Language of document : ECLI:EU:T:2013:452

DOCUMENT DE TRAVAIL





ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

16 septembre 2013 (*)

« Concurrence – Ententes – Marché espagnol du bitume de pénétration – Décision constatant une infraction à l’article 81 CE – Accords annuels de répartition du marché et de coordination des prix – Traduction de la communication des griefs – Calcul du montant de l’amende – Délai raisonnable – Autorité de la chose jugée »

Dans l’affaire T‑495/07,

Productos Asfálticos (PROAS), SA, établie à Madrid (Espagne), représentée initialement par Mes C. Fernández Vicién, A. Pereda Miquel et P. Carmona Botana, puis par Mes Fernández Vicién et Pereda Miquel et enfin par MFernández Vicién, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. F. Castillo de la Torre, en qualité d’agent, assisté initialement de Me J. Rivas Andrés, avocat, et de Mme M. Heenan Bróna, solicitor, puis de Mes Rivas Andrés et J. Gutiérrez Gisbert, avocats, et enfin de Me Rivas Andrés,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2007) 4441 final de la Commission, du 3 octobre 2007, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] [affaire COMP/38.710 – Bitume (Espagne)], ainsi qu’une demande de réduction du montant de l’amende infligée à la requérante par cette décision,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot (rapporteur), président, Mme M. E. Martins Ribeiro et M. A. Popescu, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 16 janvier 2013,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par la décision C (2007) 4441 final, du 3 octobre 2007, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] [affaire COMP/38.710 – Bitume (Espagne)], dont un résumé est publié au Journal officiel de l’Union européenne du 29 décembre 2009 (JO C 321, p. 15; ci-après la « décision attaquée »), la Commission des Communautés européennes a, d’une part, constaté la participation des treize sociétés destinataires de cette décision à un ensemble d’accords de répartition du marché et de coordination des prix du bitume de pénétration routier en Espagne (à l’exception des îles Canaries) et, d’autre part, infligé à dix de ces sociétés des amendes comprises entre 6 435 000 et 83 850 000 euros.

2        Ces dix sociétés ont introduit un recours contre cette décision, par requêtes déposées au greffe du Tribunal entre le 18 et le 20 décembre 2007 :

–        Repsol Lubricantes y Especialidades, SA, anciennement Repsol Lubricantes YPF y Especialidades, SA, Repsol Petróleo, SA et Repsol, SA, anciennement Repsol YPF, SA (ci-après, prises ensemble, « Repsol »), dans l’affaire T‑496/07 ;

–        Productos Asfálticos (PROAS), SA (ci-après « PROAS » ou la « requérante »), dans l’affaire T‑495/07 ;

–        Compañía Española de Petróleos (CEPSA), SA, dans l’affaire T‑497/07 ;

–        Nynäs Petroleum AB et Nynas Petróleo, SA (ci-après, prises ensemble, « Nynäs »), dans l’affaire T‑482/07 ;

–        Galp Energía España, SA, Petróleos de Portugal (Petrogal), SA et Galp Energia, SGPS, SA (ci-après, prises ensemble, « Petrogal » ou « Galp »), dans l’affaire T‑462/07.

A –  Marché en cause

3        Le produit concerné par l’infraction est le bitume de pénétration utilisé pour le revêtement des routes. Le bitume est un résidu de la distillation de types spécifiques de bruts lourds. Environ 85 % du bitume produit dans l’Union européenne sont utilisés pour la construction et l’entretien de routes, sous la forme d’un adhésif servant à lier le granulat de l’asphalte. Les 15 % restants sont utilisés dans d’autres domaines de la construction, notamment les revêtements de pistes d’aéroport et de parkings, et dans des applications industrielles, telles que les couvertures de toit et les enrobages de tuyau.

4        Environ 80 % du bitume utilisé pour la construction et l’entretien des routes ne font pas l’objet d’une transformation supplémentaire : il s’agit du bitume de pénétration. Les 20 % résiduels du bitume utilisé pour la construction et l’entretien des routes sont soumis à une transformation supplémentaire, par exemple, en émulsions bitumineuses, produites par mélange du bitume de pénétration avec de l’eau au moyen d’un émulsifiant (utilisé davantage dans l’entretien que dans la construction de routes), et en bitumes modifiés, obtenus en mélangeant le bitume de pénétration avec un produit chimique, usuellement constitué de polymères, afin de les rendre plus performants (bitumes modifiés par des polymères ou BMP) (considérants 4, 9 et suivants de la décision attaquée).

5        Le considérant 15 de la décision attaquée définit le marché pertinent comme étant celui du bitume de pénétration qui n’a pas subi de transformation supplémentaire et qui est utilisé dans la construction et l’entretien des routes (ci-après le « bitume de pénétration » ou le « bitume »).

6        Cette définition du marché pertinent est confirmée en ces termes par le considérant 513 de la décision attaquée :

« [… L]a présente affaire concerne une entente entre des vendeurs du même produit dans la même zone commerciale, à savoir, le bitume de pénétration en Espagne […] »

7        La valeur du marché du bitume de pénétration espagnol est estimée à 286 400 000 euros pour l’année 2001, dernière année complète de l’infraction (considérant 67 de la décision attaquée).

B –  Entreprises en cause

8        L’Espagne compte, d’une part, trois producteurs de bitume, Repsol, CEPSA‑PROAS et le groupe BP, dont BP plc est le holding et dont BP España, SA et BP Oil España, SA sont des filiales exerçant leur activité en Espagne (ci-après, prises ensemble, « BP »), et, d’autre part, des importateurs, au nombre desquels figurent Nynäs et Petrogal (considérants 63 et 64 de la décision attaquée).

1.     Groupe Repsol

9        Repsol Productos Asfálticos, SA (RPA) est devenue Repsol Lubricantes YPF y Especialidades (ci-après « RPA/Rylesa ») le 12 décembre 2001. RPA/Rylesa a été détenue de 1991 à 2002 à raison de 99,99 % par Repsol Petróleo, elle-même filiale à 99,97 % de Repsol YPF, société faîtière du groupe Repsol. Ce groupe international de compagnies pétrolières est présent principalement en Espagne et en Amérique latine.

10      RPA/Rylesa produit et commercialise des produits de bitume. Une des activités de Repsol Petróleo est la production de bitume de pénétration et sa vente à RPA/Rylesa en vue de sa commercialisation.

11      Deux autres sociétés du groupe Repsol, Petróleos del Norte, SA (ci-après « Petronor ») et Asfalnor, SA, exercent en Espagne une activité liée au bitume de pénétration.

12      En 1991, Petronor était détenue à 56,19 % par Repsol YPF et cette participation a été portée à 85,98 % le 31 décembre 1992. Asfalnor était détenue à 60 % par Petronor en 1991 et, en avril 1992, les sociétés du groupe Repsol en détenaient 80 %, à raison de 60 % pour Petronor et de 20 % pour Repsol YPF (considérant 395 de la décision attaquée).

13      Petronor produit du bitume, qu’elle a vendu de 1990 à 1998 à Asfalnor et occasionnellement à RPA/Rylesa, en vue de sa commercialisation. Depuis 1999, Petronor vend du bitume directement à des tiers.

14      Asfalnor a commercialisé du bitume entre 1990 et 1998. Cette société a acheté du bitume à Petronor et occasionnellement à RPA/Rylesa. Depuis 1999, Asfalnor agit comme agent pour le compte de Petronor.

15      RPA/Rylesa et Petronor ont réalisé en Espagne, au titre de leurs ventes de bitume de pénétration à des tiers, un chiffre d’affaires de 97 500 000 euros au cours de l’exercice 2001, soit 34,04 % du marché en cause. Le chiffre d’affaires total consolidé du groupe Repsol a été de 51 355 000 000 euros en 2006, l’exercice précédant l’adoption de la décision attaquée (considérants 16 à 26 et 67).

2.     CEPSA-PROAS

16      CEPSA est un groupe international de sociétés du secteur de l’énergie coté en Bourse et présent dans plusieurs pays. PROAS, filiale à 100 % de CEPSA depuis le 1er mars 1991, commercialise du bitume produit par CEPSA et produit et commercialise d’autres produits bitumeux (considérant 31 de la décision attaquée).

17      PROAS a réalisé en Espagne, au titre de ses ventes de bitume de pénétration à des tiers, un chiffre d’affaires de 90 700 000 euros au cours de l’exercice commercial 2001, soit 31,67 % du marché en cause. Le chiffre d’affaires total consolidé de CEPSA s’est élevé à 18 474 000 000 euros en 2006 (considérants 44 et 67 de la décision attaquée).

3.     BP

18      BP Oil España a réalisé en Espagne, au titre de ses ventes de bitume de pénétration à des tiers, un chiffre d’affaires de 43 500 000 euros au cours de l’exercice commercial 2001, soit 15,19 % du marché en cause. Le chiffre d’affaires total consolidé de BP a été de 211 776 000 000 euros en 2006 (considérants 35, 42 et 43 de la décision attaquée).

4.     Groupe Nynäs

19      Le groupe Nynäs, dont Nynäs Petroleum AB (ci-après « Nynäs Petroleum »), société suédoise, est le holding faîtier, produit et vend du bitume au niveau international. Nynas Petróleo commercialise du bitume en Espagne (considérants 46 et 53 de la décision attaquée).

20      Du 22 mai 1991 jusqu’en 1999, Nynas Petróleo était détenue à 100 % par la société holding Nynäs International BV. Celle-ci était elle-même, au cours de la même période, une filiale intégrale de Nynäs Petroleum (considérant 438 de la décision attaquée).

21      En 1999, Nynäs Petroleum a racheté à Nynäs International la totalité du capital souscrit de Nynas Petróleo, qui est restée filiale à 100 % de Nynäs Petroleum jusqu’en 2003 (considérant 439 de la décision attaquée). Le 12 juin 2003, Nynäs International a été liquidée. Après sa dissolution, son capital social a été remboursé à Nynäs Petroleum, qui est ainsi devenue son successeur économique et a endossé la responsabilité de l’infraction antérieurement commise par Nynäs International, celle-ci ayant cessé d’exister en tant qu’entité juridique distincte (considérant 440 de la décision attaquée).

22      Le groupe Nynäs n’a pas de site de production en Espagne, mais possède un dépôt de bitume à Villagarcía de Arosa, en Galice (Espagne). Nynas Petróleo a son siège à Madrid (Espagne) et son activité consiste en la vente et en la commercialisation de bitume en Espagne (considérant 53 de la décision attaquée).

23      Nynas Petróleo a réalisé en Espagne, au titre de ses ventes de bitume de pénétration à des tiers, un chiffre d’affaires situé entre 14 000 000 et 15 000 000 euros au cours de l’exercice commercial 2001, soit 4,89 à 5,24 % du marché en cause. Le chiffre d’affaires total consolidé du groupe Nynäs s’est élevé à 1 941 000 000 euros en 2006 (considérants 54 et 67 de la décision attaquée).

5.     Groupe Petrogal

24      De 1990 à 2003, les actifs de Galp Energía España (anciennement Petrogal Española, SA) ont été détenus à 89,29 % par Petróleos de Portugal et à 10,71% par Tagus, RE, compagnie d’assurances elle-même contrôlée à 98 % par Petróleos de Portugal. Depuis 2003, Galp Energía España est une filiale à 100 % de Petróleos de Portugal. Celle-ci est, quant à elle, une filiale détenue à 100 % par Galp Energia, SGPS depuis le 22 avril 1999 (considérants 56, 57, 59, 456, 458 de la décision attaquée).

25      Galp Energía España a pour activité la vente et la commercialisation de bitume en Espagne. Son chiffre d’affaires afférent au bitume vendu aux parties non liées en Espagne s’est élevé à 13 000 000 euros en 2001, dernière année complète de l’infraction, soit 4,54 % du marché en cause. Le chiffre d’affaires total consolidé de Galp Energia, SGPS a représenté 12 576 000 000 euros en 2006 (considérants 61 et 67 de la décision attaquée).

C –  Procédure administrative

26      Par lettre du 20 juin 2002, BP a informé la Commission de l’existence présumée d’une entente relative au marché du bitume routier et a présenté une demande visant à obtenir une immunité d’amende sur le fondement de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2002, C 45, p. 3, ci-après la « communication de 2002 »). La demande comportait une lettre et huit annexes décrivant des activités anticoncurrentielles présumées sur le marché espagnol du bitume (considérant 79 de la décision attaquée).

27      Au cours d’une réunion qui s’est tenue le 25 juin 2002 avec les services de la Commission, BP a développé sa demande d’immunité d’amende et produit des documents à son soutien. BP a présenté des informations complémentaires les 4, 8 et 10 juillet 2002 (considérant 80 de la décision attaquée).

28      Le 19 juillet 2002, la Commission a accordé à BP une immunité d’amende conditionnelle, conformément au paragraphe 8, sous a), de la communication de 2002 (considérant 81 de la décision attaquée).

29      Sur le fondement de l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17/62 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81 CE] et [82 CE], (JO 1962, 13, p. 204), tel que modifié ultérieurement, des vérifications ont été effectuées les 1er et 2 octobre 2002. Repsol, PROAS, BP, Nynäs et Petrogal étaient concernées (considérant 82 de la décision attaquée).

30      BP a fourni, le 21 octobre 2002, des informations complémentaires relatives aux activités anticoncurrentielles présumées sur le marché en cause (considérant 83 de la décision attaquée).

31      Le 5 novembre 2003, les services de la Commission ont entendu M. A. T., responsable du département « Bitume » de BP España, en vertu de l’obligation de coopération de BP. À la suite de cet entretien, BP a fourni, le 1er décembre 2003, des informations techniques sur le bitume (considérant 84 de la décision attaquée).

32      Le 6 février 2004, la Commission a envoyé aux entreprises concernées une première série de demandes de renseignements en application de l’article 11, paragraphe 3, du règlement n° 17, ainsi qu’une demande de renseignements informelle à BP (considérant 85 de la décision attaquée).

33      Repsol a présenté la majeure partie de sa réponse le 6 avril 2004 et, le reste, le 20 avril 2004. PROAS a fourni ses réponses concernant le marché espagnol le 21 avril 2004 (considérant 86 de la décision attaquée).

34      Par télécopie du 31 mars 2004, Repsol a présenté à la Commission une demande au titre de la communication de 2002, accompagnée d’une déclaration d’entreprise (considérant 87 de la décision attaquée).

35      Le 2 avril 2004, une demande de renseignements supplémentaire concernant les documents découverts pendant la vérification effectuée à son siège a été adressée à Repsol, qui y a répondu le 22 avril 2004 (considérant 88 de la décision attaquée).

36      Par télécopie du 5 avril 2004, PROAS a présenté à la Commission une demande au titre de la communication de 2002, accompagnée d’une déclaration d’entreprise (considérant 89 de la décision attaquée).

37      Le 20 avril 2004, Repsol a déposé deux fascicules de pièces complétant sa demande au titre de la communication de 2002 (considérant 90 de la décision attaquée).

38      Le 24 octobre 2005, la Commission a envoyé aux sociétés concernées une deuxième série de demandes de renseignements en vertu de l’article 18, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [81 CE] et [82 CE] (JO 2003, L 1, p. 1) (considérant 91 de la décision attaquée).

39      Repsol et PROAS ont répondu, respectivement, le 8 novembre et le 18 novembre 2005 (considérant 92 de la décision attaquée).

40      Le 29 mars 2006, la Commission a envoyé une troisième demande de renseignements à Repsol et à PROAS ainsi qu’une demande de renseignements informelle à BP. Repsol a répondu le 5 avril 2006, BP le 6 avril 2006 et PROAS le 7 avril 2006 (considérants 93 et 94 de la décision attaquée).

41      Afin de clarifier le degré d’implication dans l’entente de BP, de Nynäs et de Petrogal, la Commission a envoyé le 26 avril 2006 à Repsol et à PROAS une quatrième demande de renseignements, à laquelle Repsol et PROAS ont répondu le 9 mai suivant (considérants 95 et 96 de la décision attaquée).

42      Le 22 mai 2006, la Commission a envoyé à Repsol, à PROAS et à Petrogal une cinquième demande de renseignements, relative à des questions de responsabilité. PROAS a répondu le 29 mai 2006. Repsol et Petrogal ont répondu le 30 mai suivant (considérants 98 et 99 de la décision attaquée).

43      Par lettres du 2 août 2006, la Commission a informé Repsol et PROAS, en vertu du paragraphe 26 de la communication de 2002, de son intention de leur appliquer, conformément au paragraphe 23, sous b), de ladite communication, une réduction du montant de toute amende éventuelle à raison de 30 à 50 % pour Repsol et de 20 à 30 % pour PROAS (considérants 100 et 101 de la décision attaquée).

44      Le 22 août 2006, la Commission a pris la décision d’ouvrir la procédure dans la présente affaire (troisième visa de la décision attaquée).

45      Du 24 au 28 août 2006, la Commission a notifié à BP, à Repsol, à CEPSA- PROAS, à Nynäs et à Petrogal la communication des griefs adoptée le 22 août précédent (considérant 102 de la décision attaquée, troisième visa de ladite décision).

46      Les lignes directrices pour le calcul du montant des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2) ont remplacé, à compter du 1er septembre 2006, les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et de l’article 65, paragraphe 5 [CA] (JO 1998, C 9, p. 3 ; ci-après, les « lignes directrices de 1998 »).

47      BP, Repsol, PROAS (à l’exclusion de CEPSA), Nynäs et Petrogal ont exercé leur droit d’accès aux éléments du dossier de la Commission uniquement accessibles au siège de l’institution (considérant 103 de la décision attaquée).

48      BP, Repsol, CEPSA- PROAS, Nynäs et Petrogal ont répondu par écrit dans les délais prescrits aux griefs retenus à leur égard (considérant 104 de la décision attaquée).

49      Tous les destinataires de la décision attaquée, à l’exception de Repsol Petróleo, de Repsol YPF et de CEPSA, se sont prévalus de leur droit à être entendus oralement. L’audition s’est tenue le 12 décembre 2006 (considérant 105 de la décision attaquée).

50      Le 16 février 2007, la Commission a adressé à toutes les entreprises concernées une demande de renseignements visant à obtenir la confirmation ou la correction des chiffres de ventes de bitume de pénétration précédemment fournis ainsi que des informations sur le chiffre d’affaires réalisé par chaque groupe au titre de l’exercice 2006 (considérant 106 de la décision attaquée).

D –  Décision attaquée

1.     Constatation de l’infraction

51      La décision attaquée constate que les treize sociétés qui en sont destinataires ont enfreint l’article 81 CE en participant à un ensemble d’accords et de pratiques concertées dans la commercialisation du bitume de pénétration sur le territoire espagnol (à l’exception des îles Canaries).

52      La Commission a identifié, dans l’infraction constatée, deux ensembles, d’une part, un partage du marché et, d’autre part, une coordination des prix consistant en des accords sur le relèvement ou la réduction des prix du bitume d’un montant équivalent et mis en œuvre simultanément (considérant 366 de la décision attaquée).

53      Les différents comportements infractionnels, ou composantes, qui ont été identifiés, sont les suivants :

–        l’établissement de quotas de ventes ;

–        la répartition des volumes de produit et des clients tous les participants à l’entente, sur la base de ces quotas ;

–        le contrôle de la mise en œuvre du partage du marché et des clients, au moyen d’échanges d’informations sur les volumes de ventes ;

–        la création d’un mécanisme de compensation destiné à corriger les écarts survenus en ce qui concerne le partage du marché et des clients convenu ;

–        l’accord sur la modification des prix du bitume et la date d’application des nouveaux prix ;

–        la participation à des réunions régulières et à d’autres contacts afin de convenir des restrictions à la concurrence exposées ci-dessus et de les mettre en œuvre ou de les modifier en fonction des besoins (considérant 373 de la décision attaquée).

54      En premier lieu, la Commission a décrit les activités de partage du marché sur la base des déclarations que BP, Repsol et PROAS lui ont présentées dans leurs demandes au titre de la communication de 2002 et en réponse aux demandes de renseignements qu’elle leur a adressées (considérant 122 de la décision attaquée).

55      La Commission a considéré que l’existence de ces activités était confirmée par des éléments de preuve contemporains des faits incriminés, à savoir des documents obtenus au cours des vérifications et d’autres pièces contemporaines communiquées dans des demandes d’immunité d’amende ou dans des réponses à des demandes de renseignements (considérant 123 de la décision attaquée).

56      Il ressort de sa demande d’immunité d’amende que, lorsque BP a commencé à produire du bitume de pénétration en Espagne en juillet 1991, elle a constaté que Repsol et PROAS étaient impliquées dans un accord continu de partage du marché en cause et que BP devait y participer pour pénétrer sur ce marché avec quelque succès (considérant 119 de la décision attaquée).

57      D’autres fournisseurs de bitume présents sur le marché espagnol ont coordonné leurs ventes avec Repsol, PROAS et BP : Nynäs et Petrogal auraient participé à l’entente, la première, au moins à partir de 1991, la seconde, au moins à partir de 1995 (considérant 120 de la décision attaquée).

58      Selon les déclarations de Repsol et de PROAS, les parties à l’entente ont entretenu des contacts aux fins de partage du marché autour d’une table de négociation appelée « table de l’asphalte », réunissant des sociétés du groupe Repsol (RPA/Rylesa, Asfalnor et Petronor), PROAS et BP, mais également Nynäs et Petrogal, même si celles-ci n’ont participé qu’aux discussions concernant leur zone d’influence et de manière bilatérale avec Repsol ou PROAS, et non avec d’autres membres de l’entente (considérants 124 et 129 de la décision attaquée).

59      La Commission a identifié les phases suivantes du mécanisme de répartition du marché en cause mis en œuvre dans le cadre de l’entente constatée :

a)      une analyse interne du marché, effectuée vers le mois de septembre et au cours de laquelle chaque producteur aurait préparé séparément pour l’exercice commercial suivant une étude de marché estimant la consommation de bitume en Espagne ;

b)      une répartition préalable en interne du marché en cause, accomplie vers le mois d’octobre et consistant en la préparation, par chaque producteur de bitume, d’un projet de répartition du marché à présenter lors des négociations avec ses concurrents ;

c)      un accord sur la taille du marché, c’est-à-dire sur la consommation totale de bitume à prévoir pour l’exercice commercial suivant, conclu aux alentours du mois de novembre entre Repsol, PROAS et BP ;

d)      des négociations de partage du marché prévisionnel ainsi défini, conduites en décembre-janvier ;

e)      l’accord annuel de partage du marché : de 1994 à 2000, les directeurs commerciaux compétents de Repsol et de PROAS auraient normalement tenu les discussions de clôture en décembre-janvier, afin de résoudre les problèmes de répartition du marché encore pendants ; le document contenant l’accord de partage du marché au titre d’un exercice commercial donné aurait été dénommé « PTT » ou « Petete » ;

f)      la communication des informations à Nynäs et à Petrogal et la négociation avec elles : une fois conclue la répartition du marché par les trois producteurs de bitume, Repsol ou PROAS auraient tenu une réunion avec Nynäs et une autre avec Petrogal, afin de les informer et de négocier les volumes de vente et les clients qui seraient attribués à chacune dans sa zone d’influence respective (considérant 130 de la décision attaquée).

60      En second lieu, la Commission a constaté que les activités de coordination des prix avaient constitué un élément de support nécessaire aux activités de partage du marché en garantissant que la répartition des volumes et des clients convenue ne soit pas affectée par l’application de politiques de prix indépendantes de la part des fournisseurs (considérant 290 de la décision attaquée).

61      La Commission a décrit les accords sur les prix en se fondant sur les déclarations spontanées de BP, de Repsol et de PROAS et sur les réponses aux demandes de renseignements. La Commission a présenté ensuite une vue d’ensemble chronologique des documents contemporains en sa possession permettant de confirmer les accords sur les prix décrits dans les déclarations précitées (considérant 291 de la décision attaquée).

62      Les modifications de prix et la date de leur mise en œuvre auraient été généralement décidées entre Repsol et PROAS, qui auraient informé ensuite BP, Nynäs et Petrogal de leurs conclusions (considérant 354 de la décision attaquée).

63      La Commission a ensuite retenu que l’ensemble des accords ou des pratiques concertées a eu pour objet de restreindre la concurrence en Espagne (à l’exception des îles Canaries), partie substantielle du marché intérieur en cause (considérant 371 de la décision attaquée).

64      La Commission a rappelé que, selon la jurisprudence, la prise en considération des effets concrets d’un accord est superflue, dès lors qu’il apparaît avoir pour objet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence dans le marché intérieur. Par conséquent, la démonstration d’effets anticoncurrentiels réels ne serait pas requise, lorsque l’objet anticoncurrentiel des comportements reprochés est établi (considérant 375 de la décision attaquée).

65      Il en irait de même des pratiques concertées. Même si, aux termes de l’article 81 CE, la notion de pratique concertée impliquerait, outre la concertation entre les entreprises, un comportement sur le marché faisant suite à cette concertation et un lien de cause à effet entre ces deux éléments, il y aurait lieu de présumer, sous réserve de la preuve contraire, que les entreprises participant à la concertation et qui demeurent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur le marché. Il en serait d’autant plus ainsi lorsque la concertation a lieu sur une base régulière au cours d’une longue période. Une telle pratique concertée relèverait alors de l’article 81 CE, même en l’absence d’effets anticoncurrentiels sur le marché (considérant 331 de la décision attaquée).

66      Néanmoins, en l’espèce, la Commission a estimé avoir également prouvé, sur la base des éléments présentés dans la décision attaquée, que les accords de l’entente avaient été mis en œuvre et qu’ils avaient probablement produit des effets anticoncurrentiels réels (considérant 376 de la décision attaquée).

67      Par ailleurs, la Commission a considéré comme établi que le personnel de PROAS avait participé à l’entente en cause (considérant 416 de la décision attaquée).

2.     Calcul du montant des amendes

68      La Commission a rappelé que, en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003, elle pouvait, par voie de décision, infliger aux entreprises des amendes lorsque celles-ci commettent, de propos délibéré ou par négligence, une infraction aux dispositions de l’article 81 CE. Elle a indiqué également que, en vertu de l’article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17, applicable au moment de l’infraction, l’amende pour chaque entreprise participant à l’entente ne pouvait dépasser 10 % de son chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice précédent et que l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003 instaurait la même limitation (considérant 496 de la décision attaquée).

69      La Commission a considéré que chacune des deux restrictions à la concurrence constatées, à savoir les accords horizontaux de partage du marché et la coordination des prix, relevait, par sa nature même, des types d’infractions les plus graves à l’article 81 CE, lesquels sont susceptibles de justifier, selon la jurisprudence, la qualification d’infractions « très graves » uniquement au vu de leur nature, sans qu’il soit nécessaire qu’un tel comportement couvre une zone géographique particulière ou ait un impact particulier (considérant 500 de la décision attaquée).

70      La Commission a jugé impossible de mesurer l’impact réel de l’entente sur le marché, en raison, notamment, de l’insuffisance d’informations sur l’évolution probable que les prix nets du bitume en Espagne auraient suivie en l’absence d’accords. La Commission ne s’est pas estimée tenue de démontrer avec précision le véritable impact de l’entente sur le marché en cause ni de le quantifier, mais a considéré qu’elle pouvait se limiter à des estimations de la probabilité d’un tel effet. En tout état de cause, la Commission a considéré que les accords de l’entente avaient été mis en œuvre et qu’il était probable qu’ils aient produit des effets anticoncurrentiels réels (voir considérant 501 de la décision attaquée).

71      Eu égard à la nature de l’infraction, la Commission a considéré que Repsol, PROAS, BP, Nynäs et Petrogal avaient commis une infraction très grave à l’article 81 CE et précisé que cette conclusion était formulée indépendamment de la question de savoir si l’entente avait eu un impact mesurable sur le marché en cause. La Commission a ajouté qu’elle prenait en compte le fait que la collusion avait concerné uniquement le marché espagnol (considérant 509 de la décision attaquée).

a)     Détermination et adaptation du « montant de départ » des amendes

72      La Commission a fixé le « montant de départ » des amendes à infliger en prenant en compte la gravité de l’infraction, la valeur du marché en cause estimée à 286 400 000 euros en 2001, dernière année complète de l’infraction, et le fait que l’infraction était limitée aux ventes de bitume effectuées dans un seul État membre. Compte tenu des éléments qui précèdent, la Commission a fixé le montant de départ des amendes à 40 000 000 euros (considérant 510 de la décision attaquée).

73      La Commission a ensuite classé les entreprises destinataires de la décision attaquée en différentes catégories définies en fonction de leur importance relative sur le marché en cause, aux fins de l’application du traitement différencié, de façon à tenir compte de leur capacité économique effective à causer un préjudice grave à la concurrence. À cette fin, la Commission s’est fondée sur leurs parts, exprimées en valeur des ventes, du marché du bitume de pénétration routier espagnol au titre de l’exercice 2001 (considérants 511 et 512 de la décision attaquée).

74      Repsol et PROAS, dont les parts du marché en cause s’élevaient, respectivement, à 34,04 % et à 31,67 % au titre de l’exercice 2001, ont été classées dans la première catégorie, BP, avec une part de marché de 15,19 %, dans la deuxième catégorie, et Nynäs et Petrogal, dont les parts de marché se situaient entre 4,54 % et 5,24 %, dans la troisième catégorie. Sur cette base, les montants de départ des amendes à infliger ont été adaptés comme suit (considérants 514 et 515 de la décision attaquée) :

–        première catégorie, pour Repsol et PROAS : 40 000 000 euros ;

–        deuxième catégorie, pour BP : 18 000 000 euros ;

–        troisième catégorie, Nynäs et Petrogal : 5 500 000 euros.

75      Afin de déterminer le montant des amendes à un niveau en garantissant l’effet suffisamment dissuasif, la Commission a considéré comme approprié d’appliquer au montant de l’amende à infliger à BP et à Repsol un multiplicateur de 1,8 et de 1,2, respectivement, en fonction de leur chiffre d’affaires global de 2006, dernier exercice précédant l’adoption de la décision attaquée, mais de ne pas appliquer un multiplicateur au montant de l’amende à infliger à PROAS, à Nynäs et à Petrogal (considérant 521 de la décision attaquée).

76      Les montants de départ des amendes ont donc été adaptés comme suit (considérant 522 de la décision attaquée) :

–        Repsol : 48 000 000 euros ;

–        PROAS : 40 000 000 euros ;

–        BP : 32 400 000 euros ;

–        Nynäs : 5 500 000 euros ;

–        Petrogal : 5 500 000 euros.

b)     Durée de l’infraction

77      La Commission a estimé que Repsol et PROAS devaient répondre de leur participation à l’infraction du 1er mars 1991 au 1er octobre 2002, soit une période de onze ans et sept mois.

78      La Commission a estimé que BP devait répondre de sa participation à l’infraction du 1er août 1991 au 20 juin 2002, soit une période de dix ans et dix mois.

79      La Commission a estimé que Nynas Petróleo devait répondre de sa participation à l’infraction du 1er mars 1991 au 1er octobre 2002, soit une période de onze ans et sept mois, et que Nynäs Petroleum devait répondre de sa participation à l’infraction du 22 mai 1991 au 1er octobre 2002, soit une période de onze ans et quatre mois.

80      Enfin, la Commission a estimé que Galp Energía España (anciennement Petrogal Española) et Petróleos de Portugal devaient répondre de leur participation à l’infraction du 31 janvier 1995 au 1er octobre 2002, soit une période de sept ans et huit mois, et Galp Energia, SGPS, du 22 avril 1999 au 1er octobre 2002, soit une période de trois ans et cinq mois (considérant 523 de la décision attaquée).

81      La Commission a majoré le montant de départ des amendes de 10 % par année complète d’infraction et de 5 % pour toute période supplémentaire égale ou supérieure à six mois, mais inférieure à un an. Les majorations à appliquer au montant de départ des amendes se sont donc établies comme suit (considérants 524 et 525 de la décision attaquée) :

–        Repsol : 115 % ;

–        PROAS : 115 % ;

–        BP : 105 % ;

–        Nynäs :

–        Nynas Petróleo : 115 % ;

–        Nynäs Petroleum : 110 % ;

–        Petrogal :

–        Galp Energía España et Petróleos de Portugal : 75 % ;

–        Galp Energia, SGPS : 30 %.

82      Les montants des amendes à infliger à chaque entreprise ont donc été les suivants (considérant 526 de la décision attaquée) :

–        Repsol : 103 200 000 euros ;

–        PROAS : 86 000 000 euros ;

–        BP : 66 420 000 euros ;

–        Nynäs :

–        Nynas Petróleo : 11 825 000 euros ;

–        Nynäs Petroleum : 11 550 000 euros ;

–        Petrogal :

–        Galp Energía España et Petróleos de Portugal : 9 625 000 euros ;

–        Galp Energia, SGPS : 7 150 000 euros.


c)     Circonstances aggravantes

83      La Commission a exposé ce qui suit au considérant 534 de la décision attaquée :

« a)      les coordinateurs de la ‘table de l’asphalte’ étaient un salarié de Repsol et un salarié de PROAS (voir considérant 145) ;

b)      Repsol et PROAS ont organisé les réunions de l’entente et celles-ci étaient normalement présidées par un salarié de Repsol (voir considérant 145) ;

c)      lorsque les réunions de l’entente étaient tenues dans des hôtels, les factures étaient normalement payées par Repsol ou par PROAS (voir considérant 148) ;

d)      comme le rapportent BP, Repsol et PROAS, ces deux dernières entreprises ont décidé bilatéralement des modifications des prix du bitume et du moment où elles devaient être mises en œuvre, puis ont communiqué les décisions prises aux autres opérateurs du marché (voir considérant 302) ;

e)      à partir du début de l’entente, en ce qui concerne Nynäs, et à partir du moment où elle a rejoint l’entente en 1995, en ce qui concerne Petrogal, Repsol et PROAS ont organisé des réunions avec chacune de ces deux entreprises séparément afin de négocier leurs parts de marché dans leur zone de ventes (voir considérant 130). BP était seulement présente pendant les négociations concernant sa zone d’influence, mais n’a pas participé aux négociations traitant de la position de Repsol et de PROAS (voir considérant 137) ni à celles tenues avec Nynäs et Petrogal. Ceci montre que, au lieu de réunir sur un pied d’égalité les cinq participants au cartel, les négociations de partage des marchés étaient tenues bilatéralement entre Repsol et PROAS d’un côté, et chacun des trois autres participants à l’entente de l’autre côté ;

f)      de 1994 à 2000 (c’est-à-dire, durant sept des quelque douze années de la durée de l’entente), tout problème en suspens concernant la répartition du marché procédant de l’accord annuel faisait l’objet d’un accord final entre Repsol et PROAS (voir considérant 130) ;

g)      des éléments de preuve contemporains de 1991 et 1992 rédigés par BP rapportent que ‘Repsol a négocié avec Nynäs leur entrée officielle sur le marché espagnol’, et qu’il a été attribué à Nynäs 3,74 % du marché ‘par décision expresse de Repsol et de CEPSA’ (voir considérants 201 et 206) ;

h)      Repsol et PROAS ont offert à Petrogal une attribution de part de marché dans sa zone géographique d’influence (voir considérant 125) ;

i)      pendant la période au cours de laquelle BP a suspendu sa participation aux réunions de la ‘table de l’asphalte’, soit Repsol, soit PROAS, lui ont fourni une copie de l’accord de partage des marchés (voir considérant 172) ;

j)      BP a rapporté entretenir des conversations téléphoniques de contrôle bimensuelles, soit avec Repsol, soit avec PROAS, et que l’une de ces deux entreprises a recueilli les données de BP sur les volumes de ventes (voir considérant 184) ;

k)      dans le contexte des contacts de contrôle tenus à partir de 2001, Repsol et PROAS ont déterminé des prix pour de nouveaux travaux et ont attribué de nouveaux travaux non compris dans l’accord annuel de partage des marchés (voir considérant 187) ;

l)      Repsol a produit un graphique fixant les volumes à fournir par Nynäs en 2001 qui, selon Repsol, avaient été préparés en commun par Repsol et PROAS, puis communiqués à Nynäs (voir considérant 265) ;

m)      les données estimatives des volumes du marché pour 2002 comprises dans certains graphiques préparés par PROAS ont été ultérieurement vérifiées par Repsol à la ‘table de l’asphalte’ (voir considérant 270) ;

n)      PROAS a expliqué qu’un certain document contient la consommation par province prévue par Repsol et PROAS pour 2002 et l’accord conclu par ces deux entreprises sur ces volumes de consommation (voir considérant 271) ».

84      Au vu de ces éléments, la Commission a considéré que Repsol et PROAS avaient été les moteurs significatifs de l’entente en cause, car elles avaient attribué les parts de marché aux nouveaux membres de l’entente, avaient pris des décisions concernant la taille globale du marché, s’étaient mises d’accord sur les problèmes non résolus liés au partage du marché, avaient négocié bilatéralement et séparément avec les autres participants à l’entente les volumes de vente et les clients devant leur être attribués dans leur zone d’influence respective, avaient rassemblé des données sur les volumes de vente des autres participants, organisé et présidé les réunions de l’entente, couvert les frais de la majorité de celles-ci et étaient convenues bilatéralement des modifications de prix qu’elles avaient ensuite communiquées aux autres opérateurs du marché (considérant 535 de la décision attaquée).

85      La Commission a conclu que le montant de l’amende à infliger à Repsol et à PROAS devait être majoré de 30 % (considérant 536 de la décision attaquée). Le montant de l’amende a donc été porté à 134 160 000 euros pour Repsol et à 111 800 000 euros pour PROAS (considérant 568 de la décision attaquée).

d)     Application de la communication de 2002

86      La Commission a rappelé avoir ouvert son enquête à la suite de la demande d’immunité d’amende de BP présentée sur le fondement de la communication de 2002. Elle a ajouté que Repsol et PROAS avaient ultérieurement présenté une demande de réduction du montant de l’amende en vertu du même texte (considérant 569 de la décision attaquée).

87      La Commission a reconnu à BP le droit à l’immunité de l’amende qui aurait normalement dû lui être infligée après avoir constaté qu’elle avait satisfait aux conditions énoncées au paragraphe 11 de la communication de 2002, lesquelles sont relatives à la coopération avec la Commission, à la cessation de la participation à l’infraction et à l’absence de mesures visant à contraindre d’autres entreprises à participer à l’infraction (considérant 573 de la décision attaquée).

88      La Commission a également décidé que Repsol et Proas avaient droit, respectivement, à une réduction de 40 % et de 25 % du montant de l’amende qui aurait dû normalement leur être infligée (considérants 580 et 588 de la décision attaquée).

3.     Dispositif de la décision attaquée

89      Le dispositif de la décision est libellé comme suit :

« Article premier

Les entreprises suivantes ont enfreint l’article 81, [paragraphe 1, CE] en participant, pendant les périodes indiquées, à un ensemble d’accords et de pratiques concertées dans la commercialisation du bitume de pénétration couvrant l’ensemble du territoire espagnol (à l’exception des îles Canaries) et consistant en des accords de partage du marché et en une coordination des prix :

[…]

[PROAS] et [CEPSA], du 1er mars 1991 au 1er octobre 2002 ;

[…]

Article 2

Pour l’infraction visée à l’article 1er, les amendes suivantes sont infligées :

[…]

[PROAS] et [CEPSA], conjointement et solidairement responsables du paiement de 83 850 000 euros ;

[…]

Article 4

Les destinataires de la décision sont :

[…]

[PROAS]

[[CEPSA],]

[…] »

 Procédure et conclusions des parties

90      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 décembre 2007, la requérante a introduit le présent recours.

91      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        à titre subsidiaire, réduire le montant de l’amende infligée ;

–        condamner la Commission à l’intégralité des dépens.

92      La Commission conclut en substance à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        augmenter le montant de l’amende infligée à PROAS ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

A –  Sur les conclusions présentées à fin d’annulation de la décision attaquée et, à titre subsidiaire, à fin de réduction du montant de l’amende

93      PROAS développe huit moyens au soutien de ses conclusions, tirés, respectivement, le premier, de la méconnaissance de ses droits de la défense et du principe de bonne administration, le deuxième, l’erreur commise dans l’appréciation de la gravité de l’infraction, le troisième, l’erreur commise dans la détermination de son chiffre d’affaires pertinent aux fins du calcul du montant de l’amende, le quatrième, l’erreur commise dans la qualification de comeneur de l’entente en cause qui lui a été attribuée, le cinquième, d’une application erronée de la communication de 2002, le sixième, de la méconnaissance du principe de respect d’un délai raisonnable, le septième, de la violation de la règle du plafonnement du montant de l’amende à 10 % du chiffre d’affaires, et le huitième, formulé en liaison étroite avec ses arguments précédents, de la violation de l’obligation de motivation.

1.     Sur le premier moyen, pris de la méconnaissance des droits de la défense et du principe de bonne administration

a)     Arguments des parties

94      PROAS soutient avoir renoncé à recevoir la communication des griefs en langue espagnole, langue de la procédure administrative, à la demande de la Commission. PROAS souligne l’importance de cette renonciation à un droit linguistique fondamental, qui concerne intrinsèquement les droits de la défense et le principe de bonne administration. Cette renonciation serait intervenue après que la Commission a confirmé à PROAS l’adoption imminente de nouvelles lignes directrices qui auraient sensiblement aggravé l’amende encourue par PROAS si la Commission lui avait adressé la communication des griefs après leur publication. Dès lors, la renonciation de PROAS aurait directement résulté de la menace d’une sanction majeure, ce qui serait très éloigné d’une renonciation libre.

95      PROAS aurait dû ainsi traduire par ses propres moyens un texte rédigé en anglais, d’une grande difficulté technique et d’une importance juridique incontestable, en se défendant de griefs exposés dans une version non authentique, avec toutes les incertitudes que cela implique.

96      La Commission soutient que le présent moyen doit être écarté.

b)     Appréciation du Tribunal

97      Il suffit de constater que PROAS indique avoir été seulement invitée par la Commission à renoncer à recevoir la communication des griefs en langue espagnole.

98      Ainsi, elle ne soutient pas qu’une contrainte aurait été exercée par la Commission.

99      En tout état de cause, une telle contrainte n’est pas établie.

100    Il y a donc lieu de conclure que PROAS a librement accepté de recevoir un document de la procédure rédigé par la Commission dans une autre langue que la langue de la procédure administrative. Par suite, elle n’est fondée à invoquer ni la violation du principe de bonne administration ni la méconnaissance de ses droits de la défense.

101    La requérante invoque également, dans le cadre du moyen tiré de violation du principe de bonne administration et des droits de la défense, la méconnaissance des dispositions de l’article 3 du règlement n° 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385), tel que modifié. Aux termes de cet article, les textes adressés par les institutions à une personne relevant de la juridiction d’un État membre sont rédigés dans la langue de cet État.

102    Le fait de ne pas avoir communiqué une version en langue espagnole de la communication des griefs constitue donc un vice dans l’établissement de ce document qui pourrait en affecter la régularité et, par voie de conséquence, celle de la décision attaquée.

103    Cependant, la requérante se borne à indiquer ce qui suit :

« [… L]a Commission a transféré à PROAS une tâche qu’elle était tenue de remplir elle-même (la traduction de la communication des griefs dans la version authentique de la procédure). C’est ainsi que PROAS a dû traduire par ses propres moyens (inférieurs sans aucun doute à ceux dont dispose la Commission) un texte revêtu d’une grande difficulté technique et doté d’une importance juridique incontestable, en se défendant d’accusations formulées à son égard dans une version ‘non authentique’, avec tous les doutes et incertitudes que cela implique. »

104    Au regard d’une argumentation aussi peu développée et étayée, le Tribunal considère qu’il n’est pas établi que PROAS n’a pas été en état de prendre utilement connaissance du contenu de la communication des griefs.

105    De plus, ainsi qu’il vient d’être dit plus haut, PROAS a elle-même accepté de recevoir la communication des griefs en langue anglaise afin que celle-ci lui soit transmise plus rapidement. Cette circonstance contribue encore davantage à ôter tout fondement à l’allégation selon laquelle PROAS n’aurait pas été en mesure de prendre utilement connaissance du contenu de la communication des griefs.

106    En conséquence, il y a lieu de conclure que l’irrégularité constatée n’a pas eu en l’espèce de conséquences préjudiciables pouvant vicier la procédure administrative (arrêt de la Cour du 15 juillet 1970, ACF Chemiefarma/Commission, 41/69, Rec. p. 661, points 47 à 52) et, dès lors, d’écarter le présent moyen.

2.     Sur le deuxième moyen, pris de l’erreur d’appréciation de la gravité de l’infraction

a)     Arguments des parties

107    PROAS reproche à la Commission d’avoir commis une erreur d’appréciation des faits en analysant le degré de gravité de l’infraction, aux fins de l’application du point 1 A des lignes directrices de 1998. Du fait de l’absence d’informations suffisantes sur l’évolution probable du prix net du bitume en l’absence de l’entente en cause, la Commission se serait limitée à affirmer l’impossibilité de mesurer l’impact réel de l’entente et à déduire de la mise en œuvre des accords litigieux la probabilité de leurs effets anticoncurrentiels réels.

108    S’il est vrai que l’impact de l’infraction doit être pris en compte dans la mesure où il est mesurable, il n’en demeurerait pas moins que, en présence de facteurs susceptibles d’atténuer ou d’éliminer l’impact de l’entente présumée, la Commission serait tenue d’apprécier son impact réel lorsqu’elle calcule le montant de l’amende.

109    Pour pouvoir considérer qu’était établi le fait que l’entente avait produit des effets sur le marché, la Commission aurait dû au moins se référer à des indices concrets démontrant avec une probabilité raisonnable que l’entente a permis aux participants d’atteindre un niveau de prix supérieur à celui qui aurait été pratiqué en l’absence de l’entente et prendre en compte, à cet effet, toutes les conditions objectives du marché en cause.

110    La Commission aurait pu mesurer l’impact réel de l’entente. Il lui aurait suffi de demander les informations nécessaires, comme celles utilisées par LECG Consulting Spain (ci-après « LECG ») pour établir, à la demande de PROAS, le rapport intitulé « Coordination sur le marché du bitume : analyse économétrique de ses effets », annexé à la requête. Selon ce rapport, l’évolution des prix du bitume en Espagne avant et après la dissolution de l’entente indiquerait que son impact sur les prix a été très limité, voire inexistant. En d’autres termes, l’évolution des prix pendant la durée de l’entente aurait été pratiquement identique à celle qu’ils auraient connue en l’absence d’infraction et les profits des participants auraient été quasiment insignifiants.

111    Dans l’hypothèse où la Commission aurait été réellement dans l’impossibilité de présenter les indices lui permettant d’analyser les effets de l’entente, elle aurait dû, à tout le moins, prêter dûment attention aux éléments produits par PROAS pendant la procédure administrative. Ceux-ci auraient révélé une situation du marché en cause manifestement incompatible avec les effets normaux d’une entente, à savoir, les pertes subies par PROAS au titre de certains exercices commerciaux de la période infractionnelle, la répercussion tardive systématique, voire l’absence de toute répercussion, des cours du fioul sur les prix du bitume, le niveau inférieur des prix du bitume en Espagne par rapport à la moyenne européenne et, enfin, le caractère vraisemblable des pressions du gouvernement espagnol, exercées par l’intermédiaire de Repsol, principale entreprise du marché et meneur de l’entente, dans un but de contention anti-inflationniste des prix de tous les dérivés du pétrole.

112    Outre ces éléments de preuve, PROAS signale avoir indiqué à la Commission un nombre suffisant de facteurs démontrant que le rôle du gouvernement espagnol et les autres particularités du marché ont, à tout le moins, substantiellement atténué les effets de l’entente.

113    En premier lieu, l’entente n’aurait eu d’effet que sur une zone géographique plus limitée que le territoire espagnol. Si cette zone représente une partie substantielle du marché intérieur et si l’infraction constatée constitue une entente, ces éléments ne permettraient cependant pas, contrairement à ce qui ressort du considérant 506 de la décision attaquée, de qualifier l’entente de très grave ou, à tout le moins, de fixer à 40 000 000 euros le montant de départ de l’amende. Dans des affaires antérieures, la Commission aurait déjà tenu compte de la dimension géographique limitée du marché concerné ou de la portée réelle de l’infraction pour qualifier l’entente en cause de grave ou pour diminuer de manière substantielle le montant de base des amendes sanctionnant une infraction qualifiée de très grave.

114    Il existerait d’autres précédents dans lesquels la Commission a fixé un montant de base limité en raison, notamment, de l’effet limité des accords en dehors du marché national concerné ou de la circonstance selon laquelle les accords n’avaient atteint leur forme la plus achevée qu’avec l’entente à l’échelle européenne. Ainsi, dans la décision 1999/60/CE de la Commission, du 21 octobre 1998, relative à une procédure d’application de l’article 85 [CE] (affaire IV/35.691/E-4 – Conduites précalorifugées) (JO 1999, L 24, p. 1), la Commission a appliqué à une entreprise un coefficient supplémentaire inférieur à celui qu’elle aurait dû appliquer en raison de la durée de l’infraction (1,4 % au lieu de 5 % pour une durée de cinq années).

115    En second lieu, les membres de l’entente auraient estimé les réunions des bureaux de l’asphalte nécessaires, voire indispensables, pour convaincre Repsol de la nécessité de répercuter sur le prix du bitume les variations des cours du fioul, malgré les pressions du gouvernement espagnol sur Repsol, comme l’attestent les communiqués de presse produits par PROAS. En tant que preuves contemporaines des faits litigieux, ces pièces auraient dû être appréciées de manière appropriée par la Commission. Ainsi s’expliquerait la neutralisation d’une partie très importante des effets potentiels de l’entente, à telle enseigne que les participants n’auraient parfois même pas réalisé de bénéfices. Les opérations de PROAS sur le marché en cause auraient même été déficitaires en 2000.

116    PROAS ajoute que la Commission a commis une erreur dans son appréciation des autres caractéristiques du marché du bitume espagnol.

117    Premièrement, les pressions exercées par les grandes entreprises de construction, partie importante de la clientèle du marché de la construction routière, et leur faculté de recourir aux importations auraient considérablement réduit la marge de manœuvre des participants à l’entente.

118    Deuxièmement, les importations auraient engendré une pression importante pendant toute la durée de l’entente et en auraient nécessairement limité les éventuels effets sur les prix. PROAS aurait démontré à la Commission que l’entente n’a eu aucun impact sur la structure du marché, sur les opérateurs présents ou sur les nouveaux entrants potentiels, ce que PROAS a corroboré en se fondant sur deux éléments.

119    D’une part, le niveau des importations serait resté constant et aurait même augmenté durant toute la période concernée par l’enquête, à l’exception d’une diminution de quelque 7 % entre 1999 et 2000 en raison de la plus faible présence des importateurs consécutive au bas niveau des prix dû aux pressions exercées pour contenir les hausses des prix des dérivés du pétrole. D’autre part, la décision d’un opérateur d’implanter ou de développer son activité sur le marché en cause dépendrait de facteurs étrangers à l’objet des négociations tenues au sein de l’entente, tels que les lourds investissements en moyens de transport et de stockage.

120    Troisièmement, l’impact d’une entente pourrait être limité par la forte dépendance du prix du produit final par rapport à celui de la matière première. Il ressortirait des éléments produits par PROAS au cours de la procédure administrative que l’étroite corrélation entre les prix moyens des fournisseurs du bitume sur le marché en cause et le cours international du fioul s’est maintenue tout au long de la période concernée par l’enquête et que cette corrélation aurait même été parfois interrompue en raison de l’absence de répercussion immédiate, voire de l’absence totale de répercussion, des hausses du prix de la matière première sur le prix du bitume.

121    Les autres estimations auxquelles PROAS a procédé en interne confirmeraient l’étroite corrélation entre les prix de vente moyens mensuels de PROAS sur le marché en cause et les prix du fioul de janvier 1992 à septembre 2007. Cette corrélation serait presque parfaite si l’on compare le prix de vente moyen mensuel du bitume au cours international du fioul du mois antérieur. Il ressortirait de la décision attaquée elle-même que les réunions, tenues à l’initiative de tout participant à l’entente quel qu’il soit, répondaient en général à la nécessité de faire face à la hausse du prix de la matière première, du bitume.

122    En conclusion, PROAS demande au Tribunal d’annuler la sanction infligée par la Commission ou, subsidiairement, de réformer la qualification de l’entente ou, le cas échéant, de réduire la sanction infligée par la Commission.

123    À défaut, PROAS demande au Tribunal de retenir une circonstance atténuante tirée de l’existence de certains facteurs qui limitent la dimension réelle de l’entente, notamment le fait que le prix du bitume est tributaire du prix du fioul, et tirée, en outre, du fait que l’interventionnisme du gouvernement, directement ou par l’intermédiaire de Repsol, a fait naître, dans l’esprit de PROAS, une confusion quant à la licéité des accords.

124    La Commission soutient que le présent moyen doit être écarté.

b)     Appréciation du Tribunal

125    Il convient tout d’abord de relever que, dans le cadre du présent moyen, la requérante invoque, à titre principal, un grief par lequel elle conteste la qualification d’infraction très grave qui a été retenue par la Commission dans la décision attaquée et, à titre subsidiaire, un grief par lequel elle se prévaut de circonstances atténuantes.

126    Il convient d’examiner, en premier lieu, le grief par lequel la requérante conteste la qualification de l’infraction de très grave retenue par la Commission.

 Sur la qualification de l’infraction

127    À titre liminaire, il y a lieu de relever que, par son argumentation, PROAS se borne à contester la qualification d’infraction très grave qui a été retenue par la Commission dans la décision attaquée sans, pour autant, développer une critique autonome en ce qui concerne le montant de départ de l’amende qui lui a été appliqué. À cet égard, il est utile d’indiquer que dans les sous-titres de la partie de la requête consacrée au présent moyen, la requérante se réfère à une erreur de la Commission dans l’appréciation de la gravité de l’infraction. Ainsi, par le présent grief, la requérante ne vise pas à contester, en tant que tel, le montant de l’amende qui lui a été infligée.

128    PROAS soutient en substance que, pour pouvoir qualifier l’infraction retenue à son égard de « très grave », la Commission aurait dû établir que l’entente avait produit des effets sur le marché.

129    À cet égard, il y a lieu de préciser qu’il est vrai que, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas considéré comme établi le fait que l’entente avait produit de tels effets.

130    En effet, au considérant 500 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que chacun des deux groupes de comportements anticoncurrentiels constatés, les accords horizontaux de partage du marché et la coordination des prix, relevait, de par sa nature même, des types d’infractions les plus graves à l’article 81 CE et que la jurisprudence avait confirmé que ce type de restrictions pouvait justifier la classification d’infractions « très graves » uniquement au vu de leur nature, sans qu’il soit nécessaire, pour de tels comportements, d’avoir un impact particulier.

131    La Commission a réaffirmé au considérant 509 de la décision attaquée que, étant donné la nature de l’infraction, les entreprises destinataires de la décision attaquée avaient commis une infraction très grave à l’article 81 CE et précisé que cette conclusion était formulée indépendamment de la question de savoir si l’entente avait eu un impact mesurable sur le marché.

132    Ce n’est qu’aux fins de réfuter, au considérant 503 de la décision attaquée, les arguments de PROAS tirés des pressions à la baisse des prix exercées par le gouvernement espagnol et des spécificités du marché du bitume espagnol que la Commission a relevé que les allégations de PROAS, à les supposer établies, auraient pu atténuer, mais pas empêcher, l’impact sur le marché des accords anticoncurrentiels.

133    Or, il résulte de la description indicative donnée des infractions très graves au point 1 A, deuxième alinéa, troisième tiret, des lignes directrices de 1998 que des accords ou pratiques concertées visant, comme en l’espèce, à la répartition des marchés et à la fixation des prix peuvent emporter une telle qualification sur le seul fondement de leur nature propre, sans qu’il soit nécessaire de caractériser de tels comportements par une étendue géographique ou un impact particuliers (arrêt de la Cour du 3 septembre 2009, Prym et Prym Consumer/Commission, C‑534/07 P, Rec. p. I‑7415, points 75 et 81).

134    Cette conclusion est corroborée par le fait que, si la description indicative des infractions ayant vocation à être considérées comme graves mentionne qu’il s’agit d’infractions du même type que celles définies comme peu graves, « mais dont l’application est plus rigoureuse, dont l’impact sur le marché est plus large et qui peuvent produire leurs effets sur des zones étendues du marché commun », celle des infractions très graves, en revanche, ne mentionne aucune exigence d’impact ni de production d’effets sur une zone géographique particulière (arrêt de la Cour du 24 septembre 2009, Erste Group Bank e.a./Commission, C‑125/07 P, C‑133/07 P, C‑135/07 P et C‑137/07 P, Rec. p. I‑8681, point 103, et arrêt du Tribunal du 25 octobre 2005, Groupe Danone/Commission, T‑38/02, Rec. p. II‑4407, point 150).

135    Il s’ensuit que les accords de répartition du marché et les activités de coordination des prix auxquels a participé PROAS ont pu être qualifiés à bon droit par la Commission d’infraction très grave à l’article 81, paragraphe 1, CE sur le seul fondement de leur nature propre.

136    En conséquence, le présent grief doit être écarté.

 Sur les circonstances atténuantes

137    PROAS demande au Tribunal de réduire le montant de l’amende au titre de deux circonstances atténuantes, d’une part, la confusion que l’interventionnisme du gouvernement espagnol aurait engendrée dans son chef à propos de la licéité des accords de l’entente et, d’autre part, l’existence de certains facteurs qui limiteraient l’impact de l’entente sur le marché, dont la dépendance du prix du bitume par rapport au prix du fioul.

138    S’agissant de l’interventionnisme allégué du gouvernement espagnol, il convient de rappeler que, s’il n’est pas exclu que, dans certaines circonstances, un cadre juridique national ou un comportement des autorités nationales puissent constituer des circonstances atténuantes, l’approbation ou la tolérance d’une infraction de la part des autorités nationales ne saurait être prise en considération à ce titre lorsque les entreprises en cause disposent des moyens nécessaires pour se procurer des renseignements juridiques précis et corrects (arrêt Erste Group Bank e.a./Commission, précité, points 228 et 230). A fortiori, une simple confusion que l’interventionnisme du gouvernement espagnol aurait engendrée dans l’esprit de PROAS à propos de la licéité des accords de l’entente ne saurait constituer une circonstance atténuante alors même qu’il n’est pas établi, ni même allégué, que PROAS ne disposait pas des moyens nécessaires pour se procurer des renseignements juridiques précis et corrects.

139    De plus, selon la jurisprudence, des pressions exercées sur une entreprise ne dégagent pas cette dernière de sa responsabilité dans la participation à une infraction (voir arrêt de la Cour du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, non encore publié au Recueil, point 79, et la jurisprudence citée). Il en va de même, a fortiori, d’une simple confusion.

140    S’agissant de l’impact concret de l’entente, ainsi qu’il ressort des lignes directrices de 1998, celui-ci doit être examiné au stade de la qualification de la gravité de l’infraction et non lors de la phase ultérieure de détermination du montant de l’amende destinée à permettre à l’entreprise en cause de se voir, le cas échéant, accorder une réduction du montant de l’amende au titre des circonstances atténuantes.

141    En effet, il est fait expressément référence à l’impact concret de l’entente au point 1, intitulé « Montant de base », des lignes directrices de 1998, cet impact étant l’un des éléments qui peuvent être pris en compte pour qualifier la gravité de l’infraction. Au contraire, l’impact concret de l’entente n’est pas mentionné dans la liste, certes non exhaustive, qui figure au point 3, intitulé « Circonstances atténuantes », de ces mêmes lignes directrices.

142    Or, un texte ne saurait prendre en compte un même élément à la fois pour déterminer la gravité d’une infraction et pour retenir l’existence de circonstances atténuantes.

143    En tout état de cause, la Commission a pu valablement fixer un tel montant sans devoir prendre en compte l’impact concret de l’entente.

144    À cet égard, il convient de rappeler que, dans un premier temps, la Commission a déterminé un montant de départ qu’elle a fixé à 40 000 000 euros, compte tenu à la fois du fait qu’elle qualifiait les infractions retenues de « très graves », de l’étendue géographique du marché concerné et de sa valeur (voir point 72 supra).

145    Sur la base de ce montant de départ, la Commission a appliqué un traitement différencié à chacun des participants à l’entente en prenant en compte la part qu’occupait chacun d’eux dans le marché du bitume de pénétration pour l’Espagne en 2001, c’est-à-dire la dernière année complète de l’infraction (considérants 511 à 515 de la décision attaquée).

146    Ainsi, la Commission a procédé au classement en trois catégories des participants à l’entente, estimant, notamment, que le montant de départ pour le calcul de l’amende, fixé à 40 000 000 euros, devait s’appliquer pleinement à Repsol et à PROAS, dont les parts de marché étaient estimées entre 31,67 % et 34,04 % (considérants 514 à 515 de la décision attaquée).

147    C’est donc sur la base d’un montant de 40 000 000 euros, équivalant au montant de départ, que la Commission s’est ensuite fondée pour calculer le montant de l’amende due par la requérante.

148    La Commission a ainsi augmenté ce montant pour tenir compte de la durée de la participation de PROAS à l’infraction et de son rôle de meneur. Pour finir, elle a réduit le montant de l’amende sur le fondement de la communication de 2002, parvenant alors à un montant final de 83 850 000 euros.

149    À cet égard, il y a lieu de constater, en premier lieu, que l’infraction en cause a été qualifiée de « très grave » par la Commission et, ainsi qu’il ressort du point 135 du présent arrêt, que la requérante n’a pas établi que cette qualification était erronée.

150    En deuxième lieu, en ce qui concerne l’étendue géographique de l’infraction, il n’est pas contesté que l’infraction en cause se rapporte au bitume de pénétration vendu en Espagne (à l’exception des îles Canaries).

151    Sur ce point, la requérante n’établit pas qu’un tel marché ne serait pas de dimension nationale.

152    Or, il ressort de la jurisprudence qu’un marché géographique de dimension nationale correspond à une partie substantielle du marché commun (arrêt de la Cour du 9 novembre 1983, Nederlandsche Banden-Industrie-Michelin/Commission, 322/81, Rec. p. 3461, point 28 ; arrêts du Tribunal du 27 juillet 2005, Brasserie nationale e.a./Commission, T‑49/02 à T‑51/02, Rec. p. II‑3033, point 176, et Groupe Danone/Commission, précité, point 150).

153    En troisième lieu, il est constant que la valeur totale du marché espagnol du bitume de pénétration a représenté 286 400 000 euros en 2001, dernière année complète de l’infraction en cause. Il est également constant que les ventes de PROAS concernant le bitume espagnol étaient en 2001 de 90 700 000 euros, soit 31,67 % du marché concerné.

154    Au regard de ce pourcentage et de ces deux montants, ainsi que de la gravité de l’infraction et de l’étendue du marché géographique concerné, le montant de 40 000 000 euros appliqué à la requérante pour servir de base au calcul du montant de l’amende n’apparaît pas disproportionné.

155    Ensuite, la requérante n’établit pas l’existence d’une erreur affectant les éléments pris en compte par la Commission pour moduler le montant de départ de l’amende qui lui a été infligée et parvenir à son montant final, que ce soit lorsque la Commission a augmenté le montant de l’amende compte tenu du fait que PROAS avait participé à l’infraction pendant une période de onze ans et sept mois, lorsqu’elle a majoré ensuite de 30 % ce montant en raison du rôle de meneur de l’infraction de PROAS (voir sur ce dernier point l’examen du quatrième moyen) ou lorsqu’elle a réduit le montant de l’amende sur le fondement de la communication de 2002 (voir sur ce dernier point l’examen du cinquième moyen).

156    Au regard de l’ensemble des éléments pris en compte par la Commission, le montant final de l’amende appliqué à la requérante, soit 83 850 000 euros, n’apparaît pas disproportionné.

157    Dès lors, la Commission a pu valablement fixer un tel montant sans devoir prendre en compte l’impact concret de l’entente.

158    Ainsi, à supposer même établie l’absence d’impact concret de l’entente sur le marché en cause, celle-ci ne saurait conduire le Tribunal à réformer le montant de l’amende.

159    Il convient de préciser à cet égard, qu’en invoquant la situation particulière du secteur du bitume, la requérante se prévaut, en substance, de l’absence d’impact concret de l’entente sur le marché en cause, grief auquel il vient d’être répondu.

160    En tout état de cause, les circonstances invoquées à ce titre par la requérante relèveraient, à les supposer avérées, des risques inhérents à toute activité économique qui, en tant que tels, ne caractériseraient pas une situation structurelle ou conjoncturelle exceptionnelle susceptible d’être prise en compte pour la fixation du montant de l’amende (voir, en ce sens, arrêt Groupe Danone/Commission, précité, point 414).

161    Enfin, il a été jugé que la pratique décisionnelle antérieure de la Commission ne sert pas de cadre juridique applicable aux amendes en matière de droit de concurrence et que des décisions concernant d’autres affaires n’ont qu’un caractère indicatif en ce qui concerne l’existence de discriminations (voir arrêt de la Cour du 19 avril 2012, Tomra Systems e.a./Commission, C‑549/10 P, non encore publié au Recueil, point 104, et la jurisprudence citée).

162    Ainsi, le fait que la Commission a imposé, dans le passé, des amendes se situant à un niveau déterminé pour certaines catégories d’infractions ne saurait l’empêcher de les fixer à un niveau plus élevé, si un relèvement des sanctions est jugé nécessaire afin d’assurer la mise en œuvre de la politique de concurrence de l’Union, celle-ci restant uniquement définie par le règlement n° 1/2003 (voir arrêt Tomra Systems e.a./Commission, précité, point 105, et la jurisprudence citée).

163    La Cour a, en effet, souligné que la mise en œuvre de ladite politique exige que la Commission puisse adapter le niveau du montant des amendes en fonction des impératifs de la politique en la matière (voir arrêt de la Cour du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80 à 103/80, Rec. p. 1825, point 109).

164    Par suite, la requérante ne saurait utilement se prévaloir de décisions antérieures adoptées par la Commission en matière de concurrence pour obtenir une réduction du montant de l’amende qui lui a été appliqué.

165    En conséquence, le second grief invoqué par la requérante doit être écarté.

166    Il résulte de tout ce qui précède qu’aucun des griefs présentés par PROAS dans le cadre du présent moyen n’est fondé et que, par suite, celui-ci doit être écarté.

3.     Sur le troisième moyen, pris de l’erreur commise dans la détermination du chiffre d’affaires pertinent de PROAS aux fins du calcul du montant de l’amende

167    Dans le cadre du présent moyen, PROAS développe trois griefs, tirés, le premier, de la prise en considération du seul bitume de pénétration, le deuxième, de l’omission des chiffres de ventes intragroupe de bitume de Repsol à Composán Distribución, SA (ci-après « Composán ») et le troisième, de la prise en compte d’un exercice commercial dépourvu de pertinence.

168    Il convient d’examiner successivement chacun de ces trois griefs.

a)     Sur le premier grief, tiré de la prise en considération du seul bitume de pénétration

 Arguments des parties

169    PROAS expose que l’entente a réparti entre les participants la totalité du bitume, que ce bitume ait été commercialisé sous la forme de bitume de pénétration, d’émulsions ou encore de bitumes modifiés. Pour évaluer le poids spécifique de chacun des membres du cartel en cause, la Commission aurait dû prendre en considération les quotas alloués à Repsol et à PROAS dans le cadre de l’entente à raison, respectivement, de 50,3 % et de 39,7 %, quotas qui incluaient la totalité du bitume. Les volumes assignés à chaque participant auraient toujours été attribués en se basant sur ces parts théoriques.

170    La Commission aurait cependant évalué le poids relatif de PROAS dans l’entente en se fondant sur la part de 31,67 % du seul marché du bitume de pénétration routier réalisée par PROAS au titre de l’exercice commercial 2001. Cette part de marché aurait alors placé PROAS dans la première catégorie d’entreprises définie aux fins de la détermination du montant initial de l’amende (40 000 000 euros), aux côtés de Repsol, dont la part de ce marché a été estimée par la Commission à 34,04 %.

171    PROAS estime que cette part de marché ne saurait en aucune manière refléter son poids spécifique, ni sur le marché du bitume ni dans sa participation à l’infraction au cours des années concernées par l’entente.

172    La Commission soutient que le présent grief doit être écarté.

 Appréciation du Tribunal

173    Le présent grief porte sur le fait que la Commission, aux fins de la détermination du montant de l’amende, a évalué le poids spécifique de chaque entreprise dans l’entente, en premier lieu, en ne prenant en compte que le bitume de pénétration et, en second lieu, en se référant aux ventes réelles réalisées par chaque entreprise et non aux quotas théoriques alloués dans le cadre de l’entente.

174    Il convient d’examiner successivement chacun de ces deux arguments.

175    En premier lieu, selon le considérant 15 de la décision attaquée, le marché sectoriel à prendre en considération est celui du bitume de pénétration qui n’a pas subi de transformation supplémentaire et qui est utilisé pour la construction et l’entretien des routes, produit auquel il est fait référence dans le présent arrêt sous les appellations « bitume de pénétration » ou « bitume » (voir point 5 ci-dessus).

176    Or, cette délimitation du marché sectoriel en cause n’a pas, en tant que telle, été contestée par PROAS.

177    Par suite, dans la mesure où le marché pertinent est celui du seul bitume de pénétration, il appartenait à la Commission, ainsi qu’elle l’a fait aux considérants 513 à 515 de la décision attaquée, de se fonder sur ledit marché, et non sur un marché plus large, pour déterminer la capacité économique effective des entreprises concernées à porter un préjudice à la concurrence.

178    À cet égard, il convient de rappeler que la Cour a jugé que, pour la détermination du montant de l’amende, il pouvait être tenu compte d’un grand nombre d’éléments dont le caractère et l’importance variaient selon le type d’infraction en cause et les circonstances particulières de l’infraction concernée. Parmi ces éléments pouvaient, notamment, figurer le volume et la valeur des marchandises faisant l’objet de l’infraction (arrêt Musique Diffusion française e.a./Commission, précité, points 120 et 129, et arrêt du Tribunal du 21 octobre 1997, Deutsche Bahn/Commission, T‑229/94, Rec. p. II‑1689, point 127).

179    En particulier, l’analyse opérée en vue de fixer le montant d’une amende pour infraction aux règles de concurrence de l’Union peut se fonder sur la capacité économique effective des entreprises concernées à porter un préjudice à la concurrence. Or, celle-ci implique une appréciation de l’importance réelle de ces entreprises sur le marché affecté, c’est-à-dire de leur influence sur celui-ci (arrêts du Tribunal du 9 juillet 2003, Cheil Jedang/Commission, T‑220/00, Rec. p. II‑2473, point 88, et du 29 novembre 2005, Union Pigments/Commission, T‑62/02, Rec. p. II‑5057, point 152).

180    En tout état de cause, il ne saurait être fait grief à la Commission, dans le cadre du présent recours, de ne pas avoir retenu un marché plus large que celui du bitume de pénétration. En effet, un tel argument, à le supposer fondé, ne saurait avoir une quelconque influence sur la légalité de la décision attaquée, puisqu’il ne permet pas de mettre en cause la constatation de l’existence d’une infraction relative au bitume de pénétration sur laquelle se fonde ladite décision (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 27 septembre 2012, Vermeer Infrastructuur/Commission, T‑353/06, non publié au Recueil, point 172).

181    Au demeurant, si le Tribunal entendait, dans le cadre du présent litige, lequel porte sur une infraction à l’article 81 CE, juger, ne serait-ce qu’en vue d’une réduction du montant de l’amende, que la Commission, eu égard aux preuves à sa disposition, aurait dû établir l’existence d’une infraction portant sur un marché plus large que celui qu’elle a retenu, il statuerait au-delà de ce que sa compétence d’annulation, laquelle est limitée à l’infraction retenue dans la décision attaquée, ainsi que sa compétence de pleine juridiction, laquelle ne lui permet pas de constater l’existence d’infractions non retenues par la Commission dans la décision attaquée, l’autorisent à accomplir (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Tokai Carbon e.a./Commission, T‑71/03, T‑74/03, T‑87/03 et T‑91/03, non publié au Recueil, point 370).

182    Il résulte de ce qui précède que la Commission a pu, à bon droit, utiliser, pour déterminer le poids respectif de Repsol et de PROAS dans l’entente, la valeur des ventes du seul produit qu’elle avait retenu pour délimiter l’infraction en cause, c’est-à-dire le bitume de pénétration.

183    En second lieu, les parts de marché détenues par une entreprise sur le marché en cause constituent un élément pertinent pour déterminer la capacité économique effective de cette entreprise à porter un préjudice à la concurrence, laquelle implique une appréciation de l’importance réelle de cette entreprise sur le marché affecté, c’est-à-dire de son influence sur celui-ci (arrêts Cheil Jedang/Commission, précité, point 88, et Union Pigments/Commission, précité, point 152).

184    Par suite, la Commission a pu, à bon droit, prendre en considération, non pas les quotas théoriques de répartition du marché, tels que déterminés dans le cadre de l’entente, mais les parts du marché en cause réellement détenues par les membres de cette entente.

185    En outre, en se fondant sur lesdites parts de marché, la Commission s’est conformée au point 1 A, sixième alinéa, des lignes directrices de 1998, dont il se déduit que la pondération du montant des amendes déterminé à l’intérieur de chacune des trois catégories d’infractions établies en fonction de la gravité de ces dernières vise à tenir compte du poids spécifique et, par conséquent, de l’impact réel du comportement infractionnel de chaque entreprise sur la concurrence.

186    À cet égard, il convient de préciser qu’il a été jugé que, même en l’absence de preuve d’une incidence concrète de l’infraction sur le marché, la Commission est en droit de procéder à un traitement différencié en fonction des parts détenues sur le marché concerné. En effet, la part de marché de chacune des entreprises concernées sur le marché ayant fait l’objet d’une pratique restrictive constitue un élément objectif qui donne une juste mesure de la responsabilité de chacune en ce qui concerne la nocivité potentielle de ladite pratique pour le jeu normal de la concurrence (voir arrêt du Tribunal du 6 mai 2009, KME Germany e.a./Commission, T‑127/04, Rec. p. II‑1167, points 61 et 62, et la jurisprudence citée).

187    En conséquence, la Commission n’a pas erronément pris en compte, pour déterminer le poids individuel de Repsol et de PROAS, leur part respective du marché en cause plutôt que les quotas qui leur avaient été respectivement alloués dans le cadre de l’entente.

188    Il résulte de tout ce qui précède que c’est à tort que PROAS reproche à la Commission de ne pas avoir pris en considération, pour évaluer son poids spécifique et celui de Repsol dans l’entente, les quotas de 39,7 % et de 50,3 %, relatifs à la totalité du bitume et non au seul bitume de pénétration, respectivement alloués chaque année à ces deux entreprises dans le cadre de l’entente.

189    Le présent grief doit donc être écarté.

b)     Sur le deuxième grief, tiré de l’omission des chiffres de ventes intragroupe de bitume de Repsol à Composán

 Arguments des parties

190    PROAS relève que le bureau de l’asphalte créditait Composán, client de Repsol depuis 1990, d’un volume de ventes annuel de quelque 120 000 tonnes au titre de sa production d’émulsions, soit l’équivalent de quelque 70 000 tonnes de bitume, représentant une part du marché du bitume de 6 à 7 % au titre de l’exercice commercial 1997.

191    Composán faisant désormais partie de son groupe, Repsol aurait cessé depuis 1998 de prendre en considération le bitume qu’elle lui vendait au titre des ventes intragroupe. Or, au moins une partie importante de ces ventes aurait continué d’être écoulée sur le marché et le bureau de l’asphalte aurait continué à les inclure dans les quantités assignées à Repsol.

192    Dès lors que les ventes intragroupe n’ont pas été prises en considération par la décision attaquée, la part de marché de Repsol aurait été réduite artificiellement et celle de PROAS majorée d’autant. Dans ces circonstances, la véritable situation de PROAS, subordonnée dans la conduite du cartel à celle de Repsol pendant toute la période de l’entente, ne serait pas correctement reflétée, du fait de la diminution de plus de huit points de pourcentage de la part réelle de Repsol.

193    Selon le tableau intitulé « Quotas du marché espagnol » (Cuotas mercado España), reproduit à la page 57 du mémoire en défense, la valeur retenue comme « marché total de l’asphalte » inclut l’asphalte contenu dans les émulsions et le bitume modifié. Or, ce tableau ne préciserait pas si, pour le calcul des données relatives aux ventes des différentes entreprises du groupe, le même critère a été ou non suivi.

194    En outre, le tableau intitulé « Chiffre d’affaires sur l’Espagne par entreprises et types de produit » (Facturación en España por empresas y tipo de producto) figurant à la page 58 du mémoire en défense, qui se réfère aux ventes facturées, ne mentionnerait nullement cet aspect et, en revanche, ajouterait un nouveau critère omis dans le premier tableau : les relations entre les entreprises du groupe.

195    Enfin, dans un troisième tableau intitulé « Valeur du marché espagnol 1997‑2002 » (Valor mercado español 1997-2002) repris à la page 59 du mémoire en défense, figurerait une nouvelle note qui, répondant à un critère opposé à celui utilisé dans le premier tableau, indiquerait que, dans le marché de l’asphalte, le bitume contenu dans des émulsions et le bitume modifié ne sont pas inclus afin d’éviter des doublons, question non abordée dans le premier tableau.

196    PROAS se déclare incapable de trouver la raison de cette incohérence, puisque Repsol ne précise pas les critères utilisés pour l’élaboration des tableaux susvisés. On ne saurait déterminer clairement si les ventes de Repsol indiquées dans le premier tableau, premièrement, englobent ou n’englobent pas le bitume utilisé pour les émulsions et le bitume modifié, la note au tableau semblant ne faire référence qu’aux données du marché total de l’asphalte, et, deuxièmement, si elles ne tiennent pas compte des ventes entre entreprises du groupe, comme le spécifie le tableau concernant les ventes facturées, ou si elles les incluent.

197    Par conséquent, étant donné que la seule explication fournie par la Commission pour justifier le calcul des parts de marché réside dans les données de Repsol et qu’aucune conclusion ne peut en être tirée, l’attitude de la Commission serait clairement constitutive d’une atteinte aux droits de la défense de PROAS.

198    Par ailleurs, PROAS a présenté, par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 20 décembre 2007, parallèlement à sa requête introductive d’instance, une demande de mesures d’organisation de la procédure au titre de l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal.

199    PROAS y relève qu’elle a adressé le 29 janvier 2007 au conseiller auditeur de la Commission une lettre remettant en cause l’affirmation formulée par Repsol au cours de l’audition du 12 décembre 2006, selon laquelle PROAS aurait été le meneur du marché en 1998 et en 1999.

200    Afin de déterminer si la Commission n’a pas méconnu, outre les droits de la défense de PROAS, les principes de proportionnalité et d’égalité de traitement dans son calcul du montant de l’amende infligée, PROAS sollicite l’adoption de mesures d’organisation de la procédure permettant d’apprécier si la Commission a évalué correctement les informations fournies par PROAS et, le cas échéant, toute autre pièce que Repsol aurait produite à cet égard, évaluations dont il n’a pas été fait état à PROAS.

201    Pour ce motif, PROAS conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        « invite[r] la Commission à se prononcer sur la portée qu’elle a accordée aux informations fournies par PROAS, Repsol ou par une autre partie [concernant les ventes de bitume de pénétration de Repsol à Composán] ;

–        somme[r] la Commission de présenter les documents pertinents relatifs à cette question en garantissant l’accès de PROAS à ceux-ci, afin que la requérante soit en mesure d’exercer pleinement ses droits de la défense ;

–        déclare[r], dès à présent et pour le futur, que la décision [attaquée] est invalide au regard de ce motif, en ce qui concerne, notamment, le montant de base de l’amende infligée à PROAS ou, à titre subsidiaire, [réduire] ce montant ».

202    La Commission soutient que le présent grief doit être écarté et que les demandes de mesures d’organisation de la procédure soient rejetées.

 Appréciation du Tribunal

203    Par son grief, la requérante reproche, en substance, à la Commission de ne pas avoir pris en compte les ventes de bitume de Repsol à Composán, ce qui aurait minoré de manière artificielle le poids de Repsol au sein de l’entente et aurait permis que Repsol et PROAS soient regroupées, ainsi qu’il résulte des considérants 513 à 515 de la décision attaquée, dans une même catégorie au regard de leur poids respectif au sein de cette entente, aux fins de la détermination du montant de l’amende à leur appliquer.

204    Il convient à cet égard de rappeler que la Commission, pour déterminer le poids respectif de chacune des entreprises ayant participé à l’entente, s’est fondée sur leur volume de vente pour le marché en cause au titre de l’exercice 2001.

205    Or, ainsi qu’il résulte de la réponse apportée au troisième grief du présent moyen, la requérante n’a pas établi que la Commission aurait choisi à tort cet exercice pour évaluer le poids respectif de chacun des participants à l’entente.

206    Ensuite, il ressort des pièces du dossier et, en tout état de cause, il n’a pas été contesté, que Composán avait cessé d’exister depuis 1999 et que son patrimoine avait été repris par RPA/Rylesa.

207    Ainsi, il n’était pas possible, en toute hypothèse, pour la Commission, de prendre en compte, au titre de l’exercice 2001, les ventes de Repsol à Composán.

208    La conclusion qui précède n’est pas susceptible d’être remise en cause par les arguments que la requérante tire de la comparaison de trois des tableaux annexés au mémoire en défense, lesquels ne concernent pas l’existence juridique de Composán.

209    À supposer même que la requérante entende invoquer, par ces arguments, une absence de cohérence entre les tableaux communiqués par Repsol sur la base desquels la Commission a déterminé le volume des ventes de celle-ci pour l’exercice 2001 dans le cadre du marché litigieux, un tel grief devrait être considéré comme nouveau. Or, ce grief ne se fonde pas sur des éléments nouveaux qui se seraient révélés au cours de la procédure juridictionnelle, puisque c’est la version non confidentielle de ces tableaux qui a été annexée au mémoire en défense et qu’il est constant que cette version non confidentielle se trouvait déjà dans le dossier de la procédure administrative. Ce grief ne constitue pas non plus une ampliation d’un grief énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et présentant un lien étroit avec celui-ci.

210    Ainsi, ce grief devrait être écarté comme irrecevable.

211    Par ailleurs, la requérante ne développe aucune argumentation spécifique relative à d’autres sociétés appartenant au groupe Repsol, en particulier Petronor et Asfalnor.

212    En tout état de cause, concernant Petronor, le volume des ventes de bitume réalisé par cette société en 2001 a été pris en compte pour déterminer le poids de Repsol dans l’entente (considérant 26 de la décision attaquée).

213    Ensuite, concernant Asfalnor, le volume des ventes de bitume réalisé par cette société en 2001 n’a pas été pris en compte pour déterminer le poids de Repsol dans l’entente. Cependant, il n’est pas contesté qu’Asfalnor ne vendait plus de bitume à des « parties non liées » depuis 1999 (considérant 26 de la décision attaquée). Par suite, ses ventes ont été nécessairement prises en compte dans la décision attaquée à travers les ventes de bitume réalisées par les autres sociétés du groupe Repsol ayant participé à l’entente, c’est-à-dire RPA/Rylesa et Petronor.

214    Le grief de la requérante doit donc être écarté, sans qu’il soit besoin de faire droit aux premier et deuxième chefs de la demande de mesures d’organisation de la procédure, lesquels se rapportent à ce grief.

215    Il convient d’ajouter que le Tribunal est en mesure de constater, sans qu’il soit davantage besoin d’accueillir les premier et deuxième chefs de la demande de mesures d’organisation de la procédure présentée par PROAS, que la Commission n’a pas méconnu, en rapport avec ce grief, les principes de proportionnalité et d’égalité de traitement.

216    Enfin, la requérante s’est désistée lors de l’audience du troisième chef de sa demande, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience.

217    Il y a donc lieu de rejeter dans son intégralité la demande de mesures d’organisation de la procédure.

c)     Sur le troisième grief, tiré de la prise en compte d’un exercice commercial dépourvu de pertinence

 Arguments des parties

218    PROAS fait valoir que ses résultats au titre de l’exercice commercial 2001 ont été exceptionnellement bons par rapport aux autres années de la période infractionnelle, contrairement à ceux de Repsol, qui furent exceptionnellement mauvais. Toutes les parts du marché du bitume détenues par Repsol mentionnées dans les considérants 154, 213, 255, 259, sous b), 261, 267 et 282 de la décision attaquée, à l’exception, précisément, de celle qui sert de référence au calcul du montant de base de l’amende, seraient largement supérieures à celles de PROAS.

219    La Commission aurait donc dû, pour évaluer le poids spécifique de PROAS dans le cartel, se fonder sur une période différente de celle retenue pour les autres participants à l’entente, étant donné que son chiffre d’affaires anormalement élevé en 2001 ne constituait pas une indication de sa véritable taille et de sa puissance économique, ni de la gravité de l’infraction qu’elle a commise.

220    En tout état de cause, la Commission aurait dû tenir compte des parts de marché de toutes les années antérieures (50,3 % pour Repsol, 39,7 % pour PROAS, 10 % pour BP), qui était le critère retenu par le cartel ou, subsidiairement, de la moyenne ou de l’évolution des parts de marché pendant la durée du cartel, comme elle l’a déjà fait en d’autres occasions. Faute d’avoir procédé ainsi, la Commission aurait infligé à PROAS une amende d’un montant excessif au regard de son véritable poids spécifique dans l’entente.

221    PROAS demande à titre subsidiaire au Tribunal de remédier, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, aux conséquences de l’erreur d’appréciation commise par la Commission et de réduire à due concurrence le montant de l’amende que la Commission lui a infligée. PROAS conclut à ce que le Tribunal fixe le montant de départ de son amende dans une catégorie inférieure ou, le cas échéant, réduise ce montant de départ à l’intérieur de cette première catégorie, au regard de sa véritable position sur le marché du bitume de pénétration espagnol pendant la période de l’infraction.

222    La Commission soutient que le présent grief doit être écarté.

 Appréciation du Tribunal

223    Dans la mesure où il y a lieu de se fonder sur le chiffre d’affaires des entreprises impliquées dans une même infraction en vue de déterminer les relations entre le montant des amendes à infliger, il convient de délimiter la période à prendre en considération de manière à ce que les chiffres obtenus soient aussi comparables que possible. Il en résulte qu’une entreprise déterminée ne saurait exiger que la Commission se fonde, à son égard, sur une période différente de celle généralement retenue qu’à condition qu’elle démontre que le chiffre d’affaires qu’elle a réalisé au cours de cette dernière période ne constitue pas, pour des raisons qui lui sont propres, une indication de sa véritable taille et de sa puissance économique ni de l’ampleur de l’infraction qu’elle a commise (voir arrêt du Tribunal du 30 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, T‑175/05, non publié au Recueil, point 142, et la jurisprudence citée).

224    Il ressort également de la jurisprudence que la prise en compte du chiffre d’affaires réalisé par chacune des entreprises au cours de l’année de référence, à savoir la dernière année complète de la période d’infraction retenue, permet d’apprécier la taille et la puissance économique de chaque entreprise ainsi que l’ampleur de l’infraction commise par chacune d’entre elles, ces éléments étant pertinents pour apprécier la gravité de l’infraction commise par chaque entreprise (voir arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, précité, point 143, et la jurisprudence citée).

225    En l’espèce, il convient tout d’abord de relever que PROAS a soutenu elle-même au point 95 de sa requête avoir subi des pertes significatives, précisément au cours de l’exercice commercial 2001, au motif qu’elle n’aurait pas pu répercuter la hausse de prix imposée par l’évolution du coût de la matière première. Une telle circonstance contredit donc l’allégation de la requérante quant à l’existence de résultats exceptionnels au titre de l’exercice commercial 2001.

226    En tout état de cause, il convient de rappeler que ce ne sont pas les résultats des entreprises concernées au titre de l’exercice commercial 2001 qui ont été pris en compte par la Commission pour le calcul du montant de l’amende, mais leurs parts de marché. Ainsi, l’argument de la requérante ne serait susceptible d’avoir une incidence sur le calcul du montant de l’amende que dans la mesure où les résultats exceptionnels de PROAS au titre de l’exercice commercial 2001, dont la requérante se prévaut, se seraient traduits par une part de marché accrue.

227    À cet égard, il n’est pas contesté par la requérante que, dans sa réponse du 18 décembre 2005 à une demande de renseignements, PROAS a donné une estimation, pour l’exercice commercial 2001, de sa part du marché espagnol du bitume de pénétration, cette estimation figurant à la page 1213 du dossier d’instruction tenu par la Commission.

228    Or, ladite page, jointe en annexe B 2 du mémoire en défense, fait apparaître que les parts détenues par PROAS sur le marché espagnol du bitume de pénétration s’établissent comme suit au cours de la période infractionnelle :

Exercices

Parts de marché

1997

33,0 %

1998

41,6 %

1999

41,8 %

2000

31,3 %

2001

30,6 %

2002

31,2 %


229    Il ne ressort nullement du tableau ci-dessus que la part du marché en cause revenant à PROAS en 2001 ait été anormalement élevée. Il apparaît au contraire qu’elle est la plus faible de toutes les parts de marché rapportées par PROAS.

230    En conséquence, PROAS n’a pas démontré que la Commission aurait dû, pour évaluer son poids spécifique dans le cartel, retenir un exercice commercial différent de celui retenu pour les autres participants à l’entente.

231    Au surplus, ainsi qu’il a été dans le cadre de l’examen du premier grief du présent moyen, la Commission n’a pas erronément pris en compte, pour déterminer le poids individuel des participants à l’entente, leur part respective du marché en cause plutôt que les quotas qui leur avaient été respectivement alloués dans le cadre de l’entente.

232    En effet, ces quotas, outre leur caractère théorique, se rapportent, par ailleurs, à la totalité du bitume (bitume de pénétration, émulsions et bitume modifié). Leur pertinence est donc limitée aux fins d’apprécier la capacité économique effective de PROAS à causer un préjudice grave à la concurrence s’agissant du marché du bitume de pénétration.

233    Il convient également de relever que, si la Commission fait référence aux quotas en cause dans la décision attaquée, ce n’est pas aux fins du calcul du montant de l’amende, mais dans le cadre de la présentation des faits constitutifs de l’infraction. C’est donc à tort que la requérante relève, à cet égard, l’existence d’une incohérence dans la décision attaquée.

234    Il résulte des considérations qui précèdent que le présent grief et, partant, l’ensemble du troisième moyen doivent être écartés.

4.     Sur le quatrième moyen, pris de l’erreur entachant la qualification attribuée à PROAS de « meneur » aux côtés de Repsol

a)     Arguments des parties

235    PROAS conteste la qualification de « force motrice » du cartel que le considérant 535 de la décision attaquée lui a attribuée aux côtés de Repsol et qui lui a valu une majoration de 30 % du montant de l’amende au titre des circonstances aggravantes. Comme il ressortirait des éléments de preuve obtenus par la Commission, les membres du cartel auraient été contraints d’obéir aux instructions de Repsol, véritable chef de file et meneur du marché, aux décisions de laquelle PROAS se contentait de souscrire.

236    Dans sa lettre du 24 mars 2004 à la Commission, BP aurait indiqué que Repsol était normalement l’entreprise qui prenait l’initiative des propositions de répartition du marché et de fixation des prix à débattre au cours des réunions et que Repsol était suivie par PROAS. BP aurait également affirmé que M. P., employé de Repsol, convoquait et présidait habituellement ces réunions et que Repsol elle-même était responsable de l’adoption des conclusions et de la rédaction du résumé à l’issue de ces réunions.

237    Repsol aurait décidé des augmentations ou des diminutions des prix du bitume et, le cas échéant, de leur montant, contrairement à PROAS et aux autres participants, qui devaient toujours s’assurer de l’approbation de Repsol avant de décider une augmentation ou une réduction donnée des prix (considérants 301, 310, 311, 313 et 316 de la décision attaquée). Seraient significatives à cet égard les pertes que PROAS a subies en 2001, faute de pouvoir répercuter la hausse de prix imposée par l’évolution du coût de la matière première, mais non autorisée par Repsol sous la pression de l’administration espagnole.

238    Dans un courrier du 15 mars 1994, évoqué au considérant 310 de la décision attaquée, BP déclarerait ne pas pouvoir augmenter les prix du bitume en raison de la réponse négative de Repsol. Il ressortirait d’un autre courrier de BP, daté du 4 avril 2000, et repris au point 313 de la décision attaquée, que les participants à l’entente avaient augmenté les prix, mais que, par la suite, ils se sont vus contraints de les réduire dans la mesure où Repsol avait indiqué qu’elle appliquerait une augmentation moindre que celle qui avait été initialement convenue.

239    Les autres opérateurs du marché n’auraient été en mesure de procéder à une réduction du prix du bitume qu’au moment où Repsol appliquait celle-ci (considérant 311 de la décision attaquée). Le considérant 316 de la décision attaquée refléterait la manière dont, selon Repsol, les modifications de prix devaient être appliquées, c’est-à-dire à raison d’un montant exactement ou pratiquement identique à celui annoncé par Repsol (considérant 317 de la décision attaquée).

240    Qui plus est, Repsol aurait été en mesure d’allouer elle-même unilatéralement des quotas aux membres de l’entente sans consulter les autres membres, comme cela ressort de la note interne de BP du 30 octobre 1991, selon laquelle Repsol a assigné un quota à un importateur établi par Nynäs sans consulter BP (considérant 201 de la décision attaquée).

241    PROAS demande donc au Tribunal de supprimer la majoration de 30 % du montant de base de l’amende motivée par la circonstance aggravante du rôle de meneur dans le cadre qui lui a été erronément attribué ou, subsidiairement, de prononcer une majoration inférieure.

242    La Commission soutient que le présent moyen doit être écarté.

b)     Appréciation du Tribunal

243    Lorsqu’une infraction a été commise par plusieurs entreprises, il y a lieu, dans le cadre de la détermination du montant des amendes, d’examiner la gravité relative de la participation de chacune d’entre elles (arrêt de la Cour du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, Rec. p. I‑123, point 92), ce qui implique, en particulier, d’établir leurs rôles respectifs dans l’infraction pendant la durée de leur participation à celle-ci (arrêt de la Cour du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, Rec. p. I‑4125, point 150).

244    Il en résulte, notamment, que le rôle de « chef de file » joué par une ou plusieurs entreprises dans le cadre d’une entente doit être pris en compte aux fins du calcul du montant de l’amende, dans la mesure où les entreprises ayant joué un tel rôle doivent, de ce fait, porter une responsabilité particulière par rapport aux autres entreprises (arrêt du Tribunal du 15 mars 2006, BASF/Commission, T‑15/02, Rec. p. II‑497, point 281).

245    Conformément à ces principes, le point 2 des lignes directrices de 1998 établit, sous le titre « Circonstances aggravantes », une liste non exhaustive de circonstances pouvant conduire à une augmentation du montant de l’amende et comprenant, au point 2, troisième tiret, des lignes directrices de 1998, le rôle de « meneur » de l’infraction (arrêt BASF/Commission, précité, point 282).

246    À cet égard, il convient de relever que le fait pour une entreprise d’exercer des pressions, voire de dicter le comportement des autres membres de l’entente, n’est pas une condition nécessaire pour que cette entreprise puisse être qualifiée de meneur de l’entente. Il suffit, en effet, que l’entreprise ait représenté une force motrice significative pour l’entente, ce qui peut être inféré notamment du fait qu’elle s’est chargée d’élaborer et de suggérer la conduite à tenir par les membres de l’entente, alors même qu’elle n’était pas nécessairement en mesure de la leur imposer (arrêt BASF/Commission, précité, point 282).

247    Ainsi, une entreprise peut être qualifiée de meneur de l’entente si elle a porté une responsabilité particulière et concrète dans le fonctionnement de celle-ci (arrêt du Tribunal du 8 septembre 2010, Deltafina/Commission, T‑29/05, Rec. p. II‑4077, point 332).

248    La qualification de meneur de l’entente a notamment été retenue lorsqu’il a été établi que l’entreprise en cause avait joué un rôle central dans le fonctionnement concret de l’entente, par exemple en organisant de nombreuses réunions, en collectant et en distribuant les informations au sein de l’entente, en se chargeant de représenter certains membres dans le cadre de l’entente ou en formulant le plus souvent des propositions relatives au fonctionnement de l’entente (voir, en ce sens, arrêt BASF/Commission, précité, point 404).

249    Enfin, deux entreprises, voire un plus grand nombre, peuvent se voir simultanément attribuer la qualité de meneur (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal BASF/Commission, précité, points 439 et 440, et du 26 avril 2007, Bolloré e.a./Commission, T‑109/02, T‑118/02, T‑122/02, T‑125/02, T‑126/02, T‑128/02, T‑129/02, T‑132/02 et T‑136/02, Rec. p. II‑947, point 561).

250    En l’espèce, les divers éléments de conviction sur lesquels la Commission s’est fondée pour qualifier PROAS, conjointement à Repsol, de meneur de l’entente sont décrits au considérant 534 de la décision attaquée puis font l’objet, au considérant 535 de ladite décision, d’un résumé, duquel il ressort, notamment, ce qui suit :

« Compte tenu de ce qui précède, la Commission conclut que tant Repsol que PROAS ont été des moteurs importants du cartel, étant donné qu’elles […] ont négocié bilatéralement et séparément avec les autres participants de l’entente les volumes et les clients devant leur être attribués dans leurs zones d’influence respectives, sont convenues bilatéralement des variations de prix et de leur période de mise en œuvre et ont ensuite communiqué aux autres opérateurs du marché les accords convenus. »

251    Or, il n’est pas contesté par la requérante que Repsol et PROAS ont été les seules entreprises à participer à l’ensemble des six phases décrites au considérant 130 de la décision attaquée, lesquelles conduisaient à l’adoption des accords annuels de répartition du marché et de partage de la clientèle, BP n’étant présente, au plus, qu’au cours des quatre premières phases, Petrogal et Nynäs ne l’étant qu’au cours de la dernière.

252    En tout état de cause, la requérante ne produit aucun élément établissant l’existence de contacts directs entre BP, Petrogal et Nynäs dans le cadre de l’adoption des accords annuels de répartition du marché et de partage de la clientèle.

253    Ainsi, les négociations de répartition du marché et de partage de la clientèle n’avaient pas lieu entre les cinq participants à l’entente, mais entre Repsol et PROAS d’un côté, et chacun des trois autres participants à l’entente de l’autre, lesquels au surplus n’intervenaient que pour leurs zones d’influence respectives.

254    Par suite, non seulement Repsol et PROAS ont joué un rôle central dans le fonctionnement concret de l’entente, mais leur participation était indispensable à celle-ci, puisque l’adoption des accords annuels de répartition du marché et de partage de la clientèle se réalisait sans que BP, Petrogal et Nynäs négocient directement entre elles.

255    Par ailleurs, s’agissant de la coordination des prix, il n’est pas contesté que c’était au cours de réunions tenues entre Repsol, PROAS et, dans une moindre mesure, BP que se décidaient les variations de prix, lesquelles étaient ensuite communiquées à Petrogal, à Nynäs et, le cas échéant, à BP, au cours de réunions bilatérales ou par téléphone, chacune de ces trois dernières entreprises prenant occasionnellement l’initiative de demander des modifications de prix (considérants 296 et 359 de la décision attaquée).

256    Par suite, là encore, la participation de Repsol et de PROAS a été indispensable pour assurer, pendant toute la durée de l’infraction, la mise en œuvre coordonnée des modifications de prix par les différents membres de l’entente.

257    Au regard des seuls éléments qui viennent d’être examinés, il y a lieu de conclure que la Commission a pu qualifier à bon droit PROAS de force motrice significative pour l’entente et, sans commettre d’erreur, majorer de 30 % le montant de l’amende qu’elle lui infligeait.

258    Ainsi, à supposer même que les autres éléments sur lesquels la Commission a fondé la majoration du montant de l’amende ne soient pas établis, celle-ci demeurerait justifiée.

259    Cependant, la requérante se prévaut de la circonstance que Repsol, qui s’est vu appliquer le même taux de majoration de l’amende que PROAS, aurait joué un rôle plus important que celle-ci dans l’entente.

260    À cet égard, il y a lieu pour le Tribunal, dans le cadre de son pouvoir de pleine juridiction, de relever, non seulement, que la Commission n’a pas commis d’erreur en majorant de 30 % le montant de l’amende imposée à PROAS, mais également que, eu égard à leur gravité, les éléments reprochés à PROAS qui viennent d’être examinés précédemment imposent une majoration du montant de l’amende qui ne saurait être inférieure à 30 %.

261    Dès lors, la circonstance que Repsol, qui s’est vu appliquer le même taux de majoration du montant de l’amende que PROAS, aurait joué un rôle plus important que cette dernière dans l’entente ne saurait utilement être invoquée par la requérante au soutien de ses conclusions aux fins de la suppression ou de la réduction de la majoration du montant de l’amende appliquée à PROAS.

262    En effet, une méconnaissance du principe d’égalité, tenant à l’existence d’un traitement égal appliqué à Repsol et à PROAS en matière de majoration du montant de l’amende alors que la situation de ces deux entreprises à cet égard serait différente, ne saurait imposer pour autant d’appliquer à PROAS une majoration du montant de l’amende qui serait insuffisante par rapport aux faits qui lui sont reprochés (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 14 mai 1998, SCA Holding/Commission, T‑327/94, Rec. p. II‑1373, point 160, et du 29 avril 2004, Tokai Carbon e.a./Commission, T‑236/01, T‑239/01, T‑244/01 à T‑246/01, T‑251/01 et T‑252/01, Rec. p. II‑1181, point 316).

263    Il y a lieu également de préciser qu’à supposer même que la requérante ait entendu se prévaloir de la circonstance que, eu égard au rôle prépondérant dans l’entente joué selon elle par Repsol, le rôle de meneur de PROAS aurait en réalité été imposé à celle-ci par Repsol, elle reste en défaut d’établir un tel fait.

264    Sur ce point, il convient de relever, en particulier, que l’argument de la requérante tiré des considérants 301 et 310 de la décision attaquée, considérants selon lesquels, lorsque Repsol n’acceptait pas la variation de prix proposée par l’un des participants à l’entente, cette variation n’était pas mise en œuvre, ne permet pas de conclure que Repsol aurait contraint PROAS à assurer, avec Repsol, la coordination de la mise en œuvre des modifications de prix par les différents membres de l’entente.

265    De même, le fait que BP indique dans un courrier que Repsol était normalement celle qui prenait l’initiative au sujet des propositions devant être discutées au cours des réunions de l’entente, tant en ce qui concerne la répartition du marché, que la fixation des prix, et que Repsol était suivie par PROAS, ne permet pas non plus d’établir que Repsol aurait contraint PROAS d’assurer le rôle de coordination qu’elle a joué au sein de l’entente.

266    Il résulte de ce qui précède que l’argumentation présentée par la requérante et tirée de la circonstance que Repsol, qui s’est vue appliquer le même taux de majoration du montant de l’amende que PROAS, aurait joué un rôle plus important que celle-ci dans l’entente doit être écartée.

267    En tout état de cause, cette argumentation manque en fait, le rôle prépondérant que Repsol aurait joué par rapport à PROAS dans l’entente n’étant pas établi.

268    Ainsi, s’agissant, en premier lieu, de la répartition du marché entre les membres du cartel, il découle de la demande de PROAS au titre de la communication de 2002 et de sa réponse du 18 novembre 2005 à une demande de renseignements que les coordinateurs de l’entente étaient un représentant de Repsol et un représentant de PROAS (considérant 145 de la décision attaquée). Selon la réponse de BP du 24 mars 2004 à une demande de renseignements, les réunions de l’entente étaient convoquées par Repsol et par PROAS (considérant 145 de la décision attaquée) et non pas seulement par Repsol, contrairement à ce que laisse entendre la requérante.

269    Dans sa réponse du 18 novembre 2005 à une demande de renseignements, PROAS a expliqué que des tableaux préparatoires découverts à son siège et fournissant des estimations pour 2002, par province et par client ou projet, des volumes de produit requis et du fournisseur de bitume envisagé, constituaient des études partielles à l’intention de ses équipes en vue de l’élaboration de tableaux complets et que les informations préparées par ses délégués commerciaux étaient ultérieurement vérifiées de concert avec Repsol (considérant 270 de la décision attaquée).

270    PROAS a précisé, dans cette même réponse, qu’un tableau interne préparé par ses soins reproduisait les projections en volumes effectuées par PROAS et Repsol pour l’exercice commercial 2002, par région, et que la colonne intitulée « Convenu » reflétait l’accord sur le marché total par région conclu entre Repsol et PROAS (considérant 271 de la décision attaquée).

271    Enfin, la capacité dont, selon PROAS, seule Repsol aurait disposé d’attribuer unilatéralement des parts de marché aux membres du cartel sans consulter les autres membres est démentie par le mémorandum interne de BP España de février 1992, selon lequel le marché national « comprend également un quota de 3,74 % pour Asfaltos europeos (Nynäs) par décision expresse de Repsol et [de] CEPSA » (considérant 206 de la décision attaquée).

272    S’agissant, en second lieu, de la coordination des prix, Repsol et PROAS ont elles-mêmes déclaré être convenues, entre 1991 et mai 2002, de « modifications génériques » du prix du bitume ou de modifications du prix de référence du bitume et de la date de leur application (considérant 295 de la décision attaquée) et avoir communiqué aux autres opérateurs du marché les accords sur les modifications des prix et la date de leur application au cours de réunions bilatérales ou par téléphone (considérant 296 de la décision attaquée).

273    Repsol a précisé que les modifications génériques des prix étaient normalement décidées bilatéralement, habituellement au cours d’un déjeuner commun des directeurs commerciaux de Repsol et de PROAS, qui informaient ensuite d’autres acteurs du marché des décisions prises concernant les prix (considérant 302 de la décision attaquée).

274    Comme la Commission le relève au considérant 312 de la décision attaquée, PROAS a confirmé, en réponse à une demande de renseignements, que les prix indiqués sur un de ses graphiques internes renvoyaient à un accord sur les prix conclu entre Repsol et PROAS.

275    Il résulte de tout ce qui précède que le présent moyen doit être écarté.

5.     Sur le cinquième moyen, pris de l’application erronée de la communication de 2002

276    Par le présent moyen, la requérante conteste, en substance, l’application qu’a faite la Commission de la communication de 2002 lorsqu’elle a adopté la décision attaquée.

277    Elle invoque au soutien du présent moyen trois griefs pris, respectivement, de la violation du principe d’égalité de traitement, d’une erreur dans l’application et l’interprétation de la communication de 2002 et du non-respect des principes d’équité et de proportionnalité. Si le Tribunal ne devait pas juger approprié d’augmenter le pourcentage de réduction du montant de l’amende infligée, PROAS demande l’application d’une réduction de 10 % au titre de la circonstance atténuante tenant à sa collaboration effective, appréciée indépendamment de la communication de 2002. Par ailleurs, PROAS sollicite l’adoption de mesures d’organisation de la procédure en rapport avec l’admission de BP au bénéfice de l’immunité d’amendes en vertu du titre A de la communication de 2002.

278    Il convient d’examiner au préalable cette demande de mesures d’organisation de la procédure.

a)     Sur la demande de mesures d’organisation de la procédure

 Arguments des parties

279    Par acte séparé déposé parallèlement au présent recours le 20 décembre 2007, PROAS a présenté une demande de mesures d’organisation de la procédure. Elle y expose qu’elle a marqué, au cours de l’audition du 12 décembre 2006, son opposition à ce que BP effectue une déclaration à huis clos. L’absence d’accès de PROAS au contenu de cette déclaration aurait été susceptible d’avoir une influence directe sur l’appréciation de sa contribution à l’établissement de la preuve de l’infraction par la Commission et d’affecter négativement ses droits de la défense.

280    En effet, un éventuel refus d’immunité opposé à BP en raison d’une demande d’immunité incomplète aurait entraîné le passage de PROAS, soit dans la catégorie des bénéficiaires d’immunité, soit dans une tranche de réduction du montant de l’amende supérieure à la seconde tranche de réduction qui lui a été appliquée au titre du paragraphe 23, sous b), premier alinéa, deuxième tiret, de la communication de 2002, à tout le moins, au titre de certaines années de l’infraction pendant lesquelles BP a affirmé, dans un premier temps, n’avoir pas participé à l’entente.

281    Étant donné que PROAS a été ainsi privée de la possibilité de vérifier la véracité des allégations de BP et qu’une version non confidentielle des déclarations à huis clos de BP ne lui a même pas été communiquée, PROAS considère que ses droits de la défense ont pu être méconnus.

282    Pour ce motif, PROAS conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        « invite[r] la Commission à se prononcer sur la portée qu’elle a accordée aux informations fournies par BP ;

–        somme[r] la Commission de présenter les documents pertinents relatifs à cette question en garantissant l’accès de PROAS à ceux-ci, en particulier, à la déclaration de BP effectuée à huis clos, afin que la requérante soit en mesure de présenter les observations qu’elle juge pertinentes ; et

–        déclare[r], dès à présent et pour le futur, que la décision [attaquée] est invalide au regard de ce motif, en ce qui concerne, notamment, le montant de base de l’amende infligée à PROAS ou, à titre subsidiaire, [réduire] ce montant ».

283    La Commission soutient que cette demande doit être rejetée.

 Appréciation du Tribunal

284    La requérante s’est désistée lors de l’audience du troisième chef de sa demande de mesures d’organisation de la procédure, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience.

285    Quant aux premier et deuxième chefs, PROAS justifie sa demande par le fait que les éléments dont elle souhaite obtenir la communication seraient de nature à lui permettre de démontrer qu’elle doit bénéficier, à tout le moins, au titre de certaines années de l’infraction pendant lesquelles BP a affirmé, dans un premier temps, n’avoir pas participé à l’entente, soit de l’immunité prévue au titre A de la communication de 2002, soit de la première tranche de réduction du montant de l’amende prévue au paragraphe 23, sous b), premier alinéa, premier tiret, de cette communication.

286    À cet égard, il ressort des pièces du dossier que BP a présenté le 20 juin 2002 une demande d’immunité d’amende sur le fondement du paragraphe 8, sous a), de la communication de 2002 et que, le 19 juillet 2002, la Commission lui a accordé, sur ce même fondement, une immunité d’amende conditionnelle, telle que prévue au paragraphe 15 de la communication de 2002.

287    À la suite de la demande d’immunité de BP en date du 20 juin 2002 et d’une réunion tenue le 25 juin 2002 entre BP et les services de la Commission, cette dernière a pu effectuer des vérifications les 1er et 2 octobre 2002 dans les locaux des entreprises concernées.

288    Or, ce n’est que postérieurement à cette date que Repsol et PROAS ont déposé une demande au titre de la communication de 2002, respectivement le 31 mars et le 4 avril 2004.

289    En tant que premier et second demandeurs en réduction du montant de l’amende, Repsol et PROAS se sont vu appliquer, respectivement, la première et la deuxième tranche de réduction du montant de l’amende, en vertu du paragraphe 23, premier alinéa, sous b), premier et deuxième tirets, de la communication de 2002.

290    Au regard des éléments qui précèdent, BP est la première entreprise à avoir fourni des éléments de preuve ayant été jugés, par la Commission, de nature à lui permettre d’adopter une décision ordonnant des vérifications concernant une entente présumée. À ce titre, BP remplit la condition prévue au paragraphe 8, sous a), de la communication de 2002.

291    Or, il est inhérent à la logique de l’immunité d’amende que seul un des membres d’une entente puisse en bénéficier, étant donné que l’effet recherché est de créer un climat d’incertitude au sein des ententes en encourageant leur dénonciation auprès de la Commission. Cette incertitude résulte précisément du fait que les participants à l’entente savent que seul l’un d’entre eux pourra bénéficier d’une immunité d’amende en dénonçant les autres participants à l’infraction, les exposant ainsi au risque de se voir infliger des amendes plus sévères (arrêt KME Germany e.a./Commission, précité, point 130).

292    Ainsi, BP apparaît comme étant la seule entreprise en mesure de remplir la condition prévue au paragraphe 8, sous a), de la communication de 2002.

293    Pour sa part, Repsol apparaît comme étant la première entreprise, au sens du paragraphe 21 de la communication de 2002, à avoir livré des éléments de preuve de l’infraction présumée apportant une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments de preuve déjà en possession de la Commission et donc comme étant la seule entreprise à pouvoir bénéficier de la réduction d’amende au titre du paragraphe 23, sous b), premier alinéa, premier tiret, de cette communication.

294    Or, PROAS n’apporte dans sa demande de mesure d’organisation de la procédure aucun élément qui permette au Tribunal de comprendre en quoi les informations dont elle souhaite obtenir la communication seraient susceptibles de mettre en cause les conclusions auxquelles le Tribunal est parvenu aux deux points précédents.

295    En particulier, le simple renvoi à l’existence d’une déclaration que BP aurait faite à huis clos au cours de l’audition qui a eu lieu le 12 décembre 2006 apparaît, en l’absence d’explication supplémentaire, sans rapport avec le fait que BP a été la première entreprise à transmettre, plus de quatre ans auparavant, des éléments de preuve qui ont permis à la Commission d’adopter une décision ordonnant des vérifications.

296    De même, l’existence de cette déclaration à huis clos apparaît, en l’absence d’explication supplémentaire, sans rapport avec le fait que la Commission aurait pu déjà disposer, au moment de la communication par BP des éléments de preuve lui ayant permis d’obtenir l’immunité conditionnelle, d’éléments de preuve suffisants pour adopter une décision ordonnant des vérifications, circonstance qui, en vertu du paragraphe 9 de la communication de 2002, fait obstacle à l’octroi de l’immunité d’amende.

297    Ainsi, contrairement à ce que soutient PROAS, les mesures d’organisation de la procédure qu’elle sollicite ne seraient pas de nature, s’il y était fait droit, à lui permettre de bénéficier, à la place de BP, de l’immunité d’amende prévue au titre A de la communication de 2002 ou, à la place de Repsol, dans la mesure où celle-ci bénéficierait de l’immunité d’amende, de la première tranche de réduction du montant de l’amende prévue au paragraphe 23, sous b), premier alinéa, premier tiret, de cette communication.

298    Par ailleurs, malgré, d’une part, la distinction que semble faire PROAS entre les différentes périodes au cours desquelles l’entente s’est déroulée et, d’autre part, l’affirmation selon laquelle la demande d’immunité d’amende de BP n’aurait porté que sur certaines de ces périodes, il n’est pas contesté qu’il n’existait qu’une seule et même entente. Le paragraphe 8, sous a), de la communication de 2002, lequel renvoie à « une » entente présumée, ne pouvait, en conséquence, être appliqué à Repsol ou à PROAS puisqu’il s’appliquait déjà à BP au titre de l’entente en cause.

299    En conséquence, les premier et deuxième chefs de la demande de mesures d’organisation de la procédure et, partant, l’ensemble de cette demande, doivent être rejetés.

b)     Sur le grief pris de la violation du principe d’égalité de traitement

 Arguments des parties

300    PROAS reproche à la Commission de l’avoir pénalisée par rapport à Repsol, en violation du principe d’égalité de traitement. Repsol aurait été admise au bénéfice d’une réduction du montant de l’amende au titre de la première tranche de réduction (de 30 à 50 %) définie par le premier tiret du paragraphe 23, sous b), de la communication de 2002, alors que PROAS se serait vu appliquer la deuxième tranche de réduction (de 20 à 30 %) visée au paragraphe 23, sous b), deuxième tiret, au motif que sa demande au titre de ce texte a été introduite plus tard que celle de Repsol. Or, PROAS n’aurait présenté cette demande, qui revêtait une valeur ajoutée significative, que cinq jours après que Repsol eut déposé la sienne, soit presque en même temps.

301    La Commission soutient que le présent grief doit être écarté.

 Appréciation du Tribunal

302    Dans le cadre du présent grief, la requérante ne conteste pas que les éléments de preuve de l’infraction fournis par Repsol aient apporté une valeur ajoutée significative au sens du paragraphe 21 de la communication de 2002. Elle se limite à soutenir que la Commission a méconnu le principe d’égalité de traitement en appliquant à Repsol la première tranche de réduction du montant de l’amende et en n’appliquant à PROAS que la deuxième, bien qu’elle ait présenté sa demande en réduction du montant de l’amende seulement cinq jours après Repsol.

303    À cet égard, il convient de rappeler qu’il ressort du paragraphe 7 de la communication de 2002 que toute réduction du montant de l’amende infligée par la Commission doit refléter la contribution effective de l’entreprise à l’établissement, par la Commission, de la preuve de l’infraction. Cette contribution étant prise en compte tant au regard de sa qualité que de la date à laquelle elle est livrée.

304    De plus, il résulte d’une lecture combinée du paragraphe 21 et du paragraphe 23, sous b), de la communication de 2002 que le premier et le deuxième demandeur de la réduction du montant de l’amende à fournir à la Commission des éléments de preuve de l’infraction présumée apportant une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments de preuve déjà en possession de la Commission sont admis, respectivement, au bénéfice d’une réduction de 30 à 50 % et de 20 à 30 % par rapport au montant de l’amende qu’à défaut la Commission leur infligerait, sous réserve de la condition, sans pertinence en l’espèce, qu’elles mettent fin à leur participation à l’activité illégale présumée, au plus tard, au moment où elles fournissent ces éléments de preuve.

305    En l’espèce, il est constant que Repsol a présenté sa demande en réduction du montant de l’amende le 31 mars 2004 et PROAS le 5 avril suivant.

306    Or, la communication de 2002, dont PROAS n’a pas contesté la légalité, repose sur une approche nécessitant la détermination d’un ordre chronologique précis des demandes présentées au titre de ce texte, correspondant aux objectifs de transparence et de sécurité juridique. Par suite, son application ne saurait diverger selon que l’intervalle entre les demandes est long ou bref (arrêt du Tribunal du 14 juillet 2011, Arkema France/Commission, T‑189/06, non encore publié au Recueil, point 155).

307    Dès lors, quel que soit le délai écoulé entre la demande de réduction du montant de l’amende introduite par Repsol et celle introduite par PROAS, ces deux entreprises ne se trouvaient pas dans une situation identique ou comparable.

308    La Commission n’a donc pas méconnu le principe d’égalité de traitement en ne leur appliquant pas la même tranche de réduction du montant de l’amende.

309    Il résulte de ce qui précède que le présent grief ne peut être accueilli.

c)     Sur le grief pris d’une erreur dans l’application et l’interprétation de la communication de 2002

 Arguments des parties

310    PROAS soutient que la Commission a commis une erreur d’interprétation et d’application de la communication de 2002 en ne lui appliquant pas le pourcentage de réduction maximale de 30 % auquel lui ouvrait droit la seconde tranche de réduction du montant de l’amende et en la sanctionnant ainsi pour avoir présenté sa demande de réduction du montant de l’amende un an et demi après la date des vérifications et seulement après avoir reçu une demande de renseignements détaillée.

311    En pénalisant ainsi sa collaboration et la valeur ajoutée significative qu’elle a apportée au moment où cette collaboration s’est concrétisée, la Commission heurterait de front l’esprit de la communication de 2002, qui entend réserver un traitement favorable aux entreprises contribuant à la lutte effective contre les cartels. Le paragraphe 5 de ce texte reconnaîtrait la nécessité d’améliorer l’efficacité du programme de coopération des entreprises au moyen d’une correspondance plus étroite entre le niveau de réduction du montant des amendes et l’importance de la contribution de l’entreprise à l’établissement du comportement illicite. En d’autres termes, l’élément fondamental dont il convient de tenir compte serait la contribution réelle, c’est-à-dire « la valeur ajoutée significative » apportée par les entreprises.

312    La date à laquelle intervient la collaboration des entreprises retenue au paragraphe 7 de la communication de 2002 viserait surtout à encourager et à rétribuer cette collaboration à une date utile pendant la phase de l’enquête, lorsque les informations fournies s’avèrent encore nécessaires à l’obtention de preuves permettant de sanctionner les ententes et, surtout, avant la prescription du délai légal de poursuite.

313    Dès lors que la collaboration de PROAS a été maximale, qu’elle a apporté une valeur ajoutée significative et que PROAS est même allée, en certaines occasions, au-delà de son obligation de réponse, la Commission n’aurait pas dû, en méconnaissance de l’esprit de la communication de 2002, recourir au critère temporel, excessivement formaliste, de la date de la présentation de sa demande de réduction du montant de l’amende pour priver sa collaboration effective d’une partie de sa valeur et lui refuser le bénéfice de la réduction maximale de 30 % à laquelle PROAS avait droit.

314    PROAS fait valoir à titre subsidiaire que, eu égard au degré de valeur ajoutée des éléments qu’elle a fournis, elle méritait au moins l’application du niveau maximal de sa tranche de réduction, soit 30 %. Ses informations auraient en effet permis d’étayer les conclusions de la Commission et de corroborer les éléments produits par Repsol. La valeur des informations de PROAS n’aurait pas été réduite du fait de l’antériorité de la transmission des données de Repsol, d’autant plus que, en certaines occasions, les deux entreprises ont fourni des informations simultanément, PROAS ayant même été la première à fournir certaines réponses. Selon la jurisprudence, aucune considération d’ordre chronologique ne devrait être regardée comme déterminante aux fins de l’appréciation comparative de la valeur de la coopération des deux entreprises.

315    La Commission soutient que le présent grief doit être écarté.

 Appréciation du Tribunal

316    Il résulte des dispositions du paragraphe 23, sous b), premier alinéa, de la communication de 2002 que la date de la contribution d’une entreprise à l’établissement de l’infraction est, au même titre que le degré de valeur ajoutée des éléments que cette entreprise apporte, un des paramètres que la Commission est tenue de prendre en compte pour déterminer le niveau exact, au sein d’une des fourchettes prévues au paragraphe 23, sous b), premier alinéa, de ladite communication, de la réduction du montant de l’amende dont bénéficiera cette entreprise. De plus, la Commission a la possibilité de prendre en compte également l’étendue et la continuité de la coopération dont l’entreprise a fait preuve à partir de la date de sa contribution.

317    En ce qui concerne l’importance relative du paramètre relatif à la date de la contribution d’une entreprise à l’établissement de l’infraction par rapport aux deux autres paramètres prévus au paragraphe 23, sous b), premier alinéa, de la communication de 2002, il convient tout d’abord de relever que la date à laquelle des éléments de preuve de l’infraction présumée sont remis à la Commission influe sur la reconnaissance à ces éléments d’une valeur ajoutée significative, dans la mesure où une telle reconnaissance dépend des éléments de preuve figurant déjà au dossier de la Commission à la date de leur dépôt (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 juillet 2011, Fuji Electric/Commission, T‑132/07, non encore publié au Recueil, point 239).

318    Par ailleurs, l’ordre chronologique et la rapidité de la coopération offerte par les membres d’un cartel constituent des éléments fondamentaux du système mis en place par la communication de 2002, système dans lequel les entreprises les plus promptes à fournir leur coopération sont censées bénéficier de réductions plus importantes des montants des amendes auxquels elles seraient autrement assujetties que celles accordées aux entreprises moins promptes à coopérer (arrêt du Tribunal du 5 octobre 2011, Transcatab/Commission, T‑39/06, non encore publié au Recueil, points 379 et 380).

319    Ainsi, la date de la contribution d’une entreprise est prise en considération non seulement en vue de la fixation du niveau de réduction exact au sein d’une des fourchettes prévues au paragraphe 23, sous b), premier alinéa, de la communication de 2002, mais également aux fins du classement des entreprises dans l’une de ces fourchettes.

320    Compte tenu de ce qui précède, la date de la contribution d’une entreprise à l’établissement de l’infraction apparaît comme étant un paramètre particulièrement important pour déterminer le niveau exact de la réduction du montant de l’amende au sein d’une des fourchettes prévues au paragraphe 23, sous b), premier alinéa, de la communication de 2002.

321    À cet égard, il a été jugé que la Commission n’excède pas sa marge d’appréciation en accordant à une entreprise une réduction du montant de l’amende égale au pourcentage correspondant à la moitié de sa tranche de réduction, lorsque les éléments de preuve produits, indépendamment de leur qualité et de leur utilité, n’ont été communiqués à la Commission qu’à un moment où celle-ci avait déjà reçu une demande au titre de ce même texte lui permettant de constater une infraction et effectué une série d’inspections (arrêt du Tribunal du 13 juillet 2011, General Technic-Otis e.a./Commission, T‑141/07, T‑142/07, T‑145/07 et T‑146/07, non encore publié au Recueil, points 273 et 274).

322    La Commission peut également fonder son appréciation du montant de la réduction de l’amende sur le fait que la coopération de l’entreprise a commencé après réception par celle-ci d’une demande de renseignements (voir arrêt du Tribunal du 8 octobre 2008, Carbone‑Lorraine/Commission, T‑73/04, Rec. p. II‑2661, point 283, et la jurisprudence citée).

323    En l’espèce, PROAS, qui est la troisième entreprise à avoir introduit une demande au titre de la communication de 2002, n’a accompli cette formalité que le 5 avril 2004, soit plus d’un an et demi après les vérifications effectuées au siège des entreprises concernées sur la base des éléments de preuve que BP avait fournis.

324    PROAS ayant présenté pour la première fois le 5 avril 2004 des éléments de preuve de l’infraction, alors que la Commission avait déjà reçu une demande au titre de la communication de 2002 lui permettant d’adopter une décision ordonnant des vérifications et effectué des vérifications datant de plus d’un an et demi, il y a lieu de constater que sa collaboration n’a pas été maximale.

325    Cette conclusion est confirmée par le fait que PROAS a introduit sa demande au titre de la communication de 2002 près de deux mois après l’envoi par la Commission de la première série de demandes de renseignements intervenu le 6 février 2004.

326    Quant à la qualité et au degré de la valeur ajoutée de la contribution de PROAS à l’établissement par la Commission de la preuve de l’infraction, il convient de ne pas les surestimer. En effet, la Commission a relevé, au considérant 582 de la décision attaquée, sans contestation sur ce point de la part de PROAS, que les informations que celle-ci avait fournies dans la déclaration jointe à sa demande au titre de la communication de 2002 étaient moins détaillées que celles de Repsol. Au considérant 584 de la décision attaquée, la Commission a souligné, sans contestation sur ce point de la part de PROAS, la valeur seulement confirmative d’une partie au moins des preuves fournies par PROAS, en indiquant que ces preuves avaient renforcé sa capacité à démontrer l’existence de l’infraction.

327    Au regard de ce qui précède, malgré l’étendue et la continuité de la coopération de PROAS, reconnues par la Commission aux considérants 582 et 583 de la décision attaquée, ainsi que la valeur ajouté des éléments que PROAS a présentés, la Commission n’a pas commis d’erreur d’appréciation, notamment dans la pondération qu’elle a appliquée des paramètres prévus au paragraphe 23, sous b), deuxième alinéa, de la communication de 2002, en accordant une réduction du montant de l’amende de 25 % à PROAS au titre de sa coopération aux fins de l’établissement de l’entente.

328    Par ailleurs, il y a lieu de relever que la Commission a pris en compte le degré de valeur ajoutée intrinsèque de la contribution de PROAS, notamment, aux considérants 582 et 584 de la décision attaquée, ainsi que l’étendue et la continuité de sa coopération, aux considérants 582 et 583 de la décision attaquée.

329    Or, il ressort du considérant 588 de la décision attaquée que la Commission a déterminé le pourcentage de réduction du montant de l’amende « compte tenu de ce qui précède ». Par ce membre de phrase, la Commission a entendu renvoyer à l’ensemble des constatations exposées aux considérants 581 à 587 de la décision attaquée faisant application à PROAS des critères de réduction du montant de l’amende définis au paragraphe 23, sous b), deuxième alinéa, de la communication de 2002, parmi lesquels sont compris, notamment, les considérants 582 à 584 de la décision attaquée auxquels il a été fait référence précédemment.

330    Par suite, la requérante n’est pas fondée à soutenir que la réduction du montant de l’amende à raison de 25 % dont a bénéficié PROAS repose uniquement sur la date du dépôt de sa demande au titre de la communication de 2002.

331    Il s’ensuit que le présent grief doit être écarté.

332    La conclusion qui précède ne saurait être mise en cause au regard de la rapidité alléguée des réponses de PROAS aux demandes de renseignements de la Commission.

333    En tout état de cause, sur ce dernier point, il ressort de la description des antécédents du litige par la décision attaquée que PROAS a parfois été moins prompte à répondre aux demandes de renseignements que les autres entreprises concernées, comme l’indiquent les considérants 86, 92 et 94 de la décision attaquée.

d)     Sur le grief pris de la violation des principes d’équité et de proportionnalité

 Arguments des parties

334    PROAS souligne que la Commission n’a pas correctement évalué, en violation des principes d’équité et de proportionnalité, les circonstances de la présentation de sa demande au titre de la communication de 2002. Dès novembre 2002, PROAS aurait noué des contacts avec la Commission pour explorer des voies de collaboration. Le 30 décembre 2002, elle aurait remis à la Commission une première description exacte et historique du marché en cause. PROAS aurait encore manifesté sa disposition totale à collaborer en envoyant le 17 mars 2004 un courrier électronique à la Commission, en vue de la tenue d’une réunion devant traiter des possibilités de collaboration. Enfin, PROAS aurait exploré avec la Commission des moyens permettant de fournir davantage d’informations relatives au cartel au cours d’une réunion tenue le 26 mars 2004, soit cinq jours avant le dépôt de la demande de Repsol au titre de la communication de 2002.

335    PROAS demande au Tribunal de tenir compte de ces circonstances, conformément à l’esprit de la communication du 8 décembre 2006 de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17 ; ci-après la « communication sur la coopération de 2006 ») et de lui octroyer le pourcentage de réduction de 40 % reconnu à Repsol ou, subsidiairement, de 30 %, soit le pourcentage maximal de réduction de la deuxième tranche.

336    La Commission soutient que le présent grief doit être écarté.

 Appréciation du Tribunal

337    La requérante n’est pas fondée à se prévaloir de la communication sur la coopération de 2006 dès lors que celle-ci est, en l’espèce, inapplicable ratione temporis. En effet, selon son paragraphe 37, ce texte, à l’exception de ses points relatifs aux déclarations d’entreprises, dépourvus de pertinence en l’espèce, ne remplace, à compter de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes le 8 décembre 2006, la communication de 2002 que pour les affaires dans lesquelles aucune entreprise ne s’est prévalue de cette dernière. Or, il est constant qu’à la date du 8 décembre 2006, plusieurs entreprises, dont PROAS, avaient déjà sollicité le bénéfice de la communication de 2002.

338    Ne pouvant se prévaloir du texte lui-même, la requérante n’est pas plus fondée à se prévaloir de l’esprit de celui-ci.

339    À supposer même que la requérante entende se prévaloir de principes sous-jacents à la communication sur la coopération de 2006 qui auraient pu s’appliquer antérieurement à sa publication et devraient être pris en compte pour interpréter les dispositions pertinentes de la communication de 2002, un tel argument ne saurait utilement être invoqué que dans la mesure où les dispositions en cause de la communication de 2002 ne seraient pas suffisamment précises ou claires pour faire l’objet d’une interprétation littérale.

340    Or, s’agissant de l’argument de la requérante, lequel porte sur la possibilité pour une entreprise de se prévaloir d’une alternative au système de présentation d’une demande formelle de réduction du montant de l’amende pour se voir attribuer un rang dans l’ordre d’arrivée des demandes introduites à ce titre, il y a lieu de constater que la communication de 2002 prévoit de manière suffisamment claire et précise les conditions dans lesquelles est établi cet ordre d’arrivée.

341    En effet, il résulte du paragraphe 25 de la communication de 2002 que la date prise en compte pour déterminer l’ordre d’arrivée des demande de réduction du montant de l’amende est la date à laquelle les éléments de preuve ont été remis à la Commission et du paragraphe 21 de ladite communication que ces éléments permettent à l’entreprise intéressée de bénéficier d’une réduction du montant de l’amende dans la mesure où ils apportent une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments de preuve déjà en possession de la Commission.

342    En application des dispositions précitées de la communication de 2002, les contacts que PROAS a pu nouer avec la Commission antérieurement à la présentation, le 5 avril 2004, de sa demande au titre de la communication de 2002 sont dépourvus de pertinence aux fins de l’appréciation de sa contribution effective à l’établissement de la preuve de l’infraction par la Commission.

343    Il est en effet constant que PROAS n’a soumis de sa propre initiative à la Commission aucun élément de preuve portant sur l’infraction constatée avant la présentation de sa demande au titre de la communication de 2002 et, en tout état de cause, il n’est pas établi qu’un document qu’elle aurait soumis de sa propre initiative à la Commission avant la présentation de cette demande aurait apporté une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments de preuve dont disposait déjà la Commission. Cette dernière a donc retenu à bon droit que PROAS n’avait rempli la condition, prévue AU paragraphe 21 de la communication de 2002, de l’apport d’une valeur ajoutée significative en ce qui concerne les éléments de preuve que la Commission a déjà en sa possession qu’à la date de présentation de sa demande au titre de la communication de 2002.

344    Par ailleurs, aucun argument de la requérante ne permet d’établir que la Commission, en respectant, ainsi qu’elle l’a fait, les dispositions de la communication de 2002, aurait méconnu les principes d’équité ou de proportionnalité. Il convient de relever, notamment, que la requérante n’excipe pas de l’illégalité de la communication de 2002 au regard desdits principes.

345    Il y a donc lieu d’écarter le présent grief.

e)     Sur la demande d’admission au bénéfice d’une circonstance atténuante tenant à la collaboration effective de PROAS

 Arguments des parties

346    PROAS sollicite en tout état de cause une réduction supplémentaire de 10 % du montant de son amende au titre de la circonstance atténuante constituée par sa collaboration effective, appréciée indépendamment de la communication de 2002 et conformément à l’esprit du projet de communication de la Commission relative aux procédures de transaction engagées en vue de l’adoption de décisions en vertu des articles 7 et 23 du règlement n° 1/2003 du Conseil dans les affaires d’entente (JO 2007, C 255, p. 51). Selon ce projet, pour autant que la coopération fournie par une entreprise relève des deux communications de la Commission, elle pourrait être récompensée à ce double titre.

347    La Commission soutient que le présent grief doit être écarté.

 Appréciation du Tribunal

348    PROAS ne peut utilement se prévaloir du projet de communication de la Commission relative aux procédures de transaction, dès lors que ce texte est un simple texte préparatoire dépourvu de portée contraignante et qu’en tout état de cause il n’a été publié que le 27 octobre 2007, c’est-à-dire après la date d’adoption de la décision attaquée.

349    Ne pouvant se prévaloir dudit projet lui-même, la requérante n’est pas plus fondée à se prévaloir de l’esprit de celui-ci.

350    De plus, la requérante ne peut être regardée comme ayant entendu invoquer des principes, sous-jacents à ce texte, qui seraient susceptibles de s’imposer à la Commission. En effet, dans son argumentation, la requérante ne fait référence à aucun principe.

351    Quant à la demande de prise en compte de la circonstance atténuante tenant à la collaboration effective de l’entreprise à la procédure administrative en dehors du champ d’application de la communication de 2002, il convient de rappeler que le point 3 des lignes directrices de 1998 prévoit une diminution du montant de l’amende au titre de la circonstance atténuante, envisagée au sixième tiret, tenant à la « collaboration effective de l’entreprise à la procédure, en dehors du champ d’application » de la communication de la Commission concernant la non-imposition d’amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 1996, C 207, p. 4) (ci-après la « communication de 1996 »).

352    Un tel libellé interdit, pour le moins, que le comportement adopté par une entreprise qui collabore de manière effective avec la Commission puisse être pris en compte à double titre et permette ainsi à cette entreprise de bénéficier d’une réduction du montant de l’amende à la fois au titre des lignes directrices de 1998 et au titre d’une communication sur la coopération.

353    En l’espèce, il convient de relever que la Commission, pour déterminer au considérant 588 de la décision attaquée la réduction du montant de l’amende octroyée à PROAS au titre de la communication de 2002, a pris en compte les éléments qu’elle avait évoqués précédemment dans la section de la décision attaquée dans laquelle figurent les considérants 581 à 587.

354    Or, au considérant 583 de la décision attaquée, la Commission s’est référée à la « coopération » de PROAS en réponse aux demandes de renseignements présentées par la Commission et au fait que PROAS avait fourni des informations qui étaient allées au-delà de son devoir de réponse.

355    Ainsi, le comportement coopératif de PROAS a été pris en compte par la Commission au titre de la communication de 2002 lorsqu’elle a accordé à PROAS une réduction de 25 % du montant de l’amende.

356    Dès lors, le comportement identifié au considérant 588 de la décision attaquée ne saurait être pris en compte également au titre des lignes directrices de 1998.

357    Étant donné que la requérante n’établit pas l’existence d’un comportement coopératif distinct de celui déjà pris en compte au titre de la communication de 2002, elle ne peut bénéficier d’une réduction du montant de l’amende, au titre d’une circonstance atténuante, fondée sur les lignes directrices de 1998.

358    En tout état de cause, selon la jurisprudence, dès lors que l’infraction relève bien, comme en l’espèce, du champ d’application d’une communication sur la coopération, une requérante ne peut pas valablement reprocher à la Commission de ne pas avoir pris en compte en tant que circonstance atténuante le degré de sa coopération en dehors du cadre juridique de ce texte (voir arrêts du Tribunal BASF/Commission, précité, point 586, et la jurisprudence citée, prononcé sous l’empire de la communication de 1996 ; du 16 juin 2011, Solvay/Commission, T‑186/06, Rec. p. II‑2839, point 314, prononcé sous l’empire de la communication de 2002 présentement applicable, faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant la Cour, affaire C‑455/11 P).

359    En l’espèce, l’infraction en cause relève du champ d’application de la communication de 2002, laquelle prévoit, en son paragraphe 1, qu’elle s’applique aux « ententes secrètes entre entreprises consistant à fixer des prix, des quotas de production ou de vente et à répartir les marchés, y compris par le truquage d’appels d’offres, ou encore à restreindre les importations ou les exportations ».

360    Il y a donc lieu de rejeter la demande de PROAS tendant à l’octroi d’une réduction supplémentaire du montant de l’amende sur le fondement des lignes directrices de 1998 au titre d’une circonstance atténuante.

361    En conséquence, le moyen pris de l’application erronée de la communication de 2002 doit être écarté dans son intégralité.

6.     Sur le sixième moyen, pris de la méconnaissance du principe du respect d’un délai raisonnable

a)     Arguments des parties

362    PROAS souligne que le respect d’un délai raisonnable, qui, selon l’article 41, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2010, C 83, p. 389), participe du principe de bonne administration, s’impose dans toute procédure administrative.

363    En l’espèce, la durée de la procédure administrative aurait excédé les limites du raisonnable, puisqu’elle s’est étendue sur 63 mois, dont 50 mois, du 20 juin 2002, date de la présentation par BP de sa demande d’immunité, au 22 août 2006, date de la communication des griefs. En particulier, près de dix-sept mois se seraient écoulés du 1er juin 2004, date de la réception de la dernière réponse à la première demande de renseignements de la Commission, au 24 octobre 2005, date de la notification de la deuxième demande de renseignements.

364    Ce manquement serait d’autant plus grave que la phase d’instruction aurait dû être plus brève, dès lors que la procédure administrative a été engagée à la suite d’une demande d’immunité et que les trois principales entreprises du secteur ont participé à la procédure administrative.

365    Certes, la violation du principe du respect d’un délai raisonnable ne justifierait pas l’annulation automatique de la décision attaquée, à moins que la durée de la procédure ait eu une quelconque incidence sur la solution du litige, en violation des droits de la défense.

366    Néanmoins, si la Commission avait agi en l’espèce avec la diligence requise et si la procédure avait été clôturée plus tôt, le montant de l’amende infligée aurait très probablement été bien inférieur. Il ne ferait pas de doute que le retard, imputable à la Commission, s’est traduit principalement par une majoration très significative de la sanction infligée à PROAS. Pour ce motif, PROAS « devrait faire face de surcroît à une défense beaucoup plus difficile », étant donné que l’annulation ou, subsidiairement, la réduction du montant de l’amende sollicitée part d’une base injuste et majorée de manière exponentielle.

367    En effet, si elle n’avait pas excédé le délai raisonnable, la Commission aurait adopté la décision attaquée entre la fin de l’année 2004 et, au plus tard, l’année 2006. Or, entre octobre 2002 et octobre 2007, la Commission aurait considérablement durci sa politique de répression des ententes et relevé manifestement le montant des amendes infligées, à telle enseigne que les lignes directrices de 1998 se sont révélées obsolètes et que la Commission a dû publier les lignes directrices du 1er septembre 2006 pour le calcul du montant des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003, dont les nouveaux critères ont permis à la Commission d’augmenter de façon substantielle le montant des amendes.

368    La méconnaissance du respect du délai raisonnable aurait eu d’autant plus un impact direct sur le montant de l’amende applicable que le chiffre d’affaires global de PROAS a augmenté de 85 % entre 2004 et 2006. PROAS serait donc pénalisée pour avoir réalisé, pendant une période de pleine concurrence, de meilleurs chiffres d’affaires, en raison, notamment, de l’augmentation sensible des cours du fioul, qui ont progressé entre 2002 et 2006 de 140,13 euros/tonne métrique (Tm) à 232,95 euros/Tm, soit une augmentation de 66,24 %. Il n’apparaîtrait pas juridiquement fondé que l’augmentation du chiffre d’affaires de PROAS due à ces facteurs exogènes ait contribué à majorer le montant de l’amende applicable, compte tenu a fortiori du fait que cette augmentation est intervenue pendant une période au cours de laquelle PROAS ne participait plus à l’entente.

369    Il s’ensuivrait que la Commission a imposé à PROAS une amende supérieure à celle qui aurait été prononcée si la décision attaquée avait été adoptée dans un délai approprié. PROAS aurait subi, de ce fait, une sanction disproportionnée et discriminatoire. Aussi PROAS demande-t-elle l’annulation de la décision attaquée.

370    Subsidiairement, PROAS sollicite la réduction du montant de l’amende en rapport avec le niveau des sanctions comparables prononcées ces dernières années, eu égard au délai dans lequel aurait dû être adoptée la décision attaquée.

371    La Commission soutient que le présent moyen doit être écarté.

b)     Appréciation du Tribunal

372    Il résulte de la jurisprudence que l’observation d’un délai raisonnable dans la conduite des procédures administratives en matière de politique de la concurrence constitue un principe général du droit de l’Union, dont le juge assure le respect (voir arrêt de la Cour du 21 septembre 2006, Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission, C‑105/04 P, Rec. p. I‑8725, point 35, et la jurisprudence citée).

373    La violation de ce principe ne justifie cependant l’annulation d’une décision prise à l’issue d’une procédure administrative en matière de concurrence qu’en tant qu’elle emporte également une violation des droits de la défense de l’entreprise concernée. En revanche, lorsqu’il n’est pas établi que l’écoulement excessif du temps a affecté la capacité des entreprises concernées à se défendre effectivement, le non-respect du principe du délai raisonnable est sans incidence sur la validité de la procédure administrative (arrêt Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission, précité, points 42, 43, 60 et 61, et arrêt du Tribunal du 14 avril 2011, Visa Europe et Visa International Service/Commission, T‑461/07, Rec. p. II‑1729, point 232).

374    En l’espèce, la requérante relève elle-même que la violation du principe du respect du délai raisonnable ne justifie l’annulation automatique de l’acte attaqué que dans la mesure où la durée de la procédure aurait eu une quelconque incidence sur la solution du litige, en violation de ses droits de la défense.

375    Or, la requérante n’a pas démontré que l’exercice de ses droits de la défense ait pu être affecté en raison d’une durée excessive de la procédure administrative, à supposer cette irrégularité établie. Elle s’est, au contraire, bornée à soutenir que, si cette procédure avait été clôturée plus tôt, le montant de l’amende infligée aurait « très probablement » été bien inférieur et que la majoration très significative de la sanction qui lui a été infligée l’a confrontée à une défense beaucoup plus difficile, étant donné que l’annulation ou, subsidiairement, la réduction du montant de l’amende sollicitée part d’une base injuste et majorée de manière exponentielle.

376    De tels arguments n’établissent pas que les possibilités de PROAS de réfuter les griefs développés contre elle par la Commission ont été limitées pour des raisons liées à la durée prétendument excessive de la procédure administrative (voir, en ce sens, arrêt Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission, précité, point 56).

377    Aucune méconnaissance des droits de la défense de PROAS n’est donc établie.

378    En l’absence d’arguments distincts relatifs au principe de bonne administration, la méconnaissance de ce dernier principe n’est pas non plus établie.

379    Par suite, le moyen doit être écarté en ce qu’il vise à obtenir l’annulation de la décision attaquée prise dans son ensemble ou, plus spécifiquement, en tant qu’elle constate l’existence de l’infraction en cause.

380    Cependant, même en l’absence de violation des droits de la défense, l’existence d’un délai déraisonnable peut être prise en compte par le Tribunal si le moyen a été également invoqué au soutien de conclusions en réformation (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission, C‑185/95 P, Rec. p. I 8417, points 13, 48 et 49, et arrêt du Tribunal du 5 juin 2012, Imperial Chemical Industries/Commission, T‑214/06, non encore publié au Recueil, points 286, 287, 293 et 294).

381    En effet, le Tribunal dispose alors d’une compétence de pleine juridiction, laquelle l’habilite à réformer l’acte attaqué, même en l’absence d’annulation (arrêt de la Cour du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, Rec. p. I‑8375, point 692).

382    Il convient donc d’examiner le présent moyen en tant qu’il est invoqué au soutien des conclusions en réformation.

383    À cet égard, il convient de rappeler que, en présence d’une réglementation complète régissant en détail les délais de prescription dans le respect desquels la Commission est en droit, sans porter atteinte à l’exigence fondamentale de sécurité juridique, d’infliger des amendes aux entreprises faisant l’objet de procédures d’application des règles de la concurrence, toute considération liée à l’obligation pour la Commission d’exercer son pouvoir d’infliger des amendes dans un délai raisonnable doit être écartée (arrêts du Tribunal du 19 mars 2003, CMA CGM e.a./Commission, T‑213/00, Rec. p. II‑913, point 324 ; du 1er juillet 2008, Compagnie maritime belge/Commission, T‑276/04, Rec. p. II‑1277, points 41 et 42 ; Visa Europe et Visa International Service/Commission, précité, points 234 à 237, et du 27 juin 2012, Bolloré/Commission, T‑372/10, non encore publié au Recueil, points 115 à 118, faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant la Cour, affaire C‑414/12 P).

384    Or, l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1/2003, ce règlement ayant repris les dispositions pertinentes figurant dans le règlement (CEE) n° 2988/74 du Conseil, du 26 novembre 1974, relatif à la prescription en matière de poursuites et d’exécution dans les domaines du droit des transports et de la concurrence de la Communauté économique européenne (JO L 319, p. 1), prévoit que le pouvoir de la Commission d’infliger des amendes est soumis à un délai de prescription de cinq ans. En vertu de l’article 25, paragraphe 2, de ce texte, la prescription court, pour les infractions, comme en l’espèce, continues, à compter du jour où l’infraction a pris fin. La prescription est toutefois susceptible d’être interrompue, en application de l’article 25, paragraphes 3 et 4 dudit règlement. En vertu de l’article 25, paragraphe 5, du règlement n° 1/2003, la prescription court à nouveau à partir de chaque interruption, la prescription étant toutefois acquise au plus tard le jour où un délai égal au double du délai de prescription arrive à expiration sans que la Commission ait prononcé une amende ou une astreinte, de sorte que la Commission ne saurait, sous peine que la prescription ne soit acquise, retarder indéfiniment sa décision quant aux amendes.

385    Par suite, une réglementation complète, au sens de la jurisprudence citée au point 383 ci-dessus, s’applique en l’espèce, réglementation dont la requérante n’a pas contesté la légalité.

386    Or, il est constant que PROAS a mis fin à sa participation à l’infraction continue litigieuse à la suite des vérifications effectuées les 1er et 2 octobre 2002 au siège des entreprises concernées.

387    Ainsi, la décision attaquée, adoptée le 3 octobre 2007, est intervenue dans le respect des délais de prescription prévus à l’article 25 du règlement n° 1/2003, eu égard aux divers actes interruptifs de prescription que, comme il résulte de l’exposé des antécédents du litige, la Commission a accomplis aux fins de l’instruction et de la poursuite de l’infraction litigieuse et au nombre desquels figure la dernière demande de renseignements du 16 février 2007 adressée à toutes les entreprises concernées (considérant 106 de la décision attaquée).

388    La Commission ayant prononcé les amendes en cause dans le respect des délais de prescription fixés, toute considération liée à l’obligation pour la Commission d’exercer son pouvoir d’infliger des amendes dans un délai raisonnable doit être écartée.

389    Il résulte de ce qui précède que le sixième moyen doit également être écarté en tant qu’il vient au soutien des conclusions en réformation.

390    À titre surabondant, la requérante n’établit pas que la Commission aurait méconnu le principe du respect d’un délai raisonnable.

391    À cet égard, le simple rappel de la durée totale de la procédure, soit environ cinq ans entre le moment où l’infraction a cessé et l’adoption de la décision attaquée, ou celui de la durée écoulée entre la date à laquelle il a été mis fin à l’infraction et la communication des griefs, soit environ quatre ans, ne permettent pas, à eux seuls, d’établir l’existence d’un délai déraisonnable.

392    Par ailleurs, la circonstance qu’un délai d’environ 17 mois se soit écoulé entre, d’une part, la réception par la Commission de la dernière réponse à sa première série de demandes de renseignements, soit le 1er juin 2004, et, d’autre part, la date à laquelle elle a adressé sa deuxième série de demandes de renseignements, soit le 24 octobre 2005, ne permet pas non plus, à elle seule, d’établir l’existence d’un délai déraisonnable.

393    En effet, pour pouvoir formuler une deuxième demande de renseignements, la Commission a dû analyser de manière approfondie l’ensemble des éléments dont elle disposait.

394    Or, certains de ces éléments lui avaient été communiqués peu de temps avant le 1er juin 2004.

395    Ainsi, entre la fin du mois de mars 2004 et le 1er juin de la même année, non seulement la Commission a reçu les réponses des cinq entreprises concernées à sa première série de demandes de renseignements, mais elle a également reçu les demandes d’immunité d’amendes de Repsol et de PROAS.

396    Eu égard aux éléments qui précèdent et à la complexité des faits en cause, le délai d’environ 17 mois dont se prévaut la requérante ne révèle pas une inaction critiquable de la Commission.

397    Il y a lieu également d’ajouter que, pris dans leur ensemble, les éléments invoqués par la requérante pour établir l’existence d’un délai déraisonnable, lesquels viennent d’être examinés précédemment, ne permettent pas d’établir l’existence d’un délai déraisonnable.

398    La conclusion qui précède n’est pas remise en cause par l’invocation par la requérante de la durée des procédures s’agissant d’autres décisions adoptées par la Commission en matière de concurrence. En effet, le déroulement de chaque procédure suivie par la Commission aux fins de l’adoption d’une décision en matière de concurrence varie en fonction d’un ensemble de circonstances qui sont spécifiques à chaque affaire, ce qui rend toute comparaison difficile. Or, la requérante n’est pas parvenue à établir une identité suffisante entre les circonstances relatives aux procédures dont elle se prévaut et celles relatives à la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée.

399    Dès lors, en l’absence de démonstration du caractère déraisonnable de la procédure administrative diligentée par la Commission, il convient d’écarter comme reposant sur une prémisse erronée les arguments de PROAS selon lesquels la prolongation indue de l’instruction du dossier aurait eu une incidence directe et significative sur le montant de l’amende retenu dans la décision attaquée, en raison, d’une part, du relèvement sensible du montant des amendes infligées prétendument opéré entre-temps par la Commission et, d’autre part, de l’augmentation du chiffre d’affaires de PROAS entre 2004 et 2006, sans qu’il soit besoin d’examiner le bien-fondé de ces arguments en raison de leur caractère désormais inopérant.

400    En conséquence, le moyen pris de la méconnaissance du principe du respect d’un délai raisonnable doit, en tout état de cause, être écarté.

7.     Sur le septième moyen, pris de la violation du plafonnement du montant de l’amende à 10 % du chiffre d’affaires

a)     Arguments des parties

401    PROAS allègue avoir agi de sa propre initiative et de manière autonome pendant toute la période de l’infraction, ce qui serait logique dans la mesure où CEPSA, sa société mère, ne connaissait pas le marché sur lequel opérait sa filiale.

402    En infligeant à PROAS une amende de 83 850 000 euros, la Commission aurait donc violé l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, selon lequel l’amende infligée ne peut, pour chaque entreprise ayant participé à l’infraction, excéder 10 % de son chiffre d’affaires total afférent à l’exercice commercial précédant l’adoption de la décision infligeant l’amende.

403    PROAS ayant réalisé en 2006 un chiffre d’affaires de 325 088 908 euros, son amende n’aurait donc pas dû dépasser 32 500 000 euros. Il en irait d’autant plus ainsi que l’imposition d’une amende égale au plafond de 10 % du chiffre d’affaires de l’entreprise ne correspond pas à la pratique habituelle de la Commission et serait à plus forte raison disproportionnée si l’on considère les circonstances de la présente affaire.

404    Même en partant de l’hypothèse la moins favorable d’une amende égale au plafond de 10 % du chiffre d’affaires de PROAS, la Commission aurait dû en réduire le montant de 25 %, de sorte que son montant final n’aurait pas dû être supérieur à 24 310 000 euros.

405    Indépendamment de ces arguments, PROAS demande au Tribunal de réduire équitablement la sanction infligée, après avoir accueilli les moyens invoqués au soutien du recours, notamment, ceux pris de l’erreur d’appréciation de la gravité de l’infraction et d’une fausse application des critères de réduction du montant de l’amende au titre de la coopération.

406    Dans le prolongement du moyen tiré de la méconnaissance du principe du respect du délai raisonnable, PROAS s soutient que, compte tenu du plafond de 10 % de 175 776 564 euros, son chiffre d’affaires afférent à l’exercice commercial 2004, ou, à tout le moins, compte tenu du plafond de 10 % de 264 349 117 euros, son chiffre d’affaires de l’exercice commercial 2005, la Commission aurait dû lui infliger une amende n’excédant pas, respectivement, 17 580 000 ou 26 430 000 euros.

407    Enfin, la Commission aurait dû ensuite appliquer sur l’un ou l’autre de ces montants la réduction de 25 %, voire un pourcentage plus élevé, en vertu de la communication de 2002. Par conséquent, le montant final de l’amende infligée à PROAS en raison de sa participation à l’entente n’aurait jamais dû dépasser 13 850 000 euros ou, le cas échéant, 19 820 000 euros.

La Commission soutient que le présent moyen doit être écarté.

b)     Appréciation du Tribunal

408    L’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 précise, en son deuxième alinéa, que pour chaque entreprise participant à l’infraction, l’amende n’excède pas 10 % du chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice social précédent. La même indication figurait à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, applicable au moment de l’infraction en cause.

409    Il ressort de l’article 2 de la décision attaquée que, pour l’infraction constatée à l’article 1er, PROAS et CEPSA ont été condamnées conjointement et solidairement au paiement de la somme de 83 850 000 euros.

410    Il convient de préciser que la Commission a conclu que CEPSA et PROAS devaient être tenues solidairement responsables de la participation à l’infraction du personnel de PROAS, après avoir retenu, sur la base de la présomption de l’exercice effectif par une société mère d’une influence décisive sur sa filiale détenue, comme en l’espèce, à 100 % et eu égard à des indices supplémentaires, que CEPSA et PROAS avaient constitué une entreprise pendant toute la durée de l’infraction (considérants 416 à 430 de la décision attaquée).

411    Or, il ressort d’une jurisprudence constante que le chiffre d’affaires visé à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et à l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003 ? relatif à la limite supérieure du montant de l’amende susceptible d’être infligée, se réfère au chiffre d’affaires global de l’entreprise, lequel donne seul une indication approximative de l’importance et de l’influence de celle-ci sur le marché (arrêt Musique Diffusion française e.a./Commission, précité, point 119, et arrêt du Tribunal du 4 juillet 2006, Hoek Loos/Commission, T‑304/02, Rec. p. II‑1887, point 116).

412    De plus, le fait que plusieurs sociétés soient, comme en l’espèce, solidairement tenues au paiement d’une amende au motif qu’elles forment une entreprise au sens de l’article 81 CE n’implique pas, en ce qui concerne l’application du plafond prévu par l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, et avant lui par l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, que l’obligation de chacune se limite à 10 % du chiffre d’affaires qu’elle a réalisé durant le dernier exercice social. En effet, le plafond de 10 %, au sens de cette disposition, doit être calculé sur la base du chiffre d’affaires cumulé de toutes les sociétés constituant l’entité économique unique agissant en tant qu’entreprise au sens de l’article 81 CE, puisque seul le chiffre d’affaires cumulé de ces sociétés peut constituer une indication de la taille et de la puissance économique de l’entreprise en question (voir arrêt du Tribunal du 12 décembre 2007, Akzo Nobel e.a./Commission, T‑112/05, Rec. p. II‑5049, point 90, et la jurisprudence citée).

413    La Commission a donc pu, à bon droit, prendre en compte le chiffre d’affaires de CEPSA pour calculer le plafond de 10 % du montant de l’amende qu’elle infligeait à PROAS.

414    Cependant, PROAS allègue avoir agi de sa propre initiative et de manière autonome pendant toute la période de l’infraction. Elle soutient ainsi que CEPSA, sa société mère, ne connaissait pas le marché sur lequel opérait sa filiale. Aussi PROAS considère-t-elle que l’illégalité alléguée tient au fait que l’amende de 83 850 000 euros qui lui a été infligée par la Commission n’aurait pas dû excéder à tout le moins 32 500 000 euros, soit 10 % de son propre chiffre d’affaires afférent à 2006, dernier exercice précédant la date de la décision attaquée.

415    En substance, la requérante conteste ainsi l’imputation à CEPSA de la responsabilité solidaire de la participation de PROAS à l’infraction.

416    À cet égard, il convient de rappeler tout d’abord qu’une infraction au droit de la concurrence de l’Union doit être imputée sans équivoque à une personne juridique qui sera susceptible de se voir infliger des amendes (arrêt de la Cour du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C‑97/08 P, Rec. p. I‑8237, point 57).

417    Cependant, le droit de la concurrence de l’Union vise les activités des entreprises et la notion d’entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement. La Cour a précisé que la notion d’entreprise, placée dans ce contexte, doit être comprise comme désignant une unité économique même si cette unité économique est constituée de plusieurs personnes juridiques (arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, précité, points 54 et 55).

418    Compte tenu de la jurisprudence mentionnée au point précédent, le comportement infractionnel d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques (arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, précité, point 58).

419    En effet, dans une telle situation, la société mère et sa filiale font partie d’une même unité économique et, partant, forment une seule entreprise, au sens où cette notion a été définie ci-dessus. Le fait que la société mère et sa filiale constituent une seule entreprise au sens de l’article 81 CE permet alors à la Commission d’adresser une décision imposant des amendes à la société mère, sans qu’il soit requis d’établir l’implication personnelle de cette dernière dans l’infraction (arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, précité, point 59).

420    Dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital de sa filiale ayant commis une infraction aux règles communautaires de la concurrence, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale, et, d’autre part, il existe une présomption réfragable selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale (arrêt de la Cour du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, non encore publié au Recueil, point 56).

421    Dans ces conditions, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital d’une filiale est détenue par sa société mère pour présumer que cette dernière exerce une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale (arrêt Elf Aquitaine/Commission, précité, point 57).

422    En l’espèce, il est constant que, pendant toute la durée de l’infraction, PROAS était une filiale intégrale de CEPSA.

423    Dès lors, la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante de CEPSA sur PROAS s’appliquait.

424    Or, la requérante, qui se borne à affirmer avoir agi de manière autonome à l’égard de CEPSA pendant toute la durée de l’infraction, sans invoquer d’éléments précis de nature à prouver l’existence de cette autonomie, n’est pas parvenue à renverser cette présomption.

425    Par conséquent, le chiffre d’affaires total à prendre en considération est, non pas celui de PROAS s, mais celui de l’entreprise CEPSA-PROAS.

426    Sur cette base, la détermination du montant de l’amende infligée n’est pas contraire aux prescriptions de l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003 ou de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17. En effet, le montant de l’amende de 83 850 000 euros au paiement de laquelle PROAS et CEPSA sont tenues conjointement et solidairement représente 0,45 % du chiffre d’affaires total consolidé de 18 474 000 000 euros réalisé par CEPSA en 2006 (considérant 33 de la décision attaquée).

427    Le présent moyen doit donc être écarté.

8.     Sur le huitième moyen, pris de la violation de l’obligation de motivation

a)     Arguments des parties

428    En liaison étroite avec les moyens développés ci-dessus, PROAS considère que la Commission a violé son obligation de motivation.

429    La Commission n’aurait procédé à aucun moment à l’évaluation de l’impact réel de l’entente sur le marché et se serait bornée à constater, au considérant 501 de la décision attaquée, qu’il était probable que les accords, du fait de leur mise en œuvre, avaient produit des effets réels anticoncurrentiels, sans expliquer comment cette atteinte à la concurrence s’était produite.

430    À aucun moment la Commission n’aurait exposé les motifs qui l’ont conduite à contester les effets limités des répercussions concrètes de l’entente sur le marché. En particulier, la Commission n’aurait pas justifié le raisonnement l’ayant conduite à écarter de son appréciation de la gravité de l’infraction le niveau élevé du pouvoir de négociation des clients, la pression importante des importations et l’absence d’impact des accords illicites sur la structure du marché en cause.

431    La Commission n’aurait, à aucun moment, exposé les raisons pour lesquelles le contexte économique de l’affaire et la pression exercée par le gouvernement espagnol, principalement par l’intermédiaire de Repsol, ne constituaient pas une preuve suffisante des effets limités de l’entente, ni, notamment, sur quel fondement elle a estimé que n’étaient pas établies les spécificités du marché du bitume qui, selon PROAS, confirment ces effets limités.

432    La Commission n’aurait pas non plus motivé le rejet, aux considérants 556 et 557 de la décision attaquée, de l’argument tiré par PROAS de la confusion quant à la licéité des accords engendrée par l’interventionnisme pratiqué par le gouvernement espagnol, directement ou par l’intermédiaire de Repsol.

433    Enfin, la Commission n’aurait pas expliqué pourquoi elle ne s’est fondée, pour évaluer le poids spécifique des participants au cartel, que sur une partie du produit en cause, le bitume de pénétration. La seule motivation figurant au considérant 15 de la décision attaquée serait non seulement insuffisante, mais aussi incohérente.

434    La Commission soutient que le présent moyen doit être écarté.

b)     Appréciation du Tribunal

435    Le moyen tiré du défaut ou de l’insuffisance de la motivation doit être distingué de celui pris de l’inexactitude des motifs de l’acte attaqué, en raison d’une erreur sur les faits ou dans l’appréciation juridique. Ce dernier aspect relève de l’examen de la légalité au fond de l’acte et non de la violation des formes substantielles et ne peut donc constituer une violation de l’article 253 CE (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 30 mars 2000, VBA/Florimex e.a., C‑265/97 P, Rec. p. I‑2061, point 114, et arrêt du Tribunal du 7 novembre 1997, Cipeke/Commission, T‑84/96, Rec. p.  II‑2081, point 47).

436    En tant que forme substantielle, la motivation exigée par l’article 253 CE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires de l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 63, et la jurisprudence citée).

437    Il n’en demeure pas moins que, aux fins de la motivation d’une décision adoptée pour assurer l’application des règles de concurrence, la Commission est tenue, en vertu de l’article 253 CE, de mentionner, à tout le moins, les faits et les considérations revêtant une importance essentielle dans l’économie de sa décision, permettant ainsi à la juridiction compétente et aux parties intéressées de connaître les conditions dans lesquelles elle a fait application du traité (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 15 septembre 1998, European Night Services e.a./Commission, T‑374/94, T‑375/94, T‑384/94 et T‑388/94, Rec. p. II‑3141, point 95, et du 13 juillet 2011, ThyssenKrupp Liften Ascenseurs e.a./Commission, T‑144/07, T‑147/07 à T‑150/07 et T‑154/07, non encore publié au Recueil, point 133).

438    Enfin, une motivation peut être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles les mesures en question ont été prises et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (voir arrêt General Technic-Otis e.a./Commission, précité, point 302, et la jurisprudence citée).

439    Dans le cadre du présent moyen, les critiques de la requérante portent, en substance, sur l’absence de justifications suffisantes fournies par la Commission concernant, en premier lieu, les éléments produits par la requérante quant à l’absence d’impact concret de l’entente, en deuxième lieu, la confusion quant à la licéité des accords engendrée par l’interventionnisme qu’aurait pratiqué le gouvernement espagnol, en troisième lieu, l’évaluation du poids spécifique des participants au cartel sur la base du seul bitume de pénétration.

440    En premier lieu, il convient de rappeler que la Commission a indiqué, au considérant 500 de la décision attaquée, qu’il n’était pas nécessaire que l’entente ait un impact particulier pour pouvoir être qualifiée de très grave aux fins de la fixation du montant de départ de l’amende.

441    Elle a réaffirmé au considérant 509 de la décision attaquée que, étant donné la nature de l’infraction, les entreprises destinataires de la décision attaquée ont commis une infraction très grave à l’article 81 CE et précisé que cette conclusion était formulée indépendamment de la question de savoir si l’entente a eu un impact mesurable sur le marché.

442    Par suite, la Commission n’était pas tenue d’établir l’existence d’un impact concret de l’entente sur le marché et donc de répondre aux arguments présentés par PROAS à cet égard.

443    En effet, il n’appartient pas à la Commission de répondre expressément à chacun des arguments avancés par les entreprises en réponse à la communication des griefs. Tel est le cas lorsque les arguments en cause ne revêtent pas une importance essentielle dans l’économie de la décision attaquée c’est-à-dire, notamment, lorsque ces arguments sont sans incidence sur le dispositif de cette décision.

444    En deuxième lieu, la Commission a précisé, aux considérants 503, 556 et 557 de la décision attaquée, que l’existence d’une confusion quant à la licéité des accords n’était pas établie. Elle a donc suffisamment motivé sa position sur ce point.

445    En troisième lieu, la Commission, qui avait circonscrit le marché litigieux au seul bitume de pénétration au considérant 15 de la décision attaquée, n’était pas dans l’obligation de préciser les raisons pour lesquelles elle se fondait uniquement sur le marché relatif à ce produit pour évaluer le poids spécifique des participants à l’entente sur ce même marché, lorsqu’elle a déterminé, pour chacun d’entre eux, le montant de départ de l’amende.

446    En effet, le raisonnement que la Commission a suivi à cet égard présente un caractère à ce point évident qu’il ne justifie aucune explication particulière.

447    Il résulte de ce qui précède que le présent moyen doit être écarté.

448    Il résulte de tout ce qui précède que l’ensemble des moyens invoqués par la requérante doivent être écartés et que, par suite, ses conclusions aux fins d’annulation doivent être rejetées.

449    De plus, il ne ressort pas des pièces du dossier, au regard des arguments et moyens soulevés par la requérante, que la Commission aurait commis une erreur justifiant une modification du montant de l’amende qui lui a été appliquée. Il convient donc, eu égard à ce qui précède et à l’ensemble des circonstances de l’espèce, de rejeter également les conclusions aux fins de réformation présentées par la requérante.

450    Il y a donc lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

B –  Sur la demande de la Commission visant à une majoration du montant de l’amende

1.     Arguments des parties

451    La Commission note que, dans deux des affaires connexes à la présente affaire, l’affaire T‑462/07, introduite par Galp, et l’affaire T‑482/07, introduite par Nynäs, Galp et Nynäs soutiennent que l’infraction n’a pas été prouvée à suffisance de droit à leur égard et reprochent à la Commission de s’être indûment fondée sur les déclarations émises par Repsol et CEPSA-PROAS dans leur demande au titre de la communication de 2002.

452    Dans l’hypothèse d’une annulation, qui serait même partielle, de la décision attaquée en ce qui concerne Galp et Nynäs, prononcée au motif que les informations apportées par CEPSA-PROAS n’auraient pas une valeur probante suffisante, le Tribunal devrait réexaminer, dans l’exercice de sa pleine juridiction, l’étendue de la coopération de CEPSA-PROAS.

453    La Commission estime que, dans une telle hypothèse, la réduction du montant de l’amende pour coopération accordée à PROAS devrait se limiter à 20 % (5 % de moins que le pourcentage appliqué par la Commission). Il ne peut être exclu que, si le Tribunal estime, dans les deux affaires précitées, que les informations fournies par CEPSA-PROAS ont une valeur très limitée, il doive décider que PROAS ne peut bénéficier d’aucune réduction en raison de sa coopération, celle-ci n’atteignant pas le seuil de « valeur ajoutée significative ».

454    Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du Tribunal du 12 décembre 2007, BASF et UCB/Commission (T‑101/05 et T‑111/05, Rec. p. II‑4959), le Tribunal aurait déjà eu l’occasion de réexaminer la coopération de BASF à la lumière de l’annulation de la décision sur le fond. Il serait clair que, dans certaines circonstances, l’annulation sur le fond peut, et même doit, conduire à une réappréciation de la coopération des entreprises.

455    PROAS conclut au rejet des présentes conclusions.

2.     Appréciation du Tribunal

456    La Commission soutient que le constat, dans le cadre des affaires dans lesquelles Petrogal et Nynäs sont parties requérantes, de l’absence de valeur probante des éléments fournis par CEPSA-PROAS en application de la communication de 2002, s’il conduisait à une annulation de la décision attaquée à l’égard de Petrogal et de Nynäs ou à une réduction du montant de l’amende qui leur a été infligée, devrait nécessairement conduire le juge, dans la présente instance, à réduire le montant de l’amende dont la requérante a bénéficié au titre de ladite communication.

457    À cet égard, il convient de rappeler que les arrêts d’annulation des juridictions de l’Union jouissent de l’autorité absolue de la chose jugée (arrêt de la Cour du 29 avril 2004, Italie/Commission, C‑372/97, Rec. p. I‑3679, point 36).

458    Ainsi, une annulation fait disparaître rétroactivement l’acte en cause à l’égard de tous les justiciables, un arrêt d’annulation ayant un effet erga omnes [arrêt de la Cour du 1er juin 2006, P & O European Ferries (Vizcaya) et Diputación Foral de Vizcaya/Commission, C‑442/03 P et C‑471/03 P, Rec. p. I‑4845, point 43].

459    Cependant, une décision adoptée en matière de concurrence à l’égard de plusieurs entreprises, bien que rédigée et publiée sous la forme d’une seule décision, doit s’analyser comme un faisceau de décisions individuelles constatant à l’égard de chacune des entreprises destinataires la ou les infractions retenues à sa charge et lui infligeant, le cas échéant, une amende. Elle ne peut être annulée qu’en ce qui concerne les destinataires ayant obtenu gain de cause dans leurs recours devant le juge de l’Union et elle demeure contraignante à l’égard des destinataires n’ayant pas introduit de recours en annulation (arrêt Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, précité, points 99 et 100).

460    Néanmoins, la Cour a jugé que l’annulation partielle, dans une instance, d’une décision retenant la responsabilité d’une société, permet au juge, dans une autre instance, d’annuler dans la même mesure la décision retenant la responsabilité de sa société mère, lorsque la responsabilité de cette dernière est entièrement dérivée de celle de sa filiale (arrêt de la Cour du 22 janvier 2013, Commission/Tomkins, C‑286/11 P, non encore publié au Recueil, points 14 et 39).

461    En l’espèce, la responsabilité de PROAS n’est pas dérivée de celle de Petrogal ou de Nynäs.

462    Dès lors, l’annulation des décisions adressées à ces deux dernières entreprises reste sans incidence sur la décision adressée à PROAS et ne saurait donc imposer au juge, contrairement à ce que soutient la Commission, de majorer l’amende infligée à PROAS. Il en va a fortiori de même des conséquences d’une simple réduction du montant de l’amende infligée à Petrogal ou à Nynäs.

463    Certes, l’autorité absolue des arrêts d’annulation des juridictions de l’Union s’attache tant au dispositif de l’arrêt qu’aux motifs qui en constituent le soutien nécessaire (arrêt Italie/Commission, précité, point 36).

464    Cependant, la prise en considération des motifs qui font apparaître les raisons exactes de l’illégalité constatée par le juge de l’Union n’a pour objet que de déterminer le sens exact de ce qui a été jugé dans le dispositif (arrêt de la Cour du 14 septembre 1999, Commission/AssiDomän Kraft Products e.a., C‑310/97 P, Rec. p. I‑5363, point 55).

465    Par suite, si le dispositif d’un arrêt d’annulation est sans incidence sur la situation d’une personne, les motifs qui en constituent le support ne sauraient en avoir.

466    Ainsi, l’annulation des décisions adressées à Petrogal ou à Nynäs ou une réduction du montant de leur amende ne saurait imposer au juge de majorer le montant de l’amende infligée à PROAS, y compris dans le cas où cette annulation ou cette réduction auraient pour motif une absence de valeur probante des éléments fournis par CEPSA-PROAS en application de la communication de 2002.

467    En tout état de cause, l’autorité d’un simple motif d’un arrêt d’annulation ne peut s’appliquer aux personnes qui n’étaient pas parties au procès et à l’égard desquelles l’arrêt ne peut dès lors avoir décidé quoi que ce soit (arrêt Commission/AssiDomän Kraft Products e.a., précité, point 55).

468    Dès lors, à supposer même que l’absence de valeur probante des éléments fournis par CEPSA-PROAS en application de la communication de 2002 soit établie dans le cadre des affaires où Petrogal et Nynäs sont parties requérantes, un tel constat n’imposerait pas au Tribunal, dans la présente instance, de majorer le montant de l’amende infligée à PROAS en diminuant la réduction du montant d’amende dont elle a bénéficié au titre de ladite communication.

469    Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la Commission doivent être rejetées.

470    À supposer même que le Tribunal, bien qu’il n’y soit pas tenu, puisse, sans méconnaître le principe du contradictoire, prendre en compte, dans le cadre de sa compétence de pleine juridiction, les motifs et le dispositif des arrêts prononcés ce jour, Galp Energía España e.a./Commission (T‑462/07, non publié au Recueil), ainsi que Nynäs Petroleum et Nynas Petróleo/Commission (T‑482/07, non publié au Recueil), une telle prise en compte resterait en l’espèce sans incidence sur le montant de l’amende infligée à la requérante.

471    En effet, d’une part, l’annulation partielle par le Tribunal, dans l’arrêt Galp Energía España e.a./Commission, précité, de la décision attaquée et la réduction du montant de l’amende infligée à Galp et, d’autre part, la réduction du montant de l’amende infligée à Nynäs, dans l’arrêt Nynäs Petroleum et Nynas Petróleo/Commission, précité ne reposent nullement sur le constat d’une absence de valeur ajoutée des éléments fournis par CEPSA-PROAS au titre de la communication de 2002.

472    Il résulte de tout ce qui précède et eu égard à l’ensemble des circonstances de l’espèce que l’ensemble des conclusions présentées par la Commission doit être rejeté.

 Sur les dépens

473    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

474    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission en ce sens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Les conclusions de la Commission européenne tendant à une majoration du montant de l’amende sont rejetées.

3)      Productos Asfálticos (PROAS), SA est condamnée aux dépens.

Truchot

Martins Ribeiro

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 septembre 2013.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

A –  Marché en cause

B –  Entreprises en cause

1.  Groupe Repsol

2.  CEPSA-PROAS

3.  BP

4.  Groupe Nynäs

5.  Groupe Petrogal

C –  Procédure administrative

D –  Décision attaquée

1.  Constatation de l’infraction

2.  Calcul du montant des amendes

a)  Détermination et adaptation du « montant de départ » des amendes

b)  Durée de l’infraction

c)  Circonstances aggravantes

d)  Application de la communication de 2002

3.  Dispositif de la décision attaquée

Procédure et conclusions des parties

En droit

A –  Sur les conclusions présentées à fin d’annulation de la décision attaquée et, à titre subsidiaire, à fin de réduction du montant de l’amende

1.  Sur le premier moyen, pris de la méconnaissance des droits de la défense et du principe de bonne administration

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

2.  Sur le deuxième moyen, pris de l’erreur d’appréciation de la gravité de l’infraction

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

Sur la qualification de l’infraction

Sur les circonstances atténuantes

3.  Sur le troisième moyen, pris de l’erreur commise dans la détermination du chiffre d’affaires pertinent de PROAS aux fins du calcul du montant de l’amende

a)  Sur le premier grief, tiré de la prise en considération du seul bitume de pénétration

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

b)  Sur le deuxième grief, tiré de l’omission des chiffres de ventes intragroupe de bitume de Repsol à Composán

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

c)  Sur le troisième grief, tiré de la prise en compte d’un exercice commercial dépourvu de pertinence

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

4.  Sur le quatrième moyen, pris de l’erreur entachant la qualification attribuée à PROAS de « meneur » aux côtés de Repsol

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

5.  Sur le cinquième moyen, pris de l’application erronée de la communication de 2002

a)  Sur la demande de mesures d’organisation de la procédure

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

b)  Sur le grief pris de la violation du principe d’égalité de traitement

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

c)  Sur le grief pris d’une erreur dans l’application et l’interprétation de la communication de 2002

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

d)  Sur le grief pris de la violation des principes d’équité et de proportionnalité

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

e)  Sur la demande d’admission au bénéfice d’une circonstance atténuante tenant à la collaboration effective de PROAS

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

6.  Sur le sixième moyen, pris de la méconnaissance du principe du respect d’un délai raisonnable

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

7.  Sur le septième moyen, pris de la violation du plafonnement du montant de l’amende à 10 % du chiffre d’affaires

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

8.  Sur le huitième moyen, pris de la violation de l’obligation de motivation

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

B –  Sur la demande de la Commission visant à une majoration du montant de l’amende

1.  Arguments des parties

2.  Appréciation du Tribunal

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’espagnol.