Language of document : ECLI:EU:T:2013:123

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

11 mars 2013 (*)

« Référé – Redevances et droits dus à l’ECHA – Redevances réduites accordées aux petites entreprises – Vérification par l’ECHA de la déclaration relative à la taille de l’entreprise – Décision ordonnant le recouvrement du solde non perçu de la redevance intégrale due – Demande de sursis à exécution – Méconnaissance des exigences de forme – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑89/13 R,

Calestep, SL, établie à Estepa (Espagne), représentée par Me E. Cabezas Mateos, avocat,

partie requérante,

contre

Agence européenne des produits chimiques (ECHA), représentée par Mmes M. Heikkilä, A.  Iber et M. C. Jacquet, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de sursis à l’exécution des rappels de paiement des 23 janvier et 8 février 2013 adressés par l’ECHA à la requérante au motif que celle-ci ne remplissait pas les conditions pour bénéficier de la réduction des redevances prévue pour les petites entreprises,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige, procédure et conclusions des parties

1        La requérante, Calestep, SL, est une société de droit espagnol, qui a pour objet la fabrication de chaux sous toutes ses formes et produits dérivés, la vente des produits et sous-produits obtenus, et le transport et négoce de ces derniers. Elle exerce son activité dans la région de Séville (Espagne).

2        Ainsi qu’il ressort de la demande en référé, la requérante est tenue de verser à l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) des redevances au titre du règlement (CE) n° 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006, concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) n° 793/93 du Conseil et le règlement (CE) n° 1488/94 de la Commission ainsi que la directive 76/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission (JO L 396, p. 1) et du règlement (CE) n° 340/2008 de la Commission, du 16 avril 2008, relatif aux redevances et aux droits dus à l’Agence européenne des produits chimiques en application du règlement n° 1907/2006 (JO L 107, p. 6). Se prévalant de sa qualité de petite entreprise, la requérante a payé la taxe réduite, telle que prévue à l’article 74, paragraphe 3, du règlement n° 1907/2006 et explicitée par le règlement n° 340/2008.

3        Aux termes de la demande en référé, une vérification du statut de petite entreprise réclamé par la requérante a amené l’ECHA à estimer que le groupe d’entreprises dont fait partie la requérante ne remplissait pas les critères pour le droit au versement de la taxe réduite. Par conséquent, l’ECHA a exigé, par la décision SME (2012) 4028 du 21 décembre 2012, le versement du solde non perçu de la redevance intégrale correspondant à une moyenne entreprise, majoré d’une taxe administrative, sous peine de voir considérés comme incomplets les registres relatifs à l’activité de la requérante (ci-après la « décision attaquée »). En exécution de la décision attaquée, l’ECHA a adressé à la requérante, les 23 janvier et 8 février 2013, trois factures d’un montant respectif de 6 975 euros, 6 975 euros et 14 500 euros.

4        Dans ces circonstances, par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 février 2013, la requérante a introduit un recours visant à l’annulation de la décision attaquée.

5        Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 19 février 2013, la requérante a introduit la présente demande en référé, dans laquelle elle conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal de surseoir à l’exécution du paiement des factures susmentionnées.

6        Dans ses observations sur la demande en référé, déposées au greffe du Tribunal le 7 mars 2013, l’ECHA conclut au rejet de la demande en référé, tout en s’engageant à ne prendre aucune mesure qui ferait grief à la requérante avant la fin de la procédure principale.

 En droit

7        Il ressort d’une lecture combinée des articles 278 TFUE et 279 TFUE, d’une part, et de l’article 256, paragraphe 1, TFUE, d’autre part, que le juge des référés peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire les mesures provisoires nécessaires, et ce en application de l’article 104 du règlement de procédure du Tribunal.

8        Dès lors que le non-respect du règlement de procédure constitue une fin de non-recevoir d’ordre public, il appartient au juge des référés d’examiner d’office, in limine litis, si les dispositions applicables de ce règlement ont été respectées (voir ordonnance du président du Tribunal du 29 juillet 2010, Cross Czech/Commission, T‑252/10 R, non publiée au Recueil, point 7, et la jurisprudence citée).

9        En vertu de l’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure, les demandes en référé doivent spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence, ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent. Ainsi, le sursis à exécution et les autres mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts de la partie qui les sollicite, qu’ils soient édictés et produisent leurs effets dès avant la décision sur le recours principal. Ces conditions sont cumulatives, de sorte que les mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut [ordonnances du président de la Cour du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C‑268/96 P(R), Rec. p. I‑4971, point 30, et du 12 mai 2010, Torresan/OHMI, C‑5/10 P‑R, non publiée au Recueil, points 14 et 15].

10      En outre, en vertu de l’article 104, paragraphe 3, et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, la demande doit notamment être présentée par acte séparé, indiquer l’objet du litige et contenir un exposé sommaire des moyens invoqués.

11      Il découle d’une lecture combinée de ces dispositions du règlement de procédure qu’une demande relative à des mesures provisoires doit, à elle seule, permettre à la partie défenderesse de préparer ses observations et au juge des référés de statuer sur la demande, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’une telle demande soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celle-ci se fonde ressortent d’une façon cohérente et compréhensible du texte même de la demande en référé. Si ce texte peut être étayé et complété sur des points spécifiques par des renvois à des passages déterminés de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la demande en référé, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels dans celle-ci [voir ordonnance Cross Czech/Commission, précitée, point 10, et la jurisprudence citée ; voir, également, en ce sens, ordonnance du président de la Cour du 30 avril 2010, Ziegler/Commission, C‑113/09 P(R), non publiée au Recueil, point 13].

12      Dans les circonstances du cas d’espèce, il convient de vérifier si la demande en référé est recevable en ce qu’elle contient un exposé suffisamment précis des éléments permettant l’examen de la condition relative à l’urgence.

13      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’urgence doit s’apprécier par rapport à la nécessité de statuer provisoirement, afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite les mesures provisoires, étant précisé qu’un préjudice de caractère purement financier n’est normalement pas irréparable, dès lors qu’il peut faire l’objet d’une compensation financière ultérieure, à moins qu’il apparaisse que, en l’absence de ces mesures, ladite partie se trouverait dans une situation susceptible de mettre en péril son existence avant l’intervention de l’arrêt mettant fin à la procédure principale (voir, en ce sens, ordonnance du président du Tribunal du 16 novembre 2007, Dimos Peramatos/Commission, T‑312/07 R, non publiée au Recueil, points 34 et 35, et la jurisprudence citée).

14      Pour pouvoir apprécier si le préjudice allégué présente un caractère grave et irréparable, le juge des référés doit disposer d’indications concrètes et précises, étayées par des preuves documentaires détaillées et certifiées qui démontrent la situation financière de la partie qui sollicite les mesures provisoires et permettent d’apprécier les conséquences qui résulteraient de l’absence des mesures demandées. Il s’ensuit que ladite partie doit produire, pièces à l’appui, une image fidèle et globale de sa situation financière [voir, en ce sens, ordonnances du président de la Cour du 20 avril 2012, Fabricela/Commission, C‑507/11 P(R), non publiée au Recueil, point 35, et du Tribunal du 27 avril 2010, Parlement/U, T‑103/10 P(R), non publiée au Recueil, points 37 et 39].

15      En l’espèce, la requérante se limite à affirmer, dans la demande en référé, qu’elle « est une petite entreprise qui ne dispose pas actuellement des sommes nécessaires pour réaliser le paiement, car elle n’avait pas budgété ce montant, et qu’elle s’engage à le faire après que le Tribunal aura prononcé son arrêt définitif dans l’hypothèse où sa demande principale ne serait pas accueillie, le cas échéant avec les intérêts correspondants ».

16      Or, force est de constater que ces allégations ne sauraient en aucun cas être considérées comme fournissant une image fidèle et globale de la situation financière de la requérante. Par conséquent, cette dernière ne permet pas au juge des référés d’apprécier si le préjudice allégué peut être qualifié de grave.

17      Par ailleurs, la requérante a omis de se prononcer sur le caractère irréparable du préjudice financier allégué. Notamment, elle n’a pas exposé ce qui l’empêcherait, en cas d’annulation de l’acte attaqué, d’obtenir une compensation financière ultérieure par la voie d’un recours en indemnité au titre des articles 268 TFUE et 340 TFUE, la seule possibilité de former un tel recours étant suffisante pour attester du caractère en principe réparable d’un tel préjudice (voir, en ce sens, ordonnance du président du Tribunal du 31 août 2010, Babcock Noell/Entreprise commune Fusion for Energy, T‑299/10 R, non publiée au Recueil, point 51, et la jurisprudence citée).

18      Il s’ensuit que la demande en référé doit être rejetée comme irrecevable.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 11 mars 2013.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’espagnol.