Language of document : ECLI:EU:C:2015:483

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

16 juillet 2015 (*)

«Recours en annulation – Décision du Conseil autorisant l’ouverture des négociations pour lier le système d’échange de droits d’émission à effet de serre de l’Union européenne avec un système d’échange de droits d’émission à effet de serre en Australie – Directives de négociation – Comité spécial – Articles 13, paragraphe 2, TUE, 218, paragraphes 2 à 4, TFUE et 295 TFUE – Équilibre institutionnel»

Dans l’affaire C‑425/13,

ayant pour objet un recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE, introduit le 24 juillet 2013,

Commission européenne, représentée par MM. G. Valero Jordana et F. Castillo de la Torre, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

soutenue par:

Parlement européen, représenté par MM. R. Passos et D. Warin, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie intervenante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme K. Michoel ainsi que par MM. M. Moore et J.‑P. Hix, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par:

République tchèque, représentée par MM. M. Smolek, J. Vláčil et E. Ruffer, en qualité d’agents,

Royaume de Danemark, représenté par MM. C. Thorning, L. Volck Madsen et U. Melgaard, en qualité d’agents,

République fédérale d’Allemagne, représentée par MM. T. Henze et B. Beutler, en qualité d’agents,

République française, représentée par MM. D. Colas, G. de Bergues et F. Fize ainsi que par Mme N. Rouam, en qualité d’agents,

Royaume des Pays-Bas, représenté par Mmes M. Bulterman et M. de Ree, en qualité d’agents,

République de Pologne, représentée par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

Royaume de Suède, représenté par Mmes A. Falk, C. Meyer-Seitz, U. Persson ainsi que par MM. E. Karlsson, L. Swedenborg et C. Hagerman, en qualité d’agents,

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, représenté par Mme E. Jenkinson et M. M. Holt, en qualité d’agents, assistés de MM. J. Holmes et B. Kennelly, barristers,

parties intervenantes,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, M. K. Lenaerts, vice-président, M. A. Tizzano, Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteur), MM. M. Ilešič, A. Ó Caoimh, C. Vajda, S. Rodin et Mme K. Jürimäe, présidents de chambre, MM. A. Rosas, E. Juhász, J. Malenovský, E. Levits, F. Biltgen et C. Lycourgos, juges,

avocat général: M. M. Wathelet,

greffier: M. M. Aleksejev, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 janvier 2015,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 17 mars 2015,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission européenne demande l’annulation de l’article 2, seconde phrase, de la décision du Conseil du 13 mai 2013 autorisant l’ouverture de négociations sur la mise en relation du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne avec un système d’échange de droits d’émission mis en place en Australie ainsi que de la section A de l’annexe de cette décision (ci-après la «décision attaquée»).

 Le cadre juridique

 La directive 2003/87/CE

2        La directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 2003, établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil (JO L 275, p. 32), telle que modifiée par la directive 2009/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009 (JO L 140, p. 63, ci-après la «directive»), a été adoptée sur le fondement de l’article 175, paragraphe 1, CE. Ainsi que l’expose le considérant 5 de cette directive, celle-ci a pour objectif de contribuer à réaliser de manière plus efficace les engagements pris par la Communauté européenne et ses États membres afin de réduire les émissions anthropiques de gaz à effet de serre dans le cadre du protocole de Kyoto.

3        L’article 1er de la directive définit l’objet de celle-ci comme suit:

«La présente directive établit un système communautaire d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté [...] afin de favoriser la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans des conditions économiquement efficaces et performantes.»

4        Aux termes de l’article 25 de la directive, intitulé «Liens avec d’autres systèmes d’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre»:

«1.      Des accords devraient être conclus avec les pays tiers visés à l’annexe B du protocole de Kyoto et ayant ratifié ce protocole, afin d’assurer la reconnaissance mutuelle des quotas entre le système communautaire et d’autres systèmes d’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre, conformément aux règles énoncées à l’article 300 du traité.

bis.      Des accords peuvent être conclus afin d’assurer la reconnaissance des quotas entre le système communautaire et des systèmes contraignants compatibles d’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre assortis de plafonds d’émission absolus établis dans tout autre pays ou dans des entités sous-fédérales ou régionales.

ter.      Des arrangements non contraignants peuvent être pris avec des pays tiers ou des entités sous-fédérales ou régionales afin d’assurer la coordination administrative et technique en ce qui concerne les quotas du système communautaire ou d’autres systèmes contraignants d’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre assortis de plafonds d’émission absolus.

2.      Lorsqu’un accord visé au paragraphe 1 a été conclu, la Commission arrête toutes les dispositions nécessaires en ce qui concerne la reconnaissance mutuelle des quotas dans le cadre de cet accord. [...]»

 Les antécédents du litige

5        En 2011, le Commonwealth d’Australie a pris contact avec la Commission en vue d’engager des négociations bilatérales sur la mise en relation du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne avec le système australien.

6        La recommandation formelle relative à l’autorisation d’ouvrir des négociations avec le Commonwealth d’Australie aux fins de la mise en relation des systèmes d’échange concernés a été rédigée sur le modèle de la recommandation précédente concernant la mise en relation du système d’échange de quotas d’émission de l’Union avec le système d’échange suisse. Elle a été adoptée par la Commission le 24 janvier 2013, puis transmise au Conseil de l’Union européenne. Au cours des discussions au sein du groupe de travail «Environnement» du Conseil, des États membres ont demandé à pouvoir s’impliquer davantage dans les négociations avec le Commonwealth d’Australie que ne le prévoyait la recommandation de la Commission. Un texte de compromis a été approuvé, avec quelques modifications, par le groupe de travail «Environnement» le 22 avril 2013.

7        Le 2 mai 2013, la Commission a transmis une déclaration à inscrire au procès-verbal, dans laquelle elle contestait certains aspects du projet de décision relative à l’autorisation de l’ouverture des négociations en cause (document 8805/13, ADD1). Pour sa part, le Conseil a également effectué une déclaration en date du 8 mai 2013 (document 8805/13, ADD2).

8        Ce projet de décision a été soumis au Comité des représentants permanents (Coreper) et a été finalement adopté en l’état en tant que point «A» de l’ordre du jour du Conseil «Agriculture et pêche» du 13 mai 2013.

9        Par l’article 1er, paragraphe 1, de la décision attaquée, la Commission a été autorisée à ouvrir les négociations en question au nom de l’Union.

10      L’article 1er, paragraphe 2, de la décision attaquée prévoit que la «Commission conduit ces négociations [...] conformément aux directives de négociation établies à l’annexe» de cette décision.

11      L’article 2, seconde phrase, de cette décision prévoit que «la Commission informe le Conseil par écrit de l’issue des négociations après chaque session de négociation et, en tout état de cause, au moins une fois par trimestre».

12      À l’annexe de ladite décision, les directives de négociation (document 8568/13, ADD1) adressées à la Commission sont libellées sous la section A comme suit:

«A.      Procédure de négociation

1)      La Commission mène les négociations conformément à la législation pertinente de l’Union en vigueur. Le cas échéant, les positions de négociation détaillées de l’Union sont établies au sein du comité spécial visé à l’article 1er, paragraphe 2, ou au sein du Conseil. Le groupe ‘Environnement’ est désigné comme comité spécial pour assister la Commission dans cette tâche. Les réunions du comité spécial sont organisées et présidées par l’État membre qui exerce la présidence du Conseil.

2)      Les négociations doivent être préparées longtemps à l’avance. À cet effet, la Commission communique dès que possible au Conseil le calendrier prévu, les questions à négocier et les documents pertinents, afin de donner aux membres du comité spécial un délai raisonnable pour se préparer de manière appropriée en vue des négociations à venir.

3)      Chaque session de négociation est précédée d’une réunion au sein du comité spécial afin de cerner les principales questions et d’établir des positions de négociation ou des orientations, selon le cas. Si nécessaire, des orientations sur des aspects techniques spécifiques des négociations peuvent être demandées au comité des changements climatiques, sous réserve d’une autorisation préalable du comité spécial.

4)      La Commission rend compte au Conseil des résultats des négociations après chaque session et, en tout état de cause, au moins une fois par trimestre. La Commission informe le Conseil de tout problème majeur qui surviendrait au cours de celles-ci et consulte le comité spécial à ce sujet.»

13      Sous la section B de ces directives de négociation sont exposés le contenu et la portée des négociations.

14      Le deuxième alinéa de la déclaration du Conseil du 8 mai 2013 relative au projet de décision concernant l’ouverture des négociations expose:

«La désignation d’un comité spécial, conformément à l’article 218, paragraphe 4, TFUE, implique que ledit comité [...] est mandaté pour suivre la conduite des négociations et de guider le négociateur, compte tenu des directives de négociation arrêtées par le Conseil.»

15      La décision attaquée a été notifiée à la Commission le 15 mai 2013.

 La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

16      La Commission demande à la Cour:

–        à titre principal, d’annuler l’article 2, deuxième phrase, de la décision attaquée ainsi que la section A de l’annexe de celle-ci;

–        à titre subsidiaire, d’annuler la décision attaquée et de maintenir les effets de celle-ci dans l’hypothèse où elle serait annulée dans son intégralité, et

–        de condamner le Conseil aux dépens.

17      Par un acte déposé au greffe de la Cour le 7 octobre 2013, le Conseil, conformément à l’article 151 du règlement de procédure de la Cour, a demandé à la Cour de «retirer du dossier» la décision attaquée et les directives de négociation ainsi que les passages de la requête de la Commission citant lesdites directives. Le Conseil a demandé également à la Cour de prendre les mesures qu’elle jugera appropriées pour garantir que le contenu des directives de négociation «ne sera pas rendu public» et pour que la nature de ces directives «ne puisse pas être déduite des documents publics de la Cour».

18      Cette demande du Conseil a été rejetée par l’ordonnance Commission/Conseil (C‑425/13, EU:C:2014:91).

19      Le Parlement européen, qui a été autorisé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission par décision du président de la Cour du 13 février 2014, demande qu’il soit fait droit aux conclusions présentées par la Commission.

20      Le Conseil demande à la Cour de rejeter le recours ou, en cas d’annulation de la décision attaquée, de ne pas maintenir les effets de celle-ci et de condamner la Commission aux dépens.

21      Le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne, le Royaume des Pays-Bas, la République de Pologne, le Royaume de Suède, qui ont été autorisés à intervenir au soutien des conclusions du Conseil par décision du président de la Cour du 13 février 2014, demandent à la Cour de rejeter le recours.

22      La République tchèque et la République française, qui ont été autorisées à intervenir au soutien des conclusions du Conseil par décision du président de la Cour du 13 février 2014, demandent à la Cour de rejeter le recours et de condamner la Commission aux dépens.

23      Le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, qui a été autorisé à intervenir au soutien des conclusions du Conseil par décision du président de la Cour du 13 février 2014, demande à la Cour de rejeter le recours dans son intégralité et, dans l’hypothèse où il y serait fait droit en tout ou en partie, de ne pas maintenir les effets de la décision attaquée.

 Sur le recours

 Sur la recevabilité

 Argumentation des parties

24      Le Conseil excipe de l’irrecevabilité du recours de la Commission, en ce qu’il est dirigé contre la section A de l’annexe de la décision attaquée, contenant les directives de négociation litigieuses. Il fait valoir que, dans d’autres contentieux institutionnels, la Commission a considéré que de telles directives de négociation n’avaient pas le caractère d’actes contraignants.

25      La Commission soutient que le fait de considérer que les directives de négociation n’ont pas d’effet contraignant ne signifie pas qu’elles ne produisent pas d’effets juridiques. Dans la mesure où le Conseil aurait clairement exposé que les directives de négociation en cause sont contraignantes pour la Commission, le recours qu’elle a formé serait recevable.

 Appréciation de la Cour

26      Il y a lieu de rappeler que le recours en annulation doit être ouvert à l’égard de toutes les dispositions prises par les institutions de l’Union, indépendamment de leur nature ou de leur forme, à condition qu’elles visent à produire des effets de droit (voir arrêt Commission/Conseil, C‑28/12, EU:C:2015:282, point 14 et jurisprudence citée).

27      Pour déterminer si de telles dispositions produisent des effets de droit, il faut s’attacher à leur substance (voir, en ce sens, arrêt Pays-Bas/Commission, C‑147/96, EU:C:2000:335, point 27).

28      À cet égard, la Cour a déjà jugé qu’une décision adoptée sur le fondement de l’article 218, paragraphes 3 et 4, TFUE produit des effets juridiques dans les relations entre l’Union et ses États membres ainsi qu’entre les institutions de l’Union (voir arrêt Commission/Conseil, C‑114/12, EU:C:2014:2151, point 40).

29      En l’espèce, la section A de l’annexe de la décision attaquée, contenant les directives de négociation litigieuses, décrit une procédure précise et détaillée concernant la négociation de l’accord envisagé que le Conseil entendait manifestement imposer à la Commission, ainsi que cela ressort également de l’article 1er, paragraphe 2, de cette décision.

30      Elle est donc de nature à produire des effets de droit.

31      Par conséquent, le recours est recevable.

 Sur le fond

32      À l’appui de son recours, la Commission avance deux moyens. Le premier moyen, relatif à la procédure détaillée énoncée à la section A des directives de négociation, est tiré d’une violation de l’article 13, paragraphe 2, TUE, de l’article 218, paragraphes 2 à 4, TFUE et de l’article 295 TFUE ainsi que du principe de l’équilibre institutionnel. Le second moyen, relatif à la décision attaquée en ce qu’elle prévoit que «des positions de négociation détaillées de l’Union sont établies» par le comité spécial ou le Conseil, est tiré d’une violation de l’article 13, paragraphe 2, TUE et de l’article 218 TFUE ainsi que du principe de l’équilibre institutionnel.

33      La Cour estime approprié d’examiner ces deux moyens de manière conjointe.

 Argumentation des parties

34      La Commission expose que les négociations relatives à un accord international dans des domaines qui ne concernent pas principalement ou exclusivement la politique étrangère et de sécurité commune relèvent de sa compétence. Son rôle de négociateur en ce domaine ne saurait être remis en cause par les autres institutions de l’Union. Si le traité FUE a attribué au Conseil le pouvoir d’autoriser l’ouverture de telles négociations, il ne disposerait cependant pas du pouvoir d’étendre le contenu des directives de négociation en y insérant des dispositions qui ne sont pas directement liées à la négociation avec l’État tiers concerné.

35      La Commission considère que le pouvoir d’adopter des directives de négociation ne comprend pas celui d’établir les modalités dans lesquelles doit se dérouler la négociation, lesdites directives devant uniquement définir les choix stratégiques et les objectifs de fond à défendre pendant les négociations.

36      La Commission fait valoir que la procédure de négociation détaillée prévue à la section A de l’annexe de la décision attaquée a pour conséquence de conférer de nouvelles compétences au Conseil, contrairement à ce que prévoit l’article 218, paragraphes 2 à 4, TFUE. Le Conseil, en imposant unilatéralement une telle procédure, imposerait des obligations à la Commission qui ne seraient pas conformes auxdites dispositions.

37      La Commission estime que le Conseil a également violé l’article 13, paragraphe 2, TUE ainsi que le principe de l’équilibre institutionnel en ayant élargi, par les directives de négociation en cause, les attributions qui lui sont conférées par les traités.

38      La Commission souligne que, s’il peut être utile aux institutions d’organiser les modalités de leur coopération, une telle coopération doit s’exercer, conformément à l’article 295 TFUE, au moyen d’accords interinstitutionnels. En l’espèce, en l’absence de conclusion d’un tel accord, le Conseil, en adoptant la section A de l’annexe de la décision attaquée, aurait également violé cet article.

39      La Commission soutient que le Conseil a, en vertu de ladite section A, un rôle décisif dans la négociation. Cette même section prévoirait, en effet, qu’il appartient au comité spécial visé à l’article 218, paragraphe 4, TFUE ou au Conseil, dans certaines circonstances, de définir des «positions de négociation détaillées de l’Union», qui seraient contraignantes pour la Commission. Or, les traités ne conféreraient aucun rôle décisionnel direct durant les négociations à ce comité ou au Conseil, la Commission disposant à cet égard d’une plénitude de compétence. Le comité spécial ne serait qu’un organe consultatif à l’intention du négociateur.

40      Selon la Commission, il lui incombe de fixer les modalités de consultation du comité spécial désigné par le Conseil, conformément à l’article 218, paragraphe 4, TFUE. Cette disposition ne conférerait au comité spécial qu’un rôle consultatif, les négociations ne devant être conduites qu’«en consultation avec» ce dernier. Certes, si ce comité peut exprimer son point de vue sur les différents aspects de la négociation, la Commission estime que les directives de négociation, en permettant audit comité ou au Conseil d’adopter des «positions de négociation détaillées de l’Union», positions qui seraient de ce fait contraignantes pour elle, méconnaissent l’article 218 TFUE.

41      La Commission fait remarquer, enfin, que les éléments de la décision attaquée dont l’annulation est demandée sont détachables du reste de celle-ci et que, dès lors, une annulation partielle de cette décision serait possible. En tout état de cause, la désignation du comité spécial ne serait pas affectée par une annulation partielle.

42      Le Parlement partage l’argumentation de la Commission. Il expose que le traité FUE n’autorise pas le Conseil à adopter de manière unilatérale de nouvelles modalités de négociation qui s’imposeraient au négociateur. S’il en allait ainsi, tant les compétences de la Commission, dans sa fonction de négociateur, que celles du Parlement seraient affectées.

43      Le Parlement observe également que, conformément à l’article 13, paragraphe 2, TUE, chaque institution doit agir dans les limites de ses attributions et dans le respect du principe de coopération loyale.

44      Le Parlement précise que ni lui-même ni le Conseil ne sont autorisés, dans le cadre des négociations, à jouer activement un rôle autonome et de premier plan empiétant sur les prérogatives du négociateur. En particulier, le Conseil ne saurait se prévaloir, en son nom propre ou au nom du comité spécial qu’il a désigné, d’un rôle de décideur au cours des négociations.

45      Le Conseil soutient que le pouvoir d’arrêter des directives de négociation aux fins d’autoriser la Commission à négocier un accord international au nom de l’Union, qui lui est reconnu à l’article 218, paragraphe 4, TFUE, ne saurait être compris comme le privant de la possibilité de fixer également les modalités dans le cadre desquelles doit être conduite la négociation. En effet, toute autre interprétation de l’article 218, paragraphe 4, TFUE priverait celui-ci de son effet utile.

46      La République tchèque, la République fédérale d’Allemagne, la République française, la République de Pologne, le Royaume de Suède ainsi que le Royaume-Uni souscrivent à cet argument du Conseil et indiquent que le libellé de l’article 218, paragraphes 2 à 4, TFUE ne prévoit aucune restriction à l’adoption de telles directives ni ne s’oppose à ce que ces dernières prévoient des règles procédurales, notamment en ce qui concerne les modalités de consultation du comité spécial.

47      La République fédérale d’Allemagne, la République française et le Royaume-Uni considèrent également que le pouvoir d’adresser des directives de négociation à la Commission comprend celui de préciser les exigences procédurales de négociation pour assurer une coopération loyale entre les institutions, consacrée à l’article 13, paragraphe 2, TUE, ainsi que le respect de l’équilibre institutionnel.

48      Le Conseil souligne qu’il lui appartient d’apprécier, lorsqu’il adopte une décision autorisant l’ouverture de négociations et désignant le négociateur, s’il est approprié, voire nécessaire, d’inclure, dans les directives de négociation, des indications concernant le rôle dévolu à chaque institution ainsi que les modalités de procédure dans le cadre desquelles doit se dérouler la négociation. Il s’agirait d’un corollaire de son droit de décider s’il y a lieu ou non d’accorder une telle autorisation.

49      Le Conseil explique que les modalités de procédure figurant dans les directives de négociation litigieuses portent exclusivement sur les relations entre la Commission, en tant que négociateur, le Conseil, en tant qu’institution octroyant l’autorisation de négocier un accord international et de signer ce dernier, et le comité spécial, que le Conseil peut désigner pour suivre les négociations.

50      Le Conseil estime que ces modalités procédurales, qui figurent dans les directives de négociation, ne méconnaissent pas le rôle respectif de chaque institution ni l’équilibre établi entre celles-ci par les traités. En effet, de telles modalités ne feraient qu’exprimer la manière dont les institutions devraient concrétiser le principe de coopération loyale dans le contexte de négociations internationales.

51      La République tchèque, le Royaume de Danemark et le Royaume de Suède se rallient à l’argument du Conseil tiré du rôle actif de ce dernier au cours des négociations d’un accord international. La compétence du Conseil d’adopter des directives de négociation et le fait que la Commission soit tenue de conduire les négociations en consultation avec un comité spécial, conformément à l’article 218, paragraphe 4, TFUE, supposent une coordination continue et un dialogue permanent entre la Commission et le Conseil, sans que ce processus soit limité à une phase déterminée des négociations.

52      À cet égard, la République de Pologne observe que seule l’obtention d’un résultat de négociation acceptable par le Conseil peut conduire à la signature et à la conclusion de l’accord au nom de l’Union. Aussi serait-il indispensable que le Conseil, au moment de l’octroi de l’autorisation au négociateur, puisse également en établir les limites et indiquer les conditions auxquelles les négociations seront conduites. Il conviendrait donc de prévenir une situation dans laquelle ce résultat serait inacceptable pour le Conseil et dans laquelle le refus d’approuver le projet d’accord final aurait une incidence négative sur les relations avec l’autre partie. Par conséquent, le pouvoir du Conseil de suivre de manière active les négociations revêtirait un caractère permanent et ne se bornerait pas à la seule adoption de directives de négociation annexées à la décision autorisant l’ouverture des négociations.

53      Le Conseil est d’avis que la Commission doit conduire les négociations dans les limites du mandat que le Conseil lui a donné. Les positions établies au sein du comité spécial seraient conçues comme une expression concrète des directives de négociation du Conseil et, en tant que telles, viseraient à aider le négociateur en précisant les points de vue avalisés par le Conseil. Il appartiendrait à la Commission de déterminer la manière de négocier, tout en suivant les orientations du comité spécial, que ce soit sous la forme d’instructions orales ou de positions exposées dans des documents.

54      Le Conseil précise que la définition de positions de négociation au sein du comité spécial a pour but de guider le négociateur en tenant compte des directives de négociation. Ces positions ne sauraient s’entendre comme impliquant une obligation pour la Commission de parvenir au résultat recommandé pour toutes les orientations qui y sont définies.

55      À cet égard, la République tchèque, la République française et le Royaume-Uni soulignent la faculté du Conseil de déterminer les modalités de consultation du comité spécial. En outre, en prévoyant, à la section A de l’annexe de la décision attaquée, qui contient les directives de négociation litigieuses, que ce dernier ou le Conseil lui-même peuvent adopter des «positions de négociation détaillées», lesdites directives ne feraient que rappeler le droit pour le Conseil de les préciser à tout moment ainsi que le rôle qui incombe au comité spécial.

56      Sur ce point, la République fédérale d’Allemagne ajoute que le «savoir spécialisé» des États membres dans le domaine visé par l’accord en question ne saurait être exploité dans une mesure suffisante si la Commission réussissait à imposer sa volonté d’intervenir dans des négociations de façon totalement autonome et sans tenir compte des observations du comité spécial.

57      Le Conseil rejette également l’argument tiré de l’absence de conclusion d’un accord interinstitutionnel relatif aux modalités de procédure, visé à l’article 295 TFUE, car un tel accord impliquerait non seulement la Commission et le Conseil, mais également le Parlement, ce qui irait à l’encontre de l’équilibre entre les institutions établi par l’article 218 TFUE.

58      Le Conseil, soutenu par le Royaume-Uni, fait observer, enfin, qu’une annulation partielle portant sur l’article 2, seconde phrase, de la décision attaquée et sur la section A de l’annexe de celle-ci ne saurait être envisagée, étant donné qu’elle modifierait fondamentalement le contenu global de l’autorisation de négociation. Il découlerait de la structure même de la décision attaquée et de son annexe que chacune de ces dispositions fait partie d’un tout indivisible.

 Appréciation de la Cour

59      Le présent recours vise, d’une part, l’article 2, seconde phrase, de la décision attaquée et, d’autre part, la section A de l’annexe de ladite décision. Il y a lieu d’examiner successivement ces deux aspects du recours.

60      En premier lieu, la Commission fait valoir que l’obligation prévue à l’article 2, seconde phrase, de la décision attaquée, selon laquelle «la Commission informe le Conseil par écrit de l’issue des négociations après chaque session de négociation et, en tout état de cause, au moins une fois par trimestre», est contraire à l’article 218, paragraphes 2 et 4, TFUE, à l’article 13, paragraphe 2, TUE et au principe de l’équilibre institutionnel ainsi qu’à l’article 295 TFUE.

61      L’article 218, paragraphe 4, TFUE constituant, dans le présent contentieux, la norme de référence principale régissant la délimitation des attributions conférées, respectivement, au Conseil et au comité spécial ainsi qu’à la Commission, il convient d’apprécier le moyen avancé, d’abord, au regard de cette disposition.

62      À cet égard, il ressort de la jurisprudence de la Cour que l’article 218 TFUE constitue, en matière de conclusion de traités internationaux, une norme autonome et générale de portée constitutionnelle, en ce qu’elle attribue aux institutions de l’Union des compétences déterminées. Visant à établir un équilibre entre ces dernières, cette disposition prévoit, en particulier, que les accords entre l’Union et un ou plusieurs États tiers sont négociés par la Commission, dans le respect des directives de négociation arrêtées par le Conseil, puis conclus par le Conseil, soit après approbation, soit après consultation du Parlement. La compétence pour conclure de tels accords est toutefois attribuée au Conseil sous réserve des compétences reconnues à la Commission dans ce domaine (voir, en ce sens, arrêt France/Commission, C‑327/91, EU:C:1994:305, point 28).

63      En outre, l’article 17, paragraphe 1, TUE prévoit que, à l’exception de la politique étrangère et de sécurité commune et des autres cas prévus par les traités, la Commission assure la représentation extérieure de l’Union.

64      Dans le cadre de ces attributions, le Conseil et la Commission sont néanmoins tenus au respect de l’article 13, paragraphe 2, deuxième phrase, TUE, qui énonce que «[l]es institutions pratiquent entre elles une coopération loyale». Cette coopération revêt une importance particulière pour l’action de l’Union sur le plan international, une telle action déclenchant un processus de concertation et de consultation étroit entre les institutions de l’Union.

65      Par ailleurs, l’article 218, paragraphe 4, TFUE prévoit que, lorsque le Conseil a désigné un comité spécial, les négociations doivent être conduites en consultation avec ce comité.

66      Dans ce cas, auquel correspond la présente espèce, la Commission doit fournir à ce comité spécial toutes les informations nécessaires au suivi, par ce dernier, du déroulement des négociations, telles que, notamment, les orientations annoncées et les positions défendues par les autres parties tout au long des négociations. Ce n’est que de cette manière que le comité spécial se trouve en mesure de formuler des opinions et des indications relatives à la négociation.

67      Eu égard aux différentes attributions institutionnelles dans la négociation et la conclusion des accords visés à l’article 218 TFUE, il peut être exigé de la Commission qu’elle fournisse ces informations également au Conseil. En effet, il est utile que ce dernier dispose desdites informations afin de comprendre le déroulement des négociations qui visent à l’élaboration d’un projet d’accord qui lui sera soumis pour approbation.

68      Par conséquent, l’obligation qui figure à l’article 2, seconde phrase, de la décision attaquée, qui prévoit que «la Commission informe le Conseil par écrit de l’issue des négociations après chaque session de négociation et, en tout état de cause, au moins une fois par trimestre», doit être considérée comme étant conforme à l’article 218, paragraphes 2 et 4, TFUE.

69      S’agissant, ensuite, de la prétendue violation de l’article 13, paragraphe 2, TUE, il importe de rappeler que, conformément à cette disposition, chaque institution de l’Union agit dans les limites des attributions qui lui sont conférées par les traités, conformément aux procédures, aux conditions et aux fins prévues par ceux-ci. Ladite disposition traduit le principe de l’équilibre institutionnel, caractéristique de la structure institutionnelle de l’Union, lequel implique que chacune des institutions exerce ses compétences dans le respect de celles des autres (voir arrêt Conseil/Commission, C‑409/13, EU:C:2015:217, point 64 et jurisprudence citée).

70      Or, pour les motifs indiqués aux points 66 et 67 du présent arrêt, l’article 2, seconde phrase, de la décision attaquée respecte également l’obligation énoncée à l’article 13, paragraphe 2, TUE, selon laquelle chaque institution de l’Union agit dans les limites des attributions qui lui sont conférées par les traités.

71      De même, cette disposition de ladite décision n’est aucunement constitutive d’une violation du principe de l’équilibre institutionnel.

72      Enfin, et quant à la violation alléguée de l’article 295 TFUE, ce dernier ne fait pas obstacle à la possibilité pour le Conseil de régler, dans une décision d’autorisation de négociation, les modalités de l’information périodique que la Commission doit lui fournir tout au long du processus de négociation en vue de la conclusion d’un accord international par l’Union.

73      Dans ces conditions, la demande d’annulation de la Commission en ce qu’elle vise l’article 2, seconde phrase, de cette décision doit être rejetée.

74      En deuxième lieu, la Commission fait valoir que la section A de l’annexe de la décision attaquée, qui contient les directives de négociation litigieuses, méconnaît la délimitation des attributions, prévue à l’article 218, paragraphe 4, TFUE, conférées, respectivement, au Conseil et au comité spécial ainsi qu’à la Commission, en tant que négociateur, et viole également l’article 13, paragraphe 2, TUE ainsi que l’équilibre institutionnel.

75      Au regard des observations écrites et orales présentées devant la Cour, et étant rappelé que le Conseil, en l’espèce, a désigné un comité spécial, il convient de déterminer, d’abord, si le Conseil est habilité à prévoir, dans les directives de négociation, des règles de nature procédurale comme celles en cause en l’espèce et, dans l’affirmative, si les règles établies à la section A de l’annexe de la décision attaquée respectent la répartition des compétences entre les institutions et le comité spécial prévue à l’article 218, paragraphe 4, TFUE.

76      À cet égard, il résulte de la troisième phrase du point 1 de la section A de l’annexe de la décision attaquée, lue en combinaison avec le deuxième alinéa de la déclaration du Conseil, du 8 mai 2013, que le comité spécial désigné par le Conseil est «mandaté pour suivre la conduite des négociations et guider le négociateur, compte tenu des directives de négociation arrêtées par le Conseil». En outre, la quatrième phrase du point 1 de cette section A prévoit que les réunions dudit comité doivent être organisées et présidées par l’État membre qui exerce la présidence du Conseil.

77      Le Conseil étant habilité à désigner un comité spécial et la Commission étant tenue de conduire les négociations «en consultation avec ce comité», conformément à l’article 218, paragraphe 4, TFUE, cette dernière doit informer ledit comité de tous les aspects des négociations afin que celui-ci puisse être utilement consulté. Ce n’est que de cette manière que le comité spécial se trouve en mesure de formuler des opinions et des indications relatives aux positions que doit adopter la Commission dans les négociations.

78      Dans ces conditions, l’article 218, paragraphe 4, TFUE doit être interprété comme habilitant le Conseil à prévoir, dans les directives de négociation, des modalités procédurales régissant le processus d’information, de communication et de consultation entre le comité spécial et la Commission, de telles règles répondant à l’objectif d’assurer une bonne concertation sur le plan interne.

79      Il convient de vérifier, toutefois, si la section A de l’annexe de la décision attaquée comporte d’autres dispositions qui, tout en étant de nature procédurale, seraient susceptibles de priver le négociateur du pouvoir qui lui est reconnu à l’article 17, paragraphe 1, TUE.

80      Quant à la première phrase du point 1 de la section A de l’annexe de la décision attaquée, selon laquelle «la Commission mène les négociations conformément à la législation pertinente de l’Union en vigueur», il y a lieu d’observer qu’il s’agit ici d’un rappel à caractère général qui circonscrit le champ d’action de la Commission en la matière. À cette fin, il est, en outre, utilement indiqué à la première phrase du point 2 de cette section A que «les négociations doivent être préparées longtemps à l’avance».

81      S’agissant de la seconde phrase de ce même point, selon laquelle, aux fins de la préparation des négociations, «la Commission communique dès que possible au Conseil le calendrier prévu, les questions à négocier et les documents pertinents, afin de donner aux membres du comité spécial un délai raisonnable pour se préparer de manière appropriée en vue des négociations à venir», il convient de relever que, d’une part, cet élément explicite l’obligation énoncée à l’article 2, seconde phrase, de la décision attaquée, laquelle est conforme à l’article 218, paragraphe 4, TFUE, ainsi qu’il résulte du point 68 du présent arrêt. D’autre part, ledit élément détermine les modalités de la consultation du comité spécial désigné par le Conseil conformément à l’article 218, paragraphe 4, TFUE.

82      Il en va de même du point 4 de la section A de l’annexe de cette décision, qui prévoit que «la Commission rend compte au Conseil des résultats des négociations après chaque session de négociation et, en tout état de cause, au moins une fois par trimestre», que «[l]a Commission informe le Conseil de tout problème majeur qui surviendrait au cours de celles-ci et consulte le comité spécial à ce sujet.»

83      Enfin, la seconde phrase du point 3 de la section A de l’annexe de la décision attaquée, qui permet de demander conseil au comité des changements climatiques sur des aspects techniques spécifiques des négociations «sous réserve d’une autorisation préalable du comité spécial», doit également être considérée comme relevant des modalités de consultation du comité spécial.

84      Il s’ensuit que les éléments de cette section A, examinés aux points 80 à 83 du présent arrêt, ne méconnaissent ni l’article 218, paragraphe 4, TFUE, ni l’article 13, paragraphe 2, TUE, ni le principe de l’équilibre institutionnel, ni l’article 295 TFUE.

85      Il reste, dès lors, à apprécier, en dernier lieu, deux éléments figurant à la section A de l’annexe de la décision attaquée, à savoir la deuxième phrase de son point 1, qui prévoit que, «[l]e cas échéant, les positions de négociation détaillées de l’Union sont établies au sein du comité spécial visé à l’article 1er, paragraphe 2, ou au sein du Conseil», ainsi que l’élément particulier de la première phrase de son point 3, qui permet au comité spécial, avant chaque session de négociation, «d’établir des positions de négociation».

86      Il importe d’observer que lesdites stipulations constituent des dispositions visant à lier le négociateur.

87      En effet, même si le Conseil se borne à soutenir que les positions de négociation ont pour objectif d’assister le négociateur et ne sauraient s’entendre comme impliquant une obligation pour la Commission de parvenir au «résultat recommandé», il ressort de ces dispositions, lues à la lumière de leur libellé et placées dans leur contexte, qu’elles visent à ce que ces positions déploient des effets contraignants pour le négociateur.

88      Or, ce caractère contraignant des positions établies par le comité spécial, ou, le cas échéant, par le Conseil lui-même, est contraire à l’article 218, paragraphe 4, TFUE.

89      En effet, d’une part, les deux éléments visés au point 85 du présent arrêt confèrent au comité spécial la fonction d’établir des positions de négociation détaillées de l’Union, qui excède la fonction consultative qui lui est assignée par cette disposition.

90      D’autre part, si l’article 218, paragraphe 4, TFUE autorise, certes, le Conseil à formuler des directives de négociation, cette disposition n’investit pas, en revanche, cette institution, contrairement à ce que prévoit la deuxième phrase du point 1 de la section A de l’annexe de la décision attaquée, du pouvoir d’imposer au négociateur des «positions de négociation détaillées».

91      Il s’ensuit que le Conseil, en incluant lesdits éléments dans les directives de négociation, a violé l’obligation énoncée à l’article 13, paragraphe 2, TUE d’agir dans les limites des attributions qui lui sont conférées par l’article 218, paragraphes 2 à 4, TFUE.

92      Ce faisant, le Conseil a également enfreint le principe de l’équilibre institutionnel.

93      Dans ces conditions, la deuxième phrase du point 1 de la section A de l’annexe de la décision attaquée ainsi que les termes «et d’établir des positions de négociation», figurant à la première phrase du point 3 de cette section A, doivent être annulés.

94      S’agissant des conditions d’une annulation partielle d’un acte de l’Union, il résulte d’une jurisprudence constante qu’une telle annulation n’est possible que dans la mesure où les éléments dont l’annulation est demandée sont détachables du reste de l’acte (voir arrêts Commission/Conseil, C‑29/99, EU:C:2002:734, point 45, et Allemagne/Commission, C‑239/01, EU:C:2003:514, point 33). La Cour a itérativement jugé qu’il n’est pas satisfait à cette exigence de séparabilité lorsque l’annulation partielle d’un acte aurait pour effet de modifier la substance de celui-ci (voir arrêts Commission/Pologne, C‑504/09 P, EU:C:2012:178, point 98, ainsi que Commission/Parlement et Conseil, C‑427/12, EU:C:2014:170, point 16). En ce qui concerne la vérification du caractère détachable des dispositions contestées, celle-ci suppose l’examen de la portée desdites dispositions, afin de pouvoir évaluer si leur annulation modifierait l’esprit et la substance de la décision attaquée (voir arrêt Commission/Estonie, C‑505/09 P, EU:C:2012:179, point 112 et jurisprudence citée).

95      En l’espèce, la deuxième phrase du point 1 de la section A de l’annexe de la décision attaquée ainsi que les termes «et d’établir des positions de négociation», figurant à la première phrase du point 3 de cette section A, exposés au point 85 du présent arrêt, sont détachables du reste de cette décision. En effet, ces deux chefs d’annulation ne modifient pas la substance de la décision attaquée et, en particulier, sont sans incidence sur les obligations de la Commission relatives à la conduite des négociations, telles qu’elles résultent des directives de négociation figurant à l’annexe de ladite décision, et à l’information du Conseil, découlant de l’article 2, seconde phrase, de ladite décision.

96      Par ailleurs, ladite annulation ne saurait davantage modifier la substance des autres éléments de la section A de l’annexe de la décision attaquée.

97      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il convient d’annuler, sous la section A, intitulée «Procédure de négociation», de l’annexe de la décision attaquée:

–        la deuxième phrase du point 1 de cette section A, aux termes de laquelle, «[l]e cas échéant, les positions de négociation détaillées de l’Union sont établies au sein du comité spécial visé à l’article 1er, paragraphe 2, ou au sein du Conseil», et

–        au point 3 de ladite section, les termes «et d’établir des positions de négociation».

 Sur les dépens

98      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le recours de la Commission ayant été en partie accueilli, la Commission et le Conseil, conformément à l’article 138, paragraphe 3, de ce règlement, supportent leurs propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure ayant donné lieu à l’ordonnance Commission/Conseil (C‑425/13, EU:C:2014:91).

99      Conformément à l’article 140, paragraphe 1, dudit règlement, le Parlement ainsi que la République tchèque, le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne, la République française, le Royaume des Pays-Bas, la République de Pologne, le Royaume de Suède et le Royaume-Uni supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (grande chambre) déclare et arrête:

1)      Sont annulés, sous la section A, intitulée «Procédure de négociation», de l’annexe de la décision du Conseil du 13 mai 2013 autorisant l’ouverture de négociations sur la mise en relation du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne avec un système d’échange de droits d’émission mis en place en Australie:

–        la deuxième phrase du point 1 de cette section A, aux termes de laquelle, «[l]e cas échéant, les positions de négociation détaillées de l’Union sont établies au sein du comité spécial visé à l’article 1er, paragraphe 2, ou au sein du Conseil», et

–        au point 3 de ladite section, les termes «et d’établir des positions de négociation».

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne supportent leurs propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure ayant donné lieu à l’ordonnance Commission/Conseil (C‑425/13, EU:C:2014:91).

4)      Le Parlement européen ainsi que la République tchèque, le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne, la République française, le Royaume des Pays-Bas, la République de Pologne, le Royaume de Suède ainsi que le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord supportent leurs propres dépens.

Signatures


* Langue de procédure: l’anglais.