2007, le requérant a demandé la constitution de la commission médicale prévue par l’article 22 de la réglementation de couverture.

32      Dans son rapport daté du 5 décembre 2007, la commission médicale a reconnu, à l’unanimité, l’origine professionnelle de la maladie du requérant. Les conclusions dudit rapport étaient rédigées en ces termes :

« 1.      Suite au choc psychologique qu’il a subi dans le cadre de ses activités professionnelles le [7 avril] 2003, [le requérant] s’est trouvé en état d’incapacité temporaire totale de travail, depuis le 10 avril 2003 et au moins jusqu’au 31 août 2003.

2.      Par la suite, [le requérant] a tenté deux brèves reprises de travail, mais sans succès, d’où rechutes en incapacité totale temporaire qui sont manifestement en relation avec le processus pathologique initial.

3.      Au moment de la clôture de cette expertise médicale, [le requérant] se trouve toujours en état d’incapacité totale temporaire et sa situation ne paraît pas consolidable.

4.      [Le requérant] devra être revu dans un délai de deux ans environ, à la requête de la partie la plus diligente.

[…] »

33      Par ailleurs, dans la partie « D[iscussion] » de son rapport, la commission médicale écrivait que « la situation médical[e du requérant] ne s’[était] guère modifiée depuis 2005 ». Elle indiquait également que, « [c]onstatant le bien-fondé de la remarque du [médecin désigné par le requérant pour le représenter] concernant le fait que [celui-ci était] en instance d’une décision de la [c]ommission [d]isciplinaire, on [devait] bien admettre qu’il exist[ait] une relation causale persistante entre l’état anxio-dépressif [du requérant] et un problème administratif en rapport direct avec son activité professionnelle ». La commission médicale en tirait la conclusion, par un avis émis à l’unanimité, que « [d]ans ces conditions, […] l’état psychologique [du requérant devait] être considéré comme toujours en évolution et que son état n’[était] donc pas consolidable au stade actuel ». Elle précisait enfin, toujours par un avis émis à l’unanimité, que, « [c]ompte tenu de ces différents éléments, [elle] estim[ait] justifié que [le requérant fût] reconnu en incapacité de plus de 66 % à partir du [18 mars] 2003 ».

34      Le 28 mars 2008, le chef du secteur « Assurance accidents et maladies professionnelles » de l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » de la Commission (PMO) a envoyé au requérant un courrier aux termes duquel il reconnaissait l’origine professionnelle de la maladie du requérant.

35      Le 8 avril 2008, le requérant a sollicité du chef du secteur « Assurance accidents et maladies professionnelles » du PMO la « mise en œuvre [à son profit] de l’article 73, [paragraphe] 2, [sous] b), du statut ». Celui-ci, dans un courrier du 28 avril suivant, a refusé de faire droit à la demande du requérant, faisant valoir, en particulier, que, dans le rapport de la commission médicale du 5 décembre 2007, il avait été constaté que son état de santé n’était pas « encore consolidable » et qu’il était, en conséquence, impossible pour l’administration de se prononcer, à ce stade, sur la mise en œuvre à son égard de l’article 73 du statut.

36      Le 24 août 2010, la commission médicale, saisie début mai 2010 par les services de la Commission aux fins de révision de la situation médicale du requérant, a estimé dans un nouveau rapport qu’« il [était] apparu que la situation médicale n’avait guère évolué et paraissait bien en mesure d’être consolidée ». Elle a également conclu qu’« il [était] absolument nécessaire d’obtenir un bilan neurocognitif complet et un bilan psychopathologique afin d’objectiver les plaintes [du requérant] » et que « sauf situation exceptionnelle […] elle pourra[it] prévoir de déposer son rapport sur la base des constatations actualisées et des bilans effectués ».

37      Les bilans sollicités par la commission médicale ont été effectués le 24 mai 2011 par des experts désignés à cet effet. Dans ces bilans, les experts ont conclu que « [s]eul le conflit juridique qui oppos[ait] [le requérant] à la [C]ommission […] [devait] être retenu comme cause explicative des séquelles neuropsychologiques et psychopathologiques ».

38      Dans son rapport du 19 septembre 2011, la commission médicale a finalement conclu que le cas du requérant semblait « assez stabilisé » et a proposé, à l’unanimité, de fixer la date de consolidation « [à la date] de la première séance d’expertise médicale, le [7 novembre] 2007, c’est-à-dire au moment où les médecins ont pu prendre connaissance de l’ensemble du dossier et des plaintes [du requérant] », ajoutant que, « [e]ffectivement, il n’y a[vait] plus d’évolution significative depuis lors ». La commission médicale s’est néanmoins montrée partagée dans ses conclusions quant au taux d’IPP à retenir, deux médecins estimant que « le bilan séquellaire correspond[ait] à l’article 9-1 b [du barème], soit [à] ‘un trouble dépressif majeur moyen’, donnant lieu à la reconnaissance d’une [invalidité] partielle permanente de [20 %] » ; l’autre médecin proposant de fixer ce taux à 15 %, estimant que « le bilan séquellaire correspond[ait] [aux] article[s] 9-2, [soit à des] troubles dépressifs majeurs légers[,] et […] 3-4 [du barème, soit à des] troubles cognitifs mineurs ».

39      Par décision du 11 janvier 2012, le chef du secteur « Assurance accidents et maladies professionnelles » du PMO a reconnu au requérant, après avoir pris connaissance du rapport de la commission médicale du 19 septembre 2011, un taux d’IPP de 20 % et fixé la date de consolidation au 25 février 2010. Dans son mémoire en défense, la Commission a indiqué que l’AIPN avait retenu comme date de consolidation celle à laquelle le requérant avait été réexaminé par le médecin désigné par la Commission, « [c]ompte tenu du premier avis de la commission médicale [rendu fin 2007] d’attendre deux ans pour se prononcer sur le taux d’invalidité et sur la date de consolidation, et dans l’intérêt même du requérant ».

40      Le requérant a introduit le 11 avril 2012 une réclamation contre la décision du 11 janvier 2012. La réclamation a été rejetée par une décision du 7 août 2012.

2.     La procédure ouverte au titre de l’article 78 du statut

41      Par courrier du 25 mai 2004, le chef du service médical de la Commission à Bruxelles a informé le requérant que, au vu du nombre de ses jours d’absence pour cause de maladie, il envisageait de demander à l’AIPN d’ouvrir une procédure d’invalidité à son égard, et lui a demandé s’il avait des objections à formuler à ce propos.

42      Par courrier du 23 juin 2004, le requérant a répondu qu’il ne s’opposait pas à l’ouverture d’une procédure d’invalidité, à condition que celle-ci se fondât exclusivement sur l’article 78, cinquième alinéa, du statut, relatif notamment au cas dans lequel l’invalidité résulte d’une maladie professionnelle.

43      Le 29 juin 2004, le chef du service médical de la Commission à Bruxelles a répondu au requérant qu’il avait pris bonne note de son courrier du 23 juin précédent. Il lui a également indiqué qu’il tenait à attirer son attention sur le fait qu’il n’était pas possible de présumer des conclusions de la commission d’invalidité, notamment en ce qui concerne l’origine professionnelle de l’invalidité, mais que la commission d’invalidité aurait à examiner cette question.

44      Le 29 octobre 2004, la commission d’invalidité a rendu un avis selon lequel le requérant était atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière. La commission d’invalidité précisait dans son avis qu’elle ne s’était pas prononcée, à ce stade, sur l’éventuelle relation entre l’invalidité constatée et l’activité professionnelle du requérant, compte tenu du fait qu’une procédure tendant à la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie de celui-ci était en cours.

45      Par décision de l’AIPN du 8 novembre 2004 prenant effet le 30 novembre suivant, le requérant a été mis d’office à la retraite, sur le fondement de l’article 53 du statut, et admis au bénéfice d’une allocation d’invalidité fixée conformément à l’article 78, troisième alinéa, du statut.

46      Le 9 juin 2008, la commission d’invalidité s’est réunie à nouveau et, au vu du rapport de la commission médicale du 5 décembre 2007, a conclu que l’invalidité du requérant était d’origine professionnelle.

47      Par décision du 16 juin 2008, annulant et remplaçant la décision du 8 novembre 2004, l’AIPN, au vu des conclusions de la commission d’invalidité du 9 juin 2008, a admis le requérant au bénéfice d’une allocation d’invalidité fixée conformément aux dispositions de l’article 78, cinquième alinéa, du statut, avec effet au jour de la mise en invalidité de l’intéressé, à savoir le 30 novembre 2004.

3.     Les recours devant le Tribunal

48      Antérieurement au présent recours, le requérant avait saisi le Tribunal de trois recours dirigés contre la Commission, enregistrés respectivement les 16 décembre 2005, 10 août 2006 et 18 février 2009 sous les références F‑124/05, F‑96/06 et F‑12/09.

49      Par le recours F‑124/05, le requérant demandait notamment l’annulation d’une décision de la Commission rejetant une demande qu’il avait introduite tendant à la clôture de la procédure disciplinaire que l’AIPN avait ouverte à son encontre dans le cadre de l’affaire Berthelot.

50      Par le recours F‑96/06, le requérant demandait la condamnation de la Commission à lui verser des dommages et intérêts en raison de diverses fautes qu’il reprochait à cette dernière.

51      Par arrêt du 13 janvier 2010, A et G/Commission (F‑124/05 et F‑96/06, ci-après l’« arrêt du 13 janvier 2010 »), le Tribunal s’est prononcé sur ces deux premiers recours. Le Tribunal a, d’une part, constaté qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur les conclusions du recours F‑124/05 et, d’autre part, s’agissant du recours F‑96/06, jugé que la Commission avait commis deux fautes de service, la première en s’abstenant de donner accès au requérant à une contribution de l’Office d’investigation et de discipline de la Commission qui concernait sa situation administrative, la seconde en ouvrant et en maintenant une procédure disciplinaire à l’encontre du requérant en violation de son obligation de diligence. Le Tribunal a estimé que ces fautes avaient causé au requérant un préjudice moral, qu’il convenait de réparer en condamnant la Commission à lui verser la somme de 30 000 euros. En revanche, le Tribunal a, en particulier, estimé que le grief, soulevé à l’appui de ses conclusions en responsabilité, tiré de la prolongation injustifiée de la procédure introduite dans le cadre de l’article 73 du statut était irrecevable au motif qu’il constituait un moyen nouveau présenté en cours d’instance. Le Tribunal a, de même, jugé que le grief présenté à l’appui de ses conclusions indemnitaires, tiré de l’illégalité de l’avis de la commission d’invalidité du 29 octobre 2004 était irrecevable, car dirigé contre un acte préparatoire et le requérant n’ayant pas expliqué en quoi cet acte lui avait causé un préjudice distinct de celui de la décision finale, en l’occurrence la décision du 8 novembre 2004 par laquelle il avait été mis à la retraite et admis au bénéfice de l’allocation d’invalidité, ajoutant à cet égard que, en tout état de cause, le requérant n’avait pas demandé l’annulation de cette décision ou introduit un recours indemnitaire dans les délais prévus.

52      Par le recours F‑12/09, le requérant demandait, notamment, l’annulation de la décision du 28 avril 2008 par laquelle la Commission avait refusé de faire droit à sa demande tendant à la « mise en œuvre de l’article 73, paragraphe 2, [sous b),] du statut » et la condamnation de la Commission à lui verser l’indemnité prévue par ces dispositions ainsi que la différence, au titre de son droit à la réparation intégrale du préjudice subi, entre le montant total dudit préjudice et le montant de ladite indemnité. Le requérant sollicitait également l’indemnisation du préjudice moral que lui auraient causé les multiples fautes et irrégularités commises par les services de la Commission dans l’instruction des procédures médicales le concernant. Dans sa requête, le requérant faisait valoir en particulier, à l’appui de son recours indemnitaire, que, tout au long de la procédure conduite au titre de l’article 73 du statut, les services administratifs de la Commission et les médecins qui la représentaient s’étaient rendus coupables « d’une incroyable succession de fautes, d’irrégularités et d’actes dilatoires », en violation du principe de bonne administration. À l’appui de cette argumentation, le requérant avait en outre ajouté que, près de six ans après l’introduction de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle, la procédure n’avait toujours pas abouti, en violation du principe du délai raisonnable dans lequel toute procédure administrative devait être conduite.

53      Par arrêt du 14 septembre 2011, A/Commission (F‑12/09, ci-après l’« arrêt du 14 septembre 2011 »), le Tribunal a rejeté l’ensemble des conclusions présentées dans le cadre du recours F‑12/09. Le Tribunal a estimé, notamment, que les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 28 avril 2008 étaient non fondées, compte tenu des moyens invoqués à l’appui desdites conclusions, observant en particulier que le requérant n’avait pas remis en cause la constatation de la commission médicale figurant dans son rapport du 5 décembre 2007 selon laquelle son état n’était pas consolidé, ni soulevé aucun moyen tiré de l’illégalité des conclusions dudit rapport, que ce soit un moyen tiré de la violation de la notion de consolidation ou un moyen tiré de l’insuffisance de motivation des conclusions. Le Tribunal a, par ailleurs, rejeté les conclusions indemnitaires en tant qu’irrecevables en l’absence de procédure précontentieuse régulière. Il a en effet estimé que, si le recours avait bien été précédé d’une réclamation dirigée contre la décision dont le requérant demandait l’annulation, un tel recours n’avait en revanche pas été précédé d’une demande de réparation du préjudice causé par les comportements non décisionnels de la Commission, notamment la violation du principe du délai raisonnable, dont le requérant soutenait qu’ils étaient fautifs.

54      Par arrêt du 13 décembre 2012, A/Commission (T‑595/11 P), le Tribunal de l’Union européenne a déclaré qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur le pourvoi formé par le requérant contre l’arrêt du 14 septembre 2011 en ce que celui-ci concernait, d’une part, la demande d’annulation de la décision du 28 avril 2008 dans la mesure où elle portait refus de verser l’indemnité provisionnelle prévue par l’article 19, paragraphe 4, de la réglementation de couverture et d’appliquer les dispositions de l’article 73, paragraphe 2, sous b), du statut, ainsi que, d’autre part, la demande de condamner la Commission à verser l’indemnité prévue par cet article. Le Tribunal de l’Union européenne a rejeté le pourvoi pour le surplus. Il a, dans les motifs de son arrêt, constaté notamment que la décision du 11 janvier 2012, adoptée postérieurement à l’introduction du pourvoi, avait eu pour objet de fixer, premièrement, le taux d’IPP définitif dont était atteint le requérant, deuxièmement, le montant du capital correspondant à ce taux d’IPP, dû au titre de l’article 73 du statut, et, troisièmement, la date retenue pour la consolidation de l’état de santé du requérant. Le Tribunal de l’Union européenne a estimé qu’une telle décision clôturait la procédure initiée par le requérant visant à l’application de l’article 73, paragraphe 2, sous b), du statut et que le pourvoi ne pouvait par son résultat lui procurer un bénéfice dans la mesure où il demandait l’annulation de l’arrêt du 14 septembre 2011 en ce que cet arrêt rejetait sa demande d’annuler la décision du 28 avril 2008 portant refus de lui appliquer les dispositions de l’article 73, paragraphe 2, sous b), du statut et de lui verser l’indemnité prévue par cet article. Le Tribunal de l’Union européenne a ainsi considéré que le requérant n’avait, sur ce point, plus d’intérêt à agir. Il a néanmoins estimé que le requérant gardait un intérêt à agir contre l’arrêt du 14 septembre 2011 en tant que cet arrêt avait trait à sa demande indemnitaire, dans la mesure où celle-ci ne concernait pas la demande d’indemnisation au titre de l’article 73 du statut. Le Tribunal de l’Union européenne a confirmé la conclusion du Tribunal en faveur de l’irrecevabilité des prétentions indemnitaires en raison de l’absence de procédure précontentieuse.

 Conclusions des parties

55      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer la Commission responsable de la violation du principe du délai raisonnable et de différentes fautes commises lors de l’instruction de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle introduite au titre de l’article 73 du statut, et ce faisant annuler les décisions de l’AIPN des 11 janvier et 7 août 2012 et condamner la Commission à lui verser, ainsi qu’à sa famille, la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice moral causé indépendamment de sa maladie professionnelle ;

–        déclarer la Commission responsable de différentes fautes ayant contribué à l’apparition, au maintien et à l’aggravation de sa maladie professionnelle et la condamner à lui verser la somme de 1 798 650 euros, en réparation de son préjudice matériel, et la somme de 145 850 euros, en réparation de son préjudice moral, sommes dont il pourra être déduit la somme de 268 679,44 euros déjà versée en application de l’article 73 du statut ;

–        condamner la Commission au versement des intérêts sur les sommes précitées au taux de 12 %, et ce depuis le mois de novembre 2004, date à laquelle sa demande introduite dans le cadre de l’article 73 du statut aurait pu être tranchée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

56      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours irrecevable ou à tout le moins non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

1.     Sur les conclusions en déclaration de droit et la fin de non-recevoir opposée sur ce point

57      Les conclusions demandant au Tribunal de déclarer la Commission responsable de la violation du principe du délai raisonnable et des fautes qu’elle a commises visent en réalité à faire reconnaître par le Tribunal le bien-fondé de certains des arguments invoqués à l’appui des conclusions indemnitaires. Ainsi qu’il résulte d’une jurisprudence constante (arrêt de la Cour du 13 juillet 1989, Jaenicke Cendoya/Commission, 108/88, points 8 et 9, et la jurisprudence citée ; ordonnance du Tribunal du 18 février 2009, Marcuccio/Commission, F‑42/08, point 18), ces conclusions à fins de déclaration en droit doivent être rejetées comme irrecevables et la fin de non-recevoir opposée par la Commission sur ce point doit être accueillie.

2.     Sur les conclusions en annulation

 Sur l’objet du recours

58      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler, ainsi que le fait valoir la Commission, que les conclusions en annulation formellement dirigées contre le rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée, lorsqu’elles sont, comme telles, dépourvues de contenu autonome (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, point 8 ; arrêt du Tribunal de première instance du 6 avril 2006, Camόs Grau/Commission, T‑309/03, point 43 ; arrêt du Tribunal du 11 décembre 2008, Reali/Commission, F‑136/06, point 37).

59      La décision du 7 août 2012 portant rejet de la réclamation introduite à l’encontre de la décision du 11 janvier 2012 étant, en l’espèce, dépourvue de contenu autonome, le recours doit être regardé comme dirigé contre la seule décision du 11 janvier 2012 (ci-après la « décision attaquée »).

 Sur le fond

60      Le requérant soulève trois moyens, tirés, respectivement, le premier, de la violation du principe du délai raisonnable, le deuxième, de l’inapplicabilité et de l’illégalité du barème retenu au soutien de la décision attaquée, le troisième, des irrégularités commises par les instances médicales et par l’AIPN dans l’instruction de sa demande présentée au titre de l’article 73 du statut.

61      Par son premier moyen, le requérant entend contester la durée de la procédure qui a conduit à l’adoption de la décision attaquée ; par ses deuxième et troisième moyens, et en substance, le requérant se prévaut, premièrement, du manque d’impartialité et d’indépendance de la commission médicale ainsi que de la violation du secret médical, deuxièmement, de l’irrégularité de l’avis émis par cette commission qui serait insuffisamment motivé sur plusieurs points dont celui de la date de consolidation, entaché d’erreur de droit et d’erreur manifeste d’appréciation, troisièmement, de la violation par l’AIPN du devoir de sollicitude et du principe de bonne administration dans l’instruction de son dossier, quatrièmement, enfin, de l’erreur de droit et de l’erreur manifeste d’appréciation que celle-ci aurait commises dans la fixation de la date de consolidation et le choix du taux d’IPP finalement retenus. Dans un souci d’économie de la procédure contentieuse, il sera d’abord procédé à l’examen du grief tiré de l’insuffisance de motivation de l’avis de la commission médicale quant à la date de consolidation retenue puis à celui tiré de l’erreur de droit qu’aurait commise l’AIPN dans la fixation de cette même date.

62      Il y a lieu, à titre liminaire, de rappeler que les appréciations médicales proprement dites formulées par la commission médicale doivent être considérées comme définitives lorsqu’elles ont été émises dans des conditions régulières. Le juge est uniquement habilité à vérifier, d’une part, si ladite commission a été constituée et a fonctionné régulièrement et, d’autre part, si son avis est régulier, notamment s’il contient une motivation permettant d’apprécier les considérations sur lesquelles il est fondé et s’il établit un lien compréhensible entre les constatations médicales qu’il comporte et les conclusions auxquelles il parvient (arrêt du Tribunal du 14 septembre 2010, AE/Commission, F‑79/09, point 64, et la jurisprudence citée). Lorsque la commission médicale est saisie de questions d’ordre médical complexes se rapportant à un diagnostic difficile ou au lien de causalité entre l’affection dont est atteint l’intéressé et l’exercice de son activité professionnelle auprès d’une institution, il lui appartient notamment d’indiquer dans son avis les éléments du dossier sur lesquels elle s’appuie et de préciser, en cas de divergence significative, les raisons pour lesquelles elle s’écarte de certains rapports médicaux, antérieurs et pertinents, plus favorables à l’intéressé (arrêt AE/Commission, précité, point 65, et la jurisprudence citée).

63      De plus, si les garanties procédurales de l’assuré devant la commission médicale doivent être contrôlées strictement par le juge, il n’en demeure pas moins que ce contrôle doit tenir compte de la nature même des travaux de la commission médicale, lesquels, selon la jurisprudence, ne visent pas à trancher un débat contradictoire, mais seulement à établir des constatations médicales (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 janvier 1988, Biedermann/Cour des comptes, 2/87, point 16).

64      C’est à la lumière des principes qui viennent d’être rappelés qu’il convient d’examiner les griefs du requérant.

 Sur le grief tiré de l’insuffisance de motivation de l’avis de la commission médicale quant à la date de consolidation retenue

–       Arguments des parties

65      Le requérant soutient que la motivation des deux rapports de la commission médicale, datés des 5 décembre 2007 et 19 septembre 2011, serait contradictoire quant à la date de consolidation retenue dans la mesure où, en substance, la commission médicale aurait reconnu que son état de santé n’évoluait plus depuis 2005, mais aurait pourtant fixé la date de consolidation en novembre 2007. L’avis de la commission médicale serait d’autant plus contradictoire qu’il établirait un lien entre l’incertitude « juridico-administrative » dans laquelle il serait maintenu et l’absence d’évolution de sa maladie. Une telle motivation ne lui permettrait pas de comprendre clairement les motifs qui ont conduit les médecins à fixer la date de consolidation finalement retenue. Enfin, la commission médicale n’aurait pas davantage expliqué dans son dernier rapport, celui du 19 septembre 2011, les motifs qui l’auraient amenée à ne pas envisager d’indemnité complémentaire à l’IPP. Elle aurait été d’autant plus tenue de motiver cet aspect de son avis qu’elle se serait écartée sur ce point des conclusions de l’expert sollicité quelques mois plus tôt en vue de réaliser un bilan neurocognitif du requérant, bilan jugé pourtant nécessaire par la commission médicale pour se prononcer définitivement sur le dossier de ce dernier.

66      La Commission estime que le requérant n’est pas recevable à contester la date de consolidation et conclut au rejet au fond de l’ensemble de son argumentation. À cet égard, la Commission fait valoir que le requérant aurait dû contester la date de consolidation au moment où il en avait pris connaissance pour la première fois, à savoir dans le cadre de l’affaire F‑12/09. Or, si, dans l’affaire F‑12/09, il a attaqué la décision du 28 avril 2008, qui refusait de statuer sur sa demande au titre de l’article 73 du statut au motif que son état de santé n’était alors pas encore consolidable, et aurait donc pu, dans le cadre de ce recours, contester la date de consolidation ainsi retenue, il aurait toutefois omis de le faire. Non seulement le grief serait tardif, mais l’autorité de chose jugée qui s’attache à l’arrêt du 14 septembre 2011, confirmé sur pourvoi, s’opposerait à ce que le Tribunal examinât une seconde fois un tel grief.

–       Appréciation du Tribunal

67      S’agissant, en premier lieu, de l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission à l’encontre du grief relatif à la date de consolidation, il y a lieu de souligner que la décision du 28 avril 2008, qui a fait l’objet de l’affaire F‑12/09 ayant donné lieu à l’arrêt de rejet du 14 septembre 2011, est en partie fondée sur le rapport de la commission médicale du 5 décembre 2007 selon lequel l’état de santé du requérant n’était pas alors encore consolidable. Toutefois, force est de constater que le présent recours ne concerne pas la décision du 28 avril 2008, laquelle n’avait pas pour objet de fixer la date de consolidation, mais de se prononcer, à cette date, sur le versement du capital prévu par les dispositions de l’article 73, paragraphe 2, sous c), du statut. La présente affaire concerne la décision du 11 janvier 2012 par laquelle l’AIPN, après nouvel examen du dossier du requérant par la commission médicale, examen postérieur à la décision du 28 avril 2008, s’est prononcé définitivement sur la maladie professionnelle du requérant en arrêtant la date de consolidation des séquelles de sa maladie. Contrairement à ce que prétend la Commission, l’autorité de chose jugée qui s’attache à l’arrêt du 14 septembre 2011 ne saurait donc faire obstacle à l’introduction du présent recours, lequel n’a pas le même objet que le recours ayant donné lieu à cet arrêt.

68      Au surplus, ainsi que le Tribunal l’a d’ailleurs constaté dans l’arrêt du 14 septembre 2011, le requérant n’avait soulevé à l’encontre de la décision du 28 avril 2008 aucun moyen tiré de ce que la commission médicale avait estimé que son état de santé n’était pas encore consolidable. La contestation de la date de consolidation des séquelles de la maladie professionnelle du requérant est donc pour la première fois soulevée dans la présente instance.

69      Enfin, contrairement à ce que soutient aussi la Commission, un tel grief n’a pas été présenté tardivement. En effet, il ne saurait être admis que le requérant aurait eu connaissance de la date de consolidation de ses séquelles par la décision du 28 avril 2008, dans la mesure où, en tout état de cause, la date définitive n’avait, à cette date, pas encore été fixée et qu’elle ne l’a été que par la décision attaquée. Dans ces conditions, l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission doit être écartée.

70      S’agissant, en second lieu, du bien-fondé du grief tiré de l’insuffisance de motivation quant à la date de consolidation finalement retenue par la commission médicale, le Tribunal rappelle que, selon la jurisprudence, le rapport de la commission médicale doit contenir, ainsi qu’il a été précisé plus haut, une motivation permettant d’apprécier les considérations sur lesquelles il est fondé et établir un lien compréhensible entre les constatations médicales qu’il comporte et les conclusions auxquelles il parvient (arrêt AE/Commission, précité, point 64, et la jurisprudence citée).

71      En l’espèce, il ressort du premier rapport de la commission médicale, daté du 5 décembre 2007, que, si la commission médicale a fait valoir que la situation médicale du requérant ne lui semblait guère avoir évolué depuis 2005, elle a toutefois réservé sa position définitive en estimant que les manifestations anxieuses de l’intéressé restaient « fortement tributaires de la procédure disciplinaire […] encore engagée à son égard ». En conséquence, l’état de santé du requérant ne lui paraissant pas encore, « au stade actuel », consolidable, la commission médicale a estimé nécessaire de revoir l’intéressé « dans un délai de deux ans environ » afin d’être en mesure de se prononcer définitivement sur la date de consolidation des séquelles de sa maladie professionnelle.

72      Dans son deuxième rapport daté du 24 août 2010, la commission médicale a estimé que « la situation médicale » du requérant lui « paraissait bien en mesure d’être consolidée », mais qu’elle devait néanmoins, pour se prononcer de façon certaine, obtenir un bilan neurocognitif complet et un bilan psychopathologique afin d’« objectiver les plaintes [du requérant] ».

73      Dans son troisième et dernier rapport, en date du 19 septembre 2011, la commission médicale a finalement conclu, après avoir pris connaissance des bilans qu’elle avait sollicités, qu’elle était en mesure de fixer la date de consolidation définitive au 7 novembre 2007. Or, pour justifier de la date ainsi retenue, la commission médicale s’est bornée à indiquer que cette date correspondait « [à la date] de la première séance d’expertise médicale, le [7 novembre] 2007, c’est-à-dire au moment où les médecins [avaient] pu prendre connaissance de l’ensemble du dossier ». Par une telle appréciation, la commission médicale s’est ainsi limitée, dans sa motivation, à des considérations administratives. Or, à l’évidence, la date de consolidation, laquelle désigne l’état d’une victime dont les lésions se sont fixées de manière telle qu’elles ne paraissent plus susceptibles de guérison ou d’amélioration et qu’un traitement n’est plus, en principe, indiqué si ce n’est pour en éviter une aggravation (arrêt du Tribunal du 13 juin 2012, Guittet/Commission, F‑31/10, point 54, et la jurisprudence citée), ne saurait correspondre à la date à laquelle les médecins se réunissent et prennent connaissance du dossier médical.

74      Si la commission médicale a ajouté, pour motiver sa position, qu’il « n’y a[vait] plus d’évolution significative » depuis le 7 novembre 2007, elle n’a pas expliqué les raisons qui l’ont conduite à s’écarter de ses appréciations médicales précédentes, par lesquelles elle avait estimé que l’état de santé du requérant lui semblait ne s’être guère modifié depuis 2005. Tout en constatant, en outre, dans son rapport que le médecin traitant du requérant estimait lui aussi que l’état de santé de celui-ci n’avait guère évolué depuis novembre 2004, la commission médicale n’a pas davantage précisé les raisons d’ordre médical l’ayant conduite à s’écarter également de telles conclusions pourtant plus favorables au requérant.

75      Enfin, et au surplus, dans son dernier rapport, la commission médicale a insisté sur la circonstance que « la persistance de la procédure […] et son corol[l]aire judiciaire […] contribu[ai]ent à maintenir des troubles anxiodépressifs d’allure chronique », pour en conclure que l’état de santé du requérant pouvait néanmoins être considéré comme consolidé à la date du 7 novembre 2007, date à laquelle, trois ans auparavant, elle avait pourtant estimé, pour des raisons similaires, qu’il ne pouvait l’être.

76      Adoptant ainsi une motivation insuffisante et contradictoire, la commission médicale n’a pas permis au requérant de saisir de façon compréhensible le lien qu’elle a entendu établir entre ses appréciations médicales et les conclusions auxquelles elle est arrivée quant à la date de consolidation de ses séquelles. Le grief tiré de l’insuffisance de motivation de l’avis de la commission médicale quant à la date de consolidation doit donc être accueilli.

77      Or, les droits du requérant à la fixation de son taux d’IPP et, en conséquence, au capital prévu à l’article 73, paragraphe 2, du statut ainsi qu’à l’indemnité complémentaire à l’IPP prévue à l’article 13 de la règlementation de couverture ne peuvent être définis qu’en fonction de la date de consolidation des séquelles de sa maladie professionnelle, compte tenu, en particulier, de l’entrée en vigueur, au 1er janvier 2006, du barème, dont l’applicabilité au requérant requiert que ses lésions aient été consolidées postérieurement à cette entrée en vigueur (arrêt Guittet/Commission, précité, point 68), ce qu’il reste à la commission médicale à préciser en motivant à suffisance de droit son appréciation.

78      En conséquence, le constat de l’insuffisance de motivation de l’avis de la commission médicale quant à la date de consolidation est de nature à entraîner l’annulation de la décision attaquée.

 Sur le grief tiré de l’erreur de droit commise par l’AIPN dans la fixation de la date de consolidation

79      Le Tribunal estime nécessaire d’examiner également le grief tiré de l’erreur de droit dans la fixation de la date de consolidation, telle qu’elle a été finalement retenue par l’AIPN.

80      Le requérant soutient, en substance, que l’AIPN a commis une erreur de droit en fixant la date de consolidation des séquelles de sa maladie professionnelle au 25 février 2010, car elle n’a pas suivi, sans pour autant en justifier les raisons, le dernier avis émis par la commission médicale, qui proposait de fixer cette date au plus tard au 7 novembre 2007.

81      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que le but poursuivi par les dispositions du statut relatives à la commission médicale saisie dans le cadre de l’article 73 est de confier à des experts médicaux l’appréciation définitive de toutes les questions d’ordre médical, qu’aucune AIPN, de par sa composition administrative interne, ne pourrait réaliser (voir, par analogie, s’agissant de la commission d’invalidité, arrêt du Tribunal du 7 mai 2013, McCoy/Comité des régions, F‑86/11, point 78). En conséquence, l’AIPN ne saurait, sans erreur de droit, s’écarter des appréciations médicales émises par la commission médicale, sauf à établir que de telles appréciations seraient dépourvues de pertinence pour avoir été émises dans des conditions irrégulières. Dans l’hypothèse même où l’appréciation médicale émise par la commission médicale serait erronée, l’AIPN ne saurait pour autant, sans excéder ses pouvoirs, se substituer à cette commission en se prononçant elle-même sur des questions d’ordre médical.

82      La Commission, pour justifier s’être écartée de la date de consolidation proposée par la commission médicale, fait valoir qu’elle a tenu compte du fait que, dans son premier rapport, daté de décembre 2007, la commission médicale avait indiqué qu’il était nécessaire d’attendre deux ans avant de pouvoir se prononcer définitivement sur la date de consolidation, la date du 25 février 2010 étant celle à laquelle, à la suite de ce premier avis, le requérant avait été réexaminé par le médecin de l’institution. Ce premier motif ne saurait toutefois justifier valablement la décision de l’AIPN, puisqu’en tout état de cause la commission médicale, en concluant en décembre 2007 que le requérant devait être revu dans un délai d’environ deux ans, n’a nullement entendu fixer la date de consolidation à l’échéance dudit délai, mais seulement fixer le délai nécessaire pour être en mesure de déterminer la date de consolidation de façon définitive.

83      La Commission soutient, en outre, qu’elle a agi dans l’intérêt du requérant afin de lui permettre d’être remboursé intégralement de ses frais médicaux jusqu’au 25 février 2010 et non pas seulement jusqu’au 7 novembre 2007, la date de consolidation mettant fin, selon la Commission, à la prise en charge intégrale des frais liés à la maladie professionnelle, conformément aux dispositions de l’article 9 de la nouvelle réglementation de couverture.

84      À cet égard, quel que soit le bien-fondé de l’interprétation donnée par la Commission à l’article 9 de la nouvelle réglementation de couverture, il suffit de rappeler que la consolidation des lésions est une notion d’ordre médical, relevant de l’appréciation de la commission médicale, et qui ne saurait être fixée en fonction de la durée de la prise en charge des soins médicaux au titre de la réglementation de couverture.

85      La Commission n’avance, par ailleurs, aucun autre argument pour justifier la date de consolidation qu’elle a retenue. Dans ces conditions, en fixant la consolidation des séquelles de la maladie du requérant à la date du 25 février 2010, laquelle n’était pas celle retenue, en tout état de cause, par la commission médicale, l’AIPN a excédé ses pouvoirs et entaché sa décision, sur ce point, d’une erreur de droit.

86      Compte tenu de tout ce qui précède, la décision attaquée est entachée d’un vice de procédure, en l’absence de motivation suffisante de l’avis de la commission médicale quant à la date de consolidation, et d’une erreur de droit dans la fixation par l’AIPN de la date de consolidation au 25 février 2010. Par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens et griefs soulevés, le requérant est fondé à en demander l’annulation.

3.     Sur les conclusions indemnitaires

87      Le recours en indemnité vise, en premier lieu, à la réparation du préjudice moral causé par la violation du délai raisonnable et par les fautes commises dans l’instruction de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle et, en second lieu, à la réparation des préjudices matériel et moral causés par la maladie professionnelle.

 Sur la demande de réparation du préjudice moral causé par la violation du délai raisonnable et les fautes commises lors de l’instruction de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle

 Arguments des parties

88      Le requérant soutient, en substance, que l’état d’incertitude dans lequel il s’est trouvé et se trouve encore actuellement en raison de la durée de la procédure de près de neuf années est à l’origine d’un préjudice moral non compensé par l’indemnité déjà reçue au titre de l’article 73 du statut. La Commission aurait ainsi été fautive de nombreux manquements qui auraient prolongé de façon excessive et sans raison valable la durée de la procédure d’instruction de sa demande.

89      La Commission conclut, à titre principal, au rejet de l’ensemble des conclusions indemnitaires, en conséquence du rejet des conclusions d’annulation, auxquelles elles sont étroitement liées. S’agissant du préjudice moral pour violation du délai raisonnable, la Commission conclut à l’absence de faute sur ce point, les délais étant pleinement justifiés, notamment compte tenu des considérations médicales propres au cas du requérant.

 Appréciation du Tribunal

90      Il convient tout d’abord de rappeler qu’il incombe à la Commission, en application de l’article 266 TFUE, de prendre les mesures que comporte l’exécution du présent arrêt d’annulation et, notamment, d’adopter, dans le respect du principe de légalité, tout acte de nature à compenser équitablement le désavantage ayant résulté, pour le requérant, de l’acte annulé (arrêt du Tribunal de première instance du 15 septembre 2005, Casini/Commission, T‑132/03, point 98 ; arrêt du Tribunal du 24 juin 2008, Andres e.a./BCE, F‑15/05, point 132), sans préjudice de la possibilité pour le requérant d’introduire par la suite un recours à l’encontre des mesures adoptées par la Commission en exécution du présent arrêt.

91      En outre, la consolidation des lésions n’étant pas encore fixée, par l’effet de l’arrêt d’annulation, il ne saurait être envisagé d’apprécier, à ce stade, le caractère raisonnable du délai de la procédure, puisque la décision portant fixation définitive du taux d’invalidité du requérant qui va clôturer cette procédure ne pourra être prise qu’après la fixation de la date de la consolidation définitive des lésions.

92      Toutefois, force est de constater que, par l’effet du présent arrêt d’annulation, le requérant se trouve à nouveau dans une position d’attente quant au règlement définitif de la procédure ouverte au titre de l’article 73 du statut. Un tel prolongement de la situation d’attente et d’incertitude, provoqué par l’illégalité de la décision attaquée, constitue un préjudice moral qu’il appartient à la Commission de compenser par une réparation adéquate (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 juin 2012, BL/Commission, F‑63/10, point 108). Dans les circonstances de l’espèce, il convient d’évaluer ce préjudice ex æquo et bono à la somme de 3 500 euros.

 Sur la demande de réparation des préjudices matériel et moral causés par la maladie professionnelle

 Arguments des parties

93      Le requérant soutient que l’indemnisation obtenue au titre de l’article 73 du statut ne compense pas intégralement les préjudices matériel et moral qu’il a subis en raison de sa maladie professionnelle, lesquels ont été aggravés par des comportements fautifs de la part de la Commission tout au long de la procédure. Il entend solliciter la réparation du préjudice matériel que représente la perte de revenus présents et futurs découlant de sa mise en invalidité. Il sollicite également la réparation du préjudice moral qui a résulté, en conséquence de son état de santé, de la perte de ses relations sociales et de la cessation de ses activités de loisirs et intellectuelles ainsi que celle de son préjudice sexuel et de sa dépendance aux médicaments.

94      La Commission estime, quant à elle, que le capital versé au titre de l’article 73 du statut couvre l’intégralité des préjudices liés à la maladie professionnelle du requérant, de sorte que sa demande ne saurait prospérer. En tout état de cause, aucune faute, de nature à conduire à une indemnisation complémentaire à celle déjà versée, n’est susceptible d’être reprochée à la Commission. En outre, le requérant n’apporte pas la preuve que les préjudices dont il demande réparation trouveraient leur origine dans un acte fautif de la Commission durant la procédure de reconnaissance de maladie professionnelle.

 Appréciation du Tribunal

95      Il y a lieu de rappeler ici que, selon la jurisprudence, le fonctionnaire victime d’une maladie professionnelle est seulement en droit de demander une indemnisation complémentaire selon le droit commun, lorsque le régime statutaire instauré par l’article 73 du statut ne permet pas une indemnisation appropriée (arrêt du Tribunal de première instance du 15 décembre 1999, Latino/Commission, T‑300/97, point 94). En conséquence et en principe, la demande indemnitaire tendant à la réparation du préjudice matériel et moral qui aurait été causé à un fonctionnaire par une maladie professionnelle n’est pas recevable tant que la procédure ouverte au titre de l’article 73 du statut n’est pas terminée (arrêt du 13 janvier 2010, points 151 et 152).

96      Dans l’arrêt du 10 décembre 2008, Nardone/Commission (T‑57/99, point 56), le Tribunal de première instance des Communautés européennes a, certes, estimé qu’il ne pouvait être systématiquement déduit du non-achèvement de la procédure médicale la prématurité d’une demande tendant à l’octroi de dommages et intérêts en raison d’une faute de service prétendument commise par l’institution, et jugé que c’était au regard de l’économie de la procédure qu’il avait, dans son arrêt Latino/Commission, précité, subordonné la recevabilité du recours en indemnité de droit commun à l’épuisement de la voie d’indemnisation statutaire. Toutefois, en l’espèce, la détermination du lien de causalité entre les conditions d’exercice des fonctions par le requérant et les préjudices invoqués ainsi que l’évaluation du préjudice, comme le Tribunal l’a déjà estimé dans son arrêt du 13 janvier 2010, nécessitent le recours à une expertise médicale, de sorte qu’il ne pourra pas être procédé à la détermination du lien de causalité et à celle des préjudices allégués avant que la procédure introduite au titre de l’article 73 du statut ne soit terminée.

97      En conséquence, la demande d’indemnisation des préjudices moral et matériel causés par la maladie professionnelle du requérant est, dans les circonstances de l’espèce, prématurée.

98      En outre, il convient de constater que, en tout état de cause, le préjudice matériel dont le requérant sollicite la réparation ne trouve pas sa cause adéquate dans la décision attaquée, mais dans la décision de mise en invalidité. Au surplus, en l’état du dossier soumis au Tribunal, le requérant n’établit pas de lien de causalité entre le préjudice moral, tel qu’il le présente, et les fautes dans le déroulement de la procédure, telles qu’il les allègue.

99      Il résulte de ce qui précède que l’ensemble des conclusions indemnitaires doivent être rejetées comme irrecevables.

 Sur les dépens

100    Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

101    Il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que la Commission est la partie qui, pour l’essentiel, succombe. En outre, le requérant a, dans ses conclusions, expressément demandé que la Commission soit condamnée aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la Commission doit supporter ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par le requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la Commission européenne du 11 janvier 2012 clôturant la procédure ouverte au titre de l’article 73 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne à la suite de la maladie professionnelle dont a été victime A est annulée.

2)      La Commission européenne est condamnée à verser à A la somme de 3 500 euros.

3)      Le recours est rejeté pour le surplus.

4)      La Commission européenne supporte ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par A.

Van Raepenbusch

Barents

Bradley

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 décembre 2013.

Le greffier

 

      Le président

W. Hakenberg

 

      S. Van Raepenbusch


* Langue de procédure : le français.