Language of document : ECLI:EU:C:2013:499

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES Bot

présentées le 18 juillet 2013 (1)

Affaire C‑272/12 P

Commission européenne

contre

Irlande,
République française,

République italienne,
Eurallumina SpA,
Aughinish Alumina Ltd

«Pourvoi – Aides d’État – Imputabilité de la mesure contestée – Exonération du droit d’accise – Huiles minérales – Rapport entre harmonisation fiscale et contrôle des aides d’État – Principe de sécurité juridique – Présomption de légalité»





1.        La présente affaire devrait permettre à la Cour d’apprécier si le Tribunal de l’Union européenne a relevé d’office un moyen qui ne pouvait l’être.

2.        C’est la seconde fois que la Cour connaît de cette affaire. La Commission européenne a de nouveau formé un pourvoi contre l’arrêt du Tribunal du 21 mars 2012, Irlande e.a./Commission (2), par lequel celui-ci a, une nouvelle fois, annulé la décision 2006/323/CE de la Commission, du 7 décembre 2005 (3).

3.        Par cette décision, la Commission a qualifié d’aides d’État incompatibles avec le marché commun des exonérations de droits d’accise sur les huiles minérales pratiquées par la République française, l’Irlande et la République italienne. Ces exonérations avaient été autorisées par le Conseil de l’Union européenne sur proposition de la Commission, plusieurs années auparavant, conformément aux directives pertinentes en matière de droits d’accise.

4.        La Commission a également ordonné la récupération de ces aides à compter de la date de publication au Journal officiel des Communautés européennes de l’ouverture de la procédure formelle d’examen, estimant que, avant cette date, elles avaient fait naître une confiance légitime chez leurs bénéficiaires.

5.        Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a prononcé l’annulation de la décision litigieuse en jugeant que les décisions d’autorisation du Conseil, en dernier lieu la décision 2001/224/CE (4), faisaient, en principe, obstacle à ce que la Commission puisse imputer aux États membres concernés les exonérations litigieuses et, partant, à ce qu’elle puisse les qualifier d’aides d’État et en ordonner la récupération partielle. Il a constaté que, dans les circonstances particulières de l’espèce, la décision litigieuse violait le principe de sécurité juridique ainsi que le principe de présomption de légalité des actes de l’Union, en ce qu’elle remettait directement en cause la validité des exonérations litigieuses accordées par les États membres concernés jusqu’au 31 décembre 2003, et remettait également en cause, indirectement, mais nécessairement, la validité des décisions d’autorisation du Conseil, en dernier lieu la décision 2001/224, et des effets attachés à celle-ci.

6.        La Commission, au soutien de sa demande d’annulation de l’arrêt attaqué, fait valoir notamment que le Tribunal a annulé la décision litigieuse sur le fondement d’un moyen qu’il a relevé d’office, à savoir celui de la non-imputabilité des exonérations litigieuses aux États membres, et qui, selon elle, ne pouvait l’être et constituait le véritable motif de cette annulation.

7.        Dans les présentes conclusions, nous soutiendrons la thèse de la Commission en proposant à la Cour de juger que le Tribunal a effectivement relevé d’office un moyen qui ne pouvait l’être et nous démontrerons que ce constat justifie, à lui seul, l’annulation de l’arrêt attaqué.

I –    Le cadre juridique

A –    Le régime des aides d’État

8.        L’article 87, paragraphe 1, CE dispose:

«Sauf dérogations prévues par le [traité CE], sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.»

9.        L’article 88 CE prévoit:

«1.   La Commission procède avec les États membres à l’examen permanent des régimes d’aides existant dans ces États. Elle propose à ceux-ci les mesures utiles exigées par le développement progressif ou le fonctionnement du marché commun.

2.     Si, après avoir mis les intéressés en demeure de présenter leurs observations, la Commission constate qu’une aide accordée par un État ou au moyen de ressources d’État n’est pas compatible avec le marché commun aux termes de l’article 87, ou que cette aide est appliquée de façon abusive, elle décide que l’État intéressé doit la supprimer ou la modifier dans le délai qu’elle détermine.

[…]

3.     La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu’un projet n’est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l’article 87, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L’État membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale.»

B –    La réglementation en matière d’harmonisation fiscale

1.      Les directives relatives aux droits d’accise sur les huiles minérales

10.      Les droits d’accise sur les huiles minérales ont fait l’objet de plusieurs directives, à savoir les directives 92/81/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant l’harmonisation des structures des droits d’accises sur les huiles minérales (5), 92/82/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant le rapprochement des taux d’accises sur les huiles minérales (6), et 2003/96/CE du Conseil, du 27 octobre 2003, restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité (7), qui a abrogé les directives 92/81 et 92/82 avec effet au 31 décembre 2003.

11.      S’agissant de la directive 92/81, l’article 8, paragraphe 4, de celle-ci était rédigé comme suit:

«Le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, peut autoriser un État membre à introduire des exonérations ou des réductions supplémentaires pour des raisons de politiques spécifiques.

Tout État membre souhaitant introduire une telle mesure en informe la Commission et lui communique également toutes les informations pertinentes ou nécessaires. La Commission informe les autres États membres de la mesure proposée dans un délai d’un mois.

Le Conseil est réputé avoir autorisé l’exonération ou la réduction proposée si, dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle les autres États membres ont été informés conformément au deuxième alinéa, ni la Commission ni aucun État membre n’a demandé que cette question soit examinée par le Conseil.»

12.      L’article 8, paragraphe 5, de cette directive prévoyait:

«Si la Commission considère que les exonérations ou réductions visées au paragraphe 4 ne peuvent plus être maintenues, notamment pour des raisons de concurrence déloyale ou de distorsion dans le fonctionnement du marché intérieur ou pour des motifs liés à la politique communautaire de protection de l’environnement, elle présente au Conseil des propositions appropriées. Le Conseil statue à l’unanimité sur ces propositions.»

13.      S’agissant de la directive 92/82, l’article 6 de celle-ci a fixé le taux minimal de l’accise sur le fioul lourd que les États devaient appliquer, à partir du 1er janvier 1993, à 13 euros par 1 000 kg.

14.      S’agissant de la directive 2003/96, l’article 2, paragraphe 4, sous b), deuxième tiret, de celle-ci a prévu qu’elle ne s’appliquait pas aux produits énergétiques à double usage, c’est-à-dire à ceux qui sont destinés à être utilisés à la fois comme combustible et pour des usages autres que ceux de carburant ou de combustible. Ainsi, depuis le 31 décembre 2003, date d’entrée en application de cette directive, il n’y a plus de taux minimal de l’accise sur le fioul lourd utilisé dans la production d’alumine. En outre, à son article 18, paragraphe 1, la directive 2003/96 a autorisé les États membres, sous réserve d’un examen préalable du Conseil, à continuer d’appliquer, jusqu’au 31 décembre 2006, les taux réduits ou les exonérations énumérés à son annexe II, laquelle mentionne les exonérations de droits d’accise sur le fioul lourd utilisé comme combustible dans la production d’alumine dans la région de Gardanne, dans la région du Shannon et en Sardaigne.

2.      La décision 2001/224

15.      L’article 1er, paragraphe 1, de la décision 2001/224 dispose que les États membres sont autorisés à continuer d’appliquer les taux réduits ou les exonérations de droits d’accise énumérés à l’annexe I de cette décision.

16.      Le point 5 des motifs de ladite décision est rédigé comme suit:

«La présente décision ne préjuge pas de l’issue d’éventuelles procédures relatives aux distorsions de fonctionnement du marché unique qui pourraient être intentées notamment en vertu des articles 87 et 88 du traité. Elle ne dispense pas les États membres, conformément à l’article 88 du traité, de l’obligation de notifier à la Commission les aides d’état susceptibles d’être instituées.»

II – Les antécédents du litige

17.      L’Irlande depuis 1983, la République italienne depuis 1993 et la République française depuis 1997 exonèrent de droit d’accise les huiles minérales utilisées pour la production d’alumine, respectivement, dans la région du Shannon, en Sardaigne et dans la région de Gardanne.

18.      Ces exonérations ont été autorisées par le Conseil, respectivement, par les décisions 92/510/CEE (8), 93/697/CE (9) et 97/425/CE (10). Ces autorisations ont été prorogées par le Conseil à plusieurs reprises et, en dernier lieu, par la décision 2001/224, jusqu’au 31 décembre 2006.

19.      Par trois décisions du 30 octobre 2001, publiées au Journal officiel des Communautés européennes le 2 février 2002 (11), la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE à l’égard de chacune des exonérations en cause. À l’issue de cette procédure, la Commission a adopté la décision litigieuse.

20.      Dans le dispositif de la décision litigieuse, il est indiqué, notamment, que les exonérations litigieuses accordées jusqu’au 31 décembre 2003 constituent des aides d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, que les aides accordées entre le 3 février 2002 et le 31 décembre 2003 sont incompatibles avec le marché commun dans la mesure où leurs bénéficiaires ne se sont pas acquittés d’un droit d’au moins 13,01 euros par 1 000 kg d’huile minérale lourde et que, en conséquence, ces aides doivent faire l’objet d’une récupération par les trois États membres concernés.

III – La procédure antérieure à l’arrêt attaqué

21.      S’agissant du premier examen des affaires par le Tribunal et la Cour, nous renvoyons aux points 25 à 43 de l’arrêt attaqué.

IV – L’arrêt attaqué

22.      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a annulé la décision litigieuse en tant qu’elle constate, ou repose sur le constat, que les exonérations de droits d’accise sur les huiles minérales utilisées comme combustible pour la production d’alumine accordées par la République française, l’Irlande et la République italienne jusqu’au 31 décembre 2003 constituent des aides d’État, au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE et en tant qu’elle ordonne à ces États membres de prendre toutes les mesures nécessaires pour récupérer lesdites exonérations auprès de leurs bénéficiaires dans la mesure où ces derniers ne se sont pas acquittés d’un droit d’accise d’au moins 13,01 euros pour 1 000 kg d’huile minérale lourde.

23.      Aux termes du point 58 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a indiqué qu’il estimait opportun, conformément au principe d’économie de procédure, d’examiner, en premier lieu, les moyens et les griefs tirés de la violation du principe de sécurité juridique et/ou du principe de présomption de légalité des actes de l’Union. Par ces moyens et ces griefs, les parties requérantes reprochaient, en substance, à la Commission d’avoir partiellement annihilé les effets juridiques produits par les décisions d’autorisation du Conseil, en dernier lieu par la décision 2001/224, qui autorisaient les États membres concernés à appliquer lesdites exonérations jusqu’au 31 décembre 2006.

24.      Après avoir rappelé, aux points 59 à 62 de l’arrêt attaqué, la jurisprudence relative aux principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union, le Tribunal, aux points 63 à 74 de cet arrêt, a examiné la question de l’articulation entre les règles relatives aux droits d’accise et celles relatives aux aides d’État.

25.      Il a rappelé les moyens d’action de la Communauté européenne destinés à éliminer différents types de distorsions qui nuisaient au bon fonctionnement du marché intérieur dans les deux matières pour partir du postulat selon lequel les règles en matière d’harmonisation fiscale, notamment celles relatives aux droits d’accise, et les règles en matière d’aides d’État visent un même objectif, à savoir la promotion du bon fonctionnement du marché intérieur en luttant, notamment, contre les distorsions de concurrence. Le Tribunal a estimé que, eu égard à leur objectif commun, la mise en œuvre cohérente de ces différentes règles impose de considérer que, contrairement à ce que soutient la Commission, la notion de distorsion de concurrence revêt la même portée et le même sens en matière d’harmonisation des législations fiscales nationales et en matière d’aides d’État.

26.      Il a relevé que les règles en matière d’harmonisation des législations fiscales nationales, notamment celles relatives aux droits d’accise, énoncées à l’article 93 CE et dans la directive 92/81, confèrent expressément aux institutions de l’Union, à savoir à la Commission, qui propose, et au Conseil, qui dispose, la responsabilité d’apprécier l’existence d’une éventuelle distorsion de concurrence, en vue d’autoriser ou non un État membre à appliquer ou à continuer d’appliquer une exonération de l’accise harmonisée.

27.      Le Tribunal a ensuite évoqué la jurisprudence s’agissant de l’article 87, paragraphe 1, CE qui vise les décisions des États membres par lesquelles ces derniers, en vue de la poursuite d’objectifs économiques et sociaux qui leur sont propres, mettent, par des décisions unilatérales et autonomes, des ressources à la disposition des entreprises ou d’autres sujets de droit, ou leur procurent des avantages destinés à favoriser la réalisation des objectifs économiques ou sociaux recherchés. Il a indiqué que, pour que des avantages puissent être qualifiés d’«aides» au sens de cette disposition, ils doivent, notamment, être imputables à l’État.

28.      C’est au regard de ces principes et de ces règles que le Tribunal, notamment, a rejeté l’argument de la Commission selon lequel la décision 2001/224 était une condition nécessaire mais non suffisante pour que les États membres concernés puissent accorder les exonérations litigieuses au regard du point 5 des motifs de la décision 2001/224. Il en a conclu que ce point de motif ne pouvait viser un cas tel que celui en cause, où les États membres appliquent des exonérations de droits d’accise en se conformant purement et simplement à une autorisation délivrée par une institution de l’Union, sinon cela porterait atteinte à l’impératif découlant du principe de sécurité juridique d’assurer une mise en œuvre cohérente des différentes dispositions du droit de l’Union.

29.      Le Tribunal a relevé que la Commission n’avait jamais usé des pouvoirs qu’elle détenait en vertu de l’article 8, paragraphe 5, de la directive 92/81 ou encore des articles 230 CE ou 241 CE pour obtenir la suppression ou une modification des décisions d’autorisation, une annulation de ces mêmes décisions ou une déclaration d’invalidité de la directive 92/81.

30.      Les points 104 et 105 de l’arrêt attaqué sont rédigés comme suit:

«104      Il s’ensuit que, comme l’a fait valoir à bon droit le Conseil dans sa réponse aux questions du Tribunal […], au moment où la Commission a adopté la décision [litigieuse], la décision 2001/224 existait et demeurait valide. Cette dernière décision, les décisions d’autorisation du Conseil qui l’avaient précédée ainsi que la directive 92/81, notamment son article 8, paragraphe 4, bénéficiaient de la présomption de légalité qui s’attache à tout acte de l’Union. Elles produisaient tous leurs effets juridiques. Par conséquent, la République italienne, l’Irlande et la République française étaient autorisées à se fonder sur les décisions d’autorisation du Conseil, en dernier lieu la décision 2001/224, pour continuer à appliquer les exonérations litigieuses respectivement en Sardaigne, dans la région du Shannon et dans la région de Gardanne, notamment, jusqu’au 31 décembre 2003. Ces décisions faisaient, en principe, obstacle à ce que, dans la décision [litigieuse], la Commission puisse imputer aux États membres concernés les exonérations litigieuses susmentionnées et, partant, à ce qu’elle puisse les qualifier d’aides d’État, au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, et en ordonner la récupération partielle, pour autant qu’elle les estimait incompatibles avec le marché intérieur, au sens de l’article 87, paragraphe 3, CE.

105      Dans les circonstances particulières de l’espèce, il y a lieu de constater que la décision [litigieuse], en ce qu’elle remet directement en cause la validité des exonérations litigieuses accordées par la République italienne, l’Irlande et la République française jusqu’au 31 décembre 2003, remet également en cause, indirectement, mais nécessairement, la validité des décisions d’autorisation du Conseil, en dernier lieu la décision 2001/224, et des effets attachés à celles-ci. Ce faisant, elle viole le principe de sécurité juridique ainsi que le principe de présomption de légalité des actes de l’Union.»

V –    Les conclusions des parties devant la Cour

31.      La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

–        annuler l’arrêt attaqué;

–        renvoyer l’affaire devant le Tribunal;

–        réserver les dépens.

32.      L’Irlande, la République française, la République italienne et Aughinish Alumina Ltd (ci-après «AAL») concluent à ce qu’il plaise à la Cour:

–        rejeter le pourvoi;

–        condamner la Commission aux dépens.

33.      Eurallumina SpA (ci-après «Eurallumina») conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

–        rejeter le pourvoi;

–        dans l’hypothèse où la Cour n’approuverait aucun des motifs invoqués par le Tribunal à l’appui de l’arrêt attaqué, renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour un nouvel examen;

–        condamner la Commission aux dépens.

VI – Le pourvoi

34.      À l’appui de sa demande d’annulation de l’arrêt attaqué et de renvoi de l’affaire devant le Tribunal, la Commission avance cinq moyens.

35.      Les deux premiers moyens sont, pour partie, d’ordre procédural, alors que les trois autres sont tirés de la violation au fond du droit de l’Union.

36.      Le premier moyen vise à démontrer l’incompétence du Tribunal, les irrégularités de procédure portant atteinte aux intérêts de la Commission, la violation du principe dispositif, de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et des articles 44, paragraphe 1, et 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, et, à titre subsidiaire, un défaut de motivation. Le deuxième moyen est tiré de l’incompétence du Tribunal, de la violation des articles 87, paragraphe 1, CE et 88 CE, ainsi que de l’article 61, deuxième alinéa, du statut de la Cour, et d’irrégularités de procédure portant atteinte aux intérêts de la Commission. Le troisième moyen tend à démontrer la violation des articles 87 CE et 88 CE, celle du principe de l’équilibre institutionnel et le fait que le Tribunal a commis des erreurs de droit dans la détermination des compétences respectives du Conseil et de la Commission, ainsi que des rapports entre harmonisation fiscale et contrôle des aides d’État. Dans le quatrième moyen, la Commission fait valoir que le Tribunal a interprété de manière erronée la décision 2001/224 et a violé les règles concernant l’interprétation des actes des institutions de l’Union. Enfin, le cinquième moyen est tiré, d’une part, de la violation des principes de sécurité juridique, de la présomption de légalité des actes de l’Union et de bonne administration, et, d’autre part, d’un défaut de motivation.

37.      Commençons notre analyse du pourvoi par le premier moyen.

A –    Les arguments des parties

38.      Le premier moyen se décompose en deux branches.

39.      Par la première branche, la Commission reproche, en substance, au Tribunal d’avoir relevé d’office un moyen tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE en raison de la non-imputabilité aux États membres des exonérations litigieuses, ou d’avoir requalifié l’objet même du recours.

40.      Selon la Commission, il est manifeste que le Tribunal a prononcé l’annulation de la décision litigieuse non pas en raison de la violation des principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union, lesquels ne seraient traités que sur le plan des généralités, mais uniquement parce que les exonérations litigieuses ne constituaient pas des aides d’État, dès lors qu’elles étaient imputables à l’Union européenne (12).

41.      Selon la Commission, ce serait le Tribunal, statuant après renvoi, qui aurait introduit la question de l’imputabilité dans le débat lorsque, par lettre du greffe du 20 juillet 2011, il a adressé aux parties la question suivante:

«Dans la mesure où ils ont été préalablement autorisés par des décisions du Conseil, adoptées à l’unanimité sur proposition de la Commission, en application de l’article 8, paragraphe 4, de la directive 92/81, en dernier lieu par la décision 2001/224, les octrois de l’Italie, l’Irlande et la France des exonérations litigieuses jusqu’au 31 décembre 2003 peuvent-ils être objectivement considérés comme remplissant la condition d’imputabilité à l’État prévue à l’article 87, paragraphe 1, CE?»

42.      De l’avis de la Commission, c’est uniquement en réponse à cette question que les parties requérantes ont fait valoir que les exonérations litigieuses ne constituaient pas des aides d’État parce qu’elles étaient imputables à l’Union et non aux États membres.

43.      Les parties défenderesses au pourvoi contestent cette argumentation.

44.      En effet, l’Irlande et la République italienne arguent de ce que le Tribunal pouvait relever d’office une violation des formes substantielles, en ce que la Commission aurait dû, pour satisfaire à son obligation de motivation, indiquer les raisons pour lesquelles elle estimait que les exonérations litigieuses étaient imputables aux États membres concernés.

45.      En outre, la République française, Eurallumina et AAL soutiennent que le moyen relatif à l’imputabilité constitue une ampliation des moyens qu’elles ont invoqués et que, par conséquent, le Tribunal avait simplement accueilli et développé les moyens tirés de la violation des principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union.

46.      Par ailleurs, selon la République française, la République italienne et Eurallumina, la thèse de la non-imputabilité des exonérations litigieuses aux États membres revêt un intérêt relatif dans les motifs de l’arrêt attaqué et ne serait donc pas la raison principale de l’annulation de la décision litigieuse.

B –    Notre appréciation

47.      Les questions que soulève la première branche du premier moyen de la Commission sont celles de savoir si le Tribunal a relevé d’office un moyen – celui tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE, en raison de la non-imputabilité aux États membres des exonérations litigieuses – qui ne pouvait l’être et si ce moyen a constitué un véritable motif d’annulation de la décision litigieuse, susceptible d’engendrer l’annulation de l’arrêt attaqué.

48.      À titre liminaire, nous rappelons qu’il ressort des règles qui régissent la procédure devant les juridictions de l’Union, notamment des articles 21 du statut de la Cour ainsi que 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, que le litige est déterminé et circonscrit par les parties. Il s’ensuit que le juge de l’Union ne peut pas excéder les demandes qui lui sont présentées dans leurs conclusions. Il doit également, en principe, statuer sur ces demandes dans le cadre des éléments juridiques et factuels exposés par les parties.

49.      Pour autant, les règles relatives à la procédure devant chaque juridiction de l’Union ainsi que la jurisprudence ont déterminé des cas de figure dans lesquels le juge de l’Union, afin de remplir sa mission de juge de légalité, dispose de la compétence de soulever d’office un moyen de droit, c’est-à-dire un moyen de droit qui n’a pas été invoqué par le requérant à l’appui de sa demande. C’est la nature du moyen qui déterminera l’office ou non du juge de l’Union.

50.      Dans la présente affaire, nous pensons que les arguments de l’Irlande et de la République italienne, selon lesquels le Tribunal pouvait relever d’office une violation des formes substantielles en ce que la Commission n’avait pas motivé la décision litigieuse sur la question de l’imputabilité à l’État, doivent être d’emblée écartés.

51.      En effet, l’imputabilité à l’État est un élément constitutif de la notion d’aide d’État.

52.      Il convient de rappeler, à cet égard, que l’article 87, paragraphe 1, CE déclare incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.

53.      Ladite disposition subordonne cette incompatibilité à la vérification de quatre conditions parmi lesquelles la condition qu’il doit s’agir d’une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État (13).

54.      Pour que des avantages puissent être qualifiés d’«aides» au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, la jurisprudence a précisé qu’ils doivent, d’une part, être accordés directement ou indirectement au moyen de ressources d’État et, d’autre part, être imputables à l’État (14).

55.      Conformément à une jurisprudence constante, le moyen concernant l’imputabilité à l’État, en tant qu’il porte sur la légalité au fond d’une décision, relève de la violation d’une règle de droit relative à l’application du traité et ne peut être examiné par le juge de l’Union que s’il est invoqué par le requérant (15).

56.      Il y a donc lieu, d’abord, d’examiner si l’Irlande, la République française, la République italienne, Eurallumina et AAL ont, lors de la première instance en renvoi, invoqué le moyen tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE en raison de la non-imputabilité aux États membres des exonérations litigieuses pour savoir si le Tribunal a relevé d’office ou non ce moyen.

57.      Au vu des éléments du dossier, il ne fait guère de doute que, à aucun moment dans leur recours lors de la procédure de renvoi devant le Tribunal, les États membres concernés et les tiers intéressés n’ont fait valoir que les exonérations litigieuses ne constituaient pas des aides d’État au motif qu’elles ne seraient pas imputables aux États membres concernés.

58.      La question de l’imputabilité a pourtant été évoquée par la Commission au stade de son mémoire en défense dans le cadre de l’affaire T‑56/06 alors que celle-ci répondait au moyen de la République française qui faisait valoir que l’exonération française ne constituait pas une aide au motif qu’elle ne fausse ni ne menace de fausser la concurrence.

59.      La Commission avait alors fait mention de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du Tribunal du 5 avril 2006, Deutsche Bahn/Commission (16), pour illustrer des cas dans lesquels la Cour et le Tribunal ont eu à apprécier des mesures nationales au regard à la fois des règles du droit de l’Union relatives aux aides d’État et d’autres dispositions du traité. Elle a démontré, par un raisonnement a contrario, qu’une exonération autorisée par le Conseil au titre de règles relatives à l’harmonisation fiscale n’exclut pas qu’elle constitue également une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

60.      À la suite de l’arrêt Commission/Irlande e.a., précité, renvoyant les affaires jointes T‑50/06, T‑56/06, T‑60/06, T‑62/06 et T‑69/06 devant le Tribunal, ce dernier a bien informé toutes les parties que la procédure se poursuivait conformément aux dispositions des articles 117 et suivants de son règlement de procédure et qu’elles avaient la possibilité de déposer des observations écrites.

61.      Les parties requérantes lors de la première instance en renvoi n’ont pourtant pas, à ce stade de la procédure, rebondi sur l’interprétation de la Commission lorsque celle-ci a évoqué l’arrêt Deutsche Bahn/Commission, précité.

62.      En effet, dans l’affaire T‑56/06 RENV, la République française a continué d’estimer que la condition de l’article 87, paragraphe 1, CE relative à l’atteinte à la concurrence faisait nécessairement défaut. Quant à la République italienne, dans l’affaire T‑60/06 RENV, elle a toujours fait grief uniquement au critère de la sélectivité de l’exonération. Eurallumina et AAL, pour leur part, dans les affaires T‑62/06 RENV et T‑69/06 RENV, ont repris les griefs qu’elles avaient évoqués lors de la procédure avant renvoi, aucun d’entre eux ne visant la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE en tant que tel. Puis, dans l’affaire T‑50/06 RENV, l’Irlande a même persisté dans le fait de considérer que l’exonération accordée à AAL constituait une aide existante.

63.      C’est donc manifestement le Tribunal, comme l’a souligné la Commission au point 19 de son pourvoi, qui a véritablement introduit dans le débat la thèse de l’imputabilité par la question qu’il a adressée aux parties par lettre du greffe du 20 juillet 2011, donnant la possibilité à celles-ci d’y répondre par écrit et d’en débattre lors de l’audience qui a eu lieu devant lui le 14 septembre 2011.

64.      Il convient, ensuite, d’examiner s’il est toutefois possible de considérer que le moyen tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE en raison de la non-imputabilité des exonérations litigieuses aux États membres peut être rattaché au moyen relatif à la violation des principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union, comme le soutiennent certaines parties défenderesses au pourvoi.

65.      À notre sens, la question de l’imputabilité ne peut pas constituer un argument supplémentaire ou ampliatif que le Tribunal a pu accueillir et développer dans le cadre du moyen tiré de la violation desdits principes.

66.      En effet, par définition, les moyens de droit sont les raisons de droit dont une partie se prévaut pour fonder sa prétention. Un argument ampliatif est un argument qui vient renforcer ce moyen pour tendre, par conséquent, à la même conclusion.

67.      Nous rappelons que, dans la présente affaire, le Tribunal a, conformément au principe d’économie de la procédure, examiné en premier lieu les moyens et les griefs tirés de la violation des principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union pour parvenir à l’annulation de la décision litigieuse.

68.      Nous ne voyons pas comment le moyen tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE en raison de la non-imputabilité des exonérations litigieuses aux États membres pourrait se greffer au moyen relatif à la violation des principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union, et ce pour plusieurs raisons.

69.      Selon nous, ces deux moyens sont bien distincts et indépendants. En effet, d’une part, la nature de la règle de droit visée est différente, puisque le premier moyen est tiré de la violation d’une règle de droit relative à l’application du traité alors que le second concerne la violation de principes généraux du droit de l’Union. D’autre part, les conséquences liées à la violation de ces deux moyens sont également différentes.

70.      En effet, le moyen relatif à la violation des principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union tend à remettre en cause le résultat auquel est parvenu la Commission, à savoir la récupération des aides.

71.      Comme l’a relevé le Tribunal, dans les affaires T‑56/06 RENV et T‑60/06 RENV, la République française et la République italienne ont fait grief à la Commission d’avoir violé le principe de sécurité juridique, pour la première, et le principe de présomption de légalité des actes de l’Union, pour la seconde, en tant qu’elle a ordonné la récupération de l’aide prétendument accordée entre le 3 février 2002 et le 31 décembre 2003 (17).

72.      S’agissant des affaires T‑62/06 RENV et T‑69/06 RENV, Eurallumina et AAL ont fait grief à la Commission d’avoir violé les principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union, pour la première, et le principe de sécurité juridique, pour la seconde, en tant qu’elle a conclu à l’incompatibilité partielle avec le marché commun respectivement de l’exonération italienne et de l’exonération irlandaise (18).

73.      Quant au moyen tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE en raison de la non-imputabilité des exonérations aux États membres, il tend, eu égard au fait que l’imputabilité soit constitutive de la notion d’aide d’État, à la conclusion selon laquelle cet élément faisait défaut.

74.      Nous ne pouvons donc partager l’avis d’Eurallumina qui soutient que la notion d’imputabilité n’est rien d’autre que l’application des principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union.

75.      Par ailleurs, il convient de souligner que l’Irlande, jusqu’à ce que le Tribunal pose la question aux parties pour réponse écrite, n’avait pas soutenu le fait que l’exonération irlandaise ne constituait pas une aide. Au contraire, elle a fait valoir que la Commission avait commis une erreur de droit en considérant qu’il s’agissait d’une aide nouvelle et non d’une aide existante. Cet élément corrobore également la thèse allant à l’encontre du rattachement au moyen tiré de la violation des principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union.

76.      Le Tribunal a, selon nous, commis une erreur d’appréciation en faisant correspondre le moyen relatif à la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE en raison de la non-imputabilité des exonérations litigieuses aux États membres au moyen ayant trait à la violation desdits principes.

77.      Examinons, enfin, le point de savoir si le moyen tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE en raison de la non-imputabilité des exonérations litigieuses aux États membres a constitué le véritable motif d’annulation de la décision litigieuse, sinon un motif important qui justifierait l’annulation de l’arrêt attaqué.

78.      Il est vrai que, dans l’arrêt attaqué, n’y sont consacrés que quelques points. Pour autant, à notre avis, ce moyen ne revêt pas qu’un simple intérêt relatif dans les motifs de cet arrêt, comme le prétendent la République italienne et Eurallumina.

79.      Ce paradoxe entre la concision du Tribunal et l’importance que revêt ledit moyen s’explique d’ailleurs, selon nous, par la circonstance que le Tribunal a fait correspondre le moyen relatif à la non-imputabilité des exonérations litigieuses aux États membres au moyen tiré de la violation des principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union.

80.      Le point 104 de l’arrêt attaqué illustre particulièrement bien cette correspondance, puisque le Tribunal, après avoir dit que les décisions d’autorisation du Conseil bénéficiaient de la présomption de légalité qui s’attache à tout acte de l’Union, a jugé que ces décisions faisaient, en principe, obstacle à ce que, dans la décision litigieuse, la Commission puisse imputer aux États membres concernés les exonérations litigieuses et, partant, à ce qu’elle puisse les qualifier d’aides d’État, au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, et en ordonner la récupération partielle, pour autant qu’elle les estimait incompatibles avec le marché intérieur, au sens de l’article 87, paragraphe 3, CE.

81.      Nous rappelons que le Tribunal a annulé la décision litigieuse «au motif que cette décision constate, ou repose sur le constat que les exonérations [litigieuses] constituent des aides d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE».

82.      Or, selon nous, la seule violation des principes de sécurité juridique et de présomption de légalité des actes de l’Union ne peut permettre d’aboutir à l’annulation de la décision litigieuse sur la base de cette motivation.

83.      Le motif sur le fondement duquel le Tribunal a pu annuler la décision litigieuse en tant qu’elle constate, ou repose sur le constat, que les exonérations litigieuses constituent des aides d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE est bien, à notre avis, celui de la non-imputabilité de ces exonérations aux États membres.

84.      Il s’ensuit que la thèse de la Commission selon laquelle le véritable motif de l’annulation de la décision litigieuse était la non-imputabilité des exonérations litigieuses aux États membres doit être accueillie.

85.      Par conséquent, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres arguments et moyens des parties, il y a lieu d’annuler l’arrêt attaqué en tant que celui-ci a annulé la décision litigieuse au motif que celle-ci constate, ou repose sur le constat, que les exonérations de droits d’accise sur les huiles minérales utilisées comme combustible pour la production d’alumine accordées par la République française, l’Irlande et la République italienne jusqu’au 31 décembre 2003 constituent des aides d’État, au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, et qu’elle ordonne à ces États membres de prendre toutes les mesures nécessaires pour récupérer lesdites exonérations auprès de leurs bénéficiaires dans la mesure où ces derniers ne se sont pas acquittés d’un droit d’accise d’au moins 13,01 euros par 1 000 kg d’huile minérale lourde.

86.      Conformément à l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour, cette dernière, en cas d’annulation de la décision du Tribunal, peut soit statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé, soit renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue. En l’espèce, le litige n’est pas en état d’être jugé.

87.      Par conséquent, il y a lieu de renvoyer l’affaire devant le Tribunal et de réserver les dépens.

VII – Conclusion

88.      Au vu des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer de la manière suivante:

1)      L’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 21 mars 2012, Irlande e.a./Commission (T‑50/06 RENV, T‑56/06 RENV, T‑60/06 RENV, T‑62/06 RENV et T‑69/06 RENV), est annulé en tant que celui-ci a:

–        annulé la décision 2006/323/CE de la Commission, du 7 décembre 2005, concernant l’exonération du droit d’accise sur les huiles minérales utilisées comme combustible pour la production d’alumine dans la région de Gardanne, dans la région du Shannon et en Sardaigne, mise en œuvre respectivement par la France, l’Irlande et l’Italie, au motif que cette décision constate, ou repose sur le constat, que les exonérations de droits d’accise sur les huiles minérales utilisées comme combustible pour la production d’alumine accordées par la République française, l’Irlande et la République italienne jusqu’au 31 décembre 2003 constituent des aides d’État, au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, et qu’elle ordonne à ces États membres de prendre toutes les mesures nécessaires pour récupérer lesdites exonérations auprès de leurs bénéficiaires dans la mesure où ces derniers ne se sont pas acquittés d’un droit d’accise d’au moins 13,01 euros par 1 000 kg d’huile minérale lourde, et

–        condamné la Commission européenne à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par les requérantes, y compris ceux afférents à la procédure de référé dans l’affaire T‑69/06 R.

2)      Les affaires jointes T‑50/06 RENV, T‑56/06 RENV, T‑60/06 RENV, T‑62/06 RENV et T‑69/06 RENV sont renvoyées devant le Tribunal de l’Union européenne.

3)      Les dépens sont réservés.


1 –      Langue originale: le français.


2 –      T‑50/06 RENV, T‑56/06 RENV, T‑60/06 RENV, T‑62/06 RENV et T‑69/06 RENV, ci-après l’«arrêt attaqué».


3 –      Décision concernant l’exonération du droit d’accise sur les huiles minérales utilisées comme combustible pour la production d’alumine dans la région de Gardanne, dans la région du Shannon et en Sardaigne, mise en œuvre respectivement par la France, l’Irlande et l’Italie (JO 2006, L 119, p. 12, ci-après la «décision litigieuse»).


4 –      Décision du Conseil du 12 mars 2001 relative aux taux réduits et aux exonérations de droits d’accise sur certaines huiles minérales utilisées à des fins spécifiques (JO L 84, p. 23).


5 –      JO L 316, p. 12.


6 –      JO L 316, p. 19.


7 –      JO L 283, p. 51.


8 –      Décision du Conseil du 19 octobre 1992 autorisant les États membres à continuer à appliquer à certaines huiles minérales utilisées à des fins spécifiques les réductions de taux d’accise ou les exonérations d’accises existantes, conformément à la procédure prévue à l’article 8 paragraphe 4 de la directive 92/81/CEE (JO L 316, p. 16).


9 –      Décision du Conseil du 13 décembre 1993 autorisant certains États membres à appliquer ou à continuer à appliquer à certaines huiles minérales utilisées à des fins spécifiques des réductions ou des exonérations d’accise conformément à la procédure prévue à l’article 8 paragraphe 4 de la directive 92/81/CEE (JO L 321, p. 29).


10 –      Décision du Conseil du 30 juin 1997 autorisant les États membres à appliquer ou à continuer à appliquer à certaines huiles minérales utilisées à des fins spécifiques les réductions de taux d’accise ou les exonérations d’accises existantes, conformément à la procédure prévue à la directive 92/81/CEE (JO L 182, p. 22).


11 –      JO C 30, respectivement p. 17, 21 et 25.


12 –      La Commission vise la dernière phrase du point 104 de l’arrêt attaqué.


13 –      Arrêt du 30 mai 2013, Doux Élevage et Coopérative agricole UKL-ARREE (C‑677/11, point 25).


14 –      Ibidem (point 27).


15 –      Arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France (C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 67). Voir également, en ce sens, arrêt du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a. (C‑89/08 P, Rec. p. I‑11245, point 40).


16 –      T‑351/02, Rec. p. II‑1047.


17 –      Voir points 53 et 54 de l’arrêt attaqué.


18 –      Voir points 55 et 56 de l’arrêt attaqué.