Language of document : ECLI:EU:C:2012:534

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

6 septembre 2012 (*)

«Agriculture — Organismes génétiquement modifiés — Directive 2002/53/CE — Catalogue commun des variétés des espèces de plantes agricoles — Organismes génétiquement modifiés admis au catalogue commun — Règlement (CE) no 1829/2003 — Article 20 — Produits existants — Directive 2001/18/CE — Article 26 bis — Mesures visant à éviter la présence accidentelle d’organismes génétiquement modifiés — Mesures nationales interdisant la mise en culture d’organismes génétiquement modifiés admis au catalogue commun et autorisés en tant que produits existants dans l’attente de mesures fondées sur l’article 26 bis de la directive 2001/18/CE»

Dans l’affaire C‑36/11,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Consiglio di Stato (Italie), par décision du 14 janvier 2011, parvenue à la Cour le 24 janvier 2011, dans la procédure

Pioneer Hi Bred Italia Srl

contre

Ministero delle Politiche agricole alimentari e forestali,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot, président de chambre, Mme A. Prechal, M. L. Bay Larsen (rapporteur), Mme C. Toader et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 21 mars 2012,

considérant les observations présentées:

–        pour Pioneer Hi Bred Italia Srl, par Mes A. Police et F. Degni, avvocati,

–        pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de MM. S. Varone et G. Aiello, avvocati dello Stato,

–        pour le gouvernement espagnol, par M. A. Rubio González, en qualité d’agent,

–        pour la Commission européenne, par M. D. Bianchi et Mme L. Pignataro-Nolin, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 avril 2012,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 26 bis de la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 mars 2001, relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil (JO L 106, p. 1), telle que modifiée par la directive 2008/27/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 2008 (JO L 81, p. 45, ci‑après la «directive 2001/18»), lu en combinaison avec la recommandation 2003/556/CE de la Commission, du 23 juillet 2003, établissant des lignes directrices pour l’élaboration de stratégies nationales et de meilleures pratiques visant à assurer la coexistence des cultures génétiquement modifiées, conventionnelles et biologiques (JO L 189, p. 36, ci-après la «recommandation du 23 juillet 2003»), et la recommandation de la Commission du 13 juillet 2010 établissant des lignes directrices pour l’élaboration de mesures nationales de coexistence visant à éviter la présence accidentelle d’OGM dans les cultures conventionnelles et biologiques (JO C 200, p. 1, ci-après la «recommandation du 13 juillet 2010»).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Pioneer Hi Bred Italia Srl (ci-après «Pioneer») au Ministero delle Politiche agricole alimentari e forestali (ministère des Politiques agricoles, alimentaires et forestières) au sujet de la légalité d’une note de ce ministère informant Pioneer que, dans l’attente de l’adoption, par les régions, de règles propres à assurer la coexistence des cultures conventionnelles, biologiques et génétiquement modifiées, il ne pouvait instruire la demande de cette société visant à être autorisée à mettre en culture des hybrides de maïs génétiquement modifiés déjà inscrits au catalogue commun des variétés des espèces de plantes agricoles (ci‑après le «catalogue commun»).

 Le cadre juridique

 La réglementation de l’Union

 La directive 2001/18

3        La directive 2001/18 régit la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés (OGM) dans l’environnement ainsi que la mise sur le marché des OGM en tant que produits ou éléments de produits.

4        L’article 34 de la directive 2001/18 fixe la date de la transposition de celle-ci au plus tard au 17 octobre 2002. L’article 36 abroge, à la date du 17 octobre 2002, la directive 90/220/CEE du Conseil, du 23 avril 1990, relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement (JO L 117, p. 15), et dispose que les références faites à cette directive s’entendent comme faites à la directive 2001/18 selon un tableau de correspondance figurant en annexe.

5        Conformément à ses considérants 18 et 28, la directive 2001/18, de même que, auparavant, la directive 90/220, instaure des procédures et des critères harmonisés pour l’évaluation cas par cas des risques potentiels liés à la dissémination volontaire d’OGM dans l’environnement, ainsi qu’une procédure communautaire d’autorisation de mise sur le marché des produits concernés, lorsque l’utilisation envisagée de ceux-ci implique une dissémination volontaire des organismes dans l’environnement.

6        Les considérants 50 à 52 de cette directive énoncent:

«(50) Les autorisations existantes accordées dans le cadre de la [directive 90/220] devraient être renouvelées pour éviter les disparités entre ces autorisations et celles qui sont accordées dans le cadre de la présente directive et pour prendre pleinement en compte les conditions d’autorisation prévues par la [directive 90/220].

(51)      Ces renouvellements exigent une période transitoire au cours de laquelle les autorisations existantes accordées dans le cadre de la [directive 90/220] restent entièrement valables.

(52)      Lors du renouvellement d’une autorisation, toutes les conditions de l’autorisation initiale devraient pouvoir être révisées, y compris celles qui concernent la surveillance et la durée de validité de l’autorisation.»

7        S’agissant des OGM mis sur le marché en tant que produits ou éléments de produits, les articles 13 à 24 de la directive 2001/18 régissent essentiellement la procédure d’évaluation et d’autorisation des produits nouveaux, le renouvellement de l’autorisation de produits existants, la surveillance des produits autorisés, leur étiquetage, ainsi qu’une clause de sauvegarde permettant l’adoption par les États membres de mesures restrictives en cas de risque pour la santé humaine ou l’environnement.

8        S’agissant, en particulier, du renouvellement, avant le 17 octobre 2006, des autorisations accordées antérieurement au 17 octobre 2002 au titre de la directive 90/220, ses modalités sont régies par l’article 17 de la directive 2001/18, intitulé «Renouvellement de l’autorisation». En application du paragraphe 9 de cette disposition, l’opérateur concerné qui a adressé avant le 17 octobre 2006 une notification de renouvellement d’une autorisation peut continuer à mettre les OGM sur le marché dans les conditions spécifiées dans cette autorisation jusqu’à ce qu’une décision finale ait été prise en ce qui concerne le renouvellement sollicité.

9        L’article 26 bis de la directive 2001/18, intitulé «Mesures visant à éviter la présence accidentelle d’OGM», est libellé comme suit:

«1.      Les États membres peuvent prendre les mesures nécessaires pour éviter la présence accidentelle d’OGM dans d’autres produits.

2.      La Commission collecte et coordonne des informations reposant sur des études réalisées au niveau communautaire et national, observe les développements en matière de coexistence dans les États membres et, sur la base de ces informations et de ces observations, élabore des lignes directrices concernant la coexistence de cultures génétiquement modifiées, conventionnelles et biologiques.»

 La recommandation du 23 juillet 2003

10      Le considérant 4 de la recommandation du 23 juillet 2003 est libellé comme suit:

«La procédure d’octroi définitif de l’autorisation prévue par la [directive 2001/18] inclut, le cas échéant, des mesures spécifiques de coexistence en vue de protéger l’environnement et la santé humaine; la mise en œuvre desdites mesures est obligatoire.»

11      Le point 1.1 des lignes directrices annexées à la recommandation du 23 juillet 2003, intitulé «Le concept de coexistence», énonce:

«La culture des [OGM] ne manquera pas d’avoir des répercussions sur l’organisation de la production agricole dans l’Union européenne. D’une part, elle pose la question de la conduite à tenir en cas de présence fortuite (involontaire) de cultures génétiquement modifiées (GM) dans des cultures conventionnelles et vice versa, et, d’autre part, elle soulève la question de la garantie du libre choix des producteurs à l’égard des différentes filières de production. En principe, les agriculteurs devraient être en mesure d’opter pour le type de production agricole de leur choix, qu’il soit génétiquement modifié, conventionnel ou biologique. Aucune forme d’agriculture ne devrait être exclue dans l’Union européenne.

Par ailleurs, la question du choix des consommateurs est également posée. La garantie du principe du libre choix pour les consommateurs européens entre aliments à OGM et sans OGM dépend non seulement d’un système de traçabilité et d’étiquetage performant, mais aussi de l’aptitude du secteur agricole à fournir les différents types de produits. La capacité de l’industrie alimentaire à assurer un large choix aux consommateurs dépend, quant à elle, de la capacité du secteur agricole à maintenir des filières de production séparées.

La coexistence se réfère à la capacité des agriculteurs à opérer un choix effectif entre cultures génétiquement modifiées, biologiques et conventionnelles, dans le respect des obligations légales en matière d’étiquetage et/ou de normes de pureté.

La présence fortuite d’OGM, dans une proportion supérieure au seuil fixé dans la législation communautaire, déclenche l’obligation de mentionner sur l’étiquette la présence d’OGM dans le produit. Cette situation est susceptible de générer une perte de revenus, imputable à un prix de marché plus bas ou à des difficultés de commercialisation du produit en cause. De plus, les agriculteurs peuvent être amenés à devoir supporter des coûts supplémentaires liés à l’adoption de systèmes de surveillance et de mesures visant à réduire les mélanges de cultures génétiquement modifiées et des autres types de culture. La coexistence soulève donc le problème de l’impact économique potentiel du mélange de produits agricoles génétiquement modifiés et autres, de l’identification de mesures de gestion praticables pour réduire tout risque de mélange et du coût de ces mesures.

[…]»

 La recommandation du 13 juillet 2010

12      La recommandation du 13 juillet 2010 abroge et remplace la recommandation du 23 juillet 2003.

13      Les lignes directrices annexées à la recommandation du 13 juillet 2010 reprennent et développent les indications des lignes directrices annexées à la recommandation du 23 juillet 2003.

 La directive 2002/53/CE

14      Le considérant 11 de la directive 2002/53/CE du Conseil, du 13 juin 2002, concernant le catalogue commun des variétés des espèces de plantes agricoles (JO L 193, p. 1), telle que modifiée par le règlement (CE) no 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil, du 22 septembre 2003 (JO L 268, p. 1, ci‑après la «directive 2002/53»), énonce:

«Il est nécessaire que les semences ou plants couverts par la présente directive puissent être commercialisés librement dans la Communauté dès leur publication dans le catalogue commun.»

15      L’article 1er, paragraphes 1 et 2, de cette directive dispose:

«1.      La présente directive concerne l’admission des variétés [notamment, de céréales, au catalogue commun].

2.      Le [catalogue commun] est établi sur la base des catalogues nationaux des États membres.»

16      L’article 4 de ladite directive énonce:

«1.      Les États membres veillent à ce qu’une variété ne soit admise que si elle est distincte, stable et suffisamment homogène. La variété doit posséder une valeur culturale et d’utilisation satisfaisante.

[…]

4.      Dans le cas d’une variété génétiquement modifiée […], la variété n’est admise que si toutes les mesures appropriées ont été prises pour éviter les risques pour la santé humaine et l’environnement.

5.      En outre, lorsque des semences issues d’une variété végétale sont destinées à être utilisées [dans des denrées alimentaires ou des aliments pour animaux relevant du règlement (CE) no 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil, du 22 septembre 2003, concernant les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés (JO L 268, p. 1)], cette variété n’est admise que si elle a été agréée conformément audit règlement.

[…]»

17      L’article 7, paragraphes 1 et 4, prévoit:

«1.      Les États membres prescrivent que l’admission des variétés est le résultat d’examens officiels effectués notamment en culture et portant sur un nombre suffisant de caractères pour permettre de décrire la variété. […]

[…]

4.      a)      Dans le cas d’une variété génétiquement modifiée visée à l’article 4, paragraphe 4, il est procédé à une évaluation des incidences sur l’environnement équivalente à celle prévue par la [directive 90/220].

b)      Les procédures garantissant une évaluation des incidences sur l’environnement et d’autres éléments pertinents équivalente à celle qui est établie dans la [directive 90/220] sont introduites sur proposition de la Commission, dans un règlement du Conseil s’appuyant sur la base juridique appropriée du traité. Jusqu’à l’entrée en vigueur dudit règlement, les variétés génétiquement modifiées ne sont admises au catalogue national qu’après avoir été admises à la commercialisation conformément à la [directive 90/220].

[…]»

18      L’article 16 dispose:

«1.      Les États membres veillent à ce que, à compter de la publication visée à l’article 17, les semences de variétés admises conformément aux dispositions de la présente directive ou conformément aux principes correspondant à ceux de la présente directive ne soient soumises à aucune restriction de commercialisation quant à la variété.

2.      Un État membre peut, sur demande […] être autorisé à interdire, pour tout ou partie de son territoire, l’utilisation de la variété ou à prescrire des conditions appropriées de culture de la variété et, dans le cas prévu au point c), des conditions d’utilisation des produits issus de la culture de cette variété:

a)      s’il est prouvé que la culture de cette variété pourrait nuire, sur le plan phytosanitaire, à la culture d’autres variétés ou espèces;

[…]

c)      s’il a des raisons valables, autres que celles qui ont déjà été évoquées ou qui ont pu être évoquées lors de la procédure [d’admission au catalogue national des variétés] de considérer que la variété présente un risque pour la santé humaine ou l’environnement.»

19      L’article 17 prévoit:

«Conformément aux informations fournies par les États membres et au fur et à mesure que celles-ci lui parviennent, la Commission assure la publication au [catalogue commun] de toutes les variétés dont les semences et plants ne sont, en application de l’article 16, soumis à aucune restriction de commercialisation quant à la variété […]. La publication indique les États membres ayant bénéficié d’une autorisation selon l’article 16, paragraphe 2, ou selon l’article 18.

[…]

La notice d’accompagnement publiée indique clairement les variétés qui ont été génétiquement modifiées.»

20      L’article 18 dispose:

«S’il est constaté que la culture d’une variété inscrite dans le catalogue commun pourrait, dans un État membre, nuire sur le plan phytosanitaire à la culture d’autres variétés ou espèces, présenter un risque pour l’environnement ou pour la santé humaine, cet État membre peut, sur demande, être autorisé […] à interdire la commercialisation des semences ou plants de cette variété dans tout ou partie de son territoire. En cas de danger imminent de propagation d’organismes nuisibles, de danger imminent pour la santé humaine ou pour l’environnement, cette interdiction peut être établie par l’État membre intéressé dès le dépôt de sa demande jusqu’au moment de la décision définitive qui doit être arrêtée dans les trois mois […]»

 Le règlement no 1829/2003

21      Conformément à ses considérants 7 et 11, le règlement no 1829/2003, applicable à partir du 18 avril 2004 en vertu de son article 49, établit une procédure communautaire unique d’autorisation s’appliquant, notamment, aux aliments pour animaux contenant des OGM ou consistant en de tels organismes ou produits à partir de ceux-ci ainsi qu’aux OGM qui seront utilisés en tant que matières d’origine pour l’obtention de tels aliments.

22      L’article 16, paragraphes 1, 2 et 7, du règlement no 1829/2003 dispose:

«1.      Les aliments pour animaux [relevant du règlement no 1829/2003] ne doivent pas:

a)      avoir des effets négatifs sur la santé humaine, la santé animale ou l’environnement;

[…]

2.      Personne ne peut mettre sur le marché, utiliser ou transformer un [aliment génétiquement modifié pour animaux entrant dans le champ d’application du règlement no 1829/2003] à moins qu’il ne soit couvert par une autorisation délivrée conformément à la présente section et que les conditions pertinentes de l’autorisation ne soient respectées.

[…]

7.      L’autorisation prévue par le présent règlement est accordée sans préjudice [notamment, de la directive 2002/53].»

23      L’article 20 de ce règlement, intitulé «Statut des produits existants», prévoit:

«1.      Par dérogation à l’article 16, paragraphe 2, les produits relevant du champ d’application de la présente section qui ont été légalement mis sur le marché dans la Communauté avant la date d’application du présent règlement peuvent continuer à être mis sur le marché, utilisés et transformés si les conditions suivantes sont remplies:

a)      dans le cas des produits qui ont été autorisés en vertu de la [directive 90/220] ou de la [directive 2001/18] […], les exploitants responsables de la mise sur le marché des produits concernés notifient à la Commission la date de la première mise sur le marché de ces produits dans la Communauté, dans les six mois qui suivent la date d’application du présent règlement;

[…]

2.      La notification visée au paragraphe 1 est accompagnée, le cas échéant, des éléments [dont la présentation est exigée par le règlement no 1829/2003 lors d’une demande initiale d’autorisation fondée sur celui-ci] […]

[…]

4.      Dans un délai de neuf ans à compter de la date de la première mise sur le marché des produits visés au paragraphe 1, point a), mais en aucun cas avant que trois ans se soient écoulés depuis la date d’application du présent règlement, les exploitants responsables de cette mise sur le marché introduisent une demande conformément à l’article 23, qui s’applique mutatis mutandis.

[…]

5.      Les produits visés au paragraphe 1 et les aliments pour animaux qui les contiennent ou qui sont obtenus à partir de ces produits sont soumis aux dispositions du présent règlement, et notamment de [son article 34, qui s’applique] mutatis mutandis.

[…]»

24      L’article 23, intitulé «Renouvellement des autorisations», prévoit, en particulier, l’application mutatis mutandis de l’article 17, paragraphe 2, relatif aux modalités de traitement, par l’autorité nationale compétente et par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (ci-après l’«Autorité»), d’une demande initiale d’autorisation fondée sur le règlement no 1829/2003, ainsi que des articles 18 et 19, qui énoncent, respectivement, les conditions dans lesquelles, d’une part, un avis est émis sur la demande par l’Autorité et, d’autre part, une décision est adoptée au niveau communautaire. L’article 18, paragraphe 3, prescrit, notamment, que l’Autorité détermine, aux fins de l’élaboration de son avis, si l’aliment pour animaux respecte les critères fixés à l’article 16, paragraphe 1, à savoir, en particulier, une absence d’effets négatifs sur la santé humaine, la santé animale ou l’environnement.

25      L’article 24, intitulé «Champ d’application» et contenu dans la section 2 intitulée «Étiquetage», dispose:

«1.      La présente section s’applique aux aliments pour animaux [relevant du règlement no 1829/2003].

2.      La présente section ne s’applique pas aux aliments pour animaux renfermant un matériel contenant des OGM, consistant en de tels organismes ou produit à partir de tels organismes dans une proportion n’excédant pas 0,9 % de l’aliment et de chacun de ses composants, à condition que cette présence soit fortuite ou techniquement inévitable.

[…]»

26      L’article 34, intitulé «Mesures d’urgence», dispose:

«Lorsqu’un produit autorisé par le présent règlement ou conformément à celui-ci est, de toute évidence, susceptible de présenter un risque grave pour la santé humaine, la santé animale ou l’environnement […], des mesures sont arrêtées conformément aux procédures visées aux articles 53 et 54 du [règlement (CE) no 178/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2002, établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l’Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires (JO L 31, p. 1)].»

 Le règlement no 178/2002

27      L’article 53 du règlement no 178/2002, intitulé «Mesures d’urgence applicables aux denrées alimentaires et aux aliments pour animaux d’origine communautaire ou importés d’un pays tiers», est libellé comme suit:

«1.      Lorsqu’il est évident que des denrées alimentaires ou des aliments pour animaux d’origine communautaire ou importés d’un pays tiers sont susceptibles de constituer un risque sérieux pour la santé humaine, la santé animale ou l’environnement et que ce risque ne peut être maîtrisé de façon satisfaisante par le biais de mesures prises par le ou les États membres concernés, la Commission […] arrête sans délai, de sa propre initiative ou à la demande d’un État membre, en fonction de la gravité de la situation, une ou plusieurs des mesures suivantes:

[suspension de la mise sur le marché ou de l’utilisation des denrées alimentaires ou des aliments pour animaux d’origine communautaire, suspension des importations de telles denrées ou aliments en provenance de pays tiers, fixation de conditions particulières ou toute autre mesure conservatoire appropriée pour des denrées alimentaires ou des aliments pour animaux d’origine communautaire ou en provenance de pays tiers].

2.      Toutefois, dans des situations d’urgence, la Commission peut, à titre provisoire, arrêter les mesures visées au paragraphe 1 après avoir consulté les États membres concernés et informé les autres États membres.

Aussi rapidement que possible et dans un délai maximum de dix jours ouvrables, les mesures adoptées sont confirmées, modifiées, abrogées ou prorogées […] et les raisons motivant la décision de la Commission sont rendues publiques sans délai.»

28      L’article 54 du même règlement, intitulé «Autres mesures d’urgence», est rédigé dans les termes suivants:

«1.      Lorsqu’un État membre informe officiellement la Commission de la nécessité de prendre des mesures d’urgence et que la Commission n’a pris aucune mesure conformément à l’article 53, cet État membre peut prendre des mesures conservatoires. Dans ce cas, il en informe immédiatement les autres États membres et la Commission.

2.      Dans un délai de dix jours ouvrables, la Commission saisit le [Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale] en vue de la prorogation, de la modification ou de l’abrogation des mesures conservatoires nationales.

3.      L’État membre peut maintenir les mesures conservatoires qu’il a prises au niveau national jusqu’à l’adoption des mesures communautaires.»

 Le règlement (CE) no 641/2004

29      L’article 11 du règlement (CE) no 641/2004 de la Commission, du 6 avril 2004, fixant les modalités d’application du règlement no 1829/2003 en ce qui concerne la demande d’autorisation de nouvelles denrées alimentaires et de nouveaux aliments pour animaux génétiquement modifiés, la notification de produits existants et la présence fortuite ou techniquement inévitable de matériel génétiquement modifié ayant fait l’objet d’une évaluation du risque et obtenu un avis favorable (JO L 102, p. 14), contenu dans la section 2 de celui-ci, intitulée «Conditions supplémentaires applicables aux notifications de certains produits mis sur le marché avant le 18 avril 2004», dispose:

«1.      […], les notifications d’OGM qui ont été mis sur le marché conformément à la partie C de la directive [90/220] ou à la partie C de la directive [2001/18] contiennent une copie de l’autorisation pertinente accordée en vertu de ces directives.

2.      La date de publication au Journal officiel de l’Union européenne de la décision d’accorder l’autorisation conformément à la directive [90/220] ou à la directive [2001/18] est considérée comme étant la date de la première mise sur le marché du produit, sauf si le notifiant fournit la preuve vérifiable que sa première mise sur le marché a eu lieu à une date ultérieure.»

 La réglementation nationale

30      L’article 1er du décret législatif no 212, du 24 avril 2001 (GURI no 131, du 8 juin 2001, ci-après le «décret législatif no 212/2001»), dispose:

«[…]

2.      […] La mise en culture des produits semenciers […] est soumise à autorisation par acte du ministre des Politiques agricoles et forestières, pris en accord avec le ministre de l’Environnement et le ministre de la Santé, adopté sur avis de la [commission pour les produits semenciers de variétés génétiquement modifiées], dans lequel sont fixées les mesures aptes à garantir que les cultures dérivant de produits semenciers de variétés génétiquement modifiées n’entrent pas en contact avec les cultures dérivant de produits semenciers traditionnels et ne provoquent pas de dommage biologique à l’environnement immédiat, compte tenu des particularités agroécologiques, environnementales et pédoclimatiques.

[…]

5.      Quiconque met en culture des produits semenciers de variétés génétiquement modifiées sans l’autorisation visée au paragraphe 2 est passible d’une peine d’emprisonnement de six mois à trois ans ou d’une amende dont le montant peut aller jusqu’à 100 millions de lires. La même sanction s’applique en cas de révocation ou de suspension de l’autorisation.

[…]»

31      Le décret-loi no 279, du 22 novembre 2004 (GURI no 280, du 29 novembre 2004), tel que modifié et converti en loi par la loi no 5, du 28 janvier 2005 (GURI no 22, du 28 janvier 2005, ci-après le «décret-loi no 279/2004»), vise à l’adoption de mesures de coexistence en considération de la recommandation du 23 juillet 2003.

32      L’article 3 de ce décret-loi prévoit l’adoption de ces mesures de coexistence par un décret de nature non réglementaire du Ministro delle Politiche agricole alimentari e forestali (ministre des Politiques agricoles alimentaires et forestières), adopté en concertation avec la conférence permanente pour les rapports entre l’État, les régions et les provinces autonomes de Trente et de Bolzano, publié après avis des commissions parlementaires compétentes.

33      En vertu du même article 3 ainsi que de l’article 4 du décret-loi no 279/2004, ce décret de nature non réglementaire à intervenir doit définir les dispositions cadres pour la coexistence, dans le respect desquelles les régions approuveront leurs propres plans de coexistence, en adoptant des actes ad hoc.

34      Conformément à l’article 4, paragraphe 1, du décret-loi no 279/2004, le plan de coexistence est adopté par acte de chaque région et province autonome et contient les règles techniques de mise en œuvre de la coexistence, tout en prévoyant des instruments qui garantissent la collaboration des organismes territoriaux locaux, sur la base des principes de subsidiarité, de différenciation et de proportionnalité.

35      L’article 8 du même décret-loi prévoit que, tant que les différents plans de coexistence ne sont pas adoptés, les cultures génétiquement modifiées ne sont pas autorisées, à l’exception de celles destinées à la recherche et à l’expérimentation.

36      Par arrêt no 116 du 17 mars 2006, rendu à la suite d’un recours formé par la région des Marches, la Corte costituzionale (Cour constitutionnelle) a déclaré inconstitutionnels, notamment, les articles 3, 4 et 8 du décret-loi no 279/2004.

37      S’agissant, en particulier, de l’article 4, elle a jugé qu’il portait atteinte à la compétence législative des régions en matière d’agriculture, en tant que celles-ci exercent le pouvoir de réglementer les modalités d’application du principe de coexistence dans les différents territoires régionaux, notoirement différents du point de vue morphologique et sur le plan de leur production.

38      En ce qui concerne l’article 8, la Corte costituzionale l’a déclaré inconstitutionnel en tant qu’il apparaissait indissociable des autres dispositions considérées comme illégales.

39      Sont en conséquence demeurés en vigueur les articles 1er et 2 du décret-loi no 279/2004, d’où résulte la volonté du législateur de se prévaloir de la possibilité de prendre les mesures nécessaires pour éviter la présence accidentelle d’OGM dans les autres cultures, telles que les cultures conventionnelles ou biologiques.

40      À la suite de l’arrêt no 116 du 17 mars 2006, le Ministro delle Politiche agricole alimentari e forestali a adopté la circulaire no 269 du 31 mars 2006, dans laquelle il considère que ledit arrêt ne remet pas en cause la légitimité de l’interdiction de cultiver des OGM dans l’attente de l’adoption de plans de coexistence et que la déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 8 du décret-loi no 279/2004 doit être entendue en ce sens que, si l’interdiction de cultiver des OGM subsiste, il faut prévoir l’exercice par l’autorité régionale ou provinciale de sa compétence en ce domaine.

41      Au point 4 de cette circulaire, il souligne que, après que les régions et les provinces autonomes ont adopté leurs propres dispositions relatives à la coexistence, la complexe procédure d’autorisation d’émission d’OGM aux fins de leur culture doit encore être conclue positivement, dans le respect des dispositions du décret législatif no 212/2001, qui exigent la délivrance d’une autorisation ministérielle.

42      Au point 5, il conclut que la culture d’OGM demeure interdite jusqu’à l’adoption des instruments réglementaires régionaux permettant de garantir la coexistence des cultures conventionnelles, biologiques et transgéniques et jusqu’à l’identification de solutions adéquates entre régions voisines, et que le non-respect de cette interdiction entraîne l’application des sanctions prévues à l’article 1er, paragraphe 5, du décret législatif no 212/2001.

 Le litige au principal et la question préjudicielle

43      Par décision 98/294/CE, du 22 avril 1998, concernant la mise sur le marché de maïs génétiquement modifié (Zea mays L. lignée MON 810), conformément à la directive 90/220 (JO L 131, p. 32), la Commission a autorisé la mise sur le marché des lignées pures et hybrides dérivées de la lignée de maïs MON 810, à la demande de Monsanto Europe SA (ci-après «Monsanto Europe»), sur le fondement de la directive 90/220.

44      Le 11 juillet 2004, Monsanto Europe a notifié à la Commission, notamment en application de l’article 20, paragraphe 1, sous a), du règlement no 1829/2003, les variétés du maïs MON 810 en tant que «produits existants».

45      Le 8 septembre 2004, la Commission a approuvé l’inscription de 17 variétés dérivées du maïs MON 810 au catalogue commun.

46      Monsanto Europe n’a pas effectué auprès de l’autorité nationale compétente, avant le 17 octobre 2006, une notification au titre de l’article 17, paragraphe 2, de la directive 2001/18.

47      Le 4 mai 2007, elle a sollicité le renouvellement de l’autorisation de mise sur le marché des variétés du maïs MON 810 sur le fondement de l’article 20, paragraphe 4, du règlement no 1829/2003.

48      Pioneer est une société de production et de distribution, à l’échelle mondiale, de semences conventionnelles et génétiquement modifiées.

49      Elle a l’intention de cultiver les variétés du maïs MON 810 inscrites au catalogue commun.

50      Le 18 octobre 2006, elle a demandé au Ministero delle Politiche agricole alimentari e forestali une autorisation de mise en culture de ces variétés au titre de l’article 1er, paragraphe 2, du décret législatif no 212/2001.

51      Par une note no 3734 du 12 mai 2008, le Ministero delle Politiche agricole alimentari e forestali — Dipartimento delle Politiche di sviluppo economico e rurale (ministère des Politiques agricoles alimentaires et forestières — Département des Politiques de développement économique et rural) lui a fait savoir qu’il ne pouvait pas procéder à l’instruction de sa demande d’autorisation de mise en culture d’hybrides de maïs génétiquement modifiés, déjà inscrits au catalogue commun, «dans l’attente de l’adoption, par les régions, des règles propres à assurer la coexistence des cultures conventionnelles, biologiques et génétiquement modifiées, tel que prévu par la circulaire du Mipaaf [ministère des Politiques agricoles, alimentaires et forestières] du 31 mars 2006».

52      Dans le cadre de son recours visant à l’annulation de cette note, Pioneer conteste l’exigence d’une autorisation nationale aux fins de la mise en culture de produits tels que des OGM admis au catalogue commun.

53      Elle conteste, par ailleurs, l’interprétation de l’article 26 bis de la directive 2001/18 selon laquelle la culture d’OGM en Italie ne serait pas autorisée jusqu’à l’adoption des instruments normatifs régionaux destinés à la mise en œuvre de mesures assurant la coexistence des cultures génétiquement modifiées, conventionnelles et biologiques.

54      Dans ce contexte, le Consiglio di Stato a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Lorsque l’État membre a estimé devoir subordonner la délivrance de l’autorisation de culture d’OGM, même s’ils sont inscrits au [catalogue commun], à des mesures d’ordre général propres à assurer la coexistence avec des cultures conventionnelles ou biologiques, l’article 26 bis de la [directive 2001/18], lu à la lumière de la [recommandation du 23 juillet 2003] et de la [recommandation du 13 juillet 2010], doit-il être interprété en ce sens que, au cours de la période précédant l’adoption des mesures générales:

a)      l’autorisation doit être délivrée, en ce qu’elle a pour objet des OGM inscrits au [catalogue commun]; ou,

b)      l’examen de la demande d’autorisation doit-il être suspendu en attendant l’adoption des mesures d’ordre général; ou,

c)      l’autorisation doit-elle être délivrée, en étant assortie des prescriptions propres à éviter dans le cas concret le contact, même accidentel, des cultures génétiquement modifiées qui sont autorisées avec les cultures conventionnelles ou biologiques environnantes?»

 Sur la question préjudicielle

 Observations liminaires

55      Afin de déterminer la portée de la question préjudicielle, il convient, à titre liminaire, de délimiter le contexte juridique du litige au principal.

56      Il y a lieu, d’abord, de constater que les variétés du maïs MON 810 n’ont pas fait l’objet d’une notification de renouvellement de leur autorisation, avant le 17 octobre 2006, sur le fondement de l’article 17, paragraphe 2, de la directive 2001/18.

57      Il doit, ensuite, être constaté que l’utilisation et la commercialisation de semences des variétés du maïs MON 810 sont autorisées à un double titre.

58      Elles sont autorisées en tant que les variétés en cause constituent des «produits existants» au sens de l’article 20 du règlement no 1829/2003, dès lors que, conformément aux paragraphes 1, sous a), et 4 de cet article, elles ont été notifiées comme tels à la Commission le 11 juillet 2004, soit antérieurement au 18 octobre 2004, et qu’elles ont fait l’objet d’une demande de renouvellement de leur autorisation le 4 mai 2007, soit dans le délai de neuf ans prévu à cet effet, qui avait commencé à courir le 5 mai 1998, date de la publication au Journal officiel de la décision 98/294, et expirait le 5 mai 2007, conformément à l’article 11, paragraphe 2, du règlement no 641/2004.

59      L’utilisation et la commercialisation de semences des variétés du maïs MON 810 sont également autorisées en tant que ces variétés ont été admises au catalogue commun régi par la directive 2002/53.

60      Il y a lieu, par ailleurs, de relever que, bien que les variétés du maïs MON 810 soient autorisées en vertu de l’article 20 du règlement no 1829/2003 et inscrites au catalogue commun en application de la directive 2002/53, l’article 26 bis de celle-ci est applicable.

61      Enfin, il sera observé que seule la recommandation du 23 juillet 2003 est pertinente ratione temporis dans le litige au principal.

62      Le contexte juridique de celui-ci étant ainsi délimité, il y a lieu de comprendre que, par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la mise en culture d’OGM tels que des variétés du maïs MON 810 peut être soumise à une procédure nationale d’autorisation, lorsque l’utilisation et la commercialisation de ces variétés sont autorisées en vertu de l’article 20 du règlement no 1829/2003 et que lesdites variétés ont été admises au catalogue commun prévu par la directive 2002/53. Elle demande, également, si l’article 26 bis de la directive 2001/18 permet à un État membre de s’opposer à la mise en culture sur son territoire de tels OGM dans l’attente de l’adoption de mesures de coexistence visant à éviter la présence accidentelle d’OGM dans d’autres cultures.

 Sur l’obligation de solliciter une autorisation nationale

63      Le règlement no 1829/2003 énonce, à son considérant 1, que la libre circulation de denrées alimentaires et d’aliments pour animaux sûrs et sains constitue un aspect essentiel du marché intérieur. Selon l’article 19, paragraphe 5, du même règlement, l’autorisation accordée conformément aux procédures prévues par celui-ci est valable dans l’ensemble de l’Union.

64      La directive 2002/53 énonce quant à elle, à son considérant 11, qu’il est nécessaire que les semences ou plants couverts par cette directive puissent être commercialisés librement dans l’Union dès leur publication dans le catalogue commun. Son article 16, paragraphe 1, prescrit en conséquence aux États membres de veiller à ce que, à compter de la publication au catalogue commun, les semences de variétés admises conformément aux dispositions de cette directive ne soient soumises à aucune restriction de commercialisation quant à la variété.

65      Il apparaît ainsi que le règlement no 1829/2003 et la directive 2002/53 visent tous deux à permettre la libre utilisation et la libre commercialisation des OGM sur l’ensemble du territoire de l’Union, dès lors qu’ils sont autorisés conformément au premier et admis au catalogue commun en application de la seconde.

66      Il apparaît par ailleurs, au regard des considérants 9, 33 et 34 du règlement no 1829/2003 ainsi que des articles 4, paragraphes 4 et 5, et 7, paragraphe 4, de la directive 2002/53, que les conditions imposées par ces deux actes, respectivement, pour une autorisation ou une inscription au catalogue commun couvrent les exigences de la protection de la santé et de l’environnement.

67      S’agissant des produits existants dont l’utilisation et la commercialisation sont autorisées en vertu de l’article 20 du règlement no 1829/2003, le législateur de l’Union a considéré en substance que ces exigences étaient satisfaites provisoirement, lors de la notification de ces produits, du fait de l’évaluation opérée au stade d’une autorisation accordée antérieurement en application de la directive 90/220 ou de la directive 2001/18.

68      Il a, par ailleurs, au moyen du renvoi effectué par l’article 20, paragraphe 4, du règlement no 1829/2003 à l’article 23 et, par l’intermédiaire de celui-ci, aux articles 18 et 19 du même règlement, assimilé les produits existants à des produits autorisés initialement sur le fondement du règlement no 1829/2003 en ce qui concerne l’évaluation des risques pour la santé et l’environnement au stade des demandes de renouvellement des autorisations.

69      Il résulte de ces constatations que, en l’état actuel du droit de l’Union, un État membre n’est pas en droit de subordonner à une autorisation nationale, fondée sur des considérations de protection de la santé ou de l’environnement, la mise en culture d’OGM autorisés en vertu du règlement no 1829/2003 et inscrits au catalogue commun en application de la directive 2002/53.

70      En revanche, une interdiction ou une restriction à la mise en culture de tels produits peut être arrêtée par un État membre dans les cas expressément prévus par le droit de l’Union.

71      Au rang de ces exceptions figurent, d’une part, les mesures prises en application de l’article 34 du règlement no 1829/2003 ainsi que celles adoptées en application des articles 16, paragraphe 2, ou 18 de la directive 2002/53, dispositions qui ne sont pas en cause dans le litige au principal, et, d’autre part, les mesures de coexistence arrêtées au titre de l’article 26 bis de la directive 2001/18.

 Sur l’interdiction de mise en culture d’OGM dans l’attente de l’adoption de mesures de coexistence

72      Il convient de constater d’emblée que, ainsi que le soulignent le gouvernement espagnol et la Commission, l’article 26 bis de la directive 2001/18 ne prévoit qu’une faculté pour les États membres d’introduire des mesures de coexistence.

73      Dès lors, dans l’hypothèse où un État membre s’abstiendrait de toute action en ce domaine, une interdiction de mise en culture d’OGM pourrait se prolonger indéfiniment dans le temps et constituer un moyen de contournement des procédures prévues aux articles 34 du règlement no 1829/2003 ainsi que 16, paragraphe 2, et 18 de la directive 2002/53.

74      Une interprétation de l’article 26 bis de la directive 2001/18 qui permettrait aux États membres d’édicter pareille interdiction serait donc contraire au système mis en place par le règlement no 1829/2003 et la directive 2002/53, système qui consiste à assurer la libre circulation immédiate des produits autorisés au niveau communautaire et admis au catalogue commun, après que les exigences de la protection de la santé et de l’environnement ont été prises en considération au cours des procédures d’autorisation et d’admission.

75      En définitive, l’article 26 bis de la directive 2001/18 ne peut donner lieu à des restrictions, voire à des interdictions géographiquement délimitées, que par l’effet de mesures de coexistence effectivement adoptées dans le respect de la finalité de celles-ci. Dès lors, cette disposition ne permet pas aux États membres d’arrêter une mesure telle que celle en cause au principal qui, dans l’attente de l’adoption de mesures de coexistence, interdit de manière générale la mise en culture d’OGM autorisés en vertu de la réglementation de l’Union et inscrits au catalogue commun.

76      Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée que:

–        la mise en culture d’OGM tels que des variétés du maïs MON 810 ne peut pas être soumise à une procédure nationale d’autorisation, lorsque l’utilisation et la commercialisation de ces variétés sont autorisées en vertu de l’article 20 du règlement no 1829/2003 et que lesdites variétés ont été admises au catalogue commun prévu par la directive 2002/53;

–        l’article 26 bis de la directive 2001/18 ne permet pas à un État membre de s’opposer de manière générale à la mise en culture sur son territoire de tels OGM dans l’attente de l’adoption de mesures de coexistence visant à éviter la présence accidentelle d’OGM dans d’autres cultures.

 Sur les dépens

77      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit:

La mise en culture d’organismes génétiquement modifiés tels que des variétés du maïs MON 810 ne peut pas être soumise à une procédure nationale d’autorisation, lorsque l’utilisation et la commercialisation de ces variétés sont autorisées en vertu de l’article 20 du règlement (CE) no 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil, du 22 septembre 2003, concernant les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés, et que lesdites variétés ont été admises au catalogue commun des variétés des espèces de plantes agricoles prévu par la directive 2002/53/CE du Conseil, du 13 juin 2002, concernant le catalogue commun des variétés des espèces de plantes agricoles, telle que modifiée par le règlement no 1829/2003.

L’article 26 bis de la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 mars 2001, relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil, telle que modifiée par la directive 2008/27/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 2008, ne permet pas à un État membre de s’opposer de manière générale à la mise en culture sur son territoire de tels organismes génétiquement modifiés dans l’attente de l’adoption de mesures de coexistence visant à éviter la présence accidentelle d’organismes génétiquement modifiés dans d’autres cultures.

Signatures


* Langue de procédure: l’italien.