Language of document : ECLI:EU:C:2020:301

ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

23 avril 2020 (*)

« Renvoi préjudiciel – Transports – Services aériens – Règlement (CE) no 1008/2008 – Article 23, paragraphe 1 – Indication du prix définitif à payer – Frais d’enregistrement en ligne des passagers – TVA – Frais administratifs pour les achats effectués au moyen d’une carte de crédit autre que celle agréée par le transporteur aérien – Éléments inévitables et prévisibles du prix définitif à payer – Suppléments de prix optionnels – Notion »

Dans l’affaire C‑28/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie), par décision du 18 décembre 2018, parvenue à la Cour le 16 janvier 2019, dans la procédure

Ryanair Ltd,

Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato – Antitrust

contre

Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato – Antitrust,

Ryanair Ltd,

Ryanair DAC,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. P. G. Xuereb (rapporteur), président de chambre, MM. T. von Danwitz et A. Kumin, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour Ryanair DAC, par Mes M. Castioni, G. Mazzei et A. Pecchia, avvocati, ainsi que par M. B. Kennelly, QC,

–        pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mme A. Collabolletta, avvocato dello Stato,

–        pour le gouvernement français, par M. D. Colas ainsi que par Mmes A.-L. Desjonquères et I. Cohen, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement autrichien, par Mme J. Schmoll et M. G. Hesse, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par M. L. Malferrari et Mme B. Sasinowska, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 23, paragraphe 1, du règlement (CE) no 1008/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 24 septembre 2008, établissant des règles communes pour l’exploitation de services aériens dans la Communauté (JO 2008, L 293, p. 3).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant, d’une part, Ryanair Ltd à  l’Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato – Antitrust (Autorité garante de la concurrence et du marché – Antitrust, Italie) (ci-après l’« AGCM ») et, d’autre part, cette dernière à Ryanair Ltd et à Ryanair DAC, au sujet de pratiques commerciales déloyales reprochées à la compagnie aérienne Ryanair (ci-après « Ryanair »).

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        Le considérant 16 du règlement no 1008/2008 énonce :

« Les clients devraient pouvoir comparer effectivement le prix des services aériens pratiqués par différentes compagnies aériennes. Par conséquent, le prix définitif à payer par le client pour des services aériens au départ de la Communauté devrait toujours être indiqué toutes taxes, redevances et charges comprises. Les transporteurs aériens communautaires sont également encouragés à indiquer le prix définitif de leurs services aériens au départ de pays tiers et à destination de la Communauté. »

4        L’article 2, point 18, de ce règlement dispose :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

[...]

18)      “tarifs des passagers” : les prix exprimés en euro ou en monnaie nationale à payer aux transporteurs aériens, à leurs agents ou à d’autres vendeurs de billets pour le transport des passagers sur des services aériens, ainsi que les conditions d’application de ces prix, y compris la rémunération et les conditions offertes à l’agence et autres services auxiliaires ».

5        L’article 23, paragraphe 1, dudit règlement est libellé comme suit :

« Les tarifs des passagers et les tarifs de fret offerts au public mentionnent les conditions applicables lorsqu’ils sont proposés ou publiés sous quelque forme que ce soit, y compris sur internet, pour les services aériens au départ d’un aéroport situé sur le territoire d’un État membre auquel le traité s’applique. Le prix définitif à payer est précisé à tout moment et inclut le tarif des passagers ou le tarif de fret applicable ainsi que l’ensemble des taxes, des redevances, des suppléments et des droits applicables inévitables et prévisibles à la date de publication. Outre l’indication du prix définitif, les éléments suivants au moins sont précisés :

a)      tarif des passagers ou tarif de fret ;

b)      taxes ;

c)      redevances aéroportuaires ; et

d)      autres redevances, suppléments ou droits, tels que ceux liés à la sûreté ou au carburant ;

lorsque les éléments énumérés aux points b), c) et d) ont été ajoutés au tarif des passagers ou au tarif de fret. Les suppléments de prix optionnels sont communiqués de façon claire, transparente et non équivoque au début de toute procédure de réservation et leur acceptation par le client résulte d’une démarche explicite. »

 Le droit italien

6        L’article 20 du decreto legislativo n. 206 – Codice del consumo (décret législatif no 206, portant code de la consommation), du 6 septembre 2005 (supplément ordinaire à la GURI no 235, du 8 octobre 2005), dans sa version applicable aux faits en cause au principal (ci-après le « code de la consommation »), interdit les pratiques commerciales déloyales telles que, notamment, les pratiques commerciales trompeuses, au sens des articles 21 à 23 de ce code. En particulier, l’article 20, paragraphe 2, dudit code précise qu’une pratique commerciale est considérée comme déloyale si elle est contraire à la diligence professionnelle et si elle est fausse ou susceptible de fausser dans une mesure appréciable le comportement économique, par rapport au produit, du consommateur moyen qu’elle touche ou auquel elle s’adresse ou bien du membre moyen du groupe particulier de consommateurs ciblé par cette pratique.

7        En vertu de l’article 21, paragraphe 1, sous d), du même code, les pratiques commerciales trompeuses peuvent concerner, entre autres, le prix ou le mode de calcul du prix ou l’existence d’un avantage spécifique quant au prix.

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

8        Par une décision du 15 juin 2011, l’AGCM a reconnu Ryanair coupable de différentes pratiques commerciales déloyales au regard du code de la consommation et lui a infligé plusieurs amendes. En particulier, l’AGCM a qualifié de pratique déloyale, au sens de l’article 20, paragraphe 2, et de l’article 21, paragraphe 1, sous d), du code de la consommation, la présentation des prix appliqués, à l’époque des faits en cause au principal, dans le système de réservation en ligne de Ryanair (http://ryanair.com/it).

9        Selon l’AGCM, les prix publiés sur ce site Internet ne comprenaient pas certains éléments qualifiés par Ryanair de frais facultatifs, à savoir les frais d’enregistrement en ligne des passagers, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) appliquée aux tarifs et aux suppléments facultatifs relatifs aux vols nationaux ainsi que les frais administratifs pour les achats effectués au moyen d’une carte de crédit autre que celle agréée par Ryanair (Mastercard prépayée), alors que, toujours selon l’AGCM, ces éléments, en réalité obligatoires, étaient mis à la charge des consommateurs au cours de la procédure de réservation en ligne et contribuaient ainsi à augmenter le tarif présenté initialement.

10      Ryanair a introduit un recours tendant à l’annulation de cette décision devant le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional du Latium, Italie).

11      S’agissant de la pratique commerciale relative à la présentation des prix, cette juridiction a, par un jugement du 12 avril 2012, confirmé la décision de l’AGCM du 15 juin 2011, en jugeant que les frais d’enregistrement en ligne des passagers ainsi que la TVA appliquée aux tarifs et aux suppléments facultatifs relatifs aux vols nationaux ne constituaient pas des frais facultatifs, mais devaient être considérés, tout comme les frais administratifs pour les achats effectués au moyen d’une carte de crédit autre que celle agréée par Ryanair, comme des frais « inévitables », au sens de l’article 23, paragraphe 1, du règlement no 1008/2008, frais dont l’absence d’affichage au début de la procédure de réservation ne permettait pas d’informer correctement le consommateur du prix effectif du service offert par Ryanair.

12      En ce qui concerne, en particulier, les frais administratifs pour les achats effectués au moyen d’une carte de crédit autre que celle agréée par Ryanair, le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional du Latium) a jugé que le caractère inévitable de ces frais se justifiait par le fait qu’un acheteur normal qui souhaite procéder à une réservation en ligne sur le site de Ryanair n’a concrètement aucune possibilité raisonnable d’éviter la majoration de prix induite par lesdits frais, dès lors qu’il ne dispose pas de la carte de crédit agréée par Ryanair. À cet égard, cette juridiction a considéré que la finalité de l’article 23, paragraphe 1, du règlement no 1008/2008 est d’assurer la transparence absolue du prix des billets d’avion dès le moment où l’intéressé a décidé de commencer la procédure de réservation et non d’inciter le public à se munir, au préalable, du moyen de paiement le plus avantageux.

13      Ryanair a formé appel, devant le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie), contre les parties du jugement par lesquelles le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional du Latium) avait rejeté son recours et confirmé la décision de l’AGCM.

14      Tout en relevant que, dans sa jurisprudence, la Cour ne s’est pas prononcée spécifiquement sur les éléments de prix litigieux, la juridiction de renvoi relève qu’il convient de déterminer, aux fins de la résolution du litige, si ces éléments peuvent être considérés comme relevant de la catégorie des suppléments de prix inévitables et prévisibles, au sens de la deuxième phrase de l’article 23, paragraphe 1, du règlement no 1008/2008, ou de celle des suppléments de prix optionnels, au sens de la quatrième phrase de cette disposition. Dans ce dernier cas, la juridiction de renvoi se demande si le caractère optionnel du supplément peut désigner des frais évitables par la majeure partie des consommateurs.

15      Dans ces conditions, le Consiglio di Stato (Conseil d’État) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      L’article 23, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement [no 1008/2008] doit-il être interprété en ce sens que les éléments de prix litigieux que sont les frais d’enregistrement en ligne et les “frais administratifs” pour l’achat effectué avec une carte de crédit, qui s’ajoutent au prix du billet proprement dit, ainsi que les frais résultant de l’application de la TVA aux tarifs et aux suppléments facultatifs pour les vols nationaux relèvent de la catégorie des suppléments de prix inévitables et prévisibles ou de celle des suppléments optionnels ?

2)      L’article 23, paragraphe 1, quatrième phrase, du règlement no 1008/2008 doit-il être interprété en ce sens que le terme “optionnels” désigne des frais que la majeure partie des consommateurs peuvent éviter ? »

 Sur les questions préjudicielles

16      Par ses deux questions auxquelles il convient de répondre conjointement, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 23, paragraphe 1, du règlement no 1008/2008 doit être interprété en ce sens que les frais d’enregistrement en ligne des passagers, la TVA appliquée sur les tarifs et sur les suppléments facultatifs relatifs aux vols nationaux ainsi que les frais administratifs pour les achats effectués au moyen d’une carte de crédit autre que celle agréée par le transporteur aérien relèvent de la catégorie des suppléments de prix inévitables et prévisibles, au sens de la deuxième phrase de cette disposition, ou de celle des suppléments de prix optionnels, au sens de la quatrième phrase de ladite disposition.

17      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 23, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement no 1008/2008, le prix définitif à payer pour le transport aérien d’un passager doit être précisé à tout moment et inclure notamment le tarif des passagers, tel que défini à l’article 2, point 18, de ce règlement, ainsi que les taxes, redevances, suppléments et droits inévitables et prévisibles applicables à la date de publication de l’offre. L’article 23, paragraphe 1, troisième phrase, dudit règlement précise que l’offre doit afficher au moins les redevances aéroportuaires ainsi que les redevances, suppléments et droits liés à la sûreté ou au carburant, lorsque ces éléments sont ajoutés au tarif des passagers.

18      La Cour a précisé à ce sujet que les taxes, redevances, suppléments et droits visés à l’article 23, paragraphe 1, deuxième et troisième phrases, du règlement no 1008/2008 ne peuvent être inclus dans le tarif des passagers, mais doivent être affichés de manière séparée (arrêt du 6 juillet 2017, Air Berlin, C‑290/16, EU:C:2017:523, point 36). Il ressort également du point 35 de l’arrêt du 15 janvier 2015, Air Berlin (C‑573/13, EU:C:2015:11), que les différents éléments composant le prix définitif à payer, au sens de l’article 23, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement no 1008/2008, doivent être précisés dès la première indication du prix des services aériens.

19      Par ailleurs, l’article 23, paragraphe 1, quatrième phrase, du règlement no 1008/2008 dispose que les suppléments de prix optionnels doivent être communiqués de façon claire, transparente et non équivoque au début de toute procédure de réservation et que leur acceptation par le client doit résulter d’une démarche explicite.

20      À cet égard, il ressort du point 14 de l’arrêt du 19 juillet 2012, ebookers.com Deutschland (C‑112/11, EU:C:2012:487), que la notion de « suppléments de prix optionnels » recouvre des suppléments de prix qui ne sont pas inévitables, contrairement aux éléments du prix définitif à payer visés à l’article 23, paragraphe 1, deuxième et troisième phrases, du règlement no 1008/2008, et qui sont, ainsi, afférents à des services qui, venant compléter le service aérien lui-même, ne sont ni obligatoires ni indispensables pour le transport des passagers, si bien que le client choisit de les accepter ou de les refuser. La Cour a eu l’occasion de juger que les suppléments de prix au titre de l’assurance annulation de vol ou du transport des bagages enregistrés doivent être considérés comme optionnels, au sens de l’article 23, paragraphe 1, quatrième phrase, du règlement no 1008/2008 (arrêts du 19 juillet 2012, ebookers.com Deutschland, C‑112/11, EU:C:2012:487, point 20, et du 18 septembre 2014, Vueling Airlines, C‑487/12, EU:C:2014:2232, point 39).

21      Il résulte, ainsi, de l’article 23, paragraphe 1, du règlement no 1008/2008 et de la jurisprudence précitée que, dans ses offres en ligne destinées au transport de passagers, un transporteur aérien tel que Ryanair a l’obligation de faire figurer, dès la première indication du prix, le tarif des passagers ainsi que, de manière séparée, les taxes, redevances, suppléments et droits inévitables et prévisibles, tandis qu’il doit communiquer les suppléments de prix optionnels de manière claire, transparente et non équivoque au début de la procédure de réservation.

22      C’est sur la base de ces éléments qu’il convient d’examiner la qualification, au regard de l’article 23, paragraphe 1, du règlement no 1008/2008, des différents éléments de prix en cause dans l’affaire au principal.

23      S’agissant, en premier lieu, des frais d’enregistrement en ligne des passagers, il convient de considérer que, contrairement à ce qu’affirment le gouvernement autrichien et la Commission européenne dans leurs observations écrites, il ne saurait être automatiquement déduit du caractère indispensable et obligatoire de l’enregistrement que ces frais sont inévitables, au sens de l’article 23, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement no 1008/2008. En effet, les transporteurs aériens doivent se voir reconnaître la possibilité de proposer aux passagers différents modes d’enregistrement à titre payant ou gratuit, tels qu’un enregistrement en ligne ou un enregistrement physique à l’aéroport.

24      Dans ces conditions, lorsque le consommateur est appelé à choisir entre, au moins, deux modes d’enregistrement, il convient de constater, ainsi que le gouvernement français l’indique dans ses observations écrites, que le mode d’enregistrement qui lui est proposé lors de la procédure de réservation n’est pas nécessairement un service obligatoire ni indispensable pour son transport. En effet, lorsque le transporteur aérien propose un service payant d’enregistrement en ligne tout en offrant des solutions alternatives permettant aux passagers de s’enregistrer gratuitement, les frais d’enregistrement en ligne des passagers ne peuvent être considérés comme un élément inévitable du prix définitif à payer, au sens de la deuxième phrase de l’article 23, paragraphe 1, du règlement no 1008/2008, mais doivent être qualifiés de supplément de prix optionnel, au sens de la quatrième phrase de cette disposition, que le consommateur peut choisir d’accepter ou de refuser.

25      De tels frais ne peuvent être considérés comme inévitables que dans l’hypothèse où tous les modes d’enregistrement proposés par le transporteur aérien sont payants ou bien lorsque, ainsi que le gouvernement italien l’indique dans ses observations écrites, aucune option entre plusieurs modes d’enregistrement n’est proposée au consommateur. En effet, dans le premier cas, le consommateur devra, d’une manière ou d’une autre, s’acquitter de frais d’enregistrement, la liberté de choix apparente qui lui est laissée n’étant qu’illusoire, tandis que, dans le second cas, le consommateur n’a, en réalité, aucun autre choix que de s’enregistrer en ligne.

26      Il incombera donc à la juridiction de renvoi de vérifier si Ryanair proposait aux passagers une possibilité d’enregistrement gratuite. Si cette dernière ne proposait que la possibilité payante de s’enregistrer en ligne, ainsi que le gouvernement italien le mentionne dans ses observations écrites, ou bien si elle ne proposait, en tant qu’alternative au service d’enregistrement payant en ligne, que des modes d’enregistrement payants, ainsi que la Commission l’affirme dans ses observations écrites, il conviendra de conclure que le client ne pouvait éviter de payer les frais d’enregistrement et que ceux-ci, dont la prévisibilité résulte de la politique tarifaire du transporteur aérien, relèvent des éléments de prix inévitables et prévisibles, au sens de l’article 23, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement no 1008/2008.

27      En revanche, si Ryanair proposait, à titre alternatif, une ou plusieurs possibilités d’enregistrement gratuit, les frais payants d’enregistrement en ligne devraient être considérés comme des suppléments de prix optionnels, au sens de l’article 23, paragraphe 1, quatrième phrase, du règlement no 1008/2008.

28      S’agissant, en deuxième lieu, de la TVA appliquée aux tarifs des vols nationaux, il y a lieu de constater qu’il s’agit d’une taxe, au sens des deuxième et troisième phrases de l’article 23, paragraphe 1, du règlement no 1008/2008, et que cette taxe, afférente au tarif des passagers, est inévitable et prévisible, au sens de la troisième phrase de cette disposition, dans la mesure où elle est prévue par la réglementation nationale et s’applique automatiquement lors de toute réservation d’un vol national.

29      S’agissant, en troisième lieu, de la TVA appliquée aux suppléments facultatifs relatifs aux vols nationaux, il convient de considérer, ainsi que la Commission le relève dans ses observations écrites, qu’il s’agit d’un supplément de prix optionnel, au sens de l’article 23, paragraphe 1, quatrième phrase, du règlement n° 1008/2008. En effet, bien qu’elle puisse être qualifiée d’inévitable en raison de son caractère obligatoire, la TVA appliquée aux suppléments facultatifs relatifs aux vols nationaux ne peut pas être considérée comme prévisible, puisqu’elle est intrinsèquement liée aux suppléments facultatifs dont le choix appartient exclusivement au passager. Or, le transporteur aérien ne peut avoir connaissance, dès le départ, des suppléments optionnels que le client choisira, si bien que le montant de la TVA afférent à ces suppléments ne peut pas être inclus dans le prix définitif prévisible devant être indiqué lors de la publication de l’offre.

30      Dans ces conditions, il y a lieu de faire observer que l’indication d’une taxe déterminée doit toujours suivre l’élément de prix auquel cette taxe se rattache, ainsi qu’il ressort d’ailleurs du dernier membre de la troisième phrase de l’article 23, paragraphe 1, du règlement n° 1008/2008, en vertu duquel les taxes « ajouté[e]s au tarif des passagers » doivent être indiquées dans le prix définitif à payer. Ainsi, si une taxe est afférente au tarif des passagers, elle doit être affichée de manière séparée avec ce tarif dès la première indication du prix définitif à payer, tandis que, si elle est afférente à un supplément de prix optionnel, elle ne devra et ne pourra être indiquée dans le prix définitif à payer, qu’au moment de l’indication du supplément.

31      Dans ce dernier cas, il convient de préciser que, ainsi que le relève la Commission dans ses observations écrites, le montant de la taxe doit apparaître clairement dans le prix des services optionnels dès l’affichage de ces derniers. En effet, l’exigence de clarté et de transparence que le transporteur aérien doit respecter lors de la communication des suppléments de prix optionnels, en vertu de l’article 23, paragraphe 1, quatrième phrase, du règlement no 1008/2008, implique que la part représentée par la TVA dans le montant du supplément soit communiquée au passager dès que celui-ci a opté pour un service optionnel. La communication de cette part répond également à l’objectif de comparabilité effective du prix des services aériens poursuivi par le règlement no 1008/2008 en vertu de son considérant 16, le consommateur devant être en mesure de comparer les suppléments de prix hors TVA proposés par les transporteurs aériens sur la liaison nationale concernée.

32      S’agissant, en quatrième et dernier lieu, des frais administratifs pour les achats effectués au moyen d’une carte de crédit autre que celle agréée par le transporteur aérien, il convient de constater que le caractère prévisible de ces frais ne fait pas de doute, dans la mesure où leur application résulte de la politique même du transporteur aérien en matière de mode de paiement.

33      Quant à leur caractère inévitable au sens de l’article 23, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement no 1008/2008, il y a lieu de relever que, de prime abord, le client peut en éviter le paiement en réglant le prix définitif à payer au moyen de la carte de crédit agréée par le transporteur aérien. Toutefois, un supplément de prix ne saurait être reconnu comme étant évitable et comme revêtant, par conséquent, un caractère optionnel lorsque l’option offerte au consommateur est soumise à une condition imposée par le transporteur aérien, en réservant la gratuité du service concerné au bénéfice d’un cercle restreint de consommateurs privilégiés et en obligeant, de facto, les consommateurs qui ne font pas partie de ce cercle soit à renoncer à la gratuité de ce service soit à renoncer à une finalisation de leur achat dans l’immédiat et à effectuer des démarches potentiellement coûteuses pour remplir la condition exigée, au risque, une fois ces démarches effectuées, de ne plus pouvoir bénéficier de l’offre ou de ne plus pouvoir en bénéficier au prix initialement indiqué.

34      Il s’ensuit que de tels frais doivent être qualifiés non seulement de prévisibles, mais également d’inévitables et qu’ils ne sauraient, par conséquent, relever de la notion de supplément de prix optionnel, au sens de l’article 23, paragraphe 1, quatrième phrase, du règlement no 1008/2008.

35      Il convient, par ailleurs, de préciser qu’il importe peu de déterminer, aux fins de la qualification de tels frais, si la majeure partie des consommateurs dispose de la carte agréée par le transporteur aérien et est ainsi en mesure d’éviter le paiement des frais concernés. En effet, le règlement no 1008/2008 visant une protection individuelle des consommateurs (voir, en ce sens, arrêt du 15 janvier 2015, Air Berlin, C‑573/13, EU:C:2015:11, point 33), le caractère évitable d’un supplément de prix ne saurait être déterminé en fonction d’un critère que remplirait uniquement la majorité des consommateurs.

36      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées que l’article 23, paragraphe 1, du règlement no 1008/2008 doit être interprété en ce sens que les frais d’enregistrement des passagers dont le paiement ne peut être évité faute d’un mode d’enregistrement gratuit alternatif, la TVA appliquée aux tarifs des vols nationaux ainsi que les frais administratifs pour les achats effectués au moyen d’une carte de crédit autre que celle agréée par le transporteur aérien constituent des éléments de prix inévitables et prévisibles, au sens de la deuxième phrase de cette disposition. En revanche, ladite disposition doit être interprétée en ce sens que les frais d’enregistrement des passagers dont le paiement peut être évité par le recours à une option d’enregistrement gratuit ainsi que la TVA appliquée aux suppléments facultatifs relatifs aux vols nationaux constituent un supplément de prix optionnel, au sens de la quatrième phrase de la même disposition.

 Sur les dépens

37      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) dit pour droit :

L’article 23, paragraphe 1, du règlement (CE) no 1008/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 24 septembre 2008, établissant des règles communes pour l’exploitation de services aériens dans la Communauté, doit être interprété en ce sens que les frais d’enregistrement des passagers dont le paiement ne peut être évité faute d’un mode d’enregistrement gratuit alternatif, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) appliquée aux tarifs des vols nationaux ainsi que les frais administratifs pour les achats effectués au moyen d’une carte de crédit autre que celle agréée par le transporteur aérien constituent des éléments de prix inévitables et prévisibles, au sens de la deuxième phrase de cette disposition. En revanche, ladite disposition doit être interprétée en ce sens que les frais d’enregistrement des passagers dont le paiement peut être évité par le recours à une option d’enregistrement gratuit ainsi que la TVA appliquée aux suppléments facultatifs relatifs aux vols nationaux constituent un supplément de prix optionnel, au sens de la quatrième phrase de la même disposition.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.