Language of document : ECLI:EU:C:2018:705

ORDONNANCE DE LA COUR (première chambre)

12 septembre 2018 (*)

« Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour –Déclaration UE-Turquie du Conseil européen du 18 mars 2016 – Demande d’annulation »

Dans les affaires jointes C‑208/17 P à C‑210/17 P,

ayant pour objet trois pourvois au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduits le 21 avril 2017,

NF, demeurant sur l’île de Lesbos (Grèce), (C‑208/17 P),

NG, demeurant à Athènes (Grèce), (C‑209/17 P),

NM, demeurant sur l’île de Lesbos, (C‑210/17 P),

représentés par M. P. O’Shea, Barrister-at-Law, et M. I. Whelan, Barrister-at-Law, ainsi que par M. B. Burns, solicitor,

parties requérantes,

les autres parties à la procédure étant :

Conseil européen, représenté par Mme S. Boelaert ainsi que par MM. M. Chavrier et J.-P. Hix, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

soutenu par :

République hellénique, représentée par Mme M. Michelogiannaki et M. G. Karipsiadis, en qualité d’agents,


LA COUR (première chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteur), président de chambre, MM. C. G. Fernlund, J.‑C. Bonichot, S. Rodin et E. Regan, juges,

avocat général : M. M. Wathelet,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        Par leur pourvoi, NF, NG et NM demandent l’annulation, respectivement, des ordonnances du Tribunal de l’Union européenne du 28 février 2017, NF/Conseil européen (T‑192/16, EU:T:2017:128), du 28 février 2017, NG/Conseil européen (T‑193/16, EU:T:2017:129), et du 28 février 2017, NM/Conseil européen (T‑257/16, EU:T:2017:130) (ci-après, ensemble, les « ordonnances attaquées »), par lesquelles celui-ci a rejeté leurs recours tendant à l’annulation d’un accord prétendument conclu entre le Conseil européen et la République de Turquie le 18 mars 2016, intitulé « Déclaration UE-Turquie ».

 Les antécédents des litiges

2        Les antécédents des litiges sont exposés par le Tribunal de manière identique pour les trois affaires, aux points 1 à 9 des ordonnances attaquées, dans les termes suivants :

« Sur les rencontres entre les dirigeants européens et turc antérieures au 18 mars 2016

1.      Le 15 octobre 2015, la République de Turquie et l’Union européenne sont convenues d’un plan d’action commun intitulé “EU-Turkey joint action plan” (ci-après le “plan d’action commun”) tendant à renforcer leur coopération, en matière de soutien des ressortissants syriens bénéficiant d’une protection internationale temporaire et en matière de gestion migratoire, pour répondre à la crise créée par la situation en Syrie.

2.      Le plan d’action commun ambitionnait de répondre à la situation de crise en Syrie de trois manières, à savoir, premièrement, en traitant à la racine les causes conduisant à un exode massif de Syriens, deuxièmement, en apportant un soutien aux Syriens bénéficiant d’une protection internationale temporaire et à leurs communautés d’accueil en Turquie et, troisièmement, en renforçant la coopération en matière de prévention des flux de migration illégaux en direction de l’Union.

3.      Le 29 novembre 2015, les chefs d’État ou de gouvernement des États membres de l’Union se sont réunis avec leur homologue turc [...]. À l’issue de cette rencontre, ils ont décidé d’activer le plan d’action commun et, notamment, d’intensifier leur coopération active concernant les migrants qui n’avaient pas besoin d’une protection internationale, en les empêchant de se rendre en Turquie et dans l’Union, en assurant l’application des dispositions bilatérales qui avaient été établies en matière de réadmission et en renvoyant rapidement dans leurs pays d’origine les migrants qui n’avaient pas besoin d’une protection internationale.

4.      Le 8 mars 2016, une déclaration des chefs d’État ou de gouvernement de l’Union, publiée par les services conjoints du Conseil européen et du Conseil de l’Union européenne, indiquait que les chefs d’État ou de gouvernement de l’Union s’étaient entretenus avec le Premier ministre turc en ce qui concernait les relations entre l’Union et la République de Turquie et que des progrès avaient été réalisés dans la mise en œuvre du plan d’action commun. Cette rencontre avait eu lieu le 7 mars 2016 [...]. Cette déclaration précisait :

“Les chefs d’État ou de gouvernement se sont accordés à reconnaître que des mesures audacieuses devaient être prises pour fermer les routes empruntées par les passeurs, démanteler le modèle économique de ceux-ci, protéger [les] frontières extérieures [de l’Union] et mettre un terme à la crise migratoire en Europe. [Ils] se sont félicités vivement des propositions supplémentaires présentées ce jour par la [République de] Turquie pour remédier au problème migratoire. Ils sont convenus d’œuvrer sur la base des principes [suivants] :

–        renvoyer tous les nouveaux migrants en situation irrégulière qui partent de la Turquie pour gagner les îles grecques, les coûts encourus étant pris en charge par l’[Union] ;

–        procéder, pour chaque Syrien réadmis par la Turquie au départ des îles grecques, à la réinstallation d’un autre Syrien de la Turquie vers les États membres de l’[Union], dans le cadre des engagements existants ;

[...]

Le président du Conseil européen approfondira ces propositions et en définira les modalités avec la [République de] Turquie avant le Conseil européen de mars [...]

Le présent document n’établit aucun nouvel engagement pour les États membres en matière de relocalisation et de réinstallation.

[...]”

5.      Dans sa communication COM(2016) 166 final au Parlement européen, au Conseil européen et au Conseil, du 16 mars 2016, intitulée “Prochaines étapes opérationnelles de la coopération UE-Turquie dans le domaine de la migration” (ci-après la “communication du 16 mars 2016”), la Commission européenne a indiqué que, le 7 mars 2016, les “chefs d’État ou de gouvernement [de l’Union avaie]nt chaleureusement accueilli les propositions supplémentaires présentées par la [République de] Turquie et [étaie]nt convenus d’œuvrer sur la base d’un ensemble de six principes”, que “[l]e président du Conseil européen a[vait] été invité à approfondir ces propositions et à en définir les modalités avec la Turquie avant le Conseil européen de mars” et que “[l]a présente communication expos[ait] la façon dont les six principes devraient être mis en œuvre pour déployer tout le potentiel de la coopération entre l’[Union] et la [République de] Turquie, dans le respect du droit européen et international”.

6.      Dans la communication du 16 mars 2016, la Commission indiquait notamment qu’“[i]l [était] essentiel de renvoyer tous les nouveaux migrants en situation irrégulière et les demandeurs d’asile de Grèce vers la Turquie pour briser le schéma des réfugiés et des migrants payant des passeurs et risquant leur vie” et que, “compte tenu de l’ampleur des flux actuels entre la Turquie et la Grèce, l’organisation de ces retours devrait être considérée comme une mesure temporaire et extraordinaire, qui [était] nécessaire pour mettre fin à la souffrance humaine et rétablir l’ordre public et qui d[evait] être soutenue par un cadre opérationnel adapté”. Selon cette communication, des avancées avaient été récemment constatées en ce qui concernait la réadmission, par la République de Turquie, des migrants en situation irrégulière et des demandeurs d’asile n’ayant pas besoin d’une protection internationale dans le cadre de l’accord bilatéral de réadmission entre la République hellénique et la République de Turquie, lequel devait être remplacé, à partir du 1er juin 2016, par l’accord entre l’Union européenne et la République de Turquie concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier (JO 2014, L 134, p. 3).

7.       La Commission concluait, dans la communication du 16 mars 2016, que “[l]e dispositif de retour de tous les nouveaux migrants en situation irrégulière et demandeurs d’asile traversant la mer Égée, à partir de la Turquie [serait] une mesure temporaire et exceptionnelle [qui] devrait être lancée aussi vite que possible”, et que, dans cette perspective, ladite communication “[établissait] un cadre permettant de mettre en œuvre ce processus dans le respect du droit international et européen, excluant l’application d’une politique de retours généralisés[, et elle décrivait] également les mesures, législatives et logistiques qu’il [convenait] d’adopter d’urgence pour amorcer le processus”.

Sur la réunion du 18 mars 2016 et sur la déclaration UE-Turquie

8.      Le 18 mars 2016, sous la forme du communiqué de presse nº 144/16, a été publiée sur le site Internet du Conseil une déclaration tendant à rendre compte des résultats “de la troisième réunion tenue depuis novembre 2015 en vue d’approfondir les relations Turquie-UE et de remédier à la crise migratoire” [...] entre “[l]es membres du Conseil européen” et “leur homologue turc” (ci-après la “déclaration UE-Turquie”).

9.      La déclaration UE-Turquie exposait que, tout en “confirm[ant] une nouvelle fois leur attachement à la mise en œuvre de leur plan d’action commun, activé le 29 novembre 2015, la [République de] Turquie et l’U[nion] reconnaiss[ai]ent que des efforts supplémentaires et résolus d[evai]ent être déployés rapidement”. Cette déclaration se poursuivait dans ces termes :

“Afin de démanteler le modèle économique des passeurs et d’offrir aux migrants une perspective autre que celle de risquer leur vie, l’UE et la [République de] Turquie ont décidé ce jour de mettre fin à la migration irrégulière de la Turquie vers l’[Union]. Afin d’atteindre cet objectif, elles sont convenues des points d’action complémentaires suivants :

1)      Tous les nouveaux migrants en situation irrégulière qui partent de la Turquie pour gagner les îles grecques à partir du 20 mars 2016 seront renvoyés en Turquie. Cela se fera en totale conformité avec le droit de l’[Union] et le droit international, excluant ainsi toute forme d’expulsion collective. Tous les migrants seront protégés conformément aux normes internationales applicables et dans le respect du principe de non-refoulement. Il s’agira d’une mesure temporaire et extraordinaire, qui est nécessaire pour mettre un terme aux souffrances humaines et pour rétablir l’ordre public. Les migrants arrivant dans les îles grecques seront dûment enregistrés et toute demande d’asile sera traitée individuellement par les autorités grecques conformément à la directive sur les procédures d’asile, en coopération avec le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Les migrants ne demandant pas l’asile ou dont la demande d’asile a été jugée infondée ou irrecevable conformément à la directive susvisée seront renvoyés en Turquie. La [République de] Turquie et la [République hellénique], avec l’aide des institutions et agences de l’[Union], prendront les mesures qui s’imposent et conviendront des arrangements bilatéraux nécessaires, y compris en ce qui concerne la présence de fonctionnaires turcs dans des îles grecques et de fonctionnaires grecs en Turquie à partir du 20 mars 2016, pour assurer la liaison et faciliter ainsi le bon fonctionnement de ces arrangements. Les coûts des opérations de retour des migrants en situation irrégulière seront pris en charge par [l’Union].

2)      Pour chaque Syrien renvoyé en Turquie au départ des îles grecques, un autre Syrien sera réinstallé de la Turquie vers l’[Union] en tenant compte des critères de vulnérabilité des Nations unies. Un mécanisme sera mis en place, avec le soutien de la Commission, des agences de l’[Union] et d’autres États membres, ainsi que du HCR, afin de s’assurer de la mise en œuvre de ce principe à partir du jour même où les retours commenceront. La priorité sera donnée aux migrants qui ne sont pas déjà entrés, ou n’ont pas tenté d’entrer, de manière irrégulière sur le territoire de l’[Union]. Du côté de [l’Union], les réinstallations prévues par ce mécanisme seront, dans un premier temps, mises en œuvre en honorant les engagements pris par les États membres dans les conclusions des représentants des gouvernements des États membres réunis au sein du Conseil le 20 juillet 2015, 18 000 places de réinstallation étant encore disponibles dans ce contexte. Il sera répondu à tout nouveau besoin de réinstallation au moyen d’un arrangement volontaire similaire, dans la limite de 54 000 personnes supplémentaires [...]”. »

 La procédure devant le Tribunal et les ordonnances attaquées

3        Par requêtes déposées au greffe du Tribunal le 22 avril 2016, NF, NG et NM ont introduit chacun un recours en annulation tendant à l’annulation de la déclaration UE-Turquie, en considérant qu’il s’agit d’un acte attribuable au Conseil européen matérialisant un accord international contraire au droit de l’Union.

4        Par ailleurs, par acte déposé au greffe du Tribunal le 11 juillet 2016, le Conseil européen a, au titre de l’article 130 du règlement de procédure du Tribunal, soulevé une exception d’irrecevabilité et a demandé au Tribunal de rejeter les recours des requérants.

5        Par les ordonnances attaquées, le Tribunal a fait droit à ladite exception en jugeant que :

« 1)      Le recours est rejeté en raison de l’incompétence du Tribunal pour en connaître.

[...] »

 La procédure devant la Cour et les conclusions des parties au pourvoi

6        NF, NG et NM demandent à la Cour :

–        d’annuler les ordonnances attaquées ;

–        de renvoyer les affaires au Tribunal pour qu’il statue en précisant qu’il est tenu de se déclarer compétent, et

–        de condamner le Conseil européen aux dépens.

7        Le Conseil européen demande à la Cour :

–        de rejeter les pourvois ;

–        à titre subsidiaire, de renvoyer les affaires au Tribunal pour qu’il statue sur les autres motifs d’irrecevabilité soulevés, et

–        de condamner les requérants aux dépens.

8        Par décision du président de la Cour du 17 mai 2017, les affaires C‑208/17 P, C‑209/17 P et C‑210/17 P ont été jointes aux fins de la procédure écrite et orale et de l’arrêt.

9        Par décision du président de la Cour du 21 septembre 2017, la République hellénique a été admise à intervenir au soutien des conclusions du Conseil européen.

 Sur les pourvois

10      En vertu de l’article 181 du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter ce pourvoi totalement ou partiellement, par voie d’ordonnance motivée.

11      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre des présents pourvois.

12      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il résulte de l’article 256 TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169 du règlement de procédure qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de la décision du Tribunal ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi ou du moyen concerné (arrêt du 14 décembre 2016, SV Capital/ABE, C‑577/15 P, EU:C:2016:947, point 69 et jurisprudence citée).

13      Ainsi, ne répond pas à ces exigences et doit être déclaré irrecevable un pourvoi dont l’argumentation n’est pas suffisamment claire et précise pour permettre à la Cour d’exercer son contrôle de la légalité, sous peine de statuer ultra petita, notamment parce que les éléments essentiels sur lesquels l’argumentation est fondée ne ressortent pas de façon suffisamment cohérente et compréhensible du texte de ce pourvoi, qui est formulé de manière obscure et ambiguë à cet égard (voir, en ce sens, arrêt du 29 septembre 2011, Arkema/Commission, C‑520/09 P, EU:C:2011:619, point 61 et jurisprudence citée).

14      La Cour a également jugé que devait être rejeté comme étant manifestement irrecevable un pourvoi dépourvu de structure cohérente, se limitant à des affirmations générales et ne comportant pas d’indications précises relatives aux points de la décision du Tribunal qui seraient éventuellement entachés d’une erreur de droit (arrêt du 10 juillet 2014, Telefónica et Telefónica de España/Commission, C‑295/12 P, EU:C:2014:2062, point 30 ainsi que jurisprudence citée).

15      Par ailleurs, il est également de jurisprudence constante que la seule énonciation abstraite des moyens dans la requête ne répond pas aux exigences de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 169 du règlement de procédure (voir, en ce sens, ordonnance du 12 décembre 2006, Autosalone Ispra/Commission, C‑129/06 P, non publiée, EU:C:2006:775, point 30).

16      En l’occurrence, les pourvois sont dépourvus de cohérence. Les requérants résument, à la fin de leurs requêtes, huit moyens sans que leur argumentation ressorte avec clarté et précision des éléments évoqués de façon vague et confuse sous la rubrique « Moyens et principaux arguments ». Les pourvois se limitent ainsi à des affirmations générales selon lesquelles le Tribunal aurait méconnu un certain nombre de principes de droit de l’Union, sans indiquer avec la précision requise ni les éléments critiqués des ordonnances attaquées ni les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique la demande d’annulation.

17      Dans ce contexte, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence mentionnée aux points 12 à 15 de la présente ordonnance, un pourvoi revêtu de telles caractéristiques n’est pas susceptible de faire l’objet d’une appréciation juridique permettant à la Cour d’exercer la mission qui lui incombe dans le domaine considéré et d’effectuer son contrôle de légalité.

18      Partant, les pourvois sont irrecevables dans leur ensemble.

19      En outre, les pourvois contiennent des affirmations et des allégations qui sont également irrecevables.

20      En effet, les requérants soulèvent, en premier lieu, une prétendue insuffisance de motivation des ordonnances attaquées. Afin de démontrer une telle insuffisance, les requérants renvoient aux arguments figurant dans les requêtes déposées devant le Tribunal en première instance, invoqués pour obtenir l’annulation de la déclaration UE-Turquie.

21      Or, une telle argumentation ne comporte aucun élément juridique visant à démontrer en quoi le Tribunal aurait commis une erreur de droit.

22      Au contraire, les requérants se limitent à renvoyer aux arguments soumis au Tribunal sans les expliciter davantage et sans faire ressortir les éléments des ordonnances attaquées qu’ils entendent critiquer. Un tel argument tend en réalité à obtenir de la Cour un simple réexamen des arguments présentés devant le Tribunal, ce qui, aux termes de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, échappe à la compétence de celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, EU:C:2007:514, points 45 et 46).

23      En deuxième lieu, les requérants reprochent au Tribunal d’avoir, dans les ordonnances attaquées, commis une erreur de droit en raison d’un défaut d’examen adéquat de la question de savoir si la déclaration UE-Turquie était en réalité une décision du Conseil européen. Le Tribunal aurait commis une erreur de droit en limitant son analyse à la forme plutôt qu’au fond et en n’examinant pas la compétence de l’auteur de l’acte attaqué.

24      Cependant, par un tel reproche, qui est au demeurant non étayé, les requérants n’identifient aucune erreur de droit que le Tribunal aurait pu commettre dans les ordonnances attaquées ni ne prétendent que la solution retenue par celui-ci serait contraire au droit de l’Union, mais se bornent à exprimer leur désaccord avec une telle solution.

25      En troisième lieu, les requérants estiment, tout d’abord, que les ordonnances attaquées méconnaissent des questions de fait pertinentes, ensuite, que ces ordonnances n’ont pas procédé à l’examen de certains éléments de preuve et, enfin, que celles-ci sont entachées d’irrégularités en ce qui concerne tant l’examen complet de questions importantes que l’appréciation de celles-ci.

26      À cet égard, selon une jurisprudence constante, le Tribunal est seul compétent pour constater et apprécier les faits et, en principe, pour examiner les preuves qu’il retient à l’appui de ces faits. En effet, dès lors que ces preuves ont été obtenues régulièrement, que les principes généraux du droit ainsi que les règles de procédure applicables en matière de charge et d’administration de la preuve ont été respectés, il appartient au seul Tribunal d’apprécier la valeur qu’il convient d’attribuer aux éléments qui lui ont été soumis. Cette appréciation ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation de ces éléments, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (arrêt du 7 avril 2016, Akhras/Conseil, C‑193/15 P, EU:C:2016:219, point 67 et jurisprudence citée).

27      En effet, c’est seulement en cas de dénaturation que la Cour peut contrôler l’appréciation des preuves faite par le Tribunal. Une telle dénaturation existe lorsque, sans avoir recours à de nouveaux éléments de preuve, l’appréciation des éléments de preuve existants apparaît manifestement erronée. Toutefois, cette dénaturation doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêt du 7 avril 2016, Akhras/Conseil, C‑193/15 P, EU:C:2016:219, point 68).

28      À cet égard, les requérants, d’une part, n’indiquent pas de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par le Tribunal ni ne démontrent les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation et, d’autre part, se fondent sur l’existence de nouveaux éléments de preuve, tels que les avis juridiques recueillis par la Commission et d’autres organes de l’Union, qui ne ressortent pas du dossier.

29      En conséquence, par leurs arguments, les requérants se bornent à exprimer leur désaccord à l’égard de l’appréciation des faits opérée par le Tribunal, tout en demandant une nouvelle appréciation de ces faits, sans même invoquer ni démontrer l’existence d’une inexactitude manifeste de l’appréciation des faits opérée par le Tribunal, ce qui est irrecevable dans le cadre d’un pourvoi.

30      Dans ces conditions, il convient, en application de l’article 181 du règlement de procédure, de rejeter les pourvois comme étant manifestement irrecevables.

 Sur les dépens

31      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Conseil européen ayant conclu à la condamnation des requérants et ceux-ci ayant succombés en leurs moyens, il y a lieu de les condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) ordonne :

1)      Les pourvois sont rejetés comme étant manifestement irrecevables.

2)      NF, NG et NM sont condamnés aux dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.