Language of document : ECLI:EU:C:2009:428

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

7 juillet 2009 (*)

Table des matières

I –  Les antécédents du litige

II –  L’arrêt Commission/Grèce

III –  La procédure précontentieuse

IV –  La procédure devant la Cour

A –  Les montants d’aide visés par le recours

B –  Les indications écrites données en réponse aux questions posées par la Cour

V –  Sur le manquement

A –  Sur l’objet du recours

B –  Sur l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce

1.  Argumentation des parties

2.  Appréciation de la Cour

VI –  Sur les sanctions pécuniaires

A –  Sur la demande d’astreinte

1.  Argumentation des parties

2. Appréciation de la Cour

a)  Observations liminaires

b)  Sur la persistance du manquement

c)  Sur le choix d’un moyen autre qu’un remboursement en numéraire

d)  Sur la charge de la preuve

e)  Sur le montant d’aide constitué par l’injection de capital

f)  Sur le montant d’aide concernant la taxe dite «spatosimo»

g)  Sur le montant d’aide relatif aux loyers d’aéroport

h)  Conclusion

B –  Sur le montant de l’astreinte

1.  Observations liminaires

2.  Sur la durée de l’infraction

3.  Sur la gravité de l’infraction

4.  Sur la capacité de paiement de l’État défendeur

5.  Conclusion

6.  Sur la date de prise d’effet et la périodicité de l’astreinte

C –  Sur l’imposition cumulative d’une astreinte et d’une somme forfaitaire

1.  Argumentation des parties

2.  Appréciation de la Cour

a)  Sur le cumul des deux sanctions

b)  Sur la pertinence de l’imposition d’une somme forfaitaire

c)  Sur le montant de la somme forfaitaire

VII –  Sur les dépens

«Manquement d’État − Aides d’État – Mesures visant à l’exécution d’un arrêt de la Cour – Article 228 CE − Sanctions pécuniaires − Astreinte – Somme forfaitaire»

Dans l’affaire C‑369/07,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 228 CE, introduit le 3 août 2007,

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme E. Righini ainsi que par MM. I. Hadjiyiannis et D.Triantafyllou, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République hellénique, représentée par Mme A. Samoni-Rantou et M. P. Mylonopoulos, en qualité d’agents, assistés de Mes V. Christianos et P. Anestis, dikigoroi,

partie défenderesse,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, MM. P. Jann, C. W. A. Timmermans, A. Rosas, K. Lenaerts et T. von Danwitz, présidents de chambre, MM. A. Tizzano et J. N. Cunha Rodrigues, Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteur), MM. K. Schiemann et A. Arabadjiev, Mme C. Toader et M. J.-J. Kasel, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: Mme R. Şereş, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 novembre 2008,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 5 février 2009,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour:

–        de constater que, en n’ayant pas adopté les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt rendu par la Cour le 12 mai 2005, Commission/Grèce (C‑415/03, Rec. p. I‑3875), concernant le manquement de la République hellénique aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 3 de la décision 2003/372/CE de la Commission, du 11 décembre 2002, concernant l’aide octroyée par la Grèce à Olympic Airways (JO 2003, L 132, p. 1, ci-après la «décision litigieuse»), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent au titre de cette décision et de l’article 228 CE;

–        d’ordonner à la République hellénique de verser à la Commission une astreinte de 53 611 euros par jour de retard dans l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce, précité, concernant la décision litigieuse, à compter du jour où l’arrêt sera prononcé dans la présente affaire jusqu’au jour où ledit arrêt Commission/Grèce aura été exécuté;

–        d’ordonner à la République hellénique de verser à la Commission une somme forfaitaire, dont le montant résulte de la multiplication d’un montant journalier de 10 512 euros par le nombre de jours de persistance de l’infraction entre le jour du prononcé de l’arrêt Commission/Grèce, précité, et la date à laquelle l’arrêt sera rendu dans la présente affaire en ce qui concerne la décision litigieuse;

–        à titre subsidiaire, si la Cour constatait que la récupération a effectivement eu lieu, d’ordonner à la République hellénique de verser à la Commission une somme forfaitaire, dont le montant résulte de la multiplication d’un montant journalier de 10 512 euros par le nombre de jours de persistance entre la date du prononcé de l’arrêt Commission/Grèce, précité, et la date de la récupération par la République hellénique des aides déclarées illégales par la décision litigieuse, et

–        de condamner la République hellénique aux dépens.

I –  Les antécédents du litige

2        Le 11 décembre 2002, la Commission a approuvé la décision litigieuse, dont le dispositif était libellé comme suit:

«Article premier

L’aide à la restructuration octroyée par la Grèce à Olympic Airways sous la forme

a)      de garanties d’emprunt consenties à la compagnie jusqu’au 7 octobre 1994, en application de l’article 6 de la loi grecque n° 96/75 du 26 juin 1975;

b)      de nouvelles garanties d’emprunt à hauteur de 378 millions de dollars des États-Unis relatives à des emprunts à contracter avant le 31 mars 2001 pour l’achat de nouveaux appareils et pour les investissements nécessaires au déménagement d’Olympic Airways au nouvel aéroport de Spata;

c)      d’un allègement de la dette d’[Olympic Airways] à hauteur de 427 milliards de drachmes grecques;

d)      d’une conversion de la dette de la compagnie en capital pour 64 milliards de drachmes grecques;

e)      d’une injection de capital de 54 milliards de drachmes grecques, ramenée à 40,8 milliards de drachmes grecques, en trois tranches respectives de 19, 14 et 7,8 milliards de drachmes grecques, en 1995, 1998 et 1999

est considérée comme incompatible avec le marché commun, au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité, vu que les conditions suivantes d’octroi de l’aide initiale ne sont plus respectées:

a)      la mise en œuvre effective du plan de restructuration afin d’atteindre la viabilité à long terme de la compagnie;

b)      le respect des 24 engagements spécifiques accompagnant l’approbation de l’aide, et

c)      le suivi régulier de la mise en œuvre des aides à la restructuration.

Article 2

L’aide d’État accordée par la Grèce sous forme de tolérance vis-à-vis de la pérennisation du non-paiement des cotisations de sécurité sociale, de la TVA due par Olympic Aviation sur le carburant et les pièces de rechange, des loyers dus aux divers aéroports, des redevances aéroportuaires dues à l’aéroport de Spata ainsi qu’à d’autres aéroports, de la taxe dite ‘spatosimo’ est incompatible avec le marché commun.

Article 3

1.      La Grèce adopte les mesures qui s’imposent pour récupérer auprès de la compagnie bénéficiaire l’aide mentionnée à l’article 1er, d’un montant de 14 milliards de drachmes grecques (41 millions d’euros), qui est incompatible avec le traité, ainsi que l’aide mentionnée à l’article 2, qui lui a été accordée de manière illégale.

2.      La récupération de l’aide s’effectue sans retard, conformément aux procédures prévues par la législation nationale à condition qu’elles permettent l’exécution immédiate et efficace de la décision. Les montants qui devront être récupérés comprendront les intérêts dus à compter de l’octroi de l’aide jusqu’à la date effective de remboursement de celle-ci. Les intérêts seront calculés sur la base du taux de référence utilisé pour calculer l’équivalent-subvention net des aides régionales.

Article 4

La Grèce informe la Commission dans un délai de deux mois, à compter de la date de notification de la présente décision, des mesures adoptées en application de celle-ci.

[…]»

II –  L’arrêt Commission/Grèce

3        Le 24 septembre 2003, la Commission, conformément à l’article 88, paragraphe 2, CE, a introduit un recours en manquement contre la République hellénique relatif à l’exécution de la décision litigieuse.

4        Dans son arrêt Commission/Grèce, précité, la Cour a jugé:

«En ne prenant pas, dans le délai prescrit, toutes les mesures nécessaires pour le remboursement des aides jugées illégales et incompatibles avec le marché commun – à l’exclusion de celles qui concernent les cotisations à l’organisme national de la sécurité sociale –, conformément à l’article 3 de la décision [litigieuse], la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu dudit article 3.»

III –  La procédure précontentieuse

5        Le 18 mai 2005, la Commission a adressé à la République hellénique une communication dans laquelle elle priait cette dernière de l’informer des mesures prises afin d’assurer l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce, précité.

6        Dans sa réponse du 2 juin 2005, cet État membre a indiqué que les mesures de recouvrement devaient avoir lieu auprès d’Olympic Airways et que les procédures de recouvrement allaient être conclues en quelques mois grâce à la vente des actifs et des participations d’Olympic Airways. La République hellénique a également précisé que l’exécution de l’ordre de recouvrement de l’aide de 41 millions d’euros, visé à l’article 1er de la décision litigieuse, avait été suspendue par le tribunal administratif d’Athènes en attendant l’issue d’un recours en annulation formé par Olympic Airways contre cette décision devant le Tribunal de première instance des Communautés européennes.

7        Par lettre du 8 juillet 2005, la République hellénique a réaffirmé que les services du gouvernement étaient au dernier stade de l’élaboration de la procédure de récupération des aides en question.

8        Par une lettre de mise en demeure du 18 octobre 2005, la Commission a alors engagé la procédure prévue à l’article 228 CE, pour non-exécution de l’arrêt Commission/Grèce, précité.

9        Dans sa réponse du 19 décembre 2005, la République hellénique a informé la Commission qu’elle contestait l’affirmation selon laquelle les mesures prises pour mettre en œuvre cet arrêt n’avaient pas été notifiées. Elle a relevé que les autorités nationales avaient procédé correctement et sans délai à la récupération des aides visées dans la décision litigieuse.

10      Le 4 avril 2006, la Commission a transmis à la République hellénique un avis motivé, qui a été notifié à cet État membre le 10 avril 2006. Dans cet avis, la Commission invitait la République hellénique à prendre les mesures nécessaires pour l’exécution de l’arrêt en cause dans un délai de deux mois à compter de la réception dudit avis motivé. Dans celui-ci, il était également précisé que, si la Commission devait saisir la Cour en vertu de l’article 228 CE, elle indiquerait les montants de l’astreinte et de la somme forfaitaire.

11      La République hellénique a répondu à l’avis motivé par une lettre du 9 juin 2006, réitérant les indications fournies dans les lettres précédentes. Elle a d’ailleurs relevé l’existence d’un recours administratif introduit par Olympic Airways et a allégué des difficultés d’achèvement des procédures nationales de récupération des aides litigieuses.

12      Dans ces conditions, la Commission a décidé de saisir la Cour.

13      Par un arrêt du 12 septembre 2007, Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission (T‑68/03, Rec. p. II‑2911), le Tribunal a annulé les articles 2 et 3 de la décision litigieuse en ce qu’ils visent la tolérance vis-à-vis de la pérennisation du non-paiement, d’une part, de redevances d’aéroport dues par Olympic Airways à l’aéroport international d’Athènes et, d’autre part, de la taxe sur la valeur ajoutée due par l’entreprise Olympic Aviation sur le carburant et des pièces de rechange. Le Tribunal a rejeté le recours pour le surplus.

IV –  La procédure devant la Cour

A –  Les montants d’aide visés par le recours

14      La Commission, dans son mémoire en réplique, a précisé que, compte tenu de l’arrêt du Tribunal Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission, précité, il restait encore à récupérer les montants d’aide suivants, sans intérêts:

–        41 millions d’euros au titre de l’article 1er de la décision litigieuse;

–        2,5 millions d’euros de loyers dus à certains aéroports;

–        61 millions d’euros pour la taxe dite «spatosimo», et

–        28,9 millions d’euros pour la compensation des dettes entre la République hellénique et Olympic Airways ou entre certains aéroports et ladite entreprise au titre de redevances aéroportuaires.

15      En ce qui concerne ce dernier montant d’aide, la Commission, dans une réponse en date du 26 novembre 2008 à une question écrite posée par la Cour le 14 novembre 2008, a confirmé que la somme de 28,9 millions d’euros, énoncée au point 209 de la décision litigieuse, ne devait pas faire l’objet de récupération, ladite somme ne constituant pas en elle-même une aide d’État.

B –  Les indications écrites données en réponse aux questions posées par la Cour

16      Le 20 octobre 2008, la Cour a demandé, en vertu de l’article 54 bis du règlement de procédure, à la République hellénique de préciser, notamment, par quelles modalités et sur quel fondement juridique les montants d’aide à récupérer auprès d’Olympic Airways au titre des articles 1er et 2 de la décision litigieuse avaient été compensés par des dettes de l’État envers cette société.

17      La République hellénique a répondu, le 31 octobre 2008, qu’un certain nombre de dettes d’Olympic Airways, comprenant la restitution du capital visé à l’article 1er de la décision litigieuse et du solde de la taxe dite «spatosimo», ainsi qu’une facture de la direction de l’aviation civile, d’un montant de 176 802 euros, avaient été compensées avec les indemnités allouées à la société par des sentences arbitrales. Les indemnités en question auraient été accordées à cette société par un tribunal arbitral constitué en vertu d’une clause d’arbitrage prévue par l’article 27 du décret législatif 3560/1956 portant validation du contrat conclu entre Aristote Onasis et l’État.

18      La République hellénique a indiqué que la première sentence arbitrale 57/2006, du 6 décembre 2006, relative au premier recours introduit le 20 mars 2006 (ci-après la «sentence arbitrale du 6 décembre 2006»), a alloué à Olympic Airways les indemnités suivantes:

–        37 051 392 euros au titre de l’expulsion prématurée de l’aéroport d’Elliniko;

–        17 996 655 euros au titre du déménagement au nouvel aéroport;

–        75 615 756 euros au titre des préjudices subis en raison de la construction des installations à l’aéroport international d’Athènes;

–        1 375 707 euros au titre des préjudices subis en raison du retard de construction des installations de l’aéroport international d’Athènes, avec pour conséquence qu’Olympic Airways ait été obligée d’utiliser les installations de l’aéroport d’Elliniko et d’en assurer la maintenance;

–        183 300 000 euros au titre des coûts supplémentaires de fonctionnement de l’aéroport international d’Athènes, du 29 mars 2001 au 31 décembre 2005, par rapport à ceux de l’aéroport d’Elliniko;

–        88 026 000 euros au titre des coûts spéciaux de fonctionnement en raison de la durée d’attente plus grande à l’aéroport international d’Athènes, par rapport à l’ancien aéroport, du 29 mars 2001 au 31 décembre 2005;

–        3 753 472 euros en raison de l’obligation de couvrir les coûts liés au péage de l’autoroute qui est obligatoirement utilisée pour accéder à l’aéroport de Spata par la voie Attiki, et

–        250 000 000 euros au titre de fonds immobilisés.

19      Selon la République hellénique, cette première sentence arbitrale aurait estimé le montant total du préjudice subi par Olympic Airways devant être indemnisé à 657 118 982 euros. À la suite d’un certain nombre de rectifications, le montant des indemnités se serait élevé à 563 896 458 euros, avec les intérêts légaux.

20      La République hellénique a souligné que, par la suite, des compensations des montants alloués à Olympic Airways par rapport aux dettes de cette dernière à l’égard de l’État ont été effectuées. Parmi ces compensations auraient figuré le remboursement de l’aide visée à l’article 1er de la décision litigieuse, ainsi que le paiement du solde de la taxe dite «spatosimo» et de la dette de 176 802 euros concernant la facture de la direction de l’aviation civile visée à l’article 2 de cette décision.

21      La République hellénique a ajouté que, à partir du mois d’août 2007, un certain nombre d’ordres de paiement au bénéfice d’Olympic Airways ont été émis par l’État sur le fondement des sentences arbitrales rendues en faveur de cette dernière. Ces fonds n’auraient pu être versés à la société en raison de l’existence de dettes de celle-ci, comprenant les montants d’aide susvisés. La compensation des dettes de la société avec les montants qui devaient lui être versés aurait constitué une obligation légale incombant aux autorités fiscales. Le premier ordre de paiement aurait suffi à acquitter intégralement le solde des dettes de la société au titre de la décision litigieuse (d’un montant total d’environ 120 millions d’euros, intérêts compris).

22      La République hellénique a relevé que le premier ordre de paiement, portant sur les indemnités allouées par la sentence arbitrale du 6 décembre 2006, était le document 2516/31 août 2007 pour un montant de 601 289 003 euros. Ce montant aurait résulté de l’addition des intérêts légaux et de la soustraction du montant total de 612 859 581 euros de retenues d’un montant de 11 550 577 euros.

23      La République hellénique a observé que les différentes opérations de compensation ont eu lieu au travers des avis comptables suivants:

–        2922 DOY/FAVE, concernant le remboursement (avec intérêts) de l’augmentation de capital (article 1er de la décision litigieuse), par compensation avec une fraction équivalente de l’ordre de paiement 2516/31.8.2007, portant sur un montant de 601 289 003 euros;

–        2927 à 2933 et 2940 DOY/FAVE, concernant l’acquittement (avec intérêts) des montants au titre de la taxe dite «spatosimo» (article 2 de la décision litigieuse), par compensation avec une fraction équivalente de l’ordre de paiement 2516/31.8.2007, et

–        2926 DOY/FAVE, concernant l’acquittement du loyer dû à la direction de l’aviation civile, d’un montant de 176 802 euros (facture n° 3307/98), par compensation avec une fraction équivalente de l’ordre de paiement 2516/31.8.2007.

V –  Sur le manquement

A –  Sur l’objet du recours

24      Il y a lieu de constater à titre liminaire que, eu égard à l’arrêt du Tribunal Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission, précité, et compte tenu des indications données par la Commission relatives au montant d’aide énoncé au point 209 de la décision litigieuse, le litige entre les parties porte encore sur l’exécution de l’article 1er de la décision litigieuse (apport en capital) ainsi que sur la mise en œuvre de deux des obligations énoncées à l’article 2 de cette décision, à savoir le remboursement de la taxe dite «spatosimo» et de loyers dus à certains aéroports.

B –  Sur l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce

1.     Argumentation des parties

25      La Commission relève que la République hellénique n’a pas pris les mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt Commission/Grèce, précité.

26      La Commission rappelle que le seul moyen de défense dont dispose un État membre qui n’a pas récupéré des aides illégales est celui tiré d’une impossibilité absolue d’exécuter la décision de récupération de ces aides et qu’un État membre qui, lors de l’exécution d’une telle décision, rencontre des difficultés imprévues et imprévisibles est tenu de soumettre ces problèmes à l’appréciation de la Commission.

27      Celle-ci soutient que la République hellénique n’a jamais invoqué une impossibilité absolue de récupérer les aides litigieuses, mais uniquement des difficultés juridiques et pratiques. Or, s’il est vrai que la récupération doit s’effectuer conformément aux procédures prévues par le droit national, l’exécution immédiate et effective de la décision en cause doit être assurée. En effet, il ne suffirait pas d’engager la procédure de récupération, mais cette procédure devrait aboutir à des résultats concrets.

28      La Commission affirme, dans son mémoire en réplique, qu’elle a été informée d’une opération de restitution des aides litigieuses pour la première fois par le mémoire en défense de la République hellénique, déposé devant la Cour le 23 octobre 2007. Cet État membre n’aurait jamais allégué auparavant avoir récupéré lesdites aides. Les seules actions communiquées à la Commission auraient été des quantifications préliminaires de certaines catégories d’aides et leur enregistrement en tant que dettes envers l’État.

29      Étant donné qu’aucune explication ne lui a été fournie à cet égard, la Commission déclare ne pouvoir accepter ni les calculs des montants prétendument payés ni les éléments de preuve apportés par la République hellénique concernant le recouvrement des aides litigieuses.

30      En effet, les documents fournis pour établir la récupération tant de la taxe dite «spatosimo» que des loyers d’aéroport auraient consisté en une déclaration de la direction de l’aviation civile du 2 octobre 2007, selon laquelle ces dettes «ont été soit réglées, soit compensées, soit transmises aux autorités fiscales compétentes en vue d’être constatées et recouvrées, conformément au code de recouvrement des recettes publiques».

31      Or, de l’avis de la Commission, un tel document ne pourrait constituer une preuve de remboursement en bonne et due forme. En tout état de cause, la partie défenderesse n’aurait pas présenté de pièces justificatives concrètes relatives aux mouvements de compte de nature à confirmer que les montants en question ont été effectivement versés. La documentation qui était jointe à la réponse de la République hellénique à l’avis motivé n’aurait pas non plus contenu d’indications suffisamment précises sur la récupération effective des différents montants d’aide.

32      La Commission indique que les autorités nationales lui ont fourni ultérieurement des copies de sentences arbitrales, mais sans documents à l’appui ou explications concernant la manière dont les montants alloués à Olympic Airways avaient été déterminés. On pourrait, dès lors, se demander dans quelle mesure les titres des dédommagements adjugés peuvent réellement être liés aux obligations de l’État envers ladite société concernant l’exploitation de l’ancien aéroport d’Athènes.

33      La Commission évoque également des doutes sur la régularité de la récupération invoquée. En effet, les documents soumis par la partie défenderesse mentionneraient soit un acquittement de dette soit une compensation de créances/dettes. Indépendamment du fait qu’une éventuelle compensation n’a eu lieu qu’au mois d’octobre 2007, les autorités nationales n’auraient pas démontré sur quel fondement juridique l’État était débiteur d’Olympic Airways.

34      De l’avis de la Commission, dans le cas où la Cour admettrait que la récupération des montants d’aide a eu lieu, Olympic Airways n’aurait pas été en mesure de rembourser les montants en cause sans injection de nouvelles subventions.

35      La République hellénique allègue que l’ensemble des montants d’aides a été récupéré entre les mois d’août et de septembre 2007. Le total des indemnités, qui ont été allouées à Olympic Airways par le tribunal arbitral, a été compensé avec des arriérés de dettes de ladite société vis-à-vis de l’État. Parmi ces dettes, qui se seraient éteintes par compensation, auraient figuré les soldes d’arriérés des aides visées par la décision litigieuse.

36      La République hellénique ajoute qu’elle avait informé la Commission dès le mois de mars 2006 de ce qu’Olympic Airways avait formé des recours en indemnité contre l’État devant le tribunal arbitral et qu’elle avait envoyé, pour information, copies des sentences prononcées à la Commission le 29 janvier 2008.

37      La République hellénique fait valoir qu’elle a informé la Commission de l’évolution des procédures mises en œuvre pour récupérer les montants litigieux. Malgré la complexité des opérations à réaliser, la Commission n’aurait pas proposé la moindre aide pour que les questions, au sujet desquelles l’État défendeur avait sollicité sa coopération, soient résolues d’un commun accord, notamment celles relatives à la détermination quantitative des montants à récupérer et les modalités de restitution dans le temps.

38      Pour ce qui est du montant de 41 millions d’euros, énoncé à l’article 1er de la décision litigieuse, la République hellénique note que sa récupération a eu lieu le 31 août 2007, y compris les intérêts accrus.

39      Quant à la taxe dite «spatosimo», la République hellénique observe qu’une partie importante de ladite taxe avait été réglée avant l’adoption de la décision litigieuse, à savoir une somme de 22 806 159 euros. Les preuves relatives à ce paiement auraient déjà été transmises à la Commission au cours de l’année 2003. Le solde de cette dette, à savoir un montant de 38 192 997 euros, aurait été constaté par les autorités fiscales conformément au code de recouvrement des recettes publiques. Cette somme, à laquelle s’ajoutent les intérêts d’un montant de 11 336 120 euros, aurait été recouvrée le 18 octobre 2007. La somme totale au titre de ladite taxe se serait ainsi élevée à 49 529 117 euros.

40      La République hellénique observe que, sur le montant d’aide au titre de loyers (2 472 719 euros), une somme de 1 818 027 euros avait été réglée par Olympic Airways en 2006, le solde de la dette ayant été remboursé en 2007.

41      La République hellénique ajoute que les mesures de remboursement relatives aux montants visés par la décision litigieuse ne constituent nullement de nouvelles aides d’État et que ces opérations, en toute hypothèse, ne pourraient en aucun cas faire l’objet du présent litige.

2.     Appréciation de la Cour

42      Afin de déterminer si la République hellénique a adopté les mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt Commission/Grèce, précité, il y a lieu de vérifier si les montants d’aide faisant encore l’objet du litige ont été restitués par l’entreprise bénéficiaire.

43      S’agissant du délai dans lequel ledit arrêt devait être exécuté, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence établie, la date de référence pour apprécier l’existence d’un manquement au titre de l’article 228 CE se situe à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé émis en vertu de cette disposition (voir arrêts du 12 juillet 2005, Commission/France, C‑304/02, Rec. p. I‑6263, point 30; du 18 juillet 2006, Commission/Italie, C‑119/04, Rec. p. I‑6885, point 27, et du 18 juillet 2007, Commission/Allemagne, C‑503/04, Rec. p. I‑6153, point 19).

44      En l’espèce, il est constant que, au moment de l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé, à savoir le 10 juin 2006, la partie défenderesse n’avait pas mis en œuvre l’arrêt Commission/Grèce, précité.

45      Quant à la réponse à l’avis motivé dans laquelle la République hellénique a annoncé des mesures visant à la récupération des différents montants d’aide, tout en relevant l’existence d’un recours administratif introduit par Olympic Airways et faisant état de difficultés relatives à la quantification des sommes à restituer ainsi que des modalités complexes de remboursement, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, un État membre ne saurait exciper de dispositions, pratiques ou situations de son ordre juridique interne pour justifier l’inobservation des obligations résultant du droit communautaire (voir arrêts Commission/Allemagne, précité, point 38, et du 10 janvier 2008, Commission/Portugal, C‑70/06, Rec. p. I‑1, point 22).

46      De même, ne saurait être accueillie l’argumentation de la République hellénique selon laquelle la procédure de récupération aurait été entravée par l’absence de collaboration de la Commission.

47      En effet, les différents montants d’aide à récupérer ressortent avec une précision suffisante, d’une part, des articles 1er à 3 de la décision litigieuse et, d’autre part, des points 206 à 208 des motifs de ladite décision.

48      En outre, la Cour a jugé qu’aucune disposition du droit communautaire n’exige que la Commission, lorsqu’elle ordonne la restitution d’une aide déclarée incompatible avec le marché commun, fixe le montant exact à restituer et qu’il est suffisant que la décision de la Commission comporte des indications permettant à son destinataire de déterminer lui-même, sans difficultés excessives, ce montant (voir arrêts du 12 octobre 2000, Espagne/Commission, C‑480/98, Rec. p. I‑8717, point 25, et du 18 octobre 2007, Commission/France, C‑441/06, Rec. p. I‑8887, point 29).

49      Dans ces conditions, la Commission pouvait se limiter à insister sur le respect de l’obligation de restitution des montants d’aide en cause et laisser aux autorités nationales compétentes le soin de calculer le montant précis des sommes à recouvrir y compris les intérêts à verser sur les sommes dues (voir arrêts Espagne/Commission, précité, point 26, et du 14 février 2008, Commission/Grèce, C‑419/06, Rec. p. I‑27, point 46).

50      Force est de conclure que la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 228, paragraphe 1, CE.

VI –  Sur les sanctions pécuniaires

51      Les conclusions de la Commission relatives à l’imposition d’une astreinte et d’une somme forfaitaire s’inspirent de la communication de la Commission SEC(2005) 1658, du 13 décembre 2005 (JO 2007, C 126, p. 15).

A –  Sur la demande d’astreinte

1.     Argumentation des parties

52      La Commission propose à la Cour d’infliger à la République hellénique une astreinte de 53 611 euros par jour de retard dans l’exécution de l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, à compter de la date du prononcé de l’arrêt à intervenir dans la présente affaire et jusqu’au jour où il sera mis fin au manquement constaté.

53      La Commission considère qu’une telle astreinte est adaptée à la gravité et à la durée de l’infraction et tient compte de la nécessité de lui donner un effet coercitif et dissuasif. Pour déterminer la gravité de l’infraction, un coefficient de 12 aurait été appliqué, cela en fonction de l’importance des dispositions communautaires ayant fait l’objet de l’infraction et des effets de cette infraction sur les intérêts généraux et particuliers.

54      La Commission indique que la durée de l’infraction jusqu’au moment de l’introduction du recours était de 17 mois. Celle-ci ne prendrait toutefois en compte que la durée actuelle de l’infraction jusqu’au prononcé de l’arrêt de la Cour, laissant ainsi à cette dernière la prise en compte d’une durée de manquement plus élevée.

55      S’agissant du montant de l’astreinte à imposer, la Commission précise que, si l’on multiplie le forfait de base uniforme fixé à 600 euros par le coefficient de 12 relatif à la gravité de l’infraction, par le coefficient 1,7 relatif à la durée, c’est-à-dire 0,1 par mois, et par le coefficient 4,38 (facteur n), qui tient compte de la capacité financière de l’État défendeur, une somme de 53 611 euros en résulte.

56      La République hellénique considère que le total des aides d’État devant être restituées ayant été récupéré dans un délai raisonnable, les demandes relatives à l’imposition d’une astreinte et d’une somme forfaitaire sont dépourvues d’objet.

57      Elle relève que, en toute hypothèse, le montant de l’astreinte proposé est disproportionné et doit être réduit dans une mesure appropriée, au cas où la Cour estimerait que la République hellénique n’a pas pleinement exécuté l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité.

 2. Appréciation de la Cour

a)     Observations liminaires

58      Ayant constaté que la République hellénique ne s’est pas conformée, dans le délai fixé par l’avis motivé, à l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, la Cour peut, conformément à l’article 228, paragraphe 2, troisième alinéa, CE, infliger à cet État membre le paiement d’une astreinte et/ou d’une somme forfaitaire.

59      S’agissant de l’imposition d’une astreinte, la Cour a jugé que cette sanction ne se justifie en principe que pour autant que perdure le manquement tiré de l’inexécution d’un précédent arrêt jusqu’à l’examen des faits par la Cour (voir, en ce sens, arrêts précités Commission/Italie, points 33, 45 et 46, ainsi que Commission/Allemagne, point 40).

60      Il importe, dès lors, de vérifier si tel est le cas.

b)     Sur la persistance du manquement

61      Afin de déterminer si le manquement qui est reproché à la partie défenderesse a perduré jusqu’à l’examen des faits de l’espèce par la Cour, il y a lieu d’apprécier les mesures qui, selon l’État défendeur, ont été adoptées postérieurement au délai fixé dans l’avis motivé.

62      La République hellénique allègue, à cet égard, que le recouvrement des montants d’aide litigieux a eu lieu par compensation des dettes et des créances réciproques d’Olympic Airways et de l’État.

63      Afin de démontrer que les montants d’aide avaient été restitués au moyen d’une telle opération, la République hellénique a présenté à la Cour une série d’attestations et de déclarations, en particulier les documents suivants:

–        annexe B.11 du mémoire en défense de la République hellénique (attestation du ministère de l’Économie et des Finances du 18 octobre 2007 relative à l’acquittement de dettes constatées d’Olympic Airways);

–        annexe 2 du mémoire en duplique de la République hellénique (justificatif de situation relatif aux dettes envers l’État du ministère de l’Économie et des Finances, en date du 29 janvier 2008);

–        annexe E.1 de la réponse aux questions écrites de la Cour (note du 31 octobre 2008 relative à l’acquittement des dettes, rédigée par ledit ministère à l’attention d’Olympic Airways);

–        annexe E.6, pièce n  16, de la même réponse (attestation dudit ministère du 27 août 2007 concernant le prélèvement des retenues afférentes à des ordres de paiement), et

–        dix avis comptables, portant dates du 30 mars 2006 et du 31 août 2007, évoqués dans ladite réponse et intitulés «crédit d’effet de compensation».

64      Dans ces conditions, il importe de déterminer, en premier lieu, si la compensation peut constituer un moyen adéquat afin de donner suite à une obligation de remboursement d’une aide d’État et, dans l’affirmative, en second lieu, si, dans la présente affaire, une telle compensation a été effectivement réalisée.

c)     Sur le choix d’un moyen autre qu’un remboursement en numéraire

65      Quant au mode de mise en œuvre de la décision litigieuse et de l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, il convient de rappeler que l’article 14, paragraphe 3, du règlement (CE) nº 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article 93 [devenu 88] du traité CE (JO L 83, p. 1), prévoit que la récupération d’une aide d’État s’effectue sans délai et conformément aux procédures prévues par le droit national de l’État membre concerné, pour autant que ces dernières permettent l’exécution immédiate et effective de la décision de la Commission.

66      C’est ainsi que la Cour, dans son arrêt du 12 décembre 2002, Commission/Allemagne (C-209/00, Rec. p. I‑11695, point 32), a précisé que, en l’absence de dispositions communautaires portant sur la procédure de recouvrement de montants d’aide indûment versés, la récupération de tels concours financiers doit être effectuée, en principe, selon les modalités prévues par le droit national.

67      Par conséquent, un État membre qui, en vertu d’une décision de la Commission, se trouve obligé de récupérer des aides illégales est libre de choisir les moyens par lesquels il exécutera cette obligation, pourvu que les mesures choisies ne portent pas atteinte à la portée et à l’efficacité du droit communautaire (voir arrêt du 12 décembre 2002, Commission/Allemagne, précité, point 34).

68      Il en résulte que, en principe, une opération de compensation, pour autant qu’elle est prévue par l’ordre juridique national en tant que mécanisme d’extinction d’une obligation, peut constituer un moyen approprié permettant d’effectuer la récupération d’une aide d’État.

69      À cet égard, la République hellénique a souligné qu’un tel mécanisme juridique fait partie des dispositions du code civil grec.

70      En ce qui concerne le fondement matériel de la compensation alléguée, la partie défenderesse, donnant suite à des questions posées par la Cour, a présenté à celle-ci copie de la sentence arbitrale du 6 décembre 2006 aux termes de laquelle l’État a été condamné à verser un certain nombre d’indemnités à Olympic Airways.

71      Il découle de cette sentence que le tribunal arbitral a notamment jugé qu’Olympic Airways avait subi des dommages financiers en raison de son expulsion prématurée de l’aéroport d’Elliniko, du déménagement obligatoire vers le nouvel aéroport de Spata, de la construction d’installations dans cet aéroport, des coûts supplémentaires et spéciaux de fonctionnement dudit aéroport ainsi que de l’immobilisation de fonds.

72      Sans préjudice de l’application des règles communautaires en matière d’aides d’État, il convient, dès lors, de constater, pour les besoins de la présente procédure, que la République hellénique a démontré l’existence d’une créance exigible dans le chef d’Olympic Airways qui s’élève à 601 289 003 euros, cette somme étant nettement supérieure à l’ensemble des montants d’aide en cause.

73      Dans ces conditions et eu égard à l’obligation de remboursement établie par la décision litigieuse et l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, il y a lieu d’examiner si la compensation alléguée a été réalisée de sorte à mettre en œuvre l’obligation susvisée.

d)     Sur la charge de la preuve

74      Il convient de rappeler à titre liminaire que, selon la jurisprudence, il incombe à la Commission, dans le cadre d’une procédure fondée sur l’article 228 CE, de fournir à la Cour les éléments nécessaires pour déterminer l’état d’exécution d’un arrêt en manquement (voir arrêt du 4 juillet 2000, Commission/Grèce, C‑387/97, Rec. p. I‑5047, point 73).

75      Dès lors que la Commission, dans la procédure susvisée, a fourni suffisamment d’éléments faisant apparaître la persistance du manquement reproché, il appartient à l’État membre concerné de contester cette affirmation de manière substantielle et détaillée, ainsi que d’apporter la preuve de la cessation de l’infraction (voir, en ce sens, arrêt du 12 juillet 2005, Commission/France, précité, point 56).

76      S’agissant des affirmations de la Commission dans la présente affaire, il importe de relever que celle-ci, non seulement au cours de la procédure écrite, mais également lors de l’audience, a rejeté le mécanisme de compensation choisi. Elle a notamment réitéré que les mesures communiquées par la partie défenderesse étaient insuffisantes afin de démontrer la mise en œuvre de la décision litigieuse et de l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité.

77      Lors de l’audience, la Commission a notamment précisé, à la suite d’une question posée par la Cour, que, même à supposer qu’une compensation, en tant que mécanisme juridique, puisse, en principe, être acceptée, la façon dont la compensation alléguée a été effectuée dans la présente affaire doit être rejetée.

78      Même si les montants d’indemnité avaient été attribués à juste titre par le tribunal arbitral à Olympic Airways, celle-ci devrait disposer des notes de compensation qui prouvent que cette opération a effectivement été réalisée. À cet égard, une déclaration selon laquelle les montants d’aide en question ont été compensés serait insuffisante.

79      En ce qui concerne la qualité de la preuve relative à l’exécution d’une décision exigeant la récupération d’aides octroyées de façon illégale, il y a lieu de rappeler que la Cour a jugé que, lorsqu’un État membre prévoit la récupération desdites aides par un moyen autre que le paiement en numéraire, il lui appartient de fournir à la Commission toutes informations permettant à celle-ci de vérifier que le moyen choisi constitue une mise en œuvre adaptée de cette décision (voir arrêt du 12 décembre 2002, Commission/Allemagne, précité, point 40).

80      La Cour a en outre précisé, au point 43 de cet arrêt, que, si l’État membre peut récupérer des aides illégales autrement qu’au moyen d’un paiement en numéraire, il doit veiller à ce que les mesures choisies par lui soient suffisamment transparentes afin que la Commission puisse s’assurer qu’elles sont aptes à éliminer la distorsion de concurrence causée par lesdites aides dans le plein respect du droit communautaire.

81      La Cour a encore ajouté, aux points 57 et 58 dudit arrêt, que de telles mesures doivent être d’un effet identique à celle qui consiste en un remboursement au moyen d’un transfert de fonds et que toute mesure adoptée afin de remplir l’obligation de récupération d’une aide versée illégalement doit être apte à rétablir les conditions de concurrence qui ont été faussées par l’octroi de l’aide illégale, de nature à pouvoir être identifiée comme telle par la Commission et les autres intéressés.

82      Eu égard à ces considérations, la Cour doit vérifier si, par les pièces présentées, la République hellénique a apporté la preuve d’avoir mis en œuvre la décision litigieuse et l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, en ce qui concerne les trois catégories d’aide faisant encore l’objet du recours.

e)     Sur le montant d’aide constitué par l’injection de capital

83      Conformément à l’article 3, paragraphe 1, de la décision litigieuse, lu en combinaison avec l’article 1er de cette décision, la République hellénique devait récupérer auprès d’Olympic Airways un montant de 41 millions d’euros au titre dudit apport.

84      La République hellénique ayant allégué le remboursement de ce montant par une opération de compensation, il y a lieu de vérifier si les documents présentés peuvent être considérés comme établissant l’exécution de cette obligation, conformément aux principes énoncés aux points 79 à 81 du présent arrêt.

85      À cet égard, la partie défenderesse a notamment soumis une note du 31 octobre 2008, adressée par le ministère de l’Économie et des Finances à l’attention d’Olympic Airways.

86      Il ressort du libellé de cette note que «la dette de 41 085 840 euros, qui a été constatée conformément au code de recouvrement des recettes publiques, et qui résulte de l’obligation de restituer l’augmentation de capital, versée à la société le 9 octobre 1998, a été intégralement acquittée (en capital et intérêts) le 31 août 2007 avec l’effet de compensation n° 2922, qui a opéré une compensation avec un montant qui, autrement, aurait dû être versé par l’administration fiscale à Olympic Airways en raison d’une dette de l’État qui apparaît dans l’ordre de paiement n° 2516/31 août 2007», ce dernier ayant été émis par la République hellénique en faveur d’Olympic Airways,pour un montant de 601 289 003 euros sur le fondement de la sentence arbitrale du 6 décembre 2006 .

87      En outre, la République hellénique a confirmé, à l’égard de la créance d’Olympic Airways détenue sur elle et résultant de ladite sentence arbitrale, que les autorités nationales étaient légalement tenues de procéder à une compensation des dettes de cette société avec le montant qui devait lui être versé.

88      La Cour considère que, par cette pièce, la partie défenderesse a apporté la preuve de la restitution du montant d’aide constitué par l’injection de capital.

f)     Sur le montant d’aide concernant la taxe dite «spatosimo»

89      Conformément à l’article 3, paragraphe 1, de la décision litigieuse, la République hellénique devait récupérer auprès d’Olympic Airways, notamment, l’aide constituée par la tolérance vis-à-vis de la pérennisation du non-paiement par cette société de la taxe pour la modernisation et le développement des aéroports, dite «spatosimo», pour un montant total de 60 999 156 euros (point 208 de cette décision).

90      La partie défenderesse ayant allégué qu’une partie de ce montant, à savoir la somme de 22 806 158 euros, avait été restituée avant l’adoption de la décision litigieuse, il y a lieu d’observer que, même si cette restitution avait eu lieu avant le prononcé de l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, en tout état de cause, la République hellénique n’a pas fourni de pièces susceptibles de soutenir l’affirmation dont il s’agit.

91      En effet, quant à la lettre de la direction de l’aviation civile du 2 octobre 2007, figurant à l’annexe B.15 du mémoire en défense de la République hellénique, dans laquelle sont évoqués des versements, par Olympic Airways, d’un montant total de 22 806 158 euros à titre de paiement de la taxe dite «spatosimo», il convient d’observer que cette lettre fait état de ce qu’Olympic Airways a versé, le 24 septembre 1999, un montant de 3 445 793 euros et, le 29 juin 2001, un montant de 19 360 365 euros.

92      Or, indépendamment du fait que les versements ainsi allégués se situent bien avant l’introduction du recours dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, au sujet duquel la Cour a constaté l’absence d’exécution de la décision litigieuse, il importe d’observer que la lettre susmentionnée du 2 octobre 2007 se limite à affirmer qu’Olympic Airways a effectivement versé lesdits montants, si bien que cette lettre ne saurait constituer une preuve de restitution de l’aide.

93      Enfin et quant aux justificatifs de paiement des montants évoqués dans la lettre du ministère des Transports et des Communications du 26 juin 2003, adressée à la Commission et figurant à l’annexe B.19 du mémoire en défense, ils ne sauraient non plus constituer une preuve suffisante. Pour ce qui est des bordereaux de versement émis par Olympic Airways, annexés à cette lettre, il convient de constater que, ainsi que l’a fait observer la Commission, sur aucun de ces documents ne figure, dans la case correspondante, le cachet de la banque qui aurait reçu le paiement. De plus, les documents présentés sont datés du mois de juin 2001 et aucun ne porte la date du 24 septembre 1999, date à laquelle, selon la lettre susmentionnée du 2 octobre 2007, une partie du montant total de 22 806 158 euros aurait été versée.

94      Force est de conclure que l’État défendeur n’a pas apporté la preuve du remboursement de la somme de 22 806 158 euros au titre de l’aide concernant la taxe dite «spatosimo».

95      En ce qui concerne le montant restant de ladite taxe (38 192 997 euros), la République hellénique a, notamment, soumis à la Cour la note susmentionnée du ministère de l’Économie et des Finances du 31 octobre 2008, adressée à Olympic Airways.

96      Il ressort du libellé de ladite note que les dettes de «spatosimo» d’Olympic Airways portant sur la période visée par la décision litigieuse «ont été entièrement acquittées le 31 août 2007 avec les effets de compensation n° 2927, n° 2928, n° 2929, n° 2930, n° 2931, n° 2932, n° 2933 et n° 2940, qui ont opéré une compensation avec un montant qui, autrement, aurait dû être versé par l’administration fiscale à Olympic Airways en raison d’une dette de l’État, à son égard, qui apparaît dans l’ordre de paiement n° 2516/31 août 2007».

97      La Cour considère que, par cette pièce, la partie défenderesse a apporté la preuve de la restitution du montant restant de la taxe dite «spatosimo».

98      Il ressort de ce qui précède que la République hellénique n’a pas démontré à suffisance de droit qu’un montant d’aide de 22 806 158 euros relatif à la taxe dite «spatosimo» a été remboursé par Olympic Airways.

g)     Sur le montant d’aide relatif aux loyers d’aéroport

99      Conformément à l’article 3, paragraphe 1, de la décision litigieuse, la République hellénique devait récupérer auprès d’Olympic Airways l’aide constituée par le non-paiement de loyers d’aéroport pour un montant de 2,46 millions d’euros (point 206 de cette décision).

100    En ce qui concerne les modalités de récupération de cet élément d’aide, la République hellénique, dans son mémoire en défense, d’une part, a déclaré avoir procédé à la récupération d’une somme de 1 818 027 euros et, d’autre part, a renvoyé, notamment, aux informations fournies en réponse à l’avis motivé, selon lesquelles quatre factures, pour un montant total de 1 087 141 euros, émises par la direction de l’aviation civile, avaient fait l’objet d’un certain nombre de rectifications et de compensations.

101    À cet égard, il y a lieu d’observer, ainsi qu’il a été constaté par M. l’avocat général aux points 54 à 56 de ses conclusions, que la documentation produite par la République hellénique, à savoir les factures de la direction de l’aviation civile, les pièces rectificatives et les nouvelles factures de remplacement ainsi que les déclarations relatives à des compensations entre dettes et créances réciproques d’Olympic Airways et de la direction de l’aviation civile, ne fait pas apparaître avec la précision requise les modalités de remboursement des loyers d’aéroport dus, les tableaux fournis à ce sujet présentant d’ailleurs un certain nombre d’incohérences quant aux montants des différentes factures et aux périodes concernées.

102    Cette documentation ne saurait donc être considérée comme étant apte à établir la récupération alléguée.

103    Il convient encore d’examiner la mise en œuvre de la décision litigieuse concernant la liquidation de deux autres factures de la direction de l’aviation civile.

104    En premier lieu, quant au montant de 176 082 euros, correspondant à la facture n° 3307/98 de la direction de l’aviation civile, il ressort du libellé de la note susmentionnée du ministère de l’Économie et des Finances du 31 octobre 2008, adressée à Olympic Airways, que ladite somme «a été intégralement acquittée le 31 août 2007 avec l’effet de compensation n° 2926 (d’un montant total de 352 808 euros en principal et intérêts), qui a opéré une compensation avec un montant qui, autrement, aurait dû être versé par l’administration fiscale à Olympic Airways en raison d’une dette de l’État à son égard, qui apparaît dans l’ordre de paiement n° 2516/31/août 2007».

105    La Cour considère que, par cette pièce, la partie défenderesse a rapporté la preuve de la restitution du montant d’aide susvisé relatif à une partie des loyers d’aéroport.

106    En second lieu, s’agissant du remboursement d’un montant de 478 606 euros, correspondant à la facture n° 4175/99 de la direction de l’aviation civile, il importe d’observer, ainsi qu’il a été relevé par M. l’avocat général au point 58 de ses conclusions, que les documents produits par la partie défenderesse dans son mémoire en défense, à savoir le décret ministériel du 2 octobre 2007 concernant la compensation, une lettre de la direction de l’aviation civile à Olympic Airways du 17 octobre 2007, comportant en annexe un état détaillé des montants faisant l’objet de la compensation, ainsi qu’une lettre de ladite direction à Olympic Airways du 19 octobre 2007, faisant état de la compensation en vertu dudit décret en ce qui concerne la facture n° 4175/99 majorée des intérêts y afférents, constituent des preuves suffisantes du remboursement de ladite somme au titre de loyers d’aéroport.

107    Par conséquent, la décision litigieuse a été mise en œuvre en ce qui concerne la liquidation des deux factures susvisées de la direction de l’aviation civile d’un montant total de 654 688 euros.

108    Il ressort des éléments ci-dessus que la République hellénique n’a pas démontré à suffisance de droit que le montant total d’aide relatif aux loyers d’aéroport a été remboursé par Olympic Airways.

h)     Conclusion

109    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la République hellénique n’a pas démontré à suffisance de droit qu’une partie de la taxe dite «spatosimo» (voir point 94 ci-dessus) et une partie des loyers d’aéroport ont été restituées par Olympic Airways (voir point 102 ci-dessus).

110    Dans ces conditions, la Cour considère que la condamnation de la République hellénique au paiement d’une astreinte constitue un moyen financier approprié afin d’inciter cette dernière à prendre les mesures nécessaires pour mettre fin au manquement constaté et pour assurer l’exécution complète de la décision litigieuse ainsi que de l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité.

B –  Sur le montant de l’astreinte

1.     Observations liminaires

111    Il y a lieu de rappeler qu’il appartient à la Cour, dans chaque affaire, d’apprécier, eu égard aux circonstances de l’espèce, les sanctions pécuniaires à arrêter (voir arrêts du 12 juillet 2005, Commission/France, précité, point 86, et du 14 mars 2006, Commission/France, C‑177/04, Rec. p. I‑2461, point 58).

112    Ainsi, les propositions de la Commission ne sauraient lier la Cour et ne constituent qu’une base de référence utile. De même, des lignes directrices telles que celles contenues dans les communications de la Commission ne lient pas la Cour, mais contribuent à garantir la transparence, la prévisibilité et la sécurité juridique de l’action menée par cette institution (voir arrêt Commission/Portugal, précité, point 34).

113    S’agissant de l’imposition d’une astreinte, la Cour a jugé que ladite sanction doit être arrêtée en fonction du degré de persuasion nécessaire pour que l’État membre défaillant à exécuter un arrêt en manquement modifie son comportement et mette fin à l’infraction incriminée (voir arrêt du 12 juillet 2005, Commission/France, précité, point 91).

114    Dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation en la matière, il incombe à la Cour de fixer l’astreinte de telle sorte que celle-ci soit, d’une part, adaptée aux circonstances et, d’autre part, proportionnée au manquement constaté ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre concerné (voir arrêts du 25 novembre 2003, Commission/Espagne, C‑278/01, Rec. p. I‑14141, point 41; du 12 juillet 2005, Commission/France, précité, point 103, et du 14 mars 2006, Commission/France, précité, point 61).

115    Ainsi, dans le cadre de l’appréciation de la Cour, les critères de base devant être pris en considération afin d’assurer la nature coercitive de l’astreinte en vue de l’application uniforme et effective du droit communautaire sont, en principe, la durée de l’infraction, son degré de gravité et la capacité de paiement de l’État membre en cause. Pour l’application de ces critères, la Cour est appelée à tenir compte, en particulier, des conséquences du défaut d’exécution sur les intérêts publics et privés ainsi que de l’urgence pour que l’État membre concerné se conforme à ses obligations (voir arrêts précités du 12 juillet 2005, Commission/France, point 104; du 14 mars 2006, Commission/France, point 62, et Commission/Portugal, point 39).

2.     Sur la durée de l’infraction

116    Il appartient à la Cour de déterminer la durée de l’infraction. Cette durée doit être évaluée en ayant égard au moment auquel la Cour apprécie les faits et non pas à celui où cette dernière est saisie par la Commission (voir arrêts précités du 14 mars 2006, Commission/France, point 71, et Commission/Portugal, point 45).

117    Dans ces conditions, la République hellénique n’ayant pu démontrer que le manquement à son obligation d’exécuter pleinement l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, est effectivement terminé, il y a lieu de considérer que ledit manquement perdure depuis plus de quatre ans, ce qui constitue un laps de temps considérable.

3.     Sur la gravité de l’infraction

118    Sur ce point, il convient de souligner, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 72 de ses conclusions, le caractère fondamental des dispositions du traité CE en matière d’aides d’État.

119    En effet, les règles faisant l’objet de la décision litigieuse et de l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, constituent l’expression d’une des missions essentielles conférée à la Communauté européenne en vertu de l’article 2 CE, à savoir l’établissement d’un marché commun et la promotion d’un haut degré de compétitivité et de convergence des performances économiques. Cette mission est également énoncée à l’article 3, paragraphe 1, sous g), CE, selon lequel l’action de la Communauté comporte un régime assurant que la concurrence n’est pas faussée dans le marché intérieur.

120    L’importance des dispositions communautaires enfreintes dans la présente espèce se reflète notamment dans le fait que, par le remboursement d’une aide d’État versée de manière illégale, se trouve éliminée la distorsion de concurrence causée par l’avantage concurrentiel procuré par l’aide et que, par cette restitution, le bénéficiaire perd l’avantage dont il avait bénéficié sur le marché par rapport à ses concurrents (voir, en ce sens, arrêts du 4 avril 1995, Commission/Italie, C‑350/93, Rec. p. I‑699, point 22, et du 29 avril 2004, Allemagne/Commission, C‑277/00, Rec. p. I‑3925, point 75).

121    Il importe d’ajouter que le contrôle des aides d’État accordées à des opérateurs de transports aériens est d’une importance considérable, le marché en question étant, par sa nature même, transfrontalier.

122    Quant au manquement constaté dans la présente affaire, il importe de remarquer que les montants d’aide pour lesquels la partie défenderesse n’a pas rapporté la preuve d’une restitution ne constituent qu’une partie relativement faible par rapport à la somme totale ayant fait l’objet de la décision litigieuse et de l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité.

4.     Sur la capacité de paiement de l’État défendeur

123    En ce qui concerne la proposition de la Commission de multiplier le montant de base par un coefficient spécifique applicable à la République hellénique, la Cour a itérativement jugé que cette méthode de calcul constitue un instrument approprié pour refléter la capacité de paiement de l’État concerné tout en maintenant un écart raisonnable entre les divers États membres (voir arrêts précités du 4 juillet 2000, Commission/Grèce, point 88; Commission/Espagne, point 59; du 12 juillet 2005, Commission/France, point 109, et du 14 mars 2006, Commission/France, point 75).

5.     Conclusion

124    Eu égard à ce qui précède, la Cour considère que l’imposition d’une astreinte d’un montant de 16 000 euros est appropriée.

6.     Sur la date de prise d’effet et la périodicité de l’astreinte

125    Eu égard aux considérations qui précèdent concernant l’absence de preuves relatives à la restitution de deux éléments d’aide, à savoir une partie de la taxe dite «spatosimo» et une partie des loyers d’aéroport (voir points 94 et 102 du présent arrêt), la Cour juge approprié de déférer la prise d’effet de l’astreinte d’un mois à partir du prononcé du présent arrêt afin de permettre à l’État défendeur de démontrer qu’il a mis fin au manquement.

126    Quant à la périodicité de l’astreinte, il convient d’infliger à la partie défenderesse une astreinte sur une base journalière.

127    Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il convient de condamner la République hellénique à payer à la Commission, sur le compte «Ressources propres de la Communauté européenne», une astreinte d’un montant de 16 000 euros par jour de retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, à compter d’un mois après le prononcé du présent arrêt et jusqu’à l’exécution dudit arrêt du 12 mai 2005.

C –  Sur l’imposition cumulative d’une astreinte et d’une somme forfaitaire

1.     Argumentation des parties

128    La Commission fait valoir que la Cour doit infliger, en l’espèce, tant une astreinte qu’une somme forfaitaire. Elle estime que l’imposition d’une somme forfaitaire est essentielle, car chaque inexécution prolongée d’un arrêt de la Cour porte atteinte au principe de la légalité et de la sécurité juridique, notamment en matière d’aides d’État. Dans ce domaine, l’exécution d’une décision de la Commission, et a fortiori celle d’un arrêt de la Cour constatant un défaut de mise en œuvre d’une telle décision sous forme de récupération de concours financiers illégalement accordés, devrait être immédiate et effective.

129    Quant à l’annulation partielle de la décision litigieuse par le Tribunal, la Commission observe que cette circonstance n’est pas de nature à affecter la détermination du montant de la somme forfaitaire.

130    La Commission souligne que la somme proposée n’est pas excessive. En effet, au moins deux ans se seraient écoulés depuis l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, sans qu’il y ait eu une récupération effective des aides visées. Même si la Cour devait admettre que la restitution des montants en question a eu lieu entre les mois d’août et d’octobre 2007, une récupération d’aides qui intervient près de cinq ans après la décision initiale et plus de deux ans après l’arrêt de la Cour ne saurait en aucun cas être considérée comme conforme aux obligations incombant à l’État concerné.

131    La Commission explique qu’elle s’est fondée non pas sur les différentes catégories d’aide ou sur les montants à récupérer pour déterminer la gravité du manquement, mais sur ses effets négatifs à l’égard des opérateurs économiques et en fonction de l’importance des dispositions du traité relatives aux aides d’État. Le fait que plus de cinq ans après l’adoption de la décision litigieuse les mesures prises par la République hellénique n’ont toujours pas abouti à une récupération des montants d’aide qui y sont visés constituerait une infraction grave au droit communautaire.

132    En tout état de cause, la Commission considère que, même si la Cour devait juger que les montants d’aide ont été remboursés, la somme forfaitaire doit être appliquée jusqu’à la date d’achèvement de la restitution intégrale desdits montants.

133    Quant au montant de la somme forfaitaire à imposer, la Commission estime qu’un calcul à partir d’un montant journalier de 200 euros par jour est adapté à la gravité du manquement et tient compte de la nécessité de donner à cette somme un effet dissuasif. Si l’on multiplie ledit montant par un facteur de 12 relatif à la gravité de l’infraction et par le coefficient 4,38, qui tient compte de la capacité financière dudit État, on obtiendrait une somme de 10 512 euros.

134    La République hellénique estime que, en tout état de cause, l’application cumulée des sanctions prévues à l’article 228 CE est disproportionnée, notamment à la lumière du fait que les sanctions en question poursuivent le même objectif, à savoir la mise en conformité de l’État membre visé et l’application effective du droit communautaire au moyen d’une pression financière afin qu’il soit mis fin à l’infraction dont il s’agit. Par conséquent, les mesures devraient être choisies séparément et non cumulativement en fonction de la question de savoir laquelle des deux sanctions est la plus appropriée.

135    La République hellénique fait également valoir que le point de départ pour calculer les sanctions prévues à l’article 228 CE doit s’entendre comme la date de l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé et non comme celle de l’arrêt de la Cour constatant l’infraction.

136    La République hellénique relève que l’exécution de l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, a eu lieu dans un temps raisonnable, à savoir deux ans après son prononcé et un an depuis l’expiration du délai fixé par l’avis motivé. Il faudrait également tenir compte des difficultés techniques du dossier et de l’absence de collaboration de la Commission dans le cadre de la mise en œuvre de la décision litigieuse.

137    La République hellénique soutient que la détermination de la gravité de l’infraction revêt un lien direct avec le montant des aides à récupérer, puisque du montant de ces dernières dépendent les conséquences de la violation de la législation communautaire sur les intérêts publics et privés. Il serait manifeste que plus le montant de l’aide est faible, plus la répercussion sur la perturbation de la libre concurrence dans le secteur des transports aériens est limitée. Par conséquent, dans la mesure où le Tribunal a jugé que le versement de certains montants énoncés dans la décision litigieuse était conforme au droit communautaire, la gravité du manquement serait moindre.

138    La République hellénique ajoute que le marché intérieur dans le domaine considéré ne saurait être affecté par Olympic Airlines, étant donné que celle-ci n’a pas succédé à Olympic Airways. En effet, cette dernière société, qui, depuis l’année 2003, n’aurait plus d’activités de vol, ne remplirait de fonctions que dans le secteur de l’assistance au sol, si bien qu’une distorsion de la concurrence dans le secteur des transports aériens n’existerait pas.

139    Enfin, si la Cour estimait nécessaire d’imposer une somme forfaitaire, la République hellénique considère que le montant proposé par la Commission est démesuré et doit être réduit de façon appropriée.

2.     Appréciation de la Cour

a)     Sur le cumul des deux sanctions

140    Il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que la procédure prévue à l’article 228, paragraphe 2, CE a pour objectif d’inciter un État membre défaillant à exécuter un arrêt en manquement et, par là, d’assurer l’application effective du droit communautaire et que les mesures prévues par cette disposition, à savoir l’astreinte et la somme forfaitaire, visent toutes les deux ce même objectif (voir arrêt du 12 juillet 2005, Commission/France, précité, point 80).

141    La Cour a dès lors jugé, aux points 81 et 82 dudit arrêt, que l’application de l’une et de l’autre de ces mesures dépend de l’aptitude de chacune à remplir l’objectif poursuivi en fonction des circonstances de l’espèce et que, dans ces conditions, il n’est pas exclu de recourir aux deux types de sanctions prévues.

142    Par conséquent, il appartient à la Cour, dans chaque affaire et en fonction des circonstances de l’espèce dont elle se trouve saisie ainsi que du niveau de persuasion et de dissuasion qui lui paraît requis, d’arrêter les sanctions pécuniaires appropriées pour assurer l’exécution la plus rapide de l’arrêt ayant précédemment constaté un manquement et prévenir la répétition d’infractions analogues au droit communautaire (voir arrêts précités du 12 juillet 2005, Commission/France, point 97, et du 9 décembre 2008, Commission/France, C‑121/07, non encore publié au Recueil, point 59).

143    Partant, la Cour est habilitée, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation qui lui est conféré dans le domaine considéré, à imposer, de façon cumulative, une astreinte et une somme forfaitaire.

b)     Sur la pertinence de l’imposition d’une somme forfaitaire

144    Il convient de rappeler que l’imposition d’une somme forfaitaire doit, dans chaque cas d’espèce, demeurer fonction de l’ensemble des éléments pertinents ayant trait tant aux caractéristiques du manquement constaté qu’à l’attitude propre à l’État membre concerné par la procédure initiée sur le fondement de l’article 228 CE (voir arrêt du 9 décembre 2008, Commission/France, précité, point 62). À cet égard, ladite disposition investit la Cour d’un large pouvoir d’appréciation afin de décider de l’imposition ou non d’une telle sanction (voir point 63 dudit arrêt).

145    Quant à la présente affaire, la Cour considère que l’ensemble des éléments juridiques et factuels entourant le manquement constaté constitue un indicateur de ce que la prévention effective de la répétition future d’infractions analogues au droit communautaire est de nature à requérir l’adoption d’une mesure dissuasive telle que l’imposition d’une somme forfaitaire (voir arrêt du 9 décembre 2008, Commission/France, précité, point 69).

c)     Sur le montant de la somme forfaitaire

146    Si la Cour décide de l’imposition d’une somme forfaitaire, il lui appartient, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, de fixer celle-ci de sorte qu’elle soit, d’une part, adaptée aux circonstances et, d’autre part, proportionnée au manquement constaté ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre concerné (voir arrêt Commission/Espagne, précité, point 41).

147    Figurent notamment au rang des facteurs pertinents à cet égard des éléments tels que la durée de persistance du manquement depuis l’arrêt l’ayant constaté ainsi que les intérêts publics et privés en cause (voir arrêts précités du 12 juillet 2005, Commission/France, point 114, et du 9 décembre 2008, Commission/France, point 64).

148    Les circonstances devant être prises en compte résultent notamment des considérations figurant aux points 117 à 122 du présent arrêt, relatives à la durée et à la gravité du manquement.

149    Sur la base de ces éléments, la Cour considère qu’il est fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en fixant à 2 millions d’euros le montant de la somme forfaitaire que la République hellénique devra acquitter.

150    Il convient, par conséquent, de condamner la République hellénique à verser à la Commission, sur le compte «Ressources propres de la Communauté européenne», la somme forfaitaire de 2 millions d’euros.

VII –  Sur les dépens

151    Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République hellénique et le manquement ayant été constaté, il y a lieu de condamner cette dernière aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (grande chambre) déclare et arrête:

1)      En ne prenant pas, à la date à laquelle a expiré le délai imparti dans l’avis motivé, les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce (C‑415/03), concernant le remboursement des aides jugées illégales et incompatibles avec le marché commun, conformément à l’article 3 de la décision 2003/372/CE de la Commission, du 11 décembre 2002, concernant l’aide octroyée par la Grèce à Olympic Airways, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette décision et de l’article 228, paragraphe 1, CE.

2)      La République hellénique est condamnée à payer à la Commission des Communautés européennes, sur le compte «Ressources propres de la Communauté européenne», une astreinte d’un montant de 16 000 euros par jour de retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, précité, à compter d’un mois après le prononcé du présent arrêt jusqu’à l’exécution dudit arrêt du 12 mai 2005.

3)      La République hellénique est condamnée à verser à la Commission des Communautés européennes, sur le compte «Ressources propres de la Communauté européenne», la somme forfaitaire de 2 millions d’euros.

4)      La République hellénique est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: le grec.