Language of document : ECLI:EU:C:2016:386

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 2 juin 2016 (1)

Affaire C76/15

Paul Vervloet e.a.

[demande de décision préjudicielle formée par la Cour constitutionnelle (Belgique)]

« Concurrence – Aides d’État (article 107, paragraphe 1, TFUE) – Régime belge de garantie protégeant les parts des associés personnes physiques de sociétés coopératives financières agréées – Validité de la décision de la Commission européenne interdisant le régime de garantie (décision 2014/686/UE) – Obligation de standstill (article 108, paragraphe 3, TFUE) – Système de garantie des dépôts (directive 94/19/CE) »






I –    Introduction

1.        La gestion de la crise économique et financière mondiale qui a éclaté en 2008 a suscité de multiples problèmes dont notre Cour a elle aussi été saisie à plusieurs reprises. Deux procédures à caractère constitutionnel dans lesquelles la Cour a été appelée à apprécier la conformité d’un certain nombre de mesures prises au niveau de l’Union européenne pour renforcer l’Union économique et monétaire ont eu certainement une importance exceptionnelle ces dernières années (2). Les mesures que les États membres ont prises pour stabiliser leur secteur financier national et protéger l’épargne du citoyen de l’Union sont moins spectaculaires mais ont une portée économique, sociale et politique majeure. La présente procédure préjudicielle a précisément pour objet une mesure de cette nature.

2.        Dans le contexte de la recapitalisation de la banque franco‑belge Dexia qui traversait de sérieuses turbulences, l’État belge a émis une garantie au bénéfice des nombreuses personnes physiques (3) qui détenaient à l’époque des parts dans trois sociétés coopératives financières du groupe ARCO (4) (ci-après les « sociétés coopératives financières ARCO » ou « ARCO »). ARCO était à l’époque un des actionnaires principaux de Dexia.

3.        Ladite garantie consentie pour les parts détenues par des particuliers dans les sociétés coopératives du groupe ARCO (ci-après la « garantie ARCO ») a soulevé des objections juridiques à deux égards.

4.        D’une part, la garantie ARCO a préoccupé la Commission qui a vu dans le régime de garantie qui y présidait une aide d’État qu’elle a déclarée incompatible avec le marché intérieur dans sa décision 2014/686/UE (5). La Commission a enjoint au Royaume de Belgique de récupérer les avantages qui y étaient liés et de s’abstenir de tout payement au titre de la garantie ARCO. Le Tribunal de l’Union européenne a été saisi de deux recours en annulation, pendants devant lui (6).

5.        D’autre part, un ensemble d’investisseurs privés et institutionnels qui s’estimaient lésés pour avoir investi non pas dans des parts de sociétés coopératives du groupe ARCO, mais directement ou par le truchement de sociétés holding dans des actions de Dexia ou d’autres sociétés de capitaux, sont montés au créneau en Belgique pour dénoncer la garantie ARCO parce qu’ils ne bénéficiaient pas d’une garantie de cette nature. Les recours qu’ils ont engagés contre l’État belge ont abouti dans l’intervalle devant la Cour constitutionnelle (Belgique).

6.        La Cour est à présent saisie par la Cour constitutionnelle des deux volets de la garantie ARCO. Au-delà de la validité de la décision 2014/686 de la Commission, la Cour est appelée à examiner si un régime de garantie tel celui mis en place en Belgique est conforme aux dispositions du droit de l’Union en matière de garantie des dépôts figurant dans la directive 94/19/CE (7) et au régime des aides d’État visé à l’article 107, paragraphe 1, et à l’article 108, paragraphe 3, TFUE.

II – Cadre juridique

A –    Droit de l’Union

7.        En droit de l’Union, le cadre juridique est tracé dans la présente affaire, d’une part, par les articles 107, 108 et 296 TFUE ainsi que par les articles 20 et 21 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et, d’autre part, par la directive 94/19 (8). Nous nous limiterons à reproduire les dispositions applicables de la directive uniquement.

8.        Aux fins de la directive 94/19, son article 1er définit notamment les notions suivantes :

« […]

1)      “dépôt” : tout solde créditeur résultant de fonds laissés en compte ou de situations transitoires provenant d’opérations bancaires normales, que l’établissement de crédit doit restituer conformément aux conditions légales et contractuelles applicables, ainsi que toute créance représentée par un titre de créance émis par l’établissement de crédit.

Les parts de “building societies” au Royaume-Uni et en Irlande, sauf celles constituant un élément de capital qui sont couvertes par l’article 2, sont considérées comme des dépôts.

[…]

4)      “établissement de crédit” : une entreprise dont l’activité consiste à recevoir du public des dépôts ou d’autres fonds remboursables et à octroyer des crédits pour son propre compte ;

[…]. »

9.        L’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 94/19 se lit comme suit :

« Chaque État membre veille à l’instauration et à la reconnaissance officielle sur son territoire d’un ou de plusieurs systèmes de garantie des dépôts. À l’exception des cas envisagés au deuxième alinéa et au paragraphe 4, aucun établissement de crédit agréé dans cet État membre au titre de l’article 3 de la directive 77/780/CEE [du Conseil, du 12 décembre 1977, visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et son exercice (JO 1977, L 322, p. 30)] ne peut accepter de dépôts s’il n’est pas membre de l’un de ces systèmes. »

10.      On complétera par l’article 2 de la directive 94/19 :

« Sont exclus de tout remboursement par les systèmes de garantie :

–        sous réserve de l’article 8 paragraphe 3, les dépôts effectués par d’autres établissements de crédit en leur nom propre et pour leur propre compte,

–        tous les instruments qui entreraient dans la définition des “fonds propres” telle qu’elle figure à l’article 2 de la directive 89/299/CEE du Conseil, du 17 avril 1989 concernant les fonds propres des établissements de crédit [JO 1989, L 124, p. 16],

–        les dépôts découlant d’opérations pour lesquelles une condamnation pénale a été prononcée pour un délit de blanchiment de capitaux au sens de l’article 1er de la directive 91/308/CEE du Conseil, du 10 juin 1991, relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux [JO 1991, L 166, p. 77]. »

B –    Droit belge

11.      Le premier texte de la législation belge qui intéresse la présente affaire est la loi fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique, du 22 février 1998 (ci-après la « loi sur la Banque nationale »).

12.      L’arrêté royal du 3 mars 2011, confirmé ultérieurement par le Parlement belge (9), a introduit, à compter du 1er avril 2011, dans la loi sur la Banque nationale un nouvel article 36/24, qui comporte les passages suivants dans la version applicable au litige au principal :

« 1      Le Roi peut, sur avis de la Banque, en cas de crise soudaine sur les marchés financiers ou en cas de menace grave de crise systémique, aux fins d’en limiter l’ampleur ou les effets :

[…]

2      mettre en place un système d’octroi de la garantie de l’État pour des engagements souscrits par les institutions contrôlées en vertu des lois précitées qu’Il détermine, ou accorder la garantie de l’État à certaines créances détenues par ces institutions ;

3      mettre en place, le cas échéant par le biais de règlements pris conformément au 1°, un système d’octroi de la garantie de l’État pour le remboursement aux associés personnes physiques de leur part du capital de sociétés coopératives, agréées conformément à l’arrêté royal du 8 janvier 1962 fixant les conditions d’agréation des groupements nationaux de sociétés coopératives et des sociétés coopératives, qui sont des institutions contrôlées en vertu des lois précitées ou dont au moins la moitié du patrimoine est investi dans de telles institutions ;

[…]

Les arrêtés royaux pris en vertu de l’alinéa 1er, 1°, cessent de produire leurs effets s’ils n’ont pas été confirmés par la loi dans les douze mois de leur date d’entrée en vigueur. La confirmation rétroagit à la date d’entrée en vigueur des arrêtés royaux. Les arrêtés royaux pris en vertu de l’alinéa 1er, 2° à 6°, sont délibérés en Conseil des Ministres.

[…] »

13.      Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, cette disposition, à l’instar de celles qui l’ont précédée (10), a été adoptée dans le contexte de la crise économique et financière mondiale de 2008. La disposition doit permettre de prendre sans délai des mesures afin de limiter l’ampleur ou les conséquences d’une éventuelle crise soudaine sur les marchés financiers ou d’une menace sérieuse de crise systémique. Spécialement à l’endroit des sociétés coopératives financières, le législateur belge a estimé en outre que leurs parts présentaient dans certains cas toutes les caractéristiques d’un produit d’épargne en sorte qu’elles devaient bénéficier de la même protection que des dépôts bancaires ou que certaines formes d’assurances-vie.

14.      L’arrêté royal du 10 octobre 2011 a alors été adopté au titre de l’article 36/24, paragraphe 1, point 3, de la loi sur la Banque nationale, pour permettre aux sociétés coopératives agréées actives dans le secteur financier de prendre part, sur une base volontaire, au Fonds spécial de protection des dépôts et des assurances sur la vie créé en 2008. Ce fonds a été renommé dans ce même contexte « Fonds spécial de protection des dépôts, des assurances sur la vie et du capital de sociétés coopératives agréées ».

15.      La demande de protection du capital des sociétés coopératives agréées Arcopar, Arcofin et Arcoplus a été admise par l’arrêté royal du 7 novembre 2011 octroyant une garantie afin de protéger le capital de sociétés coopératives agréées. Aucune autre société coopérative n’a sollicité le bénéfice de garanties de cette nature.

III – Les faits et la procédure au principal

16.      La Cour constitutionnelle est actuellement saisie par le Conseil d’État (Belgique) de trois procédures jointes en contrôle de constitutionnalité de l’article 36/24 de la loi sur la Banque nationale, disposition que le législateur belge a adoptée, on l’a dit, en réponse à la crise économique et financière mondiale qui a éclaté en 2008.

17.      Ce qui a donné lieu à cette procédure en contrôle de constitutionnalité, c’est le régime de garantie créé par l’État belge au titre de l’article 36/24, paragraphe 1, point 3, de la loi sur la Banque nationale couvrant les parts de certaines sociétés coopératives financières agréées pour autant qu’elles soient détenues par des personnes physiques, dans la limite d’un plafond légalement fixé à 100 000 euros par investisseur.

18.      Quelque temps auparavant, le gouvernement avait déjà annoncé son intention de créer une garantie de cette nature dans un premier communiqué de presse du 10 octobre 2008 puis dans un second du 21 janvier 2009 (11). Le groupe ARCO a également diffusé le communiqué de presse du 21 janvier 2009 sur son site Internet le jour même.

19.      L’État belge n’a notifié ce régime de garantie à la Commission que le 7 novembre 2011, jour auquel les sociétés coopératives financières ARCO ont été admises par arrêté royal dans le système belge de garantie des dépôts (12).

20.      Saisie par le Conseil d’État, il appartient à présent à la Cour constitutionnelle de préciser si le régime de garantie prévu à l’article 36/24, paragraphe 1, point 3, de la loi sur la Banque nationale est conforme aux principes d’égalité de traitement et de non‑discrimination, inscrits dans les articles 10 et 11 de la Constitution belge. Les requérants devant le Conseil d’État font en substance grief au régime de garantie de créer une discrimination entre les particuliers détenant des parts de sociétés coopératives financières et les différents détenteurs de parts de sociétés de capitaux et d’organismes actifs sur le marché.

21.      Préalablement à son examen de constitutionnalité de l’article 36/24 de la loi sur la Banque nationale, la Cour constitutionnelle demande si l’État belge a adopté le régime de garantie en cause au mépris du droit de l’Union, à savoir, d’une part, des textes sur la protection des dépôts et, d’autre part, de la réglementation des aides d’État. Pour trancher cette question préalable, elle estime nécessaire que la Cour de justice statue à titre préjudiciel.

IV – Demande de décision préjudicielle et procédure devant la Cour

22.      Par arrêt du 5 février 2015, parvenu au greffe de la Cour le 19 février 2015, la Cour constitutionnelle a posé à la Cour de justice les questions préjudicielles suivantes au titre de l’article 267 TFUE (13) :

« 1)      Les articles 2 et 3 de la directive 94/19/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 1994, relative aux systèmes de garantie des dépôts, combinés, le cas échéant, avec les articles 20 et 21 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et le principe général d’égalité, doivent-ils être interprétés comme :

a)      imposant aux États membres de garantir les parts des sociétés coopératives agréées actives dans le secteur financier de la même manière que les dépôts ?

b)      s’opposant à ce qu’un État membre confie à l’entité partiellement en charge de la garantie des dépôts visés par cette directive la mission de garantir également, à concurrence de 100 000 euros, la valeur des parts des associés personnes physiques d’une société coopérative agréée active dans le secteur financier ?

2)      La décision de la Commission européenne du 3 juillet 2014 concernant l’aide d’État SA.33927 (12/C) (ex 11/NN) mise à exécution par la Belgique – Régime de garantie protégeant les participations des associés personnes physiques de sociétés coopératives financières est-elle compatible avec les articles 107 et 296 TFUE en ce qu’elle qualifie d’aide d’État nouvelle le système de garantie qui fait l’objet de cette décision ?

3)      En cas de réponse négative à la deuxième question, l’article 107 TFUE doit-il être interprété en ce sens qu’un système de garantie de l’État octroyé aux associés personnes physiques de sociétés coopératives agréées actives dans le secteur financier, au sens de l’article 36/24, paragraphe 1, [point] 3, de la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique, constitue une aide d’État nouvelle devant être notifiée à la Commission européenne ?

4)      En cas de réponse affirmative à la deuxième question, la même décision de la Commission européenne est-elle compatible avec l’article 108, paragraphe 3, TFUE si elle est interprétée comme considérant que l’aide d’État en cause a été mise à exécution avant le 3 mars 2011 ou le 1er avril 2011 ou à l’une de ces deux dates ou, inversement, si elle est interprétée comme considérant que l’aide d’État en cause a été mise à exécution à une date postérieure ?

5)      L’article 108, paragraphe 3, TFUE doit-il être interprété comme interdisant à un État membre d’adopter une mesure telle que celle contenue dans l’article 36/24, paragraphe 1, [point] 3, de la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique, si cette mesure exécute une aide d’État ou participe d’une aide d’État déjà mise à exécution et que cette aide d’État n’a pas encore été notifiée à la Commission européenne ?

6)      L’article 108, paragraphe 3, TFUE doit-il être interprété comme interdisant à un État membre d’adopter, sans notification préalable à la Commission européenne, une mesure telle que celle contenue dans l’article 36/24, paragraphe 1, [point] 3, de la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique, si cette mesure participe d’une aide d’État qui n’a pas encore été mise à exécution ? »

23.      À la demande de la Cour, la juridiction de renvoi a précisé au mois de janvier 2016, en application de l’article 101, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour de justice, l’incidence pour la solution du litige au principal des deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième questions préjudicielles.

24.      Les requérants dans la procédure au principal [d’une part Vervloet e.a., d’autre part, la commune de Schaerbeek (Belgique) ainsi que le fonds de pension Ogeo Fund], les trois sociétés coopératives financières du groupe ARCO (Arcopar, Arcofin et Arcoplus), parties intervenantes dans la procédure au principal, ainsi que le Royaume de Belgique et la Commission ont participé à la procédure écrite. Ces mêmes parties étaient également représentées lors de l’audience de plaidoiries du 6 avril 2016.

V –    Appréciation

25.      Par sa liste imposante de questions préjudicielles, la juridiction de renvoi souhaite en substance savoir si l’État belge a enfreint le droit de l’Union en mettant en place dans le contexte de la crise économique et financière qui a éclaté en 2008 un régime de garantie au bénéfice des particuliers détenant des parts dans certaines sociétés coopératives financières.

A –    Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

26.      Avant d’examiner les questions préjudicielles au fond, nous dirons quelques mots sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle. Un certain nombre de parties ont en effet douté de la pertinence des problèmes juridiques qui se posent en droit de l’Union dans la solution du litige au motif que le litige au principal relève du seul droit constitutionnel belge et que la directive 94/19 ainsi que la réglementation des aides d’État, même sous l’angle de la sélectivité des aides, y sont étrangères.

27.      On relèvera à cet égard que les questions préjudicielles sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. La Cour ne peut refuser de statuer sur une question préjudicielle d’une juridiction nationale que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation ou l’appréciation de validité d’une règle de l’Union sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (14).

28.      Il ne saurait en être question en l’espèce.

29.      Il est certain que la Cour constitutionnelle est appelée ici à examiner le régime de garantie litigieux mis en place au titre de l’article 36/24, paragraphe 1, premier alinéa, point 3, de la loi sur la Banque nationale sous l’angle des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination tels qu’inscrits aux articles 10 et 11 de la Constitution belge. À cet effet, la Cour constitutionnelle considère cependant que les questions de droit de l’Union qu’elle a posées en sont manifestement le préalable. Elle l’a déjà indiqué dans sa décision de renvoi et dans les précisions données au titre de l’article 101 du règlement de procédure de la Cour de justice. Lors de l’audience de notre Cour, les parties, et en particulier la commune de Schaerbeek et le fonds de pension Ogeo Fund, l’ont également explicité.

30.      De manière très convaincante, la Cour constitutionnelle vérifie tout d’abord la question préalable de savoir si le régime de garantie en cause est conforme au droit de l’Union. Elle en tire par la suite des conclusions sur l’existence ou non d’une inégalité de traitement interdite dans la Constitution belge.

31.      S’il devait en effet découler du droit de l’Union que le régime de garantie en question est dicté par le droit de l’Union (par exemple, parce que les règles de garantie des dépôts voulues par la directive 94/19 créent une obligation de cet ordre pour l’État belge), cela pourrait aussi justifier une éventuelle inégalité de traitement entre investisseurs. S’il devait apparaître au contraire que le droit de l’Union s’oppose à un régime de garantie de cette nature (par exemple, parce qu’il a été mis en place au mépris des principes de la directive 94/19 ou des exigences de la réglementation des aides d’État), ce régime ne pourrait peut-être pas justifier non plus une inégalité de traitement entre investisseurs au sens de la Constitution belge.

32.      On voit ainsi que les questions préjudicielles ne sont manifestement pas dénuées de pertinence dans la solution du litige et la recevabilité de la demande de décision préjudicielle ne peut dès lors pas susciter de sérieux doutes.

B –    Examen des questions préjudicielles au fond

33.      Sur le fond, la Cour est appelée, d’une part, à évaluer un régime de garantie tel le régime belge au regard des textes du droit de l’Union relatifs à la garantie des dépôts (première question préjudicielle, voir ci‑dessous, sous 1) et, d’autre part, à l’apprécier sous l’angle de l’interdiction des aides d’État en droit de l’Union (deuxième à sixième questions préjudicielles, voir plus bas, sous 2).

1.      Les textes du droit de l’Union relatifs à la garantie des dépôts (première question préjudicielle)

34.      Par sa première question, la juridiction de renvoi souhaite savoir en substance si un régime de garantie tel celui en cause ici est conforme aux exigences du droit de l’Union relatives à la garantie des dépôts. À cet effet, la Cour constitutionnelle interroge notre Cour sur le sens des articles 2 et 3 de la directive 94/19, interprétés à la lumière des articles 20 et 21 de la Charte et du principe général d’égalité de traitement.

35.      Tandis qu’ARCO estime que le régime de garantie est dicté par l’objet et la finalité de la garantie des dépôts voulue par la directive 94/19, la commune de Schaerbeek et le fonds de pension Ogeo Fund défendent l’idée inverse. Le Royaume de Belgique et la Commission estiment que, dans son principe, un tel régime de garantie n’est pas dicté ni interdit par la directive. Les requérants, des particuliers emmenés par M. Paul Vervloet, soulignent de leur côté que le régime de garantie ne transpose pas la directive 94/19 et qu’il est contraire au système d’étendre la garantie des dépôts aux parts de sociétés coopératives financières.

36.      Ainsi que nous l’exposerons plus bas, la directive 94/19 est en principe neutre à l’égard d’un dispositif tel celui qui est en cause ici. Cette directive n’impose [voir ci-dessous, sous a)] ni n’interdit [voir ci-dessous, sous b)] d’étendre la garantie des dépôts à des parts de sociétés coopératives financières.

a)      La directive 94/19 n’impose pas d’étendre la garantie des dépôts à des parts de sociétés coopératives financières (première branche de la première question préjudicielle)

37.      On doit préciser tout d’abord si la directive 94/19 imposait d’étendre un système de garantie des dépôts tel celui mis en place en Belgique aux parts de sociétés coopératives financières détenues par des particuliers.

38.      L’obligation des États membres de veiller à l’instauration et à la reconnaissance officielle sur leur territoire de systèmes de garantie des dépôts découle de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 94/19. La portée de cette obligation doit s’apprécier au regard des champs d’application matériel et personnel de la directive.

39.      Le champ d’application matériel de la directive 94/19 couvre les dépôts. Aux termes de la définition qu’en donne l’article 1er, point 1, de la directive, cette notion s’entend de tout solde créditeur d’un compte qui doit être restitué à son titulaire ainsi que de toute créance représentée par un titre de créance.

40.      D’après les informations dont nous disposons, ni l’un ni l’autre ne vise les parts de sociétés coopératives financières belges telles celles du groupe ARCO. Ces parts relèvent en effet fondamentalement d’une participation dans le capital propre de l’entreprise en question alors que les dépôts s’en distinguent en ce qu’ils participent du passif exigible d’un établissement de crédit.

41.      De plus, à leur échéance, les dépôts doivent être restitués à leur titulaire à leur valeur nominale, le cas échéant, majorés des intérêts convenus et diminués des frais et des taxes, tandis que le montant qu’un associé reçoit de la société coopérative à son retrait reflète l’évolution du rendement de cette entreprise et peut donc augmenter ou diminuer en conséquence.

42.      Il s’ensuit que l’acquisition d’une part d’une société coopérative par un investisseur, même si elle peut être parfaitement présentée comme un produit d’épargne, s’apparente moins à un placement sur un compte bancaire ou à l’acquisition d’une obligation et davantage à l’achat d’une action pour lequel la directive 94/19 ne prescrit aucune garantie.

43.      Les parts en cause ici des sociétés coopératives financières belges ne sont au reste pas assimilables aux parts de building societies mentionnées à l’article 1er, point 1, deuxième alinéa, de la directive 94/19. D’une part, en effet, cette extension particulière de la notion de « dépôt » vise exclusivement, d’après ses termes mêmes, des parts de building societies britanniques ou irlandaises, en revanche, cette disposition n’évoque pas les sociétés coopératives financières de droit belge. D’autre part, cette règle particulière ne s’applique expressément pas aux parts constituant un élément de capital. Or, tel est précisément le cas, à savoir une participation dans le capital propre, on l’a dit, des parts litigieuses des sociétés coopératives financières telles celles du groupe ARCO.

44.      Quant au champ d’application personnel de la directive 94/19, il couvre uniquement les établissements de crédit. Aux termes de la définition de l’article 1er, point 4, de la directive, un établissement de crédit est une entreprise dont l’activité consiste à recevoir du public des dépôts ou d’autres fonds remboursables et à octroyer des crédits pour son propre compte.

45.      Tel n’est pas le cas, là non plus, des sociétés coopératives financières visées par le régime belge de garantie litigieux. D’après les indications concordantes de toutes les parties dans le litige au principal, en ce compris ARCO lui-même, les sociétés coopératives financières comme celles du groupe ARCO ne sont en effet pas des établissements de crédit. Elles ne reçoivent pas de dépôts du public ni n’octroient régulièrement, à la manière caractéristique des banques, de crédits pour leur propre compte.

46.      Rien d’autre ne ressort non plus d’une interprétation de la directive 94/19 à la lumière du principe général d’égalité de traitement du droit de l’Union, ainsi que la Cour constitutionnelle le suggère dans sa question préjudicielle.

47.      Il y a lieu de rappeler que le principe d’égalité de traitement constitue un principe général du droit de l’Union, consacré par les articles 20 et 21 de la Charte (15). Il ne saurait donner lieu à des interprétations ni à des applications différentes selon le domaine juridique en cause.

48.      Selon une jurisprudence constante, ce principe exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (16).

49.      Ainsi que nous l’avons exposé plus haut (17), les parts de sociétés coopératives financières en cause se distinguent nettement, au regard de l’objet de la garantie des dépôts du droit de l’Union, de dépôts classiques auprès d’établissements de crédit même si elles peuvent s’apparenter à des produits d’épargne classiques à plusieurs égards et, notamment, par leur régime fiscal, par la réglementation à laquelle l’État les soumet et par la faveur dont elles jouissent dans le public. Il s’ensuit qu’aucune raison tirée de l’égalité de traitement en droit de l’Union n’impose d’étendre à ces parts de sociétés coopératives financières un système de garantie des dépôts tel le système belge.

50.      En conséquence, le Royaume de Belgique n’était pas tenu par la directive 94/19 ni par le principe général d’égalité de traitement en droit de l’Union d’étendre son système national de garantie des dépôts à cette forme de placement en capital.

b)      La directive 94/19 n’interdit pas d’étendre la garantie des dépôts à des parts de sociétés coopératives financières (seconde branche de la première question préjudicielle)

51.      Il convient d’examiner en outre si la directive 94/19 interdisait d’étendre un système national de garantie des dépôts, tel le système belge, à des parts de sociétés coopératives financières détenues par des particuliers.

52.      La réponse à cette question gît avant tout dans l’article 2, deuxième tiret, de la directive 94/19. Aux termes de cette disposition, sont exclus de tout remboursement par les systèmes de garantie tous les instruments relevant de la définition des fonds propres telle qu’elle figure à l’article 2 de la directive 89/299, au premier rang desquels figure le « capital libéré ».

53.      À première vue, cette exclusion paraît effectivement jouer ici. En effet, ainsi que nous l’avons exposé, les parts de sociétés coopératives financières en cause sont un instrument par lequel, à l’instar de l’achat d’actions, l’investisseur acquiert une participation dans le capital propre de l’entreprise (18).

54.      À l’examen, il apparaît toutefois que la clause d’exclusion de l’article 2, deuxième tiret, de la directive 94/19 ne vise que les fonds propres des établissements de crédit. Elle vise en effet expressément les « fonds propres » relevant de la définition « telle qu’elle figure à l’article 2 de la directive [89/299] concernant les fonds propres des établissements de crédit ». Or, ainsi que nous l’avons déjà indiqué (19), les sociétés coopératives financières agréées de droit belge ne sont précisément pas des établissements de crédit.

55.      On voit donc que l’article 2, deuxième tiret, de la directive 94/19 ne s’oppose en principe pas à une extension du système national de garantie des dépôts aux parts de sociétés coopératives financières détenues par des particuliers.

56.      Qui plus est, la circonstance que la directive ne réalise qu’une harmonisation minimale en matière de garantie des dépôts (20) incite à reconnaître aux États membres une latitude pour inclure dans leurs systèmes de garantie des dépôts d’autres cas de figure non prévus par le droit de l’Union.

57.      Cependant, les États membres ne sont pas entièrement libres d’étendre à leur guise à d’autres avoirs leurs systèmes de garantie des dépôts au-delà de l’objet de la garantie visé par la directive 94/19, à savoir les dépôts dans des établissements de crédit. Certes ne sont-ils pas tenus sur ce point de respecter le principe d’égalité de traitement, consacré en droit de l’Union, puisque celui-ci ne lie les autorités nationales que dans la mise en œuvre du droit de l’Union (voir article 51, paragraphe 1, de la Charte). Néanmoins ils ne peuvent pas compromettre l’efficacité pratique du système de garantie des dépôts, tel qu’il doit être mis en place par la directive dans l’ensemble du marché intérieur.

58.      Ainsi que la Commission le souligne à juste titre à cet égard, l’efficacité pratique de la garantie des dépôts pourrait être compromise si un État membre mettait massivement à charge de son système national de garantie des dépôts des risques qui ne se rapportent pas directement à l’objectif de ce système. Car plus les risques à garantir sont élevés, plus la garantie des dépôts se dilue et moins le système de garantie des dépôts est apte, à moyens égaux, à contribuer à la réalisation de l’objectif de la directive 94/19 qui consiste à promouvoir un développement harmonieux des activités des établissements de crédit, à renforcer la stabilité du système bancaire et à protéger les épargnants (21).

59.      Il appartient aux juridictions nationales d’apprécier si le régime de garantie en cause compromet effectivement l’efficacité pratique du système belge de garantie des dépôts. Elles devront considérer à cet égard qu’une garantie telle que la garantie ARCO draine un grand nombre de petits épargnants dans le système de garantie des dépôts, que les sociétés coopératives financières n’ont absolument pas contribué dans le passé au financement du système (22), et qu’elles ont adhéré au système quelques jours seulement avant de faire jouer la garantie, soit un mois à peine avant la décision de mise en liquidation volontaire. Elles obtiennent ainsi du système national de garantie des dépôts une contre-prestation nettement plus lucrative que d’autres entreprises affiliées au système qui y ont cotisé depuis bien plus longtemps.

60.      Il va au reste de soi que d’autres textes du droit de l’Union, et en particulier les articles 107 et 108 TFUE, énonçant les exigences posées par la réglementation des aides d’État (23), ne peuvent pas être méconnus.

c)      Conclusion intermédiaire

61.      Tout cela bien considéré, il convient d’interpréter la directive 94/19 en ce sens qu’elle n’impose pas aux États membres ni les empêche d’inclure dans leur système national de garantie des dépôts les parts des sociétés coopératives agréées actives dans le secteur financier détenues par des particuliers pour autant que l’efficacité pratique de la garantie des dépôts ne s’en trouve pas compromise ou que d’autres textes du droit de l’Union ne soient pas méconnus.

2.      Les exigences que le droit de l’Union pose dans la réglementation des aides d’État (deuxième à sixième questions)

62.      Par ses deuxième à sixième questions, la juridiction de renvoi souhaite savoir si un régime de garantie comme celui en cause heurte les exigences que le droit de l’Union pose dans la réglementation des aides d’État. La Cour constitutionnelle souhaite entendre préciser en substance si ce régime de garantie était une aide d’État nouvelle au sens de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, qui devait être notifiée à la Commission sans pouvoir être mise à exécution avant son autorisation par la Commission : ce problème s’étend comme un fil rouge à travers l’ensemble des deuxième à sixième questions.

63.      En revanche, la compatibilité du régime de garantie avec le marché intérieur, en particulier au regard de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, sur laquelle plusieurs parties se sont exprimées devant la Cour, ne fait pas l’objet de la demande de décision préjudicielle de la Cour constitutionnelle.

a)      Sur la validité de la décision 2014/686 de la Commission (deuxième question)

64.      Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi soumet tout d’abord la décision 2014/686 à la censure de la Cour en lui demandant d’en apprécier la validité. Tant que le juge de l’Union n’a pas annulé cette décision dans un recours en annulation ou ne l’a pas déclarée invalide dans un renvoi en appréciation de validité, la Cour constitutionnelle reste liée par l’appréciation que la Commission y a portée (24), en déclarant que la garantie ARCO est une aide d’État nouvelle qui a été illégalement mise à exécution, que ses avantages doivent être récupérés et qu’elle ne peut donner lieu à aucun paiement.

65.      Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, les trois sociétés coopératives financières du groupe ARCO remettent en cause dans le litige au principal devant les juridictions belges (Cour constitutionnelle et Conseil d’État) la validité de la décision 2014/686 en invoquant en substance les mêmes arguments que ceux sur lesquels elles ont fondé leur recours en annulation de cette décision devant le Tribunal de l’Union européenne (25). En fin de compte, le contrôle de la validité de cette décision par notre Cour sera non seulement lourd de conséquences pour la procédure devant la juridiction nationale, mais anticipera en quelque sorte aussi l’issue de la procédure de première instance pendante devant le Tribunal (26).

66.      Les griefs qu’ARCO a émis contre la décision 2014/686, tels qu’ils sont résumés dans la décision de renvoi, visent, d’une part, la notion d’« aide d’État » au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et, d’autre part, l’obligation de motivation qui incombe à la Commission en vertu de l’article 296, paragraphe 2, TFUE. Nous aborderons les deux aspects successivement.

i)      La notion d’« aide d’État »

67.      Aux termes de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, « Sauf dérogations prévues par les traités, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. »

68.      La qualification d’« aide d’État », au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, requiert que toutes les conditions visées dans cette disposition soient remplies (27).

69.      Ainsi, premièrement, il doit s’agir d’une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État. Deuxièmement, cette intervention doit être susceptible d’affecter les échanges entre États membres. Troisièmement, elle doit accorder un avantage à son bénéficiaire. Quatrièmement, elle doit fausser ou menacer de fausser la concurrence (28).

70.      Selon une jurisprudence constante, l’examen de ces conditions ne s’attache pas tant à l’intention subjective des autorités nationales (le régime de garantie en cause est incontestablement animé de l’intention louable de préserver des particuliers de la perte de leur épargne et de contribuer dans le même temps à la stabilisation du système financier national) qu’aux effets de la mesure prise (29).

71.      Ce qui est controversé en l’espèce, c’est, d’une part, le caractère sélectif de l’avantage que le régime de garantie belge représente pour les sociétés ARCO (troisième condition de la notion d’« aide d’État ») et, d’autre part, son aptitude à affecter les échanges entre États membres et à fausser la concurrence sur le marché intérieur (deuxième et quatrième conditions de la notion d’« aide d’État ») (30).

–       Les sociétés coopératives ARCO en tant que bénéficiaires du régime de garantie

72.      Aux considérants 80 à 84 de la décision 2014/686, la Commission expose tout d’abord « qu’ARCO était le seul véritable bénéficiaire de la mesure ».

73.      ARCO rétorque que les véritables bénéficiaires du régime de garantie sont, d’une part, les particuliers détenteurs de parts des sociétés coopératives financières ARCO en ce que le remboursement de leur capital leur a été garanti à hauteur de 100 000 euros et, d’autre part, la banque Dexia au sauvetage de laquelle le régime de garantie était censé contribuer.

74.      Ce type d’argument est toutefois vain. La seule circonstance en effet que d’autres intéressés, à savoir les particuliers détenteurs de parts des sociétés coopératives financières ainsi que la banque Dexia, aient pu retirer des avantages du régime de garantie en cause n’exclut en rien qu’ARCO doive lui-même être considéré comme bénéficiaire, voire même comme principal bénéficiaire de ce régime (ou, pour reprendre les termes de la Commission, comme « seul véritable bénéficiaire »).

75.      À cet égard, ARCO méconnaît en particulier que sont considérées comme des aides au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE toutes les interventions qui, sous quelque forme que ce soit, sont susceptibles de favoriser directement ou indirectement des entreprises (31). Il ne fait aucun doute qu’en tant qu’entreprise active dans le secteur financier, ARCO soit favorisé, à tout le moins indirectement, par le régime belge de garantie. Ce n’est en effet qu’à la faveur de ce régime de garantie que le groupe ARCO a été préservé d’un retrait imminent de ses investisseurs privés des trois sociétés coopératives financières ARCO (32) et a été en mesure dans le même temps de contribuer en tant qu’actionnaire principal à la recapitalisation de la banque Dexia prévue à l’époque. On rappellera au reste que les sociétés coopératives financières ARCO ont sollicité elles-mêmes le bénéfice du régime de garantie, contrairement à toutes les autres sociétés coopératives financières. Elles ne l’auraient guère sollicité si elles ne s’étaient pas attendues à en recevoir un avantage économique concret à ce titre.

76.      Le contre-argument d’ARCO est peu convaincant quand il soutient que l’asséchement de ses fonds propres n’aurait pas nécessairement dû avoir un effet négatif pour les trois sociétés coopératives financières ARCO. Si les fonds propres d’une entreprise diminuent, son taux d’endettement augmente au détriment de sa solvabilité en sorte qu’à l’avenir cette entreprise ne peut plus se financer qu’à des conditions moins favorables. Cet aspect n’est pas à négliger précisément dans une situation telle celle d’ARCO qui avait pris à l’époque d’importants engagements financiers en contribuant à la tentative de sauvetage de la banque Dexia.

–       La sélectivité de l’avantage

77.      L’article 107, paragraphe 1, TFUE interdit les aides « favorisant certaines entreprises ou certaines productions », c’est-à-dire les aides sélectives (33). La caractéristique de cette sélectivité de l’avantage est, selon la jurisprudence, que « certaines entreprises ou certaines productions » sont favorisées par rapport à d’autres qui, au regard de l’objectif poursuivi par ledit régime, se trouvent dans une situation comparable en fait et en droit (34).

78.      Aux considérants 100 à 107 de la décision 2014/686, la Commission expose que le régime de garantie en cause est une mesure « clairement sélective » dans l’avantage conféré à ARCO (35).

79.      ARCO conteste en revanche avoir bénéficié d’un tel avantage sélectif. Il estime que les sociétés coopératives financières se trouvent en fait et en droit dans une situation comparable aux opérateurs qui offrent des produits d’épargne classiques en sorte qu’il était parfaitement conforme au système d’étendre la garantie des dépôts belge aux détenteurs de parts de pareilles sociétés coopératives financières.

80.      Cet argument n’est toutefois pas convaincant. Ainsi que nous l’avons déjà exposé plus avant à l’endroit de la directive 94/19, les parts de sociétés coopératives financières, telles celles du groupe ARCO, s’apparentent plus, au regard des objectifs de la garantie des dépôts, à des actions qu’à des dépôts classiques dans des établissements de crédit (36). De plus, de leur aveu même, ces sociétés coopératives financières n’ont pas la qualité d’établissement de crédit (37).

81.      Au regard des objectifs poursuivis par la garantie des dépôts, les sociétés coopératives financières, telles celles du groupe ARCO, ne se trouvaient de ce fait pas dans une situation comparable aux établissements de crédit, qui aurait naturellement conduit à les inclure dans le système belge de garantie des dépôts en mettant en place le régime de garantie en cause. Au contraire, leur situation était plutôt comparable à celle d’entreprises qui offrent en vente les parts de leur société sous la forme d’actions en mettant ainsi à la disposition du public une forme de placement de capitaux qui ne relève fondamentalement pas de la garantie des dépôts.

82.      Rien d’autre ne ressort de l’arrêt Paint Graphos cité par ARCO et le Royaume de Belgique (38).

83.      Dans cet arrêt, la Cour a examiné, dans un contexte fiscal, les conditions dans lesquelles un avantage conféré par un État membre revêt le caractère sélectif requis pour être susceptible de constituer une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Dans ledit arrêt, la Cour dit en substance qu’une mesure sera sélective quand, par dérogation au système commun, elle introduit des différenciations entre opérateurs se trouvant, au regard de l’objectif assigné au système fiscal de cet État membre, dans une situation factuelle et juridique comparable (39).

84.      Dans le « système commun » dont il s’agit en l’espèce, les placements de capitaux ne bénéficient en principe d’aucune garantie des dépôts. Seuls les dépôts faits dans des établissements de crédit relèvent de la garantie des dépôts alors que, en revanche, les placements sous la forme de participations dans des entreprises et dont la valeur est liée à l’évolution du rendement de l’entreprise ne bénéficient en principe pas d’une telle garantie.

85.      Si le Royaume de Belgique soumet néanmoins à la garantie des dépôts certaines formes de participation dans des entreprises, en l’espèce les parts que des particuliers détiennent dans le capital de sociétés coopératives financières agréées, elle introduit une « différenciation entre opérateurs » pour reprendre les termes de l’arrêt Paint Graphos (C-78/08 à C-80/08, EU:C:2011:550).

86.      Cette différenciation se fait entre les sociétés coopératives financières, d’une part, et les autres sociétés qu’elles soient coopératives ou non, d’autre part, c’est-à-dire entre opérateurs qui, en dépit de quelques particularités pouvant découler de leur forme juridique (40), se trouvent dans une situation comparable en fait et en droit à tout le moins au regard des objectifs poursuivis par la garantie des dépôts. Toutes ces entreprises peuvent en effet ouvrir leur capital à des investisseurs privés. Néanmoins seules les participations au capital des premières, les sociétés coopératives financières, bénéficient de la garantie des dépôts.

87.      Le critère que la Cour a retenu dans l’arrêt Paint Graphos (C-78/08 à C‑80/08, EU:C:2011:550) et dans un certain nombre d’autres arrêts (41) montre donc lui aussi que les sociétés coopératives financières ont un avantage sélectif.

88.      Dans la décision 2014/686, la Commission retient donc à très juste titre que les sociétés coopératives du groupe ARCO ont obtenu un avantage sélectif au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE en bénéficiant du régime de garantie en cause.

–       La mesure fausse la concurrence et affecte les échanges entre États membres

89.      ARCO fait également grief à la Commission d’avoir considéré, aux considérants 108 et 109 de la décision 2014/686, que le régime de garantie en cause « fausse donc la concurrence » et « a sans aucun doute un effet sur les échanges dans l’ensemble de l’Union ».

90.      Cependant, les arguments qu’ARCO développe à cet égard, tels qu’ils sont résumés dans la décision de renvoi, sont à nouveau fondés pour l’essentiel sur la prétendue similitude entre les parts de sociétés coopératives financières et les dépôts classiques d’épargne. Ainsi que nous l’avons déjà indiqué plus haut dans un autre contexte, ces arguments ne sont pas convaincants (42).

91.      Indépendamment de cela, on rappellera une jurisprudence constante selon laquelle, aux fins de la qualification d’une mesure nationale en tant qu’aide d’État, il y a lieu non pas d’établir une incidence réelle de l’aide sur les échanges entre États membres et une distorsion effective de la concurrence, mais seulement d’examiner si l’aide est susceptible d’affecter ces échanges et de fausser la concurrence (43).

92.      S’agissant tout d’abord d’une concurrence susceptible d’être faussée, la Commission a exposé de manière convaincante (44) que le régime de garantie en cause a préservé les sociétés coopératives financières du groupe ARCO de sorties de capitaux ou les a à tout le moins atténuées et retardées. Il est évident qu’il y a eu là un avantage dans la concurrence avec d’autres entreprises du secteur financier, qui plus est à une époque où une crise économique et financière mondiale rendait les marchés très nerveux et où les banques en particulier avaient de grosses difficultés à trouver de nouveaux capitaux en redoutant de toute part que les petits épargnants avant tout retirent leur capital.

93.      S’agissant ensuite des échanges entre États membres, on doit toujours admettre qu’ils sont affectés lorsque la mesure nationale en cause renforce la position d’une entreprise par rapport à d’autres entreprises concurrentes. L’entreprise bénéficiaire ne doit pas participer à ce titre elle-même aux échanges entre États membres. La seule circonstance qu’un secteur économique, comme celui des services financiers, a fait l’objet d’un important processus de libéralisation au niveau de l’Union, qui a accentué la concurrence, est de nature à caractériser une incidence réelle ou potentielle des aides sur les échanges entre États membres (45).

94.      C’est en vain qu’ARCO fait à cet égard état du montant prétendument modeste de la participation propre de chacun des associés personnes physiques des sociétés coopératives financières du groupe ARCO. D’une part, en effet, les effets du régime de garantie en cause sur la concurrence et sur les échanges entre États membres doivent s’apprécier au regard de la totalité des parts de sociétés coopératives qu’il couvre et non pas au regard du capital garanti d’un investisseur particulier. D’autre part, l’importance relativement faible d’une aide ou la taille relativement modeste de l’entreprise bénéficiaire n’excluent pas a priori l’éventualité que les échanges entre États membres soient affectés (46).

95.      On ne peut donc reprocher à la Commission, à tout le moins sur la base des griefs visés dans la décision de renvoi, d’avoir conclu que le régime de garantie en cause fausse la concurrence et affecte les échanges entre États membres (47).

ii)    L’obligation de motiver les actes

96.      Dans le contexte de cette deuxième question, la juridiction de renvoi souhaite enfin entendre préciser si la décision 2014/686 est entachée d’un défaut de motivation.

97.      L’obligation de motiver un acte juridique de l’Union résulte de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE et est, de surcroît, reconnue comme faisant partie du droit à une bonne administration par l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte également.

98.      Dès lors que la qualification d’« aide d’État », au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, requiert que toutes les conditions visées dans cette disposition soient remplies (48), la décision de la Commission retenant une telle qualification doit exposer les motifs pour lesquels cette institution considère que la mesure étatique concernée remplit chacune de ces quatre conditions (49).

99.      La décision 2014/686 répond à cette exigence. Dans ses motifs (50), la Commission expose de manière circonstanciée en quoi elle retient l’existence d’une aide d’État en l’espèce après avoir dûment apprécié chacune des quatre conditions de l’article 107, paragraphe 1, TFUE avec un degré adéquat de précision.

100. ARCO fait toutefois grief à la Commission de n’avoir pas motivé la décision 2014/686 de manière suffisamment circonstanciée, motif pris en particulier de ce que cette décision ne correspondrait à aucune pratique suivie jusque-là.

101. Cette allégation doit être d’autant plus rejetée que les griefs visés dans la décision de renvoi et émis dans les observations d’ARCO se fondent sur des reproches extrêmement vagues et de nature générale sans indiquer le moins du monde concrètement en quoi les développements de la Commission seraient abscons ni sur quels aspects de l’affaire ils feraient l’impasse.

102. Au reste, en vertu d’une jurisprudence constante, la motivation d’un acte de l’Union doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (51).

103. Néanmoins il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296, paragraphe 2, TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (52).

104. En l’espèce, les indications que la Commission donne dans les considérants de la décision 2014/686 montrent suffisamment clairement pourquoi elle a retenu chacune des conditions d’une aide d’État visées à l’article 107, paragraphe 1, TFUE. De plus, pour avoir participé comme principale partie intéressée à la procédure administrative préalable, ARCO connaissait à suffisance le contexte dans lequel la décision 2014/686 a été adoptée (53).

105. Enfin, la critique qu’ARCO émet à l’encontre de la jurisprudence citée dans la décision 2014/686, à la note en bas de page 65 (54), est peu convaincante. En effet, contrairement à ce qu’ARCO semble suggérer, la Commission ne prétend nullement que les arrêts qu’elle cite concernent exactement le même problème en cause ici. La Commission tente plutôt d’établir simplement un parallèle avec ces arrêts ainsi que les motifs de la décision (55) le montrent suffisamment clairement. Le bien-fondé ou non des conclusions que la Commission tire de la jurisprudence est une question de fond qui est étrangère au respect de l’obligation de motiver l’acte, en tant qu’exigence de forme (56).

iii) Conclusion intermédiaire

106. L’examen des questions préjudicielles sous l’angle de la notion d’« aide d’État » visée à l’article 107, paragraphe 1, TFUE et de l’obligation de motiver les actes conformément à l’article 296, paragraphe 2, TFUE n’a donc rien révélé dans l’ensemble qui soit susceptible d’affecter la validité de la décision 2014/686.

107. Si la Cour devait faire sienne cette analyse, son arrêt ne lierait certes pas officiellement le Tribunal dans les affaires pendantes T‑664/14 et T-711/14, mais servirait certainement de facto de précédent non négligeable dans l’issue de ces procédures. Le Tribunal conserve bien entendu toute liberté d’annuler la décision 2014/686 pour d’autres raisons qui n’auront pas été examinées dans la présente procédure préjudicielle.

b)      Sur l’existence d’une aide d’État nouvelle (troisième question)

108. À l’instar de la deuxième question, la troisième question de la juridiction de renvoi est à nouveau consacrée à la notion d’« aide d’État » nouvelle visée à l’article 107, paragraphe 1, TFUE et à l’article 108, paragraphe 3, TFUE. Elle n’est posée que si la deuxième question appelle une réponse négative.

109. Si la deuxième question reçoit une réponse qui va dans le sens de notre proposition (57), il appartiendra à la Cour constitutionnelle de tenir la décision 2014/686 pour valide et elle devra traiter la garantie ARCO comme une aide d’État nouvelle, ainsi que la Commission l’a déterminé. Il n’y a dès lors pas lieu de répondre à la troisième question.

c)      Sur les obligations qui incombent aux États membres en vertu de l’article 108, paragraphe 3, TFUE (quatrième à sixième questions)

110. Par ses quatrième, cinquième et sixième questions, qui peuvent être examinées conjointement, la juridiction de renvoi souhaite savoir en substance si un régime de garantie tel celui en cause enfreint l’article 108, paragraphe 3, TFUE.

i)      Sur les obligations des instances nationales au fil des événements

111. Il est vrai que, dans chacune de ces questions, la juridiction nationale considère les faits qui président à la procédure au principal en s’attachant à différents moments auxquels les instances nationales ont adopté des actes pour mettre en œuvre le régime de garantie en cause, depuis la simple annonce, et en passant par l’habilitation légale donnée à l’article 36/24, paragraphe 1, point 3, de la loi sur la Banque nationale jusqu’à sa mise en place concrète par arrêté royal. Néanmoins, au bout du compte, il s’agit simplement de savoir dans ces trois questions si le régime de garantie de l’État belge a été mis en place au mépris ou non de l’article 108, paragraphe 3, TFUE.

112. À l’égard des aides d’État nouvelles, l’article 108, paragraphe 3, TFUE impose une double obligation aux États membres. D’une part, ils sont tenus d’informer la Commission en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides (obligation de notification, article 108, paragraphe 3, première phrase, TFUE). D’autre part, ils doivent s’abstenir de mettre à exécution les mesures projetées avant que la Commission ait adopté une décision finale (interdiction de mise à exécution ou obligation de standstill, voir article 108, paragraphe 3, troisième phrase, TFUE). Ces deux obligations reflètent le contrôle préventif que la Commission exerce sur les aides d’État nouvelles, qui est essentiel pour garantir le fonctionnement du marché intérieur (58).

113. Dans la présente affaire, il est établi que le régime de garantie en cause n’a pas été notifié à la Commission avant le 7 novembre 2011, jour auquel les trois sociétés coopératives financières du groupe ARCO ont été officiellement admises dans le système belge de garantie des dépôts.

114. Contrairement à ce que le Royaume de Belgique pense, on ne peut en aucun cas considérer qu’une notification faite à ce stade avancé intervienne en temps utile au sens de l’article 108, paragraphe 3, première phrase, TFUE.

115. Il se peut que le fonds belge de garantie des dépôts n’ait effectivement encore fait aucun versement à des particuliers détenant des parts de sociétés coopératives financières agréées. Or, ainsi que la Commission le souligne à juste titre, c’est non pas au moment où les fonds de l’État ou provenant de ressources d’État sont effectivement versés que l’aide d’État est réputée « instituée » ou « mise à exécution » et, de ce fait, réalisée au sens de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, mais au moment où l’aide fausse ou menace de fausser la concurrence sur le marché intérieur au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. L’interdiction de mise à exécution vise à garantir que les effets d’un régime d’aides ne se produisent pas avant que la Commission n’ait eu un délai raisonnable pour l’examiner et se prononcer (59).

116. En l’espèce, on ne peut pas apprécier sans examen approfondi le moment auquel la concurrence a été faussée ou a menacé d’être faussée. Au vu des indications données à la Cour dans la demande de décision préjudicielle, on incline nettement à penser, et en tout cas rien n’exclut, que l’État belge a annoncé de manière suffisamment concrète le projet de mesure d’aide dès le premier communiqué du gouvernement, le 10 octobre 2008, en influençant de ce fait fortement les conditions de la concurrence (60). Compte tenu de la nervosité des marchés au plus fort de la crise économique et financière qui avait éclaté en 2008, tout porte à croire en revanche, ainsi que la Commission le détermine au reste dans la décision 2014/686 (61), que ce communiqué du gouvernement était censé rassurer les détenteurs de parts de sociétés coopératives financières comme ceux du groupe ARCO et a ainsi renforcé la capacité de ces entreprises à faire face à la concurrence. Quand on considère ses effets sur le marché, ce communiqué du gouvernement n’était pas tellement éloigné d’une garantie en dépit de toutes les différences qui les séparent dans leur forme juridique (62).

117. Finalement, aux fins de la présente procédure, il n’y a pas lieu de déterminer si l’aide d’État a été réalisée dès sa première annonce publique dans le communiqué du gouvernement, du 10 octobre 2008, ou seulement par l’arrêté royal du 7 novembre 2011 ou à un des jours que la juridiction de renvoi évoque entre ces deux dates. En effet, ainsi que la Commission l’a souligné à juste titre dans sa décision 2014/686 (63), l’annonce du régime de garantie et chacune des initiatives juridiques prises pour le mettre en place doivent être considérées comme une seule et même mesure (64). C’est au plus tard par l’arrêté royal du 7 novembre 2011 que les bénéficiaires du régime de garantie en cause ont acquis un droit d’adhérer au système national de garantie des dépôts en sorte que l’aide d’État ne se trouvait plus au stade de projet (65) mais devait être considérée comme accordée (66) et, de ce fait, « instituée » ou « mise à exécution » au sens de l’article 108, paragraphe 3, TFUE.

118. La notification du régime de garantie à la Commission le jour même, à savoir le 7 novembre 2011, a donc été tardive en tout état de cause. Elle est en effet intervenue non pas en temps utile préalablement à la mise en place du régime de garantie projeté, mais tout au plus simultanément à elle, en sorte que le principe du contrôle préventif de la Commission a été méconnu (67). Même à admettre l’urgence particulière de certaines mesures prises pour gérer la crise économique et financière de l’année 2008, il y aurait eu sans aucun doute suffisamment l’occasion entre les années 2008 et 2011 de notifier le projet d’aide en temps utile à la Commission.

119. Tout cela conduit à conclure qu’en notifiant le régime d’aide en cause le 7 novembre 2011, le Royaume de Belgique a enfreint tant l’obligation de notification de l’article 108, paragraphe 3, première phrase, TFUE que l’interdiction de mise à exécution de l’article 108, paragraphe 3, troisième phrase, TFUE et accordé de ce fait une aide d’État illégale.

ii)    En ce qui concerne spécialement la validité de la décision 2014/686 au regard de l’article 108, paragraphe 3, TFUE (quatrième question)

120. À l’égard de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, il convient d’examiner en plus un autre aspect que la juridiction de renvoi développe dans sa quatrième question : la Cour est invitée à préciser si, dans sa décision 2014/686, la Commission s’est trompée sur le moment auquel l’aide d’État a été mise en œuvre tel qu’il est indiqué dans le régime de garantie en cause.

121. Cette question est posée en cas de réponse affirmative à la deuxième question. Si, comme nous le proposons (68), la Cour décide, au terme de l’examen de cette deuxième question, que la décision 2014/686 n’enfreint pas l’article 107, paragraphe 1, TFUE ni l’article 296, paragraphe 2, TFUE, il lui appartient alors, dans le cadre de l’examen de la quatrième question, de vérifier la validité de la décision 2014/686 pour voir si l’article 108, paragraphe 3, TFUE n’a pas été éventuellement méconnu.

122. Cette question s’explique apparemment parce que la Cour constitutionnelle dit ne pas apercevoir tout à fait clairement le moment auquel la Commission a fixé la mise à exécution de l’aide d’État dans la décision 2014/686 qui détermine expressément que le Royaume de Belgique a enfreint l’article 108, paragraphe 3, TFUE (69). La Cour constitutionnelle semble ne pas parvenir à savoir si la Commission considère que l’aide d’État a été mise à exécution avant ou après l’adoption de l’article 36/24 de la loi sur la Banque nationale. Les deux dates que la Cour constitutionnelle vise dans la quatrième question s’y rapportent précisément : le 3 mars 2011, l’article 36/24 a été inséré par arrêté royal dans la loi sur la Banque nationale et la nouvelle disposition est entrée en vigueur le 1er avril 2011.

123. Au considérant 110, troisième phrase, de la décision 2014/686, la Commission indique que les éléments constitutifs d’une aide d’État « étaient en place au plus tard lorsque l’arrêté royal du 10 octobre 2011 a été adopté ». Elle ajoute par ailleurs que « l’avantage créé par la mesure existait déjà à l’issue de l’annonce de la mise en place de la mesure le 10 octobre 2008 ».

124. Il est exact que, en soi, cette formule ne permet pas de voir clairement si la Commission considère que le régime de garantie en cause a été « institué » ou « mis à exécution » au sens de l’article 108, paragraphe 3, TFUE dès le 10 octobre 2008 ou seulement le 10 octobre 2011. Sur ce point, le texte de la décision 2014/686 n’est précisément pas un modèle de clarté, et la référence à un « avantage » existant déjà depuis la première annonce de la mesure peut plutôt indiquer que la Commission se fonde sur la première des deux dates, à savoir le 10 octobre 2008.

125. Aux fins de la présente procédure préjudicielle, toutefois, il n’y a en définitive pas lieu de savoir si la Commission a privilégié dans sa décision la date antérieure ou ultérieure. La conclusion que la Commission tire au considérant 143 de la décision 2014/686 selon laquelle le régime de garantie en cause a été « illégalement mis à exécution par [le Royaume de] Belgique, en violation de l’article 108, paragraphe 3, [TFUE] » est exacte sans devoir considérer si l’aide d’État a plutôt été « instituée » ou « mise à exécution » au sens de l’article 108, paragraphe 3, TFUE antérieurement ou ultérieurement. Ce qui est décisif, c’est qu’elle avait en tout cas déjà été mise à exécution au moment où elle a été notifiée à la Commission, le 7 novembre 2011, en sorte que cette notification n’a de toute façon pas été faite en temps utile et que l’aide d’État doit déjà être qualifiée d’« illégale » à ce titre.

126. L’examen de la quatrième question n’a donc révélé aucune erreur de la part de la Commission dans l’application de l’article 108, paragraphe 3, TFUE qui soit susceptible d’affecter la validité de la décision 2014/686.

iii) Conclusion intermédiaire

127. En résumé, il convient de déterminer à l’endroit des deuxième à sixième questions qu’un régime de garantie, tel le régime belge en cause, constitue une aide d’État nouvelle. Faute d’avoir été notifié à la Commission en temps utile avant que la distorsion de concurrence qu’il induit se produise ou menace de se produire sur le marché intérieur, il doit être qualifié d’« aide illégalement mise à exécution » au sens de l’article 108, paragraphe 3, TFUE.

VI – Conclusion

128. Eu égard aux explications que nous venons d’exposer, nous proposons à la Cour de répondre comme suit à la demande de décision préjudicielle de la Cour constitutionnelle :

1)      Il convient d’interpréter la directive 94/19/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 1994, relative aux systèmes de garantie des dépôts en ce sens qu’elle n’impose pas aux États membres ni les empêche d’inclure dans leur système national de garantie des dépôts les parts des sociétés coopératives agréées actives dans le secteur financier détenues par des particuliers pour autant que l’effet utile de la garantie des dépôts ne s’en trouve pas compromis ou que d’autres textes du droit de l’Union ne soient pas méconnus.

2)      L’examen des questions préjudicielles n’a rien révélé qui soit susceptible d’affecter la validité de la décision 2014/686/UE de la Commission, du 3 juillet 2014, concernant l’aide d’État SA.33927 (12/C) (ex 11/NN) mise à exécution par la Belgique – Régime de garantie protégeant les participations des associés personnes physiques de sociétés coopératives financières [notifiée sous le numéro C(2014) 1021].

3)      Un régime de garantie, tel celui que permet l’article 36/24, paragraphe 1, point 3, de la loi fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique, du 22 février 1998, constitue une aide d’État nouvelle. Faute d’avoir été notifié à la Commission européenne en temps utile avant que la distorsion de concurrence qu’il induit se produise ou menace de se produire sur le marché intérieur, il doit être qualifié d’« aide illégalement mise à exécution » au sens de l’article 108, paragraphe 3, TFUE.


1      Langue originale : l’allemand.


2      Arrêts du 27 novembre 2012, Pringle (C-370/12, EU:C:2012:756), ainsi que du 16 juin 2015, Gauweiler e.a. (C-62/14, EU:C:2015:400).


3      Appelées également « particuliers » ou « associés personnes physiques » dans la suite des conclusions en nous inspirant de la terminologie adoptée par la Commission européenne.


4      Le groupe ARCO, constitué de plusieurs sociétés coopératives, trouve son origine dans le mouvement ouvrier chrétien des années 30, incarné par l’Algemeen Christelijk Werknemersverbond (ACW) et le Mouvement ouvrier chrétien (MOC). D’après les indications qu’ARCO a données à la Cour, les parts des sociétés coopératives financières ARCO sont détenues à 99 % par des personnes physiques représentant plus de 7 % de la population belge. La juridiction de renvoi indique également que près de 800 000 personnes seraient concernées. Les trois sociétés coopératives financières ARCO, Arcopar, Arcofin et Arcoplus, sont en liquidation depuis la fin de l’année 2011.


5      Décision de la Commission du 3 juillet 2014 concernant l’aide d’État SA.33927 (12/C) (ex 11/NN) mise à exécution par la Belgique – Régime de garantie protégeant les participations des associés personnes physiques de sociétés coopératives financières [notifiée sous le numéro C(2014) 1021] (JO 2014, L 284, p. 53).


6      Affaires Belgique/Commission (T-664/14) et Arcofin e.a./Commission (T‑711/14).


7      Directive du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 1994 relative aux systèmes de garantie des dépôts (JO 1994, L 135, p. 5).


8      La directive 94/19 a été abrogée dans l’intervalle et entièrement refondue dans un nouveau texte, mais seulement avec effet au 4 juillet 2019 [voir article 21 de la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil, du 16 avril 2014, relative aux systèmes de garantie des dépôts (JO 2014, L 173, p. 149)]. La présente affaire relève donc toujours de la seule directive 94/19.


9      L’article 36/24 de la loi sur la Banque nationale a été introduit par l’article 195 du même arrêté royal. Cet arrêté royal a reçu force de loi, avec effet à la date de son entrée en vigueur, en étant confirmé par l’article 298 de la loi relative aux organismes de placement collectif, du 3 août 2012.


10      Une règle aux termes en substance identiques à un certain nombre de dispositions précitées de l’article 36/24, paragraphe 1, de la loi sur la Banque nationale figurait déjà depuis l’année 2009 d’abord à l’article 117bis de la loi relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, du 2 août 2002, ensuite à l’article 105 de cette même loi.


11      Il s’agit d’un communiqué du ministre des Finances, du 10 octobre 2008, ainsi que d’un communiqué du Premier ministre et du ministre des Finances, du 21 janvier 2009.


12      Considérant 1 de la décision 2014/686.


13      Arrêt no 15/2015, disponible sur le site Internet de la Cour constitutionnelle à l’adresse suivante : http://www.const-court.be/de/common/home.html (dernière consultation du 22 mars 2016).


14      Arrêt du 16 juin 2015, Gauweiler e.a. (C-62/14, EU:C:2015:400, point 25). Voir également arrêts du 10 décembre 2002, British American Tobacco (Investments) et Imperial Tobacco (C‑491/01, EU:C:2002:741, points 34 et 35) ; du 8 juillet 2010, Afton Chemical (C-343/09, EU:C:2010:419, points 13 et 14), ainsi que du 12 juillet 2012, Association Kokopelli (C-59/11, EU:C:2012:447, points 28 et 29). Voir également, sur la présomption de pertinence dans la solution du litige, arrêt du 7 septembre 1999, Beck et Bergdorf (C-355/97, EU:C:1999:391, point 22).


15      Arrêts du 14 septembre 2010, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission (C‑550/07 P, EU:C:2010:512, point 54), ainsi que du 18 juillet 2013, Sky Italia (C-234/12, EU:C:2013:496, point 15). Voir dans le même sens, déjà, arrêt du 19 octobre 1977, Ruckdeschel e.a. (117/76 et 16/77, EU:C:1977:160, point 7).


16      Arrêts du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C-127/07, EU:C:2008:728, point 23) ; du 7 juillet 2009, S.P.C.M. e.a. (C-558/07, EU:C:2009:430, point 74) ; du 14 septembre 2010, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission (C-550/07 P, EU:C:2010:512, point 55) ; du 18 juillet 2013, Sky Italia (C-234/12, EU:C:2013:496, point 15), ainsi que du 4 juin 2015, P et S (C-579/13, EU:C:2015:369, point 41).


17      Voir en particulier points 42 et 45 des présentes conclusions.


18      Voir points 40 à 42 des présentes conclusions.


19      Voir point 45 des présentes conclusions.


20      Voir, en ce sens, considérants 8, 16 et 17 de la directive 94/19.


21      Voir considérant 1 de la directive 94/19.


22      Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, la participation des sociétés coopératives financières au système de garantie des dépôts était volontaire, et le bénéfice de la garantie a été limité aux détenteurs de parts émises avant l’année 2011, soit avant leur adhésion au système.


23      Voir à cet égard développements que nous consacrons aux deuxième à sixième questions aux points 62 à 127 des présentes conclusions.


24      Voir, sur le fait que les juridictions nationales sont liées par les décisions de la Commission en matière d’aides d’État, arrêt du 21 novembre 2013, Deutsche Lufthansa (C-284/12, EU:C:2013:755, en particulier point 41, dernière phrase), et ordonnance du 4 avril 2014, Flughafen Lübeck (C-27/13, EU:C:2014:240, en particulier point 24, dernière phrase). Voir dans le même sens, sous l’angle des règles de l’Union sur les ententes (devenues articles 101 et 102 TFUE), arrêt du 14 décembre 2000, Masterfoods et HB (C-344/98, EU:C:2000:689, points 49 à 52).


25      Affaires Arcofin e.a./Commission (T-711/14) ainsi que Belgique/Commission (T-664/14), pendantes devant le Tribunal.


26      C’est à ce titre que la sixième chambre du Tribunal a décidé au mois d’octobre 2015 de surseoir à statuer dans les affaires T-664/14 et T-711/14 jusqu’à ce que la Cour aura statué dans la présente affaire.


27      Arrêts du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C-280/00, EU:C:2003:415, point 38) ; du 8 mai 2013, Libert e.a. (C-197/11 et C-203/11, EU:C:2013:288, point 74) ; du 5 mars 2015, Banco Privado Português et Massa Insolvente do Banco Privado Português (C-667/13, EU:C:2015:151, point 74), ainsi que du 16 juillet 2015, BVVG (C-39/14, EU:C:2015:470, point 23).


28      Arrêts du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C-280/00, EU:C:2003:415, point 75) ; du 8 mai 2013, Libert e.a. (C-197/11 et C-203/11, EU:C:2013:288, point 74) ; du 16 juillet 2015, BVVG (C-39/14, EU:C:2015:470, point 24), ainsi que du 22 octobre 2015, EasyPay et Finance Engineering (C-185/14, EU:C:2015:716, point 35).


29      Arrêts du 3 mars 2005, Heiser (C-172/03, EU:C:2005:130, point 46), et du 16 juillet 2015, BVVG (C-39/14, EU:C:2015:470, point 52). Voir dans le même sens arrêt du 19 mars 2013, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission e.a. et Commission/France e.a. (C-399/10 P et C‑401/10 P, EU:C:2013:175, point 102).


30      Aux termes de la décision de renvoi, personne ne conteste en revanche que le régime de garantie en cause soit le fait d’une intervention de l’État ou qu’il ait mobilisé des ressources d’État (première condition de l’article 107, paragraphe 1, TFUE).


31      Arrêts du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C-280/00, EU:C:2003:415, point 84) ; du 8 mai 2013, Libert e.a. (C-197/11 et C-203/11, EU:C:2013:288, point 83), ainsi que du 3 avril 2014, France/Commission (C-559/12 P, EU:C:2014:217, point 94). Voir dans le même sens, déjà, arrêt du 15 juillet 1964, Costa (6/64, EU:C:1964:66).


32      Voir à cet égard considérant 100 de la décision 2014/686 : « […] En l’espèce, la mesure a aidé [ARCO] à maintenir [son] capital existant, en convainquant les associés de coopératives existants à ne pas se retirer de celles-ci […], ce qui a constitué un avantage particulièrement important au vu de la nervosité du marché au cours de la période qui a suivi immédiatement la faillite de Lehman Brothers. […] » Nous ajoutons que la possibilité offerte par la législation belge de limiter le retrait d’associés à 10 % du capital de la société coopérative par an ne récuse absolument pas l’idée qu’ARCO ait été avantagé par le régime de garantie ; elle limite tout au plus l’ampleur de l’avantage recueilli par ARCO.


33      Arrêt du 14 janvier 2015, Eventech (C-518/13, EU:C:2015:9, point 54).


34      Arrêts du 3 mars 2005, Heiser (C-172/03, EU:C:2005:130, point 40) ; du 14 janvier 2015, Eventech (C-518/13, EU:C:2015:9, point 55), ainsi que du 8 novembre 2001, Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer & Peggauer Zementwerke (C-143/99, EU:C:2001:598, point 41).


35      Voir, en particulier, considérant 101, première phrase, de la décision 2014/686.


36      Voir en particulier points 40 à 42 des présentes conclusions.


37      Voir point 45 des présentes conclusions.


38      Arrêt du 8 septembre 2011, Paint Graphos e.a. (C-78/08 à C-80/08, EU:C:2011:550).


39      Arrêt du 8 septembre 2011, Paint Graphos e.a. (C-78/08 à C-80/08, EU:C:2011:550, points 49 et 65). On trouve fréquemment des indications similaires dans la jurisprudence de la Cour, voir notamment arrêts du 8 novembre 2001, Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer & Peggauer Zementwerke (C-143/99, EU:C:2001:598, points 41 et 42) ; du 6 septembre 2006, Portugal/Commission (C-88/03, EU:C:2006:511, points 55 et 56) ; du 15 novembre 2011, Commission et Espagne/Government of Gibraltar et Royaume-Uni (C-106/09 P et C-107/09 P, EU:C:2011:732, points 73 et 75), ainsi que du 18 juillet 2013, P (C-6/12, EU:C:2013:525, point 22).


40      Dans l’arrêt du 8 septembre 2011, Paint Graphos e.a. (C-78/08 à C-80/08, EU:C:2011:550, point 61), la Cour reconnaît également certes les « caractéristiques particulières propres aux sociétés coopératives ». Toutefois, contrairement à ce qu’ARCO en pense, cette indication ne peut pas faire accroire que les sociétés coopératives se trouveraient toujours et sans exception dans une autre situation que les sociétés commerciales. L’idée reste plutôt que les opérateurs « se trouvent, au regard de l’objectif de la mesure en cause, dans une situation factuelle et juridique comparable » (voir à cet égard une nouvelle fois jurisprudence citée à la note 39).


41      Voir à cet égard une nouvelle fois jurisprudence citée à la note 39.


42      Voir en particulier points 40 à 42, 45, 80 et 84 à 88 des présentes conclusions.


43      Arrêts du 10 janvier 2006, Cassa di Risparmio di Firenze e.a. (C-222/04, EU:C:2006:8, point 140) ; du 8 mai 2013, Libert e.a. (C-197/11 et C-203/11, EU:C:2013:288, point 76) ; du 14 janvier 2015, Eventech (C-518/13, EU:C:2015:9, point 65), ainsi que du 5 mars 2015, Banco Privado Português et Massa Insolvente do Banco Privado Português (C-667/13, EU:C:2015:151, points 46 et 49).


44      Considérant 108 de la décision 2014/686.


45      Arrêts du 10 janvier 2006, Cassa di Risparmio di Firenze e.a. (C-222/04, EU:C:2006:8, points 141 à 143) ; du 8 mai 2013, Libert e.a. (C-197/11 et C-203/11, EU:C:2013:288, points 77 et 78), ainsi que du 5 mars 2015, Banco Privado Português et Massa Insolvente do Banco Privado Português (C-667/13, EU:C:2015:151, point 51).


46      Voir en ce sens, spécialement à l’endroit de l’atteinte aux échanges entre États membres, arrêts du 21 mars 1990, Belgique/Commission (C-142/87, EU:C:1990:125, point 43) ; du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C-280/00, EU:C:2003:415, point 81), ainsi que du 14 janvier 2015, Eventech (C-518/13, EU:C:2015:9, point 81).


47      Considérant 110 de la décision 2014/686.


48      Voir, sur ces quatre conditions, points 68 et 69 des présentes conclusions.


49      Arrêt du 5 mars 2015, Banco Privado Português et Massa Insolvente do Banco Privado Português (C-667/13, EU:C:2015:151, point 45).


50      Voir considérants 91 à 110 de la décision 2014/686.


51      Arrêts du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France (C-367/95 P, EU:C:1998:154, point 63) ; du 15 décembre 2005, Italie/Commission (C-66/02, EU:C:2005:768, point 26) ; du 5 mars 2015, Banco Privado Português et Massa Insolvente do Banco Privado Português (C‑667/13, EU:C:2015:151, point 44), ainsi que du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission (C-286/13 P, EU:C:2015:184, points 93 et 94).


52      Arrêts du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France (C-367/95 P, EU:C:1998:154, point 63) ; du 15 décembre 2005, Italie/Commission (C-66/02, EU:C:2005:768, point 26), ainsi du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission (C-286/13 P, EU:C:2015:184, points 93 et 94).


53      Voir à cet égard considérants 55 à 57 de la décision 2014/686.


54      La Commission y cite les arrêts du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission (C-156/98, EU:C:2000:467) ; du 13 juin 2002, Pays-Bas/Commission (C-382/99, EU:C:2002:363), ainsi que du 4 mars 2009, Associazione italiana del risparmio gestito et Fineco Asset Management/Commission (T-445/05, EU:T:2009:50).


55      Voir considérant 100 de la décision 2014/686.


56      Arrêts du 15 décembre 2005, Italie/Commission (C-66/02, EU:C:2005:768, points 26 et 55) ; du 22 décembre 2008, Régie Networks (C-333/07, EU:C:2008:764, point 71) ; du 30 avril 2009, Commission/Italie et Wam (C-494/06 P, EU:C:2009:272, point 33) ; du 26 novembre 2013, Gascogne Sack Deutschland/Commission (C-40/12 P, EU:C:2013:768, point 46), ainsi que du 17 septembre 2015, Total/Commission (C-597/13 P, EU:C:2015:613, point 18).


57      Voir à cet égard point 106 des présentes conclusions.


58      Arrêts du 14 février 1990, France/Commission (C-301/87, EU:C:1990:67, point 17) ; du 12 février 2008, CELF et ministre de la Culture et de la Communication (C-199/06, EU:C:2008:79, points 36 et 37) ; du 21 novembre 2013, Deutsche Lufthansa (C-284/12, EU:C:2013:755, points 25 et 26), ainsi que du 11 novembre 2015, Klausner Holz Niedersachsen (C-505/14, EU:C:2015:742, points 18 et 19).


59      Arrêts du 14 février 1990, France/Commission (C-301/87, EU:C:1990:67, point 17) ; du 12 février 2008, CELF et ministre de la Culture et de la Communication (C-199/06, EU:C:2008:79, point 36), ainsi que du 5 mars 2015, Banco Privado Português et Massa Insolvente do Banco Privado Português (C-667/13, EU:C:2015:151, point 57).


60      La Cour a déjà eu l’occasion de mesurer dans un autre contexte l’incidence significative que pouvaient avoir des communiqués de presse, voire même de simples déclarations d’autorités ou d’organismes officiels, sur l’évolution des marchés financiers ; voir notamment arrêts du 19 mars 2013, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission e.a. et Commission/France e.a. (C‑399/10 P et C-401/10 P, EU:C:2013:175, en particulier points 131 et 132), ainsi que du 16 juin 2015, Gauweiler e.a. (C-62/14, EU:C:2015:400).


61      Considérants 100 et 108 de la décision 2014/686.


62      Voir, sur la qualification d’une garantie comme avantage au sens de la réglementation des aides d’État, arrêts du 8 décembre 2011, Residex Capital IV (C-275/10, EU:C:2011:814, point 39), et du 3 avril 2014, France/Commission (C-559/12 P, EU:C:2014:217, point 96).


63      Considérants 85 à 90 de la décision 2014/686.


64      Voir, sur la possibilité d’assimiler différentes mesures successives de l’État à une seule et même mesure aux fins de l’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, arrêt du 19 mars 2013, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission e.a. et Commission/France e.a. (C-399/10 P et C‑401/10 P, EU:C:2013:175, points 103 et 104).


65      Voir, à cet égard, arrêts du 2 décembre 1997, Fantask e.a. (C-188/95, EU:C:1997:580, point 118), ainsi que du 1er juillet 2010, ThyssenKrupp Acciai Speciali Terni/Commission (T‑62/08, EU:T:2010:268, point 235).


66      Voir en ce sens arrêts du 21 mars 2013, Magdeburger Mühlenwerke (C-129/12, EU:C:2013:200, point 40), ainsi que du 9 septembre 2009, Diputación Foral de Álava e.a./Commission (T‑227/01 à T-229/01, T-265/01, T-266/01 et T-270/01, EU:T:2009:315, point 172).


67      Voir, dans le même sens, arrêt du 27 mars 1984, Commission/Italie (169/82, EU:C:1984:126, point 11), dans lequel la Cour a déterminé que, en ne notifiant les projets des lois en cause à l’époque qu’après leur adoption, la République italienne avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 93, paragraphe 3, du traité CE (devenu article 108, paragraphe 3, TFUE). Voir en outre arrêt du 1er juillet 2010, ThyssenKrupp Acciai Speciali Terni/Commission (T-62/08, EU:T:2010:268, points 235 et 236).


68      Voir développements que nous consacrons à la deuxième question aux points 64 à 106 des présentes conclusions.


69      Considérant 143 de la décision 2014/686.