Language of document : ECLI:EU:C:2009:543

ARRÊT DU 10. 9. 2009 – AFFAIRE C-286/08

COMMISSION / GRÈCE

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

10 septembre 2009 (*)

«Manquement d’État – Environnement – Directives 2006/12/CE et 91/689/CEE – Déchets dangereux – Obligation d’élaborer et d’adopter un plan de gestion des déchets dangereux – Obligation d’établir un réseau intégré et adéquat d’installations d’élimination des déchets dangereux – Directive 1999/31/CE – Mise en décharge des déchets – Élimination des déchets dangereux»

Dans l’affaire C‑286/08,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 30 juin 2008,

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme M. Patakia et M. J.‑B. Laignelot, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République hellénique, représentée par Mme E. Skandalou, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, MM. A. Tizzano et A. Borg Barthet (rapporteur), juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que:

–        en n’ayant pas élaboré ni adopté, dans un délai raisonnable, un plan pour la gestion des déchets dangereux conforme aux exigences de la législation communautaire applicable et en n’ayant pas établi un réseau intégré et adéquat d’installations d’élimination des déchets dangereux, caractérisé par l’utilisation des méthodes les plus appropriées pour garantir un niveau élevé de protection de l’environnement et de la santé publique,

–        en n’ayant pas pris toutes les mesures nécessaires pour assurer, en ce qui concerne la gestion des déchets dangereux, le respect des articles 4 et 8 de la directive 2006/12/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2006, relative aux déchets (JO L 114, p. 9), ainsi que des articles 3, paragraphe 1, 6 à 9, 13 et 14 de la directive 1999/31/CE du Conseil, du 26 avril 1999, concernant la mise en décharge des déchets (JO L 182, p. 1),

la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu, en premier lieu, des articles 1er, paragraphe 2, et 6 de la directive 91/689/CEE du Conseil, du 12 décembre 1991, relative aux déchets dangereux (JO L 377, p. 20), lus en combinaison avec les articles 5, paragraphes 1 et 2, ainsi que 7, paragraphe 1, de la directive 2006/12, en deuxième lieu, de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 91/689, lu en combinaison avec les dispositions des articles 4 et 8 de la directive 2006/12, ainsi que, en troisième lieu, des articles 3, paragraphe 1, 6 à 9, 13 et 14 de la directive 1999/31.

 Le cadre juridique

 La réglementation communautaire

 La directive 75/442/CEE

2        La directive 75/442/CEE du Conseil, du 15 juillet 1975, relative aux déchets (JO L 194, p. 39), telle que modifiée par la directive 91/156/CEE du Conseil, du 18 mars 1991 (JO L 78, p. 32, ci-après la «directive 75/442»), a pour objectif essentiel la protection de la santé de l’homme et de l’environnement contre les effets préjudiciables causés par le ramassage, le transport, le traitement, le stockage et le dépôt des déchets.

3        Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 75/442:

«Les États membres prennent des mesures appropriées pour promouvoir:

a)      en premier lieu, la prévention ou la réduction de la production des déchets et de leur nocivité […]

[…]

b)      en deuxième lieu:

–        la valorisation des déchets par recyclage, réemploi, récupération ou toute autre action visant à obtenir des matières premières secondaires

ou

–        l’utilisation des déchets comme source d’énergie.»

4        L’article 4 de la directive 75/442 dispose:

«Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer que les déchets seront valorisés ou éliminés sans mettre en danger la santé de l’homme et sans que soient utilisés des procédés ou méthodes susceptibles de porter préjudice à l’environnement, et notamment:

–        sans créer de risque pour l’eau, l’air ou le sol, ni pour la faune et la flore,

–        sans provoquer d’incommodités par le bruit ou les odeurs,

–        sans porter atteinte aux paysages et aux sites présentant un intérêt particulier.

Les États membres prennent, en outre, les mesures nécessaires pour interdire l’abandon, le rejet et l’élimination incontrôlée des déchets.»

5        L’article 5 de la directive 75/442 prévoit:

«1.      Les États membres prennent les mesures appropriées, en coopération avec d’autres États membres lorsque cela s’avère nécessaire ou opportun, en vue de l’établissement d’un réseau intégré et adéquat d’installations d’élimination, en tenant compte des meilleures technologies disponibles qui n’entraînent pas de coûts excessifs. Ce réseau doit permettre à la Communauté dans son ensemble d’assurer elle-même l’élimination de ses déchets et aux États membres de tendre individuellement vers ce but, en tenant compte des conditions géographiques ou du besoin d’installations spécialisées pour certains types de déchets.

2.      Le réseau visé au paragraphe 1 doit permettre, en outre, l’élimination des déchets dans l’une des installations appropriées les plus proches, grâce à l’utilisation des méthodes et technologies les plus appropriées pour garantir un niveau élevé de protection de l’environnement et de la santé publique.»

6        Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 75/442:

«Pour réaliser les objectifs visés aux articles 3, 4 et 5, les autorités compétentes visées à l’article 6 sont tenues d’établir dès que possible un ou plusieurs plans de gestion des déchets. Ces plans portent notamment sur:

–        les types, les quantités et les origines des déchets à valoriser ou à éliminer,

–        les prescriptions techniques générales,

–        toutes les dispositions spéciales concernant des déchets particuliers,

–        les sites et installations appropriés pour l’élimination.»

7        L’article 8 de la directive 75/442 est libellé comme suit:

«Les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que tout détenteur de déchets:

–        les remette à un ramasseur privé ou public ou à une entreprise qui effectue les opérations visées aux annexes II A ou II B

ou

–        en assure lui-même la valorisation ou l’élimination en se conformant aux dispositions de la présente directive.»

8        L’abrogation de la directive 75/442 par l’article 20, premier alinéa, de la directive 2006/12, qui est entrée en vigueur le 17 mai 2006, n’a pas d’influence sur le présent recours en manquement. En effet, cette dernière directive, qui procède dans un souci de clarté et de rationalité à une codification de la directive 75/442, reprend les dispositions mentionnées aux points 3 à 7 du présent arrêt. En outre, l’article 20, premier alinéa, de la directive 2006/12 dispose que la directive 75/442 «est abrogée, sans préjudice des obligations des États membres en ce qui concerne les délais de transposition en droit interne indiqués à l’annexe III, partie B».

 La directive 91/689

9        La directive 91/689 a pour objet, selon son article 1er, le rapprochement des législations des États membres relatives à la gestion contrôlée des déchets dangereux.

10      Aux termes de l’article 1er, paragraphe 2, de ladite directive:

«Sous réserve de la […] directive [91/689], la directive 75/442/CEE s’applique aux déchets dangereux.»

11      L’article 6, paragraphe 1, de la directive 91/689 dispose:

«Conformément à l’article 7 de la directive 75/442/CEE, les autorités compétentes élaborent, séparément ou dans le cadre de leurs plans généraux de gestion des déchets, des plans de gestion des déchets dangereux qu’elles rendent publics.»

 La directive 1999/31

12      En vertu de son article 1er, paragraphe 1, la directive 1999/31 a pour objet de prévoir des mesures, des procédures et des orientations visant à prévenir ou à réduire autant que possible les effets négatifs de la mise en décharge des déchets sur l’environnement pendant toute la durée de vie de la décharge.

13      Aux termes de l’article 2, sous g), de ladite directive, on entend par:

«décharge, un site d’élimination des déchets par dépôt des déchets sur ou dans la terre (c’est-à-dire en sous-sol), y compris:

[…]

–        un site permanent (c’est-à-dire pour une durée supérieure à un an) utilisé pour stocker temporairement les déchets

[…]»

14      L’article 3, paragraphe 1, de la même directive prévoit:

«Les États membres appliquent la […] directive [1999/31] à toute décharge au sens de l’article 2, point g).»

15      L’article 6 de la directive 1999/31 est libellé comme suit:

«Les États membres prennent des mesures pour que:

a)      seuls les déchets déjà traités soient mis en décharge. Cette disposition ne peut s’appliquer aux déchets inertes pour lesquels un traitement n’est pas réalisable techniquement ou à tous autres déchets pour lesquels un tel traitement ne contribue pas à la réalisation des objectifs de la présente directive, fixés à l’article 1er, par une réduction des quantités de déchets ou des risques pour la santé humaine ou l’environnement;

b)      seuls les déchets dangereux répondant aux critères définis conformément à l’annexe II soient dirigés vers une décharge pour déchets dangereux;

c)      les décharges destinées aux déchets non dangereux puissent être utilisées pour:

i)      les déchets municipaux;

ii)      les déchets non dangereux de toute autre origine qui satisfont aux critères d’admission des déchets dans les décharges pour déchets non dangereux fixés conformément à l’annexe II;

iii)      les déchets dangereux stables et non réactifs (par exemple solidifiés ou vitrifiés) dont le comportement en matière de production de lixiviats est équivalent à celui des déchets non dangereux visés au point ii) et qui satisfont aux critères d’admission pertinents fixés conformément à l’annexe II. Ces déchets dangereux ne sont pas mis en décharge dans des unités destinées aux déchets non dangereux biodégradables;

d)      les décharges pour déchets inertes ne soient utilisées que pour les déchets inertes.»

16      Aux termes de l’article 7 de ladite directive:

«Les États membres prennent des mesures pour que la demande d’autorisation pour l’exploitation d’une décharge contienne des données sur au moins les éléments suivants:

a)      l’identité du demandeur et, s’il s’agit de deux entités différentes, de l’exploitant;

b)      la description des types de déchets à déposer et leur quantité totale;

c)      la capacité proposée pour la décharge;

d)      la description du site, y compris ses caractéristiques hydrogéologiques et géologiques;

e)      les méthodes proposées pour prévenir et réduire la pollution;

f)      le plan proposé pour l’exploitation, la surveillance et le contrôle;

g)      le plan proposé pour les procédures de désaffectation et de gestion après désaffectation;

h)      si une étude d’impact s’impose en vertu de la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement […], les informations fournies par le maître d’ouvrage conformément à l’article 5 de ladite directive;

i)      la garantie financière du demandeur, ou tout autre moyen équivalent requis par l’article 8, point a) iv).

Après l’aboutissement d’une demande d’autorisation, ces informations sont mises à la disposition des autorités nationales et communautaires compétentes en matière de statistiques lorsque celles-ci le demandent à des fins statistiques.»

17      L’article 8 de la directive 1999/31 dispose:

«Les États membres prennent des mesures pour que:

a)      une autorisation de décharge ne soit délivrée par l’autorité compétente que si les conditions suivantes sont réunies:

i)      sans préjudice de l’article 3, paragraphes 4 et 5, le projet de décharge est conforme à toutes les exigences pertinentes de la présente directive, y compris ses annexes;

ii)      la gestion du site de mise en décharge est confiée à une personne physique techniquement compétente pour gérer le site; la formation professionnelle et technique des exploitants et du personnel de la décharge est assurée;

iii)      l’exploitation de la décharge comporte les mesures nécessaires pour éviter les accidents et en limiter les conséquences;

iv)      avant le début des opérations de dépôt, le demandeur a pris ou prendra les dispositions appropriées, sous forme d’une garantie financière ou par tout moyen équivalent, selon des modalités à arrêter par les États membres, pour faire en sorte que les obligations (y compris les dispositions relatives à la gestion après désaffectation) contractées au titre de l’autorisation délivrée conformément aux dispositions de la présente directive soient exécutées et que les procédures de désaffectation requises par l’article 13 soient suivies. Cette garantie, ou son équivalent, sera maintenue aussi longtemps que l’exigeront les opérations d’entretien et de gestion du site désaffecté, conformément à l’article 13, point d). Les États membres peuvent, à leur choix, déclarer que le présent point ne s’applique pas aux décharges pour déchets inertes;

b)      le projet de décharge soit conforme au plan ou aux plans pertinents de gestion des déchets visés à l’article 7 de la directive 75/442/CEE;

c)      avant le début des opérations d’élimination, l’autorité compétente inspecte le site pour s’assurer qu’il est conforme aux conditions fixées en la matière par l’autorisation, ce qui ne diminue en rien la responsabilité de l’exploitant en vertu de l’autorisation.»

18      L’article 9 de la directive 1999/31 énonce:

«En vue d’expliciter et de compléter les dispositions de l’article 9 de la directive 75/442/CEE et de l’article 9 de la directive 96/61/CE, l’autorisation de décharge contient au moins les indications suivantes:

a)      la catégorie de la décharge;

b)      la liste des types définis et la quantité totale de déchets dont le dépôt dans la décharge est autorisé;

c)      les exigences auxquelles doivent répondre la préparation de la décharge, les opérations de mise en décharge et les procédures de surveillance et de contrôle, y compris les plans d’intervention [annexe III, point 4, B], ainsi que les exigences provisoires concernant les opérations de désaffectation du site et de gestion après désaffectation;

d)      l’obligation pour le demandeur de faire rapport à l’autorité compétente, au moins une fois par an, sur les types et quantités de déchets éliminés et sur les résultats du programme de surveillance prévu aux articles 12 et 13 et à l’annexe III.»

19      L’article 13 de la directive 1999/31 dispose:

«Les États membres prennent des mesures pour que, conformément, le cas échéant, à l’autorisation:

a)      la procédure de désaffectation d’une décharge ou d’une partie de celle-ci soit engagée:

i)      lorsque les conditions correspondantes indiquées dans l’autorisation sont réunies

ou

ii)      après l’autorisation de l’autorité compétente, à la demande de l’exploitant

ou

iii)      sur décision motivée de l’autorité compétente;

b)      une décharge ou une partie de celle-ci ne puisse être considérée comme définitivement désaffectée que lorsque l’autorité compétente a effectué une inspection finale sur place, a procédé à l’évaluation de tous les rapports présentés par l’exploitant et a donné à l’exploitant son autorisation pour la désaffectation. Cette procédure ne diminue en rien la responsabilité qui incombe à l’exploitant en vertu de l’autorisation;

c)      après la désaffectation définitive d’une décharge, son exploitant soit responsable de l’entretien, de la surveillance et du contrôle de la décharge pour toute la durée que l’autorité compétente aura jugée nécessaire compte tenu de la période pendant laquelle la décharge peut présenter des risques.

L’exploitant notifie à l’autorité compétente les effets néfastes sur l’environnement révélés par les procédures de contrôle et se conforme à la décision de l’autorité compétente concernant la nature et le calendrier des mesures correctives à prendre;

d)      aussi longtemps que l’autorité compétente estime qu’une décharge est susceptible d’entraîner un danger pour l’environnement et sans préjudice de toute législation communautaire ou nationale en matière de responsabilité du détenteur de déchets, l’exploitant du site soit responsable de la surveillance et de l’analyse des gaz de décharge et des lixiviats du site ainsi que des nappes d’eau souterraines situées à proximité, conformément à l’annexe III.»

20      Aux termes de l’article 14 de la directive 1999/31:

«Les États membres prennent des mesures pour que les décharges autorisées ou déjà en exploitation au moment de la transposition de la présente directive ne puissent continuer à fonctionner que si les mesures indiquées ci-après sont mises en œuvre dès que possible, et au plus tard dans les huit ans à compter de la date fixée à l’article 18, paragraphe 1.

a)      Dans un délai d’un an à compter de la date fixée à l’article 18, paragraphe 1, l’exploitant d’une décharge prépare et présente, pour approbation, à l’autorité compétente un plan d’aménagement du site comprenant les éléments énumérés à l’article 8 ainsi que toute mesure corrective qu’il estime nécessaire pour se conformer aux exigences de la présente directive à l’exception de celles exposées à l’annexe I, point 1.

b)      À la suite de la présentation du plan d’aménagement, l’autorité compétente prend une décision définitive quant à la poursuite de l’exploitation sur la base dudit plan d’aménagement et de la présente directive. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour qu’il soit procédé, dans les meilleurs délais, conformément à l’article 7, point g), et à l’article 13, à la désaffectation des sites qui n’ont pas obtenu, conformément à l’article 8, l’autorisation de poursuivre leurs opérations.

c)      Sur la base du plan d’aménagement du site approuvé, l’autorité compétente autorise les travaux nécessaires et fixe une période transitoire pour l’exécution du plan. Toute décharge existante doit être conforme aux exigences de la présente directive à l’exception de celles énoncées à l’annexe I, point 1, dans un délai de huit ans à compter de la date fixée à l’article 18, paragraphe 1.

d)      i)     Dans un délai d’un an à compter de la date fixée à l’article 18, paragraphe 1, les articles 4, 5, et 11 ainsi que l’annexe II s’appliquent aux décharges pour déchets dangereux.

ii)      Dans les trois ans suivant la date fixée à l’article 18, paragraphe 1, l’article 6 s’applique aux décharges pour déchets dangereux.»

 La réglementation nationale

21      Le nouveau cadre réglementaire, communiqué par les autorités grecques à la Commission en réponse à l’avis motivé de cette dernière, est constitué par les trois arrêtés ministériels suivants:

–        l’arrêté ministériel conjoint 13588/725, relatif aux mesures, conditions et restrictions de la gestion des déchets dangereux (FEK B’ 383/28.3.2006), qui définit les déchets dangereux, les principes et objectifs de leur traitement, prévoit les conditions de leur traitement, les conditions d’octroi de l’autorisation nécessaire en la matière, les mesures pour l’assainissement et/ou la réhabilitation des sites, ainsi que les obligations du détenteur de déchets dangereux et annonce l’adoption d’un plan national pour la gestion des déchets dangereux;

–        l’arrêté ministériel conjoint 24944/1159 instituant les spécifications techniques pour la gestion des déchets dangereux (FEK B’ 791/30.6.2006). Ces spécifications concernent la collecte, l’emballage, le marquage, le transport, le stockage, le transbordement, le traitement et/ou la valorisation, l’enfouissement sanitaire et l’élimination souterraine des déchets dangereux. Elles sont également relatives à l’étude d’assainissement et/ou de réhabilitation des sites ainsi qu’au contenu des imprimés, dossiers et rapports exigés au cours des différents stades de la procédure et à la tenue du registre des installations de production et/ou de gestion des déchets dangereux;

–        l’arrêté ministériel conjoint 8668 (FEK Β’ 287/2.3.2007) portant approbation du plan national de gestion des déchets dangereux (ci-après le «plan national de gestion»). Ce dernier comporte une description de la situation existante en Grèce en ce qui concerne la provenance des déchets dangereux, les catégories et les quantités produites de ceux-ci, les pratiques utilisées pour le traitement des déchets dangereux; une description des objectifs dudit plan national, des actions devant être adoptées pour atteindre ces objectifs, des stades de mise en œuvre de celui-ci et une énumération des critères de localisation et de disponibilité des sites appropriés ou des installations d’élimination des déchets dangereux. Le plan national de gestion contient également une description des actions exigées pour un suivi continu et une mise à jour de ce dernier, une description du plan de gestion des petites quantités de déchets dangereux (principalement, les produits à usage domestique) et de déchets urbains, ainsi qu’une indication de l’origine des ressources financières pour la mise en œuvre de ce plan national.

 La procédure précontentieuse

22      Au cours de l’année 2003, la Commission a ouvert d’office une procédure portant sur l’application, par les autorités grecques, de la législation communautaire en matière de déchets dangereux et, en particulier, des directives 75/442, 91/689 et 1999/31.

23      Considérant que la planification de la gestion des déchets dangereux en Grèce ne répondait pas aux exigences de la législation communautaire, qu’il n’existait pas d’installations appropriées et suffisantes de traitement ou d’élimination des déchets dangereux pour l’ensemble du territoire national et que la méthode d’élimination de la grande majorité des déchets dangereux produits en Grèce n’était pas conforme aux exigences de la législation communautaire en la matière, la Commission a, par lettre du 21 mars 2005, invité la République hellénique à soumettre ses observations dans un délai de deux mois.

24      Dans une première lettre, datée du 25 mai 2005, les autorités grecques ont indiqué à la Commission que la réglementation nationale en vigueur était en cours de modification et que la révision de celle-ci, incluant l’élaboration des prescriptions techniques et du plan national de gestion, serait achevée pour la fin de l’année. Elles ont en outre précisé que le stockage temporaire des déchets dangereux était effectué sur les sites de production de ceux-ci, lesquels sont en principe contrôlés, protégés contre les conditions météorologiques et accessibles uniquement aux personnes autorisées, tout en faisant valoir que chaque mesure nécessaire à la protection de la santé et de l’environnement était prise à la suite de l’émission d’autorisations spécifiques.

25      Dans une seconde lettre, datée du 4 août 2005, les autorités grecques ont notamment affirmé qu’elles avaient achevé l’élaboration des arrêtés ministériels conjoints relatifs aux prescriptions techniques et aux mesures de gestion des déchets dangereux. Elles ont également indiqué que l’élaboration du plan national de gestion était en bonne voie.

26      Après avoir examiné lesdites lettres, la Commission, considérant que la République hellénique avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu des dispositions des directives communautaires relatives aux déchets dangereux, aux déchets et à la mise en décharge de ceux-ci, a, par lettre du 19 décembre 2005, adressé un avis motivé audit État membre, invitant celui-ci à s’y conformer dans un délai de deux mois à compter de sa réception.

27      La République hellénique a répondu à l’avis motivé par lettres des 20 février, 1er juin, 29 septembre et 22 novembre 2006 ainsi que du 21 mars 2007.

28      Dans leur lettre datée du 29 septembre 2006, les autorités grecques ont communiqué à la Commission les deux arrêtés ministériels conjoints 13588/725 et 24944/1159, tout en indiquant qu’un troisième arrêté, à savoir l’arrêté ministériel conjoint 8668, était au stade de la signature par les ministres compétents. Ce dernier, portant approbation du plan national de gestion, a été communiqué à la Commission par lettre du 21 mars 2007.

29      Considérant que la situation en Grèce demeurait insatisfaisante au regard des exigences de la réglementation communautaire en matière de déchets, la Commission a décidé d’introduire le présent recours.

 Sur le recours

 Sur le premier grief, tiré d’une violation des articles 1er, paragraphe 2, et 6, paragraphe 1, de la directive 91/689, lus en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2006/12

 Argumentation des parties

30      La Commission soutient que le plan national de gestion ne remplit pas les critères visés à l’article 7 de la directive 2006/12 étant donné que l’inventaire des déchets dangereux n’a pas été achevé, qu’il ne comprend pas tous les types de déchets dangereux et qu’il ne détermine pas les sites et les installations appropriés d’élimination des déchets.

31      En particulier, la Commission soutient que pour certaines catégories de déchets dangereux, tels que les déchets provenant de soins médicaux, les polychlorobiphényles (PCB) et les polychloroterphényles (PCT) ainsi que les sous-produits animaux, le plan spécifique de gestion n’a pas été achevé et que l’inventaire préalable des données en la matière n’a pas non plus été conduit à son terme ni mis à jour.

32      La Commission fait également valoir que, s’agissant des sites de gestion des déchets dangereux, le plan national de gestion ne contient pas de carte géographique déterminant des sites particuliers d’installations, mais définit simplement les critères fondamentaux de localisation des sites de ces installations, la répartition territoriale de la production de déchets dangereux et le volume de production de ceux-ci en liaison avec la taille de l’installation industrielle qui les produit. Ces critères constitueraient plutôt des lignes directrices nécessitant un traitement ultérieur et ne répondraient pas à l’exigence de «précision suffisante» dégagée par la jurisprudence.

33      La Commission en conclut que la République hellénique n’a pas mis fin à la violation de ses obligations découlant des articles 1er, paragraphe 2, et 6, paragraphe 1, de la directive 91/689, lus en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2006/12.

34      Dans son mémoire en défense, la République hellénique fait valoir qu’elle envisage d’adopter un nouvel arrêté interministériel dans lequel seront répertoriées les infrastructures de traitement des déchets dangereux qui font actuellement l’objet d’une procédure d’obtention d’une autorisation environnementale et de construction, ainsi que les prévisions exactes concernant de nouvelles infrastructures.

35      Cet État membre ajoute que ce nouvel arrêté interministériel définira les spécifications de mise en œuvre d’un système électronique de suivi et d’enregistrement de tous les déchets dangereux au niveau national. L’étude pour développer ce système aurait d’ores et déjà été attribuée et elle devrait être achevée, conformément aux obligations contractuelles, à la fin du mois de septembre de l’année 2009.

36      La République hellénique fait en outre valoir que, en parallèle, l’étude «pour l’élargissement, l’évaluation et la réhabilitation des sites et des installations non contrôlés qui sont pollués par des déchets industriels et dangereux en Grèce» est en cours d’attribution.

37      À l’égard des insuffisances que présenterait le plan spécifique de gestion de certaines catégories de déchets dangereux, la République hellénique fait valoir que, en ce qui concerne les PCB, la société Dimosia Epicheirisi Ilektrismou AE surveille de manière systématique les quantités de déchets et met en œuvre un programme d’élimination de ses équipements comportant des PCB qui devrait s’achever en 2010. S’agissant des autres détenteurs de PCB, l’inventaire complet des quantités qu’ils possèdent et l’achèvement de l’application des plans de traitement prévus dans la législation nationale applicable (arrêtés ministériels conjoints 7589/731 et 18083/1098E.103) feraient l’objet d’une étude qui se trouverait au stade du lancement de l’appel d’offre.

38      En ce qui concerne les sous-produits animaux dangereux, ledit État membre indique que la quantité annuelle produite s’élève à 45 300 tonnes environ et renvoie à un tableau annexé à son mémoire en défense dans lequel figurent les quantités produites par catégorie et par département.

39      S’agissant du traitement des sous-produits animaux, la République hellénique fait valoir que tous les abattoirs agréés disposent d’unités d’incinération. Selon elle, les producteurs des déchets en cause transportent ceux-ci, après avoir obtenu l’autorisation nécessaire, soit dans des unités d’incinération ou dans des unités de transformation, soit dans des unités de transformation des matières dites «de catégorie 1 – haute dangerosité». Les résidus produits par les unités d’incinération (cendres) et par les unités de transformation (farine de viande osseuse) seraient dirigés vers des sites d’enfouissement sanitaires dûment autorisés. Les directions vétérinaires locales contrôleraient la gestion de ces déchets et appliqueraient, en tant que de besoin, les sanctions prévues. Les unités de transformation des substances de catégorie 1 et les abattoirs agréés disposant d’unités d’incinération sont recensés respectivement dans deux tableaux annexés au mémoire en défense dudit État membre.

40      S’agissant de la gestion des déchets médicaux infectieux, la République hellénique renvoie à une liste des infrastructures en fonctionnement annexée à son mémoire en défense.

41      La République hellénique, qui admet que son plan national de gestion ne comporte pas de carte géographique déterminant les lieux précis d’implantation des sites d’élimination, renvoie à deux tableaux annexés à son mémoire en défense dans lesquels figurent respectivement les infrastructures existantes pour la gestion des déchets dangereux et celles qui sont prévues. Ledit État membre indique en outre que l’impression desdites infrastructures sur des cartes géographiques est en cours et que celles-ci seront communiquées à la Commission. La République hellénique ajoute que le nouveau plan de gestion inclura une cartographie complète faisant apparaître les emplacements appropriés pour les structures de gestion des déchets dangereux.

42      À l’égard de l’argument de la Commission selon lequel les critères de localisation des sites des installations d’élimination des déchets ne sont pas établis avec une précision suffisante, la République hellénique fait valoir que ces critères ne sont pas moins précis que ceux qui ont été dégagés par la jurisprudence de la Cour.

 Appréciation de la Cour

43      En vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 91/689, les États membres sont tenus d’élaborer des plans de gestion des déchets dangereux, lesquels doivent, conformément à l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2006/12, porter notamment sur les types, les quantités et les origines des déchets à valoriser ou à éliminer, les prescriptions techniques générales, toutes les dispositions spéciales concernant des déchets particuliers ainsi que les sites et installations appropriés pour l’élimination.

44      La République hellénique ne conteste pas le fait que le plan national de gestion ne comprend pas tous les types de déchets dangereux ni le caractère incomplet de l’inventaire de ceux-ci. En effet, cet État membre se borne à fournir des données actualisées et à faire valoir que l’élaboration d’un nouveau plan de gestion des déchets, portant sur l’ensemble des catégories de déchets qui relèvent du champ d’application de la législation communautaire et nationale, est prévue.

45      À cet égard, il suffit de rappeler que, en vertu d’une jurisprudence constante, l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêts du 14 septembre 2004, Commission/Espagne, C‑168/03, Rec. p. I‑8227, point 24, et du 17 janvier 2008, Commission/Allemagne, C‑152/05, Rec. p. I-39, point 15).

46      Par conséquent, le premier grief de la Commission doit être considéré comme fondé sur ce point.

47      S’agissant des sites et installations d’élimination des déchets dangereux, il ressort de la jurisprudence que le plan ou les plans de gestion que les autorités compétentes des États membres sont tenues d’établir en vertu de cette disposition doivent comporter soit une carte géographique déterminant le lieu précis d’implantation desdits sites, soit des critères de localisation suffisamment précis pour que l’autorité compétente chargée de délivrer une autorisation au titre de l’article 9 de la directive 2006/12 soit en mesure d’établir si le site ou l’installation en cause s’inscrit dans le cadre de la gestion prévue par le plan (arrêt du 1er avril 2004, Commune de Braine-le-Château e.a., C‑53/02 et C-217/02, Rec. p. I-3251, point 35).

48      En l’espèce, il est constant que le plan national de gestion ne comporte pas de cartographie des sites et des installations d’élimination des déchets dangereux. Il établit cependant des critères de localisation relatifs à la disponibilité des sites en principe adéquats, tels que les champs de lignite épuisés, les gisements de minerai et les sites d’extraction de graviers épuisés, à la répartition territoriale de la production des déchets dangereux et au volume de production de ceux-ci en combinaison avec l’importance de l’installation industrielle qui les produit.

49      La Cour a eu l’occasion de préciser que ces critères devraient porter sur les conditions géologiques et hydrogéologiques, la distance de tels sites par rapport aux habitats, l’interdiction de réaliser des installations à proximité de zones sensibles ou l’existence d’infrastructures adéquates, telles que le raccordement à des réseaux de transport (arrêt Commune de Braine-le-Château e.a., précité, point 34).

50      Or, force est de constater que, en l’espèce, les critères de localisation des sites et des installations d’élimination des déchets dangereux ne portent sur aucun des aspects mentionnés par la Cour au point 34 de son arrêt Commune de Braine-le-Château e.a., précité. Partant, il y a lieu de considérer que ces critères ne sont pas suffisamment précis pour permettre à l’autorité compétente d’établir si le site ou l’installation en cause s’inscrit dans le cadre de la gestion de ceux-ci prévue par le plan national de gestion.

51      La circonstance, invoquée par la République hellénique dans son mémoire en défense, selon laquelle les autorités compétentes tiendraient compte de ces éléments dans le cadre de la procédure de délivrance des autorisations environnementales est sans incidence à cet égard. Il convient en effet de rappeler que de simples pratiques administratives, par nature modifiables au gré de l’administration et dépourvues d’une publicité adéquate, ne sauraient être considérées comme constituant une exécution valable des obligations de transposition d’une directive (voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2005, Commission/Royaume-Uni, C‑33/03, Rec. p. I‑1865, point 25, et du 12 juillet 2007, Commission/Autriche, C-507/04, Rec. p. I‑5939, point 162).

52      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de considérer le premier grief invoqué par la Commission dans son recours comme fondé.

 Sur le deuxième grief, tiré d’une violation de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 91/689, lu en combinaison avec l’article 5, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/12

 Argumentation des parties

53      La Commission soutient que l’arrêté ministériel conjoint 8668 ne remplit pas les conditions prévues à l’article 5 de la directive 2006/12 dès lors qu’il ne pose pas les bases nécessaires à la création d’un réseau de gestion adéquat et intégré des installations d’élimination.

54      La Commission considère que, dans le cadre de la mise en œuvre des obligations imposées par ledit article 5, les autorités grecques auraient dû construire des infrastructures adéquates pour le traitement des déchets dangereux sur le territoire national. En particulier, elle fait valoir que, afin de garantir une autarcie dans le domaine de la gestion des déchets dangereux et d’établir une certaine coordination au sein du système d’élimination desdits déchets, ces infrastructures auraient dû fournir une capacité suffisante de traitement par rapport à la quantité de déchets dangereux produite annuellement.

55      À cet égard, la Commission relève que le plan national de gestion ne contient pas d’évaluation du niveau de la capacité existante ni de la capacité de traitement requise par rapport aux quantités inventoriées. Elle ajoute que les insuffisances concernant la création et la localisation des espaces adéquats ne permettent pas de considérer que ledit plan prévoit un réseau intégré adéquat.

56      Dans son mémoire en défense, la République hellénique soutient que, sur la base des quantités de déchets dangereux recensées dans le cadre du plan national de gestion et compte tenu également des prévisions de production de déchets dangereux en Grèce, elle dispose de suffisamment d’éléments d’information indispensables pour appliquer les pratiques appropriées en vue d’assurer la gestion de ces déchets.

 Appréciation de la Cour

57      Conformément à l’article 5 de la directive 2006/12, les États membres sont tenus de prendre les mesures appropriées aux fins de la mise en œuvre d’un réseau intégré et adéquat d’installations d’élimination qui, ainsi qu’il ressort de cet article 5, doit être de nature à permettre à la Communauté dans son ensemble d’assurer l’élimination de ses déchets et aux États membres de tendre individuellement vers ce but (arrêt du 26 avril 2005, Commission/Irlande, C-494/01, Rec. p. I-3331, point 157).

58      Pour ce faire, les États membres doivent tenir compte, notamment, des meilleures technologies disponibles qui n’entraînent pas de coûts excessifs, ainsi que des conditions géographiques ou du besoin d’installations spécialisées pour certains types de déchets, tout en permettant l’élimination dans l’une des installations appropriées les plus proches, grâce à l’utilisation des méthodes et des technologies les plus appropriées pour garantir un niveau élevé de protection de l’environnement et de la santé publique (arrêt Commission/Irlande, précité, point 154).

59      Or, en l’espèce, force est de constater que la République hellénique, en réponse au grief de la Commission, se contente d’affirmer qu’elle dispose de suffisamment d’éléments d’information indispensables pour appliquer les pratiques appropriées en vue d’assurer la gestion des déchets, sans étayer cette allégation par une argumentation circonstanciée permettant à la Cour d’en apprécier le bien-fondé.

60      Dans ces conditions, il y a lieu de considérer le deuxième grief invoqué par la Commission dans son recours comme fondé.

 Sur le troisième grief, tiré du caractère illégal de la gestion des déchets dangereux stockés temporairement

 Argumentation des parties

61      La Commission soutient que la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent, d’une part, en vertu de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 91/689, lu en combinaison avec les articles 4 et 8 de la directive 2006/12, ainsi que, d’autre part, en vertu des articles 3, paragraphe 1, 6 à 9, 13 et 14 de la directive 1999/31.

62      Elle fait valoir que la méthode de gestion des déchets principalement utilisée est celle du stockage «temporaire», lequel, en réalité, s’avère être permanent en raison du renouvellement des autorisations de stockage.

63      La Commission soutient que, dans la mesure où les déchets se rapportent à une période antérieure à l’année 2005, les installations de stockage des déchets dangereux constituent des sites permanents de stockage au sens de l’article 2, sous g), de la directive 1999/31. Elle en déduit que ces sites de stockage «temporaire» constituent des sites de décharge au sens de cette directive, de sorte que les sites de stockage exploités avant le 16 juillet 2001 relèvent du régime prévu à l’article 14 de celle-ci, tandis que les sites de stockage dont l’exploitation est postérieure à cette date relèvent des articles 3, paragraphe 1, 6, 8, 9 et 13 de ladite directive.

64      La Commission soutient en outre que, en acceptant le stockage temporaire des déchets dangereux dans des sites aménagés à cet effet, ainsi qu’il est prévu par le plan national de gestion, ou dans des sites en principe contaminés, sur la base de la nouvelle planification de la gestion des déchets dangereux, les autorités grecques n’assurent pas l’élimination adéquate de ceux-ci. Elles se contenteraient de renouveler les autorisations de stockage «temporaire» de ces déchets dans les installations des producteurs et d’imposer des amendes le cas échéant, sans prendre d’autres mesures pour l’élimination finale et sûre des déchets dangereux. La pratique en question ne tiendrait pas compte des particularités de gestion de ces déchets ni des exigences de la directive 1999/31.

65      La Commission fait valoir également que, en l’absence d’un réseau intégré et adéquat d’installations d’élimination des déchets dangereux et en l’absence d’un plan de gestion approprié, il n’est pas possible d’assurer que les travaux d’élimination des déchets seront réalisés sans mettre en danger la santé de l’homme ou l’environnement. Elle ajoute que les autorités grecques, qui, selon elle, tolèrent l’élimination incontrôlée desdits déchets par la pratique du stockage temporaire, n’ont pas pris les mesures requises afin de s’assurer que l’élimination de ceux-ci est réalisée sans qu’il soit porté préjudice à la santé humaine et sans recourir à des procédures ou à des méthodes susceptibles de porter atteinte à l’environnement.

66      En particulier, la Commission relève que l’arrêté ministériel conjoint 13588/725 n’exige pas une décision d’approbation des conditions environnementales pour le stockage temporaire des déchets. Elle indique que, dans la majorité des cas, les installations concernées sont agréées pour le stockage temporaire des déchets dangereux avant leur envoi à l’étranger ou leur livraison à un autre opérateur. Or, dans la mesure où la capacité de desserte serait insuffisante, les déchets s’accumuleraient, polluant ainsi les sols. La Commission mentionne en outre un certain nombre d’entreprises détentrices de déchets dangereux qui ne possèdent pas d’autorisation de gestion ou possèdent une autorisation de stockage temporaire desdits déchets, et ce alors même que les autorités grecques ne connaissent ni le type, ni la quantité, non plus que le mode de gestion des déchets dangereux produits par ces entreprises.

67      La Commission en conclut que la République hellénique a outrepassé la marge d’appréciation que lui confère l’article 4 de la directive 2006/12.

68      La Commission soutient par ailleurs que les détenteurs de déchets dangereux ne les livrent pas à des entreprises privées ou publiques qui exercent des activités d’élimination, mais les éliminent eux-mêmes au moyen d’un système de stockage temporaire, au mépris des dispositions communautaires en la matière. Elle fait valoir que la mise en œuvre de l’article 8 de la directive 2006/12 suppose l’existence et l’exploitation préalables, dans l’État membre concerné, d’installations accessibles dotées d’une capacité de traitement suffisante des déchets dangereux, afin de faciliter le respect des obligations découlant de cet article 8. Or, tel ne serait pas le cas en Grèce. La Commission en déduit que ledit article 8 n’a pas non plus été respecté.

69      La République hellénique soutient que toutes les mesures appropriées en vue de la gestion des déchets stockés temporairement sont en cours d’adoption en application de la législation existante.

70      En réponse à l’argument de la Commission selon lequel l’arrêté ministériel conjoint 13588/725 ne requiert pas une décision d’approbation des conditions environnementales pour le stockage temporaire des déchets, les autorités grecques font valoir que l’article 7 de cet arrêté ministériel prévoit que, pour les travaux de stockage et de traitement ainsi que les autres travaux d’élimination des déchets dangereux, une décision d’approbation des conditions environnementales est requise en application des dispositions de la législation en vigueur. Toutefois, une telle décision d’approbation ne serait pas exigée, d’une part, pour les installations qui stockent temporairement, traitent, valorisent et/ou éliminent elles-mêmes leurs déchets sur les sites de production de ceux-ci et, d’autre part, pour les installations qui stockent sur leurs sites, de manière temporaire, et qui traitent/valorisent des déchets dangereux au cours du processus de production. Selon lesdites autorités, cette pratique s’explique par le fait que les conditions pour réaliser les travaux susmentionnés sont, dans de tels cas, incluses dans la décision d’approbation des conditions environnementales délivrée pour le fonctionnement desdites installations ou activités.

71      La République hellénique ajoute que les études relatives à l’assainissement et à la réhabilitation des sites de stockage des déchets auraient d’ores et déjà commencé à être déposées et que l’achèvement des travaux en question est prévu pour la fin de l’année 2011.

 Appréciation de la Cour

72      Il convient de rappeler que les autorités nationales compétentes sont tenues, en ce qui concerne les opérations de stockage temporaire, de veiller au respect des obligations résultant de l’article 4 de la directive 2006/12, qui prévoit, à son paragraphe 1, que les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer que les déchets seront valorisés ou éliminés sans mettre en danger la santé de l’homme et sans que soient utilisés des procédés ou des méthodes susceptibles de porter préjudice à l’environnement. Dans la mesure où les déchets, même stockés temporairement, peuvent causer des dommages importants à l’environnement, il y a lieu en effet de considérer que les dispositions de cet article 4, qui visent à mettre en œuvre le principe de précaution, sont également applicables à l’opération de stockage temporaire (voir, en ce sens, arrêts du 5 octobre 1999, Lirussi et Bizzaro, C-175/98 et C‑177/98, Rec. p. I-6881, point 53, ainsi que du 11 décembre 2008, MI.VER et Antonelli, C-387/07, non encore publié au Recueil, point 24).

73      Toutefois, l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2006/12 ne précise pas le contenu concret des mesures qui doivent être prises pour s’assurer que les déchets sont éliminés sans mettre en danger la santé de l’homme et sans porter préjudice à l’environnement, mais cette disposition lie les États membres quant aux objectifs à atteindre, tout en leur laissant une marge d’appréciation dans l’évaluation de la nécessité de telles mesures (voir, en ce sens, arrêts du 9 novembre 1999, Commission/Italie, C‑365/97, Rec. p. I‑7773, point 67; du 18 novembre 2004, Commission/Grèce, C‑420/02, Rec. p. I‑11175, point 21, et du 26 avril 2007, Commission/Italie, C-135/05, Rec. p. I‑3475, point 37).

74      En particulier, il est constant que la persistance d’une situation de fait non conforme aux objectifs fixés à l’article 4 de ladite directive, notamment lorsqu’elle entraîne une dégradation significative de l’environnement pendant une période prolongée sans intervention des autorités compétentes, peut révéler que les États membres ont outrepassé la marge d’appréciation que leur confère cette disposition (arrêt du 26 avril 2007, Commission/Italie, précité, point 37).

75      En l’espèce, la République hellénique ne conteste pas que, en raison de l’absence d’un réseau intégré et adéquat d’installations d’élimination, les déchets dangereux s’accumulent sur leurs sites de production et y sont stockés de manière prolongée. Ainsi qu’il ressort du plan national de gestion, 600 000 tonnes de déchets dangereux sont entreposées dans l’attente d’un traitement sur des sites qui peuvent être considérés, en principe, comme contaminés.

76      L’existence d’une telle situation pendant une longue période a nécessairement pour conséquence une dégradation significative de l’environnement, en violation des dispositions de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/12.

77      Dans ces conditions, il y a lieu de constater que, en se contentant de renouveler les autorisations de stockage temporaire des déchets dangereux sur leur site de production et, le cas échéant, d’imposer des amendes, la République hellénique n’a pas pris les mesures nécessaires afin de s’assurer que l’élimination des déchets dangereux est réalisée sans porter préjudice à la santé humaine et sans recourir à des procédures ou à des méthodes susceptibles de porter atteinte à l’environnement.

78      Partant, il y a lieu de conclure que le troisième grief de la Commission, en tant qu’il est tiré d’une violation de l’article 4 de la directive 2006/12, doit être considéré comme fondé.

79      Quant à la violation de l’article 8 de la directive 2006/12, également invoquée par la Commission dans le cadre de son troisième grief, il suffit de relever que la République hellénique n’a fourni aucun élément de nature à infirmer les allégations de la Commission concernant les déchets stockés de manière «temporaire». En particulier, il est constant que les autorités grecques n’ont pas assuré que les détenteurs de déchets les remettent à un ramasseur privé ou public ou à une entreprise qui effectue les opérations d’élimination et de valorisation de déchets ou que ce détenteur en assure lui-même la valorisation ou l’élimination en se conformant aux dispositions de ladite directive (voir, par analogie, arrêt Commission/Irlande, précité, point 179).

80      Le troisième grief de la Commission, en tant qu’il est tiré de la violation de l’article 8 de la directive 2006/12, doit dès lors être accueilli.

81      S’agissant de la violation des dispositions de la directive 1999/31, alléguée par la Commission à l’appui de son troisième grief, force est de constater que, conformément à l’article 2, sous g), de cette directive, les sites utilisés pour stocker temporairement des déchets dont la durée de stockage est supérieure à un an doivent être considérés comme des décharges au sens de cette même directive et sont, en conséquence, soumis aux dispositions de celle-ci.

82      La directive 1999/31 définit les critères et les conditions de l’obligation de mise en décharge des déchets et impose notamment aux États membres d’exiger l’obtention d’une autorisation pour l’exploitation d’une décharge.

83      En l’espèce, la République hellénique n’a présenté aucun élément ni aucune preuve de nature à réfuter les allégations de la Commission à cet égard.

84      Dès lors, le troisième grief de la Commission doit être considéré comme fondé.

85      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater que la République hellénique,

–        en n’ayant pas élaboré ni adopté, dans un délai raisonnable, un plan pour la gestion des déchets dangereux conforme aux exigences de la législation communautaire applicable et en n’ayant pas établi un réseau intégré et adéquat d’installations d’élimination des déchets dangereux, caractérisé par l’utilisation des méthodes les plus appropriées pour garantir un niveau élevé de protection de l’environnement et de la santé publique,

–        en n’ayant pas pris toutes les mesures nécessaires pour assurer, en ce qui concerne la gestion des déchets dangereux, le respect des articles 4 et 8 de la directive 2006/12, ainsi que des articles 3, paragraphe 1, 6 à 9, 13 et 14 de la directive 1999/31,

a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu, en premier lieu, des articles 1er, paragraphe 2, et 6 de la directive 91/689, lus en combinaison avec les articles 5, paragraphes 1 et 2, ainsi que 7, paragraphe 1, de la directive 2006/12, en deuxième lieu, de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 91/689, lu en combinaison avec les dispositions des articles 4 et 8 de la directive 2006/12, ainsi que, en troisième lieu, des articles 3, paragraphe 1, 6 à 9, 13 et 14 de la directive 1999/31.

 Sur les dépens

86      Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République hellénique et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) déclare et arrête:

1)      La République hellénique,

–        en n’ayant pas élaboré ni adopté, dans un délai raisonnable, un plan pour la gestion des déchets dangereux conforme aux exigences de la législation communautaire applicable et en n’ayant pas établi un réseau intégré et adéquat d’installations d’élimination des déchets dangereux, caractérisé par l’utilisation des méthodes les plus appropriées pour garantir un niveau élevé de protection de l’environnement et de la santé publique,

–        en n’ayant pas pris toutes les mesures nécessaires pour assurer, en ce qui concerne la gestion des déchets dangereux, le respect des articles 4 et 8 de la directive 2006/12/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2006, relative aux déchets, ainsi que des articles 3, paragraphe 1, 6 à 9, 13 et 14 de la directive 1999/31/CE du Conseil, du 26 avril 1999, concernant la mise en décharge des déchets,

a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu, en premier lieu, des articles 1er, paragraphe 2, et 6 de la directive 91/689/CEE du Conseil, du 12 décembre 1991, relative aux déchets dangereux, lus en combinaison avec les articles 5, paragraphes 1 et 2, ainsi que 7, paragraphe 1, de la directive 2006/12, en deuxième lieu, de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 91/689, lu en combinaison avec les dispositions des articles 4 et 8 de la directive 2006/12, ainsi que, en troisième lieu, des articles 3, paragraphe 1, 6 à 9, 13 et 14 de la directive 1999/31.

2)      La République hellénique est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: le grec.