Language of document : ECLI:EU:C:2019:33

ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

17 janvier 2019 (*)

« Renvoi préjudiciel – Directive 2009/138/CE – Accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice – Article 13, point 13 – Notion d’“État membre où le risque est situé” – Société, établie dans un État membre, fournissant des services d’assurance relatifs aux risques contractuels liés aux transformations des sociétés dans un autre État membre – Article 157 – État membre de perception de la taxe sur les primes d’assurance »

Dans l’affaire C‑74/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Korkein hallinto-oikeus (Cour administrative suprême, Finlande), par décision du 31 janvier 2018, parvenue à la Cour le 5 février 2018, dans la procédure engagée par

A Ltd

en présence de :

Veronsaajien oikeudenvalvontayksikkö,

LA COUR (sixième chambre),

composée de Mme C. Toader, présidente, MM. A. Rosas et M. Safjan (rapporteur), juges,

avocat général : M. G. Pitruzzella,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,      

considérant les observations présentées :

–        pour le gouvernement finlandais, par Mme H. Leppo, en qualité d’agent,

–        pour la Commission européenne, par Mmes H. Tserepa-Lacombe et A. Armenia ainsi que par M. E. Paasivirta, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 13 et 157 de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009, sur l’accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II) (JO 2009, L 335, p. 1), telle que modifiée par la directive 2013/58/UE du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2013 (JO 2013, L 341, p. 1) (ci-après la « directive 2009/138 »).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure engagée par la compagnie d’assurances A Ltd au sujet d’un rescrit fiscal, qu’elle avait sollicité auprès de la keskusverolautakunta (commission fiscale centrale, Finlande), relatif à la détermination de l’État membre ayant le pouvoir d’imposition en matière de la taxe sur les primes d’assurances.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 La directive 2009/138

3        Aux termes de l’article 13, point 13, de la directive 2009/138, on entend par « État membre où le risque est situé » l’un des États membres suivants :

« a)       l’État membre où se trouvent les biens, lorsque l’assurance est relative soit à des immeubles, soit à des immeubles et à leur contenu, dans la mesure où celui-ci est couvert par la même police d’assurance ;

b)       l’État membre d’immatriculation, lorsque l’assurance est relative à des véhicules de toute nature ;

c)       l’État membre où le preneur a souscrit la police, s’il s’agit d’un contrat d’une durée inférieure ou égale à quatre mois, relatif à des risques encourus au cours d’un voyage ou de vacances, quelle que soit la branche concernée ;

d)       dans tous les cas non expressément couverts par les points a), b) ou c), l’État membre où l’un des éléments suivants est situé :

i)       la résidence habituelle du preneur ; ou

ii)       si le preneur est une personne morale, l’établissement du preneur auquel le contrat se rapporte ».

4        L’article 157 de cette directive dispose :

« 1.      Sans préjudice d’une harmonisation ultérieure, tout contrat d’assurance est exclusivement soumis aux impôts indirects et taxes parafiscales sur les primes d’assurance dans l’État membre où le risque est situé ou l’État membre de l’engagement.

[...]

3.      Chaque État membre applique aux entreprises d’assurance qui couvrent des risques ou des engagements situés sur son territoire ses dispositions nationales concernant les mesures destinées à assurer la perception des impôts indirects et taxes parafiscales dus au titre du paragraphe 1. »

5        En vertu de l’article 310 de ladite directive, la deuxième directive 88/357/CEE du Conseil, du 22 juin 1988, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l’assurance directe autre que l’assurance sur la vie, fixant les dispositions destinées à faciliter l’exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive 73/239/CEE (JO 1988, L 172, p. 1), est abrogée avec effet au 1er janvier 2016 et les références à cette dernière directive s’entendent comme faites à la directive 2009/138 et sont à lire selon le tableau de correspondance figurant à l’annexe VII de cette dernière. Conformément audit tableau, l’article 13, point 13, de la directive 2009/138 correspond à l’article 2, sous d), de la directive 88/357.

 La directive 88/357

6        L’article 2 de la directive 88/357 disposait :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

d)       État membre où le risque est situé :

–        l’État membre où se trouvent les biens, lorsque l’assurance est relative soit à des immeubles, soit à des immeubles et à leur contenu, dans la mesure où celui-ci est couvert par la même police d’assurance,

–        l’État membre d’immatriculation, lorsque l’assurance est relative à des véhicules de toute nature,

–        l’État membre où le preneur a souscrit le contrat, s’il s’agit d’un contrat d’une durée inférieure ou égale à quatre mois relatif à des risques encourus au cours d’un voyage ou de vacances, quelle que soit la branche concernée,

–        l’État membre où le preneur a sa résidence habituelle ou, si le preneur est une personne morale, l’État membre où est situé l’établissement de cette personne morale auquel le contrat se rapporte, dans tous les cas qui ne sont pas explicitement visés par les tirets précédents ;

[...] »

 Le droit finlandais

7        En vertu de l’article 1er, paragraphe 1, de la laki eräistä vakuutusmaksuista suoritettavasta verosta (664/1966) [loi (664/1966) relative à la taxe à appliquer à certaines primes d’assurance], dans sa version applicable au litige au principal, quand sont assurés un bien situé en Finlande, un intérêt se rapportant à une activité exercée en Finlande, ou un autre intérêt situé en Finlande, une taxe portant sur la prime d’assurance perçue en vertu du contrat d’assurance est versée à l’État conformément aux dispositions de ladite loi.

8        Aux termes de l’article 6, paragraphe 1, de la laki ulkomaisista vakuutusyhtiöistä (398/1995) [loi (398/1995) relative aux compagnies d’assurances étrangères], on entend par « risque situé en Finlande » :

« 1)       Un bien situé en Finlande, si l’assurance est relative à un immeuble, un bâtiment ou un bâtiment et les meubles qu’il contient si les meubles sont assurés avec la même assurance que le bâtiment ;

2)       Un véhicule immatriculé en Finlande lorsque l’assurance a pour objet le véhicule ; ou

3)       Un risque lié à un voyage ou à des vacances si le contrat d’assurance qui s’y rapporte est conclu pour une durée maximale de quatre mois et si le preneur d’assurance a conclu le contrat en Finlande. »

9        En vertu de l’article 6, paragraphe 2, de cette loi, dans les cas autres que ceux visés au paragraphe 1 de cet article, le risque est réputé être situé en Finlande si le preneur d’assurance y a sa résidence habituelle ou si celui-ci est une personne morale qui y possède un établissement auquel l’assurance se rapporte.

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

10      A Ltd est un fournisseur de produits d’assurance établi au Royaume-Uni qui opère en Finlande grâce à une licence d’accès au marché de ce dernier État membre. Cette société n’a pas d’établissement stable distinct en Finlande.

11      A Ltd propose à sa clientèle, entre autres, des produits d’assurance liés aux acquisitions d’entreprises. Les principaux produits d’assurance qu’elle offre dans ce contexte sont des assurances dites « warranty & indemnity » (ci-après l’assurance « garantie et indemnisation ») dont le preneur est soit le vendeur, soit l’acquéreur, et une assurance responsabilité civile portant sur la responsabilité liée à la situation fiscale de l’entreprise cédée (ci-après « l’assurance responsabilité fiscale »). Le but de ces assurances est de couvrir la responsabilité du preneur d’assurance ou d’indemniser celui-ci d’un préjudice financier.

12      Les assurances « garantie et indemnisation » souscrites par le vendeur ou par l’acquéreur ont pour objet la couverture, par la compagnie d’assurances, conformément aux termes du contrat, du préjudice subi par l’acquéreur en raison d’une violation des déclarations faites par le vendeur dans l’acte de vente. L’assurance responsabilité fiscale fonctionne selon un principe similaire, mais elle vise à couvrir l’engagement donné par le vendeur dans l’acte de vente selon lequel la société faisant l’objet de la vente (ci-après la « société cible ») ne sera pas assujettie à l’impôt pour la période au cours de laquelle elle était détenue par le vendeur.

13      Toutes les assurances mentionnées ci-dessus portent sur le risque contractuel lié à la valeur des actions et au juste prix d’achat payé par l’acquéreur.

14      A Ltd a adressé une demande de décision préalable à la commission fiscale centrale afin d’obtenir un rescrit fiscal portant sur la détermination de l’État de perception des taxes sur les primes d’assurance, lorsque, entre le preneur d’assurance et la société cible faisant l’objet de l’acquisition, l’un d’entre eux est une personne morale étrangère et l’autre une société par action finlandaise.

15      Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, A Ltd a indiqué, dans sa demande de décision préalable, que l’assurance « garantie et indemnisation » souscrite par le vendeur couvre, entre autres, jusqu’à un montant maximum convenu, les frais de procédure et les préjudices liés à une violation, par le vendeur, des déclarations qu’il a faites dans l’acte de vente. Dans ces situations, le vendeur est responsable à l’égard de l’acquéreur et est tenu de l’indemniser, l’assurance intervenant ensuite pour garantir le vendeur des frais et des indemnités dont il s’est acquitté envers l’acquéreur du chef de la responsabilité encourue.

16      En ce qui concerne l’assurance « garantie et indemnisation » dont le preneur est l’acquéreur, A Ltd a expliqué que cette assurance vise à indemniser directement celui-ci pour le préjudice matériel causé par une violation, par le vendeur, de ses déclarations. Elle couvre également les frais de procédure encourus par l’acquéreur en raison d’une demande de dommages et intérêts présentée par un tiers qui a en même temps pour conséquence une violation, par le vendeur, de ses déclarations.

17      En ce qui concerne l’assurance responsabilité fiscale, A Ltd a indiqué qu’elle vise à protéger soit le vendeur, soit l’acquéreur de la responsabilité encourue par la société cible avant l’opération d’acquisition. Pour le reste, l’assurance responsabilité fiscale fonctionne de la même manière que les deux types d’assurance « garantie et indemnisation ».

18      Les assurances qui présentent un lien de rattachement avec la Finlande proposées par A Ltd prévoient trois options pour le preneur d’assurance et la société cible. Dans la majorité des cas, le preneur d’assurance, qui peut être soit le vendeur, soit l’acquéreur, est une société par actions finlandaise et la société cible est, elle aussi, une personne morale finlandaise. Toutefois, il est également possible que le preneur d’assurance soit une société par actions finlandaise et que la société cible soit une personne morale étrangère, ou que le preneur d’assurance soit une personne morale étrangère et que la société cible soit une société par actions finlandaise.

19      Par décision du 4 novembre 2016, la commission fiscale centrale, dans son rescrit fiscal pour la période allant du 4 novembre 2016 jusqu’au 31 décembre 2017, s’est prononcée en ce sens que, si A Ltd propose des assurances à une société par actions finlandaise et que la société cible est une personne morale étrangère, les primes d’assurance ne sont pas soumises en Finlande à la taxe sur les primes d’assurance.

20      Cette autorité a encore considéré que, si A Ltd propose des assurances à une personne morale étrangère et que la société cible est une société par actions finlandaise, les primes d’assurance sont soumises en Finlande à la taxe sur les primes d’assurance.

21      Dans son recours devant la juridiction de renvoi, le Korkein hallinto-oikeus (Cour administrative suprême, Finlande), à l’encontre de ce rescrit fiscal, A Ltd fait valoir que l’État membre où le risque est situé devrait être déterminé en fonction de celui dans lequel le preneur d’assurance est établi.

22      Devant cette même juridiction, le Veronsaajien oikeudenvalvontayksikkö (service de défense des droits des destinataires de recettes fiscales, Finlande) est intervenu aux fins de soutenir la position adoptée par la commission fiscale centrale dans son rescrit. Se référant à l’arrêt du 14 juin 2001, Kvaerner (C‑191/99, EU:C:2001:332), ce service fait valoir que le risque se situe au niveau du groupe auquel appartient la société cible étrangère et que le lieu où se situe ce risque doit être déterminé en fonction d’un lien. Le lieu d’établissement de la société cible serait alors un facteur de rattachement concret permettant de déterminer le lieu où le risque est situé.

23      C’est dans ces circonstances que le Korkein hallinto-oikeus (Cour administrative suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Dans l’interprétation de l’article 157, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2009/138, lu en combinaison avec l’article 13, points 13 et 14, de cette directive, est-il considéré que l’État membre en droit de percevoir la taxe sur les primes d’assurance est l’État dans lequel la société (une personne morale) ayant souscrit l’assurance est établie, ou celui dans lequel la société qui fait l’objet de l’acquisition d’entreprise est établie, lorsqu’une compagnie d’assurances ayant son siège social au Royaume-Uni, non établie en Finlande, propose une assurance couvrant des risques relatifs à une acquisition d’entreprise

–        à une société non établie en Finlande, qui, dans le cadre de l’acquisition d’entreprise, agit en tant qu’acquéreur, la société cible de ladite acquisition étant établie en Finlande,

–        à une société établie en Finlande, qui, dans le cadre de l’acquisition d’entreprise, agit en tant qu’acquéreur, la société cible de ladite acquisition n’étant pas établie en Finlande,

–        à une société non établie en Finlande, qui, dans le cadre de l’acquisition d’entreprise, agit en tant que vendeur, la société cible de ladite acquisition étant établie en Finlande,

–        à une société établie en Finlande, qui, dans le cadre de l’acquisition d’entreprise, agit en tant que vendeur, la société cible de ladite acquisition n’étant pas établie en Finlande ?

2)      Le fait que l’assurance ne couvre que les obligations fiscales de la société nées antérieurement à la réalisation de l’acquisition d’entreprise a-t-il une incidence en l’espèce ?

3)      La question de savoir si l’acquisition d’entreprise a pour objet des actions ou une branche d’activité de la société cible a-t-elle une incidence en l’espèce ?

4)      Dans l’hypothèse dans laquelle l’acquisition d’entreprise a pour objet des actions de la société cible, la question de savoir si les déclarations faites par le vendeur à l’acheteur concernent uniquement le fait que le vendeur est propriétaire des actions vendues et que celles-ci ne font pas l’objet de revendications de tiers a-t-elle une incidence en l’espèce ? »

 Sur les questions préjudicielles

24      Par ses quatre questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si, lorsqu’une compagnie d’assurances établie sur le territoire d’un État membre propose une assurance couvrant les risques contractuels liés à la valeur des actions et au juste prix d’achat payé par l’acquéreur lors de l’acquisition d’une entreprise, l’article 157, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2009/138, lu en combinaison avec l’article 13, point 13, de cette directive, doit être interprété en ce sens qu’un contrat d’assurance conclu dans ce cadre est exclusivement soumis aux impôts indirects et aux taxes parafiscales sur les primes d’assurance dans l’État membre où le preneur d’assurance est établi, ou dans l’État membre où est établie la société cible.

25      À cet égard, il importe de relever qu’il ressort du libellé même de l’article 157, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2009/138 que, sans préjudice d’une harmonisation ultérieure, tout contrat d’assurance est exclusivement soumis aux impôts indirects et aux taxes parafiscales sur les primes d’assurance dans l’État membre où le risque est situé.

26      Il y a également lieu de constater que, aux termes de l’article 13, point 13, sous d), ii), de la directive 2009/138, aux fins de ladite directive, on entend par « État membre où le risque est situé », si le preneur est une personne morale, l’État membre où l’établissement du preneur, auquel le contrat se rapporte, est situé.

27      Ainsi, dès lors que le preneur d’assurance est, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, une personne morale, il convient de déterminer, afin de répondre aux questions posées, l’État membre où se trouve l’établissement du preneur auquel les contrats d’assurance se rapportent, au sens de l’article 13, point 13, sous d), ii), de la directive 2009/138.

28      À cette fin, dans la mesure où l’article 13, point 13, de la directive 2009/138 correspond, selon le tableau figurant à l’annexe VII de celle-ci, à l’article 2, sous d), de la directive 88/357, il y a lieu de se référer à la portée de l’article 2, sous d), dernier tiret, de cette dernière, qui est identique à celle de l’article 13, point 13, sous d), ii), de la directive 2009/138, et à la jurisprudence de la Cour y afférente.

29      À cet égard, la Cour a précisé, d’une part, qu’il ressort de l’article 2, sous d), premier à quatrième tirets, de la directive 88/357 que le législateur de l’Union a entendu proposer, pour tous les types de risques assurés, une solution permettant de déterminer l’État où le risque est situé en se basant sur des critères d’ordre concret et physique plutôt que sur des critères d’ordre juridique. Le but poursuivi était que corresponde à chaque risque un élément concret permettant de le localiser dans un État membre déterminé (arrêt du 14 juin 2001, Kvaerner, C‑191/99, EU:C:2001:332, point 44).

30      D’autre part, la Cour a relevé que l’objectif de l’article 2, sous d), dernier tiret, de cette directive était notamment d’édicter une règle supplétive pour la détermination du lieu où est situé un risque d’exploitation, lorsque ce risque n’est pas lié spécifiquement à un immeuble, à un véhicule ou à un voyage. L’accent est mis à cette fin sur le lieu où est exercée l’activité dont le risque est couvert par le contrat (voir, en ce sens, arrêt du 14 juin 2001, Kvaerner, C‑191/99, EU:C:2001:332, point 46).

31      Il résulte de cette jurisprudence que, pour déterminer l’État membre où se situe le risque, au sens de l’article 157, paragraphe 1, de la directive 2009/138, il convient d’identifier, en particulier, l’activité précise dont les risques sont couverts par les différents contrats d’assurance en cause au principal.

32      À cet égard, il ressort de la décision de renvoi que l’affaire au principal porte sur différents types de contrat, couvrant différents types de risques.

33      Premièrement, l’assurance « garantie et indemnisation », souscrite soit par l’acquéreur, soit par le vendeur de la société cible, a pour objet la couverture, par la compagnie d’assurances, du préjudice subi par l’acquéreur en raison d’une violation des déclarations faites par le vendeur dans l’acte de vente.

34      Deuxièmement, l’assurance responsabilité fiscale vise à couvrir le risque lié à l’engagement que prend le vendeur de la société cible quant à la situation fiscale de cette dernière au moment de la vente pour la période précédant le transfert de propriété de celle-ci au profit de l’acquéreur et protège ainsi soit le vendeur, soit l’acquéreur de la responsabilité éventuellement encourue par la société cible avant l’acquisition de celle-ci.

35      Au regard des objectifs de protection exposés aux deux points précédents, les contrats d’assurance visent, dans chacune de ces hypothèses, exclusivement à protéger le preneur d’assurance, qu’il agisse en tant qu’acquéreur ou en tant que vendeur de la société cible, du risque lié à la violation, par le vendeur, des déclarations et engagements faits par ce dernier lors de l’acte de vente.

36      Dans ces conditions, ainsi qu’il ressort expressément de la décision de renvoi, les trois types de contrats d’assurance en cause au principal portent sur l’assurance du risque contractuel lié à la valeur des actions et au juste prix d’achat payé par l’acquéreur. L’assurance ne couvre que la baisse de la valeur des actions qui serait causée par des faits ayant fait l’objet de déclarations distinctes du vendeur lors de la conclusion du contrat de vente.

37      En effet, ni les contrats d’assurance « garantie et indemnisation » ni l’assurance responsabilité fiscale ne visent à couvrir les risques d’éventuels dommages ou pertes financières liés à l’exploitation de la société cible ou à son bon fonctionnement.

38      À cet égard, déterminer, de façon automatique, à l’instar de ce qu’a proposé le gouvernement finlandais, le lieu où est exercée l’activité dont le risque est couvert par le contrat d’assurance en fonction du lieu où la société cible est établie se heurterait au libellé de l’article 13, point 13, sous d), ii) de la directive 2009/138, cette disposition énonçant clairement qu’est seul pertinent, afin de déterminer l’État membre où le risque est situé, le lieu d’établissement du « preneur ».

39      Or, dans l’hypothèse où l’acquéreur d’une entreprise a, en tant que preneur, souscrit le contrat d’assurance, cette entreprise ne saurait être vue comme étant l’« établissement du preneur » qu’à partir du moment où le transfert de la propriété de celle-ci à son profit a pris effet.

40      Il en est de même du cas inverse, caractérisé par le fait que le vendeur de l’entreprise a souscrit le contrat d’assurance. Dans cette hypothèse, cette entreprise ne saurait être vue comme étant l’« établissement du preneur » que jusqu’à cette même date.

41      Au vu des éléments qui précèdent, il convient de considérer, d’une part, que le lieu où est exercée l’activité dont le risque est couvert par les contrats d’assurance en cause au principal est le lieu d’établissement du preneur d’assurance agissant, en fonction de la portée du contrat d’assurance en cause, soit en tant que vendeur, soit en tant qu’acquéreur, et non celui de la société cible.

42      D’autre part, il découle des considérations qui précèdent que les circonstances évoquées dans les deuxième à quatrième questions n’ont pas d’incidence en l’occurrence.

43      Partant, il convient de répondre aux questions posées que l’article 157, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2009/138, lu en combinaison avec l’article 13, point 13, de cette directive, doit être interprété en ce sens que, lorsqu’une compagnie d’assurances établie sur le territoire d’un État membre propose une assurance couvrant les risques contractuels liés à la valeur des actions et au juste prix d’achat payé par l’acquéreur lors de l’acquisition d’une entreprise, un contrat d’assurance conclu dans ce cadre est exclusivement soumis aux impôts indirects et aux taxes parafiscales sur les primes d’assurance dans l’État membre où le preneur d’assurance est établi.

 Sur les dépens

44      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) dit pour droit :

L’article 157, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009, sur l’accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II), telle que modifiée par la directive 2013/58/UE du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2013, lu en combinaison avec l’article 13, point 13, de ladite directive 2009/138, doit être interprété en ce sens que, lorsqu’une compagnie d’assurances établie sur le territoire d’un État membre propose une assurance couvrant les risques contractuels liés à la valeur des actions et au juste prix d’achat payé par l’acquéreur lors de l’acquisition d’une entreprise, un contrat d’assurance conclu dans ce cadre est exclusivement soumis aux impôts indirects et aux taxes parafiscales sur les primes d’assurance dans l’État membre où le preneur d’assurance est établi.

Signatures


*      Langue de procédure : le finnois.