Language of document : ECLI:EU:C:2014:211

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

3 avril 2014 (*)

«Directive 2005/29/CE – Pratiques commerciales déloyales – Système de promotion pyramidale – Pertinence de la participation éventuelle des consommateurs versée afin de recevoir une contrepartie – Interprétation de la notion de ‘participation’»

Dans l’affaire C‑515/12,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Lietuvos vyriausiasis administracinis teismas (Cour administrative suprême de Lituanie), par décision du 29 octobre 2012, parvenue à la Cour le 14 novembre 2012, dans la procédure

«4finance» UAB

contre

Valstybinė vartotojų teisių apsaugos tarnyba,

Valstybinė mokesčių inspekcija prie Lietuvos Respublikos finansų ministerijos,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, président de chambre, MM.J. L. da Cruz Vilaça, G. Arestis, J.‑C. Bonichot (rapporteur) et A. Arabadjiev, juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

–        pour «4finance» UAB, par M. G. Velička, directeur général,

–        pour le gouvernement lituanien, par Mme R. Janeckaitė, en qualité d’agent,

–        pour le gouvernement tchèque, par M. M. Smolek et Mme S. Šindelková, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. P. Gentili, avvocato dello Stato,

–        pour le gouvernement polonais, par MM. B. Majczyna et M. Szpunar, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par Mme A. Steiblytė et M. M. van Beek, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 19 décembre 2013,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil («directive sur les pratiques commerciales déloyales») (JO L 149, p. 22).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant «4finance» UAB (ci-après «4finance») à la Valstybinė vartotojų teisių apsaugos tarnyba (Office national de protection des droits des consommateurs) et à la Valstybinė mokesčių inspekcija prie Lietuvos Respublikos Finansų ministerijos (Inspection nationale des impôts rattachée au ministère des Finances) à propos d’une amende qui a été infligée à cette société pour violation de la loi lituanienne prohibant les pratiques commerciales déloyales vis-à-vis des consommateurs.

 Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3        Les considérants 8, 9, 11 et 17 de la directive 2005/29 énoncent:

(8)      La présente directive protège expressément les intérêts économiques des consommateurs contre les pratiques commerciales déloyales des entreprises à leur égard. [...]

(9)      La présente directive s’applique sans préjudice des recours individuels formés par les personnes lésées par une pratique commerciale déloyale. [...] Eu égard à leur complexité et aux graves risques qui leur sont propres, les services financiers et les biens immobiliers doivent faire l’objet de prescriptions détaillées, y compris l’instauration d’obligations positives à respecter par les professionnels. C’est la raison pour laquelle, s’agissant des services financiers et des biens immobiliers, la présente directive s’applique sans préjudice de la faculté pour les États membres d’adopter des mesures qui aillent au-delà des dispositions de la présente directive, pour protéger les intérêts économiques des consommateurs. [...]

[...]

(11)      Le niveau élevé de convergence résultant du rapprochement des dispositions nationales assuré par la présente directive crée un niveau commun élevé de protection des consommateurs. La présente directive établit une interdiction générale unique des pratiques commerciales déloyales qui altèrent le comportement économique des consommateurs. Elle établit également des règles sur les pratiques commerciales agressives, qui ne sont pas actuellement réglementées au niveau communautaire.

[...]

(17)      Afin d’apporter une plus grande sécurité juridique, il est souhaitable d’identifier les pratiques commerciales qui sont, en toutes circonstances, déloyales. L’annexe I contient donc la liste complète de toutes ces pratiques. Il s’agit des seules pratiques commerciales qui peuvent être considérées comme déloyales sans une évaluation au cas par cas au titre des dispositions des articles 5 à 9. Cette liste ne peut être modifiée que par une révision de la directive.»

4        L’article 1er de la directive 2005/29 dispose:

«L’objectif de la présente directive est de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur et d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs en rapprochant les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux pratiques commerciales déloyales qui portent atteinte aux intérêts économiques des consommateurs.»

5        L’article 2, sous d), de ladite directive prévoit:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

[...]

d)      ‘pratiques commerciales des entreprises vis-à-vis des consommateurs’ (ci‑après également dénommées ‘pratiques commerciales’): toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d’un professionnel, en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d’un produit aux consommateurs;

[...]»

6        L’article 3, paragraphe 1, de la même directive est libellé comme suit:

«La présente directive s’applique aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs, telles que définies à l’article 5, avant, pendant et après une transaction commerciale portant sur un produit.»

7        L’article 5 de la directive 2005/29 est rédigé en ces termes:

«1.      Les pratiques commerciales déloyales sont interdites.

2.      Une pratique commerciale est déloyale si:

a)      elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle,

et

b)      elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique, par rapport au produit, du consommateur moyen qu’elle touche ou auquel elle s’adresse, ou du membre moyen du groupe lorsqu’une pratique commerciale est ciblée vers un groupe particulier de consommateurs.

[...]

4.      En particulier, sont déloyales les pratiques commerciales qui sont:

a)      trompeuses au sens des articles 6 et 7,

ou

b)      agressives au sens des articles 8 et 9.

5.      L’annexe I contient la liste des pratiques commerciales réputées déloyales en toutes circonstances. Cette liste unique s’applique dans tous les États membres et ne peut être modifiée qu’au travers d’une révision de la présente directive.»

8        L’annexe I de la directive 2005/29, intitulée «Pratiques commerciales réputées déloyales en toutes circonstances», dispose à son point 14:

«Créer, exploiter ou promouvoir un système de promotion pyramidale dans lequel un consommateur verse une participation en échange de la possibilité de percevoir une contrepartie provenant essentiellement de l’entrée d’autres consommateurs dans le système plutôt que de la vente ou de la consommation de produits.»

Le droit lituanien

9        L’article 7, point 22, de la loi relative aux pratiques commerciales déloyales, dans sa version applicable aux faits en cause au principal, dispose:

«Il est présumé qu’une pratique commerciale est trompeuse si elle se manifeste sous la forme de création du système pyramidal de distribution de biens offrant aux consommateurs la possibilité de percevoir une contrepartie essentiellement pour avoir fait entrer d’autres consommateurs dans le système plutôt que pour la vente ou la consommation de produits, ainsi que sous la forme de l’exploitation ou de la promotion de ce système.»

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

10      La requérante au principal, 4finance, est une société qui octroie, par correspondance, des crédits d’un faible montant dans un bref délai. Elle a été condamnée par décision du 28 juillet 2011 de la Valstybinė vartotojų teisių apsaugos tarnyba au paiement d’une amende d’un montant de 8 000 litas lituaniens (LTL) pour avoir enfreint l’article 7, point 22, de la loi relative aux pratiques commerciales déloyales. Il ressort de cette décision que 4finance a mené, entre le 26 octobre 2010 et le 15 février 2011, une campagne publicitaire par laquelle elle aurait mis en œuvre «un système pyramidal de distribution de biens offrant aux consommateurs la possibilité de percevoir une contrepartie essentiellement pour avoir fait entrer d’autres consommateurs dans le système plutôt que pour la vente ou la consommation de produits».

11      Ladite décision a été confirmée par un jugement du 25 octobre 2011 du Vilniaus apygardos administracinis teismas (tribunal administratif régional de Vilnius), puis 4finance a interjeté appel de ce jugement devant le Lietuvos vyriausiasis administracinis teismas (Cour administrative suprême de Lituanie).

12      S’agissant des faits reprochés à 4finance, la juridiction de renvoi expose que cette société offrait à tout nouveau client une prime de 20 LTL pour l’enregistrement de chaque autre client recruté par ses soins. Afin de devenir client de 4finance, le nouveau client était tenu, lors de l’enregistrement sur le site Internet de cette dernière, de payer des frais d’enregistrement d’un montant de 0,01 LTL.

13      C’est dans ce contexte que la juridiction de renvoi s’interroge, en premier lieu, sur l’interprétation de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29 ainsi que sur la conformité avec cette disposition de l’article 7, point 22, de la loi relative aux pratiques commerciales déloyales. Elle relève, à cet égard, que cette disposition du droit lituanien, tout en étant fidèle aux versions en langues allemande et lituanienne de cette directive, ne correspond pas à d’autres versions linguistiques de celle-ci, telles que les versions en langues espagnole, française et polonaise. En effet, ces dernières contiennent, audit point 14, les termes selon lesquels le «consommateur verse une participation en échange de la possibilité de percevoir une contrepartie provenant essentiellement de l’entrée d’autres consommateurs». Or, les versions en langues allemande et lituanienne de la même disposition ne prévoient pas ce critère du versement d’une participation par le consommateur.

14      En second lieu, dans le cas où la Cour estimerait que la participation versée par un consommateur constitue un élément indispensable pour qu’un système de promotion puisse être considéré comme un système de promotion pyramidale au sens de la directive 2005/29, la juridiction de renvoi interroge la Cour sur l’interprétation de la notion de «participation». Elle considère qu’il importe de savoir, d’une part, si toute somme versée, aussi faible soit-elle, peut être considérée comme une participation et, d’autre part, si le versement d’une somme symbolique, telle que celle en cause au principal, suffit pour que le système puisse être interdit. Elle relève à cet égard que la somme de 0,01 LTL versée sur les comptes de 4finance par un nouveau client constituerait le plus faible montant techniquement transférable, que le virement ne serait destiné qu’à l’identification exacte de ce client afin de permettre la conclusion d’un contrat de crédit et que les contributions ainsi versées n’ont financé que dans une très faible mesure les primes payées au moyen du mécanisme promotionnel.

15      C’est à la lumière de ces considérations que le Lietuvos vyriausiasis administracinis teismas a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

1)      Convient-il d’interpréter le point 14 de l’annexe I de la directive 2005/29 [...] en ce sens que le fait de créer, d’exploiter ou de promouvoir un système de promotion pyramidale est considéré comme une pratique commerciale en toutes circonstances trompeuse uniquement lorsque le consommateur est tenu de verser une participation pour percevoir une contrepartie essentiellement pour avoir fait entrer d’autres consommateurs dans le système plutôt que pour la vente ou la consommation de produits?

2)      S’il est nécessaire que le consommateur verse une participation en échange du droit de percevoir une contrepartie, le montant de la participation versée par le consommateur en échange de la possibilité de percevoir une contrepartie essentiellement pour avoir fait entrer d’autres consommateurs dans le système plutôt que pour la vente ou la consommation de produits a‑t‑il une incidence sur la qualification du système de promotion pyramidale de pratique commerciale trompeuse au sens du point 14 de l’annexe I de la directive [2005/29]? Des participations versées par des consommateurs qui sont d’un montant purement symbolique et payées afin de permettre l’identification des consommateurs peuvent-elles être considérées comme une participation en échange de la possibilité de percevoir une contrepartie au sens du point 14 de l’annexe I de la directive?

3)      Convient-il d’interpréter le point 14 de l’annexe I de la directive [2005/29] en ce sens que seul importe, pour qu’un système de promotion pyramidale soit considéré comme une pratique commerciale trompeuse, que la contrepartie soit payée au consommateur déjà enregistré essentiellement pour le fait qu’il a fait entrer d’autres consommateurs dans le système plutôt que pour la vente ou la consommation de produits ou la mesure dans laquelle la contrepartie versée aux participants de ce système pour avoir fait entrer de nouveaux consommateurs est financée par les contributions des nouveaux membres revêt-elle également de l’importance? En l’occurrence, la contrepartie payée aux participants au système de promotion pyramidale déjà enregistrés doit-elle être, entièrement ou en majeure partie, financée par les contributions des membres nouvellement entrés dans ce système?»

 Sur les questions préjudicielles

16      Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi interroge la Cour sur les conditions auxquelles un système de promotion commerciale peut être considéré comme un «système de promotion pyramidale» au sens de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29 et, dès lors, être interdit en toutes circonstances.

17      Il ressort de la demande de décision préjudicielle que l’article 7, point 22, de la loi relative aux pratiques commerciales déloyales constitue une transposition fidèle des versions en langues allemande et lituanienne de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29. Cependant, selon la juridiction de renvoi, cette dernière disposition énonce, dans plusieurs de ses autres versions linguistiques, une condition supplémentaire pour qu’un système de promotion pyramidale soit interdit, selon laquelle «le consommateur verse une participation» afin de pouvoir bénéficier du système. Cette juridiction demande à la Cour si le même point 14 exige que le consommateur soit tenu de verser une telle participation. En cas de réponse affirmative, elle cherche à savoir si toute somme, indépendamment de son montant, doit être qualifiée de participation au sens dudit point 14.

18      Enfin, la juridiction de renvoi demande à la Cour si la qualification de système de promotion pyramidale nécessite qu’il soit établi que la contrepartie qu’un consommateur peut recevoir est financée, en partie ou majoritairement, par les participations versées ultérieurement par d’autres consommateurs.

19      Il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, la nécessité d’une application et d’une interprétation uniformes d’un acte du droit de l’Union exclut que celui‑ci soit considéré isolément dans l’une de ses versions linguistiques, mais exige qu’il soit interprété en fonction tant de la volonté réelle de son auteur que du but poursuivi par ce dernier, à la lumière, notamment, des versions établies dans toutes les langues (voir arrêt Internetportal und Marketing, C‑569/08, EU:C:2010:311, point 35 et jurisprudence citée).

20      À cet égard, il y a lieu de relever que l’interdiction des systèmes de promotion pyramidale repose, dans toutes les versions linguistiques de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29, sur trois conditions communes. Tout d’abord, une telle promotion est fondée sur la promesse que le consommateur aura la possibilité de réaliser un bénéfice économique. Ensuite, la réalisation de cette promesse dépend de l’entrée d’autres consommateurs dans le système. Enfin, la majorité des revenus permettant de financer la contrepartie promise aux consommateurs ne résulte pas d’une activité économique réelle.

21      Il est, en effet, constant que, à défaut d’une activité économique réelle permettant d’engendrer suffisamment de revenus afin de financer la contrepartie promise aux consommateurs, un tel système de promotion repose nécessairement sur la contribution économique de ses participants, puisque la possibilité pour un adhérent à ce système d’obtenir une contrepartie dépend essentiellement des frais acquittés par des adhérents supplémentaires.

22      Un tel système ne peut qu’être «pyramidal» en ce sens que sa pérennisation nécessite l’adhésion d’un nombre toujours plus grand de nouveaux participants pour financer les contreparties versées aux membres en place. Il implique également que les adhérents les plus récents sont moins susceptibles de recevoir une contrepartie pour leur participation. Ce système cesse d’être viable lorsque la croissance du nombre d’adhérents, qui devrait théoriquement tendre vers l’infini pour que le système perdure, ne suffit plus à financer les contreparties promises à tous les participants.

23      Il résulte de ce qui précède que la qualification de «système de promotion pyramidale» au sens de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29 exige, en premier lieu, que les adhérents à un tel système versent une participation financière.

24      Cette interprétation est corroborée par la finalité de la directive 2005/29, qui, conformément à son considérant 8, «protège expressément les intérêts économiques des consommateurs contre les pratiques commerciales déloyales des entreprises à leur égard» et qui, selon son article 1er, assure «un niveau élevé de protection des consommateurs en rapprochant les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux pratiques commerciales déloyales qui portent atteinte aux intérêts économiques des consommateurs» (arrêt Köck, C‑206/11, EU:C:2013:14, point 29 et jurisprudence citée). Ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 32 de ses conclusions, sans participation financière du consommateur, il serait difficile d’identifier le comportement économique nécessitant la protection de ce dernier au titre de cette directive.

25      En outre, le libellé de la plupart des versions linguistiques de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29 confirme que la participation du consommateur est un élément constitutif d’un système de promotion pyramidale au sens de cette disposition.

26      Quant à la question de savoir si toute somme versée par un adhérent à un système de promotion doit être regardée, indépendamment de son montant, comme une participation au sens de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29, il y a lieu de relever que cette disposition ne prévoit aucun montant minimal dans les versions linguistiques mentionnant l’existence d’une participation financière du consommateur (voir, par analogie, arrêt Purely Creative e.a., C‑428/11, EU:C:2012:651, point 30). En outre, l’objectif d’apporter une plus grande sécurité juridique dans l’identification des pratiques commerciales déloyales, visé au considérant 17 de la même directive, ne serait pas assuré si les États membres pouvaient décider quels sont les montants susceptibles d’être considérés comme une participation financière. Partant, la notion de participation du consommateur inclut toute contribution financière de sa part, quel que soit son montant.

27      En second lieu, il résulte nécessairement des points 20 à 22 du présent arrêt que la qualification de «système de promotion pyramidale» au sens de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29 nécessite l’existence d’un lien entre les participations versées par de nouveaux adhérents et les contreparties perçues par les adhérents en place.

28      Cette interprétation est confirmée par le libellé de la plupart des versions linguistiques de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29, dont il ressort que le financement de la contrepartie qu’un consommateur peut percevoir dépend «essentiellement» ou «principalement» des participations versées ultérieurement par de nouveaux participants au système.

29      Contrairement à ce que soutient le gouvernement lituanien, une telle interprétation de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29 ne compromet nullement l’objectif d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs.

30      À cet égard, il y a lieu de relever que les pratiques interdites en vertu de l’article 5 de ladite directive sont divisées en deux catégories.

31      D’une part, l’annexe I de la directive 2005/29 comprend les pratiques commerciales qui sont, en toutes circonstances, déloyales et qui, dès lors, ne nécessitent pas une évaluation au cas par cas au titre des dispositions des articles 5 à 9 de cette directive. D’autre part, les pratiques qui ne figurent pas dans cette annexe peuvent être déclarées déloyales à la suite d’un examen au cas par cas de leurs caractéristiques au regard des critères énoncés auxdits articles 5 à 9 (arrêts Purely Creative e.a., EU:C:2012:651, point 45, ainsi que Köck, EU:C:2013:14, point 35).

32      Il en résulte que seules les pratiques commerciales les plus préjudiciables aux consommateurs font l’objet d’une interdiction absolue, mais qu’une pratique ne relevant pas de l’annexe I de la directive 2005/29 peut néanmoins être interdite lorsqu’une évaluation spécifique et concrète permet de conclure à son caractère déloyal au sens des articles 5 à 9 de la même directive.

33      En l’espèce, il ressort de la demande de décision préjudicielle que, dans le cadre du système de promotion établi par 4finance, les primes versées aux adhérents en place n’ont été financées que pour une très faible part par les participations financières demandées aux nouveaux adhérents. Dans un tel système, il semble donc que la seconde condition énoncée au point 27 du présent arrêt ne soit pas remplie. Si tel est le cas, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, ce système ne pourrait pas, dès lors, faire l’objet d’une interdiction sur le fondement de l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29.

34      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées que l’annexe I, point 14, de la directive 2005/29 doit être interprétée en ce sens qu’un système de promotion pyramidale ne constitue une pratique commerciale déloyale en toutes circonstances que lorsqu’un tel système exige du consommateur une participation financière, quel que soit son montant, en échange de la possibilité pour ce dernier de percevoir une contrepartie provenant essentiellement de l’entrée d’autres consommateurs dans le système plutôt que de la vente ou de la consommation de produits.

 Sur les dépens

35      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit:

L’annexe I, point 14, de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil («directive sur les pratiques commerciales déloyales»), doit être interprétée en ce sens qu’un système de promotion pyramidale ne constitue une pratique commerciale déloyale en toutes circonstances que lorsqu’un tel système exige du consommateur une participation financière, quel que soit son montant, en échange de la possibilité pour ce dernier de percevoir une contrepartie provenant essentiellement de l’entrée d’autres consommateurs dans le système plutôt que de la vente ou de la consommation de produits.

Signatures


* Langue de procédure: le lituanien.