Language of document : ECLI:EU:C:2012:653

ORDONNANCE DE LA COUR (première chambre)

22 octobre 2012 (*)

«Renvoi préjudiciel – Non-lieu à statuer»

Dans l’affaire C‑252/11,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Krajský súd v Prešove (Slovaquie), par décision du 7 avril 2011, parvenue à la Cour le 23 mai 2011, dans la procédure

Erika Šujetová

contre

Rapid life životná poisťovňa a.s.,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. A. Borg Barthet, M. Ilešič, M. Safjan (rapporteur) et Mme M. Berger, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: M. A. Calot Escobar,

l’avocat général entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 6, paragraphe 1, et 7, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO L 95, p. 29).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Šujetová à Rapid life životná poisťovňa a.s. (ci-après «Rapid life») au sujet de la légalité d’une sentence arbitrale enjoignant à Mme Šujetová de payer une somme d’argent à cette société ainsi que des frais d’arbitrage.

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

3        Le 12 juin 2007, Mme Šujetová a conclu avec Rapid life un contrat d’assurance, l’évènement assuré étant son décès. Ainsi qu’il ressort du dossier, les conditions générales faisant partie de ce contrat prévoyaient, en particulier, que tout litige né dudit contrat devait être résolu par la voie d’un arbitrage devant un tribunal arbitral.

4        Après avoir payé la première prime à la date de la conclusion du contrat en cause, Mme Šujetová a décidé de résilier ce dernier. À l’issue d’un entretien avec un employé de Rapid life, il lui a été indiqué que, pour résilier le contrat, il lui suffisait de cesser de verser les primes, ce qu’elle a fait.

5        Estimant qu’une somme de 23,93 euros restait due au titre de primes non payées, Rapid life a saisi le tribunal arbitral de Košice (Slovaquie) d’une demande de paiement. Le 30 juin 2010, ce tribunal arbitral a notifié à Mme Šujetová une sentence arbitrale lui enjoignant de payer la somme de 23,93 euros ainsi que des frais d’arbitrage s’élevant à 230 euros. Mme Šujetová s’est vu également informer de l’extinction du contrat d’assurance.

6        Contestant l’objectivité du tribunal arbitral de Košice, Mme Šujetová a saisi l’Okresný súd Stará Ľubovňa, sur le lieu de son domicile, d’une demande d’annulation de la sentence arbitrale. En réponse à cette action, Rapid life a demandé que l’affaire soit renvoyée devant l’Okresný súd Košice où son siège social est situé. À l’appui de sa demande, cette société a invoqué l’article 88, paragraphe 2, du code de procédure civile slovaque prévoyant que les affaires concernant l’invalidité des sentences arbitrales relèvent toujours de la compétence du tribunal dans le ressort duquel s’est déroulée la procédure arbitrale.

7        Le 5 octobre 2010, l’Okresný súd Stará Ľubovňa s’est reconnu compétent pour connaître de l’affaire.

8        Saisi d’un appel interjeté par Rapid life contre cette dernière décision, le Krajský súd v Prešove a estimé que la solution du litige au principal dépendait de l’interprétation des dispositions pertinentes de la directive 93/13.

9        Dans ces conditions, le Krajský súd v Prešove a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Les articles 6, paragraphe 1, et 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 [...] s’opposent-ils à l’application de dispositions de droit national qui prévoient que la juridiction territorialement compétente pour examiner une sentence arbitrale est toujours et exclusivement le tribunal dans le ressort duquel se trouve le siège du tribunal arbitral ou dans le ressort duquel s’est déroulée la procédure arbitrale conformément à la convention d’arbitrage ou à la clause compromissoire, même dans l’hypothèse où le tribunal parvient à la conclusion que cette convention d’arbitrage ou clause compromissoire est abusive au sens de l’article 3, paragraphe 1, de [ladite] directive?

2)      S’il est répondu par la négative à la première question, les articles 6, paragraphe 1, et 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 [...] s’opposent-ils à l’application d’une disposition de droit national qui prévoit que le tribunal doit, après annulation éventuelle de la sentence arbitrale, poursuivre la procédure au fond (c’est-à-dire statuer sur les prétentions faisant l’objet de la procédure initiale devant le tribunal arbitral) sans examiner à nouveau sa compétence territoriale par rapport à cette procédure, alors que si le droit ou la prétention avaient été invoqués dès le début contre le consommateur devant un juge et non une juridiction arbitrale, ce serait le tribunal du domicile du consommateur qui aurait été territorialement compétent?»

 La procédure devant la Cour

10      Par courrier du 30 juillet 2012, parvenu au greffe de la Cour le 3 août 2012, Rapid life a informé la Cour d’un règlement à l’amiable intervenu entre les parties au litige au principal. Ce courrier faisait également état du fait que Mme Šujetová avait déposé devant l’Okresný súd Stará Ľubovňa un mémoire par lequel elle avait retiré son recours ainsi que du fait que Rapid life avait approuvé ce retrait.

11      À la suite de cette lettre, la Cour, par courrier du 20 août 2012, a demandé au Krajský súd v Prešove de confirmer que Mme Šujetová s’était désistée de son recours et de prendre position sur les conséquences de ce désistement éventuel en ce qui concerne la procédure préjudicielle.

12      Par courrier parvenu au greffe le 17 septembre 2012, la juridiction de renvoi a confirmé que Mme Šujetová avait «introduit sa demande de retrait [...] par acte déposé à l’Okresný súd Stará Ľubovňa le 30 mars 2012», tout en estimant que l’affaire au principal n’était pas devenue sans objet. À cet égard, la juridiction de renvoi a souligné que l’acte par lequel Mme Šujetová s’est désistée de son recours avait été déposé devant la juridiction de première instance et que, à ce stade, c’était à elle, juridiction d’appel, qu’il appartenait de résoudre «la question de savoir quel [était] le tribunal territorialement compétent (en vertu de la loi) pour statuer sur la demande de retrait».

 Sur la demande de décision préjudicielle

13      Selon une jurisprudence constante, la procédure instituée par l’article 267 TFUE est un instrument de coopération entre la Cour et les juridictions nationales, grâce auquel la première fournit aux secondes les éléments d’interprétation du droit de l’Union qui leur sont nécessaires pour la solution du litige qu’elles sont appelées à trancher (voir, notamment, arrêts du 16 juillet 1992, Meilicke, C-83/91, Rec. p. I‑4871, point 22, et du 15 septembre 2011, Unió de Pagesos de Catalunya, C‑197/10, non encore publié au Recueil, point 16).

14      Il ressort ainsi à la fois des termes et de l’économie de l’article 267 TFUE que la procédure préjudicielle présuppose qu’un litige soit effectivement pendant devant les juridictions nationales, dans le cadre duquel elles sont appelées à rendre une décision susceptible de prendre en considération l’arrêt préjudiciel (arrêt du 20 janvier 2005, García Blanco, C‑225/02, Rec. p. I‑523, point 27).

15      En effet, la justification du renvoi préjudiciel est non pas la formulation d’opinions consultatives sur des questions générales ou hypothétiques, mais le besoin inhérent à la solution effective d’un contentieux (voir ordonnance du 10 juin 2011, Mohammad Imran, C‑155/11 PPU, non encore publiée au Recueil, point 21 et jurisprudence citée).

16      En l’occurrence, il ressort des courriers adressés à la Cour par la juridiction de renvoi et par Rapid life que Mme Šujetová a retiré son recours devant l’Okresný súd Stará Ľubovňa, Rapid life ayant approuvé ledit retrait.

17      Dès lors, force est de constater que le litige au principal est devenu sans objet.

18      En effet, il est constant que les questions préjudicielles portent sur la compétence territoriale d’une juridiction nationale saisie d’une demande d’annulation d’une sentence arbitrale dans le contexte d’un accord contractuel entre les parties prévoyant la compétence d’un tribunal arbitral. Ce problème faisait l’objet de l’affaire pendante devant la juridiction de renvoi qui avait été saisie dans le cadre d’une contestation de la légalité de ladite sentence.

19      Cependant, du fait du retrait de son recours par Mme Šujetová, lesdites questions ne se posent plus.

20      Il résulte des considérations qui précèdent qu’il n’y a pas lieu de statuer sur la demande de décision préjudicielle.

 Sur les dépens

21      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) ordonne:

Il n’y a pas lieu de statuer sur la demande de décision préjudicielle présentée par le Krajský súd v Prešove (Slovaquie), par décision du 7 avril 2011 dans l’affaire C‑252/11.

Signatures


* Langue de procédure: le slovaque.