Language of document : ECLI:EU:C:2004:234

Arrêt de la Cour

ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)
29 avril 2004 (1)


«Aides d'État – Transport de marchandises par route – Incidence sur les échanges entre les États membres et distorsion de concurrence – Conditions d'une dérogation à l'interdiction énoncée à l'article 92, paragraphe 1, du traité CE (devenu, après modification, article 87, paragraphe 1, CE) – Aides existantes ou aides nouvelles – Principes de proportionnalité et de protection de la confiance légitime – Motivation»

Dans l'affaire C-372/97,

République italienne, représentée par M. I. M. Braguglia, en qualité d'agent, assisté de M. O. Fiumara, avvocato dello Stato, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. P. Nemitz et P. Stancanelli, en qualité d'agents, assistés de Me M. Moretto, avvocato, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l'annulation partielle de la décision 98/182/CE de la Commission, du 30 juillet 1997, concernant les aides octroyées par la région Frioul-Vénétie Julienne (Italie) aux entreprises de transport routier de marchandises de la région (JO 1998, L 66, p. 18),



LA COUR (sixième chambre),



composée de M. V. Skouris, faisant fonction de président de la sixième chambre, MM. J. N. Cunha Rodrigues, J.-P. Puissochet et R. Schintgen, et Mme F. Macken (rapporteur), juges,

avocat général: M. S. Alber,
greffier: Mme M.-F. Contet, administrateur principal,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 20 mars 2003, au cours de laquelle la République italienne a été représentée par M. G. Aiello, avvocato dello Stato, et la Commission par M. V. Di Bucci, en qualité d'agent,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 15 mai 2003,

rend le présent



Arrêt



1
Par requête déposée au greffe de la Cour le 28 octobre 1997, la République italienne a, en vertu de l’article 173 du traité CE (devenu, après modification, article 230 CE), demandé l’annulation partielle de la décision 98/182/CE de la Commission, du 30 juillet 1997, concernant les aides octroyées par la région Frioul‑Vénétie Julienne (Italie) aux entreprises de transport routier de marchandises de la région (JO 1998, L 66, p. 18, ci‑après la «décision attaquée»).


Le cadre juridique

2
Les dispositions générales relatives aux aides d’État énoncées aux articles 92 du traité CE (devenu, après modification, article 87 CE), 93 et 94 du traité CE (devenus articles 88 CE et 89 CE) s’appliquent dans le domaine des transports, sous réserve de l’application des dispositions spéciales de l’article 77 du traité CE (devenu article 73 CE) déclarant compatibles avec le traité des aides qui répondent aux besoins de la coordination des transports ou qui correspondent au remboursement de certaines servitudes inhérentes à la notion de service public.

3
Le règlement (CEE) n° 1107/70 du Conseil, du 4 juin 1970, relatif aux aides accordées dans le domaine des transports par chemin de fer, par route et par voie navigable (JO L 130, p. 1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 543/97 du Conseil, du 17 mars 1997 (JO L 84, p. 6, ci‑après le «règlement n° 1107/70»), qui se fonde sur l’article 75 du traité CE (devenu, après modification, article 71 CE) ainsi que sur les articles 77 et 94 du traité, confirme, à son article 2, que les articles 92 à 94 du traité sont applicables dans le domaine concerné et énonce par ailleurs certaines règles particulières relatives aux aides visées pour autant que ces dernières sont spécifiques à l’activité de ce secteur. Il précise ainsi les cas et les conditions dans lesquels les États membres ont la faculté de prendre des mesures de coordination ou d’imposer des servitudes inhérentes à la notion de service public comportant l’octroi d’aides d’État au titre de l’article 77 du traité.

4
En matière de coordination des transports, l’article 3, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 1107/70 autorise, sous certaines conditions, les aides visant à éliminer, dans le cadre d’un plan d’assainissement, une surcapacité entraînant de graves difficultés structurelles et à contribuer ainsi à mieux répondre aux besoins du marché des transports. Par ailleurs, la même disposition, sous e), autorise, également sous certaines conditions, les aides destinées à faciliter le développement du transport combiné.

5
Dans le cadre de l’instauration d’une politique commune des transports, le marché des transports internationaux de marchandises par route a été partiellement libéralisé, dans la Communauté, par l’instauration, en 1969, d’un régime de contingentement par le règlement (CEE) n° 1018/68 du Conseil, du 19 juillet 1968, relatif à la constitution d’un contingent communautaire pour les transports de marchandises par route effectués entre États membres (JO L 175, p. 13). Dans le cadre de ce contingentement, les autorisations communautaires habilitaient leurs titulaires à effectuer des transports entre les États membres pour une durée d’un an. Ce régime a été maintenu en vigueur jusqu’au 1er janvier 1993, date de la libéralisation complète de cette activité par le règlement (CEE) n° 881/92 du Conseil, du 26 mars 1992, concernant l’accès au marché des transports de marchandises par route dans la Communauté exécutés au départ ou à destination du territoire d’un État membre, ou traversant le territoire d’un ou de plusieurs États membres (JO L 95, p. 1).

6
En ce qui concerne le marché des transports de marchandises à l’intérieur d’un État membre, le règlement (CEE) n° 4059/89 du Conseil, du 21 décembre 1989, fixant les conditions de l’admission de transporteurs non‑résidents aux transports nationaux de marchandises par route dans un État membre (JO L 390, p. 3), a soumis, à partir du 1er juillet 1990, le cabotage, c’est‑à‑dire le transport de marchandises à l’intérieur d’un État membre par un transporteur établi dans un autre État membre, à un régime transitoire sous la forme d’un contingent communautaire à ouverture progressive. Le règlement (CEE) n° 3118/93 du Conseil, du 25 octobre 1993, fixant les conditions de l’admission de transporteurs non‑résidents aux transports nationaux de marchandises par route dans un État membre (JO L 279, p. 1), a prévu le maintien de ce régime transitoire jusqu’à l’instauration définitive de la libéralisation complète des activités de cabotage à partir du 1er juillet 1998.


Les faits à l’origine du litige

Les aides en cause

7
Le 18 mai 1981, la Région Frioul‑Vénétie Julienne (ci‑après la «région») a adopté la loi régionale n° 28, relative à des interventions pour la promotion et le développement des transports intéressant la région Frioul‑Vénétie Julienne, ainsi que du transport routier de marchandises pour le compte d’autrui (ci‑après la «loi n° 28/1981»). Cette loi prévoyait, à ses articles 4, 7 et 8, certaines mesures d’aides en faveur des entreprises de transport pour le compte d’autrui établies sur le territoire de la région.

8
Le régime instauré par la loi n° 28/1981 a été remplacé par la loi régionale n° 4, du 7 janvier 1985, relative à des interventions pour la promotion et le développement des transports intéressant la Région Frioul‑Vénétie Julienne, ainsi que du transport routier de marchandises pour le compte d’autrui (ci‑après la «loi n° 4/1985»). Cette loi instituait, à ses articles 4 à 6, un régime d’aides régionales pour l’essentiel identique à celui mis en place par la loi n° 28/1981.

9
Ces lois prévoyaient trois mesures en faveur des entreprises de transport routier pour le compte d’autrui établies sur le territoire de la région:

a)
le financement annuel, pendant une période maximale de dix ans, à concurrence de 60 % (pour les entreprises individuelles) et de 70 % (pour les coopératives et les groupements) du taux de référence fixé par décret ministériel, des intérêts des emprunts contractés en vue (article 4 des lois nos°28/1981 et 4/1985):

de la réalisation d’infrastructures de l’entreprise (construction, achat, agrandissement, achèvement et modernisation des locaux nécessaires à l’activité de l’entreprise, y compris ceux destinés à l’entreposage, au stockage et à la manipulation des marchandises);

de l’achat, du développement et du renouvellement des équipements fixes et mobiles, ainsi que des moyens de transport internes et routiers;

b)
le financement du coût des opérations de crédit‑bail d’une durée de trois ou de cinq ans relatives à des véhicules, remorques et semi‑remorques de première main et leurs carrosseries interchangeables, adaptés à l’activité de transport routier de marchandises, ainsi qu’aux installations, machines et équipements pour l’utilisation, l’entretien et la réparation des véhicules et pour la manutention des marchandises, à concurrence de 25 % (pour les entreprises individuelles) et de 30 % (pour les coopératives et les groupements) du prix d’achat des biens. Cette aide, prévue aux articles 7 de la loi n° 28/1981 et 5 de la loi n° 4/1985, a été réduite, pour tous le bénéficiaires, à 20 % puis à 15 % du prix d’achat par des lois régionales postérieures;

c)
le financement annuel, en faveur des groupements et des autres formes associatives, à concurrence de 50 %, des investissements destinés à la construction ou à l’achat d’installations et d’équipements nécessaires à la poursuite de l’objet du groupement ou de l’association, ou destinés à contribuer à la gestion et au développement des services communs de garage, d’entretien et de réparation des véhicules, et des installations et équipements qui y sont liés (articles 8 de la loi n° 28/1981 et 6 de la loi n° 4/1985).

10
D’après certaines informations transmises à la Commission des Communautés européennes par les autorités italiennes le 18 novembre 1996, le montant des crédits prévus pour les aides visées à l’article 4 de la loi n° 4/1985, pour la période comprise entre 1985 et 1995, se serait élevé à 13 000 millions de ITL (6,7 millions d’euros) et les demandes retenues auraient été au nombre de 155. En moyenne, le niveau des aides versées aurait été compris entre 13 et 26 % des coûts et des intérêts des emprunts. Le montant prévu pour la période comprise entre 1981 et 1985 aurait atteint 930 millions de ITL (0,4 million d’euros) et 14 demandes auraient été retenues durant cette période (point II des motifs de la décision attaquée).

11
Les crédits prévus pour les aides visées à l’article 5 de la loi n° 4/1985 auraient atteint 23 300 millions de ITL (11,8 millions d’euros) durant la période comprise entre 1985 et 1995, et 1 691 demandes auraient été retenues, pour un financement moyen de l’ordre de 19 %, durant cette période. En 1993, 83 demandes auraient été accueillies et le niveau de l’aide aurait été de 10 %. De 1981 à 1985, 305 demandes auraient été retenues et 5 790 millions de ITL (2,9 millions d’euros) d’aides auraient été versés (point II des motifs de la décision attaquée).

12
D’après les informations communiquées à la Commission par le gouvernement italien à la suite de l’ouverture de la procédure administrative par cette dernière, les aides octroyées en application de l’article 6 de la loi n° 4/1985 étaient destinées à des investissements dans le secteur du transport combiné, à savoir l’achat de caisses mobiles et des installations d’accrochage correspondantes sur des véhicules et semi‑remorques à usage intermodal. Selon ces informations, ces aides représentaient 10 à 15 % du montant total des aides allouées (points II, septième alinéa, et VIII, septième et huitième alinéas, des motifs de la décision attaquée).

La procédure administrative et la décision attaquée

13
Ayant appris l’existence de la loi n° 4/1985, la Commission a invité, par lettre du 29 septembre 1995, les autorités italiennes à lui transmettre tous les textes législatifs, documents, informations et données nécessaires aux fins d’apprécier la compatibilité du régime d’aides instauré par cette loi avec le marché commun.

14
Par lettre du 14 février 1997, la Commission a informé le gouvernement italien de sa décision d’ouvrir la procédure prévue à l’article 93, paragraphe 2, du traité à l’encontre du régime d’aides en faveur des entreprises de transport routier de marchandises pour le compte d’autrui, institué par les lois nos 28/1981 et 4/1985 (JO C 98, p. 16). Elle invitait les autorités italiennes et les tiers intéressés à présenter leurs observations et à fournir tous les documents, informations et données nécessaires pour examiner la compatibilité des aides en cause avec le marché commun. La Commission a reçu les observations du gouvernement italien le 3 avril 1997, auxquelles était joint le rapport complémentaire de la région (ci‑après le «rapport complémentaire»).

15
Le 30 juillet 1997, la Commission a clos la procédure prévue à l’article 93, paragraphe 2, du traité en adoptant la décision attaquée.

16
Le point VI des motifs de la décision attaquée précise que, puisque les aides en cause visent à améliorer la position concurrentielle des entreprises de transport routier de marchandises pour le compte d’autrui établies dans la région, en réduisant les coûts normaux de leur activité, lesquels continueraient à être supportés par les entreprises concurrentes en dehors de cette région, elles profitaient dès lors à celles‑ci et à ce secteur particulier, ce qui était susceptible de produire une distorsion de concurrence.

17
Tout d’abord, la Commission fait une distinction, au point VII, troisième à onzième alinéa, des motifs de la décision attaquée, entre le marché du transport routier de marchandises au niveau local, régional et national, d’une part, et celui du transport routier international de marchandises, d’autre part. Elle rappelle que, jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement n° 4059/89, le 1er juillet 1990, le premier marché n’était pas ouvert à la concurrence communautaire. En conséquence, les aides accordées avant cette date aux entreprises de transport opérant exclusivement au niveau local, régional ou national ne pouvaient pas affecter les échanges intracommunautaires et ne constituaient donc pas des aides d’État au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité. En revanche, les aides accordées auxdites entreprises après cette date seraient des aides d’État au sens de cette disposition, en ce qu’elles auraient été susceptibles d’affecter les échanges entre les États membres.

18
Quant au marché du transport international de marchandises par route, la Commission indique, au point III, quatrième alinéa, des motifs de la décision attaquée, qu’il a été ouvert à la concurrence intracommunautaire à partir de 1969, date d’entrée en vigueur du règlement n° 1018/68. Elle en déduit, au point VII, dernier alinéa, desdits motifs, que les aides prévues par les lois nos 28/1981 et 4/1985 renforçaient la position financière et, partant, les possibilités d’action des entreprises de transport routier de marchandises pour le compte d’autrui de la région par rapport à celles de leurs concurrents depuis 1969, pour les entreprises faisant du transport international, et pouvaient, de ce fait, avoir une incidence sur les échanges entre les États membres. Lesdites aides constituent donc des aides d’État au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité et le caractère local ou limité de la concurrence des transporteurs régionaux ne saurait exclure l’application de celui‑ci.

19
Examinant ensuite si les aides ainsi qualifiées d’aides d’État sont susceptibles de bénéficier d’une dérogation, la Commission considère, au point VIII, neuvième alinéa, des motifs de la décision attaquée, que les aides au financement de matériel destiné au transport combiné peuvent bénéficier de l’exemption prévue à l’article 3, paragraphe 1, sous e), du règlement nº 1107/70. Quant aux autres aides en cause, elles ne pourraient pas bénéficier de la dérogation prévue par la même disposition, sous d), en raison de l’absence d’une situation de surcapacité et d’un plan d’assainissement du secteur.

20
Selon la décision attaquée, les dérogations prévues à l’article 92, paragraphe 3, sous a) et c), du traité en faveur des aides destinées à favoriser le développement économique de certaines régions ne seraient pas applicables en raison, d’une part, de l’absence de plan de développement régional touchant tous les secteurs de l’économie de la région et, d’autre part, du fait que l’ensemble du territoire de celle‑ci ne fait pas partie des régions pouvant bénéficier des exemptions.

21
Quant aux dérogations prévues à l’article 92, paragraphe 3, sous c), du traité en faveur des aides sectorielles, elles ne s’appliqueraient pas aux aides en cause dans la mesure où celles‑ci ne s’accompagnent d’aucune action d’intérêt commun, telle qu’un plan de restructuration du secteur. En outre, les aides aux opérations de crédit‑bail relatives à l’achat de nouveaux véhicules constitueraient des aides au fonctionnement (point VII, treizième alinéa, des motifs de la décision attaquée).

22
Enfin, au point VIII, dernier alinéa, des motifs de la décision attaquée, il est précisé que l’aide octroyée en vertu des lois nos 28/1981 et 4/1985 aux entreprises de transport routier de marchandises de la région faisant du transport local, régional ou national à partir du 1er juillet 1990, ainsi qu’à celles faisant du transport international, n’est pas compatible avec le marché commun au sens de l’article 92 du traité. La Commission en conclut, au point IX desdits motifs, que, le gouvernement italien ayant mis en œuvre le régime d’aides en cause sans avoir rempli l’obligation de notification, celui‑ci doit être considéré comme illégal et la récupération desdites aides nécessaire en vue de rétablir les conditions de concurrence équitables existant avant l’octroi de telles aides.

23
Le dispositif de la décision attaquée est libellé comme suit:

«Article premier

Les subventions octroyées au titre des lois n° 28/81 et n° 4/85 de la région Frioul‑Vénétie Julienne (ci‑après dénommées ‘subventions’) jusqu’au 1er juillet 1990 aux entreprises faisant exclusivement du transport local, régional ou national ne constituent pas des aides d’État au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

Article 2

Les subventions non couvertes par l’article 1er de la présente décision constituent des aides au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité et sont illégales car elles ont été mises en œuvre en violation de l’article 93, paragraphe 3, du traité.

Article 3

Les subventions destinées au financement de matériels spécifiquement adaptés au transport combiné et utilisés seulement en transport combiné constituent des aides d’État au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité, mais sont compatibles avec le marché commun en vertu de l’article 3, paragraphe 1, sous e), du règlement (CEE) n° 1107/70.

Article 4

Les subventions octroyées à partir du 1er juillet 1990 aux entreprises faisant du transport local, régional ou national et à celles faisant du transport international sont incompatibles avec le marché commun car elles ne remplissent aucune des conditions requises pour les dérogations prévues à l’article 92, paragraphes 2 et 3, du traité, ni les conditions prévues par le règlement (CEE) n° 1107/70.

Article 5

L’Italie supprime et récupère l’aide visée à l’article 4. L’aide est remboursée selon les dispositions de droit interne, majorée des intérêts calculés en appliquant les taux de référence utilisés pour l’évaluation des régimes d’aides régionaux, qui courent à compter du jour où l’aide a été versée jusqu’à la date du remboursement effectif.

[…]

Article 7

La République italienne est destinataire de la présente décision.»

24
À la suite de l’adoption de la décision attaquée, la région, qui avait suspendu l’allocation des aides en cause à partir du 1er janvier 1996, a abrogé le régime d’aides prévu par la loi n° 4/1985 et a pris les mesures nécessaires à la récupération des aides déjà versées.


Sur la procédure

25
Outre le présent recours de la République italienne, certaines entreprises de transport routier de marchandises, qui avaient bénéficié des aides de la région (ci‑après les «entreprises bénéficiaires»), ont également demandé, par requêtes déposées au greffe du Tribunal de première instance des Communautés européennes entre le 2 décembre 1997 et le 26 janvier 1998, enregistrées sous les numéros T‑298/97, T‑312/97, T‑313/97, T‑315/97, T‑600/97 à T‑607/97, T‑1/98, T‑3/98 à T‑6/98 et T‑23/98, l’annulation partielle de la décision attaquée. Par ordonnance du président de la première chambre élargie du 16 juin 1998, ces affaires ont été jointes aux fins de la procédure écrite, de la procédure orale et de l’arrêt.

26
Par ordonnance du président de la quatrième chambre élargie du 29 septembre 1998, la République italienne a été admise à intervenir au soutien des conclusions des entreprises bénéficiaires.

27
Par ordonnance du 24 novembre 1998, la Cour a suspendu la procédure dans la présente affaire jusqu’au prononcé de l’arrêt du Tribunal dans les affaires jointes mentionnées au point 25 du présent arrêt.

28
Par arrêt du 15 juin 2000, Alzetta e.a./Commission, (T‑298/97, T‑312/97, T‑313/97, T‑315/97, T‑600/97 à T‑607/97, T‑1/98, T‑3/98 à T‑6/98 et T‑23/98, Rec. p. II‑2319), le Tribunal a annulé l’article 2 de la décision attaquée, en ce qu’il déclare illégales les aides octroyées à partir du 1er juillet 1990 aux entreprises effectuant exclusivement du transport local, régional ou national, ainsi que l’article 5 de la même décision, en ce qu’il oblige la République italienne à récupérer ces aides. Il a rejeté le recours des entreprises bénéficiaires pour le surplus.

29
Par requête déposée au greffe de la Cour le 3 août 2000, la République italienne a formé un pourvoi contre cet arrêt du Tribunal, enregistré sous le numéro C‑298/00 P.


Sur l’objet du recours

30
La République italienne demande à la Cour, à titre principal, d’annuler les articles 2 et 5 de la décision attaquée et, à titre subsidiaire, d’annuler l’article 5 de cette décision en tant qu’il impose à cet État membre de procéder à la récupération des aides litigieuses, majorées des intérêts. Elle demande également la condamnation de la Commission aux dépens.

31
À l’appui de son recours, la République italienne invoque quatre moyens d’annulation tirés de la violation, en premier lieu, de l’article 92, paragraphe 1, du traité, en deuxième lieu, des articles 92, paragraphe 3, sous c), dudit traité et 3, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 1107/70, en troisième lieu, de l’article 93 du même traité et, en quatrième lieu, des principes de proportionnalité et de protection de la confiance légitime ainsi que de l’obligation de motivation.

32
La Commission demande à la Cour de rejeter le recours et de condamner la République italienne aux dépens. Toutefois, à la suite du prononcé de l’arrêt Alzetta e.a./Commission, précité, la Commission a admis l’interprétation du Tribunal relative aux aides octroyées à partir du 1er juillet 1990 aux entreprises effectuant exclusivement du transport local, régional ou national et, en conséquence, elle a renoncé à son moyen de défense concernant de telles aides.

33
Aux termes de l’article 92, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour:

«La Cour peut à tout moment, d’office, examiner les fins de non‑recevoir d’ordre public, ou constater, les parties entendues, que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer; la décision est prise dans les conditions prévues à l’article 91, paragraphes 3 et 4, du présent règlement.»

34
À cet égard, ainsi que la Cour l’a déjà relevé au point 28 du présent arrêt, l’arrêt Alzetta e.a./Commission, précité, qui a été prononcé après l’introduction du présent recours, a annulé les articles 2 et 5 de la décision attaquée dans la mesure où ils concernent les aides aux entreprises de transport routier local, régional ou national.

35
D’ailleurs, au cours de la procédure concernant le pourvoi contre l’arrêt Alzetta e.a./Commission, précité, la Commission n’a soulevé aucun grief concernant l’annulation par le Tribunal des articles 2 et 5 de la décision attaquée dans la mesure où cette annulation vise les aides aux entreprises de transport routier local, régional ou national. Dans son arrêt de ce jour, Italie/Commission (C‑298/00 P, non encore publié au Recueil), la Cour a rejeté tous les griefs soulevés tant par la République italienne que par la Commission contre ledit arrêt du Tribunal.

36
En outre, l’autorité absolue dont jouit un arrêt d’annulation d’une juridiction communautaire (voir, notamment, arrêts du 21 décembre 1954, France/Haute Autorité, 1/54, Rec. p. 7, 34; Italie/Haute Autorité, 2/54, Rec. p. 73, 104, et du 11 février 1955, Assider/Haute Autorité, 3/54, Rec. p. 123, 139) s’attache tant au dispositif de l’arrêt qu’aux motifs qui en constituent le soutien nécessaire (voir arrêt du 14 septembre 1999, Commission/AssiDomän Kraft Products e.a., C‑310/97 P, Rec. p. I‑5363, point 54).

37
Dans ces conditions, il résulte nécessairement de l’arrêt Alzetta e.a./Commission, précité, et du rejet du pourvoi dirigé contre celui‑ci par l’arrêt de ce jour, Italie/Commission, précité, que le présent recours est devenu sans objet en ce qui concerne les conclusions tendant à l’annulation des articles 2 et 5 de la décision attaquée dans la mesure où ils visent les aides aux entreprises de transport routier local, régional ou national.

38
Dès lors, il appartient à la Cour de vérifier si la décision attaquée est compatible avec les principes du droit communautaire invoqués par la République italienne uniquement en ce qu’elle déclare illégales des aides octroyées au titre des lois nos 28/1981 et 4/1985 aux entreprises exerçant une activité de transport routier international (ci‑après les «aides litigieuses»).


Sur le recours

Sur le premier moyen

Sur l’erreur de droit concernant l’interprétation de l’article 92, paragraphe 1, du traité

    Argumentation des parties

39
Par la première branche du premier moyen, la République italienne fait valoir que, en ce qui concerne l’application de l’article 92, paragraphe 1, du traité aux aides litigieuses, la Commission se limiterait à évoquer la simple possibilité que les échanges entre les États membres soient affectés par de telles aides et ne démontrerait pas l’existence d’une menace réelle et concrète de distorsion de concurrence.

    Appréciation de la Cour

40
À titre liminaire, il convient de relever que l’article 92, paragraphe 1, du traité définit les aides qui sont réglementées par celui‑ci comme étant les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions, dans la mesure où elles affectent les échanges entre les États membres.

41
À cet égard, les règles de procédure établies par le traité varient selon que les aides constituent des aides existantes ou des aides nouvelles.

42
En ce qui concerne les aides existantes, en vertu des dispositions de l’article 93, paragraphes 1 et 2, du traité et conformément au principe de la sécurité juridique, dans le cadre de son contrôle permanent de ces aides, si, après avoir mis les intéressés en demeure de présenter leurs observations, la Commission constate qu’une aide n’est pas compatible avec le marché commun aux termes de l’article 92 dudit traité, ou que cette aide est appliquée de manière abusive, elle décide que l’État intéressé doit la supprimer ou la modifier dans le délai qu’elle détermine. De telles aides peuvent donc être régulièrement exécutées tant que la Commission n’a pas constaté leur incompatibilité (voir arrêts du 30 juin 1992, Italie/Commission, C‑47/91, Rec. p. I‑4145, points 23 et 25, ainsi que du 15 mars 1994, Banco Exterior de España, C‑387/92, Rec. p. I‑877, point 20).

43
Quant aux aides nouvelles, l’article 93, paragraphe 3, du traité prévoit que la Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer de telles aides. Celle‑ci procède alors à un premier examen du projet d’aides. Si, au terme de cet examen, elle estime que ce projet n’est pas compatible avec le marché commun, elle ouvre sans délai la procédure d’examen contradictoire prévue au paragraphe 2 dudit article. Dans une telle hypothèse, l’État membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées avant que la procédure n’ait abouti à une décision finale. Les aides nouvelles sont donc soumises à un contrôle préventif exercé par la Commission et elles ne peuvent en principe être mises à exécution aussi longtemps que cette dernière ne les a pas déclarées compatibles avec le traité.

44
Dans le cadre de son appréciation tant des aides existantes, en vertu de l’article 92, paragraphes 1 et 2, du traité, que des aides nouvelles qui doivent lui être notifiées avant d’être mises en œuvre, en vertu de l’article 93, paragraphe 3, dudit traité, la Commission est tenue, en effet, non pas d’établir une incidence réelle de ces aides sur les échanges entre les États membres et une distorsion effective de la concurrence, mais doit seulement examiner si ces aides sont susceptibles d’affecter ces échanges et de fausser la concurrence.

45
Il en est de même dans l’hypothèse où des aides nouvelles ont été octroyées sans avoir été préalablement notifiées à la Commission. Si, en revanche, la Commission devait, dans sa décision, faire la démonstration de l’effet réel d’aides déjà accordées, cela aboutirait à favoriser les États membres qui versent des aides en violation de l’obligation de notification prévue à l’article 93, paragraphe 3, du traité au détriment de ceux qui notifient les aides à l’état de projet (voir arrêt du 14 février 1990, France/Commission, dit «Boussac Saint Frères», C‑301/87, Rec. p. I‑307, points 32 et 33).

46
Il convient donc d’écarter l’interprétation restrictive de l’article 92, paragraphe 1, du traité proposée par la République italienne, selon laquelle la Commission serait tenue d’établir l’existence d’une incidence réelle et effective des aides litigieuses sur les échanges intracommunautaires ainsi que sur la concurrence et, partant, de rejeter la première branche du premier moyen.

Sur l’incidence des aides litigieuses sur les échanges intracommunautaires et la concurrence

    Argumentation des parties

47
Par la deuxième branche du premier moyen, la République italienne soutient, en premier lieu, que le montant total très modeste des aides litigieuses, qui devraient logiquement être assimilées aux aides dites «de minimis» exonérées de l’obligation de notification, prouverait qu’elles ne peuvent pas avoir d’incidence sur les échanges intracommunautaires et la concurrence.

48
En deuxième lieu, la République italienne souligne que la quasi‑totalité des bénéficiaires des aides litigieuses exercent leurs activités de transport dans les limites du territoire de la région. Or, la Commission se serait abstenue d’établir, notamment, que certaines entreprises communautaires ont subi un préjudice causé par lesdites aides. Elle se serait limitée à constater que, depuis le 1er juillet 1990, les entreprises de la région sont, en principe, en concurrence avec tout autre transporteur italien ou communautaire effectuant du cabotage en Italie, sans même démontrer que les transporteurs des autres États membres avaient effectivement accès au marché italien, une telle démonstration présupposant, à tout le moins, l’absence d’épuisement du contingent communautaire. Or, ce contingent aurait été épuisé et, de ce fait, toute concurrence en matière de transport international de marchandises par route aurait été exclue.

49
En troisième lieu, s’agissant de la fonction «compensatoire» des aides dans le cadre d’une situation de désavantage concurrentiel objectif, la République italienne fait valoir que, en raison de sa situation géographique, la région devait surtout défendre sa modeste part de marché international à l’égard des transporteurs routiers autrichiens, croates et slovènes qui, appartenant à des pays non communautaires – à tout le moins jusqu’en 1994 pour ce qui concerne la république d’Autriche –, bénéficiaient de mesures d’État et de situations de faveur peu susceptibles d’être éliminées au moyen d’accords bilatéraux.

50
À cet égard, la Commission soutient que le marché du transport routier des marchandises se caractérise par l’existence de nombreuses entreprises de modeste dimension et qu’une intervention de l’État, même de faible importance, en faveur de certaines d’entre elles est appelée à avoir des répercussions importantes sur les autres et à affecter les échanges intracommunautaires ainsi que la concurrence. En outre, en faisant référence au point VII, huitième alinéa, des motifs de la décision attaquée, elle ajoute que, dans la plupart des cas, même si un véhicule a été acheté dans le but d’être utilisé exclusivement pour le transport local, il peut néanmoins être employé pour assurer des services de transport international.

51
La Commission ajoute que la détention d’une part extrêmement réduite du marché national ou une faible participation aux échanges intracommunautaires ne suffisent pas pour prouver l’absence d’incidence sur ceux‑ci et de répercussions sur la concurrence au niveau communautaire. Ce qui importerait, en revanche, ce serait le fait que les entreprises bénéficiaires des aides litigieuses et celles installées dans d’autres États membres qui ne bénéficient pas de ces aides sont à même de fournir les mêmes services.

    Appréciation de la Cour

52
À cet égard, lorsqu’une aide financière accordée par un État membre renforce la position d’une entreprise par rapport à celle d’autres entreprises concurrentes dans les échanges intracommunautaires, ces derniers doivent être considérés comme influencés par l’aide (voir arrêts du 17 septembre 1980, Philip Morris/Commission, 730/79, Rec. p. 2671, point 11, et du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, C‑278/92 à C‑280/92, Rec. p. I‑4103, point 40).

53
S’agissant du premier argument du gouvernement italien, portant sur l’importance relativement faible d’une aide ou la taille relativement modeste de l’entreprise bénéficiaire, il convient de rappeler que de telles circonstances n’excluent pas a priori l’éventualité que les échanges entre États membres soient affectés (voir arrêts du 21 mars 1990, Belgique/Commission, dit «Tubemeuse», C‑142/87, Rec. p. I‑959, point 43; Espagne/Commission, précité, point 42, et du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, C‑280/00, Rec. p. I‑7747, point 81).

54
Une aide d’une importance relativement faible est de nature à affecter la concurrence et les échanges entre États membres lorsque le secteur dans lequel opèrent les entreprises qui en bénéficient connaît une vive concurrence (voir arrêts du 11 novembre 1987, France/Commission, 259/85, Rec. p. 4393, point 24; du 21 mars 1991, Italie/Commission, C‑303/88, Rec. p. I‑1433, point 27, et du 26 septembre 2002, Espagne/Commission, C‑351/98, Rec. p. I‑8031, point 63).

55
En l’espèce, s’agissant du marché du transport international de marchandises par route, qui a été ouvert à la concurrence communautaire à partir de 1969, la part des opérations exécutée par les transporteurs de la région par rapport au transport total effectué en Italie était de 16 % en tonnes par kilomètre en 1993. Or, ces derniers sont en concurrence avec d’autres entreprises italiennes accomplissant la même activité.

56
Par ailleurs, la Commission a constaté, à juste titre, que les aides litigieuses réduisaient les coûts normaux des entreprises du secteur du transport routier de marchandises dans la région, ce qui pouvait entraîner une distorsion de concurrence (point VI, dernier alinéa, des motifs de la décision attaquée). Elle en a conclu que, «[d]ès lors que la position des entreprises d’un secteur particulier participant aux échanges entre États membres se trouve renforcée, ces échanges doivent être considérés comme affectés au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité» (point VII, dernier alinéa, desdits motifs).

57
De plus, il est clair que, lorsqu’un secteur est caractérisé par un nombre élevé de petites entreprises, une aide, même relativement modeste sur le plan individuel, mais ouverte potentiellement à l’ensemble ou à une très large partie des entreprises du secteur, peut avoir des répercussions sur la concurrence et les échanges entre les États membres (voir, en ce sens, arrêt du 26 septembre 2002, Espagne/Commission, précité, point 64). À cet égard, les chiffres communiqués à la Commission par le gouvernement italien confirment que plus de 80 % des bénéficiaires des aides litigieuses sont des petites entreprises.

58
En outre, la communication de la Commission, du 6 mars 1996, relative aux aides de minimis (JO C 68, p. 9), qui a été remplacée par la communication de la Commission, du 23 juillet 1996, relative à l’encadrement communautaire des aides d’État aux petites et moyennes entreprises (JO  C 213, p. 4), exclut le secteur des transports de son champ d’application.

59
À la lumière de ces considérations, le premier argument de la République italienne, relatif à la modicité des aides litigieuses, doit être rejeté.

60
S’agissant du deuxième argument de la République italienne, qui prétend, tout d’abord, que la plupart des entreprises bénéficiaires desdites aides exercent exclusivement leur activité au niveau local, il y a lieu de rappeler que la condition d’application de l’article 92, paragraphe 1, du traité, selon laquelle l’aide doit être de nature à affecter les échanges entre États membres, ne dépend pas de la nature locale ou régionale des services de transport fournis ou de l’importance du domaine d’activité concerné (voir arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, précité, point 82).

61
En l’espèce, c’est donc à bon droit que la Commission, au point VII, dixième alinéa, des motifs de la décision attaquée, a constaté que le caractère limité de la concurrence des transporteurs régionaux en matière de transport international par route ne saurait exclure l’application de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

62
Ensuite, ainsi que la Cour l’a déjà relevé, aux points 44 à 46 du présent arrêt, il suffit que la Commission établisse que les aides litigieuses sont susceptibles d’affecter les échanges entre les États membres et menacent de fausser la concurrence, sans qu’il soit nécessaire d’établir que certaines entreprises communautaires ont subi un préjudice en raison de l’octroi desdites aides. L’argument de la République italienne sur ce point doit donc être rejeté.

63
Enfin, s’agissant du contingentement des autorisations communautaires, il convient de rappeler que, en vertu des dispositions pertinentes du règlement no 1018/68, ces autorisations, établies au nom du transporteur et utilisables pour un seul véhicule, étaient octroyées, à l’intérieur des contingents nationaux, pour une durée d’un an en ce qui concerne le transport international de marchandises par route, les titulaires d’une telle autorisation étant habilités, durant ces périodes de validité, à effectuer, avec un véhicule, sans limitation, des transports de marchandises entre les États membres de leur choix.

64
Dès lors, les régimes de contingentement en vigueur de 1969 à 1993 sur le marché du transport international de marchandises par route ont permis l’instauration d’une situation de concurrence effective dans la limite des contingents fixés, susceptible d’être affectée par l’octroi des aides litigieuses.

65
Or, à supposer même que le contingent communautaire ait été épuisé, cette circonstance n’aurait pas permis de conclure à l’absence d’incidence des aides litigieuses sur les échanges intracommunautaires et la concurrence. En effet, compte tenu du libre choix réservé par les régimes du contingentement aux titulaires des autorisations communautaires, en ce qui concerne les États membres entre lesquels ils peuvent réaliser des transports internationaux de marchandises par route, l’épuisement de ces contingents ne fournirait, en toute hypothèse, aucune indication sur l’utilisation qui en a été faite, notamment pour les transports internationaux à partir ou à destination de l’Italie ou, plus précisément, de la région.

66
Étant donné que l’activité essentiellement locale de la plupart des bénéficiaires des aides litigieuses et l’existence de régimes de contingentement n’étaient pas de nature à exclure l’incidence de ces aides sur les échanges entre les États membres, le deuxième argument invoqué par la République italienne au soutien de la deuxième branche du premier moyen, doit être rejeté.

67
S’agissant du troisième argument, tiré de la prétendue fonction compensatoire que rempliraient les aides litigieuses dans le cadre d’une situation de désavantage concurrentiel objectif, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, la circonstance qu’un État membre cherche à rapprocher, par des mesures unilatérales, les conditions de concurrence existant dans un certain secteur économique de celles prévalant dans d’autres États membres ne saurait enlever à ces mesures le caractère d’aides (voir arrêts du 10 décembre 1969, Commission/France, 6/69 et 11/69, Rec. p. 523, points 20 et 21, ainsi que du 19 mai 1999, Italie/Commission, C‑6/97, Rec. p. I‑2981, point 21).

68
Il s’ensuit que, sans même qu’il y ait lieu de s’interroger sur le point de savoir si la République italienne a démontré que la situation des transporteurs routiers autrichiens, croates et slovènes plaçaient les transporteurs routiers établis dans la région dans une situation concurrentielle défavorable, il convient de rejeter ce troisième argument et, partant, la deuxième branche du premier moyen ne saurait être accueillie.

Sur l’obligation de motivation

69
S’agissant de la troisième branche du premier moyen, qui est tirée de l’obligation de motivation incombant à la Commission, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 190 du traité CE (devenu article 253 CE) doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications (arrêt du 13 mars 1985, Pays‑Bas et Leeuwarder Papierwarenfabriek/Commission, 296/82 et 318/82, Rec. p. 809, point 19).

70
À cet égard, il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 190 du traité doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, notamment, arrêts du 19 septembre 2002, Espagne/Commission, C‑114/00, Rec. p. I‑7657, points 62 et 63, ainsi que du 30 septembre 2003, Allemagne/Commission, C‑301/96, non encore publié au Recueil, point 87).

71
Néanmoins, s’agissant plus particulièrement d’une décision en matière d’aides d’État, la Cour a jugé que, s’il peut ressortir, dans certains cas, des circonstances mêmes dans lesquelles l’aide a été accordée qu’elle est de nature à affecter les échanges entre États membres et à fausser ou à menacer de fausser la concurrence, il incombe, à tout le moins, à la Commission d’évoquer ces circonstances dans les motifs de sa décision (arrêts Pays‑Bas et Leeuwarder Papierwarenfabriek/Commission, précité, point 24; du 24 octobre 1996, Allemagne e.a./Commission, C‑329/93, C‑62/95 et C‑63/95, Rec. p. I‑5151, point 52, et du 13 février 2003, Espagne/Commission, C‑409/00, Rec. p. I‑1487, point 74).

72
En l’espèce, il ressort des considérations qui précèdent que la Commission a indiqué de manière claire, dans les motifs de la décision attaquée, les circonstances dans lesquelles les aides litigieuses ont été accordées et a précisé les raisons pour lesquelles elles sont de nature à affecter les échanges entre les États membres et à fausser ou à menacer de fausser la concurrence. En outre, elle a réfuté les objections qui avaient été émises par le gouvernement italien durant la procédure administrative. Dans ces conditions, la troisième branche du premier moyen ne saurait être accueillie.

73
Pour l’ensemble de ces motifs, le premier moyen invoqué par la République italienne au soutien de son recours, tiré de la violation de l’article 92, paragraphe 1, du traité et de l’insuffisance de motivation de la décision attaquée, doit être rejeté.

Sur le deuxième moyen

74
Par son deuxième moyen, la République italienne fait grief à la Commission, d’une part, d’avoir exclu que les dérogations visées aux articles 3, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 1107/70 et 92, paragraphe 3, sous c), du traité puissent s’appliquer au cas d’espèce et, d’autre part, de ne pas avoir motivé la décision attaquée à cet égard.

Sur l’article 3, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 1107/70

    Argumentation des parties

75
S’agissant de la première branche du deuxième moyen, relative à l’article 3, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 1107/70, la République italienne soutient que, en dépit de la constatation de la Commission selon laquelle, contrairement à ladite disposition, les subventions au crédit‑bail sont «difficilement compatibles» avec le marché commun, en raison du fait que «notamment […] elles entraînent une augmentation de la capacité», la région avait précisé que les aides en matière de crédit‑bail pour véhicules neufs avaient été octroyées temporairement eu égard aux difficultés structurelles dues à une exploitation excessive des moyens techniques et humains, s’accompagnant d’un risque de répercussions négatives en termes de sécurité.

76
La Commission soutient que l’exclusion du bénéfice de la dérogation en question se fonde sur le non‑respect des deux conditions d’application de l’article 3, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 1107/70, à savoir l’encadrement des aides par un plan d’assainissement du secteur et l’existence d’une surcapacité à éliminer. Selon elle, les autorités italiennes ont elles‑mêmes confirmé, au point 2.4, premier et deuxième alinéas, du rapport complémentaire que «[…] [dans la région], il n’existe pas de surcapacité structurelle dans les transports routiers de marchandises», ni, par conséquent, de plan d’assainissement du secteur au sens de ladite disposition. Quant à l’argument selon lequel les aides destinées à rénover le parc de véhicules de la région auraient été nécessaires pour des raisons de protection de l’environnement et de sécurité, la Commission relève que, au point VIII, sixième alinéa, des motifs de la décision attaquée, elle a précisé que «[…] les subventions au leasing et matériel roulant constituent des aides difficilement compatibles avec le marché commun du fait, notamment, qu’elles entraînent une augmentation de la capacité, contrairement à ce que prévoit l’article 3, paragraphe 1, point d) du règlement (CEE) n° 1107/70» et que la République italienne n’a présenté aucun argument démontrant une prétendue erreur d’appréciation à cet égard.

    Appréciation de la Cour

77
L’article 3, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 1107/70 ne vise que les aides accordées afin d’éliminer, dans le cadre d’un plan d’assainissement, une surcapacité entraînant de graves difficultés structurelles. En l’espèce, aucun élément du dossier ne permet de présumer l’existence d’une telle surcapacité. Il ressort, au contraire, du point VIII, troisième alinéa, des motifs de la décision attaquée que, dans leurs observations sur la décision d’ouverture de la procédure, les autorités italiennes ont souligné que, dans la région, «il n’[existait] pas de surcapacité dans le secteur mais [...] au contraire un sous‑dimensionnement du parc de véhicules d’environ 20 % par rapport aux besoins réels, c’est‑à‑dire une exploitation excessive des moyens et du personnel existant dans la région […]».

78
En outre, force est de constater que les régimes d’aides en cause ne se réfèrent en aucune manière à la nécessité de ne pas augmenter la capacité du secteur des transports dans la région et n’introduisent aucune condition en vue d’éviter une telle augmentation. Partant, la première branche du deuxième moyen ne saurait être accueillie.

Sur l’article 92, paragraphe 3, sous c), du traité

    Argumentation des parties

79
S’agissant de la deuxième branche du deuxième moyen, relative à l’article 92, paragraphe 3, sous c), du traité, la République italienne soutient que, contrairement à ce que prétend la Commission, selon laquelle l’exemption visée audit article ne saurait être applicable au régime en cause dans la mesure où il s’agit de mesures qui ne s’accompagnent d’aucune action d’intérêt commun, les aides litigieuses se présentaient comme des moyens devant permettre une véritable restructuration destinée à améliorer la qualité des services. Il aurait donc été possible de considérer lesdites aides comme étant destinées à favoriser le développement de certaines activités au sens dudit article.

80
Pour réfuter la prétendue violation de l’article 92, paragraphe 3, sous c), du traité, la Commission rappelle que, au point 2.4, deuxième alinéa, du rapport complémentaire, les autorités italiennes n’ont fourni aucun élément précis concernant un plan de restructuration concret et détaillé dans le secteur concerné, mais qu’elles ont plutôt fait des allusions générales à un futur processus de restructuration et de rationalisation à mettre en œuvre au moyen de nouveaux instruments législatifs en matière d’aides. Dans la décision attaquée, elle aurait considéré que les aides à la location‑vente de véhicules neufs sont comparables à des aides au fonctionnement ou à des aides qui visent à libérer une entreprise des coûts qu’elle aurait dû normalement supporter dans le cadre de sa gestion courante ou de ses activités normales. De telles aides, en principe, fausseraient les conditions de concurrence dans les secteurs au bénéfice desquels elles sont octroyées, sans pour autant être capables, par elles mêmes, d’atteindre l’un des buts fixés audit article 92, paragraphe 3, et, partant, elles ne relèveraient pas du champ d’application de cette disposition.

    Appréciation de la Cour

81
Un État membre qui demande à pouvoir octroyer des aides en dérogation aux règles du traité est tenu à un devoir de collaboration envers la Commission. En vertu de ce devoir, il lui incombe, notamment, de fournir tous les éléments de nature à permettre à cette institution de vérifier que les conditions de la dérogation sollicitée sont remplies (voir arrêt du 28 avril 1993, Italie/Commission, C‑364/90, Rec. p. I‑2097, point 20).

82
Les appréciations économiques, dans le cadre de l’application de l’article 92, paragraphe 3, du traité, doivent être effectuées dans un contexte communautaire, ce qui signifie que la Commission a l’obligation d’examiner l’impact d’une aide sur la concurrence et le commerce intracommunautaire. Il incombe à la Commission, lors de cet examen, de mettre en balance les effets bénéfiques de l’aide avec ses effets négatifs sur les conditions des échanges et sur le maintien d’une concurrence non faussée (voir arrêts précités Philip Morris/Commission, points 24 et 26, ainsi que du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, point 51).

83
La Commission jouit, pour l’application de l’article 92, paragraphe 3, du traité, d’un large pouvoir d’appréciation dont l’exercice implique des évaluations complexes d’ordre économique et social qui doivent être effectuées dans un contexte communautaire (voir, notamment, arrêt du 24 février 1987, Deufil/Commission, 310/85, Rec. p. 901, point 18). Le contrôle juridictionnel appliqué à l’exercice de ce pouvoir d’appréciation se limite à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation ainsi qu’au contrôle de l’exactitude matérielle des faits retenus et de l’absence d’erreur de droit, d’erreur manifeste dans l’appréciation des faits ou de détournement de pouvoir (voir arrêts précités du 26 septembre 2002, Espagne/Commission, point 74, et du 13 février 2003, Espagne/Commission, point 93).

84
En l’espèce, il ressort du dossier que, contrairement aux allégations de la République italienne, la région n’a fourni, au cours de la procédure administrative, aucun élément précis concernant, notamment, un plan concret et détaillé de restructuration du secteur du transport routier de marchandises. Au contraire, il ressort du point 2.4, deuxième alinéa, du rapport complémentaire que, dans l’immédiat, aucun plan de restructuration n’était nécessaire et la région s’est bornée à faire référence à d’éventuelles mesures visant à la rationalisation dudit secteur, au moyen, notamment, de mesures destinées à encourager les fusions et d’incitations, en particulier, au transport combiné, mesures qui étaient susceptibles d’être adoptées prochainement par l’administration régionale.

85
Dans ces conditions, la Commission a pu, à bon droit et sans outrepasser les limites de son pouvoir d’appréciation, considérer que les éléments à sa disposition ne lui permettaient pas d’établir que les aides litigieuses s’accompagnaient d’une action d’intérêt commun, telle qu’un plan de restructuration.

86
En outre, puisque le remplacement de véhicules anciens représente un coût que toutes les entreprises de transport routier doivent normalement supporter pour pouvoir continuer à offrir leurs services sur le marché à des conditions compétitives, la Commission a également constaté à bon droit, au point VIII, treizième alinéa, des motifs de la décision attaquée, que les aides au crédit‑bail octroyées pour financer un tel remplacement, qui ont renforcé artificiellement la situation financière des entreprises bénéficiaires au détriment des entreprises concurrentes, constituaient des aides au fonctionnement qui ne relèvent pas, en principe, du champ d’application de l’article 92, paragraphe 3, du traité. Dans ces conditions, la deuxième branche du deuxième moyen ne saurait être accueillie.

Sur la défaut de motivation de la décision attaquée

87
S’agissant de la troisième branche du deuxième moyen, tirée d’un prétendu défaut de motivation de la décision attaquée, il convient de se référer aux principes rappelés aux points 69 et 70 du présent arrêt. À cet égard, il ressort des motifs de la décision attaquée que la Commission y a clairement indiqué les raisons pour lesquelles les aides litigieuses ne pouvaient pas bénéficier des dérogations prévues aux articles 92, paragraphe 3, sous c), du traité et 3, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 1107/70 et, partant, la troisième branche du deuxième moyen ne saurait être accueillie.

88
Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen invoqué par la République italienne au soutien de son recours.

Sur le troisième moyen

Argumentation des parties

89
Par son troisième moyen, la République italienne fait valoir que, puisque le marché national du transport routier n’était pas ouvert à la concurrence communautaire et que l’octroi des aides litigieuses n’a pu affecter les échanges intracommunautaires, celles‑ci doivent être qualifiées d’aides existantes et, par conséquent, l’article 93, paragraphe 3, du traité ne leur est pas applicable.

90
La République italienne allègue que, les aides litigieuses étant qualifiées d’aides existantes, la Commission devait les soumettre à la procédure visée à l’article 93, paragraphes 1 et 2, du traité, ce qui a pour conséquence qu’elle est uniquement habilitée à imposer la suppression ou la modification de telles aides dans le délai qu’elle détermine. En revanche, en ayant jugé que lesdites aides étaient des aides nouvelles, soumises en tant que telles à la procédure visée à l’article 93, paragraphe 3, du traité, et en ayant, en conséquence, considéré que celles‑ci étaient illégales et, simultanément, incompatibles avec le marché commun, tout en prévoyant explicitement une obligation de restitution à l’État, la Commission aurait commis une violation grave des formes substantielles et procédurales qui affecte la validité de la décision attaquée, du moins en ce qu’elle ordonne la récupération des aides litigieuses.

91
En revanche, la Commission soutient que des aides existantes comprennent uniquement, d’une part, les aides qui existaient avant la date d’entrée en vigueur du traité CE ou avant l’adhésion des nouveaux États membres aux Communautés et, d’autre part, les aides qui ont été régulièrement autorisées, explicitement ou implicitement, par cette institution. Or, les aides litigieuses ne relèveraient d’aucune de ces deux catégories.

92
En premier lieu, selon la Commission, ce qui importe serait le fait que, à un moment déterminé, les mesures en question ont pu apparaître comme des aides, toutes les conditions d’application de l’article 92, paragraphe 1, du traité, se trouvant alors remplies.

93
En second lieu, l’ouverture progressive, par l’introduction d’un régime de contingentement, d’un marché précédemment fermé à la concurrence communautaire montrerait, par sa nature même, l’existence au niveau communautaire d’un préjudice au moins potentiel aux échanges, lequel serait suffisant en soi pour considérer comme remplie la condition particulière prévue à l’article 92, paragraphe 1, du traité. Le fait que le contingent est appliqué et peut être utilisé, même jusqu’à épuisement, ainsi que le soutient la République italienne, serait bien la preuve qu’une concurrence effective a existé. La Commission ajoute que les autorisations communautaires prévues atteignaient déjà le nombre de 5 268 en 1985 et elles étaient de 65 936 en 1992, dont 7 770 ont été attribuées audit État membre.

Appréciation de la Cour

94
En l’espèce, comme la Cour l’a déjà relevé au point 5 du présent arrêt, le secteur du transport routier international a été ouvert à la concurrence par le règlement n° 1018/68 à partir de 1969 et complètement libéralisé depuis le 1er janvier 1993.

95
Ainsi que la Cour l’a également constaté aux points 52 à 68 du présent arrêt, les aides litigieuses renforçaient la position financière et, partant, les possibilités d’action des transporteurs routiers de marchandises pour le compte d’autrui de la région par rapport à leurs concurrents et pouvaient, de ce fait, avoir une incidence sur les échanges entre les États membres.

96
Instituées en 1981 et en 1985, lesdites aides relevaient donc, lors de leur instauration, du champ d’application de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

97
Il s’ensuit qu’elles devaient être considérées comme des régimes d’aides nouveaux soumis, à ce titre, à l’obligation de notification prévue à l’article 93, paragraphe 3, du traité.

98
Dès lors, le troisième moyen, tiré de la qualification erronée des aides litigieuses comme des aides nouvelles, doit être rejeté.

Sur le quatrième moyen

Sur la violation du principe de proportionnalité

    Argumentation des parties

99
Par la première branche de son quatrième moyen, la République italienne soutient que, puisque les aides litigieuses ont eu une incidence insignifiante sur la situation des entreprises bénéficiaires et que, partant, la Communauté n’a aucun intérêt au rétablissement de la situation antérieure, la décision attaquée, en ce qu’elle porte obligation de récupération de ces aides, méconnaît le principe de proportionnalité. En outre, le remboursement de celles‑ci représenterait, pour lesdites entreprises, une charge très importante susceptible d’entraîner la disparition probable du marché d’un grand nombre d’entre elles et de provoquer ainsi une crise grave en matière d’emploi et sur le plan social, de telle sorte que cette récupération serait pratiquement impossible. Au surplus, la décision attaquée ne serait pas motivée sur ce point.

100
En revanche, la Commission observe, en premier lieu, que la récupération d’une aide d’État accordée illégalement, pour rétablir le statu quo ante, ne peut pas, en principe, être considérée comme une mesure disproportionnée par rapport à l’objectif des dispositions du traité en matière d’aides. Elle fait valoir à cet égard que la disparition probable du marché d’entreprises bénéficiaires d’aides illégales à la suite de l’exécution de l’obligation de remboursement ne constitue pas un motif justifiant la non‑récupération de celles-ci (voir arrêt du 15 janvier 1986, Commission/Belgique, 52/84, Rec. p. 89, point 14).

101
En deuxième lieu, quant à la crainte d’une crise sociale grave, s’il est vrai que des difficultés insurmontables peuvent empêcher un État membre de respecter les obligations qui lui incombent en vertu du droit communautaire, selon une jurisprudence constante, la simple crainte de telles difficultés ne saurait justifier lタルabstention par celui‑ci d’appliquer correctement le droit (voir arrêt du 29 janvier 1998, Commission/Italie, C‑280/95, Rec. p. I‑259, point 16).

102
En troisième lieu, la Commission soutient qu’elle n’est pas tenue d’invoquer des motifs précis pour justifier l’exercice de son pouvoir d’ordonner le remboursement de l’aide illégale. Toutefois, elle fait valoir que, dans la décision attaquée, il est précisé qu’elle a considéré que la récupération des aides litigieuses était nécessaire aux fins de rétablir les conditions de concurrence équitables qui existaient avant l’octroi desdites aides.

    Appréciation de la Cour

103
Il convient tout d’abord de rappeler que la suppression d’une aide illégale par voie de récupération est la conséquence logique de la constatation de son illégalité. Par conséquent, la récupération d’une aide étatique illégalement accordée, en vue du rétablissement de la situation antérieure, ne saurait, en principe, être considérée comme une mesure disproportionnée par rapport aux objectifs des dispositions du traité en matière d’aides d’État (voir arrêts Tubemeuse, précité, point 66, et du 14 janvier 1997, Espagne/Commission, C‑169/95, Rec. p. I‑135, point 47).

104
Par la restitution de l’aide, le bénéficiaire perd l’avantage dont il avait bénéficié sur le marché par rapport à ses concurrents et la situation antérieure au versement de l’aide est rétablie (voir arrêt du 4 avril 1995, Commission/Italie, C‑350/93, Rec. p. I‑699, point 22). Il résulte également de cette fonction du remboursement que, en règle générale, sauf circonstances exceptionnelles, la Commission ne saurait méconnaître son pouvoir discrétionnaire, reconnu par la jurisprudence de la Cour, lorsqu’elle demande à l’État membre de récupérer les sommes accordées au titre d’aides illégales puisqu’elle ne fait que rétablir la situation antérieure (voir arrêts du 17 juin 1999, Belgique/Commission, C‑75/97, Rec. p. I‑3671, point 66, et du 7 mars 2002, Italie/Commission, C‑310/99, Rec. p. I‑2289, point 99).

105
En l’espèce, la République italienne se bornant à prétendre que le remboursement des aides litigieuses représenterait, pour les entreprises bénéficiaires, une charge très importante susceptible d’entraîner la disparition du marché d’un grand nombre d’entre elles et de provoquer ainsi une crise grave en matière d’emploi et sur le plan social, il suffit de relever, conformément à la jurisprudence de la Cour, que la crainte de difficultés internes ne saurait justifier qu’un État membre ne respecte pas les obligations qui lui incombent en vertu du droit communautaire (voir, notamment, arrêts du 27 juin 2000, Commission/Portugal, C‑404/97, Rec. p. I‑4897, point 52; du 7 mars 2002, Italie/Commission, précité, point 105, et du 26 juin 2003, Commission/Espagne, C‑404/00, Rec. p. I‑6695, point 55).

106
Par conséquent, rien n’indique que la République italienne était confrontée à l’existence de circonstances exceptionnelles justifiant une impossibilité de remboursement et, partant, la première branche du quatrième moyen ne saurait être accueillie.

Sur la violation du principe de protection de la confiance légitime

    Argumentation des parties

107
Par la deuxième branche de son quatrième moyen, la République italienne soutient que, puisque les entreprises bénéficiaires se seraient fiées à la régularité d’aides instituées et versées depuis de nombreuses années, la décision attaquée est contraire au principe de protection de la confiance légitime, en tant qu’elle impose la récupération des aides accordées à partir du 1er juillet 1990.

108
La Commission rétorque que, contrairement à ce que prétend la République italienne, lorsque des subventions constituent des aides au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité et qu’elles sont illégales, dans la mesure où elles ont été mises en œuvre en violation de l’article 93, paragraphe 3, du traité, la prétendue violation du principe de protection de la confiance légitime à l’égard des entreprises bénéficiaires n’est pas pertinente puisqu’il n’existait aucune raison objective de considérer que, en 1981 et en 1985, ladite institution n’avait rien à objecter aux aides instituées par les lois nos 28/1981 et 4/1985.

109
En outre, la Commission fait valoir que, si les autorités italiennes avaient le moindre doute sur la nature des mesures en question, elles auraient pu et dû procéder sans délai à la notification des projets. En réalité, il ressort des considérations de fait et de droit qui ont conduit à l’adoption de la décision attaquée que, en 1981 et en 1985, il n’existait aucune raison objective de considérer que la Commission n’avait rien à objecter auxdites mesures. Le fait que, après avoir été informée de l’existence des lois nos 28/1981 et 4/1985 et avoir engagé la procédure prévue à l’article 93, paragraphe 2, du traité, elle est arrivée à la conclusion que les mesures accordées jusqu’au 1er juillet 1990 aux entreprises de transport routier exerçant leurs activités exclusivement au niveau local, régional ou national ne constituaient pas des aides d’État, ne peut avoir créé, ni pour les entreprises bénéficiaires ni pour la région, aucune confiance quant à la légitimité des aides versées après le 1er juillet 1990.

    Appréciation de la Cour

110
Quant au principe de protection de la confiance légitime, il y a lieu de rappeler que, par communication publiée au Journal officiel desCommunautés européennes (JO 1983, C 318, p. 3), la Commission a informé les bénéficiaires potentiels d’aides d’État du caractère précaire des aides qui leur seraient octroyées illégalement, en ce sens qu’ils pourraient être amenés à les restituer (voir arrêts du 20 septembre 1990, Commission/Allemagne, C‑5/89, Rec. p. I‑3437, point 15, et du 7 mars 2002, Italie/Commission, précité, point 102).

111
La possibilité, pour le bénéficiaire d’une aide illégale, d’invoquer des circonstances exceptionnelles, qui ont légitimement pu fonder sa confiance dans le caractère régulier de cette aide, et de s’opposer, par conséquent, à son remboursement ne saurait certes être exclue. Dans un tel cas, il appartient au juge national, éventuellement saisi, d’apprécier, le cas échéant après avoir posé à la Cour des questions préjudicielles d’interprétation, les circonstances en cause (voir arrêts précités Commission/Allemagne, point 16, et du 7 mars 2002, Italie/Commission, point 103).

112
En revanche, un État membre, dont les autorités ont octroyé une aide en violation des règles de procédure prévues à l’article 93 du traité, ne saurait invoquer la confiance légitime des bénéficiaires pour se soustraire à l’obligation de prendre les mesures nécessaires en vue de l’exécution d’une décision de la Commission lui ordonnant de récupérer l’aide. Admettre une telle possibilité reviendrait, en effet, à priver les dispositions des articles 92 et 93 du traité de tout effet utile, dans la mesure où les autorités nationales pourraient ainsi se fonder sur leur propre comportement illégal pour mettre en échec l’efficacité des décisions prises par la Commission en vertu de ces dispositions du traité (voir arrêts précités Commission/Allemagne, point 17, et du 7 mars 2002, Italie/Commission, point 104).

113
En l’espèce, il n’est pas contesté, tout d’abord, que, contrairement aux obligations imposées aux États membres par l’article 93, paragraphe 3, du traité, les aides litigieuses ont été octroyées sans avoir été préalablement notifiées.

114
Ensuite, ainsi que la Cour l’a déjà constaté au point 54 du présent arrêt, une aide, même relativement modeste sur le plan individuel, mais ouverte potentiellement à l’ensemble ou à une très large partie des entreprises du secteur, peut avoir des répercussions sur la concurrence et les échanges entre les États membres. Sauf à admettre l’existence de circonstances exceptionnelles susceptibles de s’opposer au remboursement d’une telle aide, le fait que les bénéficiaires sont de petites entreprises effectuant des opérations d’importance limitée n’est pas pertinent.

115
Enfin, la République italienne estime que, puisque les entreprises bénéficiaires s’étaient fiées à la régularité d’aides instituées et versées depuis de nombreuses années, cette longue période avait entraîné une confiance légitime desdites bénéficiaires à l’égard du bien‑fondé de telles aides.

116
À cet égard, il importe de rappeler que l’exigence fondamentale de la sécurité juridique s’oppose à ce que la Commission puisse retarder indéfiniment l’exercice de ses pouvoirs (voir arrêts du 14 juillet 1972, Geigy/Commission, 52/69, Rec. p. 787, points 20 et 21, ainsi que du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C‑74/00 P et C‑75/00 P, Rec. p. I‑7869, point 140).

117
Certes, un retard pris par la Commission pour décider qu’une aide est illégale et qu’elle doit être supprimée et récupérée par un État membre, peut, dans certaines circonstances, fonder chez les bénéficiaires de ladite aide une confiance légitime de nature à empêcher la Commission d’enjoindre audit État membre d’ordonner la restitution de cette aide (voir arrêt du 24 novembre 1987, RSV/Commission, 223/85, Rec. p. 4617, point 17). Cependant, les circonstances de l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt étaient exceptionnelles et ne présentent aucune similitude avec celles de la présente espèce. En effet, la mesure en cause dans ledit arrêt concernait un secteur qui, depuis plusieurs années, était bénéficiaire d’aides d’État autorisées par la Commission et elle était destinée à faire face aux coûts supplémentaires d’une opération qui avait déjà bénéficié d’une aide autorisée (arrêt du 28 janvier 2003, Allemagne/Commission, C‑334/99, Rec. p. I‑1139, point 44).

118
En tout état de cause, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 77 de ses conclusions, en cas d’aides d’État non notifiées, un tel retard ne saurait être imputé à la Commission qu’à partir du moment où elle a pris connaissance de l’existence des aides incompatibles avec le marché commun.

119
En l’espèce, il est constant que la Commission n’a eu connaissance des aides litigieuses qu’en septembre 1995. Compte tenu, d’une part, que celles‑ci n’avaient pas fait l’objet d’une autorisation de la Commission et, d’autre part, que la situation complexe dans le cadre de laquelle ces aides avaient été octroyées n’était pas connue de cette dernière, il était donc nécessaire, avant de parvenir à une décision, d’effectuer une enquête. Dans ces conditions, le délai qui s’est écoulé entre septembre 1995 et la date d’adoption de la décision attaquée, à savoir le 30 juillet 1997, est raisonnable. En outre, la République italienne n’a invoqué aucun élément de nature à démontrer que la Commission aurait retardé ladite procédure.

120
Dès lors, la décision attaquée ne peut, ni en tant qu’elle prescrit le remboursement des aides litigieuses ni en tant qu’elle ordonne le versement d’intérêts, être regardée comme portant atteinte à la confiance légitime des entreprises bénéficiaires desdites aides et, partant, la deuxième branche du quatrième moyen ne saurait être accueillie.

Sur l’étendue de l’obligation de récupération des aides litigieuses

    Argumentation des parties

121
Par la troisième branche de son quatrième moyen, la République italienne soutient, en ce qui concerne la date à partir de laquelle la décision attaquée impose l’obligation de récupérer les aides octroyées dans le secteur du transport international, que l’article 4 de la décision attaquée, auquel renvoie l’article 5 de celle‑ci, prévoyant la récupération des aides incompatibles avec le traité, constate sans équivoque l’incompatibilité des aides versées à partir du 1er juillet 1990 et ne doit donc pas être interprété à la lumière des motifs de ladite décision.

122
En revanche, la Commission soutient que le dispositif d’un acte est indissociable de sa motivation et doit donc être interprété en tenant compte des motifs qui ont conduit à son adoption. En l’espèce, la motivation préciserait que la date du 1er juillet 1990 concerne uniquement les aides octroyées aux entreprises qui effectuent des activités de transport routier local, régional ou national, à l’exclusion des entreprises actives dans le secteur du transport international par route.

123
Par ailleurs, il ne serait pas non plus indispensable, selon la Commission, de recourir à l’exposé des motifs pour interpréter correctement l’article 4 de la décision attaquée, mais il suffirait de situer cet article dans le contexte du dispositif global dont il fait partie et de le lire à la lumière des articles de celui‑ci qui le précèdent.

    Appréciation de la Cour

124
En l’espèce, l’article 4 de la décision attaquée est formulé de manière équivoque en ce qui concerne l’exigence de récupération des aides litigieuses, laquelle serait susceptible de viser soit toutes celles octroyées aux entreprises effectuant du transport international depuis leur instauration, soit uniquement les aides allouées à partir du 1er juillet 1990.

125
À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, le dispositif d’un acte est indissociable de sa motivation et doit être interprété, si besoin est, en tenant compte des motifs qui ont conduit à son adoption (voir arrêts du 15 mai 1997, TWD/Commission, C‑355/95 P, Rec. p. I‑2549, point 21, et Commission/Portugal, précité, point 41).

126
Il ressort des motifs de la décision attaquée que, d’une part, au point VII, troisième alinéa, de ceux‑ci, la Commission a distingué entre les entreprises faisant exclusivement du transport local, régional ou national et celles faisant du transport international et que, d’autre part, aux cinquième à septième alinéa du même point VII, elle a identifié la date du 1er juillet 1990 comme étant pertinente en ce qui concerne les seules subventions octroyées aux premières entreprises. Au demeurant, au onzième alinéa dudit point VII, la Commission a considéré que les aides litigieuses renforçaient la position financière des entreprises de transport routier de marchandises pour le compte d’autrui de la région par rapport à leurs concurrents depuis le 1er juillet 1990 pour les entreprises faisant du transport local, régional ou national et depuis 1969 pour celles faisant du transport international et pouvaient, de ce fait, avoir une incidence sur les échanges entre les États membres.

127
Il s’ensuit que, ainsi qu’il ressort également du point VIII, dernier alinéa, des motifs de la décision attaquée, l’article 4 de celle‑ci doit être interprété en ce sens que les aides octroyées en vertu des lois n°s 28/1981 et 4/1985, à partir du 1er juillet 1990, aux entreprises faisant du transport local, régional ou national, ainsi que celles octroyées aux entreprises effectuant du transport international, sont incompatibles avec le marché commun.

128
Cette interprétation résulte également de la lecture du dispositif de la décision attaquée qui, considéré dans son ensemble, ne présente pas d’ambiguïté. En effet, l’article 2 dudit dispositif, lu en combinaison avec l’article 1er de celui‑ci, déclare illégales, au motif qu’elles n’avaient pas été notifiées à la Commission comme l’exige l’article 93, paragraphe 3, du traité, les aides octroyées, au titre des régimes d’aides institués par les lois nos 28/1981 et 4/1985, à des entreprises effectuant du transport international et, à partir du 1er juillet 1990, à des entreprises effectuant du transport local, régional ou national. L’article 3 dudit dispositif constate la compatibilité avec le marché commun des aides au transport combiné, parce qu’elles peuvent bénéficier d’une dérogation en vertu de l’article 3, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 1107/70. Quant à l’article 4 du même dispositif, il détermine, parmi les aides illégales visées à l’article 2 de celui‑ci, celles qui sont incompatibles avec le marché commun au motif qu’elles ne remplissent pas les conditions pour bénéficier d’une dérogation. Dans l’économie du dispositif, il s’agit donc des aides illégales qui n’ont pas été déclarées compatibles avec le marché commun, par l’article 3 de ce dispositif, à savoir, pour ce qui est du secteur du transport international, les aides octroyées depuis l’instauration de celles‑ci par les lois nos 28/1981 et 4/1985. En conséquence, la troisième branche du quatrième moyen n’est pas susceptible de prospérer.

Sur l’obligation de motivation

129
Quant à la quatrième branche du quatrième moyen, relatif au prétendu défaut de motivation de la décision attaquée, il suffit de rappeler qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour que, en matière d’aides d’État, lorsque, contrairement aux dispositions de l’article 93, paragraphe 3, du traité, l’aide projetée a déjà été versée, la Commission, qui a le pouvoir d’enjoindre aux autorités nationales d’en ordonner la restitution, n’est pas tenue d’exposer des motifs spécifiques pour justifier de son exercice (voir arrêts précités du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, point 78, et du 17 juin 1999, Belgique/Commission, point 82). Néanmoins, il est constant que, aux points VI à VIII des motifs de la décision attaquée, la Commission a explicité les raisons pour lesquelles elle a décidé d’exiger la restitution des aides litigieuses. Il y a donc lieu de constater que ladite décision n’est entachée à cet égard d’aucun défaut de motivation et, partant, la quatrième branche du quatrième moyen ne saurait être accueillie.

130
Il s’ensuit que le quatrième moyen doit également être rejeté.


Sur les dépens

131
Aux termes de l’article 69, paragraphe 6, du règlement de procédure, la Cour, en cas de non‑lieu à statuer, règle librement les dépens. Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

132
En l’espèce, la République italienne avait déposé sa requête et sa réplique dans la présente affaire concluant à ce que la Cour annule, notamment, les articles 2 et 5 de la décision attaquée concernant les aides octroyées aux entreprises du transport routier local, régional et national avant que cette partie du recours soit devenu sans objet. Pour autant que le recours a encore un objet, la République italienne a succombé en ses moyens. À la lumière de ces considérations, il y a lieu de condamner chaque partie à supporter ses propres dépens.


Par ces motifs,

LA COUR (sixième chambre)

déclare et arrête:

1)
Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions du recours tendant à l’annulation des articles 2 et 5 de la décision 98/182/CE de la Commission, du 30 juillet 1997, concernant les aides octroyées par la région Frioul‑Vénétie Julienne (Italie) aux entreprises de transport routier de marchandises de la région, en tant que ces articles déclarent illégales les aides octroyées à partir du 1er juillet 1990 aux entreprises effectuant exclusivement du transport local, régional ou national.

2)
Le recours est rejeté pour le surplus.

La République italienne et la Commission des Communautés européennes supportent leurs propres dépens.

Skouris

Cunha Rodrigues

Puissochet

Schintgen

Macken

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 29 avril 2004.

Le greffier

Le président

R. Grass

V. Skouris


1
Langue de procédure: l'italien.