Language of document : ECLI:EU:C:2020:428

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 4 juin 2020 (1)

Affaire C591/16 P

H. Lundbeck A/S et

Lundbeck Ltd

contre

Commission européenne

« Pourvoi – Concurrence – Ententes (articles 101 TFUE et 53 de l’accord sur l’Espace économique européen) – Médicaments antidépresseurs – Accords de règlement amiable de litiges en matière de brevets conclus entre un laboratoire de princeps titulaire de brevets et des fabricants de médicaments génériques – Notion de concurrence potentielle – Notion de restriction de concurrence par objet – Amendes – Prévisibilité du caractère anticoncurrentiel d’un comportement – Ventes à prendre en compte aux fins du calcul du montant de l’amende »






Table des matières


I. Introduction

II. Antécédents du litige

A. Faits et procédure administrative

1. Produit et brevets en cause

2. Accords conclus entre Lundbeck et des fabricants de génériques

3. Décision de la Commission

B. Procédure devant le Tribunal

III. Procédure devant la Cour et conclusions des parties

IV. Appréciation

A. Sur l’existence d’une infraction à l’article 101 TFUE (premier à quatrième moyens du pourvoi)

1. Sur l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques (quatrième moyen du pourvoi)

a) Sur la prétendue existence de barrières légales à l’entrée du marché du citalopram, constituées par les brevets de Lundbeck

b) Sur les prétendues erreurs commises par le Tribunal lors de l’appréciation des preuves avancées par la Commission afin de démontrer l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques

c) Sur les arguments des requérantes cherchant à démontrer la prétendue absence d’un rapport de concurrence potentielle entre Lundbeck et chacun des fabricants de génériques concernés

2. Sur la qualification des accords entre Lundbeck et les fabricants de génériques de restrictions de la concurrence par objet (premier à troisième moyens du pourvoi)

a) Sur la qualification de restrictions de la concurrence par objet d’accords qui ne dépassent pas la portée d’un brevet (premier moyen du pourvoi)

1) Sur l’asymétrie des risques entre Lundbeck et les fabricants de génériques

2) Sur le « scénario contrefactuel »

3) Sur l’absence de clauses de non-contestation dans les accords litigieux

4) Sur la prétendue nouveauté de la sanction de règlements amiables de litiges de brevet

5) Conclusion

b) Sur la prétendue erreur constituée par la conclusion du Tribunal selon laquelle cinq des six accords dépassaient la portée des brevets de Lundbeck (deuxième moyen du pourvoi)

c) Sur la prétendue erreur consistant à qualifier certains des accords litigieux de restrictions de la concurrence par objet, à supposer même qu’ils aient dépassé la portée des brevets litigieux (troisième moyen du pourvoi)

B. Sur les amendes (cinquième et sixième moyens du pourvoi)

1. Sur la confirmation des amendes par le Tribunal (cinquième moyen du pourvoi)

a) Sur le « niveau de culpabilité » requis pour l’infliction d’une amende

b) Sur le point de savoir si Lundbeck ne pouvait pas ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement

c) Sur les principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité

2. Sur la confirmation du calcul du montant des amendes par le Tribunal (sixième moyen du pourvoi)

a) Sur les ventes de Lundbeck prises en considération aux fins du calcul du montant des amendes

b) Sur le taux de gravité retenu aux fins du calcul du montant des amendes

C. Conclusion

V. Dépens

VI. Conclusion


I.      Introduction

1.        Entre la concurrence et les droits de propriété intellectuelle, un certain degré de tension est souvent inévitable puisque, afin de créer une incitation à la recherche et au développement, ces droits attribuent certains privilèges exclusifs aux inventeurs. C’est également le principe du droit des brevets. Toutefois, afin de promouvoir le progrès technique et le développement économique en général, les inventions doivent, après un certain temps, à l’expiration des droits de brevet, tomber dans le domaine public pour que tout un chacun puisse en faire usage.

2.        Ce dernier aspect revêt une importance particulière dans le domaine des médicaments, où la promotion de la recherche par les laboratoires de princeps doit être conciliée avec l’intérêt général à la mise sur le marché de médicaments génériques, qui soulagent financièrement les caisses de maladie et aident à prévenir des essais superflus sur les humains et les animaux (2).

3.        Si, pendant la durée de validité d’un brevet, le titulaire jouit certes du droit exclusif d’utiliser son invention en vue de la fabrication et de la première mise en circulation de produits ainsi que du droit de s’opposer à toute contrefaçon (3), un brevet ne protège pas contre les actions visant à en contester la validité (4). Partant, des litiges de brevet entre concurrents font partie du jeu normal de la concurrence dans les secteurs dans lesquels existent de tels droits d’exclusivité (5), et le fait de résoudre ou de prévenir de tels litiges au moyen d’accords de règlement amiable correspond à une pratique répandue.

4.        Ainsi que le reconnaît la Commission européenne elle-même dans sa décision litigieuse dans la présente procédure (6), de tels règlements amiables de litiges de brevet ne sont aucunement illégitimes en soi et peuvent même être dans l’intérêt public en tant que moyen d’économiser des ressources et d’encourager le développement économique. Toutefois, des règlements amiables de litiges de brevet deviennent problématiques lorsqu’ils entrent en conflit avec les règles du droit de la concurrence puisqu’ils visent en réalité non pas à résoudre un conflit de brevet, mais à éviter ou à retarder l’entrée sur le marché de concurrents potentiels.

5.        Or, de l’avis de la Commission, confirmé par le Tribunal dans l’arrêt attaqué par le présent pourvoi (7), cela était précisément le cas de six accords portant sur le médicament antidépresseur citalopram, conclus par le laboratoire de princeps Lundbeck avec plusieurs fabricants de médicaments génériques. Dans le cadre de son pourvoi, Lundbeck soutient au contraire que cette analyse repose sur une série d’erreurs de droit et que les accords en cause n’étaient pas susceptibles de se voir sanctionnés au titre du droit de la concurrence.

6.        La présente affaire s’inscrit ainsi dans le contexte de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (8), dans lequel la Cour a dégagé les critères pour qu’un accord de règlement amiable d’un litige opposant le titulaire d’un brevet pharmaceutique à un fabricant de médicaments génériques soit contraire au droit de la concurrence de l’Union, et des affaires dites « Servier », actuellement pendantes devant la Cour, dans lesquelles la Commission a constaté que des accords de règlement amiable de litiges de brevets constituaient des infractions au droit de la concurrence de l’Union (9).

II.    Antécédents du litige

A.      Faits et procédure administrative

7.        H. Lundbeck A/S est une société de droit danois qui contrôle un groupe de sociétés, dont Lundbeck Ltd, implantée au Royaume-Uni (ci-après, prises ensemble, « Lundbeck » ou les « requérantes »), spécialisé dans le développement et la distribution de produits pharmaceutiques pour le traitement de pathologies affectant le système nerveux central, dont la dépression (10).

1.      Produit et brevets en cause

8.        Les produits de Lundbeck comprennent un antidépresseur contenant l’ingrédient pharmaceutique actif (IPA) citalopram. Lundbeck a d’abord obtenu des brevets pour cet IPA lui-même ainsi que pour les procédés de fabrication d’alkylation et de cyanation. En ce qui concerne l’Espace économique européen (EEE), la protection découlant de ces brevets originaires ainsi que, le cas échéant, des certificats complémentaires de protection (11), a expiré entre 1994 (pour l’Allemagne) et 2003 (pour l’Autriche). En particulier, s’agissant du Royaume-Uni, les brevets originaires ont expiré en janvier 2002 (12).

9.        Au fil du temps, Lundbeck a développé d’autres procédés plus efficaces pour produire du citalopram, pour lesquels elle a demandé, et souvent obtenu, des brevets dans plusieurs pays de l’EEE ainsi que par le biais du Traité de coopération en matière de brevets de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) et auprès de l’Office européen des brevets (OEB). En particulier, Lundbeck a obtenu, entre 2001 et 2003, des brevets pour la fabrication de citalopram par des procédés utilisant respectivement de l’amide et de l’iode, ainsi que pour la fabrication de citalopram par cristallisation et par distillation en film (ci‑après les « brevets litigieux ») (13).

10.      Enfin, Lundbeck envisageait de lancer un nouveau médicament antidépresseur, le Cipralex, fondé sur l’IPA dénommé escitalopram (ou S‑citalopram), pour la fin de l’année 2002 ou le début de l’année 2003. Ce nouveau médicament visait les mêmes patients que ceux susceptibles d’être soignés par le médicament breveté Cipramil de Lundbeck, fondé sur l’IPA citalopram. L’IPA escitalopram était protégé par des brevets valables jusqu’en 2012, à tout le moins (14).

2.      Accords conclus entre Lundbeck et des fabricants de génériques

11.      Au cours de l’année 2002, Lundbeck a conclu six accords concernant le citalopram (ci-après les « accords litigieux ») avec quatre entreprises actives dans la production ou la vente de médicaments génériques (ci‑après les « fabricants de génériques »).

12.      Premièrement, Lundbeck a conclu avec l’entreprise anglaise Generics UK Ltd, qui était contrôlée par Merck KGaA à travers Merck Generics Holding GmbH [ci-après, prises ensemble, « Merck (GUK) »], d’une part, un premier accord couvrant le territoire du Royaume-Uni, qui a pris effet le 24 janvier 2002 et fin le 1er novembre 2003. Cet accord prévoyait, en substance, que Merck (GUK) allait livrer son stock de citalopram générique à Lundbeck et que Lundbeck allait vendre du citalopram à Merck (GUK) aux fins de sa revente au Royaume-Uni et effectuer des transferts de valeur importants à Merck (GUK). Au total, pendant toute la durée de cet accord, Lundbeck a transféré l’équivalent de 19,4 millions d’euros à Merck (GUK) (15).

13.      D’autre part, Lundbeck a conclu avec Merck (GUK) un second accord couvrant l’EEE, qui a pris effet le 22 octobre 2002 et fin le 22 octobre 2003. Aux termes de ce dernier accord, Lundbeck devait payer à Merck (GUK) un montant de 12 millions d’euros, en échange duquel cette dernière s’engageait à ne pas vendre ou fournir de produits pharmaceutiques contenant du citalopram sur le territoire de l’EEE (à l’exception du Royaume-Uni) et à entreprendre tous les efforts raisonnables afin que Natco Pharma Ltd, le producteur de l’IPA de son citalopram, cessât de fournir du citalopram ou des produits contenant du citalopram dans l’EEE pendant la durée de l’accord (16).

14.      Deuxièmement, Lundbeck a conclu avec Arrow Generics Ltd et Resolution Chemicals Ltd, qui étaient contrôlées par Arrow Group A/S (ci-après, prises ensemble, « Arrow »), d’une part, un premier accord concernant le territoire du Royaume-Uni, qui a pris effet le 24 janvier 2002 et fin le 20 octobre 2003. Cet accord prévoyait, en substance, qu’Arrow s’engageait à ne pas fabriquer, céder ou utiliser du citalopram considéré par Lundbeck comme enfreignant les droits de propriété intellectuelle de cette dernière, en échange de transferts de valeur de la part de Lundbeck d’un montant de 6,8 millions de livres sterling (GBP), et qu’Arrow livrerait à Lundbeck son stock de citalopram (17).

15.      D’autre part, Lundbeck a conclu avec Arrow un second accord concernant le territoire du Danemark, qui a pris effet le 3 juin 2002 et fin le 1er avril 2003. Aux termes de cet accord, Arrow acceptait de cesser toute importation, fabrication, production, vente ou autre commercialisation de produits contenant du citalopram enfreignant, selon Lundbeck, les droits de propriété intellectuelle de celle-ci, en échange d’un transfert de valeur de la part de Lundbeck de 500 000 dollars des États-Unis (USD), et Lundbeck achetait au prix de 147 000 USD le stock de citalopram d’Arrow (18).

16.      Troisièmement, Lundbeck a conclu un accord avec Alpharma ApS, qui a plus tard été transformée en Xellia Pharmaceuticals ApS et qui était contrôlée par Alpharma Inc., elle-même contrôlée par A.L. Industrier AS (ci-après, prises ensemble, « Alpharma »). Cet accord a pris effet le 22 février 2002 et fin le 30 juin 2003, concernait tous les États membres de l’Union, la Norvège et la Suisse, et prévoyait, en substance, qu’Alpharma et ses filiales annulaient, arrêtaient et s’abstenaient de toute importation, production ou vente de produits pharmaceutiques contenant du citalopram en échange d’un transfert de 12 millions d’USD de la part de Lundbeck, et qu’Alpharma livrait à Lundbeck son stock de citalopram générique (19).

17.      Enfin, quatrièmement, Lundbeck a conclu un accord avec Ranbaxy Laboratories Ltd et Ranbaxy (UK) Ltd (ci-après, prises ensemble, « Ranbaxy »), qui a pris effet le 16 juin 2002 et fin le 31 décembre 2003, concernait le territoire de l’EEE et prévoyait, en substance, que Ranbaxy annulait, arrêtait et renonçait à la fabrication ou à la vente de citalopram en échange d’un paiement de 9,5 millions d’USD de la part de Lundbeck, et que Lundbeck vendait à Ranbaxy des comprimés de citalopram avec une remise de 40 % sur le prix hors usine aux fins de la vente sur le marché du Royaume-Uni (20).

3.      Décision de la Commission

18.      Dans la décision litigieuse, la Commission a considéré que les accords litigieux visaient à exclure les fabricants de génériques du marché pendant le temps convenu au moyen de paiements effectués en leur faveur par Lundbeck. Partant, la Commission a qualifié ces accords de restrictions de la concurrence par objet et a infligé des amendes à Lundbeck et aux autres parties auxdits accords.

19.      Étant donné que, en ce qui concerne Lundbeck, la Commission a considéré que les six accords avaient donné lieu à quatre infractions distinctes, elle lui a infligé quatre amendes séparées. L’amende infligée à Lundbeck A/S, d’un montant total de 93 766 000 euros, dont 5 306 000 euros solidairement avec Lundbeck Ltd, se compose donc comme suit :

–        19 893 000 euros, dont 5 306 000 euros solidairement avec Lundbeck Ltd, pour les deux accords conclus avec Merck (GUK), qui ont été considérés comme constituant une infraction unique et continue s’étendant du 24 janvier 2002 au 1er novembre 2003 ;

–        12 951 000 euros pour les deux accords conclus avec Arrow, qui ont été considérés comme constituant une infraction unique et continue s’étendant du 24 janvier 2002 au 20 octobre 2003 ;

–        31 968 000 euros pour l’accord conclu avec Alpharma, qui a été considéré comme une infraction s’étendant du 22 février 2002 au 30 juin 2003,

–        et 28 954 000 euros pour l’accord conclu avec Ranbaxy, qui a été considéré comme une infraction s’étendant du 16 juin 2002 au 31 décembre 2003 (21).

B.      Procédure devant le Tribunal

20.      Par acte du 30 août 2013, Lundbeck a introduit devant le Tribunal un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse et, à titre subsidiaire, à la suppression ou la réduction du montant des amendes qui lui avaient été infligées. Devant le Tribunal, Lundbeck a été soutenue en ses conclusions par la European Federation of Pharmaceutical Industries and Associations (EFPIA).

21.      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours dans son intégralité et a condamné Lundbeck à supporter ses propres dépens ainsi que les dépens de la Commission, alors que l’EFPIA a été condamnée à supporter ses propres dépens.

III. Procédure devant la Cour et conclusions des parties

22.      Par acte du 18 novembre 2016, Lundbeck a formé un pourvoi contre l’arrêt attaqué, toujours soutenue en ses conclusions par l’EFPIA.

23.      Parallèlement, les autres destinataires de la décision litigieuse ont également introduit des pourvois contre les arrêts du Tribunal rejetant leurs recours contre ladite décision (22), et il a été décidé que l’ensemble de ces pourvois feraient l’objet d’un traitement coordonné.

24.      Par ordonnance du Président de la Cour du 13 décembre 2016, Lundbeck/Commission (23), un traitement confidentiel a été réservé, à l’égard de l’EFPIA, à la version confidentielle de la décision litigieuse.

25.      Par acte du 10 mars 2017, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord a demandé à intervenir dans la présente procédure de pourvoi au soutien des conclusions de la Commission. Par ordonnance du Président de la Cour du 5 juillet 2017, Lundbeck/Commission (24), l’intervention du Royaume-Uni a été admise et un traitement confidentiel a été réservé, à l’égard de cet État membre, à la version confidentielle de la décision litigieuse.

26.      À la suite du dépôt de l’ensemble des écritures des différentes parties, la phase écrite de la procédure dans la présente affaire a été clôturée le 13 novembre 2017, l’ensemble de ces écritures comptant presque 300 pages hors annexes, arrêt attaqué et décision litigieuse, dépassant ainsi, en ce qui concerne notamment les écritures de Lundbeck et de la Commission, largement le volume préconisé par les Instructions pratiques aux parties, relatives aux affaires portées devant la Cour.

27.      Par décision de la Cour du 27 novembre 2018, la présente affaire a été attribuée à la quatrième chambre statuant à la suite d’une audience de plaidoiries commune avec les cinq autres pourvois introduits contre les arrêts du Tribunal rejetant les recours contre la décision litigieuse (25).

28.      Lundbeck demande à la Cour

–        d’annuler l’arrêt attaqué en tout ou en partie ;

–        d’annuler la décision litigieuse en ce qu’elle la concerne ou, subsidiairement, d’annuler les amendes qui lui ont été infligées ou, à titre plus subsidiaire encore, de réduire substantiellement le montant de ces amendes ;

–        de condamner la Commission aux dépens et autres frais exposés par Lundbeck au cours du pourvoi et de la procédure devant le Tribunal ;

–        pour autant que de besoin, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue conformément à l’arrêt de la Cour ;

–        d’adopter toute autre mesure que la Cour jugera appropriée.

29.      L’EFPIA demande à la Cour

–        d’accueillir, en tout ou en partie, le pourvoi ;

–        pour autant que de besoin, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue conformément à l’arrêt de la Cour ;

–        de condamner la Commission aux dépens exposés par l’EFPIA au cours du pourvoi et de la procédure devant le Tribunal.

30.      La Commission demande à la Cour

–        de rejeter le pourvoi dans son intégralité ; et

–        de condamner les requérantes aux dépens.

31.      Le Royaume-Uni demande à la Cour

–        de rejeter le pourvoi formé par Lundbeck dans son intégralité.

32.      Les parties ont été entendues en leurs observations et en leurs réponses aux questions de la Cour lors de l’audience commune le 24 janvier 2019.

33.      Le 30 janvier 2020, la Cour a rendu son arrêt dans l’affaire Generics (UK) e.a. (26). Le 7 février 2020, sur le fondement de l’article 62, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, nous avons donné aux parties à la présente procédure la possibilité de prendre position par écrit sur l’éventuel impact dudit arrêt sur les moyens soulevés dans la présente affaire relatifs à l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques parties aux accords litigieux ainsi qu’à la qualification de ces derniers de restrictions de la concurrence par objet. Les réponses à cette question sont parvenues à la Cour le 6 mars 2020.

IV.    Appréciation

34.      Par leurs moyens de pourvoi, les requérantes critiquent les constatations du Tribunal aussi bien quant à l’existence d’une infraction à l’article 101 TFUE (sous A) que quant au caractère approprié de l’amende infligée par la Commission (sous B).

A.      Sur l’existence d’une infraction à l’article 101 TFUE (premier à quatrième moyens du pourvoi)

35.      Concernant l’existence d’une infraction à l’article 101 TFUE, les requérantes font valoir, d’une part, par leurs premier à troisième moyens, que le Tribunal a commis une erreur de droit en entérinant le constat de la Commission selon lequel les accords litigieux constituaient des restrictions de la concurrence par objet. D’autre part, par leur quatrième moyen, les requérantes soutiennent que c’est à tort que le Tribunal a confirmé l’appréciation de la Commission selon laquelle, au moment de la conclusion des accords, Lundbeck et les fabricants de génériques se trouvaient dans un rapport de concurrence potentielle.

36.      Dans la mesure où l’article 101 TFUE est uniquement applicable dans les secteurs ouverts à la concurrence, la qualification d’un accord entre entreprises comme ayant pour objet de restreindre la concurrence présuppose l’existence d’une concurrence susceptible d’être restreinte (27). Partant, il convient de traiter ci‑après, dans un premier temps, le moyen des requérantes relatif à l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques (sous 1), avant de se tourner vers les moyens portant sur la qualification des accords litigieux de restrictions de la concurrence par objet (sous 2).

1.      Sur l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques (quatrième moyen du pourvoi)

37.      Le quatrième moyen des requérantes se compose de plusieurs branches.

38.      Tout d’abord, les requérantes font valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en méconnaissant le fait que les brevets de Lundbeck constituaient des barrières légales à l’entrée sur le marché du citalopram, qui excluaient tout rapport de concurrence entre Lundbeck et les fabricants de génériques (voir ci‑après sous a).

39.      Ensuite, les requérantes soutiennent que le Tribunal a commis des erreurs lors de l’appréciation des preuves avancées par la Commission afin de démontrer l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et ces fabricants (voir ci-après sous b).

40.      Enfin, les requérantes avancent des arguments destinés à démontrer que le Tribunal a entériné à tort les constatations de la Commission quant à l’existence d’un rapport de concurrence potentielle entre Lundbeck et chacun des fabricants de génériques concernés (voir ci-après sous c).

a)      Sur la prétendue existence de barrières légales à l’entrée du marché du citalopram, constituées par les brevets de Lundbeck

41.      Selon les requérantes et l’EFPIA, le Tribunal a commis une erreur de droit en ne reconnaissant pas que les brevets de Lundbeck constituaient, en raison de leur présomption de validité, des barrières légales empêchant l’entrée sur le marché des fabricants de génériques et, par là même, l’existence de toute concurrence potentielle entre Lundbeck et ces derniers. La possibilité d’un lancement dit « à risque » d’un générique sur le marché, susceptible d’appeler une action en contrefaçon du fabricant du médicament princeps, qui soutient que des droits de brevet couvrant encore ce dernier s’opposent à l’entrée du générique sur le marché, ne saurait à leur avis être considérée comme une possibilité réelle et concrète d’intégrer le marché. Ainsi, lorsque sont en cause des droits exclusifs, il serait requis de démontrer que les entreprises susceptibles d’être qualifiées de concurrents potentiels auraient eu la possibilité d’intégrer légalement le marché, c’est-à-dire sans enfreindre d’éventuels droits de brevet d’entreprises présentes sur celui-ci. Partant, en n’exigeant pas de la Commission la preuve que les fabricants de génériques auraient pu entrer sur le marché sans violer les brevets de Lundbeck, le Tribunal aurait méconnu les règles relatives à la charge de la preuve.

42.      La Commission objecte, à titre liminaire, que certains des brevets litigieux n’avaient pas encore été accordés mais étaient encore au stade de la demande ou de l’examen par les autorités compétentes au moment de la conclusion de certains des accords litigieux (28).

43.      Il n’y a toutefois pas lieu de se pencher plus en avant sur cette objection dans la mesure où, en tout état de cause, l’argumentation des requérantes, selon laquelle les brevets litigieux constituaient des barrières légales infranchissables à l’entrée sur le marché des fabricants de génériques, ne saurait prospérer même si ces brevets étaient déjà accordés au moment de la conclusion des accords litigieux.

44.      Ainsi, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté l’argumentation de Lundbeck à cet égard en constatant, notamment, que celle-ci reposait sur la prémisse erronée selon laquelle il ne faisait aucun doute que les brevets en cause étaient valides et contrefaits par chacun des produits génériques concurrents. Le Tribunal a ainsi indiqué que, s’il est vrai que les brevets sont présumés valides jusqu’à ce qu’ils soient expressément révoqués ou invalidés par une autorité ou juridiction compétente à cet effet, une telle présomption de validité ne saurait équivaloir à une présomption d’illégalité des produits génériques valablement mis sur le marché dont le détenteur d’un brevet estime qu’ils violent celui-ci. Une entrée à risque ne serait donc pas illégale en elle-même et il appartiendrait au contraire à Lundbeck, en cas d’entrée des génériques sur le marché, de démontrer que ceux-ci enfreignaient l’un ou l’autre de ses brevets de procédé et de se défendre contre d’éventuelles exceptions d’invalidité de ces brevets soulevées par les fabricants de génériques. Partant, le Tribunal a conclu que la Commission n’avait pas commis d’erreur en estimant que les brevets de procédé de Lundbeck ne constituaient pas des barrières insurmontables pour les fabricants de génériques (29).

45.      Or, contrairement à l’argumentation des requérantes, ces constatations ne sont entachées d’aucune erreur de droit.

46.      En effet, il est certes vrai que, afin de démontrer qu’une entreprise extérieure à un certain marché constitue un concurrent potentiel des entreprises établies sur ce marché, il doit être examiné si le marché en cause n’est pas muni de barrières à l’entrée insurmontables (30) et si les entreprises susceptibles d’être qualifiées de concurrents potentiels des entreprises qui y sont établies disposent de possibilités réelles et concrètes de concurrencer ces dernières (31).

47.      Toutefois, comme la Cour l’a récemment constaté dans son arrêt dans l’affaire Generics (UK) e.a., dans une situation comme la présente, où il s’agit d’évaluer le rapport de concurrence potentielle entre, d’une part, un fabricant de médicaments princeps titulaire d’un brevet de procédé de fabrication d’un principe actif tombé dans le domaine public et, d’autre part, des fabricants de médicaments génériques s’apprêtant à entrer sur le marché du médicament contenant ce principe actif, l’existence d’un brevet qui protège le procédé de fabrication dudit principe ne saurait, en tant que telle, être regardée comme une barrière insurmontable.

48.      Ainsi, l’existence d’un tel brevet de procédé n’empêche pas de qualifier de « concurrent potentiel » du fabricant du médicament princeps concerné un fabricant de médicaments génériques qui a effectivement la détermination ferme ainsi que la capacité propre d’entrer sur le marché et qui, par ses démarches, se montre prêt à contester la validité de ce brevet et à assumer le risque de se voir, lors de son entrée sur le marché, confronté à une action en contrefaçon introduite par le titulaire de ce brevet (32).

49.      Que l’existence d’un brevet sur un médicament ne constitue pas une barrière insurmontable à l’entrée sur le marché pour un fabricant d’un générique de ce médicament s’explique notamment par le fait que la présomption de validité des brevets n’est que la conséquence automatique du dépôt, puis de la délivrance d’un brevet à son titulaire, et ne renseigne donc nullement sur l’issue d’un éventuel litige relatif à la validité de ce brevet (33). Partant, les requérantes ont tort lorsqu’elles affirment que la possibilité de l’invalidation future d’un brevet est sans pertinence aux fins du constat d’un rapport de concurrence potentielle entre le titulaire et d’autres opérateurs économiques.

50.      Certes, ainsi que le rappellent les requérantes, il est vrai que, lorsqu’il est accordé par une autorité publique, un droit de propriété intellectuelle est normalement présumé valide et sa détention par une entreprise supposée être légitime (34). Par conséquent, les brevets sont présumés valides jusqu’à ce qu’ils soient expressément révoqués ou invalidés par une autorité ou une juridiction compétente à cet effet. Néanmoins, une telle présomption de validité ne saurait, comme le Tribunal l’a constaté à juste titre dans l’arrêt attaqué, équivaloir à une présomption d’illégalité des produits génériques valablement mis sur le marché dont le détenteur d’un brevet estime qu’ils violent celui-ci (35).

51.      L’insécurité sur la validité de brevets protégeant un médicament princeps et sur le caractère contrefaisant de génériques de ce médicament est au contraire une caractéristique fondamentale des rapports de concurrence dans le secteur pharmaceutique (36). Des différends et litiges à cet égard constituent donc un indice de l’existence d’un rapport de concurrence entre les opérateurs concernés (37).

52.      Ainsi, comme la Cour l’a précisé dans une jurisprudence rappelée à juste titre par le Tribunal dans l’arrêt attaqué (38), l’objet d’un brevet est certes d’assurer au titulaire le droit exclusif d’utiliser une invention en vue de la fabrication et de la première mise en circulation de produits, ainsi que le droit de s’opposer à toute contrefaçon (39). Toutefois, cet objet ne saurait être interprété comme garantissant une protection également contre les actions visant à contester la validité du brevet, compte tenu de ce qu’il est de l’intérêt public d’éliminer tout obstacle à l’activité économique qui pourrait découler d’un brevet délivré à tort (40).

53.      Partant, il est constitutif du droit des brevets que, malgré la présomption de validité de ces derniers, il ne peut exister de certitude concernant cette validité ainsi que le caractère contrefaisant de produits concurrents qu’après un examen de ces questions par les autorités et juridictions compétentes en la matière.

54.      Dans un tel contexte, des différends et litiges entre fabricants de médicaments princeps et fabricants de génériques de ces médicaments font souvent partie des préparatifs de l’entrée sur le marché des génériques. De plus, dans la mesure où, pour obtenir une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour un médicament générique, il n’est pas requis de démontrer que ce médicament n’enfreint pas d’éventuels droits de brevet du fabricant du médicament princeps (41), l’insécurité sur la validité du brevet et le caractère contrefaisant du médicament générique peut persister même après l’entrée sur le marché d’un tel médicament.

55.      Par conséquent, il ne saurait être soutenu qu’une entrée à risque d’un générique sur le marché, susceptible d’appeler une action en contrefaçon de la part du titulaire d’un brevet sur le médicament princeps, ne constituerait pas une possibilité réelle et concrète pour un fabricant de génériques de pénétrer le marché lorsqu’il existe encore des droits de brevet sur le médicament princeps.

56.      Comme le Tribunal l’a relevé à juste titre dans l’arrêt attaqué (42), cela est d’autant plus vrai dans un contexte comme celui de la présente affaire, où les brevets litigieux sont non pas des brevets de molécule, protégeant l’IPA même du médicament princeps, mais des brevets de procédé protégeant certaines manières de fabriquer cette IPA. Par conséquent, contrairement à un brevet de molécule, ces brevets de procédé n’empêchent pas, indépendamment de la question de leur validité, les fabricants de génériques d’entrer sur le marché avec l’IPA en cause fabriquée selon d’autres procédés. En d’autres termes et à l’inverse, dans une situation dans laquelle le brevet de l’IPA d’un médicament a expiré et où un laboratoire de princeps ne détient plus que des brevets de procédé, une entrée de génériques du médicament en question contrevient seulement aux droits de brevet de ce laboratoire s’il est établi que les brevets de procédé en cause sont à la fois valides et contrefaits par chacun des entrants potentiels (43).

57.      Dans ces conditions, il ne saurait être soutenu, ainsi que le suggèrent les requérantes, que, afin de démontrer l’existence d’un rapport de concurrence entre le titulaire d’un brevet sur un médicament et un fabricant d’un générique de ce médicament, la Commission serait « tenue de prouver positivement » que le générique en cause n’enfreint pas le brevet concerné, c’est-à-dire, en l’espèce, que les procédés employés par les fabricants de génériques afin de produire le citalopram n’enfreignaient pas les brevets litigieux de Lundbeck.

58.      En effet, il n’appartient pas à la Commission de se livrer, en évaluant la force des brevets concernés ou le caractère contrefaisant des produits génériques, à des pronostics sur l’issue de différends entre titulaires de brevets et fabricants de génériques, afin d’évaluer les rapports de concurrence entre ces opérateurs aux fins de l’application du droit de la concurrence. Comme l’a résumé, en substance, le Tribunal au point 159 de l’arrêt attaqué, exiger de la Commission de prouver que les fabricants de génériques auraient certainement ou très probablement obtenu gain de cause dans un litige de brevet avec Lundbeck et seraient certainement ou très probablement entrés sur le marché avec leurs produits reviendrait d’ailleurs à confondre concurrence réelle et concurrence potentielle, et à omettre le fait que l’article 101 TFUE protège justement aussi cette dernière (44).

59.      Certes, une autorité de concurrence ne doit pas faire abstraction de toute question relative au droit des brevets, susceptible d’influer sur le constat de l’existence d’un tel rapport de concurrence, puisque d’éventuels brevets protégeant un médicament princeps ou l’un de ses procédés de fabrication font incontestablement partie du contexte économique et juridique caractérisant les rapports de concurrence entre les titulaires de ces brevets et les fabricants de médicaments génériques. Toutefois, l’appréciation des droits conférés par un brevet, effectuée par l’autorité de concurrence, ne doit pas consister en un examen de la force du brevet ou de la probabilité avec laquelle un litige entre son titulaire et un fabricant de médicaments génériques pourrait aboutir au constat que le brevet est valide et contrefait. Cette appréciation doit davantage porter sur la question de savoir si, malgré l’existence de ce brevet, le fabricant de médicaments génériques dispose de possibilités réelles et concrètes d’intégrer le marché au moment pertinent (45).

60.      Or, à cet effet, il convient justement de tenir compte, notamment, outre le fait qu’un brevet de procédé n’empêche pas l’entrée sur le marché de produits fabriqués selon d’autres procédés, du fait que l’insécurité sur la validité de brevets couvrant des médicaments est une caractéristique fondamentale du secteur pharmaceutique ; que la présomption de validité d’un brevet sur un médicament princeps n’équivaut pas à une présomption d’illégalité d’une version générique de ce médicament valablement mis sur le marché ; qu’un brevet ne garantit pas une protection contre les actions en nullité ; et que de telles actions et, notamment, le lancement dit « à risque » d’un médicament générique, ainsi que les procédures juridictionnelles qu’il suscite, ont couramment lieu dans la phase précédant ou suivant immédiatement l’entrée sur le marché d’un tel médicament générique (46).

61.      Il s’ensuit que la persistance d’une insécurité sur la licéité de la mise sur le marché d’un médicament générique au regard du droit des brevets n’exclut aucunement de conclure que le fabricant de ce générique dispose de possibilités réelles et concrètes d’intégrer le marché en cause et qu’il existe, partant, un rapport de concurrence potentielle entre ce fabricant et le titulaire d’un brevet sur le médicament princeps aux fins de l’application de l’article 101 TFUE.

62.      Par conséquent, les requérantes ne sauraient soutenir que l’existence de brevets protégeant un certain médicament constituerait une barrière juridique excluant toute concurrence telle que des droits exclusifs reconnus comme constituant de telles barrières dans des affaires antérieures (47), ce que le Tribunal a d’ailleurs, contrairement aux allégations des requérantes, correctement expliqué dans l’arrêt attaqué (48).

63.      De la même manière, le point 29 des lignes directrices de la Commission concernant l’application de l’article 101 TFUE à des catégories d’accords de transfert de technologie (49), invoqué par les requérantes, indique certes que les parties à un accord ne sont pas considérées comme des concurrents lorsqu’un droit sur technologie ne peut pas être exploité sans enfreindre un autre droit sur technologie valable. Toutefois, ce même point précise que, en pratique, il peut y avoir des cas où on ne peut être certain qu’un droit sur technologie donné est valable et enfreint, ce qui est précisément le cas de brevets tels que ceux concernés en l’espèce.

64.      Il résulte de ce qui précède que le Tribunal n’a pas commis d’erreur en constatant que les brevets litigieux ne constituaient pas des barrières insurmontables pour l’entrée des fabricants de génériques sur le marché du citalopram et que, afin de démontrer l’existence d’un rapport de concurrence potentielle entre Lundbeck et ces fabricants, la Commission n’était pas tenue de démontrer que ces derniers pouvaient entrer sur le marché sans violer d’éventuels droits de brevet de Lundbeck.

65.      La première branche du quatrième moyen doit donc être rejetée.

b)      Sur les prétendues erreurs commises par le Tribunal lors de l’appréciation des preuves avancées par la Commission afin de démontrer l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques

66.      Par les deuxième et troisième branches de leur quatrième moyen, qu’il convient d’examiner ensemble, les requérantes soutiennent que le Tribunal a commis des erreurs lors de l’appréciation des éléments de preuve censés témoigner de l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques au moment de la conclusion des accords litigieux.

67.      La Commission fait valoir que, par cette argumentation, les requérantes tentent de remettre en cause les conclusions de fait du Tribunal et d’obtenir un réexamen des preuves présentées devant le Tribunal par la Cour, ce qui est irrecevable dans le cadre d’un pourvoi.

68.      Cette objection doit toutefois être nuancée.

69.      Ainsi, il est certes vrai que les requérantes avancent quelques arguments relatifs à l’appréciation des faits par le Tribunal, qui sont, sauf dans le cas d’une dénaturation des éléments de preuve qui n’est, en l’occurrence, ni alléguée ni manifeste, irrecevables au stade du pourvoi (50).

70.      Néanmoins, force est de constater que le cœur de l’argumentation des requérantes porte sur la méthodologie appliquée par la Commission et le Tribunal aux fins de parvenir au constat de l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques au moment de la conclusion des accords litigieux, ce qui est d’ailleurs illustré par les réponses mêmes opposées par la Commission aux allégations des requérantes. Partant, il s’agit là de questions de droit soumises au contrôle de la Cour dans le cadre du pourvoi.

71.      Les requérantes font ainsi valoir que le Tribunal aurait, à tort, validé l’approche de la Commission consistant à se fonder essentiellement sur des éléments témoignant de l’appréciation subjective qu’avait Lundbeck de la force de ses brevets afin de conclure à l’existence d’une concurrence potentielle entre cette dernière et les fabricants de génériques, en omettant par là même de tenir compte de nombreuses preuves objectives susceptibles de démontrer l’absence d’un tel rapport de concurrence potentielle.

72.      Ce faisant, le Tribunal aurait, de manière arbitraire et en se contredisant dans ses motifs, refusé de tenir compte de preuves postérieures à la conclusion des accords litigieux lorsque la prise en compte de ces preuves aurait été favorable pour les requérantes, tandis qu’il n’aurait pas hésité à s’appuyer sur de telles preuves postérieures pour tirer des conclusions en la défaveur de ces dernières.

73.      Cette argumentation ne saurait toutefois prospérer.

74.      Ainsi, les allégations des requérantes s’appuient, premièrement, sur une lecture partielle et trompeuse de l’arrêt attaquée.

75.      En effet, comme la Commission le souligne à juste titre, le Tribunal a explicitement indiqué, au point 142 de l’arrêt attaqué, que c’était à tort que les requérantes prétendaient que la Commission s’était fondée « presque exclusivement » sur des évaluations subjectives de la force de ses brevets par Lundbeck afin d’établir l’existence d’une concurrence potentielle entre celle-ci et les fabricants de génériques.

76.      Le Tribunal a encore constaté, au même point 142 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait procédé à un examen minutieux, pour chacune des entreprises de génériques concernées, des possibilités réelles et concrètes qu’elles avaient d’entrer sur le marché, en se fondant sur des éléments objectifs tels que, notamment, les investissements déjà réalisés, les démarches effectuées afin d’obtenir une AMM et les contrats d’approvisionnement conclus avec leurs fournisseurs d’IPA. De plus, le Tribunal s’est également appuyé, au point 144 de l’arrêt attaqué, sur d’autres éléments objectifs, tels que l’existence même des accords litigieux et des paiements effectués par Lundbeck en faveur des fabricants de génériques, afin de conclure que la Commission avait démontré à suffisance de droit l’existence d’une concurrence potentielle entre ces opérateurs.

77.      Or, une telle manière de procéder est conforme aux critères dégagés par la Cour aux fins de l’évaluation de la concurrence potentielle existant entre le titulaire d’un brevet sur un médicament et un fabricant d’un générique de ce même médicament.

78.      En effet, pour apprécier l’existence d’un rapport de concurrence potentielle entre de tels opérateurs, il convient de déterminer si, à la date de conclusion des accords litigieux, le fabricant de génériques avait effectué des démarches préparatoires suffisantes, en termes administratifs, judiciaires et commerciaux, lui permettant d’accéder au marché concerné dans un délai à même de faire peser une pression concurrentielle sur le fabricant de médicaments princeps et établissant ainsi sa détermination ferme et sa capacité propre d’accéder à ce marché même en présence de brevets de procédé encore détenus par ce fabricant de médicaments princeps (51).

79.      De plus, doit être pris en considération, aux fins d’établir l’existence d’une concurrence potentielle entre un fabricant de génériques et un laboratoire de princeps, la perception que ce dernier se fait du risque que présente le premier pour ses intérêts commerciaux, perception révélée notamment par la conclusion même d’un accord entre ces opérateurs ainsi que la disposition du laboratoire de princeps à effectuer des transferts de valeur en faveur du fabricant de génériques en contrepartie du report de son entrée sur le marché (52).

80.      Deuxièmement, il découle de ce qui précède que, contrairement à ce que semblent alléguer les requérantes, la démarche du Tribunal consistant à se fonder, parmi un faisceau d’indices, également sur des éléments de preuve témoignant de la perception, par Lundbeck, de la pression concurrentielle exercée par les fabricants de génériques afin de conclure à l’existence d’un rapport de concurrence potentielle, ne comporte aucune erreur méthodologique. La perception de l’opérateur en place est au contraire un élément pertinent pour l’appréciation de l’existence d’une relation concurrentielle entre celui-ci et une entreprise extérieure au marché (53).

81.      Partant, c’est sans commettre d’erreur que le Tribunal a pu, parmi d’autres éléments, prendre en compte, notamment au point 145 de l’arrêt attaqué, mis en cause par les requérantes, le fait que Lundbeck doutait de la validité de ses brevets afin de conclure que la Commission avait établi à suffisance de droit l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques.

82.      Cependant, les requérantes font valoir, troisièmement, que le Tribunal a commis une erreur en concluant, au vu des documents sur lesquels il s’est appuyé, que Lundbeck doutait de la validité de ses brevets, alors qu’il s’agissait de documents établis postérieurement à la conclusion des accords litigieux. Selon les requérantes, le Tribunal a ainsi, de manière erroné, contradictoire et arbitraire, admis des éléments de preuve postérieurs à la conclusion desdits accords en la défaveur des requérantes, alors qu’il a refusé de tenir compte de tels éléments de preuve postérieurs lorsqu’ils étaient invoqués en la faveur de ces dernières.

83.      Cette argumentation est toutefois également dépourvue de fondement.

84.      Ainsi, il est certes vrai que le Tribunal ne saurait entériner un constat d’infraction au droit de la concurrence de l’Union lorsqu’il dispose de preuves susceptibles d’invalider un tel constat (54). Toutefois, il est également de jurisprudence constante que le principe qui prévaut en droit de l’Union est celui de la libre administration des preuves et que le seul critère pertinent pour apprécier les preuves produites réside dans leur crédibilité (55). Selon les règles généralement applicables en matière de preuve, la crédibilité et, partant, la valeur probante d’un document dépendent de son origine, des circonstances de son élaboration, de son destinataire et du caractère sensé et fiable de son contenu (56).

85.      Or, en l’espèce, l’appréciation des preuves par le Tribunal, mise en cause par les requérantes, est conforme à ces principes.

86.      Ainsi, le Tribunal a affirmé à juste titre, aux points 139 et 141 de l’arrêt attaqué, que la Commission a eu raison de s’appuyer, afin d’évaluer la situation concurrentielle entre les parties aux accords litigieux au moment de la conclusion de ceux-ci, sur des documents reflétant la perception de la force des brevets litigieux par ces parties à ce moment-là. En effet, c’est uniquement sur la base des informations dont elles disposaient à l’époque et de leur perception du marché à ce moment-là qu’elles ont décidé d’adopter une ligne de conduite et de conclure les accords litigieux. Partant, il est correct, ainsi que l’a également indiqué le Tribunal au point 141 de l’arrêt attaqué, que des éléments de preuve postérieurs à la conclusion des accords litigieux peuvent être pris en compte lorsqu’ils permettent d’établir la position des parties au moment pertinent.

87.      Par conséquent, d’une part, contrairement aux allégations des requérantes, le Tribunal n’a pas commis d’erreur ni procédé à un renversement de la charge de la preuve lorsqu’il s’est appuyé, au point 254 de l’arrêt attaqué, sur des preuves datant de la période postérieure à la conclusion des accords litigieux pour constater que Lundbeck doutait de la validité des brevets litigieux, en affirmant que cette dernière n’avait fourni aucun élément permettant d’expliquer en quoi, auparavant, son appréciation de cette question aurait été différente.

88.      En effet, les documents dont la prise en compte par le Tribunal est mise en cause par les requérantes étaient des documents internes de Lundbeck (57). Il ne s’agissait donc pas de documents qui auraient été établis postérieurement à la conclusion des accords litigieux aux fins de la défense de Lundbeck dans la procédure devant la Commission, ce qui aurait été un élément de nature à entraver leur crédibilité (58). Partant, le Tribunal a pu conclure sans commettre d’erreur ni de renversement de la charge de la preuve que, en l’absence d’éléments susceptibles de démontrer que Lundbeck aurait eu des raisons de changer radicalement sa position à cet égard après la conclusion des accords litigieux, il était crédible que ces documents reflétaient également la perception par cette dernière de la force de ses brevets au moment de la conclusion desdits accords.

89.      D’autre part, c’est également à tort que les requérantes soutiennent que le Tribunal a commis une erreur lorsqu’il a refusé de tenir compte, aux points 136 et 143 à 146 de l’arrêt attaqué, des éléments fournis par Lundbeck afin de démontrer que les fabricants de génériques avaient contrefait ses brevets, qu’elle avait obtenu des injonctions ou d’autres mesures provisoires dans des affaires de contrefaçon ou que l’OEB avait confirmé le brevet sur la cristallisation dans tous ses aspects pertinents en 2009.

90.      Contrairement à l’affirmation des requérantes, le Tribunal n’a pas refusé de tenir compte de ces éléments uniquement parce qu’il s’agissait d’éléments postérieurs à la conclusion des accords litigieux. La raison de ce refus était plutôt que ces éléments, même s’il s’agissait de faits objectifs et non de déclarations subjectives établies in tempore suspecto, n’étaient tout simplement pas pertinents afin d’apprécier les rapports de concurrence existant entre Lundbeck et les fabricants de génériques au moment de la conclusion de ces accords. Ainsi, comme l’a constaté à juste titre le Tribunal, ces éléments ne changeaient rien au fait que, à ce moment-là, les fabricants de génériques étaient perçus comme une menace par Lundbeck, l’ensemble de ces opérateurs doutaient de la validité du brevet sur la cristallisation et il n’était pas exclu qu’une juridiction nationale pût déclarer ce dernier invalide.

91.      En effet, contrairement à l’avis des requérantes, indépendamment de la question de savoir si c’est le cas en l’espèce, ce n’est pas parce que la perception d’une certaine réalité par un opérateur au moment de la conclusion d’un accord s’avère par la suite infondée que la perception en cause ne peut pas être prise en compte aux fins de l’évaluation de la concurrence potentielle au moment pertinent. L’idée des requérantes selon laquelle des opérateurs pourraient s’estimer, « subjectivement », « à tort » concurrents potentiels à un moment donné alors qu’il pourrait s’avérer ultérieurement que, « objectivement », ils n’étaient en fait pas des concurrents potentiels à ce moment-là, manque en effet de fondement. Cette idée omet de tenir compte du fait que les opérateurs agissent nécessairement, à un moment donné, sur la base de leur perception de la réalité à ce moment-là et que ces actions façonnent à leur tour la réalité en contribuant ainsi à l’existence ou au contraire l’absence d’une concurrence potentielle. Partant, si, en raison d’un faisceau d’éléments, on peut conclure à l’existence d’un rapport de concurrence potentielle à un moment donné, un événement ou un fait ultérieur ne pourra pas invalider a posteriori l’existence de cette concurrence potentielle au moment considéré.

92.      En outre, et en tout état de cause, pour conclure, en l’espèce, à l’existence d’une concurrence potentielle, le Tribunal s’est appuyé non pas uniquement sur la possibilité d’invalidation du brevet sur la cristallisation ou la perception des parties à cet égard, mais sur un ensemble d’éléments. Pareillement, il n’est pas nécessaire de déterminer si c’est à juste titre que le Tribunal a constaté, au point 146 de l’arrêt attaqué, que, au moment de conclure les accords litigieux, aucune mesure provisoire n’avait été obtenue par Lundbeck, ce que contestent les requérantes. En effet, l’existence de telles mesures provisoires n’est en tout état de cause pas de nature à invalider le constat de l’existence d’une concurrence potentielle entre un laboratoire de princeps et des fabricants de génériques à l’encontre desquels ce dernier obtient le prononcé de telles mesures (59).

93.      Il résulte des considérations qui précèdent que le Tribunal n’a pas commis d’erreurs méthodologiques lors de l’appréciation des preuves avancées par la Commission afin de démontrer l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques au moment de la conclusion des accords litigieux.

94.      Les deuxième et troisième branches du quatrième moyen doivent donc également être rejetées.

c)      Sur les arguments des requérantes cherchant à démontrer la prétendue absence d’un rapport de concurrence potentielle entre Lundbeck et chacun des fabricants de génériques concernés

95.      Par les quatrième à septième branches de leur quatrième moyen, les requérantes font valoir que le Tribunal a commis des erreurs lorsqu’il a validé, aux points 207 à 330 de l’arrêt attaqué, les constatations de la Commission relatives à l’existence d’un rapport de concurrence potentielle entre Lundbeck et chacun des fabricants de génériques en cause sur chaque territoire concerné par les accords litigieux.

96.      La Commission fait encore valoir que cette argumentation est irrecevable parce qu’elle cherche à remettre en cause les conclusions de fait du Tribunal et à obtenir un réexamen des preuves présentées devant le Tribunal par la Cour. Toutefois, si elles avancent en effet des éléments de nature factuelle dont l’examen appartient au seul Tribunal, il ressort de l’argumentation des requérantes qu’elles critiquent également des erreurs méthodologiques prétendument commises par le Tribunal lors de son examen de la concurrence potentielle entre Lundbeck et chacun des fabricants génériques, ce qui est permis au stade du pourvoi.

97.      Néanmoins, sur le fond, l’argumentation des requérantes ne saurait prospérer dans la mesure où, d’une part, elle recoupe largement les critiques méthodologiques déjà réfutées lors de l’examen des précédentes branches du présent moyen, et, d’autre part, pour le surplus, elle s’avère également dénuée de fondement.

98.      Ainsi, les requérantes font valoir, premièrement, que le Tribunal a eu tort d’admettre l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et Merck (GUK) au Royaume-Uni ainsi que dans tout l’EEE, entre Lundbeck et Arrow au Royaume-Uni et au Danemark, entre Lundbeck et Alpharma dans l’EEE ainsi qu’entre Lundbeck et Ranbaxy dans l’EEE sans exiger la preuve, par la Commission, du fait que ces fabricants de génériques auraient pu entrer sur le marché avec du citalopram non-contrefaisant, c’est-à-dire du citalopram fabriqué selon des procédés autres que ceux protégés par les brevets litigieux de Lundbeck. De la même manière, les requérantes réitèrent l’idée selon laquelle il serait erroné, en raison de la présomption de validité des brevets, de considérer la possibilité d’une contestation de ladite validité comme l’expression de l’existence d’une concurrence potentielle.

99.      Or, comme déjà indiqué ci-dessus dans le cadre de l’examen de la première branche du présent moyen, afin de démontrer l’existence d’un rapport de concurrence entre le titulaire d’un brevet sur un médicament et un fabricant d’un générique de ce médicament, la Commission n’est pas tenue de prouver que le générique n’enfreint pas le brevet concerné ou que celui-ci aurait été invalidé au cours d’une procédure judiciaire, et l’entrée dite « à risque » d’un générique sur le marché tout comme la contestation de la validité d’un brevet peuvent au contraire être considérées comme des possibilités réelles et concrètes de concurrencer le titulaire du brevet (60).

100. Deuxièmement, les requérantes soutiennent que le Tribunal a conclu à tort que Merck (GUK) et Arrow étaient des concurrents de Lundbeck en se fondant sur des éléments de preuve subjectifs et en ignorant des éléments de preuve objectifs postérieurs. Or, ces arguments, pour autant qu’ils ne consistent pas à chercher à obtenir de la Cour un réexamen de certains éléments factuels déjà appréciés par le Tribunal mais qu’ils offrent une critique méthodologique de l’appréciation desdits faits par le Tribunal, ont déjà été réfutés dans le cadre de l’examen des deuxième et troisième branches du présent moyen ci-dessus (61).

101. Enfin, troisièmement, les requérantes font valoir que le Tribunal a eu tort de valider les constatations de la Commission quant à l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques alors que ces fabricants n’ont pas fait de demandes d’AMM ou n’ont obtenu des AMM pour leurs produits dans une partie des pays concernés par les accords litigieux qu’au cours de la durée ou après l’expiration de ces derniers.

102. À cet égard, il importe de noter que le Tribunal a examiné, notamment aux points 168 à 182 de l’arrêt attaqué, de manière approfondie le point de savoir si le fait qu’un fabricant de génériques ne dispose pas encore d’AMM pour le marché d’un certain pays empêche l’existence d’une concurrence potentielle entre ce fabricant et le titulaire d’un brevet sur le médicament princeps déjà en vente sur le marché géographique en cause. De plus, le Tribunal a analysé, auxdits points, la situation de chacun des fabricants de génériques parties aux accords litigieux en termes d’AMM pour les marchés géographiques concernés par ces accords.

103. Le Tribunal a ainsi constaté, tout d’abord, que le fait qu’un fabricant de génériques ne dispose pas encore d’AMM pour son produit dans un État donné n’empêche pas l’existence d’une concurrence potentielle entre ce fabricant et un laboratoire de princeps déjà actif dans la zone géographique en cause, puisque la concurrence potentielle inclut notamment les activités des fabricants de génériques visant à l’obtention des AMM ainsi qu’à l’accomplissement de toutes les démarches administratives et commerciales indispensables pour préparer leur entrée sur le marché (62). Comme l’a encore indiqué le Tribunal, si l’aboutissement de la procédure pour obtenir une AMM est indispensable pour qu’une concurrence effective puisse exister, le cheminement pour y parvenir, lorsqu’il est entamé par une entreprise étant depuis longtemps en train de préparer sérieusement son entrée sur le marché, relève de la concurrence potentielle (63).

104. De la même manière, le Tribunal a noté, aux points 163 et 232 de l’arrêt attaqué, qu’il n’est pas nécessaire que la Commission démontre que l’entrée des fabricants de génériques sur le marché aurait eu lieu avec certitude dans chacun des pays concernés par les accords litigieux avant l’expiration de ces derniers pour pouvoir établir l’existence d’une concurrence potentielle, cette dernière exigeant non pas la démonstration d’une entrée certaine sur le marché, mais uniquement l’existence de possibilités réelles et concrètes à cet égard.

105. Or, les requérantes n’avancent aucun élément de nature à contredire ces considérations qui, au demeurant, ne sont entachées d’aucune erreur de droit.

106. En effet, refuser de reconnaître l’existence d’un rapport de concurrence potentielle entre le titulaire d’un brevet sur un médicament et le fabricant d’un générique de ce médicament, dont il est par ailleurs établi qu’il a la détermination ferme ainsi que la capacité propre d’entrer sur le marché, du seul fait que ce fabricant ne dispose pas encore d’AMM, reviendrait à exclure toute existence de concurrence potentielle et, par là même, toute application du droit de la concurrence pendant la phase préparatoire de l’entrée sur le marché de médicaments génériques, dont font justement partie les démarches aux fins d’obtenir une AMM. Une telle position irait totalement à l’encontre de l’effet utile de l’article 101 TFUE, puisqu’elle signifierait qu’il serait permis d’arrêter ou de retarder les préparatifs de futurs entrants sur le marché au moyen d’accords d’exclusion, en sorte qu’une entrée sur le marché de tels opérateurs et, partant, une concurrence réelle ne pourraient jamais se réaliser.

107. Ensuite, le Tribunal a constaté que, en l’espèce, non seulement les fabricants de génériques étaient depuis longtemps en train de préparer sérieusement leur entrée sur le marché, mais qu’en plus soit ils disposaient déjà d’une AMM, soit ils avaient entamé des démarches pour en obtenir une à court ou moyen terme. Dans ce contexte, le Tribunal a examiné, de manière spécifique, la situation de chacun des fabricants de génériques concernés et en a conclu que chacun d’eux avait des possibilités réelles et concrètes pour obtenir des AMM et ainsi accéder au marché du citalopram dans plusieurs pays de l’EEE, notamment en ayant recours à la procédure de reconnaissance mutuelle prévue par la directive 2001/83 (64), dans un délai suffisamment court pour exercer une pression concurrentielle sur Lundbeck (65).

108. Les requérantes ne contestent pas les faits sur lesquels le Tribunal s’est appuyé pour arriver à cette conclusion et n’en invoquent pas non plus la dénaturation, mais se bornent à faire valoir que les fabricants de génériques n’ont pas fait de demandes d’AMM ou n’ont obtenu des AMM pour leurs produits dans une partie des pays concernés par les accords litigieux qu’au cours de la durée ou après l’expiration de ces derniers.

109. Sur la base de cette même argumentation, les requérantes soutiennent, dans leur réponse à notre question concernant l’impact de l’arrêt de la Cour dans l’affaire Generics (UK) e.a. (66) sur la présente procédure (67), que le critère dégagé par la Cour dans ledit arrêt pour constater l’existence d’une concurrence potentielle entre le titulaire d’un brevet sur un médicament et des fabricants de génériques dudit médicament ne serait pas rempli en l’espèce.

110. Or, comme il vient d’être constaté, le fait de ne pas encore disposer d’AMM n’est pas de nature à invalider le constat de l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques. Cela est d’autant plus vrai dans la mesure où, ainsi que l’a noté à juste titre la Commission lors de l’audience dans la présente affaire, il est impossible de savoir si ce ne sont pas précisément les accords litigieux eux-mêmes qui ont incité ces fabricants à s’abstenir de réaliser plus rapidement les démarches nécessaires à l’obtention d’une AMM pour leurs produits dans les États concernés par ces accords.

111. Contrairement aux affirmations des requérantes, cela est également en accord avec les constatations effectuées par la Cour aux points 43 et 44 de l’arrêt Generics (UK) e.a. (68). En effet, auxdits points, la Cour s’est bornée à indiquer que, pour apprécier le rapport de concurrence potentielle entre le titulaire d’un brevet et un fabricant de médicaments génériques dans des circonstances semblables à celles concernées en l’espèce, il importe de déterminer si ce fabricant avait, au moment pertinent, effectué des démarches préparatoires suffisantes lui permettant d’accéder au marché concerné dans un délai à même de faire peser une pression concurrentielle sur le titulaire du brevet. Parmi ces démarches peuvent figurer, entre autres, celles destinées à le mettre en capacité à disposer, dans ledit délai, des AMM requises.

112. Or, ainsi qu’il vient d’être noté, les requérantes ne remettent pas en cause les constatations de fait sur lesquelles le Tribunal s’est appuyé pour conclure que les fabricants de génériques avaient des possibilités réelles et concrètes pour obtenir des AMM et accéder ainsi au marché du citalopram dans plusieurs pays de l’EEE dans un délai suffisamment court pour exercer une pression concurrentielle sur Lundbeck.

113. Dans ces conditions, les quatrième à septième branches du quatrième moyen doivent également être rejetées, tout comme ce moyen dans son ensemble.

2.      Sur la qualification des accords entre Lundbeck et les fabricants de génériques de restrictions de la concurrence par objet (premier à troisième moyens du pourvoi)

114. Avec leurs trois premiers moyens de pourvoi, les requérantes font valoir que le Tribunal a commis des erreurs en qualifiant les accords litigieux de restrictions de la concurrence par objet.

115. Tout d’abord, dans le cadre de leur premier moyen, les requérantes soutiennent que le Tribunal a eu tort de valider l’appréciation de la Commission selon laquelle ces accords étaient restrictifs de la concurrence de par leur objet même si les restrictions prévues entraient dans le champ d’application des brevets litigieux, c’est-à-dire même à supposer que ces accords empêchaient uniquement l’entrée sur le marché d’un citalopram générique jugé par les parties aux accords comme contrefaisant potentiellement ces brevets et non celle de tout type de citalopram générique (69).

116. Ensuite, dans le cadre de leur deuxième moyen, les requérantes avancent que le Tribunal a commis des erreurs en concluant que cinq des six accords litigieux dépassaient le champ d’application des brevets litigieux, c’est-à-dire qu’ils interdisaient aux fabricants de génériques de vendre tout type de citalopram générique et pas seulement du citalopram fabriqué selon les procédés protégés par les brevets litigieux.

117. Enfin, avec leur troisième moyen, les requérantes font valoir que, à supposer même que la Cour juge que certains des accords litigieux dépassaient le champ d’application des brevets litigieux en interdisant la vente de tout citalopram générique, le Tribunal n’en aurait pas moins conclu de manière erronée que ces accords constituaient des restrictions de concurrence par objet.

a)      Sur la qualification de restrictions de la concurrence par objet d’accords qui ne dépassent pas la portée d’un brevet (premier moyen du pourvoi)

118. De l’avis des requérantes, le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que les accords litigieux étaient restrictifs de la concurrence de par leur objet même à supposer que les restrictions qu’ils ont imposées aux fabricants de génériques n’aient pas dépassé le champ d’application des brevets litigieux. Ainsi, selon les requérantes, un accord imposant des restrictions comparables à celles que le titulaire d’un brevet aurait pu obtenir au moyen de décisions judiciaires ne saurait être regardé, de par sa nature même, comme étant nuisible à la concurrence. En effet, un tel accord traduirait seulement la prérogative du titulaire d’un brevet de tenir à l’écart du marché les produits contrefaisants.

119. Un accord de règlement amiable en matière de brevet pourrait d’autant moins constituer une restriction de concurrence par objet que le règlement à l’amiable d’un contentieux de brevet serait un mode de prévention des litiges légitime et courant.

120. Enfin, le fait que le titulaire du brevet ait opéré un important transfert de valeur en faveur du fabricant de génériques signataire de l’accord en cause ne saurait à cet égard, contrairement aux conclusions du Tribunal, être pertinent aux fins de la qualification d’un accord de restrictif de la concurrence de par son objet.

121. Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté cette argumentation en expliquant qu’il peut certes exister des accords légitimes de règlement à l’amiable de litiges de brevet, même assortis de paiements de la part du titulaire du brevet en faveur d’un fabricant de génériques. Toutefois, selon le Tribunal, lorsqu’un tel paiement est combiné à une exclusion du marché de concurrents ou à une limitation des éléments incitatifs à ce qu’une telle entrée se produise, il est possible de considérer qu’une telle limitation ne découle pas exclusivement de l’appréciation de la force du brevet par les parties, mais qu’elle est obtenue au moyen d’un tel paiement et s’apparente, de ce fait, à un rachat de la concurrence.

122. Le Tribunal a encore rappelé que, en vertu de l’article 101 TFUE, chaque opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique qu’il entend suivre sur le marché. Partant, le Tribunal a approuvé l’appréciation de la Commission selon laquelle des accords de règlement amiable de litiges de brevet tombent sous le coup de l’interdiction édictée par cette disposition lorsqu’ils contiennent des paiements inversés importants, qui réduisent ou éliminent toute incitation pour les fabricants de génériques à entrer sur le marché pendant une certaine période, sans pour autant résoudre le litige sous-jacent en matière de brevets. En effet, dans un tel cas, le transfert de valeur se substitue à l’appréciation autonome, par les parties, de la force des brevets du laboratoire de princeps et à l’évaluation de leurs chances d’obtenir gain de cause en cas de litige éventuel.

123. Par conséquent, le Tribunal a considéré que, en concluant les accords litigieux, les requérantes avaient échangé l’incertitude sur l’issue de tels litiges par la certitude que les fabricants de génériques n’entreraient pas sur le marché, moyennant des paiements inversés importants, éliminant de ce fait toute concurrence, même potentielle, sur le marché, pendant la durée de ceux‑ci (70).

124. Par suite, le Tribunal a conclu que le « critère du champ d’application du brevet », selon lequel les restrictions contractuelles relevant du champ temporel, territorial et matériel des droits du titulaire du brevet ne violeraient pas le droit de la concurrence, ne saurait être retenu. En effet, selon le Tribunal, ce critère conduit, d’une part, à présumer qu’un médicament générique enfreint le brevet du laboratoire de princeps, alors que le caractère infractionnel ou non du médicament générique est une question non résolue. D’autre part, d’après le Tribunal, ce critère se fonde sur la présomption selon laquelle tout brevet invoqué dans le cadre d’un règlement amiable serait considéré comme étant valide en cas de contestation de sa validité, alors qu’il n’existe pas de fondement à cet effet en droit ou dans la pratique.

125. Ainsi, selon le Tribunal, le fait que certaines restrictions contenues dans les accords litigieux aient été considérées par la Commission comme se situant potentiellement dans le champ d’application des brevets de Lundbeck signifiait uniquement que les requérantes auraient pu obtenir des restrictions comparables au moyen de décisions judiciaires prises pour la mise en œuvre de leurs brevets, à supposer qu’elles aient obtenu gain de cause devant les juridictions nationales compétentes. Partant, même si les accords litigieux contenaient également des restrictions relevant potentiellement du champ d’application des brevets des requérantes, ces accords allaient au-delà de l’objet spécifique de leurs droits de propriété intellectuelle, qui incluaient, certes, le droit de s’opposer à des contrefaçons, mais pas celui de conclure des accords par lesquels des concurrents réels ou potentiels du marché étaient payés pour ne pas entrer sur le marché (71).

126. Contrairement à l’avis des requérantes, ces considérations ne sont entachées d’aucune erreur de droit.

127. En effet, comme l’a expliqué la Cour dans son arrêt dans l’affaire Generics (UK) e.a. (72), les accords par lesquels un fabricant de génériques reconnaît la validité d’un brevet et s’engage, en contrepartie d’un transfert de valeur de la part du titulaire du brevet, à ne pas la contester ni à entrer sur le marché, sont susceptibles de restreindre la concurrence. La raison en est que la contestation de la validité des brevets, notamment au moyen d’une entrée dite « à risque » sur le marché, fait partie du jeu normal de la concurrence dans les secteurs dans lesquels existent des droits d’exclusivité sur les technologies.

128. Ainsi, il est certes possible qu’un fabricant de génériques décide de manière autonome de renoncer à entrer sur le marché et de conclure dans ce contexte un accord de règlement amiable d’un litige de brevet. Toutefois, l’article 101 TFUE oblige chaque opérateur de déterminer de manière autonome son comportement sur le marché et interdit à de tels opérateurs de substituer sciemment une coopération pratique entre eux aux risques de la concurrence. Partant, un accord de règlement amiable d’un litige de brevet s’apparente à une restriction de la concurrence par objet si le transfert de valeur effectué par le titulaire du brevet en faveur du fabricant de génériques s’explique uniquement par l’intérêt commercial commun des parties à ne pas se livrer une concurrence par les mérites.

129. En effet, si ce transfert n’a d’autre contrepartie, de la part du fabricant de génériques, que son renoncement à entrer sur le marché et à contester le brevet, cela indique, en l’absence d’autre explication plausible, que c’est non pas sa perception de la force du brevet, mais la perspective du transfert de valeur qui l’a incité à renoncer à une entrée sur le marché et à une contestation du brevet.

130. Par conséquent, il ne saurait être soutenu que la conclusion d’un tel accord relève de la mise en œuvre, par le titulaire du brevet, de ses prérogatives découlant de l’objet de ce dernier, ni qu’elle correspond, de la part des fabricants de médicaments génériques, uniquement à la reconnaissance par ces derniers des droits de brevet, présumés valides, du titulaire de celui-ci. En effet, la présomption de validité d’un brevet ne renseignant aucunement sur l’issue d’un éventuel litige relatif à cette validité, un accord par lequel les parties éliminent l’incertitude à cet égard moyennant un transfert de valeur au profit du fabricant de génériques s’apparente à l’élimination de la concurrence potentielle qui aurait existé en l’absence de cet accord (73).

131. Aucun des arguments avancés par les requérantes dans la présente procédure n’est de nature à démontrer que le Tribunal aurait eu tort de confirmer l’appréciation de la Commission selon laquelle, en l’espèce, les accords litigieux constituaient de telles restrictions de concurrence tendant à obtenir de la part des fabricants de génériques l’engagement de ne pas livrer concurrence pendant le temps convenu en échange d’un paiement de la part de Lundbeck qui n’avait pour contrepartie que ledit engagement.

1)      Sur l’asymétrie des risques entre Lundbeck et les fabricants de génériques

132. Ainsi, premièrement, la Cour a certes jugé que, afin de conclure qu’un accord de règlement amiable d’un litige de brevet entre le titulaire d’un brevet et un fabricant de génériques, assorti d’un transfert de valeur de la part du premier en faveur du second, constitue une restriction de concurrence par objet, il doit ressortir de l’analyse de l’accord que ledit transfert de valeur s’explique uniquement par l’engagement du fabricant de génériques de ne pas livrer concurrence avec son produit pendant le temps convenu. Il doit donc être avéré que ce transfert n’est pas justifié au regard d’objectifs légitimes des parties à l’accord, comme la compensation de frais liés au litige, la fourniture effective de biens ou de services, ou encore la renonciation à des engagements financiers pris par le titulaire du brevet. En outre, toujours selon la Cour, si tel est le cas, il importe encore de déterminer si le transfert de valeur effectué en faveur du fabricant de génériques a été suffisamment important pour inciter effectivement ce dernier à renoncer à entrer sur le marché concerné (74).

133. Toutefois, les requérantes n’avancent aucun élément susceptible de démontrer que, en l’espèce, les transferts de valeur effectués par Lundbeck en faveur des fabricants de génériques auraient eu une contrepartie de la part de ces derniers autre que leur abstention d’entrer sur le marché. De la même manière, les requérantes n’invoquent aucun élément de nature à infirmer la conclusion du Tribunal selon laquelle, en l’espèce, les montants des paiements inversés prévus par les accords litigieux étaient suffisamment élevés pour que les fabricants de génériques acceptent les limitations à leur autonomie et pour réduire les incitations qu’ils avaient à entrer sur le marché. Ainsi, le Tribunal a constaté qu’il ressortait des éléments du dossier que ces fabricants n’auraient pas accepté de se tenir à l’écart du marché unilatéralement, après avoir effectué des démarches et des investissements importants, en l’absence des paiements effectués en leur faveur par Lundbeck (75).

134. Au lieu d’avancer le moindre élément concret qui pourrait livrer une explication pour ces paiements, alternative à celle retenue par la Commission et le Tribunal, les requérantes se bornent en effet à soutenir que lesdits paiements s’expliqueraient par l’asymétrie des risques entre Lundbeck et les fabricants de génériques. Ainsi, si ces derniers étaient entrés sur le marché en violation des brevets de Lundbeck, les dommages et intérêts que celle-ci aurait pu obtenir à la suite d’une victoire en justice n’auraient jamais suffi à compenser les pertes occasionnées, ce qui expliquerait sa disposition à effectuer les paiements litigieux.

135. Or, comme le Tribunal l’a expliqué à juste titre aux points 379 à 387 de l’arrêt attaqué, ce n’est pas parce que la conclusion d’un accord est une solution rationnelle et rentable en termes économiques et commerciaux pour les parties qu’un tel accord échappe à l’application de l’article 101 TFUE. De la même manière, il revient aux autorités publiques et non à des entreprises privées d’assurer le respect des prescriptions légales (76). Il n’appartient ainsi pas à de telles entreprises de pallier une prétendue insuffisance de la réglementation au moyen d’accords anticoncurrentiels et de se faire ainsi justice elles-mêmes (77). Partant, une « asymétrie des risques » telle que celle invoquée par les requérantes de même que d’éventuelles déficiences des droits nationaux des brevets ne sauraient, même à les supposer avérées, justifier des accords consistant à ce qu’un opérateur économique paie ses concurrents pour qu’ils restent en dehors du marché.

2)      Sur le « scénario contrefactuel »

136. Deuxièmement, les requérantes font valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en refusant, aux points 472 et 473 de l’arrêt attaqué, d’examiner le « scénario contrefactuel », c’est-à-dire la situation qui se serait produite en l’absence des accords litigieux. Selon les requérantes, un tel examen aurait révélé que l’abstention des fabricants de génériques d’entrer sur le marché était due non pas à l’existence de ces accords, mais tout simplement à celle des brevets de Lundbeck.

137. Les requérantes insistent encore sur ce point dans leur réponse à notre question concernant l’impact de l’arrêt de la Cour dans l’affaire Generics (UK) e.a. (78) sur la présente procédure (79), en soutenant que, dans ledit arrêt, la Cour aurait reconnu l’importance de l’analyse contrefactuelle ainsi que de la prise en compte d’effets proconcurrentiels des accords sous examen, qui n’auraient pas existé en l’absence de ces derniers, lors de l’application de l’article 101 TFUE.

138. Il convient toutefois de noter, tout d’abord, que, au point 37 de l’arrêt Generics (UK) e.a., invoqué par les requérantes, la Cour s’est bornée à affirmer que, aux fins d’analyser l’existence d’un rapport de concurrence potentielle entre des opérateurs économiques, il importe de déterminer si, en l’absence de l’accord, auraient existé des possibilités réelles et concrètes pour que l’entreprise extérieure au marché concurrence l’entreprise qui y est déjà établie.

139. Or, indépendamment du point de savoir si une telle analyse peut présenter des similitudes avec une analyse dite « contrefactuelle » des développements qui se seraient produits en l’absence d’un accord et s’il est nécessaire de procéder à une telle analyse contrefactuelle dans des cas dans lesquels sont en cause des accords constituant des restrictions de concurrence par objet, il suffit de constater que le Tribunal a examiné de façon approfondie, dans l’arrêt attaqué, le point de savoir si les fabricants de génériques disposaient de possibilités réelles et concrètes d’entrer sur le marché au moment de la conclusion des accords litigieux, en sorte qu’il est possible de conclure que ces possibilités ont été éliminées par lesdits accords (80).

140. De plus, il est erroné d’affirmer, à l’instar des requérantes, qu’une analyse contrefactuelle aurait révélé que l’abstention d’entrer sur le marché de la part des fabricants de génériques résultait non pas des accords litigieux, mais de l’existence des brevets de Lundbeck qui empêchaient une entrée sur le marché avec des produits contrefaisants. En effet, une telle argumentation méconnaît le fait qu’il existait, au moment de la conclusion des accords litigieux, une incertitude quant à la validité des brevets litigieux et au caractère contrefaisant des produits des fabricants de génériques. Or, ainsi que l’a constaté la Cour dans l’arrêt Generics (UK) e.a. (81), c’est précisément cette incertitude qui contribue, tant qu’elle dure, à l’existence d’une situation de concurrence au moins potentielle entre le titulaire d’un brevet sur un médicament et un fabricant souhaitant entrer sur le marché avec un générique de ce médicament.

141. Partant, s’il est établi qu’un accord vise à éliminer cette incertitude, il est permis de conclure qu’il constitue une restriction de concurrence par objet puisqu’il substitue à une situation dans laquelle les parties gèrent de manière autonome les risques et chances induites par cette incertitude une situation concertée qui est le résultat d’une coopération pratique entre les parties (82). Or, c’est justement au moyen d’une analyse de ce point que le Tribunal est parvenu au constat selon lequel les accords litigieux en l’espèce constituaient des restrictions de concurrence par objet (83).

142. Concernant, enfin, la prise en compte d’éventuels effets proconcurrentiels d’un accord, il est certes vrai que la Cour a constaté, au point 103 de l’arrêt Generics (UK) e.a. (84), invoqué par les requérantes, que de tels effets doivent, en tant qu’éléments du contexte de cet accord, être dûment pris en compte aux fins de sa qualification de restriction de la concurrence par objet, dans la mesure où ils sont susceptibles de remettre en cause l’appréciation globale du degré suffisamment nocif de la pratique collusoire concernée à l’égard de la concurrence et, en conséquence, sa qualification de restriction de la concurrence par objet.

143. Toutefois, en l’espèce, les requérantes ne se prévalent, dans leurs écritures dans la présente procédure de pourvoi, d’aucun effet prétendument proconcurrentiel des accords litigieux qui aurait été susceptible de remettre en cause l’analyse du Tribunal quant à la qualification desdits accords de restrictions de la concurrence par objet.

3)      Sur l’absence de clauses de non-contestation dans les accords litigieux

144. Troisièmement, les requérantes soutiennent, dans leur réponse à notre question concernant l’impact de l’arrêt dans l’affaire Generics (UK) e.a. sur la présente procédure (85), que l’analyse de la Cour dans ledit arrêt, selon laquelle des accords tels que ceux en cause dans ladite affaire peuvent constituer des restrictions de la concurrence par objet, aurait reposé principalement sur la présence de clauses de non-contestation des brevets en cause dans lesdits accords. Or, dans la mesure où les accords litigieux dans la présente affaire n’auraient pas contenu de telles clauses de non-contestation, le Tribunal aurait commis une erreur en les qualifiant de restrictions de la concurrence par objet. En effet, l’absence de clauses de non-contestation dans les accords litigieux démontrerait que l’abstention des fabricants de génériques de contester les brevets litigieux aurait découlé non pas de ces accords, mais de l’appréciation autonome de la force des brevets de Lundbeck par les fabricants de génériques.

145. Cette argumentation ne saurait toutefois pas non plus prospérer.

146. Ainsi, indépendamment du point de savoir si les accords en cause dans l’affaire Generics (UK) e.a. contenaient des clauses explicites de non-contestation du brevet concerné ou si l’obligation de non-contestation dudit brevet découlait seulement du contexte et de l’économie générale de ces accords (86), force est de constater que, en tout état de cause, en l’espèce, l’absence de clauses explicites de non-contestation dans les accords litigieux n’est pas un élément susceptible de remettre en cause l’appréciation du Tribunal selon laquelle ces accords constituaient des restrictions de concurrence par objet.

147. En effet, les requérantes n’avancent aucun argument de nature à infirmer la conclusion du Tribunal aux points 398 et 399 de l’arrêt attaqué selon laquelle, même si les accords litigieux ne contenaient aucune clause de non-contestation, les fabricants de génériques n’avaient aucun intérêt à contester les brevets de Lundbeck après avoir conclu ces accords, puisque les paiements inversés correspondaient environ aux profits qu’ils comptaient réaliser en cas d’entrée sur le marché ou aux dommages-intérêts qu’ils auraient pu obtenir s’ils avaient obtenu gain de cause contre Lundbeck au contentieux et que, à supposer même que ces paiements aient été inférieurs aux bénéfices escomptés, il s’agissait malgré tout d’un bénéfice certain et immédiat, que ces fabricants obtenaient sans avoir à courir les risques qu’une entrée sur le marché aurait comportés.

148. Ces considérations sont d’autant plus valables dans la mesure où il ressort des faits analysés par le Tribunal que, en vertu des accords litigieux, les paiements de Lundbeck en faveur des fabricants de génériques devaient, du moins en partie, être effectués en tranches échelonnées au fur et à mesure pendant la durée de ces accords (87). Or, il est peu probable, au vu de l’économie générale desdits accords, que ces derniers seraient partis du principe que Lundbeck continuerait à payer les fabricants de génériques pour leurs engagements s’ils avaient par ailleurs lancé des actions de contestation de la validité des brevets litigieux.

149. C’est, d’ailleurs, pour les mêmes raisons que l’argument de Lundbeck selon lequel les accords litigieux n’auraient pas empêché les fabricants de génériques d’entrer sur le marché avec des produits non-contrefaisants manque totalement de force de conviction. Tout d’abord, cet argument repose encore une fois sur la prémisse erronée selon laquelle il était établi que les produits des fabricants de génériques en cause contrefaisaient les brevets de Lundbeck, alors que cela était précisément incertain (88). Mais de plus, il est tout simplement improbable que les fabricants de génériques aient conservé l’incitation d’entrer sur le marché avec du citalopram quelconque, alors qu’ils étaient par ailleurs rémunérés par Lundbeck pour ne pas remettre en cause la validité des brevets que cette dernière détenait encore en rapport avec cette molécule (89).

4)      Sur la prétendue nouveauté de la sanction de règlements amiables de litiges de brevet

150. Quatrièmement, les requérantes estiment que, puisqu’ils poursuivaient l’objectif légitime de régler un contentieux de brevet, les accords litigieux ne sauraient tout simplement être assimilés à des accords d’exclusion du marché non déguisés révélant un degré suffisant de nocivité pour la concurrence pour être qualifiés de restrictions de la concurrence par objet. Il en irait d’autant plus ainsi dans la mesure où, à l’époque de la conclusion des accords litigieux, une grande insécurité aurait régné quant à l’appréhension des accords de règlement amiable en matière de brevets en termes de droit de la concurrence.

151. Cette argumentation ne saurait pas non plus emporter la conviction.

152. Ainsi, comme cela a été constaté à juste titre par le Tribunal dans l’arrêt attaqué (90), il ressort, d’une part, de la jurisprudence de la Cour que ni le fait qu’un accord poursuit l’objectif légitime de régler un contentieux à l’amiable (91) ni le fait qu’un accord concerne un droit de propriété intellectuelle (92) ne sauraient mettre un tel accord à l’abri d’une application pleine et entière des règles du droit de la concurrence de l’Union. Les arrêts invoqués à cet égard par les requérantes ne sont pas susceptibles de supporter l’idée que, de manière générale, des accords ne peuvent restreindre la concurrence lorsqu’ils restent dans le domaine de la propriété intellectuelle (93).

153. De plus, les requérantes n’avancent aucun élément susceptible d’infirmer les considérations du Tribunal ayant entériné la conclusion de la Commission selon laquelle, en l’espèce, les accords litigieux n’ont pas permis de mettre un terme aux litiges sous-jacents en matière de brevets entre les parties à ces accords (94). En effet, le seul fait que la durée des accords litigieux était liée à l’issue d’un contentieux « test » qui opposait Lundbeck à un autre fabricant de génériques au Royaume-Uni ne saurait démontrer que ces accords ont résolu les litiges de brevet sous-jacents, alors qu’ils les ont seulement mis entre parenthèses pour le temps convenu.

154. D’autre part, les requérantes ne sauraient pas non plus exciper du prétendu manque d’expérience en matière de sanction d’accords analogues à ceux concernés en l’espèce au titre du droit de la concurrence ou du fait que le Konkurrence- og Forbrugerstyrelsen (Autorité de la concurrence et des consommateurs, Danemark) (ci-après le « KFST ») et la Commission eux-mêmes nourrissaient, au début, des doutes quant à la qualification juridique de ces accords, pour arguer que lesdits accords ne peuvent être assimilés à des restrictions de concurrence par objet.

155. Contrairement à l’avis des requérantes, ce n’est pas parce que le cas d’espèce est le premier dans lequel la Commission a appliqué l’article 101 TFUE à des accords de règlement amiable de litiges de brevets entre un laboratoire de princeps et des fabricants de génériques dans le domaine pharmaceutique que ces accords ne sauraient être qualifiés de restrictions de la concurrence par objet au sens de cette disposition.

156. Comme le Tribunal l’a affirmé à juste titre aux points 438 et 774 de l’arrêt attaqué, il n’est pas requis, pour qualifier un accord de restriction de la concurrence par objet, que le même type d’accords ait déjà été condamné par le passé. Le rôle de l’expérience et, partant, la prévisibilité à cet égard concernent en effet, comme l’a correctement expliqué le Tribunal, non pas la catégorie spécifique d’un accord dans un secteur particulier, mais le fait qu’il est établi que certaines formes de collusion, telle l’exclusion de concurrents du marché, sont, en général et au vu de l’expérience acquise, tellement susceptibles d’avoir des effets négatifs sur la concurrence qu’il n’est pas nécessaire de démontrer qu’elles ont des effets dans le cas particulier en cause.

157. En outre, le Tribunal a également eu raison de noter, aux points 752 et 775 de l’arrêt attaqué, que la jurisprudence n’exige pas qu’un accord doive être suffisamment nocif pour la concurrence à première vue ou sans aucun doute, sans qu’il soit procédé à un examen approfondi de son contenu, de sa finalité et du contexte économique et juridique dans lequel il s’insère, pour pouvoir être qualifié de restriction de la concurrence par objet au sens de l’article 101 TFUE (95).

5)      Conclusion

158. Il résulte des considérations qui précèdent que les requérantes n’ont pas avancé d’arguments susceptibles de démontrer que le Tribunal aurait entériné à tort la conclusion de la Commission selon laquelle les accords litigieux constituaient des restrictions de la concurrence par objet, même à supposer qu’ils aient imposé aux fabricants de génériques des restrictions que Lundbeck aurait également pu obtenir au moyen d’actions en justice fondées sur les brevets litigieux si la validité desdits brevets ainsi que le caractère contrefaisant des produits génériques avaient été établis. Le premier moyen doit donc être rejeté.

b)      Sur la prétendue erreur constituée par la conclusion du Tribunal selon laquelle cinq des six accords dépassaient la portée des brevets de Lundbeck (deuxième moyen du pourvoi)

159. Dans le cadre de leur deuxième moyen, les requérantes font valoir que le Tribunal a commis des erreurs lorsqu’il a considéré que cinq des six accords litigieux dépassaient la portée des brevets de Lundbeck, dans la mesure où ils interdisaient non seulement la vente de citalopram contrefaisant potentiellement les procédés protégés par les brevets litigieux, mais également la vente de toute sorte de citalopram, quel que soit son mode de production.

160. Il convient de constater d’emblée que ce moyen est aussi bien inopérant qu’irrecevable.

161. Ainsi, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que les arguments dirigés contre des motifs surabondants d’une décision du Tribunal ne sauraient entraîner l’annulation de cette décision et sont donc inopérants (96).

162. Or, en l’espèce, le Tribunal a explicitement noté, aux points 539 à 541 de l’arrêt attaqué, que l’argumentation des requérantes tirée du caractère erronée de la décision litigieuse en ce que celle-ci aurait conclu à tort que les accords litigieux comportaient des restrictions dépassant celles inhérentes à l’exercice des droits que leurs brevets leur conféraient était inopérante.

163. En effet, d’après le Tribunal, même si les accords litigieux n’étaient pas allés au-delà du champ d’application des brevets des requérantes, ces accords auraient néanmoins constitué des restrictions de la concurrence par objet au sens de l’article 101 TFUE, puisqu’ils ont consisté en des ententes visant à retarder l’entrée des fabricants de génériques sur le marché, en échange de paiements inversés importants, qui ont transformé l’incertitude relative à une telle entrée en la certitude qu’elle n’aurait pas lieu pendant la durée des accords litigieux.

164. Partant, ce n’est qu’à titre subsidiaire que le Tribunal a examiné, aux points 542 à 705 de l’arrêt attaqué, les arguments des requérantes tendant à démontrer que la Commission avait conclu à tort que les restrictions imposées par les accords litigieux dépassaient le champ d’application des brevets litigieux (97).

165. Le caractère inopérant desdits arguments en première instance n’est d’ailleurs pas remis en cause par la circonstance que le fait que les accords litigieux contenaient des restrictions allant au-delà de la portée des brevets litigieux a été pris en considération par la Commission aussi bien lors de la constatation du caractère anticoncurrentiel de ces accords que lors de la détermination du montant des amendes. En effet, le Tribunal a explicitement noté que cet élément avait constitué, dans la décision litigieuse, un facteur pertinent mais non décisif aux fins de l’établissement de l’existence d’une restriction par objet au sens de l’article 101 TFUE comme aux fins de la détermination du niveau des amendes (98).

166. En outre, force est de constater, à l’instar de la Commission, que, en tout état de cause, le deuxième moyen de pourvoi est irrecevable.

167. En effet, les requérantes prétendent certes que leur argumentation consisterait à faire valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en n’appliquant pas le critère juridique approprié lors de l’analyse du point de savoir si les restrictions imposées par les accords litigieux dépassaient la portée des brevets litigieux. Ainsi, elles soutiennent que le Tribunal aurait dû analyser, en se référant aux principes du droit des contrats dans chacun des ordres juridiques concernés par les accords litigieux, s’il correspondait réellement au concours des volontés entre Lundbeck et les fabricants de génériques d’interdire à ces derniers d’entrer sur les marchés concernés avec tout type de citalopram et non seulement avec du citalopram jugé contrefaisant par Lundbeck.

168. Toutefois, sous couvert de cette argumentation, les requérantes cherchent en réalité à obtenir de la part de la Cour un réexamen de l’interprétation effectuée par le Tribunal des termes des accords ainsi que des éléments de fait ayant entouré leur conclusion, ce qui est, sauf en cas de dénaturation des faits qui n’est, en l’occurrence, ni alléguée ni manifeste, irrecevable au stade du pourvoi (99).

169. Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté sans qu’il y ait lieu de se pencher sur le fond de l’argumentation avancée en son soutien par les requérantes.

c)      Sur la prétendue erreur consistant à qualifier certains des accords litigieux de restrictions de la concurrence par objet, à supposer même qu’ils aient dépassé la portée des brevets litigieux (troisième moyen du pourvoi)

170. Dans le cadre de leur troisième moyen, les requérantes font valoir que, à supposer même que la Cour juge que certains des accords litigieux dépassaient le champ d’application des brevets litigieux en interdisant la vente de tout citalopram générique, le Tribunal n’en aurait pas moins conclu de manière erronée que ces accords constituaient des restrictions de concurrence par objet.

171. Au soutien de cette affirmation, les requérantes renvoient à leurs développements avancés au soutien de leur premier moyen. Elles soutiennent ainsi que le Tribunal aurait commis des erreurs en qualifiant les accords litigieux de restrictions de la concurrence par objet, puisqu’il n’aurait pas suffisamment tenu compte du contexte de ces accords, notamment de l’asymétrie des risques entre Lundbeck et les fabricants de génériques, n’aurait pas examiné le scénario contrefactuel et aurait à tort conclu que lesdits accords présentaient une nocivité suffisante pour la concurrence pour être qualifiés de restrictions de la concurrence par objet, notamment au vu des doutes nourris au début par le KFST et la Commission eux-mêmes à cet égard.

172. Or, dans la mesure où ces arguments ont déjà été rejetés dans le cadre de l’examen du premier moyen ci-dessus (100), le troisième moyen ne saurait davantage prospérer.

B.      Sur les amendes (cinquième et sixième moyens du pourvoi)

173. Par leurs cinquième et sixième moyens de pourvoi, les requérantes font valoir que le Tribunal a commis des erreurs lorsqu’il a confirmé les amendes infligées par la Commission dans leur principe (sous 1) ainsi que dans leurs modalités de calcul (sous 2).

1.      Sur la confirmation des amendes par le Tribunal (cinquième moyen du pourvoi)

174. Dans le cadre de leur cinquième moyen, les requérantes font valoir que le Tribunal a eu tort de confirmer que la Commission avait, en l’espèce, le droit d’infliger des amendes à Lundbeck. Ainsi, tout d’abord, le Tribunal n’aurait pas appliqué le bon critère pour déterminer s’il était, en l’espèce, permis d’infliger une amende (sous a). Ensuite, le Tribunal aurait commis une erreur en confirmant la conclusion de la Commission selon laquelle Lundbeck ne pouvait ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement (sous b). Enfin, le Tribunal aurait méconnu les principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité en confirmant le prononcé d’une sanction excédant le niveau d’une amende symbolique (sous c).

a)      Sur le « niveau de culpabilité » requis pour l’infliction d’une amende

175. Les requérantes soutiennent que le Tribunal n’a pas appliqué le bon critère en ce qui concerne le « niveau de culpabilité » requis pour l’infliction d’une amende en droit de la concurrence. Ainsi, le Tribunal aurait certes affirmé, au point 762 de l’arrêt attaqué, que, selon la jurisprudence de la Cour, l’infliction d’une telle amende n’est possible que si une entreprise « ne peut ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement ». Toutefois, le Tribunal n’aurait, par la suite, pas appliqué ce critère pour déterminer la culpabilité de Lundbeck, mais se serait au contraire contenté d’affirmer, au point 777 de l’arrêt attaqué, que les accords litigieux « pouvaient raisonnablement être perçus » par Lundbeck comme contraires à l’article 101 TFUE, abaissant ainsi de manière erronée le niveau de culpabilité requis pour l’infliction d’une amende.

176. À titre liminaire, il importe de relever qu’il ressort en effet de la jurisprudence de la Cour, citée par le Tribunal au point 762 de l’arrêt attaqué, que, s’agissant de la question de savoir si une infraction au droit de la concurrence a été commise de propos délibéré ou par négligence et est, de ce fait, susceptible d’être sanctionnée par une amende en vertu de l’article 23 du règlement (CE) no 1/2003 (101), cette condition est remplie dès lors que l’entreprise en cause ne peut ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement, qu’elle ait eu ou non conscience d’enfreindre les règles de concurrence du traité. En particulier, le fait que l’entreprise concernée aurait qualifié de manière juridiquement erronée son comportement sur lequel la constatation de l’infraction se fonde ne peut pas avoir pour effet de l’exonérer de l’infliction d’une amende (102).

177. Cela étant rappelé, force est de constater que, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a pas méconnu le critère ainsi établi.

178. Tout d’abord, il importe de noter, à l’instar de la Commission, que, contrairement à ce qu’avancent les requérantes, le fait qu’il doit être établi qu’une entreprise « ne pouvait ignorer » le caractère anticoncurrentiel de son comportement ne signifie pas que la Commission doive démontrer qu’il est certain que cette entreprise avait connaissance dudit caractère anticoncurrentiel. En d’autres termes, il ne doit pas être prouvé que l’entreprise en cause savait que son comportement était anticoncurrentiel. Il suffit au contraire que la Commission fasse état d’éléments de nature à établir que, dans les circonstances données, il peut raisonnablement être attendu d’un opérateur économique diligent qu’il soit conscient du caractère anticoncurrentiel de son comportement.

179. Partant, les requérantes jouent sur les mots lorsqu’elles affirment que le Tribunal aurait méconnu ce standard de preuve en l’espèce en notant, au point 777 de l’arrêt attaqué, que les restrictions de la concurrence prévues par les accords litigieux « pouvaient raisonnablement être perçues » par les parties comme étant contraires à l’article 101 TFUE. Contrairement à l’avis des requérantes, il ne ressort en effet nullement de cette formulation que le Tribunal se serait contenté d’un standard de preuve selon lequel il suffirait qu’il fût « simplement possible » que Lundbeck ait eu connaissance du caractère anticoncurrentiel de son comportement. Par ailleurs, aux points 832 et 833 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a clairement affirmé que Lundbeck « n’a[vait] pas pu ignorer » que les accords litigieux étaient susceptibles d’enfreindre l’article 101 TFUE, et qu’elle « était consciente » du caractère potentiellement infractionnel desdits accords.

180. Il s’ensuit que la première branche du cinquième moyen doit être rejetée.

b)      Sur le point de savoir si Lundbeck ne pouvait pas ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement

181. De plus, les requérantes sont d’avis que le Tribunal a méconnu le standard de preuve requis pour l’infliction d’une amende puisque les éléments invoqués par le Tribunal ne seraient pas susceptibles de démontrer que Lundbeck ne pouvait ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement.

182. Ainsi, dans la mesure où les accords litigieux ne pourraient pas être assimilés à de simples accords de répartition ou d’exclusion du marché, mais qu’ils auraient au contraire impliqué la mise en œuvre de droits de propriété intellectuelle dans la poursuite d’un but légitime, leur caractère anticoncurrentiel aurait été beaucoup plus difficile à saisir que celui d’accords de répartition du marché non déguisés. Or, malgré cela, le Tribunal se serait fondé, au point 776 de l’arrêt attaqué, uniquement sur deux documents pour établir la culpabilité de Lundbeck, alors qu’il ne pourrait aucunement être inféré de ces documents que celle-ci ne pouvait ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement. Le Tribunal aurait donc manifestement dénaturé les éléments de preuve et n’aurait pas suffisamment expliqué pourquoi il a confirmé la culpabilité de Lundbeck.

183. Cette argumentation est dépourvue de tout fondement.

184. En premier lieu, il ressort des considérations déjà exprimées plus haut que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les accords litigieux ne constituaient pas des accords d’exclusion du marché, et que l’arrière-plan de ces accords en matière de brevets ne saurait servir de prétexte pour les mettre à l’abri de l’application pleine et entière des règles du droit de la concurrence (103).

185. En deuxième lieu, force est de constater qu’il n’apparaît pas en quoi le Tribunal aurait dénaturé les trois (et non pas deux, comme l’indiquent les requérantes) documents cités au point 776 de l’arrêt attaqué lorsqu’il a pris en compte ces documents dans le cadre de son examen du point de savoir si Lundbeck ne pouvait ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement :

–        ainsi, premièrement, le Tribunal renvoie, au point 776 de l’arrêt attaqué, au considérant 190 de la décision litigieuse au soutien de son affirmation selon laquelle certains fabricants de génériques avaient bien perçu le caractère infractionnel d’accords analogues aux accords litigieux et refusé d’entrer dans de tels accords pour cette raison. Audit considérant 190 de la décision attaquée, est cité un courrier électronique adressé par NM Pharma à Lundbeck, classé dans un document de Lundbeck intitulé « Generic citalopram update 04 09 2002 », duquel il ressort que NM Pharma a décliné l’invitation de Lundbeck à une réunion en affirmant que sa politique en matière de concurrence (« Antitrust Policy ») lui interdisait de s’engager plus en avant dans des discussions avec Lundbeck. Partant, c’est sans se livrer à une dénaturation que le Tribunal a pu s’appuyer sur ce document en tant qu’élément susceptible d’étayer la constatation selon laquelle Lundbeck ne pouvait ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement ;

–        deuxièmement, le Tribunal cite, au point 776 de l’arrêt attaqué, un courrier électronique d’un employé de Lundbeck, évoqué au considérant 265 de la décision attaquée. Dans ce document, l’employé en cause s’oppose, en affirmant qu’il est illégal de se mettre d’accord sur des prix de revente, à une proposition faite par Lundbeck à Merck (GUK) aux fins de convenir, au cours des négociations préalables à l’accord Merck (GUK) pour le Royaume-Uni, notamment, des prix de revente du citalopram à fournir par Lundbeck à Merck (GUK) dans le cadre dudit accord. Il s’ensuit que c’est également sans procéder à une dénaturation que le Tribunal a pu compter ce document parmi les éléments de nature à démontrer que Lundbeck ne pouvait ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement ;

–        troisièmement, le Tribunal se réfère, au point 776 de l’arrêt attaqué, à un courrier électronique interne de Lundbeck, cité au considérant 188 de la décision attaquée, dans lequel il est noté, au sujet des négociations avec Ranbaxy, qu’un accord serait difficile, notamment du point de vue du droit de la concurrence. Au vu de cela, il n’apparaît pas en quoi le Tribunal aurait dénaturé ce document en le prenant en compte aux fins de l’affirmation selon laquelle Lundbeck ne pouvait ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement.

186. Enfin, en troisième et dernier lieu, et en tout état de cause, ce sont les requérantes elles-mêmes qui dénaturent l’arrêt attaqué en affirmant que le Tribunal se serait appuyé uniquement sur les documents qui viennent d’être examinés afin de constater que Lundbeck ne pouvait ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement, et qu’il n’aurait pas suffisamment expliqué ce constat.

187. Ainsi, il découle des considérations du Tribunal figurant aux points 764 à 776 de l’arrêt attaqué que la conclusion figurant au point 777 dudit arrêt, selon laquelle les restrictions de la concurrence prévues par les accords litigieux pouvaient raisonnablement être perçues par les parties à ces accords comme étant contraires à l’article 101, paragraphe 1, TFUE, s’appuie non seulement sur les éléments factuels évoqués au point 776, mais également sur l’ensemble des considérations figurant aux points 764 à 776.

188. Or, dans ces considérations, le Tribunal a amplement expliqué pourquoi il était arrivé à la conclusion que Lundbeck pouvait raisonnablement prévoir le caractère anticoncurrentiel de son comportement. C’est ainsi que le Tribunal a notamment affirmé, au point 764 de l’arrêt attaqué, qu’il n’était pas imprévisible que des accords par lesquels un laboratoire de princeps parvient à écarter des concurrents potentiels du marché pendant une période déterminée, au moyen de paiements inversés importants, puissent être contraires à l’article 101, paragraphe 1, TFUE, qu’ils aillent ou non au-delà du champ d’application des brevets de ce laboratoire.

189. En outre, ainsi que le fait valoir à juste titre la Commission, il ressort de plusieurs points de l’arrêt attaqué que le Tribunal a entériné l’appréciation opérée par la Commission de divers éléments factuels qui étaient, en plus de ceux mentionnés au point 776 de l’arrêt attaqué, susceptibles de démontrer que Lundbeck ne pouvait ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement, voire même qu’elle était consciente dudit caractère anticoncurrentiel (104). Or, les requérantes ne remettent pas en cause, dans le cadre du présent pourvoi, les appréciations factuelles ainsi effectuées par le Tribunal, et il n’apparaît pas non plus que des éléments factuels pertinents aient été dénaturés par celui-ci.

190. Dans ces conditions, la deuxième branche du cinquième moyen doit également être rejetée.

c)      Sur les principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité

191. Dans le cadre de la troisième branche de leur cinquième moyen, les requérantes font valoir que, en confirmant l’infliction à Lundbeck d’une amende excédant un niveau symbolique, le Tribunal a méconnu les principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité.

192. Selon les requérantes, ces principes interdisent l’application rétroactive de l’interprétation nouvelle d’une disposition établissant une infraction, si cette interprétation n’était pas raisonnablement prévisible au moment où cette infraction a été commise. Or, tel serait précisément le cas de l’interprétation retenue par la Commission et validée par le Tribunal en l’espèce, selon laquelle des accords tels que les accords litigieux peuvent tomber sous le coup de l’interdiction édictée par l’article 101 TFUE.

193. Cette argumentation ne saurait prospérer.

194. Ainsi, il ressort certes de la jurisprudence invoquée par les requérantes que, si le principe de légalité des délits et des peines, désormais consacré à l’article 49 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ne saurait être interprété comme proscrivant la clarification graduelle des règles de la responsabilité pénale, ce principe s’oppose néanmoins à l’application rétroactive d’une interprétation jurisprudentielle d’une norme établissant une infraction dont le résultat n’était pas raisonnablement prévisible au moment où l’infraction a été commise, au vu notamment de l’interprétation retenue à cette époque dans la jurisprudence relative à la disposition légale en cause (105).

195. Toutefois, force est de constater que le Tribunal n’a commis aucune erreur en appliquant le critère de prévisibilité ainsi établi aux circonstances de la présente espèce et en constatant que, en l’occurrence, le principe de légalité des délits et des peines ne s’opposait pas à la sanction des accords litigieux sur la base de l’article 101 TFUE.

196. À cet égard, les requérantes répètent, tout d’abord, leur argument déjà évoqué plus haut (106) selon lequel les accords litigieux auraient impliqué la mise en œuvre de droits de propriété intellectuelle dans la poursuite d’un but légitime, en sorte que leur nature aurait été beaucoup plus complexe à saisir que celle des accords de répartition de marchés non déguisés. Partant, contrairement à l’affirmation du Tribunal au point 765 de l’arrêt attaqué, une lecture littérale de l’article 101, paragraphe 1, TFUE ne permettrait pas de comprendre que de tels accords seraient susceptibles de tomber sous le coup de l’interdiction édictée par cette disposition.

197. Il ressort toutefois, d’une part, des constatations du Tribunal déjà examinées plus haut que les accords litigieux avaient pour objet d’inciter les fabricants de génériques à s’abstenir d’entrer de manière indépendante sur le marché du citalopram pendant les périodes convenues, au moyen de paiements de la part de Lundbeck qui n’avaient d’autre contrepartie que ladite abstention (107). En d’autres termes, il a été convenu dans ces accords que Lundbeck payerait les fabricants de génériques pour qu’ils n’entrent pas sur le marché, ce qui fait desdits accords des accords d’exclusion du marché.

198. Or, en tant que partie à ces accords, Lundbeck ne pouvait ignorer que ses paiements n’avaient d’autre contrepartie de la part des fabricants de génériques que l’abstention de ces derniers d’entrer sur le marché pendant les périodes convenues. Partant, c’est sans commettre d’erreur que le Tribunal a pu constater, aux points 764 et 765 de l’arrêt attaqué, qu’il n’était pas imprévisible pour Lundbeck que les accords litigieux pouvaient tomber sous le coup de l’interdiction édictée à l’article 101 TFUE, puisqu’une lecture littérale de cette disposition permet tout à fait de comprendre que des accords entre concurrents visant à exclure certains d’entre eux du marché sont illégaux.

199. D’autre part, il découle également des développements déjà effectués plus haut que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l’arrière-plan des accords litigieux en termes de droit des brevets aurait pu les inciter à croire que ces accords seraient à l’abri de l’application du droit de la concurrence. En effet, il ressort d’une jurisprudence bien établie de la Cour qu’une transaction judiciaire aussi bien que les conditions de l’exercice d’un droit de propriété intellectuelle peuvent relever des interdictions édictées par l’article 101 TFUE (108).

200. Partant, contrairement aux allégations des requérantes, c’est à bon droit que le Tribunal a affirmé, aux points 766 à 770 de l’arrêt attaqué, que la circonstance que, dans le cas d’espèce, les accords litigieux avaient été conclus sous la forme de règlements à l’amiable portant sur des droits de propriété intellectuelle ne saurait permettre aux requérantes d’inférer que l’illégalité de ceux-ci au regard du droit de la concurrence était totalement nouvelle ou imprévisible.

201. En outre, contrairement à l’avis des requérantes, ce n’est pas parce que le cas d’espèce est le premier dans lequel la Commission a appliqué l’article 101 TFUE à des accords de règlement amiable de litiges de brevets entre un laboratoire de princeps et des fabricants de génériques dans le domaine pharmaceutique que cette application constitue une « orientation tout à fait nouvelle » qui ne saurait être regardée comme une clarification graduelle des conditions d’application de cette disposition au sens de la jurisprudence citée au point 194 des présentes conclusions. En effet, comme cela a déjà été constaté, il n’est pas requis, pour qualifier un accord de restriction de la concurrence par objet, que le même type d’accords ait déjà été condamné par le passé, ni qu’un accord doive être suffisamment nocif pour la concurrence à première vue ou sans aucun doute (109).

202. Les requérantes ne sauraient donc pas non plus se prévaloir du prétendu caractère « complexe » des accords litigieux pour arguer que la sanction de ces derniers au titre de l’article 101 TFUE n’aurait pas été prévisible. Il en va d’autant plus ainsi dans la mesure où la jurisprudence a précisé que l’exigence de prévisibilité de la loi ne s’oppose pas à ce que des personnes, et particulièrement des professionnels, soient amenés à recourir à des conseils éclairés pour évaluer les conséquences de leur comportement (110). De même, ainsi que cela a déjà été noté, il ressort de la jurisprudence que le fait que l’entreprise concernée aurait qualifié de manière juridiquement erronée son comportement sur lequel la constatation de l’infraction se fonde ne peut pas avoir pour effet de l’exonérer de l’infliction d’une amende pour autant qu’elle ne pût ignorer le caractère anticoncurrentiel dudit comportement (111).

203. Enfin, l’argumentation des requérantes selon laquelle le Tribunal n’a pas suffisamment expliqué ou clarifié la raison pour laquelle, à son avis, celles-ci devaient s’attendre à voir sanctionner les accords litigieux au titre de l’article 101 TFUE alors que le KFST et la Commission eux-mêmes nourrissaient des doutes à cet égard n’a pas non plus de chances de prospérer.

204. Ainsi, le Tribunal a indiqué, au point 772 de l’arrêt attaqué, qu’il ressortait clairement du communiqué de presse du KFST invoqué par les requérantes que les accords qui ont pour objet d’acheter l’exclusion du marché d’un concurrent sont anticoncurrentiels. De même, le Tribunal a noté, audit point, que la Commission avait pu peaufiner son approche à l’issue de son enquête sur le secteur pharmaceutique et saisir ainsi pleinement le caractère anticoncurrentiel d’accords tels que ceux concernés en l’espèce.

205. Or, contrairement à ce que semblent insinuer les requérantes, cette explication n’est pas non plus entachée d’erreurs sur le fond. Ainsi, comme cela a été noté (112), le caractère anticoncurrentiel d’un accord ne doit pas être évident à première vue ou sans aucun doute pour qu’un tel accord puisse être qualifié de restrictif de la concurrence par objet. Partant, le fait que la Commission ait besoin de mener des enquêtes approfondies avant de qualifier certains comportements de restrictions de concurrence ne saurait signifier que le caractère anticoncurrentiel de tels comportements n’est pas prévisible pour les opérateurs économiques qui y prennent part. Il en va d’autant plus ainsi que, comme le note à juste titre la Commission, contrairement à cette autorité, qui doit d’abord enquêter sur les faits, les opérateurs impliqués ont pleine connaissance de ces faits. Partant, en l’espèce, contrairement à la Commission, Lundbeck savait dès le début que les paiements de sa part en faveur des fabricants de génériques, prévues par les accords litigieux, n’avaient d’autre contrepartie que l’abstention de ces fabricants d’entrer sur le marché avec leurs produits.

206. Il résulte des considérations qui précèdent que la troisième branche du cinquième moyen doit également être rejetée, tout comme, par conséquent, le cinquième moyen dans son ensemble.

2.      Sur la confirmation du calcul du montant des amendes par le Tribunal (sixième moyen du pourvoi)

207. Par leur sixième moyen, les requérantes soutiennent, d’une part, que le Tribunal a commis une erreur en confirmant l’inclusion, par la Commission, aux fins du calcul du montant des amendes infligées à Lundbeck, de ventes de celle-ci qui n’étaient pas susceptibles d’avoir été affectées par les accords litigieux (sous a). D’autre part, les requérantes sont d’avis que le Tribunal a eu tort lorsqu’il a confirmé le taux de gravité retenu par la Commission pour le calcul du montant des amendes infligées à Lundbeck (sous b).

a)      Sur les ventes de Lundbeck prises en considération aux fins du calcul du montant des amendes

208. Il ressort des points 68 et 70 à 75 de l’arrêt attaqué ainsi que des considérants de la décision litigieuse auxquels ces points renvoient (113), que, pour le calcul du montant des amendes infligées à Lundbeck, la Commission a suivi la méthodologie générale décrite dans les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1/2003 (ci-après les « lignes directrices de 2006 ») (114), fondée sur la valeur des ventes du produit concerné réalisées par chaque participant à une entente dans le secteur géographique concerné. En outre, comme déjà indiqué ci-dessus (115), la Commission a infligé quatre amendes séparées à Lundbeck, étant donné que les six accords litigieux ont été considérés comme ayant donné lieu à quatre infractions distinctes, dans la mesure où les deux accords entre Lundbeck et Merck (GUK) ont été qualifiés d’infraction unique et continue, tout comme les deux accords entre Lundbeck et Arrow.

209. Partant, la Commission a pris en compte, pour le calcul de chaque amende, les ventes de citalopram de Lundbeck dans les marchés géographiques concernés par chacune de ces quatre infractions.

210. Dans le cadre de la première branche de leur sixième moyen, les requérantes font valoir que, en validant cette méthode de calcul du montant des amendes, le Tribunal a commis une erreur de droit.

211. D’après les requérantes, la Commission a eu tort d’intégrer l’ensemble des ventes de citalopram de Lundbeck réalisées pendant la durée des accords litigieux dans les secteurs géographiques concernés par ces accords (116) dans son calcul du montant des amendes, alors que certaines de ces ventes n’ont pas pu être affectées par les accords en question. La raison en serait que les fabricants de génériques n’auraient pas pu pénétrer les marchés de certains États membres pendant la durée des accords litigieux puisque, d’une part, ils n’auraient obtenu la délivrance d’une AMM dans un grand nombre de ces États qu’après l’expiration des accords et, d’autre part, le brevet de molécule du citalopram serait resté en vigueur en Autriche pendant une grande partie de leur durée, parce qu’il n’y a expiré qu’en avril 2003.

212. Or, de l’avis des requérantes, pour pouvoir tenir compte de ventes d’une entreprise aux fins du calcul du montant d’une amende selon la méthode en cause, la Commission doit examiner si ces ventes ont été effectivement affectées par l’infraction. Cela aurait signifié, en l’espèce, qu’il fallait procéder à un examen approfondi des perspectives concrètes des fabricants de génériques d’intégrer réellement le marché de chaque État membre concerné par les accords litigieux au cours de la durée de ceux-ci. En effet, si les fabricants de génériques ne pouvaient pas entrer sur le marché d’un État membre pendant la période pertinente, les ventes de Lundbeck dans cet État n’auraient pas non plus pu être affectées par les accords litigieux. Partant, il conviendrait d’exclure de la valeur des ventes de Lundbeck utilisée aux fins du calcul du montant de l’amende l’ensemble des ventes effectuées au cours de périodes pendant lesquelles les fabricants de génériques ne disposaient pas d’AMM dans les États membres concernés ou pendant lesquelles le brevet de molécule du citalopram était encore en vigueur en Autriche.

213. Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté cette argumentation en considérant, d’une part, au point 804 de l’arrêt attaqué, que, s’agissant d’infractions par objet, la Commission était en droit de se fonder sur l’ensemble de la portée géographique des accords litigieux aux fins du calcul du montant des amendes, sans procéder à un examen approfondi des perspectives concrètes d’entrée des fabricants de génériques dans chaque État concerné. D’autre part, le Tribunal a expliqué, au point 815 de l’arrêt attaqué, que l’argumentation en cause était à rejeter parce qu’elle revenait à nier la distinction existant entre la concurrence réelle et la concurrence potentielle, et le fait que l’article 101 TFUE protège tout autant cette dernière.

214. Or, contrairement à l’avis des requérantes, ces constatations ne sont entachées d’aucune erreur de droit.

215. Les requérantes font valoir que leur point de vue trouve appui aux points 6 et 13 des lignes directrices de 2006, aux termes desquels « la combinaison de la valeur des ventes en relation avec l’infraction et de la durée est considérée comme une valeur de remplacement adéquate pour refléter l’importance économique de l’infraction ainsi que le poids relatif de chaque entreprise participant à l’infraction », en sorte que la Commission utilise, lors de l’application de la méthode de calcul en cause, « la valeur des ventes de biens ou services, réalisées par l’entreprise, en relation directe ou indirecte avec l’infraction, dans le secteur géographique concerné » (117).

216. Toutefois, l’argumentation des requérantes, selon laquelle les ventes de citalopram effectuées par Lundbeck pendant la durée des accords litigieux dans des États couverts par le champ d’application de ceux-ci ne pourraient constituer des ventes « en relation avec l’infraction » au sens de ces dispositions que lorsque les fabricants de génériques disposaient d’une AMM pour leurs produits dans chacun des États concernés, ne saurait prospérer. Il en va de même de l’argumentation fondée sur la prétendue impossibilité de commercialiser du citalopram générique en Autriche pendant une partie de la durée des accords en raison de l’existence d’un brevet protégeant l’IPA de ce médicament.

217. Il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que le point 13 des lignes directrices de 2006 a pour objectif de retenir comme point de départ pour le calcul du montant de l’amende infligée à une entreprise un montant qui reflète l’importance économique de l’infraction et le poids de cette entreprise dans celle-ci. Par conséquent, si la notion de valeur des ventes visée au point 13 des lignes directrices de 2006 ne saurait, certes, s’étendre jusqu’à englober les ventes réalisées par l’entreprise en cause qui ne relèvent pas du champ d’application de l’entente reprochée, il serait toutefois porté atteinte à l’objectif poursuivi par cette disposition si cette notion s’entendait comme ne visant que le chiffre d’affaires réalisé avec les seules ventes pour lesquelles il est établi qu’elles ont réellement été affectées par cette entente (118).

218. En effet, limiter les ventes prises en considération aux fins du calcul d’une amende aux seules ventes pour lesquelles il est établi qu’elles ont réellement été affectées par une entente aurait pour effet de minimiser artificiellement l’importance économique de l’infraction commise par une entreprise donnée et conduirait à infliger une amende sans relation réelle avec le champ d’application de l’infraction en cause (119).

219. Il en va ainsi, notamment, parce que le fait de limiter les ventes prises en considération aux fins du calcul d’une amende aux seules ventes pour lesquelles il est établi qu’elles ont réellement été affectées par une entente reviendrait à méconnaître que l’un des principaux objectifs de nombreuses ententes est de parvenir à un effet de stabilisation qui favorise naturellement l’ensemble de l’activité des participants à l’entente sur le marché considéré. Or, si l’objectif illicite d’une entente s’étend à l’ensemble d’un marché, force est également, lors du calcul du montant de l’amende, de tenir compte de toutes les ventes qui ont été réalisées sur celui-ci (120).

220. En l’espèce, le but des accords litigieux a précisément consisté, ainsi que la Commission l’a constaté au considérant 1325 de la décision litigieuse et rappelé lors de l’audience dans la présente affaire, à protéger les ventes de citalopram de Lundbeck dans l’espace géographique concerné par chacun des accords litigieux.

221. En effet, ainsi que cela a été constaté ci-dessus, par ces accords, Lundbeck a éliminé le risque d’une entrée des fabricants de génériques sur l’ensemble des marchés concernés, en les incitant, au moyen de paiements, à abandonner, pendant les périodes convenues, leurs efforts en vue de préparer et de réaliser une entrée sur ces marchés avec leurs produits (121). Partant, Lundbeck a éliminé, par les accords litigieux, la concurrence potentielle des fabricants de génériques relative au citalopram (122).

222. Or, ainsi que le Tribunal l’a constaté à juste titre dans l’arrêt attaqué, le fait qu’un fabricant de génériques ne dispose pas encore d’AMM pour son produit dans un État donné n’empêche pas l’existence d’une concurrence potentielle entre ce fabricant et un laboratoire de princeps déjà actif dans la zone géographique en cause. En outre, le Tribunal a constaté que, en l’espèce, non seulement les fabricants de génériques étaient depuis longtemps en train de préparer sérieusement leur entrée sur le marché, mais qu’en plus soit ils disposaient déjà d’une AMM, soit ils avaient entamé des démarches pour en obtenir une à court ou moyen terme. Partant, chacune des entreprises génériques avait des possibilités réelles et concrètes pour obtenir ces AMM et ainsi accéder au marché du citalopram dans plusieurs pays de l’EEE dans un délai suffisamment court pour exercer une pression concurrentielle sur Lundbeck (123).

223. De la même manière, le fait que le brevet protégeant la molécule du citalopram ou ses procédés de fabrication originaux ait encore été en vigueur en Autriche pendant une partie de la durée des accords en cause (124) n’a pas empêché l’existence d’une concurrence potentielle dans cet État membre à ce moment-là. En effet, une telle concurrence potentielle peut s’exercer bien avant l’expiration d’un brevet protégeant le principe actif d’un médicament princeps, puisque les fabricants de médicaments génériques veulent être prêts pour entrer sur le marché au moment de cette expiration (125). Cela est d’autant plus valable dans un cas comme celui de l’espèce où les accords ont été conclus relativement peu de temps avant l’expiration du brevet protégeant le citalopram en Autriche et où les fabricants de génériques avaient, pour certains, déjà prévu d’obtenir des AMM dans ce pays à ce moment-là. Alpharma a d’ailleurs obtenu cette AMM pendant la durée de vigueur de son accord avec Lundbeck. Partant, les fabricants de génériques disposaient, même pendant le laps de temps pendant lequel le brevet protégeant la molécule du citalopram ou ses procédés de fabrication originaux était encore en vigueur en Autriche alors que les accords litigieux avaient déjà été conclus, de possibilités réelles et concrètes d’intégrer le marché dans cet État membre dans un délai suffisamment court pour exercer une pression concurrentielle sur Lundbeck (126).

224. Par conséquent, dans la mesure où Lundbeck a éliminé cette pression concurrentielle au moyen des accords litigieux pour l’ensemble de ses ventes sur les territoires et pendant les périodes concernés par ceux-ci, l’ensemble de ces ventes constituent également des ventes « en relation avec l’infraction » au sens des points 6 et 13 des lignes directrices de 2006.

225. En effet, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée ci-dessus (127), pour pouvoir prendre en compte des ventes aux fins du calcul du montant de l’amende infligée à une entreprise, il n’est pas déterminant qu’il soit avéré que chaque opération commerciale comptabilisée est réellement le résultat de l’entente en cause. Il suffit au contraire que celle-ci ait eu pour objet ou pour effet de fausser la concurrence sur le marché concerné où ces opérations ont eu lieu. Si tel est le cas, l’ensemble des ventes réalisées sur celui-ci doit en principe entrer dans le calcul du montant de l’amende (128).

226. Cela est valable indépendamment du point de savoir si c’est la concurrence effective ou, comme en l’espèce, la concurrence potentielle qui a été éliminée sur un certain marché. Comme l’a constaté le Tribunal, s’il était possible de payer des concurrents pour qu’ils arrêtent ou ralentissent le processus de préparation de leur entrée sur le marché, la concurrence effective n’aurait jamais lieu ou subirait des retards significatifs (129). Partant, c’est à juste titre que la Commission a affirmé lors de l’audience dans la présente affaire qu’une position consistant à soutenir que les amendes ne peuvent être infligées que pour la période pour laquelle la Commission peut démontrer qu’il est certain que la concurrence potentielle aurait pu se transformer en concurrence effective devait être rejetée.

227. L’adoption d’une telle position irait en effet totalement à l’encontre de l’effet utile de l’article 101 TFUE, puisqu’elle aurait pour conséquence de permettre aux entreprises d’éliminer la concurrence potentielle en toute impunité, au motif qu’il ne serait pas prouvé que les ventes réalisées sur le marché concerné par cette élimination ont réellement été affectées par l’infraction en cause et peuvent, par conséquent, être prises en compte aux fins du calcul du montant de l’amende.

228. Cela est d’autant plus vrai en l’espèce dans la mesure où, ainsi que l’a également noté à juste titre la Commission lors de l’audience dans la présente affaire, il est impossible de savoir si ce ne sont pas précisément les accords litigieux eux-mêmes qui ont incité les fabricants de génériques à s’abstenir de réaliser plus rapidement les démarches nécessaires à l’obtention d’une AMM pour leurs produits dans les États concernés par ces accords, ou si ce ne sont pas d’autres démarches de Lundbeck qui ont retardé la délivrance de telles AMM (130).

229. Enfin, contrairement aux allégations des requérantes, les modalités du calcul de la valeur des ventes de Lundbeck retenue aux fins du calcul du montant des amendes en l’espèce ne sont pas non plus incompatibles avec les précédents jurisprudentiels du Tribunal dans les affaires E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission (131), et Telefónica/Commission (132).

230. Ainsi, les requérantes font valoir, premièrement, que le Tribunal n’a pas suffisamment motivé la distinction qu’il a établie, au point 816 de l’arrêt attaqué, entre la présente affaire et l’affaire E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission, dans laquelle il a été reconnu que des barrières légales ou factuelles empêchaient l’existence de toute concurrence pendant une partie de la période considérée (133).

231. Le Tribunal a expliqué, audit point 816 de l’arrêt attaqué, que les circonstances de l’affaire E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission n’étaient pas comparables à celles de la présente affaire puisque, dans l’affaire E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission, toute concurrence aurait été impossible même en l’absence d’accord anticoncurrentiel pendant une partie de la période considérée en raison d’une législation nationale créant une situation de monopole de fait. En revanche, toujours selon le Tribunal, en l’espèce, les requérantes n’avaient pas démontré que, en l’absence des accords litigieux, la concurrence – même potentielle – entre elles et les fabricants de génériques aurait été impossible ou inexistante.

232. Selon les requérantes, ces constatations ne réfutent pas l’argument selon lequel les fabricants de génériques ont, tout comme les opérateurs en cause dans l’affaire E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission, de fait été empêchés de concurrencer Lundbeck sur les marchés des États pour lesquels ils ne disposaient pas d’AMM. Elles soutiennent que l’argument selon lequel la préparation de l’obtention d’une AMM relèverait déjà de l’existence d’une concurrence potentielle ne saurait à cet égard prospérer puisque, dans l’affaire E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission, la possibilité de préparer l’entrée sur le marché n’aurait pas non plus été considérée comme démontrant l’existence d’une concurrence potentielle au cours d’une période pendant laquelle l’existence d’un monopole empêchait encore les opérateurs concernés de pénétrer sur le marché en cause (134).

233. Or, ainsi que le souligne, en substance, la Commission, une situation dans laquelle une législation ou une circonstance de fait empêche toute concurrence, même potentielle, sur un marché n’est pas comparable à une situation dans laquelle un marché est ouvert à la concurrence, même si les opérateurs souhaitant entrer sur ce marché doivent remplir pour cela certaines conditions comme, par exemple, celle d’obtenir une AMM pour leurs produits.

234. En d’autres termes, en l’espèce, aucune législation ou circonstance de fait n’empêchait les fabricants de génériques d’effectuer les démarches pour obtenir une AMM et d’entrer sur les marchés concernés dès qu’ils en disposaient alors que, dans l’affaire E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission, les opérateurs étaient, indépendamment de leur volonté ou de leurs démarches, de droit ou de fait empêchés d’entrer sur les marchés en cause aussi longtemps que les barrières légales ou factuelles à l’entrée de ces marchés persistaient. Le Tribunal a donc aussi bien expliqué à suffisance de droit que considéré à juste titre que l’absence d’AMM en l’espèce n’équivalait aucunement à une barrière à l’entrée du marché excluant l’existence de toute concurrence, même potentielle, telles que les barrières concernées dans l’affaire E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission. Il en va de même de la situation en Autriche, où l’existence du brevet original, qui était déjà proche de sa date d’expiration, n’a pas empêché l’existence d’une concurrence potentielle entre les parties pour les raisons explicitées ci-dessus (135).

235. Deuxièmement, les circonstances de la présente affaire ne sont pas non plus comparables à celles de l’affaire Telefónica/Commission, également invoquées par les requérantes. En effet, dans cette dernière affaire, le Tribunal a considéré qu’il n’était pas établi que toutes les ventes prises en considération aux fins du calcul du montant de l’amende relevaient d’activités pour lesquelles les parties à un accord étaient des concurrentes potentielles, en sorte que cette question devait être réexaminée par la Commission (136). En revanche, en l’espèce, les requérantes n’ont pas remis en cause les constatations du Tribunal établissant que Lundbeck et les fabricants de génériques étaient des concurrents potentiels sur l’ensemble des marchés couverts par le champ d’application des accords litigieux (137).

236. Concernant, troisièmement, l’argument des requérantes selon lequel les effets d’une infraction peuvent, même dans le cas d’une infraction par objet, être pertinents pour le calcul du montant des amendes (138), il suffit de constater que, en vertu du point 22 des lignes directrices de 2006, la Commission tient compte non pas des effets, mais de la mise en œuvre ou non de l’infraction et que, en l’espèce, les requérantes ne contestent pas les constatations du Tribunal selon lesquelles les accords litigieux ont été mis en œuvre (139).

237. En outre, et en tout état de cause, il n’est aucunement démontré que, en l’espèce, les accords litigieux n’ont pas eu d’effets pendant les périodes pendant lesquelles les fabricants de génériques ne disposaient pas encore d’AMM pour leurs produits. Or, cela est pour le moins douteux dans la mesure où il est établi que ces accords ont précisément eu pour objet d’éliminer, pendant les périodes convenues, la concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques en incitant ces derniers à abandonner leurs efforts aux fins de la préparation de leur entrée sur le marché et, partant, aux fins de l’obtention d’une AMM (140).

238. Il s’ensuit que la première branche du sixième moyen doit être rejetée.

b)      Sur le taux de gravité retenu aux fins du calcul du montant des amendes

239. Conformément aux points 19 et suivants des lignes directrices de 2006, le montant de base de l’amende est lié à une proportion de la valeur des ventes, déterminée en fonction du degré de gravité de l’infraction, qui est apprécié au cas par cas en tenant compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce.

240. Il ressort du point 72 de l’arrêt attaqué ainsi que des considérants de la décision litigieuse auxquels celui-ci renvoie (141) que, en l’occurrence, la Commission a qualifié les infractions de « graves » en raison du fait qu’elles comportaient une exclusion du marché, de la part de marché élevée de Lundbeck s’agissant des produits en cause, de la portée géographique très large des accords litigieux et du fait que l’ensemble de ces accords avaient été mis en œuvre. Finalement, la Commission a fixé la proportion de la valeur des ventes à retenir aux fins du calcul du montant des amendes à 11 % pour les infractions dont la portée était l’ensemble de l’EEE, c’est-à-dire pour les accords conclus avec Merck, Alpharma et Ranbaxy, et à 10 % pour l’infraction constituée par les accords conclus avec Arrow, qui couvraient uniquement le Royaume-Uni et le Danemark (142).

241. Dans le cadre de la seconde branche de leur sixième moyen, les requérantes soutiennent que, en validant les taux de gravité ainsi retenus par la Commission, le Tribunal a commis des erreurs.

242. Avant de se pencher sur cette argumentation, il importe de rappeler que le Tribunal est seul compétent pour contrôler la façon dont la Commission a apprécié dans chaque cas particulier la gravité des comportements illicites. Dans le cadre du pourvoi, le contrôle de la Cour a pour objet, d’une part, d’examiner dans quelle mesure le Tribunal a pris en considération, d’une manière juridiquement correcte, tous les facteurs essentiels pour apprécier la gravité d’un comportement déterminé à la lumière de l’article 101 TFUE et de l’article 23 du règlement n° 1/2003, et, d’autre part, de vérifier si le Tribunal a répondu à suffisance de droit à l’ensemble des arguments invoqués au soutien de la demande de suppression de l’amende ou de réduction du montant de celle-ci (143).

243. En outre, il n’appartient pas à la Cour, lorsqu’elle se prononce sur des questions de droit dans le cadre d’un pourvoi, de substituer, pour des motifs d’équité, son appréciation à celle du Tribunal statuant, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, sur le montant des amendes infligées à des entreprises. Ainsi, ce n’est que dans la mesure où la Cour estimerait que le niveau de la sanction est non seulement inapproprié, mais également excessif, au point d’être disproportionné, qu’il y aurait lieu de constater une erreur de droit commise par le Tribunal (144).

244. Or, en l’espèce, il ressort, d’une part, des points 796 à 811 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a correctement pris en considération tous les facteurs essentiels pour apprécier la gravité des infractions en cause, à savoir la nature de restrictions de la concurrence par objet, la large portée géographique et la mise en œuvre de ces infractions ainsi que la part de marché importante de Lundbeck, et qu’il a également répondu à suffisance aux arguments contraires invoqués par les requérantes, ce que ces dernières ne contestent d’ailleurs pas.

245. D’autre part, au vu des éléments ainsi pris en considération, les taux de gravité retenus en l’espèce par la Commission et validés par le Tribunal n’apparaissent nullement disproportionnés, d’autant plus que, ainsi que celui-ci l’a constaté à juste titre au point 806 de l’arrêt attaqué, ces taux de gravité se situent plutôt en bas de l’échelle prévue au paragraphe 21 des lignes directrices de 2006.

246. Les arguments avancés par les requérantes dans le cadre du présent pourvoi ne sont pas susceptibles de remettre en cause ces considérations.

247. Ainsi, les requérantes font valoir, d’une part, que, en validant les taux de gravité fixés par la Commission, le Tribunal a omis de tenir correctement compte de l’étendue géographique des infractions en cause, puisque celle-ci aurait été limitée en raison du fait qu’une partie des marchés des États membres de l’EEE aurait en réalité été fermée aux fabricants de génériques pendant la durée des accords litigieux. Or, il ressort de l’examen de la première branche du présent moyen que cette argumentation repose sur des prémisses erronées (145).

248. D’autre part, les requérantes soutiennent qu’un taux de gravité sensiblement inférieur aurait dû être retenu en raison du fait que les infractions en cause n’auraient pas répondu à la définition d’« ententes ». Or, il ressort des considérations effectuées plus haut que ces infractions ont consisté en des accords ayant pour objet de payer des concurrents pour rester en-dehors du marché et que Lundbeck ne pouvait ignorer le caractère anticoncurrentiel d’une telle démarche (146). Partant, indépendamment du point de savoir ce qu’entendent les requérantes par « la définition d’entente », l’on ne voit pas pourquoi un taux de gravité inférieur aurait dû être fixé pour ce type de comportement.

249. Il résulte de ces considérations que la deuxième branche du sixième moyen doit aussi être rejetée, tout comme, par conséquent, ce moyen dans son entièreté.

C.      Conclusion

250. Puisque aucun des moyens invoqués par les requérantes ne saurait prospérer, le pourvoi doit être rejeté dans son ensemble.

V.      Dépens

251. Conformément à l’article 184, paragraphe 2, de son règlement de procédure, la Cour statue sur les dépens lorsqu’elle rejette le pourvoi.

252. Tout d’abord, en vertu de l’article 138, paragraphes 1 et 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens ; si plusieurs parties succombent, la Cour décide du partage des dépens. La Commission ayant conclu en ce sens et les requérantes ayant succombé en leurs moyens, ces dernières doivent être condamnées à supporter leurs propres dépens ainsi que les dépens exposés par la Commission. Ayant introduit le pourvoi ensemble, elles devront supporter ces dépens solidairement.

253. Ensuite, conformément à l’article 184, paragraphe 4, de son règlement de procédure, la Cour peut décider qu’une partie intervenante en première instance qui a participé à la phase écrite ou orale de la procédure devant la Cour supportera ses propres dépens. L’EFPIA ayant participé aux phases écrite et orale de la présente procédure de pourvoi, il y a donc lieu de condamner celle-ci à supporter ses propres dépens.

254. Enfin, il résulte des dispositions combinées de l’article 140, paragraphe 1, et de l’article 184, paragraphe 1, du règlement de procédure, que les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Partant, il convient de décider que le Royaume-Uni supportera ses propres dépens.

VI.    Conclusion

255. Sur la base des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer comme suit :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      H. Lundbeck A/S et Lundbeck Ltd supportent, solidairement, leurs propres dépens ainsi que les dépens exposés par la Commission européenne.

3)      La European Federation of Pharmaceutical Industries and Associations et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord supportent chacun leurs propres dépens.


1      Langue originale : le français.


2      Voir, en ce sens, considérants 9 et 10 de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (JO 2001, L 311, p. 67), ainsi que arrêts du 3 décembre 1998, Generics (UK) e.a. (C‑368/96, EU:C:1998:583, point 4), et du 16 octobre 2003, AstraZeneca (C‑223/01, EU:C:2003:546, points 42 et 52) ; voir, également, arrêt du Tribunal du 15 septembre 2015, Novartis Europharm/Commission (T‑472/12, EU:T:2015:637, points 62 et 63), ainsi que nos conclusions dans l’affaire Warner-Lambert Company (C‑423/17, EU:C:2018:822, points 1 et suiv.).


3      Arrêts du 31 octobre 1974, Centrafarm et de Peijper (15/74, EU:C:1974:114, point 9) ; du 18 février 1992, Commission/Italie (C‑235/89, EU:C:1992:73, point 17) ; du 27 octobre 1992, Generics et Harris Pharmaceuticals (C‑191/90, EU:C:1992:407, point 23), ainsi que du 5 décembre 1996, Merck et Beecham (C‑267/95 et C‑268/95, EU:C:1996:468, points 30 et 31).


4      Arrêt du 25 février 1986, Windsurfing International/Commission (193/83, EU:C:1986:75, points 89 et 92).


5      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, points 52 et 81) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 67 à 75).


6      Voir considérants 5 et 81 de la décision de la Commission C (2013) 3803 final, du 19 juin 2013, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT.39226 – Lundbeck) (ci‑après la « décision litigieuse »).


7      Arrêt du Tribunal du 8 septembre 2016, Lundbeck/Commission (T-472/13, EU:T:2016:449) (ci‑après « l’arrêt attaqué »). Outre l’arrêt attaqué, la décision litigieuse a donné lieu aux arrêts du Tribunal, également sous pourvoi, du 8 septembre 2016, dans les affaires Sun Pharmaceutical Industries et Ranbaxy (UK)/Commission (T‑460/13, non publié, EU:T:2016:453 ; affaire C‑586/16 P, pendante) ; Arrow Group et Arrow Generics/Commission (T‑467/13, non publié, EU:T:2016:450 ; affaire C‑601/16 P, pendante) ; Generics (UK)/Commission (T‑469/13, non publié, EU:T:2016:454 ; affaire C‑588/16 P, pendante) ; Merck/Commission (T-470/13, non publié, EU:T:2016:452 ; affaire C‑614/16 P, pendante), ainsi que Xellia Pharmaceuticals et Alpharma/Commission (T-471/13, non publié, EU:T:2016:460 ; affaire C‑611/16 P, pendante).


8      C‑307/18, EU:C:2020:52.


9      Voir décision de la Commission C (2014) 4955 final, du 9 juillet 2014, relative à une procédure d’application des articles 101 et 102 TFUE [affaire AT.39612 – Périndopril (Servier)] ; cette décision a donné lieu aux arrêts du Tribunal, actuellement sous pourvoi, du 12 décembre 2018, dans les affaires Biogaran/Commission (T‑677/14, EU:T:2018:910 ; affaire C‑207/19 P, pendante) ; Teva UK e.a./Commission (T-679/14, non publié, EU:T:2018:919 ; affaire C‑198/19 P, pendante) ; Lupin/Commission (T-680/14, non publié, EU:T:2018:908 ; affaire C‑144/19 P, pendante) ; Mylan Laboratories et Mylan/Commission (T‑682/14, non publié, EU:T:2018:907 ; affaire C‑197/19 P, pendante) ; Krka/Commission (T-684/14, non publié, EU:T:2018:918 ; affaire C‑151/19 P, pendante) ; Servier e.a./Commission (T-691/14, EU:T:2018:922 ; affaires C‑176/19 P et C‑201/19 P, pendantes) ; Niche Generics/Commission (T‑701/14, non publié, EU:T:2018:921 ; affaire C‑164/19 P, pendante), ainsi que Unichem Laboratories/Commission (T-705/14, non publié, EU:T:2018:915 ; affaire C‑166/19 P, pendante).


10      Point 1 de l’arrêt attaqué.


11      Prévus par le règlement (CEE) no 1768/92 du Conseil, du 18 juin 1992, concernant la création d’un certificat complémentaire de protection pour les médicaments (JO 1992, L 182, p. 1), désormais remplacé par le règlement (CE) n° 469/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 6 mai 2009, concernant le certificat complémentaire de protection pour les médicaments (JO 2009, L 152, p. 1).


12      Points 15 à 17 de l’arrêt attaqué.


13      Points 18 à 21 de l’arrêt attaqué ; les brevets litigieux ont été respectivement délivrés par l’OEB en 2001 (amide) et en 2003 (iode), ainsi que dans plusieurs États membres et par l’OEB en 2002 (cristallisation). Enfin, le brevet pour la fabrication du citalopram par distillation en film a été délivré au Royaume-Uni en 2001 et révoqué en 2004, et un brevet analogue a été délivré au Danemark en 2002.


14      Point 22 de l’arrêt attaqué.


15      Points 3, 4 et 25 à 29 de l’arrêt attaqué.


16      Points 30 et 31 de l’arrêt attaqué.


17      Points 5 à 8 et 33 à 36 de l’arrêt attaqué.


18      Points 37 à 39 de l’arrêt attaqué.


19      Points 9 à 11 et 40 à 45 de l’arrêt attaqué.


20      Points 12 à 14 et 46 à 48 de l’arrêt attaqué.


21      Points 71 et 75 de l’arrêt attaqué.


22      Voir ci-dessus, note en bas de page 7 des présentes conclusions.


23      C‑591/16 P, non publiée, EU:C:2016:967.


24      C‑591/16 P, non publiée, EU:C:2017:532.


25      Voir ci-dessus, note en bas de page 7 des présentes conclusions.


26      C‑307/18, EU:C:2020:52.


27      Voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, points 30 à 32), ainsi que nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, point 57 et jurisprudence citée).


28      Voir point 127 de l’arrêt attaqué ainsi que, pour les dates respectives de l’accord des brevets et de la conclusion des accords litigieux, ci-dessus, points 9 et 11 à 17 des présentes conclusions.


29      Voir points 120 à 122, 128, 130 et 132 de l’arrêt attaqué.


30      Arrêts du 20 janvier 2016, Toshiba Corporation/Commission (C‑373/14 P, EU:C:2016:26, points 31, 32 et 34), ainsi que du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, point 45) ; voir, également, arrêts du Tribunal du 28 juin 2016, Portugal Telecom/Commission (T‑208/13, EU:T:2016:368, point 181), et Telefónica/Commission (T‑216/13, EU:T:2016:369, point 221).


31      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, points 36 et 37) ; voir, également, en ce sens, arrêt du 28 février 1991, Delimitis (C‑234/89, EU:C:1991:91, point 21) ; s’agissant des conditions pour la qualification d’une entreprise en tant que concurrent potentiel par la Commission, voir arrêts du Tribunal du 15 septembre 1998, European Night Services e.a./Commission (T‑374/94, T‑375/94, T‑384/94 et T‑388/94, EU:T:1998:198, point 137) ; du 14 avril 2011, Visa Europe et Visa International Service/Commission (T‑461/07, EU:T:2011:181, points 68, 166 et 167), ainsi que du 29 juin 2012, E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission (T‑360/09, EU:T:2012:332, points 85 et 86) ; voir, également, point 10 des lignes directrices de la Commission sur l’applicabilité de l’article 101 TFUE aux accords de coopération horizontale (JO 2011, C 11, p. 1).


32      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, points 34 et 46).


33      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, point 48).


34      Arrêt du Tribunal du 1er juillet 2010, AstraZeneca/Commission (T‑321/05, EU:T:2010:266, point 362).


35      Voir point 121 de l’arrêt attaqué ; voir, également, arrêt du Tribunal du 12 décembre 2018, Servier e.a./Commission (T‑691/14, EU:T:2018:922, point 359).


36      Voir sur ce point déjà nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, point 67).


37      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, points 52 et 81) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 73 et 74).


38      Voir points 117, 119, 390 et 487 de l’arrêt attaqué.


39      Arrêts du 31 octobre 1974, Centrafarm et de Peijper (15/74, EU:C:1974:114, point 9) ; du 18 février 1992, Commission/Italie (C‑235/89, EU:C:1992:73, point 17) ; du 27 octobre 1992, Generics et Harris Pharmaceuticals (C‑191/90, EU:C:1992:407, point 23), ainsi que du 5 décembre 1996, Merck et Beecham (C‑267/95 et C‑268/95, EU:C:1996:468, points 30 et 31).


40      Arrêt du 25 février 1986, Windsurfing International/Commission (193/83, EU:C:1986:75, points 89 et 92).


41      Voir, sur ce point, nos conclusions dans l’affaire Warner-Lambert Company (C‑423/17, EU:C:2018:822, point 57).


42      Voir points 124 à 129 de l’arrêt attaqué.


43      Voir sur ce point déjà nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 40 à 42 et 72).


44      Voir sur ce point déjà nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, point 125).


45      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, point 50) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, point 83).


46      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, point 51) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 84 et 85).


47      Voir arrêt du Tribunal du 15 septembre 1998, European Night Services e.a./Commission (T‑374/94, T‑375/94, T‑384/94 et T‑388/94, EU:T:1998:198, point 139), invoqué par les requérantes, ainsi que arrêt du Tribunal du 29 juin 2012, E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission (T‑360/09, EU:T:2012:332, point 89).


48      Voir point 162 de l’arrêt attaqué, lu en combinaison, notamment, avec les points 120 à 132 dudit arrêt.


49      JO 2014, C 89, p. 3.


50      Voir ordonnance du 29 septembre 2010, EREF/Commission (C‑74/10 P et C‑75/10 P, non publiée, EU:C:2010:557, points 41 et 42 ainsi que jurisprudence citée).


51      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, point 44) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, point 88).


52      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, points 54 et suiv.) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 86 et 87).


53      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, points 42, 56 et 57) ; voir, également, arrêts du Tribunal du 14 avril 2011, Visa Europe et Visa International Service/Commission (T‑461/07, EU:T:2011:181, point 169), et du 12 décembre 2018, Servier e.a./Commission (T‑691/14, EU:T:2018:922, points 342 et suiv.), ainsi que nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 60, 86, 87 et 94).


54      Voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./Commission (C‑603/13 P, EU:C:2016:38, point 72).


55      Arrêts du 25 janvier 2007, Dalmine/Commission (C‑407/04 P, EU:C:2007:53, points 49 et 63), ainsi que du 27 avril 2017, FSL e.a./Commission (C‑469/15 P, EU:C:2017:308, point 38) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire FSL e.a./Commission (C‑469/15 P, EU:C:2016:884, points 30 et suiv.).


56      Ordonnance du 12 juin 2019, OY/Commission (C‑816/18 P, non publiée, EU:C:2019:486, point 4 [6]), ainsi que arrêts du Tribunal du 15 mars 2000, Cimenteries CBR e.a./Commission (T‑25/95, T‑26/95, T‑30/95 à T‑32/95, T‑34/95 à T‑39/95, T‑42/95 à T‑46/95, T‑48/95, T‑50/95 à T‑65/95, T‑68/95 à T‑71/95, T‑87/95, T‑88/95, T‑103/95 et T‑104/95, EU:T:2000:77, point 1053) ; du 16 juin 2015, FSL e.a./Commission (T‑655/11, EU:T:2015:383, point 183), et du 14 mars 2018, Kim e.a./Conseil et Commission (T‑533/15 et T‑264/16, EU:T:2018:138, point 224).


57      Voir, notamment, points 122 et 126 de l’arrêt attaqué ainsi que considérants 149 et 157, et notes en bas de page 292 et 322 de la décision litigieuse.


58      Voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 27 septembre 2006, Archer Daniels Midland/Commission (T‑59/02, EU:T:2006:272, point 277) ; du 8 juillet 2008, Lafarge/Commission (T‑54/03, non publié, EU:T:2008:255, point 379) ; du 11 juillet 2014, Esso e.a./Commission (T‑540/08, EU:T:2014:630, point 75), ainsi que du 16 juin 2015, FSL e.a./Commission (T‑655/11, EU:T:2015:383, point 208).


59      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, point 53) ; voir sur ce point, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 89 à 93).


60      Voir ci-dessus, points 44 à 64, et spécialement points 55 à 58, des présentes conclusions.


61      Voir ci-dessus, points 86 à 93 des présentes conclusions.


62      Voir, spécialement, point 171 de l’arrêt attaqué.


63      Voir points 313 et 314 de l’arrêt attaqué.


64      Voir ci-dessus, note en bas de page 2 des présentes conclusions.


65      Voir point 179 de l’arrêt attaqué ainsi que, concernant spécifiquement Merck (GUK), points 172, 230 et 231 de l’arrêt attaqué ; concernant Arrow, points 173, 174, 246, 249 et 269 de l’arrêt attaqué ; concernant Alpharma, points 175, 176 et 290 de l’arrêt attaqué, et, concernant Ranbaxy, points 177, 178 et 312 à 326 de l’arrêt attaqué.


66      Arrêt du 30 janvier 2020 (C‑307/18, EU:C:2020:52).


67      Voir ci-dessus, point 33 des présentes conclusions.


68      Arrêt du 30 janvier 2020 (C‑307/18, EU:C:2020:52).


69      Voir, notamment, point 335 de l’arrêt attaqué.


70      Voir, notamment, points 352, 358 à 360, 363, 369, 401, 412, 414, 425, 428, 431 et 490 de l’arrêt attaqué.


71      Voir points 478 à 500, et spécialement points 491 et 495, de l’arrêt attaqué.


72      Arrêt du 30 janvier 2020 (C‑307/18, EU:C:2020:52).


73      Voir arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, points 78, 81, 83 à 89, 92, 93, 97, 100 et 102) ; voir sur ces points, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 108 à 120 et 130 à 140).


74      Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, points 85 à 95).


75      Voir, notamment, points 361, 363, 414, 430 et 431 de l’arrêt attaqué.


76      Arrêts du 7 février 2013, Slovenská sporiteľňa (C‑68/12, EU:C:2013:71, point 20), et du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, point 88).


77      Voir, en ce sens, point 387 de l’arrêt attaqué ainsi qu’arrêt du Tribunal du 27 juillet 2005, Brasserie nationale e.a./Commission (T‑49/02 à T‑51/02, EU:T:2005:298, point 81).


78      Arrêt du 30 janvier 2020 (C‑307/18, EU:C:2020:52).


79      Voir ci-dessus, point 33 des présentes conclusions.


80      Voir ci-dessus, points 66 à 113 des présentes conclusions (examen du quatrième moyen de pourvoi, portant sur l’existence d’une concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques).


81      Arrêt du 30 janvier 2020 (C‑307/18, EU:C:2020:52, point 100).


82      Voir, sur ce point, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 121 à 129).


83      Voir, notamment, points 363, 369, 390, 401, 429 et 474 de l’arrêt attaqué.


84      Arrêt du 30 janvier 2020 (C‑307/18, EU:C:2020:52).


85      Voir ci-dessus, point 33 des présentes conclusions.


86      Si la juridiction de renvoi dans l’affaire Generics (UK) e.a. partait du principe que les accords en cause dans ladite affaire interdisaient aux fabricants de génériques concernés de poursuivre leurs contestations du brevet en cause pendant la durée convenue, il n’est pas certain que ces accords contenaient des clauses explicites de non-contestation de ce brevet (voir points 13, 14 et 21 de l’arrêt de la Cour dans ladite affaire du 30 janvier 2020, C‑307/18, EU:C:2020:52).


87      Voir points 23 à 48 de l’arrêt attaqué.


88      Voir sur ce point, notamment, ci-dessus, points 49 à 58 et 140 des présentes conclusions.


89      Voir à cet égard, concernant spécifiquement l’accord conclu entre Lundbeck et Merck (GUK) pour le Royaume-Uni, points 574 à 576 de l’arrêt attaqué.


90      Voir points 427, 486 à 488, 498, 769 et 770 de l’arrêt attaqué.


91      Arrêts du 27 septembre 1988, Bayer et Maschinenfabrik Hennecke (65/86, EU:C:1988:448, point 14 à 16), ainsi que du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, point 80) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, point 133).


92      Arrêts du 13 juillet 1966, Consten et Grundig/Commission (56/64 et 58/64, EU:C:1966:41, p. 500) ; du 18 février 1971, Sirena (40/70, EU:C:1971:18, point 9) ; du 8 juin 1982, Nungesser et Eisele/Commission (258/78, EU:C:1982:211, point 28) ; du 25 février 1986, Windsurfing International/Commission (193/83, EU:C:1986:75, point 46) ; du 27 septembre 1988, Bayer et Maschinenfabrik Hennecke (65/86, EU:C:1988:448, point 16), ainsi que du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, points 49, 79, 81 et 82) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 108 à 112).


93      Voir, pour une analyse de ces arrêts, note en bas de page 84 de nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28). L’arrêt du 8 juin 1982, Nungesser et Eisele/Commission (258/78, EU:C:1982:211, points 56 à 58), également invoqué par les requérantes et non traité à ladite note, ne mène pas à une autre conclusion, puisqu’il se borne à confirmer que, en matière de droits d’obtention végétale, la concession d’une licence exclusive peut être compatible avec l’actuel article 101 TFUE dans des cas spécifiques.


94      Voir points 354, 360, 383, 384, 412, 475, 497, 718 et 835 de l’arrêt attaqué.


95      Voir arrêt du 11 septembre 2014, CB/Commission (C‑67/13 P, EU:C:2014:2204, points 53 et 54, ainsi que jurisprudence citée) ; voir, également, nos conclusions dans les affaires T-Mobile Netherlands e.a. (C‑8/08, EU:C:2009:110, points 38 et suiv., ainsi que jurisprudence citée), et Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, point 158), ainsi que conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire CB/Commission (C‑67/13 P, EU:C:2014:1958, points 40 et suiv., ainsi que jurisprudence citée), et conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire Budapest Bank e.a. (C‑228/18, EU:C:2019:678, point 46).


96      Voir ordonnance du 12 mars 2020, EMB Consulting e.a./BCE (C‑571/19 P, non publiée, EU:C:2020:208, point 16 et jurisprudence citée).


97      Dans le cadre de cet examen, le Tribunal a constaté, au point 569 de l’arrêt attaqué, que la Commission n’avait pas établi à suffisance de droit que les restrictions contenues dans l’accord entre Merck (GUK) et Lundbeck pour le Royaume-Uni (point 12 des présentes conclusions, ainsi que points 25 à 29 de l’arrêt attaqué) allaient au-delà du champ d’application des brevets de cette dernière. Le Tribunal a toutefois considéré, aux points 570 à 577 de l’arrêt attaqué, que ce constat ne pouvait avoir d’incidence sur la légalité de la décision litigieuse, puisque, d’une part, l’accord en question était en tout état de cause anticoncurrentiel et, d’autre part, Merck (GUK) n’avait en tout état de cause plus aucune incitation, en raison des dispositions dudit accord, prises dans leur contexte, à se procurer du citalopram sous forme d’IPA auprès de tiers ou à vendre du citalopram sous forme de produits finis autre que celui de Lundbeck, même si elle était en principe libre de le faire en vertu de cet accord.


98      Voir points 354, 515, 801 et 840 de l’arrêt attaqué.


99      Voir ci-dessus, point 69 des présentes conclusions et jurisprudence citée, ainsi que, en ce qui concerne l’interprétation des termes des accords litigieux, arrêt du 29 octobre 2015, Commission/ANKO (C‑78/14 P, EU:C:2015:732, point 23).


100      Voir ci-dessus, points 132 à 143 et 150 à 157 des présentes conclusions.


101      Règlement du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité (JO 2003, L 1, p. 1).


102      Voir arrêt du 18 juin 2013, Schenker & Co. e.a. (C‑681/11, EU:C:2013:404, points 37 et 38, ainsi que jurisprudence citée).


103      Voir, notamment, ci-dessus, points 133 et 152 des présentes conclusions.


104      Voir, notamment, point 368 (« les preuves contemporaines aux accords litigieux montrent que les requérantes avaient l’intention d’utiliser “une grosse pile de [USD]” pour exclure les génériques du marché ») ou encore points 524, 528 et 839 de l’arrêt attaqué (constatation selon laquelle des éléments factuels confirment l’existence d’une stratégie de la part de Lundbeck pour retarder l’arrivée des génériques sur le marché, dont faisaient partie les accords litigieux).


105      Arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, points 217 et 218).


106      Voir ci-dessus, points 182 et 184 des présentes conclusions.


107      Voir ci-dessus, point 133 des présentes conclusions.


108      Voir ci-dessus, point 152 des présentes conclusions.


109      Voir ci-dessus, points 156 et 157 des présentes conclusions.


110      Voir arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 219), également cité au point 767 de l’arrêt attaqué.


111      Voir la jurisprudence citée ci-dessus, au point 176 des présentes conclusions.


112      Voir ci-dessus, point 157 des présentes conclusions.


113      Considérants 1316 à 1358 de la décision litigieuse.


114      JO 2006, C 210, p. 2.


115      Voir ci-dessus, point 19 des présentes conclusions.


116      Voir, pour les champs d’application géographiques respectifs des accords litigieux, ci-dessus, points 12 à 17 des présentes conclusions.


117      Souligné par nos soins.


118      Voir arrêts du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, non publié, EU:C:2013:464, point 76) ; du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, point 57) ; du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission (C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 148) ; du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 53), ainsi que du 7 septembre 2016, Pilkington Group e.a./Commission (C‑101/15 P, EU:C:2016:631, point 19) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire Pilkington Group e.a./Commission (C‑101/15 P, EU:C:2016:258, points 26 et 31 à 33).


119      Voir, en ce sens, arrêts du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, non publié, EU:C:2013:464, point 77) ; du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, point 58), ainsi que du 9 juillet 2015, InnoLux/Commission (C‑231/14 P, EU:C:2015:451, point 62) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire Pilkington Group e.a./Commission (C‑101/15 P, EU:C:2016:258, point 34).


120      Voir, en ce sens, arrêt du 7 septembre 2016, Pilkington Group e.a./Commission (C‑101/15 P, EU:C:2016:631, point 22), ainsi que nos conclusions dans l’affaire Pilkington Group e.a./Commission (C‑101/15 P, EU:C:2016:258, point 35).


121      Voir ci-dessus, point 133 des présentes conclusions.


122      Voir, notamment, ci-dessus, points 140 et 141 des présentes conclusions.


123      Voir ci-dessus, points 101 à 112 des présentes conclusions.


124      Au considérant 109 de la décision litigieuse, la Commission a indiqué que, en Autriche, la protection du brevet original couvrait non pas la molécule du citalopram, mais seulement les procédés originaux pour la produire, en sorte que des fabricants de génériques auraient en principe pu entrer sur le marché dès l’expiration de la protection réglementaire des données (voir, sur le cadre juridique à ce dernier égard, arrêt du 28 juin 2017, Novartis Europharm/Commission, C‑629/15 P et C‑630/15 P, EU:C:2017:498, points 2 et suiv.) s’ils avaient trouvé un autre procédé de fabrication industriellement exploitable. Toutefois, aux considérants 111 et 827, ainsi qu’à la note en bas de page 1124 de la décision litigieuse, la Commission se réfère à la protection de la molécule en Autriche et, de manière générale, il semble que la Commission soit partie du principe que la protection du brevet original n’expirait en Autriche qu’en 2003 (voir, notamment, note en bas de page 644 de la décision litigieuse).


125      Voir, à cet égard, point 163 de l’arrêt attaqué ainsi que arrêts du 6 décembre 2012, AstraZeneca/Commission (C‑457/10 P, EU:C:2012:770, point 108), et du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52, point 51) ; voir, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 76 et 84).


126      Voir, au regard de ce critère pour déterminer s’il existe une concurrence potentielle malgré l’existence d’un brevet, ci-dessus, point 59 des présentes conclusions. Sur l’obtention d’AMM en Autriche par les fabricants de génériques, voir points 176 et 227 de l’arrêt attaqué.


127      Voir jurisprudence citée aux points 217 à 219 des présentes conclusions.


128      Voir sur ce point déjà nos conclusions dans l’affaire Pilkington Group e.a./Commission (C‑101/15 P, EU:C:2016:258, point 36).


129      Point 171 de l’arrêt attaqué.


130      Voir, à cet égard, le considérant 171 de la décision litigieuse.


131      Arrêt du 29 juin 2012 (T‑360/09, EU:T:2012:332).


132      Arrêt du 28 juin 2016 (T‑216/13, EU:T:2016:369).


133      Voir arrêt du 29 juin 2012, E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission (T‑360/09, EU:T:2012:332, points 88 et suiv.).


134      Arrêt du 29 juin 2012, E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission (T‑360/09, EU:T:2012:332, points 90 à 93).


135      Voir ci-dessus, point 223 des présentes conclusions.


136      Voir arrêt du 28 juin 2016, Telefónica/Commission (T‑216/13, EU:T:2016:369, points 290 et suiv.).


137      Voir ci-dessus, points 37 à 113 des présentes conclusions (examen du quatrième moyen des requérantes, tiré de l’absence de concurrence potentielle entre Lundbeck et les fabricants de génériques).


138      Les requérantes s’appuient à cet égard sur le point 31 de l’arrêt du 4 juin 2009, T‑Mobile Netherlands e.a. (C‑8/08, EU:C:2009:343).


139      Voir points 399 et 805 de l’arrêt attaqué.


140      Voir ci-dessus, point 133 des présentes conclusions. Voir sur ce point, également, nos conclusions dans l’affaire Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:28, points 196 à 199).


141      Considérants 1331 et 1332 de la décision litigieuse.


142      Voir ci-dessus, points 12 à 17 des présentes conclusions.


143      Arrêts du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission (C‑185/95 P, EU:C:1998:608, point 128) ; du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 244), ainsi que du 26 septembre 2018, Infineon Technologies/Commission (C‑99/17 P, EU:C:2018:773, point 192).


144      Arrêts du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission (C‑185/95 P, EU:C:1998:608, point 129) ; du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 245) ; du 30 mai 2013, Quinn Barlo e.a./Commission (C‑70/12 P, non publié, EU:C:2013:351, point 57), ainsi que du 26 janvier 2017, Villeroy & Boch Austria/Commission (C‑626/13 P, EU:C:2017:54, point 86).


145      Voir, notamment, ci-dessus, points 211, 212, 222, 223, 228, 233 et 234 des présentes conclusions.


146      Voir ci-dessus, points 133, 181 à 190 et 196 à 202 des présentes conclusions.