Language of document : ECLI:EU:C:2020:231

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. EVGENI TANCHEV

présentées le 26 mars 2020 (1)

Affaire C249/19

JE

contre

KF

[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunalul Bucureşti (tribunal de grande instance de Bucarest, Roumanie)]

« Renvoi préjudiciel – Règlement (UE) no 1259/2010 – Coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps – Détermination de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps – Article 10 – Application de la loi du for – Interprétation de la formule “ne prévoit pas le divorce” – Critère d’appréciation – Interprétation restrictive ou extensive »






1.        Dans son renvoi préjudiciel, le Tribunalul Bucureşti (tribunal de grande instance de Bucarest, Roumanie) cherche à être éclairé sur l’interprétation de l’article 10 du règlement (UE) no 1259/2010 (2), une disposition qui n’a pas encore fait l’objet d’une interprétation par la Cour (3). L’affaire au principal concerne une action opposant JE à KF en ce qui concerne la détermination de la loi applicable à leur procédure de divorce. Ce règlement, premier instrument de droit international privé jamais adopté dans l’histoire de l’Union au titre de la procédure de « coopération renforcée », est décrit par les commentateurs juridiques comme une belle réussite et comme constituant une pierre angulaire du futur droit européen de la famille (4). La Roumanie est l’un des 17 États membres participant à cette coopération renforcée.

I.      Le cadre juridique

A.      Le droit de l’Union

1.      Le règlement (CE) no 2201/2003

2.        Comme le prévoit l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 2201/2003 (5) :

« Sont compétentes pour statuer sur les questions relatives au divorce, à la séparation de corps et à l’annulation du mariage des époux, les juridictions de l’État membre :

[…]

b)      de la nationalité des deux époux ou, dans le cas du Royaume‑Uni et de l’Irlande, du “domicile” commun. »

2.      Règlement (UE) no 1259/2010

3.        L’article 5 du règlement (UE) no 1259/2010 (6), intitulé « Choix de la loi applicable par les parties », dispose :

« 1.      Les époux peuvent convenir de désigner la loi applicable au divorce et à la séparation de corps, pour autant qu’il s’agisse de l’une des lois suivantes :

a)      la loi de l’État de la résidence habituelle des époux au moment de la conclusion de la convention ; ou

b)      la loi de l’État de la dernière résidence habituelle des époux, pour autant que l’un d’eux y réside encore au moment de la conclusion de la convention ; ou

c)      la loi de l’État de la nationalité de l’un des époux au moment de la conclusion de la convention ; ou

d)      la loi du for.

2.      Sans préjudice du paragraphe 3, une convention désignant la loi applicable peut être conclue et modifiée à tout moment, mais au plus tard au moment de la saisine de la juridiction.

3.      Si la loi du for le prévoit, les époux peuvent également désigner la loi applicable devant la juridiction au cours de la procédure. Dans ce cas, la juridiction prend acte de la désignation conformément à la loi du for. »

4.        L’article 8 dudit règlement, intitulé « Loi applicable à défaut de choix par les parties », dispose :

« À défaut de choix conformément à l’article 5, le divorce et la séparation de corps sont soumis à la loi de l’État :

a)      de la résidence habituelle des époux au moment de la saisine de la juridiction ; ou, à défaut,

b)      de la dernière résidence habituelle des époux, pour autant que cette résidence n’ait pas pris fin plus d’un an avant la saisine de la juridiction et que l’un des époux réside encore dans cet État au moment de la saisine de la juridiction ; ou, à défaut,

c)      de la nationalité des deux époux au moment de la saisine de la juridiction ; ou, à défaut,

d)      dont la juridiction est saisie. »

5.        L’article 10 du règlement, intitulé « Application de la loi du for », dispose :

« Lorsque la loi applicable en vertu des articles 5 ou 8 ne prévoit pas le divorce ou n’accorde pas à l’un des époux, en raison de son appartenance à l’un ou l’autre sexe, une égalité d’accès au divorce ou à la séparation de corps, la loi du for s’applique. »

6.        L’article 12 du règlement, intitulé « Ordre public », est libellé comme suit :

« L’application d’une disposition de la loi désignée en vertu du présent règlement ne peut être écartée que si cette application est manifestement incompatible avec l’ordre public du for. »

B.      Le droit roumain

7.        Aux termes de l’article 2600, paragraphes 2 et 3, du code civil roumain :

« 2.      Lorsque la loi étrangère ainsi déterminée ne permet pas le divorce ou admet celui‑ci dans des conditions très restrictives, la loi roumaine s’applique si l’un des époux a, à la date de la demande en divorce, la nationalité roumaine ou sa résidence habituelle en Roumanie.

3.      Les dispositions du paragraphe 2 sont également applicables lorsque le divorce est régi par la loi choisie par les conjoints. »

II.    Les faits à l’origine du litige au principal et la question préjudicielle

8.        JE et KF se sont mariés à Iași, en Roumanie, le 2 septembre 2001, et de cette union est issu un enfant, né à Vérone, en Italie, le 23 juin 2005.

9.        JE a saisi la Judecătoria Iași (tribunal de première instance d’Iași, Roumanie), le 13 octobre 2016, d’une demande de divorce à l’encontre de KF.

10.      Par jugement civil du 31 mai 2017, cette juridiction a décliné sa compétence pour connaître du litige, et ce en faveur de la Judecătoria Sectorului 5 București (tribunal de première instance du cinquième arrondissement de Bucarest, Roumanie), qui a inscrit cette affaire à son rôle le 9 août 2017.

11.      Par jugement civil du 20 février 2018, la juridiction susmentionnée a établi la compétence générale des juridictions roumaines pour la procédure de divorce en cause conformément à l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 2201/2003. En outre, elle a établi que la loi applicable au litige était la loi italienne en vertu de l’article 8, sous a), du règlement no 1259/2010, étant donné que – à la date à laquelle la juridiction a été saisie de la demande de divorce – les parties avaient leur résidence habituelle en Italie (les parties résident depuis longtemps en Italie).

12.      À cet égard, la Judecătoria Sectorului 5 București (tribunal de première instance du cinquième arrondissement de Bucarest) a relevé que, selon le droit italien, une demande de divorce, telle que celle introduite par JE, ne peut être introduite que lorsqu’une séparation de corps des époux a été constatée ou ordonnée par une juridiction et qu’au moins trois années se sont écoulées entre la séparation de corps et la date à laquelle la juridiction a été saisie de la demande de divorce.

13.      Étant donné qu’il n’avait pas été démontré qu’une décision d’une juridiction avait été rendue aux fins de procéder à une séparation de corps des parties et étant donné que le droit roumain ne prévoit pas de procédure de séparation de corps, la juridiction précitée a jugé que cette procédure devait être menée devant les juridictions italiennes et que, en conséquence, toute demande en ce sens introduite devant les juridictions roumaines était irrecevable.

14.      JE a interjeté appel de ce jugement devant la juridiction de renvoi, faisant valoir que la juridiction de première instance aurait dû appliquer l’article 2600, paragraphe 2, du code civil roumain, qui « constitue la transposition en droit roumain des dispositions de l’article 10 du règlement no 1259/2010 ».

15.      JE a également invoqué l’article 12 du règlement no 1259/2010, faisant valoir que l’application de la loi italienne est manifestement incompatible avec l’ordre public du for compétent, de sorte qu’il y a lieu d’écarter l’application de la loi étrangère autrement applicable à la procédure de divorce et d’appliquer la loi roumaine à la place de cette loi.

16.      C’est dans ce contexte que le Tribunalul Bucuresţi (tribunal de grande instance de Bucarest) a décidé de surseoir à statuer et de déférer à la Cour la question préjudicielle suivante :

« […] concernant l’interprétation des dispositions de l’article 10 du règlement no 1259/2010 selon lesquelles, “[l]orsque la loi applicable en vertu des articles 5 ou 8 ne prévoit pas le divorce ou n’accorde pas à l’un des époux, en raison de son appartenance à l’un ou l’autre sexe, une égalité d’accès au divorce ou à la séparation de corps, la loi du for s’applique”, visant à déterminer si l’expression “la loi applicable en vertu des articles 5 ou 8 ne prévoit pas le divorce” doit être interprétée de manière restrictive et littérale, comme visant uniquement les situations dans lesquelles la loi étrangère applicable ne prévoit le divorce sous aucune forme, ou si elle doit être interprété de manière extensive, comme incluant également les situations dans lesquelles la loi étrangère applicable admet le divorce mais le soumet à des conditions très restrictives, impliquant une procédure de séparation de corps obligatoire préalable au divorce, procédure pour laquelle la loi du for ne contient pas de dispositions procédurales équivalentes. »

17.      Des observations écrites ont été soumises à la Cour par les gouvernements roumain, allemand et portugais, ainsi que par la Commission européenne. Aucune audience n’a été demandée par les parties et il n’en a été tenu aucune.

III. Analyse

A.      Réponse à la question préjudicielle

18.      Il est important de relever que toutes les parties intervenant dans la présente procédure font valoir que l’article 10 du règlement no 1259/2010 doit être interprété de manière restrictive, en ce sens que la formule « [l]orsque la loi applicable en vertu des articles 5 ou 8 ne prévoit pas le divorce », contenue audit article, ne concerne que les situations dans lesquelles la loi étrangère applicable ne prévoit le divorce sous aucune forme, à savoir qu’elle ne connaît pas l’institution du divorce.

19.      Dans les présentes conclusions, je suis parvenu à la conclusion que cette interprétation est manifestement correcte.

20.      L’article 10 du règlement no 1259/2010 exclut l’application de la loi déterminée conformément à l’article 5 ou à l’article 8 du règlement dans les cas dans lesquels, notamment, cette loi ne prévoit pas le divorce (la première hypothèse prévue à l’article 10, ci‑après également la « disposition en cause »). Cette hypothèse est peu susceptible d’être invoquée souvent en pratique, étant donné qu’elle vise à remédier au rare cas où il n’y a pas de loi nationale régissant le divorce [au sein de l’Union, la République de Malte a été le dernier État membre à introduire un droit du divorce après un référendum qui a eu lieu en 2011 (7)]. Pratiquement tous les États ont, à présent, un droit du divorce, à l’exception de la République des Philippines et de l’État de la Cité du Vatican, où seule l’annulation du mariage est autorisée. L’article 10 garantit un droit au divorce et je relève que des dispositions similaires (qui accordent également un droit au divorce comme une sorte de norme minimale) existent également dans les règles nationales de conflits de lois et ont inspiré cette disposition (8).

21.      La question de la juridiction de renvoi trouve son origine dans le fait que la loi applicable à l’affaire au principal est, en vertu de l’article 8, sous a), du règlement no 1259/2010, la loi italienne. En vertu de la loi italienne, le divorce ne peut être demandé que lorsqu’une séparation de corps a été constatée ou ordonnée au préalable par une juridiction, tandis que la loi du for (à savoir la loi roumaine) ne prévoit pas une telle procédure.

22.      Faisant suite à l’allégation mentionnée au point 14 des présentes conclusions, je souhaite souligner que le règlement no 1259/2010 est directement applicable et n’exige pas de transposition ou d’équivalence en droit national. Dès lors, afin de déterminer la loi applicable à une demande de divorce telle que celle en cause dans la procédure au principal, les juridictions roumaines ne peuvent appliquer que le règlement no 1259/2010 et la juridiction de renvoi ne devrait pas se référer à cet égard au code civil roumain (9) étant donné que celui‑ci n’est pas pertinent dans les présentes circonstances.

23.      La juridiction de renvoi note que, selon la jurisprudence nationale, dans des circonstances telles que celles en l’espèce, dans lesquelles les juridictions roumaines sont saisies d’une demande de séparation de corps ou d’une demande de divorce n’ayant pas été précédée par une séparation de corps constatée ou ordonnée conformément à la loi italienne, les juridictions roumaines rejettent de telles demandes comme étant, respectivement : a) irrecevables (étant donné que la loi roumaine ne prévoit pas de procédure de séparation de corps) ; b) prématurées (sur la base du fait qu’un divorce est demandé directement devant les juridictions roumaines sans qu’une séparation de corps ait été préalablement décidée par les juridictions italiennes) ; ou c) infondées, comme en l’espèce (sur la base de ces deux motifs combinés (10)).

24.      En d’autres termes, la juridiction de renvoi explique que des obstacles d’ordre procédural (découlant de l’absence de procédure de séparation de corps en droit roumain) ont conduit à des solutions procédurales dans ces affaires qui ne permettaient pas une analyse du fond de ces demandes.

25.      Comme je l’expliquerai dans les présentes conclusions, il convient de répondre à la question posée par la juridiction de renvoi que la première hypothèse prévue à l’article 10 du règlement no 1259/2010 doit recevoir une interprétation stricte.

1.      Le libellé et l’économie de la disposition en cause

26.      Le libellé de la première hypothèse prévue à l’article 10 du règlement no 1259/2010 est clair. La loi du for ne s’applique que « lorsque la loi applicable en vertu des articles 5 ou 8 ne prévoit pas le divorce » (c’est‑à‑dire lorsqu’un couple marié n’a aucune possibilité de divorcer). Rien ne suggère que cette hypothèse vaudrait également lorsque la loi étrangère applicable permet le divorce, mais le soumet à des conditions restrictives (par exemple, à une séparation de corps préalable).

27.      Par conséquent, la formule « ne prévoit pas le divorce » ne saurait signifier que la loi applicable « prévoit le divorce à certaines conditions (matérielles ou procédurales) ».

28.      En effet, comme la Commission l’a souligné, même si tous les États membres ont leurs propres règles en matière de divorce, les conditions varient d’un État membre à l’autre et le simple fait que la loi applicable soit plus restrictive (que la loi du for) ne signifie clairement pas qu’elle « ne prévoit pas le divorce » dans la mesure où, si les conditions prévues par la loi sont remplies, le divorce peut être prononcé.

29.      Il s’ensuit que le libellé de la première hypothèse prévue à l’article 10 du règlement no 1259/2010 ne vise que les cas où la loi étrangère applicable ne connaît pas de régime juridique pour le divorce (11).

30.      Cela est confirmé par le considérant 24 de ce règlement (12), qui prévoit que la loi de la juridiction saisie ne devrait s’appliquer que lorsque la loi applicable « ne prévoit pas le divorce ». Là encore, rien n’indique que, à la lumière de ce considérant, l’article 10 concernerait également des situations où le divorce est permis, mais est soumis à des conditions restrictives.

31.      La première hypothèse prévue à l’article 10 du règlement no 1259/2010 est une conséquence de l’application universelle des règles de conflits de lois de l’Union en matière de divorce et de séparation de corps, conformément à l’article 4 du même règlement, « [l]a loi désignée par le présent règlement s’applique même si cette loi n’est pas celle d’un État membre participant ». Cette disposition pose comme principe que la « faculté de divorcer » est un aspect général et positif des règles de conflits de lois de l’Union en matière de divorce et de séparation de corps et, in concreto, du droit international de la famille. La favor divortii consacrée dans le règlement no 1259/2010 est renforcée par les principes de l’autonomie de la volonté des parties et du lien le plus étroit avec les parties. Ces règles de l’Union exigent, pour ainsi dire, un « droit fondamental, effectif et incontournable, au divorce » (13).

32.      Mon interprétation de l’article 10 du règlement no 1259/2010 est corroborée par les commentaires juridiques selon lesquels cette disposition couvre la situation dans laquelle la loi applicable en vertu de l’article 5 ou de l’article 8 de ce règlement ne connaît aucun régime juridique de divorce du tout, et dans laquelle le divorce ne serait purement et simplement pas possible. Par conséquent, cette disposition ne couvre pas un cas dans lequel il ne peut pas être mis fin au mariage en raison du fait que certaines exigences préalables ne sont pas remplies : par exemple, lorsque la loi applicable fixe des motifs de divorce restrictifs, tels que l’exigence d’une (plus) longue période de séparation. L’application de l’article 10 sera également exclue lorsque la loi d’un État pose des conditions de divorce d’un niveau d’exigence inadmissible (14).

33.      Lorsque la loi applicable, déterminée en vertu de l’article 5 ou 8 du règlement no 1259/2010, « ne prévoit pas le divorce », la première hypothèse prévue à l’article 10 de ce règlement corrige cette lacune en désignant la lex fori. Pour donner un exemple, et par contraste avec la présente affaire, si le droit philippin (qui ne prévoit que la séparation de corps, et non le divorce) s’appliquait à une procédure de divorce devant la juridiction de renvoi, cette dernière pourrait avoir recours au droit roumain pour prononcer le divorce (15).

34.      Je partage l’opinion du gouvernement allemand selon laquelle la lecture combinée des dispositions susmentionnées et d’autres dispositions du règlement no 1259/2010 renforce l’interprétation de la première hypothèse prévue à l’article 10 dudit règlement en ce sens qu’elle ne vaut pas lorsque la loi étrangère applicable permet le divorce moyennant une séparation de corps préalable et obligatoire.

35.      Il résulte de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement no 1259/2010 que celui‑ci s’applique au divorce et à la séparation de corps. Lorsque des dispositions particulières de ce règlement s’appliquent (également) à la séparation de corps, cela est expressément mentionné dans le libellé desdits articles (16).

36.      Ainsi, le règlement no 1259/2010 ne relègue pas la séparation de corps à un rôle mineur. Si la première hypothèse prévue à l’article 10 du règlement s’appliquait également à des situations dans lesquelles le divorce est autorisé, mais soumis à une séparation de corps préalable, nous devons partir du principe que le législateur de l’Union aurait expressément légiféré en ce sens.

37.      En l’espèce, la loi italienne, en tant que loi applicable, n’interdit pas le divorce ; elle se borne à le soumettre à certaines exigences, ce qui relève de sa compétence en matière de droit matériel de la famille. Dès lors, en l’espèce, la loi applicable devrait être déterminée conformément à l’article 5 ou 8 du règlement no 1259/2010, et non en vertu de l’article 10 de celui‑ci.

2.      L’interprétation systématique ou contextuelle de la disposition en cause

38.      Je considère (comme le fait le gouvernement portugais) qu’il est pertinent de se référer également à l’article 13 et au considérant 26 du règlement no 1259/2010. Ces dispositions militent en défaveur d’une interprétation de la formule « ne prévoit pas le divorce » comme signifiant que la loi étrangère applicable le soumet à certaines conditions, mais ces dispositions viennent au soutien de la position selon laquelle la disposition en cause signifie que la loi applicable ne prévoit de divorce en aucune éventualité.

39.      L’article 13 du règlement no 1259/2010 prévoit qu’aucune disposition dudit règlement n’oblige les juridictions d’un État membre participant dont la loi ne prévoit pas le divorce à prononcer un divorce. Je considère (comme le fait la Commission) que cette disposition n’a qu’une valeur déclaratoire, et non normative. Sa pertinence en l’espèce réside dans l’expression « ne prévoit pas le divorce », qui reprend le libellé de l’article 10.

40.      L’article 13 est expliqué au considérant 26 du règlement no 1259/2010. Ce considérant indique que « [l]orsque le présent règlement se réfère au fait que la loi de l’État membre participant dont une juridiction est saisie ne prévoit pas le divorce, il conviendrait de l’interpréter comme le fait que la loi de cet État membre ne connaît pas l’institution du divorce ».

41.      Le considérant 26 fournit une explication claire, dépassant le contexte spécifique de l’article 13, sur l’interprétation de la formule « ne prévoit pas le divorce ». L’explication figurant audit considérant s’applique également à l’article 10, qui utilise la même formule.

42.      En effet, les commentateurs juridiques font valoir que, bien que le considérant 26 concerne l’article 13 du règlement no 1259/2010, l’interprétation de l’article 10 devient plus claire si la disposition est lue en combinaison avec ce considérant. Il découle du considérant 26 que, si le divorce est un concept connu en vertu de la loi applicable, mais dont ne disposent pas les époux dans les circonstances particulières de leur relation, l’article 10 ne s’applique pas et le litige ne peut être apprécié qu’au regard de l’article 12 de ce règlement (17).

43.      Dès lors, l’article 10 ne vise pas les situations dans lesquelles un mariage ne peut être dissous en raison du fait que certaines exigences ne sont pas remplies, par exemple, certaines conditions préalables restrictives [telles qu’une (plus) longue période de séparation imposée par la loi applicable en matière de divorce]. En outre, l’article 10 n’est pas applicable lorsque la loi de l’État prévoit des conditions déraisonnablement élevées pour un divorce (18). Vu que l’institution du divorce existe en droit italien, l’article 10 ne saurait s’appliquer en l’espèce.

3.      L’interprétation historique de la disposition en cause

44.      L’interprétation historique implique qu’une disposition devrait être interprétée à la lumière de sa genèse, en tenant compte des différentes étapes qui ont conduit à son adoption.

45.      La proposition initiale de règlement modifiant le règlement no 2201/2003 (19) ne contenait aucune disposition comparable à l’actuel article 10 du règlement no 1259/2010. Durant les négociations qui ont suivi, plusieurs États membres ont défendu le point de vue selon lequel le divorce est un droit qui doit être garanti dans leur ordre juridique national (20). Étant donné qu’aucun accord n’a pu être atteint sur cette proposition, la Commission a adopté une proposition de règlement du Conseil mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps (21).

46.      Le texte qui est devenu l’article 10 figurait antérieurement dans la proposition de la Commission de 2010 en tant que projet d’article 5 et le contenu de l’article est demeuré inchangé durant la procédure législative. Dans le préambule, la raison donnée à l’introduction de la disposition était d’éviter des discriminations. Le considérant 20 de la proposition contenait également la même formulation que le considérant 24 actuel, mais ne comportait aucune référence à la disposition d’ordre public (22).

47.      L’interprétation historique confirme également l’interprétation stricte de la disposition en cause avancée par moi dans les présentes conclusions. En effet, la première hypothèse prévue à l’article 10 a été introduite, avant tout, en raison du droit maltais (étant donné que la République de Malte, à l’époque de la rédaction du règlement, ne prévoyait l’octroi d’aucun divorce (23)).

48.      Comme l’a relevé le gouvernement portugais, la disposition en cause est l’expression du principe de la favor divortii, en ce sens qu’elle interdit l’application d’un droit matériel qui ne permet pas le divorce, même si ce droit a été choisi d’un commun accord par les époux.

49.      En outre, ni les travaux préparatoires ni le considérant 24 de ce règlement ne contiennent une quelconque indication selon laquelle l’article 10 devrait également être applicable lorsque la loi étrangère prévoit le divorce, mais l’assortit de conditions restrictives.

50.      Au contraire, comme cela a été relevé au point 40 des présentes conclusions et comme l’a souligné la Commission, le législateur de l’Union a clarifié, au considérant 26 du règlement, que les termes « ne prévoit pas le divorce », utilisés à l’article 13 et à l’article 10, devraient être interprétés dans le contexte de l’article 10 comme signifiant que la loi du for s’applique lorsque la loi applicable ne prévoit pas l’institution du divorce.

4.      L’esprit et la finalité de la disposition en cause

51.      Je partage l’opinion des gouvernements allemand et roumain selon laquelle l’interprétation stricte de la première hypothèse prévue à l’article 10 du règlement no 1259/2010 découle, notamment, du caractère dérogatoire de cette disposition (à savoir dérogeant aux règles prévues aux articles 5 et 8 de ce règlement) ainsi que des considérants 24 et 26 de celui‑ci.

52.      Par conséquent, l’article 10 ne reconnaît à la juridiction compétente aucun pouvoir d’appréciation et lui présente une alternative simple et objective : soit la loi applicable prévoit l’institution du divorce, soit elle ne la prévoit pas.

53.      Une telle interprétation est confirmée par les objectifs du règlement no 1259/2010, lesquels ressortent clairement des considérants 9 et 29 de celui‑ci.

54.      Ils visent à harmoniser les règles de conflits de lois en matière de divorce et de séparation de corps en vue de renforcer la sécurité juridique (les articles 5 et 8 du règlement no 1259/2010 définissent clairement quelle loi est applicable à un divorce ou à une séparation de corps), la prévisibilité et la souplesse, tout en évitant le risque de forum shopping (à savoir, rechercher la juridiction la plus favorable parmi les États membres) et, partant, ils visent à faciliter la libre circulation des personnes au sein de l’Union. La prévisibilité de la législation applicable des États membres participants peut également constituer un moyen de réduire l’incitation du forum shopping, induit par le vaste choix d’instances prévu à l’article 3 du règlement no 2201/2003.

55.      Il est important de souligner, comme le fait la Commission, que, par l’adoption de règles communes en matière de conflits de lois, les États membres participants ont accepté le principe que leurs juridictions puissent être tenues d’appliquer une loi étrangère malgré les différences que celle‑ci pourrait présenter comparées à leur propre droit national et le fait que les seules exceptions à ce principe sont celles prévues aux articles 10, 12 et 13 du règlement no 1259/2010. Dès lors, la possibilité d’appliquer la loi du for, telle que prévue à l’article 10 de ce règlement, constitue une exception à ce principe qui, en tant que telle, doit faire l’objet d’une interprétation stricte (24).

56.      Par contraste, une interprétation extensive de la disposition en cause, telle que visée dans la question préjudicielle, ferait échec à l’autonomie de la volonté des époux en matière de divorce et de séparation de corps (prévue à l’article 5 du règlement) et empêcherait l’application (en vertu de l’article 8 du règlement, en l’absence d’un choix par les parties) de la loi qui leur est la plus étroitement liée.

57.      L’interprétation extensive irait également à l’encontre de l’objectif du règlement de garantir la sécurité juridique aux citoyens et elle pourrait inciter au forum shopping étant donné qu’une partie demandant le divorce pourrait introduire une demande devant la juridiction d’un État membre où la loi prévoit des conditions moins restrictives pour l’octroi du divorce. Elle compromettrait également, en pratique, l’objectif de prévisibilité voulu par le règlement en ce qu’elle nécessiterait une analyse au cas par cas des conditions dans lesquelles un divorce peut être admis conformément à la loi applicable, ainsi qu’une appréciation subjective de la mesure dans laquelle ces conditions peuvent être qualifiées de restrictives.

58.      En outre, comme l’a noté le gouvernement allemand, le divorce qui n’est admis que sous certaines conditions constitue, en principe, plutôt la règle que l’exception et, en l’espèce, les conditions prévues par la loi italienne ne sont, selon moi, pas à ce point restrictives qu’elles rendraient impossible l’obtention d’un divorce en pratique.

B.      Conséquences de la réponse à la question préjudicielle

59.      Compte tenu : i) du fait que, dans sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi soulève la difficulté que le droit roumain ne connaît pas le concept de séparation de corps et ne contient, dès lors, pas de dispositions procédurales applicables à de telles procédures ; ii) de l’approche des juridictions roumaines mentionnée au point 23 des présentes conclusions ; et afin iii) de donner une réponse complète et utile à la juridiction de renvoi, il me semble nécessaire que la Cour donne également des indications sur les conséquences de la réponse proposée à donner à la question préjudicielle.

60.      Je considère que « pour fournir à la juridiction nationale, en vue de l’application du droit [de l’Union] dans le litige soumis à son appréciation, une réponse utile » (25), il y a lieu d’examiner la question de savoir dans quelle mesure la juridiction de renvoi doit appliquer le droit italien en matière de divorce, si celui‑ci exige une séparation de corps obligatoire, procédure pour laquelle aucune disposition ou mesure équivalente n’existe en droit roumain.

61.      En effet, c’est à la Cour qu’il appartient de fournir à la juridiction nationale « les éléments d’interprétation qui peuvent être utiles au jugement de l’affaire dont elle est saisie, qu’elle y ait fait ou non référence dans l’énoncé de ses questions » (26).

62.      Tout d’abord, en vertu de la section 1 du chapitre II du règlement no 2201/2003, lorsque la juridiction d’un État membre est saisie d’une demande de divorce, elle ne peut pas se déclarer incompétente (contrairement à une juridiction saisie d’une affaire en matière de responsabilité parentale, qui dispose du pouvoir discrétionnaire de s’adresser aux juridictions d’un autre État membre en vertu de l’article 15 de ce règlement) et elle est tenue de se prononcer sur cette demande de divorce.

63.      Je partage l’opinion du gouvernement allemand selon laquelle les États membres participant à la coopération renforcée mise en œuvre par le règlement no 1259/2010 doivent veiller à ce que tant le divorce que la séparation de corps puissent être accordés par leurs juridictions. Dès lors, plutôt que de considérer que la séparation de corps doit d’abord être constatée ou ordonnée par les juridictions italiennes, les juridictions roumaines devraient, selon moi, permettre une telle procédure et appliquer, par analogie, les règles de procédure nationales relatives aux divorces ou même adapter les règles de procédure étrangères (italiennes) relatives à la séparation de corps (conjointement avec les règles nationales roumaines). À défaut, les dispositions du règlement no 1259/2010 seraient en partie inopérantes.

64.      Premièrement, la séparation de corps constitue un élément central du règlement no 1259/2010 et, deuxièmement, il n’y a rien d’inhabituel à ce qu’une juridiction soit appelée, conformément à la loi applicable selon ledit règlement, à se prononcer sur une séparation de corps. Il en résulte que la juridiction de renvoi ne saurait refuser de statuer sur la demande au principal sur le fondement de l’article 12 du règlement susmentionné (qui est réservé à des cas exceptionnels (27)) au motif que son droit national ne prévoit pas de séparation de corps ou de règles de procédure pour la séparation de corps.

65.      À titre de solution concrète, en l’espèce, la Commission a proposé que la juridiction saisie applique les conditions de fond prévues par la loi applicable et renonce à l’application de toute condition de nature procédurale prévue par cette loi dans des circonstances où le droit procédural du for ne permet pas que ces conditions procédurales soient remplies. Par conséquent, si, dans une affaire donnée, les conditions de fond permettant l’octroi d’une ordonnance de séparation de corps sont réunies, la juridiction du for peut remédier au fait que cette juridiction ne peut pas l’octroyer elle‑même en renonçant à cette condition procédurale étrangère.

66.      Je partage ce point de vue. Selon moi, une telle solution serait équilibrée et correspondrait à l’intention implicite du législateur de l’Union. Premièrement, elle n’inciterait pas indûment le forum shopping, étant donné qu’elle nécessiterait que soient remplies les conditions de fond de la loi applicable. Le demandeur ne pourrait éviter ces conditions en saisissant une autre juridiction en vertu des règles très généreuses du règlement no 2201/2003 et en demandant l’application de son propre droit (les parties peuvent éviter ces conditions assez facilement si elles s’accordent sur le choix de la loi du for).

67.      Deuxièmement, cette solution serait conforme au principe fondamental en matière de conflits de lois selon lequel une question procédurale relève de la loi du for. Ce principe se reflète dans le principe du droit de l’Union selon lequel, sauf indication contraire, les procédures s’adressent aux juridictions et autorités qui traitent une affaire, sous réserve des principes d’équivalence et d’effectivité (28).

68.      En effet, dans plusieurs instruments juridiques récents, le législateur de l’Union a été confronté à la question de savoir comment garantir au mieux les droits matériels conférés par la loi applicable dans l’État du for, même lorsque la loi de celui‑ci n’a pas de concept (au fond) équivalent en droit. Ces instruments prévoient certains mécanismes d’adaptation du droit national matériel et procédural en vue de garantir le résultat correct selon la loi applicable. On peut, par exemple, se référer à la loi applicable dans le règlement (UE) no 650/2012 (29), en ce qui concerne l’adaptation des droits réels (article 31), la nomination et les pouvoirs d’un administrateur de la succession dans certaines situations (article 29), ainsi que dans le règlement (UE) no 2016/1103 (30) et le règlement (UE) no 2016/1104 (31), en ce qui concerne l’adaptation des droits réels (article 29).

69.      Bien que le règlement no 1259/2010 ne prévoie pas spécifiquement une telle adaptation, il ne l’interdit pas expressément.

IV.    Conclusion

70.      Pour ces raisons, je propose à la Cour qu’elle réponde, comme suit, à la question préjudicielle déférée par le Tribunalul Bucureşti (tribunal de grande instance de Bucarest, Roumanie).

L’article 10 du règlement (UE) no 1259/2010 du Conseil, du 20 décembre 2010, mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps, doit être interprété en ce sens que la formule « lorsque la loi applicable en vertu des articles 5 ou 8 ne prévoit pas le divorce » n’est applicable que lorsque la loi étrangère applicable ne prévoit aucune forme de divorce ; en d’autres termes, lorsqu’elle ne connaît pas l’institution du divorce.

Toutefois, lorsque la loi applicable fixe une condition qui résulte de son droit procédural – condition que la juridiction saisie n’est pas en mesure d’appliquer en raison des contraintes imposées par son propre droit procédural –, la juridiction saisie peut renoncer à cette condition si les conditions prévues par le droit matériel de la lex causae sont remplies dans l’affaire dont elle est saisie.

En l’espèce, la juridiction saisie n’est pas tenue d’approuver la séparation de corps des parties pendant une période de trois ans précédant le divorce dans le cadre d’une procédure distincte. Elle doit néanmoins confirmer, dans sa décision dans la procédure de divorce, que cette condition de séparation de corps a été remplie. Pour obtenir des preuves du respect de cette condition, la juridiction saisie est tenue, le cas échéant, d’adapter la loi procédurale du for.


1      Langue originale : l’anglais.


2      Règlement du Conseil du 20 décembre 2010 mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps (JO 2010, L 343, p. 10, également connu en tant que « règlement Rome III »).


3      Il est vrai qu’il a été demandé à la Cour de se prononcer sur cette disposition dans les affaires ayant donné lieu à l’ordonnance du 12 mai 2016, Sahyouni (C‑281/15, EU:C:2016:343) et à l’arrêt du 20 décembre 2017, Sahyouni (C‑372/16, EU:C:2017:988). Dans cette ordonnance, la Cour s’est toutefois déclarée incompétente pour répondre aux questions déférées et, dans cet arrêt, la Cour n’était pas tenue de se prononcer sur l’interprétation de cette disposition. Voir également note 12 des présentes conclusions.


4      Pour la plupart des États participants, le règlement a apporté au moins deux changements fondamentaux : l’introduction de l’autonomie de la volonté des parties, d’une part, et la substitution de la résidence habituelle à la nationalité, d’autre part, en tant que facteurs de rattachement principaux pertinents en l’absence de clause contractuelle de choix de la loi. Voir Basedow, J., European Divorce Law : Comments on the Rome III Regulation, dans Verbeke, A.-L., Scherpe, J.-M., Declerck, C., Helms, T., et Senaeve, P., Confronting the Frontiers of Family and Succession Law – Liber Amicorum Walter Pintens, Intersentia, Cambridge, 2012, p. 150.


5      Règlement du Conseil du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) no 1347/2000 (JO 2003, L 338, p. 1, également connu en tant que « règlement Bruxelles II bis »).


6      Règlement du Conseil du 20 décembre 2010 mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps (JO 2010, L 343, p. 10).


7      Article 66B du code civil introduit par la loi portant modification du code civil (« Civil Code Amendment Act »), The Malta Government Gazette no 18784, du 29 juillet 2011.


8      Voir, notamment, pour l’Espagne : article 107, paragraphe 2, deuxième phrase, sous c), du Código Civil ; pour l’Allemagne : article 17, paragraphe 1, deuxième phrase, de la loi portant introduction du Bürgerliches Gesetzbuch (BGB) ; pour l’Italie : article 31, paragraphe 2, de la loi (legge) 31.5.1995, no 218 – Riforma del sistema italiano di diritto internazionale privato ; pour la Belgique : article 55, paragraphe 3, du code de droit international privé de 2004. Voir Lein, E., dans Calliess, G.-P., Rome Regulations : Commentary, deuxième édition, Wolters Kluwer, Alphen aan den Rijn, 2015, 916 ; Pereira, P., Rome III : la compétence juridictionnelle et la loi applicable en matière matrimoniale, RMCUE, 2007, p. 394, et Basedow, J., European Divorce Law: Comments on the Rome III Regulation, op. cit., p. 148.


9      Comme la juridiction de renvoi le mentionne au point 15 de la décision de renvoi (sous le titre intitulé « Dispositions nationales applicables en l’espèce »).


10      La motivation de la juridiction de première instance s’est référée tant au fait que les parties n’étaient pas préalablement séparées de corps en vertu d’une ordonnance d’une juridiction qu’au fait qu’une telle séparation est irrecevable, étant donné qu’aucune disposition ne prévoit de procédure de séparation de corps en droit roumain. Voir, décision de renvoi, points 14 et 26.


11      Cette interprétation est largement défendue dans les commentaires juridiques. En fait, je n’ai trouvé aucune littérature soutenant l’interprétation contraire. Voir, notamment, Helms, T., dans Rauscher, T., Europäisches Zivilprozess- und Kollisionsrecht : EuZPR/EuIPR – Kommentar,  Band V, 4e édition, ottoschmidt, 2016, p. 885. Je cite une littérature additionnelle, plus loin dans les présentes conclusions.


12      En ce qui concerne les différentes versions linguistiques de ce considérant, voir conclusions de l’avocat général Saugmandsgaard Øe dans l’affaire Sahyouni (C‑372/16, EU:C:2017:686, points 76 et 77) et Lein, E., dans Calliess, G.-P., Rome Regulations : Commentary, op. cit., p. 920.


13      « Ein wirksames und unverzichtbares Grundrecht auf Scheidung » (voir Gruber, U.-P., Scheidung auf Europäisch – die Rom III-Verordnung, IPRax, 2012, p. 391, et  de Maizière, N., Das Europäische Scheidungskollisionsrecht nach der Rom IIIVerordnung, Jenaer Wissenschaftliche Verlagsgesellschaft, Iéna, 2017, p. 244).


14      Tolani, M., dans Althammer, C., Brussels IIa [and] Rome III, C. H.  Beck, Munich, 2019, p. 360.


15      Voir Lein, E., dans Calliess, G.-P., Rome Regulations: Commentary, op. cit., p. 919. Pour d’autres exemples, voir Henrich, D., Zur Parteiautonomie im Europäisierten Internationalen Familienrecht, dans Verbeke, A.-L., Scherpe, J.-M., Declerck, C., Helms, T., et Senaeve, P., Confronting the Frontiers of Family and Succession Law – Liber Amicorum Walter Pintens, op. cit., p. 707.


16      Voir, notamment, la deuxième hypothèse prévue à l’article 10 du règlement no 1259/2010, qui vise des situations où la loi applicable « n’accorde pas à l’un des époux, en raison de son appartenance à l’un ou l’autre sexe, une égalité d’accès au divorce ou à la séparation de corps » (souligné par nos soins).


17      Lein, E., dans Calliess, G.-P., Rome Regulations : Commentary, op. cit., p. 920. Voir également Helms, T., dans Rauscher, T., Europäisches Zivilprozess- und Kollisionsrecht : EuZPR/EuIPR – Kommentar, op. cit., p. 885 (avec références à une autre littérature juridique prônant cette position, à la note en bas de page 19 de cet ouvrage). Voir également Gruber, U.-P., Scheidung auf Europäisch – die Rom III-Verordnung, op. cit., p. 390.


18      Tolani, M., dans Althammer, C., Brussels IIa [und] Rome III : Kommentar, C.H. Beck, Munich, 2014, p. 362.


19      COM(2006) 399 final.


20      Voir document du Conseil 8364/07 (Presse 77), p. 11 de la version en langue allemande.


21      COM(2010) 105/2 final.


22      Voir Lein, E., dans Calliess, G.-P., Rome Regulations : Commentary, op. cit., p. 919.


23      Pour la même interprétation, voir Helms, T., dans Rauscher, T., Europäisches Zivilprozess- und Kollisionsrecht : EuZPR/EuIPR – Kommentar, op. cit., p. 885.


24      Voir, notamment, arrêt du 6 juin 2019, Weil (C‑361/18, EU:C:2019:473, point 43).


25      Arrêt du 28 juin 1978, Simmenthal (70/77, EU:C:1978:139, point 57).


26      Arrêt du 29 septembre 2016, Essent Belgium (C‑492/14, EU:C:2016:732, point 43).


27      Voir considérant 25 du règlement no 1259/2010.


28      Voir arrêt du 7 juin 2007, van der Weerd e.a. (C‑222/05 à C‑225/05, EU:C:2007:318, voir, notamment, point 28).


29      Règlement du Parlement européen et du Conseil, du 4 juillet 2012, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions, et l’acceptation et l’exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d’un certificat successoral européen (JO 2012, L 201, p. 107).


30      Règlement du Conseil du 24 juin 2016 mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la compétence, de la loi applicable, de la reconnaissance et de l’exécution des décisions en matière de régimes matrimoniaux (JO 2016, L 183, p. 1).


31      Règlement du Conseil du 24 juin 2016 mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la compétence, de la loi applicable, de la reconnaissance et de l’exécution des décisions en matière d’effets patrimoniaux des partenariats enregistrés (JO 2016, L 183, p. 30).