Language of document : ECLI:EU:C:2015:529

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO MENGOZZI

présentées le 3 septembre 2015 (1)

Affaire C‑155/14 P

Evonik Degussa GmbH,

AlzChem AG, anciennement AlzChem Trostberg GmbH, anciennement AlzChem Hart GmbH,

contre

Commission européenne

«Pourvoi – Ententes – Marchés de la poudre et des granulés de carbure de calcium ainsi que des granulés de magnésium dans une partie importante de l’EEE – Fixation de prix, partage des marchés et échange d’informations – Présomption d’influence déterminante – Renversement – Comportement d’une filiale contraire aux instructions de sa société mère»





1.        La présente affaire a pour objet un pourvoi introduit par Evonik Degussa GmbH (ci-après «Degussa») et AlzChem AG (2) (ci-après «AlzChem») contre l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne Evonik Degussa et AlzChem/Commission (3) (ci-après l’«arrêt attaqué»).

2.        Cette affaire donne une nouvelle fois l’occasion à la Cour de se prononcer sur la question de l’imputation à une société mère du comportement anticoncurrentiel de sa filiale. La Cour est notamment appelée à clarifier davantage à quelles conditions il est possible de renverser la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante (ci-après la «présomption capitalistique»), développée dans la jurisprudence pour l’imputation à une société mère des infractions aux règles de concurrence commises par une filiale dont elle détient la totalité ou la quasi-totalité du capital.

3.        La question fondamentale qui se pose dans la présente affaire est celle de savoir si la présomption capitalistique est renversée dans un cas où est apportée la preuve qu’une filiale détenue à 100 % et qui était sur le point d’être cédée a participé à une entente en contradiction flagrante avec des instructions expresses et précises données par ses sociétés mères de ne pas participer à de telles activités anticoncurrentielles. Outre les précisions relatives aux conditions concernant le renversement de la présomption capitalistique, dans la présente affaire la Cour pourra aussi apporter des éclaircissements sur la méthodologie à appliquer dans l’analyse des éléments et des arguments apportés pour renverser cette présomption.

I –    Les antécédents du litige

4.        Par la décision C(2009) 5791 final du 22 juillet 2009 (4) (ci-après la «décision litigieuse»), la Commission européenne a constaté que les principaux fournisseurs de carbure de calcium et de magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier avaient enfreint l’article 81, paragraphe 1, CE (devenu article 101, paragraphe 1, TFUE) et l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3), en participant, durant la période allant du 22 avril 2004 au 16 janvier 2007, à une infraction unique et continue (5). La Commission avait ouvert la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision litigieuse à la suite d’une demande d’immunité déposée par Akzo Nobel NV au titre de la communication sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (ci-après la «communication sur la clémence») (6). Les requérantes ont également déposé une demande de clémence au titre de la même communication.

5.        Dans la décision litigieuse, la Commission a constaté que les requérantes avaient participé à l’infraction pour une période de quatre mois, comprise entre le 22 avril et le 30 août 2004 (7). Leur responsabilité pour l’infraction a été constatée exclusivement en raison de la participation directe à celle-ci de membres du personnel de SKW Stahl-Technik GmbH & Co. KG (ci‑après «SKW») (8) qui, pendant ladite période, était une filiale détenue à 100 % par les requérantes (9). Le 30 août 2004, les requérantes ont cédé SKW à Arques Industrie AG, devenue Gigaset AG (ci-après «Gigaset») (10), avec effet économique rétroactif au 1er janvier 2004.

6.        En raison de leur participation à l’infraction, la Commission, à l’article 2, sous g) et h), de la décision litigieuse, a infligé aux requérantes, d’une part, une amende de 1,04 million d’euros, à payer solidairement avec SKW, et, d’autre part, une amende de 3,64 millions d’euros, pour le paiement de laquelle elles ont été désignées comme solidairement responsables.

7.        Dans ladite décision, la Commission a également infligé une amende solidaire à SKW et à sa nouvelle société mère, Gigaset, pour leur participation à l’infraction pendant la période successive, comprise entre le 1er septembre 2004 et le 16 janvier 2007.

II – La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

8.        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 octobre 2009, les requérantes ont demandé, à titre principal, l’annulation de la décision litigieuse en ce qui les concerne et, à titre subsidiaire, la réduction du montant de leur amende et la réformation de la décision litigieuse.

9.        Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a partiellement fait droit au recours. D’abord, il a constaté que la Commission avait commis une erreur en augmentant, au titre de la récidive, l’amende imposée à AlzChem (11). Ensuite, il a constaté que, en choisissant le niveau de réduction du montant de l’amende le moins élevé prévu dans la communication sur la clémence (12), la Commission avait violé cette communication (13). Puis, il a constaté que, en utilisant dans le calcul de l’amende un multiplicateur de 0,5 correspondant à une participation à l’infraction de six mois, alors que les requérantes n’y avaient participé que pendant quatre mois, la Commission avait violé le principe de proportionnalité (14). Enfin, il a constaté que, en omettant de tenir compte d’un droit d’entrée dans le cadre du calcul de la responsabilité solidaire de SKW, la Commission avait violé le principe d’égalité de traitement (15). Le Tribunal a rejeté le recours pour le surplus.

10.      Dans ces conditions, le Tribunal a, d’abord, annulé l’article 2, sous g) et h), de la décision litigieuse en ce qu’il visait les requérantes.

11.      Ensuite, aux points 287 à 289 de l’arrêt attaqué, en exerçant sa compétence de pleine juridiction, le Tribunal a réformé les amendes imposées aux requérantes pour leur participation à l’infraction et a infligé les amendes suivantes (16):

–        aux requérantes solidairement: 2,49 millions d’euros, étant précisé qu’il sera considéré qu’elles se sont acquittées de cette amende à concurrence des sommes versées par SKW au titre de l’amende qui lui a été infligée dans la décision litigieuse, et

–        à Degussa, seule, 1,24 million d’euros.

III – La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

12.      Par leur pourvoi, les requérantes demandent à la Cour:

–        d’annuler l’arrêt attaqué pour autant qu’il leur fait grief et d’annuler la décision litigieuse pour autant qu’elle les concerne;

–        à titre subsidiaire, de réduire les amendes qui leur ont été infligées dans la décision litigieuse et, à titre encore plus subsidiaire, de réformer la décision litigieuse en ce sens que SKW est solidairement responsable de l’intégralité des amendes infligées aux requérantes;

–        à titre encore plus subsidiaire, d’annuler l’arrêt attaqué et de renvoyer l’affaire devant le Tribunal, et

–        de condamner la Commission aux dépens.

13.      La Commission demande à la Cour:

–        de rejeter le pourvoi, et

–        de condamner les requérantes aux dépens de l’instance.

14.      Les parties ont exposé leurs positions respectives par écrit et lors de l’audience qui s’est tenue le 4 juin 2015.

IV – Analyse

15.      Au soutien de leur pourvoi, les requérantes invoquent cinq moyens, les quatrième et cinquième moyens étant soulevés à titre subsidiaire.

16.      Toutefois, lors de l’audience, à la suite d’une question, les requérantes ont communiqué que, au vu de l’arrêt prononcé par la Cour, après le dépôt de leur recours, dans les affaires Commission e.a/Siemens Österreich e.a. (17), elles renonçaient à leur deuxième moyen (18).

A –    Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 81 CE ainsi que des principes de la responsabilité personnelle, de la présomption d’innocence et de la responsabilité pour faute

1.      Argumentation des parties

17.      Par leur premier moyen, qui vise les points 70 à 119 de l’arrêt attaqué, les requérantes font valoir que le Tribunal a violé l’article 81 CE et les principes de la responsabilité personnelle, de la présomption d’innocence et de la responsabilité pour faute en ce qu’il leur a, à tort, imputé le comportement anticoncurrentiel de leur filiale SKW, alors que, dans le cadre d’un cas très particulier, elles avaient exceptionnellement réussi à renverser la présomption capitalistique. En rejetant leurs arguments, le Tribunal aurait appliqué un critère erroné pour le renversement de cette présomption et aurait retenu des exigences trop élevées en méconnaissant son caractère réfragable.

18.      D’abord, les requérantes reprochent au Tribunal d’avoir rejeté à tort, aux points 102 à 107 de l’arrêt attaqué, leur argumentation selon laquelle la circonstance que SKW avait participé à l’entente litigieuse en méconnaissance d’instructions explicites de leur part de ne pas participer à ce type d’activités démontrerait qu’elles n’exerçaient pas d’influence déterminante sur SKW. Ainsi, d’une part, un comportement d’une «filiale voyou» («rogue subsidiary») en contradiction flagrante avec les instructions de la société mère, tel que le comportement adopté par SKW en l’espèce, démontrerait l’absence d’influence déterminante et renverserait donc clairement la présomption capitalistique.

19.      D’autre part, les considérations du Tribunal aux points 106 et 107 de l’arrêt attaqué au regard des déclarations sous serment de MM. S. (19) et N. (20) ‐ à l’époque des faits, respectivement, directeur («Vorstand») d’AlzChem et directeur commercial de SKW ‐ méconnaîtraient la portée de l’imputation de la responsabilité au titre de l’article 81 CE. Pour procéder à l’imputation du comportement infractionnel aux requérantes, le Tribunal se serait contenté d’une influence hypothétique sur SKW alors que, selon une jurisprudence constante, pour une telle imputation, ne serait pas suffisante la possibilité d’exercer une influence déterminante, mais serait nécessaire l’exercice effectif d’une telle influence. Pour établir l’exercice d’une influence effective, il faudrait non seulement que la société mère émette une instruction, mais également que la filiale l’applique. Le Tribunal aurait ainsi fondé l’imputation de l’infraction sur une responsabilité objective sans faute, en violation des principes de la responsabilité personnelle, de la présomption d’innocence et de la responsabilité pour faute.

20.      En outre, les requérantes contestent l’analyse contenue aux points 101 et 102 de l’arrêt attaqué selon laquelle, sur la base de la constatation que les liens les unissant antérieurement à SKW n’avaient subi aucune modification en 2004, le Tribunal conclut au rejet de leur affirmation selon laquelle, en 2004, elles n’exerçaient pas d’influence déterminante sur SKW. Cette appréciation serait entachée d’une double erreur. D’une part, le Tribunal se serait limité à apprécier les rapports entre SKW et les requérantes au regard de la répartition des parts sociales et du personnel dirigeant sans analyser comment ces rapports étaient organisés de manière concrète. D’autre part, les requérantes ne devraient prouver aucune modification de leurs liens avec SKW, dès lors qu’elles n’auraient à aucun moment exercé d’influence déterminante sur cette filiale.

21.      Enfin, les requérantes font grief au Tribunal d’avoir rejeté à tort leur argument tiré de l’absence d’influence déterminante de leur part sur SKW alors que cette dernière gérait son activité de manière autonome, que son activité économique n’avait jamais fait partie de leurs activités opérationnelles essentielles et que, elles-mêmes, depuis le premier jour, étaient occupées à procéder à sa cession. En particulier aux points 84 à 87, 88 et 89, 95 à 97 et 108 à 113 de l’arrêt attaqué, le Tribunal se serait fondé uniquement sur une influence théorique éventuelle des requérantes sur SKW pour leur imputer l’infraction, aux points 93, 94 et 98 de l’arrêt attaqué, il aurait appliqué erronément la charge de la preuve et, aux points 84 à 87, il aurait dénaturé des éléments de preuve.

22.      La Commission considère que la circonstance que la société mère ait donné des instructions confirmerait le rapport général de supériorité hiérarchique avec la filiale et, partant, l’existence de liens démontrant la présence d’une unité économique. Le non-respect d’instructions de ne pas participer à des ententes contraires aux règles de concurrence ne suffirait pas pour renverser la présomption capitalistique. Il ne s’agirait que d’une violation ponctuelle. D’ailleurs, l’existence d’une unité économique serait le résultat d’une appréciation globale. Selon la Commission, rien n’empêcherait le Tribunal de tirer d’une période antérieure aux comportements litigieux, en l’espèce la période antérieure au 1er janvier 2004, des conclusions sur la période d’infraction. La présomption capitalistique aurait en outre été confirmée par une série d’indices supplémentaires et de considérations qui n’auraient rien de spéculatif.

2.      Analyse

a)      Observations liminaires

23.      Il résulte d’une jurisprudence constante qu’une infraction aux règles de concurrence commise par une filiale peut être imputée à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques. En effet, dans une telle situation, la société mère et sa filiale faisant partie d’une même unité économique et formant ainsi une seule entreprise au sens de l’article 81 CE, la Commission peut adresser une décision imposant des amendes à la société mère sans qu’il soit requis d’établir l’implication personnelle de cette dernière dans l’infraction (21).

24.      Dans le cas particulier où une société mère détient la totalité ou la quasi‐totalité du capital de sa filiale ayant commis l’infraction, il existe une présomption réfragable (la présomption capitalistique) selon laquelle cette société mère exerce effectivement une influence déterminante sur sa filiale (22).

25.      Dans ces conditions, il suffit que la Commission prouve que la totalité ou la quasi-totalité du capital d’une filiale est détenue par sa société mère pour présumer que cette dernière exerce une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale. La Commission sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme tenue solidairement au paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché (23).

26.      Afin de renverser la présomption capitalistique, il incombe à une société mère de soumettre à l’appréciation du juge de l’Union tout élément relatif aux liens organisationnels, économiques et juridiques entre elle-même et sa filiale de nature à démontrer qu’elles ne constituent pas une seule entité économique (24). Pour établir si une filiale détermine de façon autonome son comportement sur le marché, il convient de prendre en considération l’ensemble des éléments pertinents relatifs à ces liens unissant la filiale à la société mère, lesquels peuvent varier selon les cas et ne sauraient donc faire l’objet d’une énumération exhaustive (25).

27.      Ainsi, lorsqu’il examine les éléments présentés en vue de renverser la présomption capitalistique, le Tribunal est tenu d’apprécier tout élément relatif aux liens organisationnels, économiques et juridiques entre la société mère et sa filiale susceptible d’établir que cette dernière se comportait de manière autonome par rapport à sa société mère et que ces deux sociétés ne constituaient pas une entité économique unique (26). Si, considérées individuellement, certaines preuves peuvent être insuffisantes pour renverser la présomption en cause, il convient d’évaluer, dans leur ensemble, les preuves présentées par la société mère pour déterminer si cet ensemble est suffisant pour renverser la présomption (27). Dans ce contexte, il convient de prendre en considération les conséquences que ces liens existant entre la société mère et la filiale ont, dans la réalité économique, sur le comportement effectif sur le marché (28).

28.      À cet égard, il convient toutefois de rappeler que, au stade du pourvoi, il ne revient pas à la Cour de réexaminer l’ensemble des éléments de preuve et de substituer son appréciation à celle du Tribunal. En effet, le Tribunal est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. Cependant, lorsque le Tribunal a constaté ou a apprécié les faits, la Cour est compétente pour exercer un contrôle sur la qualification juridique de ces faits et les conséquences de droit qui en ont été tirées par le Tribunal (29).

29.      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’analyser l’argumentation avancée par les requérantes à l’appui du premier moyen de leur pourvoi, laquelle vise exclusivement l’analyse du Tribunal rejetant les arguments qu’elles ont avancés afin de renverser la présomption capitalistique.

b)      Sur la méthodologie «déductive» utilisée par le Tribunal

30.      Il convient, tout d’abord, d’analyser le grief, mentionné au point 20 des présentes conclusions, contestant l’approche retenue par le Tribunal aux points 101 et 102 de l’arrêt attaqué. En effet, ce grief a un caractère préalable car il met en cause la méthodologie suivie par le Tribunal dans son raisonnement visant à écarter les arguments invoqués par les requérantes pour renverser la présomption capitalistique.

31.      Dans l’arrêt attaqué, avant d’examiner dans le détail les différents arguments des requérantes visant à renverser la présomption capitalistique, le Tribunal a relevé, à titre liminaire, que, lors de l’audience, celles-ci avaient précisé qu’elles soutenaient n’avoir jamais exercé une influence déterminante sur SKW depuis son acquisition en février 2001, mais que cela était d’autant plus le cas pour la période postérieure au 1er janvier 2004, pendant laquelle elles s’étaient concentrées sur les négociations concernant la vente de SKW (30).

32.      En se fondant sur cette prémisse, le Tribunal a effectué une analyse en deux étapes des arguments avancés par les requérantes.

33.      D’une part, aux points 79 à 99 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a apprécié ces arguments en relation avec la période antérieure au 1er janvier 2004. À la suite de cette appréciation, il a conclu, au point 99 de l’arrêt attaqué, que rien dans l’argumentation des requérantes ou dans le dossier ne démontrait que, antérieurement au 1er janvier 2004, elles n’exerçaient pas une influence déterminante sur la politique commerciale de SKW.

34.      D’autre part, au point 101 dudit arrêt, le Tribunal a constaté qu’il ne ressortait pas du dossier ‐ et que les requérantes n’alléguaient même pas ‐ que les liens organisationnels, économiques et juridiques les unissant antérieurement à leur filiale auraient subi une quelconque modification en 2004.

35.      Dans ces conditions, au point 102 de l’arrêt attaqué, en appliquant ce que l’on pourrait appeler une «méthodologie déductive», le Tribunal, à défaut d’une modification dans les liens unissant SKW aux requérantes, a transposé les conclusions tirées en ce qui concerne la période antérieure au 1er janvier 2004 à la période postérieure à cette date, laquelle incluait la période infractionnelle concernant les requérantes, comprise entre le 22 avril et le 30 aout 2004, date de la vente définitive de SKW à Gigaset. Au même point 102, le Tribunal a ainsi conclu que l’affirmation des requérantes selon laquelle, en 2004, elles n’exerçaient pas une influence déterminante sur SKW ne pouvait pas être acceptée.

36.      Les requérantes contestent le raisonnement effectué par le Tribunal aux points 101 et 102 de l’arrêt attaqué et font valoir, d’une part, que le Tribunal n’aurait pas tenu compte de la réalité des liens les unissant à SKW et, d’autre part, que, afin de renverser la présomption capitalistique, elles n’étaient aucunement tenues de démontrer qu’il y aurait eu un changement en 2004 dans les liens organisationnels, économiques et juridiques les unissant à SKW.

37.      À cet égard, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence mentionnée aux points 23 à 25 des présentes conclusions, l’imputation à une société mère d’une infraction commise par une filiale se fonde sur la considération que, eu égard, notamment, aux liens organisationnels, économiques et juridiques existant entre ces deux entités, elles constituent, au moment où l’infraction est commise, une même unité économique et, ainsi, une seule entreprise au sens de l’article 81 CE.

38.      C’est donc au moment où l’infraction est commise qu’il est nécessaire que ces deux entités constituent une unité économique afin que le comportement infractionnel de la filiale puisse être imputé à la société mère et c’est donc en référence à la période infractionnelle qu’il y a lieu d’examiner les liens unissant la société mère et la filiale et leur fonctionnement concret afin d’établir si, lorsque le comportement infractionnel a eu lieu, la première exerçait effectivement une influence déterminante sur la seconde.

39.      Dans la même perspective, l’infraction peut être imputée à la société mère en application de la présomption capitalistique – qui est une présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante –, si celle-ci détient la totalité (ou la quasi-totalité) du capital de la filiale pendant la période infractionnelle (31). Par conséquent, pour renverser cette présomption, c’est en référence à la période infractionnelle, et non à une autre période, que la société mère doit apporter des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer qu’elle-même et sa filiale ne constituaient pas, à ce moment-là, une seule entité économique.

40.      Il s’ensuit de tout ce qui précède que l’analyse relative à l’exercice effectif de l’influence déterminante doit concerner la période infractionnelle et que c’est ainsi, en principe, par rapport à cette période, que la Commission et le Tribunal doivent apprécier les éléments apportés par la société mère pour renverser la présomption capitalistique.

41.      Les considérations qui précèdent ne préjugent cependant pas de la possibilité pour la Commission ou le Tribunal d’utiliser, dans le cadre de leur appréciation, un raisonnement de type déductif. En effet, il n’est pas exclu que, dans certains cas spécifiques, des conclusions concernant une période antérieure puissent être valides également pour une période postérieure.

42.      Toutefois, lorsque l’on veut utiliser une telle méthodologie déductive, j’estime qu’il convient d’y procéder avec une certaine prudence. En effet, une telle approche ne peut pas faire abstraction du fait que c’est par référence à la période infractionnelle qu’il y a lieu de vérifier l’exercice effectif d’une influence déterminante de la société mère sur la filiale. Il s’ensuit que les conclusions relatives à la réalité des liens organisationnels, économiques et juridiques existant entre ces deux entités à un moment déterminé ne peuvent pas être automatiquement transposées à une autre période. Elles doivent, au contraire, être nécessairement appréciées dans le contexte factuel propre à la période pertinente, à savoir à la période infractionnelle, contexte qui n’est pas nécessairement le même que celui d’une période antérieure.

43.      Or, force est de constater que, en l’espèce, le contexte factuel pertinent propre à la période antérieure au 1er janvier 2004 et celui de la période successive à cette date, lequel incluait la période infractionnelle, n’étaient pas les mêmes. En effet, ainsi que l’ont fait valoir les requérantes à plusieurs reprises, dans la période postérieure au 1er janvier 2004, le contexte factuel était caractérisé, contrairement à celui prévalant avant cette date, par l’existence de négociations relatives à la vente de SKW dans lesquelles les requérantes étaient occupées.

44.      Dans ces conditions, et à la lumière des considérations effectuées aux points 41 et 42 des présentes conclusions, j’estime que le Tribunal aurait commis une erreur si, en appliquant la méthodologie déductive, il avait transposé de manière automatique à la période infractionnelle les conclusions auxquelles il est arrivé au regard des liens unissant les requérantes et SKW avant le 1er janvier 2004, sans apprécier ces liens dans le contexte factuel propre à ladite période infractionnelle.

45.      À cet égard, j’observe que la lecture de la première phrase du point 102 de l’arrêt attaqué pourrait amener à penser, à première vue, que le Tribunal est arrivé à la conclusion de l’exercice effectif d’influence déterminante des requérantes sur SKW, durant la période postérieure au 1er janvier 2004, exclusivement sur la base des conclusions auxquelles il est parvenu au point 101 du même arrêt, en procédant à son raisonnement «déductif».

46.      Toutefois, j’estime qu’une lecture d’ensemble des points 102 à 107 de l’arrêt attaqué permet de considérer que, en réalité, cela n’a pas été le cas et que le Tribunal a procédé à une analyse des conclusions qu’il avait tirées en ce qui concerne les liens unissant les requérantes à SKW pendant la période antérieure au 1er janvier 2004, dans le cadre du contexte factuel particulier, invoqué par les requérantes comme étant spécifique à la période infractionnelle. Il ressort en effet de ces points que le Tribunal a considéré les arguments des requérantes concernant la réalité des liens organisationnels, économiques et juridiques dans la situation dans laquelle SKW se trouvait en plein cœur d’un processus de vente, ce qui, selon l’argumentation des requérantes, avait créé le vide de pouvoirs dans le cadre duquel a eu lieu le comportement de SKW en violation flagrante des instructions de ses sociétés mères.

47.      Enfin, je ne peux pas éviter de constater la contradiction existant dans l’argumentation des requérantes lorsque, d’une part, elles affirment n’avoir jamais exercé d’influence déterminante sur SKW, mais que, d’autre part, elles font référence à un «vide de pouvoirs» créé par le processus de vente de SKW, qui aurait permis ledit comportement de SKW.

48.      Il découle, à mon avis, des considérations qui précèdent que le grief visant les points 101 et 102 de l’arrêt attaqué, mentionné au point 20 des présentes conclusions, doit être rejeté.

c)      Sur le comportement en contradiction flagrante avec les instructions de la société mère

49.      Il convient, ensuite, d’analyser le grief des requérantes tiré de ce que le Tribunal aurait commis une erreur en ne constatant pas que le comportement d’une filiale en contradiction flagrante avec des instructions explicites de sa société mère de ne pas participer à des conduites anticoncurrentielles, tel que le comportement tenu par SKW en l’espèce, démontrait l’absence d’influence déterminante sur la filiale et renversait ainsi la présomption capitalistique. Les requérantes visent spécifiquement l’analyse, effectuée par le Tribunal aux points 106 et 107 de l’arrêt attaqué, au regard des déclarations de MM. S. et N. mentionnées au point 19 des présentes conclusions et reprochent au Tribunal de s’être contenté d’une influence hypothétique pour l’imputation de l’infraction.

50.      En l’espèce, il est constant que tant en 2002 qu’en 2004 les requérantes avaient donné à SKW l’instruction précise de ne pas participer à des accords anticoncurrentiels sur le marché en cause. Il n’est pas non plus contesté que cette instruction a été ignorée par les responsables de SKW et que, donc, la participation à l’entente pour laquelle les requérantes ont été sanctionnées a eu lieu en violation de cette instruction explicite et précise.

51.      Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a, d’une part, considéré, aux points 90 à 92, que le fait qu’une telle instruction avait été donnée par les requérantes constituait un indice additionnel confirmant l’exercice de leur part d’une influence déterminante sur la filiale. D’autre part, aux points 106 et 107 dudit arrêt, le Tribunal a analysé les déclarations de MM. S. et N. susmentionnées et a considéré qu’elles ne démontraient pas que les requérantes n’exerçaient plus, en 2004, d’influence déterminante sur SKW.

52.      À cet égard, je dois d’abord relever qu’il est, en principe, vrai que la circonstance qu’une société mère donne des instructions à une filiale peut, en général, constituer un élément indiciaire qui est susceptible d’être pris en considération dans l’analyse visant à déterminer l’exercice effectif d’une influence déterminante (32). Toutefois, il ressort de la jurisprudence mentionnée aux points 23 et suivants des présentes conclusions, d’une part, que l’exercice de l’influence déterminante doit être effectif et, d’autre part, qu’il est possible de considérer que la filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché lorsqu’elle applique, pour l’essentiel, les instructions qui lui sont données par la société mère. C’est donc, en principe, l’application des instructions qui détermine l’effectivité de l’exercice de l’influence déterminante. Il ressort, d’ailleurs, des considérations faites au point 27 in fine des présentes conclusions qu’il n’est pas possible de faire abstraction, dans l’analyse des liens unissant la société mère et la filiale, de la réalité de leur comportement.

53.      Il peut être déduit, à mon avis, de ce qui précède que, dans une situation dans laquelle il est constant qu’une instruction précise et ponctuelle donnée par une société mère n’a manifestement pas été respectée par la filiale, la simple circonstance que cette instruction a été donnée ne saurait être qualifiée d’indice de l’exercice effectif d’une influence déterminante, tel que cela a été considéré par le Tribunal aux points 90 à 92 de l’arrêt attaqué (33). Bien au contraire, le fait que l’instruction n’a pas été respectée constitue, à mon avis, un élément en faveur de l’absence de l’effectivité de l’influence déterminante.

54.      Cela étant dit, la question soulevée par les requérantes est celle de savoir si une violation manifeste par une filiale d’instructions explicites et précises données par la société mère de ne pas participer à des activités anticoncurrentielles sur un marché spécifique est, en soi, susceptible de renverser la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante.

55.      À cet égard, il convient de rappeler que, dans l’arrêt Schindler Holding e.a./Commission (34), la Cour a jugé que le non-respect des instructions adressées par des sociétés mères à leurs filiales dans le cadre des «programmes de mise en conformité» («compliance programs»), de ne pas adopter des pratiques commerciales anticoncurrentielles n’interdit pas d’imputer aux sociétés mères la responsabilité des infractions au droit des ententes commises par leur filiale (35).

56.      Je dois toutefois observer que la présente affaire se distingue de l’affaire ayant donné lieu audit arrêt Schindler Holding e.a./Commission. En effet, à la différence des directives données dans le cadre d’un programme de mise en conformité, lesquelles s’inscrivent dans un plan général visant à éviter les violations du droit de la concurrence dans l’entreprise, l’instruction qui, en l’espèce, a été donnée par les requérantes en 2002 et, particulièrement, en 2004, était spécifique et précise et concernait un comportement sur un marché précis (36). Il s’ensuit que cette jurisprudence n’est pas nécessairement applicable de manière automatique au cas d’espèce.

57.      La présente espèce se différencie également, à mon avis, des cas communément appelés de l’«employée voyou» («rogue employee») ‐ auxquels les requérantes ont implicitement fait référence en qualifiant SKW de «filiale voyou» («rogue subsidiary») ‐ où la Cour a été confrontée à l’argument visant à éviter l’imputation du comportement infractionnel selon lequel la violation des règles de concurrence était attribuable à l’action individuelle de quelques employés (voyous) pris singulièrement (37).

58.      En effet, bien qu’il puisse y avoir une certaine analogie entre le cas d’un «employé voyou» et celui d’une «filiale voyou» (38), les deux situations ne me semblent pas nécessairement comparables. Ainsi, dans le cas de l’employé voyou, il s’agit d’imputer à l’entreprise des agissements dont les gérants principaux de l’entreprise n’avaient pas connaissance, mais qui, ayant été commis par des collaborateurs autorisés à agir pour le compte de l’entreprise, se sont produits à l’intérieur de la sphère de responsabilité de celle-ci (39). En revanche, la question de l’imputation à la société mère d’une infraction commise par une «filiale voyou» concerne l’imputation à une entité juridique donnée d’agissements infractionnels commis par une entité juridique différente. Pour une telle imputation, la jurisprudence a développé un critère spécifique, à savoir l’exercice effectif d’une influence déterminante, duquel découle l’existence d’une unité économique (40). C’est seulement si ce critère spécifique est satisfait qu’il peut y avoir l’imputation d’un comportement infractionnel commis par une entité juridique à une autre. C’est donc par rapport à ce critère qu’il convient d’analyser le cas d’espèce.

59.      À cet égard, il convient de rappeler que, ainsi que je l’ai indiqué aux points 26 et 27 des présentes conclusions, selon une jurisprudence constante, l’analyse visant à établir si la présomption capitalistique a été renversée présuppose une appréciation d’ensemble des éléments de preuve apportés par la société mère.

60.      En outre, il ressort clairement de la jurisprudence mentionnée au point 23 des présentes conclusions qu’une filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché lorsqu’elle applique, pour l’essentiel, les instructions qui lui sont données par la société mère (41). Dans la même perspective, la Cour a récemment confirmé que, afin qu’il y ait une influence déterminante, il n’est pas nécessaire que la filiale applique toutes les instructions de sa société mère, sous réserve de ce que le non‑respect des instructions adressées ne soit pas la règle, ce qui doit être apprécié eu égard à l’ensemble des éléments de preuve dont dispose le Tribunal (42).

61.      La conclusion quant à l’existence d’une unité économique entre une société mère et une filiale, qui fonde l’attribution à la première de la responsabilité pour le comportement infractionnel de la seconde, ne présuppose donc pas que la filiale applique sans exception toutes les instructions données par la société mère. Il est suffisant que la filiale applique lesdites instructions pour l’essentiel (43). Il s’ensuit que le non-respect d’une instruction ponctuelle et spécifique donnée par une société mère à une filiale, même si elle est incontestablement importante, ne saura, à elle seule, démontrer l’autonomie de la filiale sur le marché et n’est donc pas suffisante, à elle seule, pour renverser la présomption capitalistique. C’est seulement si l’analyse de l’ensemble des éléments de preuve apportés démontre que le non-respect de la part de la filiale des instructions adressées par la société mère était la règle que la présomption capitalistique peut être considérée comme renversée.

62.      Or, en l’espèce, le Tribunal n’a pas constaté un manque de respect généralisé de la part de SKW des instructions données par les requérantes qui aurait prouvé que la filiale déterminait de manière entièrement autonome son comportement sur le marché. Certes, il ne peut pas être nié que la violation des instructions commise par SKW a été importante et a constitué une grave violation des directives de ses sociétés mères. Toutefois, bien qu’une telle violation constitue certainement une circonstance importante qui doit être prise en considération dans l’examen d’ensemble des éléments apportés pour renverser la présomption capitalistique, elle n’est pas suffisante, à elle seule, pour renverser cette présomption (44).

63.      Quant à l’appréciation concrète des déclarations mentionnées au point 19 des présentes conclusions, je relève que, les requérantes n’ayant pas fait valoir une dénaturation des éléments de preuve, il ne revient pas à la Cour de remettre en cause l’appréciation de ces éléments opérée par le Tribunal ni la valeur que celui‑ci leur a attribué dans son analyse (45). À cet égard, j’observe seulement que le Tribunal a considéré que ces déclarations ne démontraient pas que les requérantes n’exerçaient plus d’influence déterminante sur leur filiale, ce qui avait pour conséquence qu’elles n’étaient pas susceptibles de renverser la présomption capitalistique, sur laquelle se fondait l’attribution de la responsabilité aux requérantes. Ainsi, lorsque celles-ci affirment que le raisonnement contenu au point 106 de l’arrêt attaqué, lequel démontrerait tout au plus une influence hypothétique, ne suffirait pas pour procéder à l’imputation à leur charge de la responsabilité, les requérantes se placent dans une perspective erronée dans la mesure où, comme il est, du reste, exposé plus en détail aux points 70 et suivants des présentes conclusions, elles négligent que l’imputation de l’infraction aux requérantes a eu lieu en application de la présomption capitalistique.

64.      Il s’ensuit de tout ce qui précède que le grief tiré de ce que le comportement d’une filiale en contradiction flagrante avec des instructions explicites de sa société mère renverserait la présomption capitalistique doit être également rejeté.

d)      Sur l’application par le Tribunal d’un critère trop restrictif qui rendrait irréfragable la présomption capitalistique

65.      Les requérantes reprochent au Tribunal d’avoir utilisé un critère erroné en requérant des exigences trop élevées pour le renversement de la présomption capitalistique, rendant ce renversement impossible en violation de l’article 101 TFUE ainsi que de différents autres principes. En particulier, le Tribunal leur aurait imputé l’infraction sur la base d’une influence hypothétique, alors qu’elles auraient démontré n’avoir jamais effectivement exercé une influence déterminante sur leur filiale. Dans ce contexte, les requérantes visent plusieurs points de l’arrêt attaqué dans lesquels le Tribunal aurait erronément rejeté leurs arguments en appliquant ce critère erroné.

66.      À cet égard, il convient de relever, à titre liminaire, que, si, dans le cadre d’une procédure de pourvoi, la Cour n’est pas autorisée, sauf en cas de dénaturation, à remettre en cause l’appréciation des faits (46), elle peut, en revanche, contrôler la qualification juridique des faits effectuée par le Tribunal, laquelle inclut, selon une jurisprudence constante, la question de savoir si celui-ci a appliqué des critères juridiques corrects dans son appréciation des faits et des éléments de preuve (47). Ainsi, c’est seulement dans la mesure où les requérantes font valoir que le Tribunal aurait appliqué un critère juridique erroné dans l’appréciation des éléments invoqués pour renverser la présomption capitalistique que leur argumentation est recevable (48).

67.      En l’espèce, il est constant que, pendant la période infractionnelle, les requérantes détenaient, directement ou indirectement, la totalité du capital de SKW, de sorte que la Commission, dans la décision litigieuse, pouvait à bon droit appliquer la présomption capitalistique. Dans cette décision, la Commission s’est référée à certains éléments factuels qui confirmaient cette présomption, tant en ce qui concernait AlzChem (49) qu’en ce qui concernait Degussa (50). Ensuite, aux considérants 237 à 244 de la décision litigieuse, la Commission a rejeté les arguments invoqués par les requérantes visant à renverser la présomption capitalistique (51).

68.      Le Tribunal a analysé, aux points 70 à 119 de l’arrêt attaqué, les arguments invoqués par les requérantes, sans toutefois effectuer de distinction entre les arguments qui visaient à contester les éléments additionnels qui, selon la Commission, confirmaient la présomption capitalistique et ceux qui visaient directement à renverser cette présomption.

69.      Les requérantes reprochent au Tribunal d’avoir rejeté à plusieurs reprises leurs arguments en se contentant de la possibilité théorique d’une influence déterminante alors que la question déterminante serait celle de savoir si l’influence a été effectivement exercée. Ainsi, dans leur argumentation, elles visent spécifiquement l’analyse effectuée par le Tribunal, aux points 84 à 87 de l’arrêt attaqué, au regard de l’obligation de rapport de SKW à AlzChem, aux points 88 et 89, au regard de la réserve d’approbation en faveur d’AlzChem sur plusieurs décisions commerciales de SKW, aux points 95 à 97, au regard du caractère vendable de SKW, ainsi qu’aux points 108 à 113, au regard de la pertinence du chiffre d’affaires de SKW. Dans son raisonnement concernant tous ces arguments, le Tribunal aurait rejeté les arguments des requérantes en se fondant sur une éventuelle influence théorique de leur part sur SKW, mais n’aurait pas pu démontrer l’exercice effectif de l’influence déterminante.

70.      L’argumentation des requérantes néglige, à mon avis, le fait que l’imputation de leur responsabilité était fondée sur la présomption capitalistique (52) et que c’était ainsi à elles, aux termes de la jurisprudence mentionnée aux points 26 et 27 des présentes conclusions, qu’il incombait d’apporter des éléments de preuve suffisants susceptibles de démontrer qu’elle n’avaient pas exercé d’influence déterminante sur SKW pendant la période infractionnelle. Les requérantes partent de la prémisse, non démontrée, qu’elles auraient prouvé l’absence d’exercice effectif d’influence déterminante et que, ainsi, il ne serait pas suffisant que le Tribunal rejette leur arguments se fondant exclusivement sur une influence théorique.

71.      La perspective dans laquelle se placent les requérantes est donc, à mon avis, erronée. Cela ressort d’une manière particulièrement évidente, par exemple, lorsqu’elles affirment, en relation avec l’analyse concernant la réserve d’approbation en faveur d’AlzChem, que le Tribunal ne pourrait pas se fonder sur une influence théorique éventuelle pour rejeter un argument selon lequel il n’y a pas d’influence effective ou lorsqu’elles prétendent, en se référant à l’argument relatif à la pertinence du chiffre d’affaires de SKW, que le Tribunal devrait «renverser» l’argument selon lequel il n’y a pas eu d’influence effective.

72.      Or, lorsqu’il y a application de la présomption capitalistique, le Tribunal ne doit pas répondre aux arguments avancés par la société mère en prouvant lui‑même l’exercice effectif d’une influence déterminante. Il revient, au contraire, à la société mère d’apporter des éléments de preuve suffisants qui démontrent que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché. Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence mentionnée aux points 26 et 27 des présentes conclusions, le Tribunal doit effectuer une analyse d’ensemble de ces éléments afin de vérifier s’ils démontrent que, contrairement à ce qui est présumé en application de la présomption capitalistique, la société mère n’exerçait pas d’influence déterminante effective sur la filiale.

73.      En ce qui concerne spécifiquement l’analyse faite par le Tribunal aux points 84 à 87 de l’arrêt attaqué, concernant l’obligation de rapport de SKW à AlzChem, les requérantes font valoir que, en faisant résulter d’une simple obligation de rapport l’existence d’une influence effective, le Tribunal aurait opéré une dénaturation des éléments de preuve.

74.      Or, une dénaturation des éléments de preuve existe lorsque, sans qu’il soit nécessaire d’avoir recours à de nouveaux éléments de preuve, l’appréciation des éléments de preuve existants apparaît manifestement erronée (53).

75.      À cet égard, je dois relever que, même en admettant, comme le font valoir les requérantes, que, la supposition, contenue au point 87 de l’arrêt attaqué, selon laquelle, en raison du flux d’informations existant entre AlzChem et SKW, la première intervenait pour modifier des décisions de la seconde serait une conclusion spéculative, il ressort de la jurisprudence qu’un flux d’informations entre une société mère et sa filiale, et donc a fortiori une obligation de «faire rapport» telle qu’elle ressort des réponses de SKW et de Degussa, citées aux points 83 et 84 de l’arrêt attaqué, constitue un indice de l’exercice d’un contrôle sur les décisions de la filiale (54). Il s’ensuit, à mon avis, que le Tribunal n’a procédé à aucune dénaturation des éléments de preuve lorsque, au point 87 de l’arrêt attaqué, il a confirmé l’appréciation de la Commission contenue au considérant 229, troisième tiret, de la décision litigieuse selon laquelle l’existence de ces rapports constituait un indice complémentaire qui confirmait la présomption capitalistique.

76.      En ce qui concerne le raisonnement contenu aux points 93, 94 et 98 de l’arrêt attaqué, les requérantes font valoir que le Tribunal aurait appliqué erronément la charge de la preuve pour le renversement de la présomption capitalistique. En effet, il leur appartiendrait de prouver non pas que leur influence déterminante était nécessairement exclue, mais uniquement que, dans le cas concret, elles n’exerçaient effectivement aucune influence. Toutefois, à cet égard, il suffit de relever que le Tribunal, aux points de l’arrêt visés par cet argument, n’a aucunement renversé la charge de la preuve, mais s’est limité à considérer que les arguments apportés par les requérantes n’étaient pas suffisants, en eux-mêmes, afin de renverser la présomption capitalistique ou n’étaient pas pertinents à cette fin.

77.      Enfin, en ce qui concerne l’argument selon lequel l’application concrète de cette présomption, faite par la Commission et confirmée par le Tribunal, aurait rendu celle-ci irréfragable, il suffit de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour que le fait qu’il soit difficile d’apporter la preuve contraire nécessaire pour renverser une présomption n’implique pas, en lui-même, que celle-ci soit, en fait, irréfragable (55).

78.      À la lumière de toutes ces considérations, le grief tiré de l’application par le Tribunal d’un critère trop restrictif qui rendrait irréfragable la présomption capitalistique doit également être rejeté. Il s’ensuit que le premier moyen doit être rejeté dans son intégralité.

B –    Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation ainsi que du principe d’égalité de traitement

1.      Argumentation des parties

79.      Par leur troisième moyen, dirigé contre les points 287 à 289 de l’arrêt attaqué, les requérantes font valoir que le Tribunal a violé le principe d’égalité de traitement, leur droit d’être entendues ainsi que son obligation de motivation.

80.      D’une part, aux points 272 à 275 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que la Commission avait, dans le cadre du calcul de la responsabilité solidaire globale de SKW, à tort, omis de tenir compte d’un droit d’entrée et, par conséquent, violé le principe d’égalité de traitement ainsi que les principes régissant la fixation d’amendes solidaires. D’autre part, ainsi qu’il ressort de l’arrêt parallèle sur le recours introduit par SKW (56) et ainsi que les requérantes l’avaient invoqué dans leur réplique, la Commission n’aurait pas non plus dû procéder à une réduction de l’amende au titre de la communication sur la clémence en faveur de SKW car la demande de clémence introduite par les requérantes ne valait pas pour SKW et cette dernière n’avait pas introduit une demande de clémence propre. Si la Commission n’avait pas commis ces erreurs, l’amende infligée à SKW pour la première partie de l’infraction aurait dû être considérablement plus élevée.

81.      Dans ces conditions, le Tribunal aurait violé le principe d’égalité de traitement en ce qu’il n’a pas réduit leurs amendes afin de remédier à la disproportion illégale entre les amendes infligées aux requérantes et celles infligées à SKW alors que, dans l’arrêt parallèle Gigaset/Commission (57), dans une situation similaire, il a réduit le montant de l’amende de Gigaset, la nouvelle société mère de SKW, en jugeant que le principe d’égalité de traitement imposait que, en l’absence d’une réduction du montant de l’amende de SKW, il convenait de réduire celle de Gigaset. En outre, en ne répondant pas aux arguments invoqués dans la réplique, que les requérantes n’auraient pas été en mesure d’invoquer avant, le Tribunal aurait violé le droit d’être entendu et son obligation de motivation.

82.      La Commission soutient qu’il n’y a pas eu de violation du principe d’égalité de traitement en l’espèce. Ledit arrêt Gigaset/Commission concernerait un cas différent. Les arguments concernant l’amende de SKW iraient au-delà de l’objet de la procédure de première instance, ainsi qu’il ressortirait explicitement du point 266 de l’arrêt attaqué. L’argument selon lequel SKW n’aurait pas dû bénéficier d’une réduction au titre de la clémence serait en contradiction avec l’argumentation invoquée en première instance et serait d’ailleurs tardif et, donc, irrecevable. Selon la Commission, en tout état de cause, une réduction éventuellement erronée de l’amende de SKW, conformément à la communication sur la clémence, ne peut justifier une réduction des amendes des requérantes, pour lesquelles il a été procédé à juste titre à l’application de cette communication.

2.      Analyse

83.      Les requérantes contestent la détermination de l’amende faite par le Tribunal en application de son pouvoir de pleine juridiction. Le Tribunal aurait violé le principe d’égalité de traitement en ce que, contrairement à ce qu’il a fait dans ledit arrêt Gigaset/Commission, il n’a pas réduit des amendes des requérantes pour remédier à la disproportion illégale de celles-ci avec l’amende imposée à SKW, laquelle aurait dû être plus élevée en raison de deux erreurs dans sa détermination: l’omission de tenir compte d’un droit d’entrée et une réduction indue au titre de la communication sur la clémence.

84.      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’exercice d’une compétence de pleine juridiction ne saurait entraîner, lors de la détermination du montant des amendes, une discrimination entre les entreprises qui ont participé à un accord contraire à l’article 101, paragraphe 1, TFUE (58). En outre, selon la jurisprudence de la Cour, le principe d’égalité de traitement n’est violé que lorsque des situations comparables sont traitées de manière différente ou que des situations différentes sont traitées de manière identique, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (59).

85.      Il convient, tout d’abord, d’analyser l’argument de la Commission selon lequel ce moyen irait au-delà de l’objet de la procédure de première instance, ce qui le rendrait irrecevable. À cet égard, il convient de rappeler que, s’il est vrai qu’il ressort d’une jurisprudence constante que, dans le cadre d’un pourvoi, la compétence de la Cour se limite, en principe, à l’examen de l’appréciation par le Tribunal des moyens débattus devant lui (60), il résulte cependant également de la même jurisprudence qu’un requérant est recevable à former un pourvoi en faisant valoir, devant la Cour, des moyens nés de l’arrêt attaqué lui-même et qui visent à en critiquer, en droit, le bien-fondé (61).

86.      Or, force est de constater que, dans le cadre du présent moyen, les requérantes font valoir la violation du principe d’égalité de traitement en ce qui concerne les amendes telles que déterminées par le Tribunal dans l’arrêt attaqué dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction. Par sa nature même, donc, ce moyen n’aurait pas pu être soulevé en première instance (62). Il s’ensuit qu’il est recevable.

87.      Cependant, il convient de relever que l’argumentation des requérantes se rapporte non pas à leur situation spécifique, mais à des prétendues illégalités commises dans la détermination de l’amende de SKW. Or, il est bien établi que le principe d’égalité de traitement doit se concilier avec le principe selon lequel nul ne peut invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d’autrui (63), qui constitue un corollaire du principe de légalité (64).

88.      Dans cette perspective, à supposer même que les situations respectives de Gigaset et des requérantes soient comparables en ce qui concerne la détermination de l’amende de la part du Tribunal dans l’exercice de son pouvoir de pleine juridiction, et sans évidemment pouvoir remettre en cause, dans le cadre du présent pourvoi, l’appréciation faite par le Tribunal dans le même arrêt Gigaset/Commission, j’estime que, en tout état de cause, en vertu du principe selon lequel nul ne peut invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d’autrui, les requérantes ne sauraient se prévaloir à leur profit, aux fins, notamment, d’obtenir une réduction de leurs amendes, d’éventuelles illégalités ou erreurs commises dans la détermination de l’amende de SKW.

89.      Dans ces conditions, les griefs tirés de la violation du droit d’être entendu et de l’obligation de motivation sont, à mon avis, inopérants. En effet, même si le Tribunal avait examiné les arguments avancés dans la réplique, selon lesquels SKW n’aurait pas dû bénéficier d’une réduction de l’amende au titre de la clémence, et à supposer que ces arguments, contrairement à ce que soutient la Commission, étaient recevables devant le Tribunal, les requérantes n’auraient pu, en tout état de cause, bénéficier des illégalités prétendument commises en faveur de SKW pour obtenir une réduction de leurs amendes.

90.      Enfin, pour autant que le présent moyen doit être compris comme faisant valoir une violation du principe de proportionnalité dans la détermination de l’amende par le Tribunal, il suffit de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence bien établie qu’il n’appartient pas à la Cour, lorsqu’elle se prononce sur des questions de droit dans le cadre d’un pourvoi, de substituer, pour des motifs d’équité, son appréciation à celle du Tribunal statuant, dans l’exercice de sa pleine juridiction, sur le montant des amendes infligées à des entreprises en raison de la violation, par celles-ci, du droit de l’Union (65). Or, rien n’indique que le niveau de la sanction imposée aux requérantes serait non seulement inapproprié, mais également excessif, au point d’être disproportionné, et qu’il y aurait donc lieu de constater une erreur de droit commise par le Tribunal, en raison du caractère inapproprié du montant de l’amende.

91.      Il découle de tout ce qui précède que, à mon avis, le troisième moyen doit être rejeté.

C –    Sur le quatrième moyen soulevé à titre subsidiaire, tiré de la violation du principe de sécurité juridique, du principe nulla poena sine lege certa ainsi que de l’obligation de motivation s’imposant au Tribunal

1.      Argumentation des parties

92.      Dans le cadre de leur quatrième moyen, soulevé à titre subsidiaire et visant le point 288 de l’arrêt attaqué ainsi que le point 2 du dispositif de celui-ci, les requérantes font valoir que le Tribunal aurait violé le principe de sécurité juridique, le principe nulla poena sine lege certa ainsi que l’obligation de motivation. Les requérantes reprochent au Tribunal de n’avoir pas suffisamment précisé, dans l’arrêt attaqué, qu’un paiement de SKW aurait un double effet extinctif, à savoir qu’il aurait un effet libératoire de la dette, aussi bien pour elles-mêmes que pour Gigaset, qui est aussi solidairement responsable du paiement de l’amende avec SKW. Si le paiement de SKW n’avait pas de double effet extinctif, l’arrêt attaqué entraînerait une insécurité juridique complète. En effet, dans un cas pareil, il appartiendrait à la Commission de décider de manière discrétionnaire dans quelle mesure elle impute ce paiement respectivement aux requérantes et à Gigaset. Cela empêcherait également le juge national, éventuellement saisi d’un litige à cet égard, de se prononcer.

93.      La Commission soutient que l’argumentation des requérantes constitue un moyen nouveau et est donc irrecevable. À cet égard, le fait que la motivation critiquée résulte de l’exercice par le Tribunal de sa compétence de pleine juridiction serait sans conséquence, car il s’agirait d’une violation d’une nature telle qu’elle aurait pu être invoquée en première instance. La Commission relève que le point critiqué a été formulé par le Tribunal de sa propre initiative et s’avère favorable aux requérantes, ce qui fait douter de leur intérêt à le contester.

2.      Analyse

94.      Par leur quatrième moyen, les requérantes contestent la précision faite par le Tribunal au point 288 in fine de l’arrêt attaqué, reprise au point 2, premier tiret, du dispositif de cet arrêt, aux termes de laquelle «il sera considéré [que Degussa] et AlzChem se sont acquittées de cette amende à concurrence des sommes versées par SKW […] au titre de l’amende qui lui a été infligée à l’article 2, sous f) et g), de la [décision litigieuse]».

95.      La Commission conteste la recevabilité de ce moyen en tant que moyen nouveau irrecevable au stade du pourvoi. À cet égard, je relève que, ainsi que l’observe la Commission elle-même, il s’agit d’un moyen né de l’arrêt attaqué lui-même, contestant un point formulé par le Tribunal de sa propre initiative dans le cadre de l’exercice de son pouvoir de pleine juridiction. Dans ces conditions, en vertu de la jurisprudence citée au point 85 des présentes conclusions, il ne peut pas, à mon avis, être considéré comme un moyen nouveau et ne peut donc pas être considéré irrecevable pour cette raison (66).

96.      Ensuite, je relève que, ainsi qu’il ressort du point précédent des présentes conclusions, les parties de l’arrêt attaqué qui forment l’objet d’une contestation dans le cadre de ce moyen prévoient expressément l’effet extinctif en faveur des requérantes des sommes versées par SKW au titre de l’amende qui lui a été infligée par la décision litigieuse. Or, l’argumentation des requérantes vise à ce que la Cour constate une erreur du Tribunal en ce qu’il n’a pas déclaré qu’un tel paiement aurait un double effet extinctif. Les paiements de SKW ayant déjà un effet libératoire pour les requérantes, pour la partie de l’amende pour laquelle elles sont solidairement responsables avec SKW, ce moyen revient ainsi, en substance, à demander à la Cour de reconnaître l’effet extinctif de ces paiements à l’égard de Gigaset.

97.      À cet égard, il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’une partie requérante dispose d’un intérêt au pourvoi tant que le pourvoi est susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (67).

98.      Or, étant clair à la lecture de l’arrêt attaqué que tout paiement effectué par SKW au titre de l’amende en cause libère les requérantes pour la partie de l’amende pour laquelle elles sont solidairement responsables avec SKW, à concurrence des sommes versées, les requérantes ne sauraient obtenir aucun bénéfice d’un éventuel accueil de ce moyen reconnaissant l’effet extinctif, pour Gigaset, des paiements de SKW.

99.      Il s’ensuit que ce moyen doit être déclaré irrecevable.

D –    Sur le cinquième moyen, soulevé à titre subsidiaire, tiré de la violation de l’article 81 CE et de l’article 23 du règlement (CE) no 1/2003 ainsi que du principe de l’égalité de traitement, du droit d’être entendu et de l’obligation de motivation

1.      Argumentation des parties

100. Par leur cinquième moyen, soulevé à titre subsidiaire et dirigé contre le point 288 de l’arrêt attaqué, les requérantes font valoir que le Tribunal a commis une violation de l’article 81 CE, de l’article 23 du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1), du principe de l’égalité de traitement, du droit d’être entendu et de l’obligation de motivation. Les requérantes reprochent au Tribunal d’avoir déduit de la partie de l’amende réputée payée en cas de paiement par SKW la réduction octroyée aux requérantes au titre de la communication sur la clémence. Ainsi qu’elles l’ont fait valoir dans le cadre de leur troisième moyen, les requérantes soutiennent que leur demande de clémence ne concernait pas SKW, ce qu’elles auraient invoqué dans leur réplique devant le Tribunal. En l’absence de cette réduction illégale au titre de la communication sur la clémence du montant de l’amende imposée à SKW, la partie de l’amende pour laquelle un paiement de SKW a un effet libératoire aurait dû être plus élevée. Elle aurait dû s’élever à 3,47 millions d’euros, et non pas à 2,49 millions d’euros. Ainsi, elles demandent à la Cour de fixer l’effet libératoire, pour Degussa, d’un paiement de SKW à un montant de 3,47 millions d’euros.

101. La Commission fait valoir que la responsabilité solidaire de SKW et des requérantes ne peut pas aller au-delà de la dette solidaire. Elle relève, de plus, que l’amende infligée à Degussa, en application du point 289 de l’arrêt attaqué et du point 2, second tiret, du dispositif de celui-ci (soit un montant de 1,24 million d’euros), était propre à cette société et non soumise au mécanisme de la responsabilité solidaire. Enfin, elle indique que l’entière responsabilité solidaire des requérantes et de SKW à hauteur de 2,49 millions d’euros ne signifie pas que cette dernière aurait bénéficié de la demande de clémence des premières.

2.      Analyse

102. Par leur cinquième moyen, les requérantes reprochent au Tribunal plusieurs violations du droit en ce qu’il n’a pas augmenté la responsabilité solidaire de SKW lors de la nouvelle fixation de l’amende dans l’exercice de son pouvoir de pleine juridiction. En effet, lors de cette fixation, le Tribunal aurait omis de corriger la prise en considération erronée, de la part de la Commission en faveur de SKW, de la demande de clémence présentée par les requérantes, demande qui ne concernait pas SKW.

103. Ainsi, l’effet libératoire d’un paiement de SKW pour les requérantes devrait s’élever non pas à 2,49 millions d’euros, tel qu’établi au point 2, premier tiret, du dispositif de l’arrêt attaqué, mais à 3,47 millions d’euros. Cet effet libératoire devrait donc couvrir aussi partiellement l’amende imposée à Degussa, d’un montant de 1,24 million d’euros, telle que prévue au point 2, second tiret, du dispositif de l’arrêt attaqué.

104. Il est manifeste qu’un tel moyen ne peut pas prospérer.

105. En effet, sans même devoir aborder la question de savoir si la Cour peut, dans le cadre d’un pourvoi, augmenter la portée de la responsabilité solidaire, et donc augmenter le montant de l’amende d’un tiers, tel que SKW en l’espèce, il suffit de relever que, comme le met en exergue la Commission, la responsabilité de SKW ne peut pas aller au-delà du montant de l’amende qui lui a été imposée solidairement avec ses sociétés mères pour l’infraction constatée. Or, ce montant a été fixé par le Tribunal à 2,49 millions d’euros.

106. SKW ne peut en aucun cas être tenue de payer, même en partie, l’amende de 1,24 million d’euros prévue au point 2, second tiret, du dispositif de l’arrêt attaqué. En effet, ainsi qu’il ressort des points 271 et 289 de l’arrêt attaqué, cette amende a été imposée exclusivement à Degussa en raison de la récidive. Cette amende est donc propre à Degussa et est exclue de la responsabilité solidaire. Dans ces conditions, les requérantes ne sauraient reprocher aucune erreur ou violation de droit au Tribunal pour n’avoir pas augmenté la responsabilité solidaire de SKW lors de la nouvelle fixation de l’amende dans l’exercice de son pouvoir de pleine juridiction pour couvrir l’amende de Degussa.

107. Le cinquième moyen doit donc également être rejeté.

108. Il résulte de tout ce qui précède que, à mon avis, le pourvoi doit être rejeté dans son intégralité.

V –    Sur les dépens

109. En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

110. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

111. La Commission ayant conclu à la condamnation des requérantes aux dépens et celles-ci ayant succombé en leurs moyens, il y a lieu de les condamner à supporter, outre leurs propres dépens, ceux exposés par la Commission.

VI – Conclusion

112. Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de statuer de la manière suivante:

–        le pourvoi est rejeté, et

–        Evonik Degussa GmbH ainsi que AlzChem AG sont condamnées aux dépens.


1 –      Langue originale: le français.


2 – Anciennement AlzChem Trostberg GmbH, anciennement AlzChem Hart GmbH.


3 – T‑391/09, EU:T:2014:22.


4 – Décision relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/39.396 ‐ Réactifs à base de carbure de calcium et de magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier).


5 – L’infraction avait pour objet un partage de marchés, une fixation de quotas, une répartition des clients, une fixation des prix et un échange d’informations commerciales sensibles concernant les prix, les clients et les volumes de vente dans l’Espace économique européen (EEE), à l’exception du Royaume d’Espagne, de l’Irlande, de la République portugaise ainsi que du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.


6 – JO 2002, C 45, p. 3.


7 – Voir article 1er, sous f), de la décision litigieuse.


8 – Voir considérants 226 et 227 de la décision litigieuse.


9 – Voir considérants 227, 228 et 235 de la décision litigieuse.


10 – Voir considérant 29 de la décision litigieuse.


11 – Points 149 à 157 de l’arrêt attaqué.


12 – Voir note en bas de page 6 des présentes conclusions.


13 – Point 211 de l’arrêt attaqué.


14 – Points 227 à 236 de l’arrêt attaqué.


15 – Points 272 à 275 de l’arrêt attaqué.


16 – Voir point 2 du dispositif de l’arrêt attaqué.


17 – C‑231/11 P à C‑233/11 P, EU:C:2014:256.


18 – Le deuxième moyen, tiré de la violation du droit d’être entendu et de l’obligation de motivation, concernait l’argumentation avancée par les requérantes devant le Tribunal fondée sur l’arrêt prononcé par le Tribunal dans les affaires Siemens Österreich et VA Tech Transmission & Distribution e.a./Commission (T‑122/07 à T‑124/07, EU:T:2011:70). Cet arrêt du Tribunal a toutefois été annulé par l’arrêt de la Cour mentionné à la note en bas de page précédente des présentes conclusions.


19 – Il ressort de cette déclaration, jointe à la requête devant le Tribunal, à laquelle celui-ci c’est référé aux points 91 et 102 de l’arrêt attaqué que M. S. a affirmé que, «[a]u cours de la période 2003-2004, lorsque les fournisseurs de carbure de calcium ont dû faire face à une baisse des prix accompagnée d’une forte hausse des coûts, notamment, celui du coke, j’ai dit à M. [L.], [gérant unique (‘Geschäftsführer') de SKW,] à peu près ce qui suit: ‘Même si, dans cette situation difficile, des concurrents devaient nous faire part de leur souhait de conclure des accords, nous ne le ferons pas. Et vous non plus. Je tiens à être très clair sur ce point. J’ai prié M. [L] de transmettre cette instruction à ses collaborateurs. M. [L.] et ses collaborateurs étaient parfaitement au courant de mon instruction de respecter le droit de la concurrence’».


20 – Voir points 105 et 107 de l’arrêt attaqué.


21 – Arrêt Commission/Stichting Administratiekantoor Portielje (C‑440/11 P, EU:C:2013:514, points 38 et 39 ainsi que jurisprudence citée).


22 – Ibidem (point 40 et jurisprudence citée).


23 – Ibidem (point 41 et jurisprudence citée).


24 – Arrêt General Química e.a./Commission (C‑90/09 P, EU:C:2011:21, point 51 et jurisprudence citée).


25 – Arrêts Elf Aquitaine/Commission (C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 58) ainsi que Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:522, point 112 et jurisprudence citée).


26 – Arrêt General Química e.a./Commission (C‑90/09 P, EU:C:2011:21, point 76).


27 – Voir, à cet égard, les considérations de l’avocat général Mazák au point 36 de ses conclusions dans l’affaire General Química e.a./Commission (C‑90/09 P, EU:C:2010:517), ainsi que le point 109 de l’arrêt General Química e.a./Commission (C‑90/09 P, EU:C:2011:21).


28 – Voir, en ce sens, point 72 des conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Commission/Stichting Administratiekantoor Portielje (C‑440/11 P, EU:C:2012:763).


29 – Voir, inter alia, arrêts General Motors/Commission (C‑551/03 P, EU:C:2006:229, point 51); Evonik Degussa/Commission (C‑266/06 P, EU:C:2008:295, point 72), ainsi que Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:522, points 115 et 159).


30 – Voir point 78 de l’arrêt attaqué.


31 – Voir, à cet égard, point 146 des conclusions de l’avocat général Kokott dans les affaires Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a. (C‑628/10 P et C‑14/11 P, EU:C:2012:11).


32 – Voir à cet égard, en ce qui concerne un ordre donné par une société mère à sa filiale de se conformer aux règles de la concurrence, les considérations de l’avocat général Mazák au point 40 de ses conclusions dans l’affaire General Química e.a./Commission (C‑90/09 P, EU:C:2010:517).


33 – Certes, au point 92 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a limité sa conclusion à l’instruction donnée en 2002 et à l’exercice «à cette époque», car ce point concernait l’analyse pour la période antérieure au 1er janvier 2004. Toutefois, comme je l’ai relevé aux points 33 à 35 des présentes conclusions, en application de celle que j’ai définie comme une méthodologie déductive, cet indice additionnel a appuyé les conclusions transposées pour la période successive, incluant la période infractionnelle.


34 – C‑501/11 P, EU:C:2013:522.


35 – Ibidem (point 113). Voir également, à cet égard, points 93 à 100 des conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:248), ainsi que point 102 des conclusions de l’avocat général Kokott dans les affaires Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce (C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2014:2439).


36 – Voir la déclaration reprise à la note en bas de page 19 des présentes conclusions.


37 – La Cour a constamment rejeté cet argument en jugeant que, aux fins de l’application de l’interdiction des ententes prévue par le droit de l’Union, l’action d’une personne qui est autorisée à agir pour le compte de l’entreprise suffit pour l’imputation du comportement infractionnel à l’entreprise sans que soient nécessaires une action ni même une connaissance des associés ou des gérants principaux de l’entreprise concernée. Voir arrêts Musique Diffusion française e.a./Commission (100/80 à 103/80, EU:C:1983:158, point 97) ainsi que Slovenská sporiteľňa (C‑68/12, EU:C:2013:71, point 25).


38 – Il serait même possible de se demander si, dans le cas où la société mère contrôle à 100 % une filiale, un employé de la filiale ne pourrait pas être considéré comme un employé du groupe et donc être assimilé à un employé de la société mère.


39 – Voir, à cet égard, les points 129 à 131 des conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:248).


40 – Voir points 23 à 25 des présentes conclusions.


41 – Voir à cet égard, également, conclusions de l’avocat général Kokott dans les affaires Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce (C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2014:2439, point 100 et jurisprudence citée).


42 – Voir arrêt Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce (C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2015:416, points 96 et 97).


43 – Voir, à cet égard, les considérations contenues aux points 100 et 101 des conclusions de l’avocat général Kokott dans les affaires Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce (C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2014:2439), auxquelles la Cour fait explicitement référence au point 96 de l’arrêt Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce (C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2015:416).


44 – En ce qui concerne la référence faite, lors de l’audience, à l’arrêt BMW Belgium e.a./Commission (32/78, 36/78 à 82/78, EU:C:1979:191), le Tribunal, aux points 114 à 117 de l’arrêt attaqué, a rejeté l’argument fondé sur cet arrêt en concluant qu’il concernait une situation factuelle différente. Les requérantes n’ont apporté aucun élément susceptible de remettre en cause une telle appréciation.


45 – Voir point 28 des présentes conclusions et jurisprudence citée ainsi qu’arrêt General Química e.a./Commission (C‑90/09 P, EU:C:2011:21, point 73).


46 – Voir point 28 des présentes conclusions et jurisprudence citée à la note en bas de page 29 de celles-ci.


47 – Voir, inter alia, arrêt Commission/Stichting Administratiekantoor Portielje (C‑440/11 P, EU:C:2013:514, point 59 et jurisprudence citée).


48 – Voir en ce sens, également, arrêt FLSmidth/Commission (C‑238/12 P, EU:C:2014:284, point 21).


49 – Voir considérant 229 de la décision litigieuse.


50 – Voir considérant 236 de la décision litigieuse.


51 – Voir, également, considérant 233 de la décision litigieuse. Il s’agissait notamment de l’argument selon lequel SKW avait été vendue avec effet rétroactif au 1er janvier 2004, de l’argument tiré de la participation à l’entente en violation flagrante des instructions expresses et de l’argument visant à l’assimilation de Degussa à un investisseur financier.


52 – Il ne ressort en effet nulle part de la décision litigieuse que la Commission aurait entendu, en utilisant la méthode dite «de la double base», renoncer à s’en tenir à l’application de la seule présomption d’influence déterminante. Voir, à cet égard, arrêt Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a. (C‑628/10 P et C‑14/11 P, EU:C:2012:479, point 50). L’imputation de la responsabilité a donc été fondée sur la présomption capitalistique et les éléments additionnels invoqués confirmaient seulement la présomption.


53 – Voir, inter alia, ordonnance The Sunrider Corporation/OHMI (C‑142/14 P, EU:C:2015:371, point 49 et jurisprudence citée).


54 – Voir, en ce sens, arrêt General Química e.a./Commission (C‑90/09 P, EU:C:2011:21, point 107). Pour renverser la présomption capitalistique, en présence d’un tel flux d’informations susceptible de la confirmer, il revient, à mon avis, à la société mère de fournir des éléments de preuve suffisants pour démontrer la non-pertinence des informations échangées.


55 – Voir, inter alia, arrêts FLSmidth/Commission (C‑238/12 P, EU:C:2014:284, point 28); Commission/Stichting Administratiekantoor Portielje (C‑440/11 P, EU:C:2013:514, point 71), ainsi que Eni/Commission (C‑508/11 P, EU:C:2013:289, point 68 et jurisprudence citée).


56 – Arrêt SKW Stahl-Metallurgie Holding et SKW Stahl-Metallurgie/Commission (T‑384/09, EU:T:2014:27, point 240).


57 – T‑395/09, EU:T:2014:23, points 181 à 186.


58 – Arrêts Commission e.a./Siemens Österreich e.a. (C‑231/11 P à C‑233/11 P, EU:C:2014:256, point 105) ainsi que Quinn Barlo e.a./Commission (C‑70/12 P, EU:C:2013:351, point 46 et jurisprudence citée).


59 – Arrêt Commission e.a./Siemens Österreich e.a. (C‑231/11P à C‑233/11 P, EU:C:2014:256, point 106).


60 – Voir, à cet égard, arrêt Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a. (C‑628/10 P et C‑14/11 P, EU:C:2012:479, point 111 et jurisprudence citée).


61 – Arrêts Commission e.a./Siemens Österreich e.a. (C‑231/11 P à C‑233/11 P, EU:C:2014:256, point 102) ainsi que Areva e.a./Commission (C‑247/11 P et C‑253/11 P, EU:C:2014:257, points 118 et 170).


62 – Voir arrêts Commission e.a./Siemens Österreich e.a. (C‑231/11 P à C‑233/11 P, EU:C:2014:256, point 104 et jurisprudence citée) ainsi que les considérations aux points 141 et 142 de mes conclusions dans ces affaires (C‑231/11 P à C‑233/11 P, EU:C:2013:578).


63 – Arrêts The Rank Group (C‑259/10 et C‑260/10, EU:C:2011:719, point 62 et jurisprudence citée) ainsi que Solvay/Commission (C‑455/11 P, EU:C:2013:796, point 109). Voir à cet égard, également, conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Total Marketing Services/Commission (C‑634/13 P, EU:C:2015:208, point 92).


64 – Voir, en ce sens, point 61 des conclusions de l’avocat général Kokott dans les affaires Alliance One International et Standard Commercial Tobacco / Commission et Commission/Alliance One International e.a. (C‑628/10 P et C‑14/11 P, EU:C:2012:11).


65 – Arrêts E.ON Energie/Commission (C‑89/11, EU:C:2012:738, points 125 et 126) ainsi que Commission e.a./Siemens Österreich e.a. (C‑231/11 P à C‑233/11 P, EU:C:2014:256, point 111).


66 – À cet égard, je ne peux pas éviter de relever une certaine contradiction dans l’argumentation de la Commission, laquelle, d’une part, affirme que le point critiqué aurait été formulé par le Tribunal de sa propre initiative, mais, d’autre part, soutient qu’il s’agirait d’une violation qui aurait pu être invoquée en première instance.


67 – Voir, inter alia, arrêts Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission (C‑550/07 P, EU:C:2010:512, points 22 et 23) ainsi que Ferrero/OHMI (C‑552/09 P, EU:C:2011:177, point 39).