Language of document : ECLI:EU:C:2016:622

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MICHAL BOBEK

présentées le 28 juillet 2016 (1)

Affaire C289/15

Jozef Grundza

[demande de décision préjudicielle
formée par le Krajský súd v Prešove (cour régionale de Prešov, Slovaquie)]

« Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre 2008/909/JAI – Ressortissant de l’État d’exécution condamné dans l’État d’émission pour non-respect d’une décision officielle – Condition de la double incrimination »






I –    Introduction

1.        M. Jozef Grundza est un ressortissant slovaque. Il a été intercepté au volant d’une voiture dans les rues de Prague (République tchèque) en violation d’une décision antérieure d’une autorité administrative tchèque lui interdisant de conduire des véhicules à moteur. Par la suite, il a été condamné par une juridiction tchèque à quinze mois de prison pour, entre autres, « avoir fait obstruction à l’exécution d’une décision officielle ».

2.        Sur la base de la décision-cadre 2008/909/JAI (2), l’autorité judiciaire tchèque compétente a demandé que le jugement rendu contre M. Grundza soit reconnu et que sa peine soit exécutée en Slovaquie. Toutefois, la juridiction slovaque saisie de cette demande a des doutes sur le point de savoir si la condition de la double incrimination est satisfaite en l’espèce, étant donné que la décision qui a fait l’objet d’une obstruction a été adoptée par une autorité tchèque, et non par une autorité slovaque.

3.        La présente affaire invite la Cour à interpréter la condition de la double incrimination dans le contexte de l’article 7, paragraphe 3, de la décision-cadre 2008/909. Quels éléments sont pertinents et à quel degré d’abstraction ces éléments doivent-ils être pris en considération pour que soit satisfaite la condition de la double incrimination ?

II – Le cadre juridique

A –    Le droit de l’Union

4.        Aux termes de son article 3, paragraphe 1, la décision-cadre 2008/909 « vise à fixer les règles permettant à un État membre, en vue de faciliter la réinsertion sociale de la personne condamnée, de reconnaître un jugement et d’exécuter la condamnation ».

5.        L’article 7, paragraphe 1, de la décision-cadre 2008/909 contient une liste de 32 infractions pour lesquelles la condition de la double incrimination ne doit pas être contrôlée aux fins de la reconnaissance d’un jugement ou de l’exécution d’une condamnation.

6.        L’article 7, paragraphe 3, de la décision-cadre 2008/909 prévoit que « pour les infractions autres que celles qui sont visées au paragraphe 1, l’État d’exécution peut subordonner la reconnaissance du jugement et l’exécution de la condamnation à la condition que les faits sur lesquels porte le jugement constituent une infraction également selon son droit, quels que soient les éléments constitutifs ou la qualification de celle-ci ».

7.        L’article 9, paragraphe 1, de la décision-cadre 2008/909 contient une liste de motifs de non-reconnaissance d’un jugement ou de non‑exécution d’une condamnation. Est pertinent pour la présente affaire le motif énuméré au point d) de cette disposition, aux termes duquel l’autorité compétente de l’État d’exécution peut refuser de reconnaître le jugement et d’exécuter la condamnation si « dans les cas visés à l’article 7, paragraphe 3, […] le jugement concerne des faits qui ne constitueraient pas une infraction selon le droit de l’État d’exécution. Toutefois, en matière de taxes et d’impôts, de douane et de change, l’exécution d’un jugement ne peut être refusée au motif que le droit de l’État d’exécution n’impose pas le même type de taxes ou d’impôts ou ne contient pas le même type de réglementation en matière de taxes, d’impôts, de douane et de change que le droit de l’État d’émission ».

B –    Le droit slovaque

8.        La décision-cadre 2008/909 a été transposée par la République slovaque par la zákon o uznávaní a výkone rozhodnutí, ktorými sa ukladá trestná sankcja spojená s odňatím slobody v Európskej Únii (loi no 549/2011 relative à la reconnaissance et à l’exécution des décisions prononçant des sanctions pénales privatives de liberté dans l’Union européenne, ci-après la « loi no 549/2011 »). À l’occasion de la transposition de l’article 7, paragraphe 3, de la décision-cadre 2008/909, la République slovaque a choisi de maintenir la condition de la double incrimination pour les infractions couvertes par cette disposition.

9.        Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la loi no 549/2011, il est en principe possible de reconnaître et d’exécuter un jugement en République slovaque si l’acte pour lequel le jugement a été rendu constitue également une infraction au regard du droit slovaque. Aux termes de l’article 16, paragraphe 1, sous b), de la loi no 549/2011, « le juge refuse de reconnaître et d’exécuter la décision si le fait pour lequel a été adoptée la décision ne constitue pas une infraction selon l’ordre juridique de la République slovaque […] ».

10.      Tant le droit slovaque que le droit tchèque prévoient une infraction consistant à faire obstruction à l’exécution d’une décision officielle. La définition de cette infraction est pratiquement identique dans les deux ordres juridiques.

11.      Aux termes de l’article 337, paragraphe 1, sous a), du Trestní zákoník (code pénal, République tchèque), « toute personne qui fait obstruction à l’exécution d’une décision judiciaire ou d’un autre organe de l’autorité publique, ou qui rend celle-ci sensiblement plus difficile, en ce qu’elle exerce une activité qui lui a été interdite par cette décision ou pour laquelle lui a été retirée l’habilitation correspondante en application d’une autre disposition juridique ou pour laquelle elle a perdu l’habilitation correspondante, est passible d’une peine privative de liberté allant jusqu’à deux ans ».

12.      Aux termes de l’article 348, paragraphe 1, sous d), du Trestný zákon (code pénal, Slovaquie), « toute personne qui fait obstruction à l’exécution d’une décision judiciaire ou d’un autre organe de l’autorité publique, ou qui rend celle-ci sensiblement plus difficile, en ce qu’elle exerce une activité qui lui a été interdite par cette décision, est passible d’une peine privative de liberté allant jusqu’à deux ans ».

13.      La condition de la double incrimination a déjà été examinée dans deux décisions du Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque), qui sont toutes deux citées dans la décision de renvoi. Ces deux décisions concernaient le transfert de personnes condamnées et l’application de la condition de la double incrimination dans des circonstances factuellement similaires – la reconnaissance en Slovaquie d’une condamnation prononcée en République tchèque pour obstruction à l’exécution d’une décision officielle. Toutefois, ces décisions ont été rendues non pas dans le contexte particulier de la décision-cadre 2008/909, mais plutôt sous l’empire du régime légal antérieur, applicable à l’époque des faits.

14.      En 2010, le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) a déclaré que la condition de la double incrimination n’était pas satisfaite pour l’infraction en cause dans cette affaire, à savoir l’obstruction à l’exécution d’une décision officielle. La raison résidait dans ce que l’on appelle une analyse in concreto de la double incrimination, qui a conduit le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) à conclure que l’un des éléments de l’infraction pénale faisait défaut au regard du droit slovaque : le jugement tchèque qui devait être reconnu ne portait pas sur une décision adoptée par une autorité slovaque (3).

15.      Par la suite, toutefois, le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) a adopté une approche différente. Il a conclu, dans une autre affaire, que l’analyse in concreto de la double incrimination avait en fait établi l’existence d’une infraction d’obstruction à l’exécution d’une décision officielle. Le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) a considéré que l’intérêt protégé de la République tchèque qui avait été affecté par l’obstruction à l’exécution de la décision officielle tchèque devait être considéré par analogie comme s’il s’agissait d’un intérêt de l’État slovaque. En d’autres termes, le fait que l’infraction pénale concerne non pas une décision officielle adoptée par l’autorité slovaque, mais une décision officielle d’une autorité tchèque, ne s’opposait pas à la conclusion que la condition de la double incrimination avait été satisfaite (4).

III – Les faits, la procédure nationale et la question préjudicielle déférée

16.      Le 12 février 2014, l’autorité municipale de Přerov (République tchèque) a imposé à M. Grundza une interdiction de conduire des véhicules à moteur. Le 9 mars 2014, M. Grundza a commis un vol en République tchèque. Le 9 août 2014, M. Grundza conduisait un véhicule à moteur à Prague et a été intercepté. Le 28 août 2014, il a été reconnu coupable de l’infraction d’obstruction à l’exécution d’une décision officielle. Finalement, le 3 octobre 2014, une condamnation cumulative (5) à quinze mois de privation de liberté a été prononcée à son encontre pour vol et obstruction à l’exécution d’une décision officielle.

17.      Par la suite, l’autorité judiciaire tchèque compétente a demandé, en application de la décision-cadre 2008/909, que le jugement prononcé à l’encontre de M. Grundza soit reconnu et que la condamnation soit exécutée en Slovaquie.

18.      Dans le cadre de l’examen de cette demande et eu égard à la jurisprudence divergente du Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) relative à l’appréciation de la double incrimination présentée ci-dessus, la juridiction de renvoi a des doutes sur le point de savoir si la condition de la double incrimination est satisfaite en l’espèce, étant donné que la décision ayant fait l’objet d’une obstruction a été adoptée par une autorité tchèque.

19.      Dans ces circonstances, le Krajský súd v Prešove (cour régionale de Prešov, Slovaquie) a suspendu la procédure et a saisi la Cour de la question suivante :

« Les articles 7, paragraphe 3, et 9, paragraphe 1, sous d), de la décision-cadre [2008/909/JAI] doivent-ils être interprétés en ce sens que la condition de la double incrimination n’est remplie que si le fait pour lequel a été rendue la décision qui doit être reconnue constitue, au regard de son appréciation concrète (in concreto), une infraction également selon le droit de l’État d’exécution (quels que soient les éléments constitutifs ou la qualification de l’infraction), ou suffit-il pour que cette condition soit remplie que ce fait soit délictueux de manière générale (in abstracto) également selon le droit de l’État d’exécution ? »

20.      Des observations écrites ont été présentées par les gouvernements autrichien, tchèque, slovaque et suédois, ainsi que par la Commission européenne. Les gouvernements tchèque et slovaque ainsi que la Commission ont été entendus lors de l’audience qui s’est tenue le 25 mai 2016.

IV – Appréciation

A –    Introduction : une note de terminologie

21.      Tous les États membres ayant présenté des observations ainsi que la Commission conviennent du fait que la condition de la double incrimination est satisfaite en l’espèce. Ce qui diffère, toutefois, est leur raisonnement pour parvenir à une telle conclusion.

22.      La question déférée par la juridiction nationale repose sur la distinction terminologique entre une appréciation in abstracto et une appréciation in concreto de la condition de la double incrimination.

23.      Cette terminologie est fréquemment utilisée par la doctrine en matière de droit pénal. Le contenu spécifique et précis de ces termes (in concreto et in abstracto) est toutefois moins clair. Il semble être diversement compris par différents auteurs (6).

24.      En cherchant un dénominateur commun à ces différentes définitions, on pourrait peut-être suggérer que l’appréciation de la double incrimination in abstracto commande de vérifier si le comportement et les actes mentionnés dans le jugement de l’État d’émission correspondraient à une infraction pénale s’ils avaient été commis sur le territoire de l’État d’exécution.

25.      L’appréciation de la double incrimination in concreto semble exiger bien plus, en ce compris le respect d’autres conditions de responsabilité pénale telle que définie par les lois de l’État d’exécution, comme l’âge, la situation mentale de l’accusé ou la prise en compte d’autres circonstances de fait dans lesquelles l’acte a été commis.

26.      Les observations écrites ainsi que les débats lors de l’audience démontrent que les États membres adoptent des positions très diverses quant à l’interprétation exacte des notions « in concreto » et « in abstracto » dans le contexte de la double incrimination.

27.      Cette discussion a aussi révélé que la distinction entre l’appréciation de la double incrimination in abstracto et celle in concreto n’équivaut pas à un choix binaire, mais s’apparente plutôt à une échelle mobile. Cette distinction est fondée sur le niveau d’abstraction retenu pour analyser la double incrimination. Au niveau d’abstraction le plus élevé, il pourrait être soutenu que l’accent est mis sur la simple immoralité de l’acte : un acte déterminé est jugé immoral dans les deux systèmes. Plus bas, on trouve les éléments constitutifs de base du délit. Encore plus bas sur l’échelle de l’abstraction, on peut examiner tous les autres éléments particuliers de la responsabilité pénale, en ce compris, par exemple, la question de l’âge, l’existence (l’absence) de circonstances exceptionnelles, mais également la sévérité des sanctions. Au niveau le plus bas de l’abstraction (ou, plutôt, au niveau le plus élevé de la concrétisation), tous les éléments de fait individuels de l’acte sont également pertinents. Ce qui est requis à ce niveau est en fait une identité virtuelle de l’acte et de son appréciation en droit au regard des deux ordres juridiques en cause.

28.      Où convient-il donc de tracer la ligne de démarcation entre in abstracto et in concreto ? De manière similaire à la position défendue par la Commission lors de l’audience, je suis d’avis qu’un débat sur ces notions et leur contenu spécifique n’est peut-être pas totalement utile aux fins de fournir à la juridiction nationale une réponse utile dans la présente affaire. De plus, en raison des différentes interprétations des États membres qui sont intervenus quant à la définition précise à donner aux termes « in abstracto » et « in concreto », apposer des « étiquettes » terminologiques pourrait être potentiellement trompeur, puisque cela sera nécessairement compris de diverses manières.

29.      C’est pourquoi, plutôt que de s’attacher à des notions, l’analyse dans les présentes conclusions sera fonctionnelle. Je suggérerai à la juridiction nationale une réponse fondée sur le fonctionnement de la condition de la double incrimination dans le contexte du système intra‑Union de coopération judiciaire en matière pénale et dans le contexte de la décision-cadre 2008/909 en particulier.

30.      Toutefois, avant de se lancer dans cette analyse fonctionnelle, il est utile d’envisager brièvement l’évolution de la notion de double incrimination dans le contexte du droit international et du droit de l’Union. Cette évolution affine notre compréhension de ce que la décision-cadre 2008/909 est censée réaliser.

B –    Évolution de la condition de la double incrimination

31.      L’exigence de double incrimination fait généralement dépendre l’exercice de la juridiction extraterritoriale d’un État du fait que le comportement en cause est érigé en infraction à la fois par le droit en vigueur à l’endroit où l’acte a été commis et par le droit de l’État sanctionnant l’acte (7). Elle est liée au principe de légalité et, plus spécifiquement, de prévisibilité des peines (nulla poena sine lege).

32.      La double incrimination a été une condition traditionnelle de l’extradition. Bien que des instruments de droit international puissent énumérer des infractions pénales spécifiques qui sont soumises à l’extradition, celle-ci sera souvent soumise à l’exigence additionnelle que l’infraction soit érigée en infraction dans les ordres juridiques des deux États concernés (8).

33.      L’exigence de double incrimination est ancrée dans les principes de souveraineté, de réciprocité et de non-intervention, qui constituent les éléments fondamentaux de la coopération entre États consacrée dans les instruments de droit international public. Cette coopération vise essentiellement à éviter des interférences dans les affaires intérieures des États concernés (9).

34.      En revanche, le système de coopération judiciaire intra-Union repose avant tout sur le principe de reconnaissance mutuelle (10). Dans ce système, les ordres juridiques des différents États membres sont ouverts les uns aux autres sur la base d’une confiance mutuelle renforcée dans les systèmes judiciaires pénaux de chacun d’entre eux.

35.      Sur un plan plus pratique, cela signifie que, dès lors qu’une décision judiciaire a été adoptée dans un État membre, « elle doit être reconnue et exécutée dans d’autres États membres aussi vite que possible et avec le moins de conflit possible, comme s’il s’agissait d’une décision nationale » (11).

36.      Le principe de reconnaissance mutuelle a abouti, entre autres, à l’établissement d’une liste d’infractions pénales pour lesquelles le contrôle de la condition de la double incrimination a été supprimé et par conséquent ne doit pas être effectué.

37.      La suppression, quoique partielle, de l’exigence de la double incrimination représente un changement qualitatif par rapport à la pratique découlant des instruments de droit public international. Cette suppression a été introduite pour la première fois par la décision‑cadre 2002/584/JAI (12) et a été étendue depuis à plusieurs autres actes de droit de l’Union (13), y compris la décision-cadre 2008/909.

38.      La décision-cadre 2002/584 a remplacé le système multilatéral d’extradition auparavant en vigueur entre les États membres (14). Dans une logique similaire, la décision-cadre 2008/909 a remplacé plusieurs instruments de droit international en vue d’augmenter le niveau de coopération entre États membres.

39.      Les instruments de droit international qui ont précédé la décision‑cadre 2008/909 étaient la convention sur le transfèrement des personnes condamnées, la convention entre les États membres des Communautés européennes sur l’exécution des condamnations pénales étrangères et la convention européenne sur la valeur internationale des jugements répressifs (15). Tous ces instruments contenaient des dispositions relatives à la double incrimination (16).

40.      Il est important d’avoir ces dynamiques historiques à l’esprit au moment d’envisager la fonction de la condition de la double incrimination dans la décision-cadre 2008/909. L’application de cette règle sous l’empire de la décision-cadre 2008/909 ne devrait pas produire d’interactions moins développées ou plus fastidieuses entre États membres par rapport au système précédent moins intégré, basé sur les instruments de droit international précités.

C –    Le fonctionnement de la condition de la double incrimination dans le contexte de la décision-cadre 2008/909

41.      Par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi s’interroge en substance sur le niveau approprié d’abstraction ou de généralisation auquel une infraction entraînant une condamnation doit être examinée aux fins de la vérification de la condition de la double incrimination au regard de la décision‑cadre 2008/909. Plus spécifiquement, la question vise à déterminer si l’article 7, paragraphe 3, et l’article 9, paragraphe 1, sous d), de la décision-cadre 2008/909 doivent être interprétés en ce sens que la condition de la double incrimination est satisfaite lorsque :

a)      la reconnaissance du jugement et l’exécution de la condamnation sont demandées pour des actes qui ont été qualifiés dans l’État d’émission d’infraction pénale consistant en « l’obstruction à l’exécution d’une décision officielle », et lorsque

b)      une infraction pénale qualifiée d’une manière similaire existe aussi dans le droit de l’État d’exécution, mais que

c)      le droit, ou plutôt la jurisprudence, de l’État d’exécution exige apparemment, pour qu’une telle infraction soit établie, que la décision officielle ait été adoptée par une de ses propres autorités.

42.      Il convient de rappeler d’emblée que l’application de la décision‑cadre 2008/909 et le contrôle de la double incrimination dépendent du point de savoir si l’infraction pénale en cause figure sur la liste de l’article 7, paragraphe 1, de cette décision-cadre. Pour les infractions qui y sont énumérées, les juridictions de l’État d’exécution ne sont en principe (17) pas autorisées à vérifier si la condition de la double incrimination est satisfaite dans le cadre de la reconnaissance du jugement et de l’exécution de la condamnation prononcés dans l’État d’exécution.

43.      L’infraction consistant en une obstruction à l’exécution d’une décision officielle ne figure pas sur cette liste.

44.      Lorsqu’une infraction pénale n’est pas reprise à l’article 7, paragraphe 1, de la décision-cadre 2008/909, la double incrimination peut être examinée. L’examen de la double incrimination pour de telles infractions est une option pour l’État membre, non pas une obligation. Par conséquent, les États membres sont libres de décider s’ils appliqueront la condition de la double incrimination aux infractions non reprises à l’article 7, paragraphe 1, de cette décision-cadre.

45.      La République slovaque a fait usage de cette possibilité. Par conséquent, les juridictions slovaques doivent vérifier cette condition lorsqu’elles se prononcent sur des demandes de transfert de personnes condamnées dans d’autres États membres.

46.      Dans ces circonstances, afin de fournir à la juridiction de renvoi des indications utiles sur le critère applicable à l’appréciation de la double incrimination, j’envisagerai tout d’abord les éléments pertinents à prendre en considération dans le cadre d’une telle appréciation (sous 1), avant d’examiner la question spécifique de l’intérêt étatique protégé dans la présente affaire (sous 2).

1.      Les éléments pertinents aux fins de l’appréciation de la double incrimination

47.      L’article 7, paragraphe 3, de la décision-cadre 2008/909 définit la portée de l’appréciation de la double incrimination en exigeant que l’autorité compétente vérifie si les actes en cause constituent une infraction également selon le droit de l’État d’exécution, quels que soient les éléments constitutifs ou la qualification de celle-ci.

48.      Deux éléments valent la peine d’être soulignés. Premièrement, en soulignant l’approche flexible à adopter à l’égard des éléments constitutifs de l’infraction pénale, l’article 7, paragraphe 3, de la décision-cadre 2008/909 fait apparaître clairement qu’il ne doit pas y avoir de correspondance parfaite entre toutes les composantes de l’infraction, telle que qualifiée respectivement par le droit de l’État d’émission et de l’État d’exécution.

49.      Deuxièmement, en insistant sur la flexibilité en ce qui concerne la qualification de l’infraction pénale, l’article 7, paragraphe 3, de la décision-cadre 2008/909 fait apparaître tout aussi clairement qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une correspondance parfaite dans le nom ou la taxonomie de l’infraction entre l’État d’émission et l’État d’exécution.

50.      À l’inverse, ce que l’article 7, paragraphe 3, de la décision-cadre 2008/909 souligne comme étant pertinent, et en fait décisif, est une correspondance entre les éléments factuels de base de l’infraction, tels que reflétés dans le jugement de l’État d’émission, d’une part, et la définition de l’infraction pénale fournie par le droit de l’État d’exécution, d’autre part.

51.      L’appréciation de la double incrimination requiert donc essentiellement deux étapes : 1) une délocalisation qui implique de retenir les caractéristiques de base de l’acte commis dans l’État d’émission et de considérer l’acte comme s’il avait été commis dans l’État d’exécution, et 2) une qualification des faits qui implique de faire relever ces faits de base de toute infraction adéquate telle que définie par le droit de l’État d’exécution.

52.      En d’autres termes, les questions que doit se poser l’autorité judiciaire de l’État d’exécution dans le cadre d’une telle « conversion » sont : (les) l’acte(s) qui a(ont) conduit au jugement dans l’État d’émission peu(ven)t-il(s) relever d’une infraction pénale prévue par le droit pénal de l’État d’exécution ? Un tel acte serait-il en soi passible d’une sanction pénale s’il avait été commis sur le territoire de l’État d’exécution ?

53.      Au moment de répondre à ces questions et de définir l’(les)acte(s) pertinent(s) à convertir, je suis d’avis que ces questions doivent être envisagées à un niveau d’abstraction relativement élevé. Une correspondance est recherchée entre des éléments factuels de base que les autorités judiciaires de l’État d’émission jugent pertinents pour la condamnation pénale du contrevenant et les éléments constitutifs d’une infraction telle que qualifiée par le droit pénal de l’État d’exécution.

54.      À l’inverse, le libellé de l’article 7, paragraphe 3, de la décision‑cadre 2008/909 (« quels que soient les éléments constitutifs ou la qualification de celle-ci ») indique clairement que la correspondance ne doit pas être recherchée entre les définitions normatives respectives de l’infraction pénale dans les systèmes juridiques de l’État membre d’émission et de l’État membre d’exécution (18).

55.      Très certainement, dans plusieurs cas, il sera plutôt facile de trouver une correspondance déjà au niveau normatif. Tel semble être le cas en l’occurrence. L’infraction pénale consistant en l’obstruction à l’exécution d’une décision officielle est définie de manière pratiquement identique dans les codes pénaux tchèque et slovaque. Dans d’autres cas, cependant, l’infraction pénale dans l’État d’exécution peut être interprétée de manière légèrement différente par rapport à l’infraction dans l’État d’émission. Les éléments constitutifs des deux infractions peuvent ne pas être exactement les mêmes. Ou les éléments constitutifs peuvent être plutôt similaires, mais les infractions peuvent être désignées quelque peu différemment dans les systèmes juridiques respectifs. De plus, dans les codes pénaux, la définition de l’infraction pénale « initiale » peut être plutôt étroite et faire partie d’une catégorie plus large d’infractions pénales, qui doivent être lues ensemble aux fins de l’appréciation de la double incrimination.

56.      Toutefois, ainsi que je l’ai déjà souligné, il est tout à fait clair que la conversion voulue d’une infraction depuis l’État d’émission vers l’État d’exécution est censée être « diagonale » (en faisant relever les éléments factuels de base de l’État d’émission du droit de l’État d’exécution), et non pas « horizontale » (par laquelle une correspondance serait recherchée entre les définitions normatives d’une infraction dans les deux États).

57.      Pour fournir un exemple plus concret, ce qui est supposé être converti, dans le cas de M. Grundza, est la description de base de l’acte, qui peut être rendue simplement de la manière suivante : l’acte d’une personne conduisant un véhicule à moteur en dépit de l’existence d’une décision officielle lui interdisant un tel comportement.

58.      Par ailleurs, la question est : un tel acte serait-il également passible d’une sanction pénale au regard du droit de l’État d’exécution, s’il avait été commis sur son territoire ? Dans le cas de la République slovaque, la réponse semble être affirmative.

59.      Cependant, la délocalisation et la qualification des faits peuvent en général aller même plus loin, jusqu’à des modifications dans la taxonomie de l’infraction au regard du droit de l’État d’exécution. L’exemple donné par le gouvernement tchèque lors de l’audience fournit une illustration utile à cet égard. Il concerne l’infraction pénale de « conduite sans permis » prévue par le Strafgesetzbuch (code pénal, Allemagne) (19). Il semble que, en droit pénal allemand, l’acte commis par M. Grundza serait potentiellement qualifié non pas d’« obstruction à l’exécution d’une décision officielle », mais de « conduite sans permis ». Toutefois, même si tel devait être le cas, je considère que la condition de la double incrimination au sens de l’article 7, paragraphe 3, de la décision-cadre 2008/909 serait toujours satisfaite. Des modifications dans la taxonomie du droit pénal sont expressément prévues et autorisées par le libellé de cette disposition, lorsque des infractions pénales sont converties d’un système juridique vers un autre.

60.      En d’autres termes, selon moi, l’approche à adopter aux fins de l’appréciation de la double incrimination dans le contexte de la décision-cadre 2008/909 se fonde sur la généralisation, à un niveau plus élevé d’abstraction, du comportement qui a été examiné et condamné par la juridiction de l’État d’émission. Cette généralisation implique nécessairement une certaine flexibilité dans le processus de conversion au cours duquel l’acte en cause est examiné en se référant aux différentes définitions disponibles des infractions pénales dans l’État d’exécution.

61.      De plus, l’affirmation selon laquelle l’appréciation de la double incrimination nécessite un degré considérable d’abstraction est également confirmée par la portée plutôt limitée des informations qui sont fournies par les autorités compétentes de l’État d’émission sur le formulaire standard figurant à l’annexe I à la décision-cadre 2008/909.

62.      Le niveau d’information à fournir dépend du point de savoir si la demande de reconnaissance du jugement et d’exécution de la condamnation concerne des infractions pénales énumérées à l’article 7, paragraphe 1 [points 1 et 2 du cadre h) de l’annexe I], de la décision‑cadre 2008/909 ou si la demande concerne d’autres infractions (non-énumérées) [points 1 et 3 du cadre h) de l’annexe I].

63.      Cependant, même pour les infractions non énumérées qui peuvent faire l’objet d’un contrôle de la double incrimination, les informations standardisées à fournir sont plutôt basiques. Ainsi que l’a fait observer le gouvernement suédois dans ses observations écrites, un volume d’informations aussi limité ne permettrait certainement pas un examen plus complet de l’affaire.

64.      En résumé, il peut y avoir des différences individuelles dans la taxonomie du droit pénal, mais ces particularités ne sont pas pertinentes aux fins de l’appréciation de la condition de la double incrimination. Ce qui importe est le point de savoir si ce type d’acte, s’il était commis sur le territoire de l’État d’exécution, serait en soi passible d’une sanction pénale dans l’État d’exécution.

65.      Il convient de souligner particulièrement les mots en soi passible d’une sanction, par opposition à la question de savoir si, en cas de poursuites pénales, la personne condamnée aurait également été reconnue coupable et condamnée si le procès pénal avait été mené en application du droit de l’État d’exécution.

66.      À cet égard, je fais observer que l’objectif poursuivi par la décision-cadre 2008/909 est de faciliter la réintégration sociale des personnes condamnées en leur permettant de purger leur condamnation dans un autre État membre.

67.      Cela signifie que l’objectif est le transfert de personnes déjà condamnées et leur réintégration sociale. Il ne s’agit très certainement pas de contester des décisions définitives ou de mener un nouveau procès pénal dans l’État membre d’exécution. Ce n’est pas sans raison que la coopération établie par la décision-cadre 2008/909 peut être déclenchée seulement après que le procès a été mené et qu’un jugement définitif a été rendu dans l’État d’exécution.

68.      Dans ce contexte, la condition de la double incrimination prévue à l’article 7, paragraphe 3, de la décision-cadre 2008/909 doit être correctement interprétée comme une soupape de sécurité résiduelle que l’État membre d’exécution peut déclencher en vue de refuser l’exécution d’une condamnation pour un acte qui n’est pas en soi érigé en infraction par son propre droit. En d’autres termes, un État membre ne saurait être tenu de reconnaître et d’exécuter une condamnation pour un comportement que cet État et sa société ne considèrent pas comme étant moralement répréhensible de sorte à être érigé en infraction (20).

2.      La pertinence de l’intérêt étatique spécifique protégé

69.      Ainsi que je l’ai déjà exposé ci-dessus, l’appréciation de la condition de la double incrimination dans le contexte de la décision‑cadre 2008/909 requiert une délocalisation des faits, effectuée à un niveau élevé d’abstraction, et leur qualification au regard du droit pénal de l’État d’exécution.

70.      Il n’est que logique que cette conversion soit également effectuée en tenant compte de l’intérêt de l’État particulier concerné par le délit. Aux fins de la définition de l’acte à convertir, un intérêt de l’État saurait être considéré non pas comme l’intérêt national de l’État particulier (c’est-à-dire de l’État d’émission), mais plutôt comme un intérêt d’État qui sera apprécié ensemble avec d’autres éléments de base de l’acte concerné, au regard du droit pénal de l’État d’exécution.

71.      Il peut être aisément admis que, dans des cas particuliers plutôt extrêmes, il peut y avoir des exceptions à une conversion sans réserve des intérêts étatiques respectifs de l’État d’émission et de l’État d’exécution. Cependant, pour une vaste majorité d’autres infractions pénales, en ce compris l’obstruction à l’exécution d’une décision officielle, un système de reconnaissance mutuelle ne peut fonctionner que si ce qui est effectivement protégé est l’autorité d’« une décision officielle », et non pas uniquement « l’autorité des décisions adoptées exclusivement par les autorités de l’État membre X ».

72.      Cette interprétation de l’article 7, paragraphe 3, la décision-cadre 2008/909 est également confirmée par deux autres arguments systémiques.

73.      Premièrement, je relève que certaines des infractions pénales énumérées à l’article 7, paragraphe 1, de la décision-cadre 2008/909 (pour lesquelles la condition de la double incrimination a été totalement supprimée) visent clairement à protéger l’intérêt spécifique de l’État au détriment duquel elles ont été commises. Il s’agit, par exemple, de sabotage, de corruption, de faux-monnayage et de contrefaçon de monnaie, d’aide à l’entrée et au séjour irréguliers, de falsification de documents administratifs et de trafic de faux ou de falsification de moyens de paiement.

74.      Deuxièmement, l’article 9, paragraphe 1, sous d), de la décision‑cadre 2008/909 prévoit la possibilité de refuser la reconnaissance d’un jugement et l’exécution d’une condamnation si la condition de la double incrimination n’est pas satisfaite. Toutefois, il est indiqué qu’« en matière de taxes et d’impôts, de douane et de change, l’exécution d’un jugement ne peut être refusée au motif que le droit de l’État d’exécution n’impose pas le même type de taxes ou d’impôts ou ne contient pas le même type de réglementation en matière de taxes, d’impôts, de douane et de change que le droit de l’État d’émission ».

75.      Les deux dispositions corroborent, selon moi, la conclusion selon laquelle la reconnaissance mutuelle en application de la décision‑cadre 2008/909 est censée transcender, en général, le particularisme des intérêts de l’État membre. Après tout, n’est-ce pas précisément ce dont il est question avec la reconnaissance et le respect mutuels ?

76.      Au vu de ce qui précède, je conclus qu’il y a lieu d’interpréter l’article 7, paragraphe 3, et l’article 9, paragraphe 1, sous d), de la décision-cadre 2008/909 en ce sens que la condition de la double incrimination est satisfaite si la reconnaissance du jugement et l’exécution de la condamnation sont demandées pour un acte qui, envisagé à un niveau relativement élevé d’abstraction, est en soi passible d’une sanction pénale au regard du droit de l’État d’exécution, indépendamment d’une correspondance parfaite entre la taxonomie utilisée pour décrire cette infraction pénale dans les ordres juridiques de l’État d’émission et de l’État d’exécution.

V –    Conclusion

77.      À la lumière des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la question déférée par le Krajský súd v Prešove (cour régionale de Prešov, Slovaquie) comme suit :

Il convient d’interpréter l’article 7, paragraphe 3, et l’article 9, paragraphe 1, sous d), de la décision-cadre 2008/909/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne en ce sens que la condition de la double incrimination est satisfaite si la reconnaissance du jugement et l’exécution de la condamnation sont demandées pour un acte qui, envisagé à un niveau relativement élevé d’abstraction, est en soi passible d’une sanction pénale au regard du droit de l’État d’exécution, indépendamment d’une correspondance parfaite entre la taxonomie utilisée pour décrire cette infraction pénale dans les ordres juridiques de l’État d’émission et de l’État d’exécution.


1      Langue originale : l’anglais.


2      Décision-cadre du Conseil du 27 novembre 2008 concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne (JO 2008, L 327, p. 27).


3      Arrêt du Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) du 26 janvier 2010, sp. Zn. 2 Urto 1/2011, publié au Zbierka zákonov Slovenskej republikysous la référence no 2/2011, p. 9, accessible à l’adresse Internet suivante :http ://www.supcourt.gov.sk/data/files/88_stanoviska_rozhodnutia_2_2011.pdf


4      Ordonnance du Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) du 5 septembre 2012, sp. Zn. 3Urto 1/2012, accessible à l’adresse Internet suivante : http ://www.supcourt.gov.sk/data/att/23S 02_subor.pdf


5      En droit tchèque, lorsqu’il impose une « condamnation cumulative » (souhrnný trest), le tribunal sanctionne, par une seule condamnation, deux ou plusieurs infractions pénales commises par le même auteur. Le tribunal annule d’abord le dispositif de l’arrêt(des arrêts) préexistant(s) qui traite(nt) de la condamnation et « absorbe » ensuite, d’une certaine manière, la(les) condamnation(s) déjà infligée(s) dans une seule condamnation.


6      Voir, notamment, Plachta, M., « The role of double criminality in international cooperation in penal matters », in Jareborg, N. (éd.), Double criminality :Studies in International Criminal Law, Iustus, Uppsala, 1989, p. 105 ; Ballegooij, W., The Nature of Mutual Recognition in European Law : Re-examining the Notion form an Individual Rights Perspective with a View to Its Further Development in the Criminal Justice Area, Intersentia, Cambridge, 2015, p. 127 ; Flore, D., « Reconnaissance mutuelle, double incrimination et territorialité », in La reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires pénales dans l’Union européenne, Éditions de l’Université de Bruxelles, 2001, p. 69 et 70 ; Keijzer, N., « The Double Criminality Requirement », in Blekxtoon et al. (éd.), Handbook on the European Arrest Warrant, T.M.C. Asser Press, La Haye, 2005, p. 137 ; Cahin, G., « La double incrimination dans le droit de l’extradition », RGDIP, 2013, no 3, p. 586 ; Cameron, I., « Double criminality under pressure »», in Festskrift Till Per Ole Träskman, Norstedts Juridik AB, Stockholm, 2011, p. 124.


7      Cameron, I., op. cit., p. 122 et 123.


8      Thouvenin, J.-M., « L’extradition », inAscensio, H., Decaux, E., et Pellet, A., Droit international pénal, 2e éd. révisée, Pedone, Paris, 2012, p. 1123 et 1124.


9      Daillier, P., et Pellet, A., Droit international public, 7e éd., LGDJ, Paris, 2008, p. 515, paragraphe 337.


10      Considérant 1 de la décision-cadre 2008/909. Voir, également, point 13 des conclusions que l’avocat général Bot a présentées dans l’affaire Ognyanov (C‑554/14, EU:C:2016:319).


11      Plachta, M., « Cooperation in Criminal Matters in Europe », in Bassiouni, International Criminal law, vol. II : Multilateral and Bilateral Enforcement Mechanisms, 3e éd., Martinus Nijhoff, Leyde, 2008, p. 458. Voir, également, le considérant 5 de la décision-cadre 2008/909.


12      Décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (JO 2002, L 190, p. 1), telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009 (JO 2009, L 81, p. 24). Sur la validité de la décision-cadre 2002/584 dans la mesure où elle dispense de la vérification de la double incrimination pour les infractions énumérées dans une disposition semblable à l’article 7, paragraphe 1, de la décision-cadre 2008/909, voir arrêt Advocaten voor de Wereld (C‑303/05, EU:C:2007:261, points 48 à 61).


13      Article 3, paragraphe 2, de la décision-cadre 2003/577/JAI du Conseil, du 22 juillet 2003, relative à l’exécution dans l’Union européenne des décisions de gel de biens ou d’éléments de preuve (JO 2003, L 196, p. 45) ; article 6, paragraphe 1, de la décision-cadre 2006/783/JAI du Conseil, du 6 octobre 2006, relative à l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions de confiscation (JO 2006, L 328, p. 59) ; article 5, paragraphe 1, de la décision-cadre 2005/214/JAI du Conseil, du 24 février 2005, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux sanctions pécuniaires (JO 2005, L 76, p. 16) ; article 10, paragraphe 1, de la décision-cadre 2008/947/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements et aux décisions de probation aux fins de la surveillance des mesures de probation et des peines de substitution (JO 2008, L 337, p. 102) ; article 14, paragraphe 1, de la décision-cadre 2009/829/JAI du Conseil, du 23 octobre 2009, concernant l’application, entre les États membres de l’Union européenne, du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions relatives à des mesures de contrôle en tant qu’alternative à la détention provisoire (JO 2009, L 294, p. 20).


14      Voir arrêt Lanigan (C‑237/15 PPU, EU:C:2015:474, points 27 et 28 et jurisprudence citée), et arrêt Wolzenburg (C‑123/08, EU:C:2009:616, point 59 et jurisprudence citée).


15      Voir article 26, paragraphe 1, de la décision-cadre 2008/909.


16      Article 3, paragraphe 1, sous e), de la convention sur le transfèrement des personnes condamnées, du 21 mars 1983, STE no 112 ; article 5, premier tiret, sous b), de la convention entre les États membres des Communautés européennes sur l’exécution des condamnations pénales étrangères, du 13 novembre 1991 ; article 4, paragraphe 1, de la convention européenne sur la valeur internationale des jugements répressifs, du 28 mai 1970, STE no 70.


17      À moins que l’État membre n’ait fait une déclaration en sens contraire sur la base de l’article 7, paragraphe 4, de la décision-cadre 2008/909.


18      Si l’on revient à l’exemple de l’extradition dans le cadre de laquelle la condition de la double incrimination est historiquement apparue, il pourrait être pertinent de faire observer que le traité type d’extradition des Nations unies prévoit explicitement, à son article 2, paragraphe 2, que « [l]orsqu’il s’agit de déterminer si une infraction est une infraction à la législation de chacune des Parties, il n’est pas tenu compte : a) du fait que les législations des Parties rangent ou non les actes ou omissions constituant l’infraction dans la même catégorie d’infractions ou désignent l’infraction par le même nom ; b) du fait que les éléments constitutifs de l’infraction sont ou non les mêmes dans la législation de chacune des Parties, étant entendu que la totalité des actes ou omissions, telle qu’elle est présentée par l’État requérant, sera prise en considération » (traité type d’extradition, A/RES/45/116, 14 décembre 1990).


19      L’article 21, paragraphe 1, de la Strassenverkehrsgesetz (loi sur la circulation routière) (BGBl. 2003 1, p. 310, 919) dispose, en ce qui concerne l’infraction pénale de conduite sans permis de conduire (« fahren ohne Fahrerlaubnis ») : « Est punie d’une peine d’emprisonnement allant jusqu’à un an ou d’une amende la personne qui : 1) conduit un véhicule à moteur bien qu’elle ne dispose pas du permis de conduire requis à cet effet ou qu’il lui ait été interdit de conduire un véhicule à moteur […] ».


20      Les exemples évidents relevant de cette catégorie seraient des actes qui peuvent être qualifiés d’infractions dans un État membre, mais absolument pas de délits dans un autre État membre, tels que l’euthanasie ou la négation de l’Holocauste. Tel est également le cas, selon moi, des actes qui sont qualifiés d’infractions pénales dans un État, mais qui constituent de simples infractions administratives dans un autre (notamment, qui ne font l’objet que de poursuites administratives, mais pas pénales).