Language of document : ECLI:EU:C:2017:144

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

1er mars 2017 (1)

« Renvoi préjudiciel – Directive 2001/29/CE – Harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information – Article 9 – Accès au câble des services de radiodiffusion – Notion de “câble” – Retransmission par un tiers au moyen d’Internet des émissions de radiodiffuseurs de télévision commerciaux – “Live streaming” »

Dans l’affaire C‑275/15,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division) [Cour d’appel (Angleterre et pays de Galles) (division civile), Royaume-Uni], par décision du 2 juin 2015, parvenue à la Cour le 8 juin 2015, dans la procédure

ITV Broadcasting Limited,

ITV2 Limited,

ITV Digital Channels Limited,

Channel Four Television Corporation,

4 Ventures Limited,

Channel 5 Broadcasting Limited,

ITV Studios Limited

contre

TVCatchup Limited (en redressement judiciaire),

TVCatchup (UK) Limited,

Media Resources Limited,

en présence de :

The Secretary of State for Business, Innovation and Skills,

Virgin Media Limited,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. T. von Danwitz (rapporteur), président de chambre, MM. E. Juhász, C. Vajda, Mme K. Jürimäe et M. C. Lycourgos, juges,

avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,

greffier : Mme V. Giacobbo-Peyronnel, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 mai 2016,

considérant les observations présentées :

–        pour ITV Broadcasting Limited, ITV2 Limited, ITV Digital Channels Limited, Channel Four Television Corporation, 4 Ventures Limited, Channel 5 Broadcasting Limited, ITV Studios Limited, par M. J. Mellor, QC, et M. Q. Cregan, barrister, mandatés par MM. P. Stevens et J. Vertes, solicitors,

–        pour TVCatchup (UK) Limited et Media Resources Limited, par M. M. Howe, QC, mandaté par M. L. Gilmore, solicitor,

–        pour Virgin Media Limited, par M. T. de la Mare, QC, mandaté par M. B. Allgrove, solicitor,

–        pour le gouvernement du Royaume-Uni, initialement par Mme V. Kaye, en qualité d’agent, assistée de Mme C. May, QC, et de M. J. Riordan, barrister, puis par Mme J. Kraehling, en qualité d’agent, assistée de M. A. Robertson, QC,

–        pour la Commission européenne, par M. T. Scharf et Mme J. Samnadda, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 8 septembre 2016,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 9 de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information (JO 2001, L 167, p.10).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant ITV Broadcasting Limited, ITV2 Limited, ITV Digital Channels Limited, Channel Four Television Corporation, 4 Ventures Limited, Channel 5 Broadcasting Limited et ITV Studios Limited, d’une part, à TVCatchup Limited, en redressement judiciaire (ci-après « TVC »), à TVCatchup (UK) Limited (ci-après « TVC UK ») et à Media Resources Limited, d’autre part, au sujet de la diffusion par ces dernières au moyen d’Internet des émissions télévisées des requérantes au principal.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        Les considérants 4, 20, 23, 32 et 60 de la directive 2001/29 énoncent :

« (4)            Un cadre juridique harmonisé du droit d’auteur et des droits voisins, en améliorant la sécurité juridique et en assurant dans le même temps un niveau élevé de protection de la propriété intellectuelle, encouragera des investissements importants dans des activités créatrices et novatrices, notamment dans les infrastructures de réseaux, et favorisera ainsi la croissance et une compétitivité accrue de l’industrie européenne, [...]

[...]

(20)      La présente directive se fonde sur des principes et des règles déjà établis par les directives en vigueur dans ce domaine, notamment les directives [91/250/CEE, 92/100/CEE, 93/83/CEE du Conseil, du 27 septembre 1993, relative à la coordination de certaines règles du droit d’auteur et des droits voisins du droit d’auteur applicables à la radiodiffusion par satellite et à la retransmission par câble (JO 1993, L 248, p. 15), 93/98/CEE et 96/9/CE]. Elle développe ces principes et règles et les intègre dans la perspective de la société de l’information. Les dispositions de la présente directive doivent s’appliquer sans préjudice des dispositions desdites directives, sauf si la présente directive en dispose autrement.

[...]

(23)      La présente directive doit harmoniser davantage le droit d’auteur de communication au public. Ce droit doit s’entendre au sens large, comme couvrant toute communication au public non présent au lieu d’origine de la communication. [...]

[...]

(32)      La présente directive contient une liste exhaustive des exceptions et limitations au droit de reproduction et au droit de communication au public. [...] 

[...]

(60) La protection prévue par la présente directive n’affecte pas les dispositions légales nationales ou communautaires dans d’autres domaines, tels que la propriété industrielle, la protection des données, les services d’accès conditionnel et à accès conditionnel, l’accès aux documents publics et la règle de la chronologie des médias, susceptibles d’avoir une incidence sur la protection du droit d’auteur ou des droits voisins. »

4        L’article 1er de la directive 2001/29, intitulé « Champ d’application », dispose :

« 1.      La présente directive porte sur la protection juridique du droit d’auteur et des droits voisins dans le cadre du marché intérieur, avec une importance particulière accordée à la société de l’information.

2.      Sauf dans les cas visés à l’article 11, la présente directive laisse intactes et n’affecte en aucune façon les dispositions communautaires existantes concernant :

[...]

c)      le droit d’auteur et les droits voisins applicables à la radiodiffusion de programmes par satellite et à la retransmission par câble ;

[...] »

5        Aux termes de l’article 2 de cette directive, intitulé « Droit de reproduction » :

« Les États membres prévoient le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire la reproduction directe ou indirecte, provisoire ou permanente, par quelque moyen et sous quelque forme que ce soit, en tout ou en partie :

a)      pour les auteurs, de leurs œuvres ;

[...]

e)      pour les organismes de radiodiffusion, des fixations de leurs émissions, qu’elles soient diffusées par fil ou sans fil, y compris par câble ou par satellite. »

6        L’article 3 de ladite directive, intitulé « Droit de communication d’œuvres au public et droit de mettre à la disposition du public d’autres objets protégés », prévoit :

« 1.      Les États membres prévoient pour les auteurs le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire toute communication au public de leurs œuvres, par fil ou sans fil, y compris la mise à la disposition du public de leurs œuvres de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement.

2.      Les États membres prévoient le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire la mise à la disposition du public, par fil ou sans fil, de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement :

[...]

d)      pour les organismes de radiodiffusion, des fixations de leurs émissions, qu’elles soient diffusées par fil ou sans fil, y compris par câble ou par satellite.

[...] »

7        Aux termes de l’article 5 de la directive 2001/29, intitulé « Exceptions et limitations » :

« 3.      Les États membres ont la faculté de prévoir des exceptions ou limitations aux droits prévus aux articles 2 et 3 dans les cas suivants :

[...]

5.      Les exceptions et limitations prévues aux paragraphes 1, 2, 3 et 4 ne sont applicables que dans certains cas spéciaux qui ne portent pas atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ou autre objet protégé ni ne causent un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire du droit. »

8        L’article 9 de la cette directive, intitulé « Maintien d’autres dispositions », énonce :

« La présente directive n’affecte pas les dispositions concernant notamment les brevets, les marques, les dessins et modèles, les modèles d’utilité, les topographies des semi-conducteurs, les caractères typographiques, l’accès conditionnel, l’accès au câble des services de radiodiffusion, la protection des trésors nationaux, les exigences juridiques en matière de dépôt légal, le droit des ententes et de la concurrence déloyale, le secret des affaires, la sécurité, la confidentialité, la protection des données personnelles et le respect de la vie privée, l’accès aux documents publics et le droit des contrats. »

 Le droit du Royaume-Uni

9        La Copyright, Designs and Patents Act 1988 (loi de 1988 sur les droits d’auteur, les dessins et les brevets), telle que modifiée par le Copyright and Related Rights Regulations 2003 (décret de 2003 sur le droit d’auteur et les droits voisins) (ci-après la « CDPA »), ayant transposé la directive 2001/29, prévoit, à son article 73, intitulé « Réception d’une œuvre radiodiffusée et retransmission de celle-ci par câble » :

« (1) Le présent article s’applique lorsqu’une œuvre radiodiffusée à partir du Royaume-Uni est captée et retransmise immédiatement par câble.

(2)      Le droit d’auteur sur l’œuvre radiodiffusée n’est pas violé :

(a)      si la retransmission par câble obéit à une exigence à prendre en compte, ou bien

(b)      si et dans la mesure où l’œuvre est radiodiffusée en vue d’une réception dans la zone où elle est retransmise par câble et si et dans la mesure où elle fait partie d’un service qualifié.

(3)      Le droit d’auteur sur toute œuvre incluse dans le contenu radiodiffusé n’est pas violé si et dans la mesure où ledit contenu est radiodiffusé en vue d’une réception dans la zone où elle est retransmise par câble. [...] »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

10      Les requérantes au principal sont des radiodiffuseurs de télévision commerciaux qui détiennent des droits d’auteur, au titre du droit national, sur leurs émissions de télévision ainsi que sur les films et les autres éléments inclus dans leurs émissions. Elles sont financées par les publicités véhiculées par leurs émissions.

11      TVC offrait sur Internet des services de diffusion d’émissions télévisées, permettant aux utilisateurs de recevoir « en direct » au moyen d’Internet des flux d’émissions télévisées gratuites, y compris les émissions télévisées diffusées par les requérantes au principal. À la suite du placement de TVC en redressement judiciaire, son activité commerciale et ses services sont désormais exercés par TVC UK, en vertu d’une licence octroyée par Media Resources Limited.

12      Les requérantes au principal ont assigné TVC devant la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division de la Chancery, Royaume-Uni] pour violation de leurs droits d’auteur. Cette juridiction a saisi la Cour d’une demande de décision préjudicielle portant sur l’interprétation de la notion de « communication au public » prévue à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29.

13      À la suite de l’arrêt du 7 mars 2013, ITV Broadcasting e.a. (C‑607/11, EU:C:2013:147), la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division de la Chancery] a constaté que TVC avait violé les droits d’auteur des requérantes au principal par une communication au public. En ce qui concerne trois chaînes de télévision, à savoir ITV, Channel 4 et Channel 5, cette juridiction a cependant considéré que TVC pouvait se prévaloir d’un moyen de défense tiré de l’article 73, paragraphe 2, sous b), et paragraphe 3, de la CDPA.

14      Les requérantes au principal ont interjeté appel devant la juridiction de renvoi. TVC UK et Media Resources Limited ont été ajoutées en tant que parties défenderesses devant cette juridiction.

15      La juridiction de renvoi expose que l’article 73 de la CDPA prévoit un moyen de défense contre une action pour violation du droit d’auteur sur une œuvre radiodiffusée ou sur toute œuvre incluse dans une œuvre radiodiffusée, applicable « lorsqu’une œuvre radiodiffusée à partir du Royaume-Uni est captée et retransmise immédiatement par câble ». Elle précise que le moyen de défense dont elle est saisie porte non pas sur l’article 73, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 3, de la CDPA, dont il résulte, notamment, que le droit d’auteur sur l’œuvre radiodiffusée n’est pas violé « si la retransmission par câble obéit à une exigence à prendre en compte », mais uniquement sur l’article 73, paragraphe 2, sous b), et paragraphe 3, de cette loi, énonçant que ce droit n’est pas violé « si et dans la mesure où l’œuvre est radiodiffusée en vue d’une réception dans la zone où elle est retransmise par câble et si et dans la mesure où elle fait partie d’un service qualifié ».

16      Estimant qu’il convient d’interpréter l’article 73 de la CDPA à la lumière de l’article 9 de la directive 2001/29, la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division) [Cour d’appel (Angleterre et pays de Galles) (division civile), Royaume-Uni] a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« En ce qui concerne l’interprétation de l’article 9 de la directive 2001/29, et notamment la formulation “[l]a présente directive n’affecte pas [les dispositions concernant] notamment [...] l’accès au câble des services de radiodiffusion” :

1)      La formulation précitée autorise-t-elle le maintien d’une disposition du droit national définissant la portée de la notion de “câble”, ou bien la portée de cette disposition de l’article 9 est-elle déterminée par une acception de “câble” définie par le droit de l’Union ?

2)      Si la notion de “câble” figurant à l’article 9 est définie par le droit de l’Union, quelle en est la signification ? En particulier :

a)      A-t-elle une signification liée à une technologie particulière, limitée aux réseaux câblés classiques exploités par des fournisseurs traditionnels de services par câble ?

b)      Dans le cas contraire, a-t-elle une signification neutre sur le plan technologique qui englobe des services fonctionnellement analogues diffusés grâce à l’Internet ?

c)      En tout état de cause, englobe-t-elle la diffusion d’énergie micro-ondes entre points terrestres fixes ?

3)      La formulation précitée s’applique-t-elle aux dispositions qui exigent que les réseaux câblés retransmettent certaines œuvres radiodiffusées, ou bien aux dispositions qui autorisent la retransmission par câble d’œuvres radiodiffusées lorsque les retransmissions sont simultanées et limitées aux zones auxquelles les œuvres radiodiffusées étaient destinées et/ou lorsqu’il en va de la retransmission d’œuvres diffusées à l’origine sur des chaînes soumises à certaines obligations de service public ?

4)      Si la portée de la notion de “câble” figurant à l’article 9 est définie par le droit national, la disposition du droit national est-elle subordonnée au respect des principes du droit de l’Union de proportionnalité et de juste équilibre entre les droits des titulaires de droits d’auteur, des propriétaires du câble et l’intérêt général ?

5)      L’article 9 ne vise-t-il que les dispositions du droit national en vigueur à la date à laquelle la directive 2001/29 a été approuvée, à la date de l’entrée en vigueur ou à la date butoir du délai de transposition de celle-ci, ou bien s’applique-t-il également aux dispositions ultérieures du droit national qui portent sur l’accès au câble des services de radiodiffusion ? »

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la troisième question

17      Par sa troisième question, qu’il convient d’examiner d’emblée, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 9 de la directive 2001/29, et plus particulièrement la notion d’« accès au câble des services de radiodiffusion », doit être interprété en ce sens que relève de cette disposition et est autorisée par celle-ci une réglementation nationale prévoyant l’absence de violation du droit d’auteur en cas de retransmission immédiate par câble, y compris, le cas échéant, au moyen d’Internet, dans la zone de radiodiffusion initiale, d’œuvres radiodiffusées sur des chaînes de télévision soumises à des obligations de service public.

18      À cet égard, il convient de constater que, en l’absence d’un renvoi exprès au droit des États membres, la notion d’« accès au câble des services de radiodiffusion », figurant à l’article 9 de la directive 2001/29, doit trouver, dans toute l’Union, une interprétation autonome et uniforme qui doit être recherchée en tenant compte du libellé de cette disposition, du contexte dans lequel elle s’insère ainsi que des objectifs de la réglementation dont elle fait partie (voir, en ce sens, arrêts du 21 octobre 2010, Padawan, C‑467/08, EU:C:2010:620, point 32 et du 10 novembre 2016, Private Equity Insurance Group, C‑156/15, EU:C:2016:851, point 39 ainsi que jurisprudence citée).

19      En premier lieu, il ressort des termes mêmes « accès au câble » que cette notion diffère de celle de « retransmission par câble », seule la dernière notion désignant, dans le cadre de la directive 2001/29, la diffusion d’un contenu audiovisuel.

20      S’agissant, en deuxième lieu, du contexte de l’article 9 de la directive 2001/29, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 55 de ses conclusions, celle-ci contient déjà, à son article 1er, paragraphe 2, sous c), une disposition qui traite expressément de la « retransmission par câble », pour exclure du champ d’application de cette directive les dispositions du droit de l’Union régissant cette question, en l’occurrence celles de la directive 93/83.

21      Pour autant que de besoin, il convient de relever que les dispositions de la directive 93/83 sont sans pertinence pour le litige au principal. En effet, ce dernier concerne une retransmission au sein d’un seul État membre alors que la directive 93/83 prévoit une harmonisation minimale de certains aspects de la protection des droits d’auteur et des droits voisins uniquement en cas de communication au public par satellite ou de retransmission par câble d’émissions provenant d’autres États membres (arrêt du 7 décembre 2006, SGAE, C‑306/05, EU:2006:764, point 30).

22      En troisième lieu, quant à la finalité de la directive 2001/29, celle-ci a pour objectif principal d’instaurer un niveau élevé de protection en faveur des auteurs, permettant à ceux-ci d’obtenir une rémunération appropriée pour l’utilisation de leurs œuvres, notamment à l’occasion d’une communication au public (voir, en ce sens, arrêt du 4 octobre 2011, Football Association Premier League e.a., C‑403/08 et C‑429/08, EU:C:2011:631, point 186).

23      Compte tenu de ce niveau élevé de protection en faveur des auteurs, la Cour, saisie à titre préjudiciel dans le cadre de l’affaire au principal en première instance, a déjà jugé que la notion de communication au public figurant à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29 doit être entendue au sens large, ainsi que l’énonce explicitement le considérant 23 de cette directive, et qu’une retransmission au moyen d’un flux Internet, telle que celle en cause au principal, constitue une telle communication (voir, en ce sens, arrêt du 7 mars 2013, ITV Broadcasting e.a., C‑607/11, EU:C:2013:147, points 20 et 40).

24      Il s’ensuit que, en l’absence du consentement de l’auteur concerné, une telle retransmission n’est pas, en principe, permise, sauf si elle relève de l’article 5 de cette directive, qui prévoit une liste exhaustive d’exceptions et de limitations au droit de communication au public institué à l’article 3 de ladite directive, comme le confirme le considérant 32 de celle-ci.

25      En l’occurrence, il est constant que la retransmission en cause au principal ne relève d’aucune des exceptions et des limitations prévues de manière exhaustive à l’article 5 de la directive 2001/29.

26      S’agissant de l’article 9 de la directive 2001/29, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général aux points 37 et 38 de ses conclusions, il ressort de cette disposition, lue à la lumière du considérant 60 de cette directive, que celle-ci vise à maintenir des dispositions applicables dans des domaines autres que celui harmonisé par ladite directive.

27      Or, une interprétation de l’article 9 de la directive 2001/29 selon laquelle celui-ci permettrait une retransmission telle que celle en cause au principal sans le consentement des auteurs dans d’autres cas que ceux prévus à l’article 5 de cette directive irait à l’encontre non seulement de l’objectif de cet article 9, mais également du caractère exhaustif de cet article 5 et porterait, ainsi, préjudice à la réalisation de l’objectif principal de ladite directive d’instaurer un niveau élevé de protection en faveur des auteurs.

28      Il est, à cet égard, sans incidence que la diffusion initiale des œuvres protégées soit intervenue, ou non, sur des chaînes de télévision soumises à des obligations de service public. En effet, il n’existe pas de fondement dans la directive 2001/29 qui justifierait d’accorder une protection moindre aux contenus de ces chaînes.

29      Eu égard à l’ensemble de ces considérations, il convient de répondre à la troisième question que l’article 9 de la directive 2001/29, et plus particulièrement la notion d’« accès au câble des services de radiodiffusion », doit être interprété en ce sens que ne relève pas de cette disposition et n’est pas autorisée par celle-ci une réglementation nationale prévoyant l’absence de violation du droit d’auteur en cas de retransmission immédiate par câble, y compris, le cas échéant, au moyen d’Internet, dans la zone de radiodiffusion initiale, d’œuvres radiodiffusées sur des chaînes de télévision soumises à des obligations de service public.

  Sur les première, deuxième, quatrième et cinquième questions

30      Compte tenu de la réponse apportée à la troisième question, il n’y a pas lieu de répondre aux première, deuxième, quatrième et cinquième questions. 

 Sur les dépens

31      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit :

L’article 9 de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, et plus particulièrement la notion d’« accès au câble des services de radiodiffusion », doit être interprété en ce sens que ne relève pas de cette disposition et n’est pas autorisée par celle-ci une réglementation nationale prévoyant l’absence de violation du droit d’auteur en cas de retransmission immédiate par câble, y compris, le cas échéant, au moyen d’Internet, dans la zone de radiodiffusion initiale, d’œuvres radiodiffusées sur des chaînes de télévision soumises à des obligations de service public.

Signatures


1      Langue de procédure : l’anglais.