Language of document : ECLI:EU:T:2013:414

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

12 septembre 2013 (*)

« Recours en annulation – Tarif douanier commun – Classement dans la nomenclature combinée – Position tarifaire – Défaut d’affectation individuelle – Acte réglementaire comportant des mesures d’exécution – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑457/11,

Valeo Vision, établie à Bobigny (France), représentée par Me R. Ledru, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. R. Lyal, B.‑R. Killmann et Mme L. Keppenne, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation du règlement d’exécution (UE) n° 603/2011 de la Commission, du 20 juin 2011, relatif au classement de certaines marchandises dans la nomenclature combinée (JO L 163, p. 10),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas, président, V. Vadapalas et K. O’Higgins (rapporteur), juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 janvier 2013,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        L’article 4 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié (JO L 302, p. 1, ci-après le « code des douanes ») énonce :

« Aux fins du présent code, on entend par :

[…]

5)      décision : tout acte administratif concernant la réglementation douanière pris par une autorité douanière statuant sur un cas individuel, qui a des effets de droit sur une ou plusieurs personnes déterminées ou susceptibles d’être déterminées ;

[…]

17)      déclaration en douane : acte par lequel une personne manifeste dans les formes et modalités prescrites la volonté d’assigner à une marchandise un régime douanier déterminé ;

[…]

20)      mainlevée d’une marchandise : la mise à la disposition, par les autorités douanières, d’une marchandise aux fins prévues par le régime douanier sous lequel elle est placée ;

[…] »

2        L’article 59, paragraphe 1, de ce code dispose :

« Toute marchandise destinée à être placée sous un régime douanier doit faire l’objet d’une déclaration pour ce régime douanier. »

3        L’article 62 dudit code prévoit :

« 1.      Les déclarations faites par écrit doivent être établies sur un formulaire conforme au modèle officiel prévu à cet effet. Elles doivent être signées et comporter toutes les énonciations nécessaires à l’application des dispositions régissant le régime douanier pour lequel les marchandises sont déclarées.

2.      Doivent être joints à la déclaration tous les documents dont la production est nécessaire pour permettre l’application des dispositions régissant le régime douanier pour lequel les marchandises sont déclarées. »

4        Aux termes de l’article 63 du code des douanes :

« Les déclarations qui répondent aux conditions fixées à l’article 62 sont immédiatement acceptées par les autorités douanières, si par ailleurs les marchandises auxquelles elles se rapportent sont présentées en douane. »

5        Selon l’article 73, paragraphe 1, de ce code :

« Sans préjudice de l’article 74 lorsque les conditions de placement sous le régime en cause sont réunies et pour autant que les marchandises ne fassent pas l’objet de mesures de prohibition ou de restriction, les autorités douanières octroient la mainlevée des marchandises dès que les énonciations de la déclaration ont été vérifiées ou admises sans vérification. Il en est de même si la vérification ne peut pas être terminée dans des délais raisonnables et que la présence des marchandises en vue de cette vérification n’est plus nécessaire. »

6        Aux termes de l’article 74 dudit code :

« 1.      Lorsque l’acceptation d’une déclaration en douane entraîne la naissance d’une dette douanière, il ne peut être donné mainlevée des marchandises faisant l’objet de cette déclaration que si le montant de la dette douanière a été payé ou garanti. Toutefois, sans préjudice du paragraphe 2, cette disposition n’est pas applicable pour le régime de l’admission temporaire en exonération partielle des droits à l’importation.

2.      Lorsque, en application des dispositions relatives au régime douanier pour lequel les marchandises sont déclarées, les autorités douanières exigent la constitution d’une garantie, la mainlevée desdites marchandises pour le régime douanier considéré ne peut être octroyée qu’après que cette garantie a été constituée. »

7        Le Conseil de l’Union européenne a, par l’adoption du règlement (CEE) n° 2658/87, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO L 256, p. 1), tel que modifié (ci-après le « règlement sur la nomenclature combinée »), instauré une nomenclature complète des marchandises faisant l’objet d’opérations d’importation ou d’exportation dans l’Union européenne (ci-après la « nomenclature combinée » ou la « NC »). Cette nomenclature figure à l’annexe I dudit règlement.

8        Afin d’assurer l’application uniforme de la nomenclature combinée dans l’Union, la Commission européenne, avec l’assistance d’un comité de représentants des États membres, le comité du code des douanes, peut adopter un certain nombre de mesures qui sont énumérées à l’article 9 du règlement sur la nomenclature combinée. Parmi ces mesures figure la possibilité pour la Commission d’adopter des règlements de classement tarifaire de marchandises particulières dans la nomenclature combinée [article 9, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement sur la nomenclature combinée].

9        En application de l’article 9, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement sur la nomenclature combinée, la Commission a adopté, le 20 juin 2011, le règlement d’exécution (UE) n° 603/2011 relatif au classement de certaines marchandises dans la nomenclature combinée (JO L 163, p. 10, ci-après le « règlement attaqué »). L’annexe du règlement attaqué est constituée d’un tableau divisé en trois colonnes. La colonne 1 de ce tableau reprend la désignation des marchandises, la colonne 2, le classement dans la nomenclature combinée et, la colonne 3, la motivation. Sous ledit tableau figure, « à titre d’information », une photographie des marchandises concernées.

10      Ainsi, la colonne 1 contient la désignation des marchandises suivante :

« Article spécifiquement conçu pour être monté dans l’équipement de signalisation d’un modèle déterminé de véhicule à moteur.

L’article se présente sous la forme de deux assemblages interconnectés de circuits imprimés, comprenant chacun des composants passifs (condensateurs et résistances) et des composants actifs [diodes, diodes électroluminescentes (DEL), transistors et circuits intégrés]. Un des assemblages est muni d’une interface pour la connexion au système d’éclairage du véhicule à moteur.

Les DEL assurent la signalisation. »

11      La colonne 2 classe les marchandises ainsi désignées dans la sous-position tarifaire correspondant au code NC 8512 90 90.

12      La colonne 3 donne la motivation suivante du classement indiqué à la colonne 2 :

« Le classement est déterminé par les dispositions des règles générales 1 et 6 pour l’interprétation de la nomenclature combinée, par la note 2 b) relative à la section XVI ainsi que par le libellé des codes NC 8512, 8512 90 et 8512 90 90.

Étant donné que l’article consiste en des assemblages de circuits imprimés (voir les notes explicatives de la nomenclature combinée relatives à la sous-position 8443 99 10 qui couvre les assemblages électroniques), il ne répond pas à la définition des dispositifs à semi-conducteurs et des circuits intégrés électroniques (voir note 8 du chapitre 85). En conséquence, un classement dans la position 8541 ou 8542 est exclu.

L’article n’étant pas complet, mais spécifiquement conçu pour être utilisé avec d’autres pièces, telles que le bloc optique de feu de signalisation, dans l’équipement de signalisation d’un véhicule à moteur, le classement sous le code NC 8512 20 00 est exclu.

L’article doit être classé en tant qu’élément d’un équipement électrique d’éclairage ou de signalisation, du type de ceux utilisés dans les véhicules à moteur, sous le code NC 8512 90 90. »

13      Les marchandises classées dans la sous-position 8512 90 90 de la NC sont soumises à un droit de douane de 2,7 %.

14      La requérante, Valeo Vision, est une société française qui a notamment pour activités la conception, la fabrication et la commercialisation de systèmes d’éclairage pour l’industrie automobile. Elle importe en France des cartes électroniques à « LED » (light emitting diodes ou diodes électroluminescentes) et, notamment, les trois modèles suivants : la carte « Land Rover 320 Module LED », la carte « Land Rover 319 Module LED » et la carte « Toyota 445 Module LED ».

15      Le 8 juillet 2009, la requérante a importé des cartes « Toyota 445 Module LED » en France en les classant, dans sa déclaration en douane, dans la position 8542 de la NC. Les marchandises relevant de cette position bénéficient d’une exemption de droits de douane.

16      La direction régionale des douanes et droits indirects du Havre (France) a contrôlé cette déclaration et, considérant que les cartes électroniques en cause devaient être classées dans la position 8512 de la NC et, partant, être soumises à un droit de douane de 2,7 %, a adressé, le 13 octobre 2009, une lettre à la requérante, l’informant que l’infraction de « fausse déclaration d’espèce » avait été relevée à son égard et que ladite déclaration avait entraîné l’établissement d’une liquidation supplémentaire pour un montant de 4 327 euros.

17      La requérante a contesté ce classement lors d’une réunion avec les services de la direction régionale des douanes et droits indirects du Havre, tenue le 19 novembre 2009, ainsi que dans un courrier adressé à ces services le 7 décembre 2009. Dans ce courrier, elle exposait les motifs pour lesquels, selon elle, les trois modèles de cartes électroniques mentionnés au point 14 ci-dessus devaient être classés dans la position 8542 de la NC.

18      Parallèlement, la requérante a entamé des discussions avec la direction générale des douanes et droits indirects française (ci-après la « DGDDI ») au sujet du classement tarifaire de ces différents modèles de cartes électroniques. À la suite d’une réunion entre la requérante et la DGDDI, intervenue le 26 février 2010, cette dernière a indiqué à la première, dans une lettre du 17 juin 2010, qu’elle considérait que lesdites cartes électroniques relevaient de la sous-position 8512 20 00 de la NC, mais qu’elle saisirait le comité du code des douanes afin qu’il se prononce sur ledit classement tarifaire.

19      Par courrier électronique du 5 juillet 2010, la DGDDI a demandé à la requérante de lui fournir de la documentation technique relative aux cartes électroniques en cause « afin de faciliter le traitement [du] dossier par [le] comité [du code des douanes] ». En réponse à cette demande, la requérante, par lettre du 8 septembre 2010, a communiqué à la DGDDI des informations et des documents techniques relatifs aux trois modèles de cartes électroniques mentionnés au point 14 ci-dessus.

20      Par un document en date du 4 août 2010, la République française a demandé au comité du code des douanes de déterminer le classement tarifaire approprié de « cartes électroniques équipées de LED pour feux de signalisation de véhicule automobile ».

21      Le comité du code des douanes a examiné cette question lors d’une réunion tenue du 30 septembre au 1er octobre 2010 et a invité la Commission à préparer un projet de règlement de classement.

22      À la suite de cette invitation, la Commission a préparé un premier projet de règlement de classement tarifaire dans lequel une distinction était opérée entre deux types de cartes électroniques à LED, le premier présentant la particularité, par rapport au second, de consister en deux assemblages interconnectés de circuits imprimés.

23      Toutefois, lors de sa réunion tenue du 24 au 26 novembre 2010, le comité du code des douanes est parvenu à la conclusion que les différents types de cartes électroniques à LED étaient similaires et que, partant, il y avait lieu de préparer un projet de règlement de classement n’opérant aucune distinction entre ceux-ci.

24      Le 1er décembre 2010, la Commission a, dès lors, présenté un nouveau projet de règlement, reprenant la description de la carte « Land Rover 320 Module LED » et classant ce type d’article dans la sous-position 8512 90 90 de la NC.

25      Le 20 juin 2011, la Commission a adopté le règlement attaqué.

 Procédure et conclusions des parties

26      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 août 2011, la requérante a introduit le présent recours.

27      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 9 novembre 2011, la Commission a, en application de l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal, soulevé une exception d’irrecevabilité.

28      Le 5 janvier 2012, la requérante a présenté ses observations sur cette exception d’irrecevabilité.

29      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé, conformément à l’article 114, paragraphe 3, du règlement de procédure, d’ouvrir la procédure orale, limitée à l’examen de l’exception d’irrecevabilité. Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, conformément à l’article 64 du même règlement, les parties ont été invitées à répondre à certaines questions écrites. La Commission a, en outre, été invitée à produire certains documents. Les parties ont déféré à ces demandes dans les délais impartis.

30      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 23 janvier 2013.

31      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité ;

–        annuler le règlement attaqué ;

–        condamner la Commission aux dépens.

32      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

33      En vertu de l’article 114, paragraphes 1 et 4, du règlement de procédure, si une partie présente par acte séparé une demande visant à ce que le Tribunal statue sur l’exception d’irrecevabilité, celui-ci statue sur la demande ou la joint au fond.

34      En l’espèce, le Tribunal décide de statuer sur l’exception d’irrecevabilité présentée par la Commission sans engager le débat au fond.

35      Aux termes de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, « [t]oute personne physique ou morale peut former, dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas, un recours contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement, ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution ».

36      En l’espèce, la Commission soulève deux fins de non-recevoir, tirées, respectivement, de ce que le règlement attaqué n’affecterait pas individuellement la requérante et de ce que ce dernier comporterait des mesures d’exécution.

 Sur la première fin de non-recevoir, tirée de l’absence d’affectation individuelle de la requérante

37      La Commission fait valoir que la requérante n’est concernée par le règlement attaqué qu’en sa qualité objective d’importateur des produits en cause, au même titre que tout autre opérateur se trouvant, actuellement ou potentiellement, dans une situation identique. Ce règlement n’atteindrait pas la requérante en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne. La Commission ajoute qu’aucune des circonstances exceptionnelles de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du Tribunal du 30 septembre 2003, Sony Computer Entertainment Europe/Commission (T‑243/01, Rec. p. II‑4189), qui serait la seule affaire dans laquelle un opérateur a été considéré comme individuellement concerné par un règlement de classement tarifaire, n’est applicable en l’espèce.

38      La requérante conteste les arguments de la Commission et s’estime individuellement concernée par le règlement attaqué en raison d’une situation de fait la caractérisant par rapport à tout autre opérateur.

39      Selon une jurisprudence bien établie, en dépit de l’apparence concrète des descriptions qu’ils contiennent, les règlements de classement tarifaire n’en ont pas moins, à tous égards, une portée générale en ce que, d’une part, ils concernent tous les produits répondant au type décrit, quelles que soient par ailleurs leurs caractéristiques individuelles et leur provenance, et en ce que, d’autre part, ils produisent leurs effets, dans l’intérêt d’une application uniforme du tarif douanier commun, pour toutes les autorités douanières de l’Union et à l’égard de tous les importateurs (voir arrêt Sony Computer Entertainment Europe/Commission, point 37 supra, point 58, et la jurisprudence citée, et ordonnance du Tribunal du 3 décembre 2008, RSA Security Ireland/Commission, T‑227/06, Rec. p. II‑3451, point 56, et la jurisprudence citée).

40      En l’espèce, l’article 1er du règlement attaqué dispose que les marchandises présentant les caractéristiques décrites dans la colonne 1 du tableau figurant en annexe de ce même règlement doivent être classées, au sein de la nomenclature combinée, sous le code NC correspondant indiqué dans la colonne 2 du même tableau, à savoir le code NC 8512 90 90. La disposition s’applique à tous les produits analogues ou répondant au type décrit, quelles que soient par ailleurs leurs caractéristiques individuelles et leur provenance (voir, en ce sens, ordonnance RSA Security Ireland/Commission, point 39 supra, point 57, et la jurisprudence citée).

41      Cette disposition, se présentant comme une mesure de portée générale, s’applique à une situation déterminée objectivement et comporte des effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite, et notamment des importateurs du produit qu’elle décrit (voir, en ce sens, ordonnance RSA Security Ireland/Commission, point 39 supra, point 58, et la jurisprudence citée).

42      Toutefois, même un acte de portée générale peut, dans certaines circonstances, concerner individuellement certains opérateurs économiques. Tel est le cas lorsque l’acte en cause les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle dont le serait le destinataire d’une décision (arrêt de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, Rec. p. 197, 223 ; ordonnance RSA Security Ireland/Commission, point 39 supra, point 59).

43      Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, la possibilité de déterminer, avec plus ou moins de précision, le nombre ou même l’identité des sujets de droit auxquels s’applique une mesure n’a nullement pour effet que ceux-ci doivent être considérés comme concernés individuellement par cette mesure, dès lors que cette application s’effectue en vertu d’une situation objective de droit ou de fait définie par l’acte en cause (voir ordonnance RSA Security Ireland/Commission, point 39 supra, point 60, et la jurisprudence citée).

44      Force est de constater que les arguments avancés par la requérante ne permettent pas de déceler une qualité qui, par dérogation aux principes énoncés aux points 39 à 41 ci-dessus, lui serait particulière, ni une situation de fait qui la caractériserait et, de ce fait, l’individualiserait par rapport aux autres opérateurs économiques potentiellement concernés par le règlement attaqué.

45      Ainsi, en premier lieu, s’il est exact que, comme le fait valoir la requérante, la procédure d’adoption du règlement attaqué a été déclenchée par la demande que les autorités françaises ont présentée à la Commission pour régler le problème du classement tarifaire de ses cartes électroniques à LED à la suite d’un litige qui l’opposait aux autorités douanières françaises à ce sujet et que la carte « Land Rover 320 Module LED » a été évoquée lors de cette procédure, de telles circonstances ne sont toutefois pas de nature à l’individualiser au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

46      En effet, d’une part, ainsi que le fait observer à juste titre la Commission, une procédure d’adoption d’un règlement tarifaire est toujours déclenchée par des difficultés liées au classement d’un produit déterminé. Il n’en reste pas moins que l’application d’un tel règlement s’étend, en principe, à tous les produits analogues ou répondant au type décrit, quelles que soient par ailleurs leurs caractéristiques individuelles et leur provenance (voir ordonnance du Tribunal du 19 mars 2007, Tokai Europe/Commission, T‑183/04, non publiée au Recueil, point 51, et la jurisprudence citée).

47      D’autre part, contrairement à ce que prétend la requérante dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la procédure d’adoption du règlement attaqué n’a pas été poursuivie spécifiquement au sujet de la carte « Land Rover 320 Module LED ». En effet, il ressort des documents communiqués par la Commission en réponse à la demande du Tribunal au titre des mesures d’organisation de la procédure (voir point 29 ci-dessus) que le comité du code des douanes a également examiné non seulement les deux autres modèles de cartes électroniques à LED de la requérante, mais aussi un modèle provenant d’un autre fabricant, en l’occurrence le modèle « Automotive Rear Lamps D91 Fender ». Une photographie de chacun de ces quatre modèles était jointe au document du 4 août 2010 de la République française (voir point 20 ci-dessus), par lequel cette dernière demandait au comité du code des douanes de déterminer le classement tarifaire approprié des cartes électroniques à LED et dans lequel elle précisait, notamment, que « [c]es produits présent[ai]ent deux types de construction différents mais rest[ai]ent identiques dans leur fonctionnement et leurs applications ». L’allégation de la requérante selon laquelle, « à aucun moment, un quelconque produit, autre que celui présenté par [elle], identique ou similaire, a[vait] fait l’objet d’une démonstration et/ou d’une discussion devant [ce comité] dans le cadre de la procédure ayant abouti à l’adoption du règlement attaqué » manque donc en fait.

48      Au surplus, il convient d’observer que, ainsi que le relève à juste titre la Commission dans sa réponse à l’une des questions écrites du Tribunal, il est inévitable que les discussions qui interviennent au sein du comité du code des douanes dans le cadre d’une procédure de classement tarifaire portent spécifiquement sur un ou quelques produits donnés, puisque l’État membre qui demande à ce comité de déterminer le classement tarifaire de ce ou de ces produits est généralement invité par ce dernier à en présenter des échantillons afin qu’il puisse être procédé à un examen de ses ou de leurs caractéristiques et propriétés objectives. Toutefois, comme il a déjà été indiqué au point 46 ci-dessus, le règlement de classement tarifaire qui est adopté à l’issue de cette procédure n’en a pas moins une portée générale en ce qu’il s’applique à la généralité des produits qui sont du même type que celui ou ceux examinés par ledit comité.

49      En deuxième lieu, la requérante n’est pas fondée à prétendre que le règlement attaqué concerne spécifiquement le classement de sa carte « Land Rover 320 Module LED ». Tout d’abord, il convient de répéter, comme cela a déjà été relevé aux points 45 à 48 ci-dessus, que la procédure d’adoption du règlement attaqué ne portait pas exclusivement sur cette carte électronique, ni même sur les deux autres modèles de la requérante, mais concernait tout type de carte électronique à LED partageant les mêmes caractéristiques techniques et physiques ainsi que les mêmes utilisations finales. Ensuite, et dans le même ordre d’idées, il y a lieu de constater que, contrairement à ce qu’affirme la requérante dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la description des marchandises figurant dans la colonne 1 du tableau annexé au règlement attaqué n’est pas à ce point précise qu’il est exclu qu’elle puisse s’appliquer à d’autres cartes électroniques à LED que la carte « Land Rover 320 Module LED ». Au contraire, cette description, qui se fonde sur les caractéristiques et propriétés techniques des marchandises en cause et doit être lue en parallèle avec la motivation du classement contenue dans la colonne 3 du tableau précité, doit être considérée comme générique. Certes, selon ladite description, le produit se présente sous la forme de « deux assemblages interconnectés de circuits imprimés », ce qui constitue une particularité du modèle « Land Rover 320 Module LED ». Toutefois, s’il a été décidé de retenir une description se rapportant à ce modèle, c’est simplement parce que ce dernier était le plus complexe des quatre modèles examinés par le comité du code des douanes. Cette constatation est corroborée par les éléments exposés aux points 22 à 24 ci-dessus ainsi que par les propres indications de la requérante, qui, dans sa réponse à la question écrite qui lui a été posée par le Tribunal, a fait valoir, s’écartant ainsi de la thèse qu’elle défendait dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, que le règlement attaqué s’appliquait, outre à la carte « Land Rover 320 Module LED », aux cartes « Land Rover 319 Module LED » et « Toyota 445 Module LED » au motif que ces différents modèles « présent[ai]ent les mêmes caractéristiques techniques et […] composition pertinentes ».

50      Pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 49 ci-dessus, la requérante ne saurait tirer argument du fait que la photographie qui figure sous le tableau annexé au règlement attaqué est celle de la carte « Land Rover 320 Module LED ». De surcroît, il doit être relevé que cette photographie ne fait apparaître aucune marque ou logo permettant de rattacher cet article à la requérante et qu’elle n’est fournie qu’à titre d’information, comme le précise la note figurant sous le descriptif dudit article.

51      En troisième lieu, s’il ressort du dossier que c’est au vu du règlement attaqué que les autorités douanières françaises ont notifié à la requérante des infractions de « fausse déclaration d’espèce » et ont émis des avis de mise en recouvrement à son égard pour les importations de cartes électroniques qu’elle avait réalisées en retenant les positions 8541 ou 8542 de la NC dans ses déclarations en douane, cette circonstance ne démontre pas en soi, contrairement à ce que cette dernière fait valoir, qu’elle était la seule entreprise à être affectée dans sa position juridique par ce règlement. Ainsi qu’il résulte des considérations exposées au point 49 ci-dessus, le règlement attaqué ne concerne pas spécifiquement les cartes électroniques de la requérante, mais s’applique à tout produit analogue ou répondant au type décrit. Partant, il est incontestable que d’autres opérateurs sont susceptibles d’être, ou sont effectivement, affectés par le règlement attaqué.

52      En quatrième lieu, et pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 51 ci-dessus, la requérante ne saurait tirer argument de ce qu’elle est la seule société à pouvoir importer les cartes « Land Rover 320 Module LED », « Land Rover 319 Module LED » et « Toyota 445 Module LED » dans l’Union.

53      Il s’ensuit que la requérante n’est concernée par le règlement attaqué qu’en sa qualité objective d’importateur de cartes électroniques à LED, telles que celles visées dans le tableau annexé audit règlement, au même titre que tout opérateur se trouvant, actuellement ou potentiellement, dans une situation identique.

54      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la requérante n’est pas individuellement concernée par le règlement attaqué.

 Sur la seconde fin de non-recevoir, tirée de ce que le règlement attaqué comporte des mesures d’exécution

55      La Commission soutient, en substance, que le règlement attaqué, à l’instar de tout autre règlement de classement tarifaire, comporte des mesures d’exécution susceptibles de faire l’objet d’un recours au niveau national.

56      La requérante prétend, pour sa part, que le règlement attaqué ne comporte pas de mesures d’exécution. Au soutien de cette affirmation, premièrement, elle fait valoir que la décision de classement tarifaire des marchandises résulte de la seule déclaration en douane de l’importateur, lequel serait obligé d’appliquer le règlement attaqué, sans qu’aucune mesure d’exécution de la part des autorités douanières ne soit nécessaire. Deuxièmement, elle relève que le règlement attaqué indique expressément qu’il « est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre ». Troisièmement, elle affirme que, pour pouvoir faire valoir son droit de contester le règlement attaqué, elle est tenue de violer celui-ci. Quatrièmement, elle fait valoir que le concept de « mesures d’exécution » doit s’entendre de mesures spécifiques à l’acte attaqué et nécessaires pour que celui-ci soit applicable et produise ses effets. Elle précise, à cet égard, que, selon la jurisprudence, un règlement de classement tarifaire ne laisse aucun pouvoir d’appréciation aux destinataires de cette mesure qui sont chargés de sa mise en œuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique.

57      À titre liminaire, il convient d’observer que, ainsi que les parties elles-mêmes en conviennent, le règlement attaqué est un acte réglementaire au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE. En effet, il a une portée générale, en ce qu’il s’applique à des situations déterminées objectivement et produit des effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite (voir point 41 ci-dessus). En outre, le règlement attaqué ne constitue pas un acte législatif dès lors qu’il n’a été adopté ni selon la procédure législative ordinaire ni selon une procédure législative spéciale au sens de l’article 289, paragraphes 1 à 3, TFUE [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 25 octobre 2011, Microban International et Microban (Europe)/Commission, T‑262/10, non encore publié au Recueil, point 21, et ordonnance du Tribunal du 4 juin 2012, Eurofer/Commission, T‑381/11, non encore publiée au Recueil, points 43 et 44]. Le règlement attaqué est un acte de la Commission adopté dans l’exercice de ses compétences d’exécution, sur le fondement de l’article 9, paragraphe 1, sous a), du règlement sur la nomenclature combinée.

58      S’agissant de la question de savoir si le règlement attaqué comporte des mesures d’exécution, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, il convient de rappeler que ce règlement a pour objet de classer les marchandises désignées dans la colonne 1 du tableau qui y est annexé dans la sous-position de la NC mentionnée dans la colonne 2 du même tableau, en l’occurrence la sous-position 8512 90 90.

59      Le règlement attaqué a pour conséquence directe d’obliger la requérante, à l’instar de tout autre importateur des marchandises concernées, lorsqu’elle importe de telles marchandises sur le territoire douanier de l’Union, à retenir pour celles-ci la sous-position 8512 90 90 de la NC dans la déclaration en douane que, conformément à l’article 59, paragraphe 1, du code des douanes, elle doit établir aux fins de leur assigner un régime douanier déterminé.

60      Toutefois, cette obligation ne produit par elle-même aucun effet juridique concret et définitif sur la situation de l’importateur en cause. En particulier, contrairement à ce que soutient la requérante, elle n’emporte pas en elle-même décision sur le classement tarifaire indiqué par l’importateur dans sa déclaration en douane, ni, par voie de conséquence, sur le montant des droits de douane qu’il devra éventuellement acquitter.

61      À cet égard, il convient de relever que, s’il est vrai que la détermination des éléments nécessaires à l’application de la réglementation douanière aux marchandises est effectuée non sur la base des constatations des autorités douanières, mais sur celle des informations fournies par le déclarant, toutefois, la déclaration en douane, par sa nature d’acte unilatéral, ne constitue pas une « décision » au sens de l’article 4, point 5, du code des douanes (arrêt de la Cour du 15 septembre 2011, DP grup, C‑138/10, non encore publié au Recueil, points 34 et 35).

62      En réalité, pour qu’un règlement de classement tarifaire puisse produire des effets juridiques concrets et définitifs à l’égard de l’importateur concerné, des mesures nationales doivent, dans tous les cas, nécessairement intervenir au préalable.

63      La simple acceptation, par les autorités douanières, de la déclaration en douane ne saurait suffire à cet égard. En effet, lorsque ces autorités acceptent une déclaration en douane, signée par le déclarant ou son représentant, l’article 63 du code des douanes leur impose de se limiter à vérifier que les conditions, purement formelles, prévues à l’article 62 de ce code, sont respectées et que les marchandises concernées ont été présentées en douane. Par conséquent, lors de l’acceptation d’une déclaration en douane, lesdites autorités ne se prononcent pas sur l’exactitude des informations fournies par le déclarant, en ce compris, en particulier, le classement tarifaire qu’il a mentionné, dont ce dernier assume la responsabilité (voir, en ce sens, arrêt DP grup, point 61 supra, point 39). En d’autres termes, l’acceptation de la déclaration en douane ne saurait, en soi, constituer une décision sur le classement tarifaire.

64      S’agissant des déclarations en douane faites par écrit, après leur acceptation et, le cas échéant, même après la mainlevée des marchandises, les autorités douanières ont, conformément à l’article 68 du code des douanes, la faculté de vérifier les informations fournies par le déclarant. Cette vérification peut prendre la forme d’un simple contrôle documentaire portant sur la déclaration et les documents qui y sont joints ou d’un examen des marchandises, éventuellement accompagné d’un prélèvement d’échantillons en vue de leur analyse ou d’un contrôle approfondi.

65      S’il n’est pas procédé à la vérification de la déclaration en douane, ce sont les énonciations de celle-ci qui servent de base pour l’application des dispositions régissant le régime douanier choisi par le déclarant et, en principe, les autorités douanières octroient la mainlevée des marchandises concernées (voir article 71, paragraphe 2, et article 73, paragraphe 1, du code des douanes).

66      Dans cette hypothèse, lorsqu’aucun droit n’est dû, l’octroi de la mainlevée des marchandises, qui, en France, se concrétise par l’apposition, par les autorités douanières, de la mention « Bon à enlever » sur l’exemplaire de la déclaration en douane destiné à cette fin, emporte notamment accord desdites autorités sur le classement tarifaire mentionné par le déclarant.

67      Lorsque des droits sont dus, il ne peut être donné mainlevée des marchandises que si le montant de la dette douanière a été payé ou garanti (voir article 74 du code des douanes). En principe, le montant de ces droits est calculé par les autorités douanières et fait l’objet d’une inscription par celles-ci dans les registres comptables ou sur tout autre support qui en tient lieu (voir article 217, paragraphe 1, du code des douanes), avant d’être communiqué, par les mêmes autorités, au débiteur (voir article 221, paragraphe 1, du code des douanes). Cette communication contient donc, notamment, une décision sur le classement tarifaire retenu par le déclarant.

68      Certes, en application de l’article 221, paragraphe 2, du code des douanes, les autorités douanières peuvent prévoir que la communication visée au paragraphe 1 du même article ne sera pas effectuée lorsque le montant qu’elles ont déterminé correspond à celui que le déclarant a mentionné, à titre indicatif, dans la déclaration en douane, étant entendu que l’octroi de la mainlevée des marchandises concernées vaut alors pareille communication. Dans cette hypothèse, l’octroi de la mainlevée des marchandises emporte notamment accord desdites autorités sur le classement tarifaire mentionné par le déclarant.

69      Si les autorités douanières procèdent à la vérification de la déclaration en douane et ne constatent aucun manquement, elles octroient la mainlevée des marchandises et un des cas de figure exposés aux points 66 à 68 ci-dessus se présente.

70      En revanche, si la vérification aboutit à des résultats discordants par rapport aux énonciations de la déclaration en douane, notamment en ce qui concerne le classement tarifaire des marchandises concernées, ce sont ces résultats qui servent de base pour l’application des dispositions régissant le régime douanier sous lequel ces marchandises sont placées. Ainsi, les autorités douanières pourraient retenir un classement tarifaire différent de celui mentionné dans la déclaration en douane, ce qui pourrait entraîner le paiement de droits d’un montant différent de celui indiqué dans cette déclaration. La communication, au débiteur, du montant ainsi dû contient, notamment, une décision sur le classement tarifaire indiqué dans la déclaration en douane (voir point 67 ci-dessus).

71      Il convient d’ajouter que, ainsi que le relève la Commission dans sa réponse à l’une des questions écrites du Tribunal, il arrive que les autorités douanières prélèvent des échantillons des marchandises importées en vue d’une analyse ou d’un contrôle approfondi et qu’elles octroient la mainlevée de celles-ci sans attendre les résultats de cette analyse ou de ce contrôle. Si, ultérieurement, au vu de ces résultats, elles concluent que ces marchandises relèvent d’une autre sous-position tarifaire que celle mentionnée dans la déclaration et que, partant, des droits supplémentaires sont dus, l’avis invitant le débiteur à s’acquitter de ceux-ci emportera décision définitive sur le classement tarifaire déclaré. Dans le même sens, il résulte de l’article 78, paragraphe 2, du code des douanes que, après avoir donné mainlevée des marchandises, les autorités douanières peuvent effectuer un contrôle a posteriori de la déclaration en douane, ce qui pourrait également aboutir à une modification du classement tarifaire déclaré et, partant, au paiement de droits supplémentaires.

72      Il résulte des considérations qui précèdent que le classement de marchandises dans la nomenclature combinée opéré par les règlements du type de celui attaqué en l’espèce n’est susceptible de produire des effets juridiques concrets et définitifs sur la situation des importateurs que moyennant l’intervention de mesures individuelles prises par les autorités douanières nationales à la suite de la présentation de la déclaration en douane, ces mesures pouvant être, selon les cas, l’octroi de la mainlevée des marchandises ou la communication, au débiteur, du montant des droits à acquitter.

73      Partant, le règlement attaqué ne saurait être qualifié d’acte ne comportant pas de mesures d’exécution au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

74      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel le règlement attaqué est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre, de sorte que les particuliers sont directement tenus de l’appliquer, sans que des mesures d’exécution nationales soient nécessaires. En effet, cette argumentation est pertinente uniquement dans le cadre de l’analyse des conditions de l’affectation directe de la requérante. Or, l’exigence d’un acte ne comportant pas de mesures d’exécution visée à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE constitue une condition différente de celle tenant à l’affectation directe. Notamment, il y a lieu de relever que la question de savoir si le règlement attaqué laisse ou non un pouvoir d’appréciation aux autorités nationales chargées des mesures d’exécution n’est pas pertinente pour déterminer si le règlement attaqué comporte des mesures d’exécution (ordonnance Eurofer/Commission, point 57 supra, point 59).

75      Ladite conclusion n’est pas davantage remise en cause par l’objectif poursuivi par l’article 263, quatrième alinéa, TFUE. En effet, il est vrai que cet objectif est de permettre à une personne physique ou morale d’introduire un recours contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution, en évitant ainsi les cas où une telle personne devrait enfreindre le droit pour avoir accès à un juge (ordonnance Eurofer/Commission, point 57 supra, point 60). Toutefois, la situation de la requérante n’est pas celle visée par ledit objectif. En l’espèce, cette dernière peut, en principe, contester les mesures nationales d’exécution du règlement attaqué et, dans ce contexte, exciper de l’illégalité de celui-ci devant les juridictions nationales qui peuvent recourir, avant de statuer, aux dispositions de l’article 267 TFUE, sans avoir préalablement dû enfreindre le règlement attaqué (voir, en ce sens, ordonnance Eurofer/Commission, point 57 supra, point 60). À cet égard, il y a lieu de rappeler que le droit dérivé de l’Union a expressément prévu la voie de droit ouverte à un débiteur de droits à l’importation qui estime avoir indûment fait l’objet de l’imposition de tels droits de la part des autorités douanières. Cette voie s’exerce au niveau national, selon la procédure de recours mise en place par l’État membre en cause en conformité avec les principes posés aux articles 243 à 246 du code des douanes (voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2008, Trubowest Handel et Makarov/Conseil et Commission, T‑429/04, non publié au Recueil, point 43, et la jurisprudence citée).

76      En particulier, il convient de considérer que la mainlevée des marchandises ou, selon les cas, la communication du montant des droits à acquitter, en ce qu’elles emportent notamment décision sur la sous-position tarifaire mentionnée par l’importateur dans sa déclaration en douane, ont manifestement des effets de droit sur la situation de ce dernier et, partant, doivent pouvoir être contestées au niveau national. Cette dernière constatation vaut même dans l’hypothèse où ces mesures nationales d’exécution se fondent sur un classement tarifaire correctement opéré par l’importateur dans sa déclaration en douane. Dès lors, la requérante n’est pas fondée à prétendre que, pour faire valoir ses droits, elle est contrainte d’enfreindre la loi en classant les cartes électroniques à LED en cause dans une autre sous-position tarifaire que celle prévue par le règlement attaqué.

77      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel l’introduction d’un recours devant les juridictions nationales lui occasionnerait des charges administratives et financières beaucoup plus lourdes que celles qui résulteraient d’un recours en annulation contre le règlement attaqué devant le juge de l’Union, il convient de relever que cette circonstance ne peut changer les conditions de recevabilité d’un recours en annulation établies par le traité FUE (voir ordonnance Eurofer/Commission, point 57 supra, point 61, et la jurisprudence citée).

78      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la requérante n’a pas qualité pour agir en annulation en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE contre le règlement attaqué. Par conséquent, le recours doit être rejeté comme irrecevable.

 Sur les dépens

79      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      Valeo Vision est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

Papasavvas

Vadapalas

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 septembre 2013.

Signatures


* Langue de procédure : le français.