Language of document : ECLI:EU:C:2011:709

ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

27 octobre 2011 (*)

«Manquement d’État – Directives 92/50/CEE et 2004/18/CE – Marchés publics de services – Services complémentaires de cadastrage et d’aménagement urbain – Procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché»

Dans l’affaire C‑601/10,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 17 décembre 2010,

Commission européenne, représentée par Mme M. Patakia et M. D. Kukovec, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République hellénique, représentée par Mmes S. Chala et D. Tsagkaraki, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. A. Rosas, faisant fonction de président de la sixième chambre, MM. A. Ó Caoimh (rapporteur) et A. Arabadjiev, juges,

avocat général: M. P. Cruz Villalón,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en ayant passé, en recourant à une procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché, des marchés publics ayant pour objet des services complémentaires de cadastrage et d’aménagement urbain qui ne figuraient pas dans le contrat initial conclu par les communes de Vassilika, de Kassandra, d’Egnatia et d’Arethousa, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 8 et 11, paragraphe 3, de la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services (JO L 209, p. 1), telle que modifiée par la directive 97/52/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 1997 (JO L 328, p. 1, ci-après la «directive 92/50»), ainsi que des articles 20 et 31, point 4, de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services (JO L 134, p. 14).

 Le cadre juridique

 La réglementation de l’Union

 La directive 92/50

2        Selon l’article 1er, sous b), de la directive 92/50, sont considérées comme «pouvoirs adjudicateurs», notamment, les collectivités territoriales.

3        Aux termes de l’article 3, paragraphe 2, de cette directive:

«Les pouvoirs adjudicateurs veillent à ce qu’il n’y ait pas de discrimination entre les différents prestataires de services.»

4        Selon l’article 7 de la directive 92/50:

«1. a) La présente directive s’applique:

[...]

–        aux marchés publics de services ayant pour objet des services figurant à l’annexe I A [...]

[...]

ii)      passés par les pouvoirs adjudicateurs désignés à l’article 1er point b) autres que ceux mentionnés à l’annexe I de la directive 93/36/CEE [du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de fournitures (JO L 199, p. 1)] et dont la valeur estimée hors [taxe sur la valeur ajoutée] égale ou dépasse l’équivalent en écus de 200 000 [droits de tirage spéciaux (DTS)].

[...]»

5        Ladite annexe I A, intitulée «Services au sens de l’article 8», vise, notamment, sous la catégorie 12, les «services d’aménagement urbain» ainsi que les «services connexes de consultations scientifiques et techniques».

6        Il est constant que les collectivités territoriales grecques ne sont pas mentionnées à l’annexe I de la directive 93/36.

7        L’article 8 de la directive 92/50 dispose:

«Les marchés qui ont pour objet des services figurant à l’annexe I A sont passés conformément aux dispositions des titres III à VI.»

8        Figurant sous le titre III de cette même directive, intitulé «Choix des procédures de passation et règles applicables aux concours», l’article 11, paragraphe 3, de celle-ci prévoit:

«Les pouvoirs adjudicateurs peuvent passer leurs marchés publics de services en recourant à une procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché dans les cas suivants:

[...]

e)      pour les services complémentaires ne figurant pas dans le projet initialement envisagé ou dans le premier contrat conclu, mais qui, à la suite d’une circonstance imprévue, sont devenus nécessaires à l’exécution du service tel qu’il y est décrit, à condition que l’attribution soit faite au prestataire qui exécute ce service:

–        lorsque ces services complémentaires ne peuvent être techniquement ou économiquement séparés du marché principal sans inconvénient majeur pour les pouvoirs adjudicateurs,

ou

–        lorsque ces services, quoiqu’ils soient séparables de l’exécution du marché initial, sont strictement nécessaires à son perfectionnement.

Toutefois, la valeur cumulée estimée des marchés passés pour les services complémentaires ne doit pas dépasser 50 % du montant du marché principal;

[...]»

 La directive 2004/18

9        La directive 2004/18 a abrogé, notamment, les articles 3, 8 et 11 de la directive 92/50, avec effet à compter du 31 janvier 2006, date à laquelle les États membres devaient avoir mis en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives pour se conformer à la directive 2004/18.

10      Selon l’article 1er, paragraphe 9, de cette directive, sont considérées comme «pouvoirs adjudicateurs», notamment, les collectivités territoriales.

11      Aux termes de l’article 2 de ladite directive:

«Les pouvoirs adjudicateurs traitent les opérateurs économiques sur un pied d’égalité, de manière non discriminatoire et agissent avec transparence.»

12      En vertu de l’article 7 de la directive 2004/18, celle-ci s’applique aux marchés publics de services qui ne sont pas exclus en vertu des exceptions prévues par cette directive et dont la valeur estimée hors taxe sur la valeur ajoutée est égale ou supérieure à 249 000 euros lorsque les marchés sont passés par des pouvoirs adjudicateurs autres que ceux visés à l’annexe IV de ladite directive. Cette annexe, sous la rubrique «Grèce», ne mentionne pas les collectivités territoriales.

13      L’article 20 de la directive 2004/18 dispose:

«Les marchés qui ont pour objet des services figurant à l’annexe II A sont passés conformément aux articles 23 à 55.»

14      Ladite annexe vise, notamment, sous la catégorie 12, les «services d’aménagement urbain» ainsi que les «services connexes de consultations scientifiques et techniques».

15      L’article 31 de la directive 2004/18, intitulé «Cas justifiant le recours à la procédure négociée sans publication d’un avis de marché», prévoit:

«Les pouvoirs adjudicateurs peuvent passer leurs marchés publics en recourant à une procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché dans les cas suivants:

[...]

4)      dans le cas des marchés publics de travaux et marchés publics de services:

a)      pour les travaux ou services complémentaires qui ne figurent pas dans le projet initialement envisagé ni dans le contrat initial et qui sont devenus nécessaires, à la suite d’une circonstance imprévue, à l’exécution de l’ouvrage ou du service tel qu’il y est décrit, à condition que l’attribution soit faite à l’opérateur économique qui exécute cet ouvrage ou ce service:

–        lorsque ces travaux ou services complémentaires ne peuvent être techniquement ou économiquement séparés du marché initial sans inconvénient majeur pour les pouvoirs adjudicateurs,

ou

–        lorsque ces travaux ou services, quoiqu’ils soient séparables de l’exécution du marché initial, sont strictement nécessaires à son perfectionnement.

Toutefois, le montant cumulé des marchés passés pour les travaux ou services complémentaires ne doit pas dépasser 50 % du montant du marché initial.

[...]»

 La réglementation nationale

16      La loi 3316/2005 relative à l’attribution et à l’exécution de marchés publics relatifs à l’élaboration d’études et à la prestation de services connexes et autres dispositions (FEK A’ 42/22.2.2005) et le décret présidentiel 60/2007 (FEK A’ 64/16.3.2007) ont adapté les procédures d’attribution et d’exécution des marchés publics relatifs à la réalisation d’études, prévues par le droit hellénique, aux dispositions de la directive 2004/18. Ils régissent l’attribution et l’exécution des marchés relatifs à la réalisation d’études et à la prestation de services connexes dont les résumés des avis de marché ont été publiés après le 23 février 2005.

17      Selon l’article 45, paragraphe 1, de la loi 3316/2005, l’attribution et l’exécution des marchés relatifs à l’élaboration d’études et à la prestation de services connexes dont les résumés des avis de marché ont été publiés avant le 23 février 2005 sont régies par les dispositions du cadre juridique antérieur, à savoir la loi 716/1977 relative au registre des experts et à l’attribution et à l’élaboration d’études (FEK A’ 295/5.10.1977) et le décret présidentiel d’application 194/1979 (FEK A’ 53/15.9.1979).

18      Conformément à la loi 716/1977, la rémunération de l’expert pour l’ensemble de l’étude est estimée au préalable mais ne correspond pas à la rémunération finale versée, la rémunération contractuelle étant déterminée par le devis soumis pour la première fois par le contractant, en ce qui concerne l’objet contractuel initial, et approuvé par le service du pouvoir adjudicateur. Les éventuels contrats complémentaires conclus dans le cadre du contrat initial doivent compléter l’étude en la délimitant mais ne peuvent en aucun cas l’étendre.

 La procédure précontentieuse

19      Ayant été informée d’éléments faisant apparaître une infraction aux dispositions des directives 92/50 et 2004/18 commise par les communes de Vassilika, de Kassandra, d’Egnatia et d’Arethousa lors de la procédure d’attribution de marchés publics concernant des services complémentaires de cadastrage et d’aménagement urbain qui ne figuraient pas dans le contrat initial, la Commission a engagé la procédure prévue à l’article 258 TFUE.

20      Conformément à cette disposition, la Commission a adressé, le 2 février 2009, une lettre de mise en demeure à la République hellénique, dans laquelle elle constate que lesdites communes ont, en violation des articles 3, paragraphe 2, 8 et 11, paragraphe 3, sous e), de la directive 92/50 ainsi que des articles 2, 20 et 31, point 4, sous a), de la directive 2004/18, conclu des marchés publics de services en recourant à la procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché, alors que ces marchés, attribués chacun au même adjudicataire, étendent l’objet des marchés initiaux en prévoyant des services qui n’étaient pas couverts initialement.

21      Estimant la réponse fournie par la République hellénique insatisfaisante, la Commission a adressé, par lettre du 23 novembre 2009, un avis motivé à cet État membre.

22      Par lettre du 25 janvier 2010, la République hellénique a répondu audit avis motivé en reconnaissant que la passation de tous les marchés publics litigieux est contraire aux dispositions des directives 92/50 et 2004/18 et en annonçant l’adoption d’une série de mesures destinées à garantir le respect des exigences du droit de l’Union.

23      Constatant que les autorités administratives régionales refusent de procéder à l’application effective de ces mesures, alors qu’elles seraient suffisantes et appropriées pour mettre fin à l’infraction si elles étaient contraignantes et si leur respect était garanti dans la pratique, la Commission a décidé d’introduire le présent recours.

 Sur le recours

24      Par son recours, la Commission reproche à la République hellénique d’avoir enfreint les directives 92/50 et 2004/18 en ce que les communes de Vassilika, de Kassandra, d’Egnatia et d’Arethousa ont conclu des marchés publics concernant des services de cadastrage et d’aménagement urbain en recourant à la procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché, alors que ces marchés étendent l’objet des contrats initiaux en prévoyant des services qui n’étaient pas couverts par ceux-ci.

25      Tant dans son mémoire en défense que dans son mémoire en duplique, la République hellénique reconnaît que les marchés publics litigieux, dès lors qu’ils ont été attribués dans le cadre du régime juridique en vigueur antérieurement, tel qu’il résultait de la loi 716/1977, ont été conclus en violation des dispositions des directives 92/50 et 2004/18. En effet, dans le cadre de cette loi, il aurait été impossible de fixer dès l’origine le montant des frais contractuels liés aux études, de manière à ce qu’il soit connu dès le stade de l’attribution, ainsi que l’exigent ces directives. En adoptant la loi 3316/2005 et le décret présidentiel 60/2007, les procédures d’attribution et d’exécution des marchés publics d’études auraient cependant été adaptées au droit de l’Union, en prévoyant que l’élaboration des études serait désormais attribuée sur la base de l’offre financièrement la plus intéressante.

26      La République hellénique souligne avoir informé la Commission des mesures qu’elle a adoptées en vue de contraindre les communes concernées à retirer les marchés publics litigieux. En particulier, elle aurait demandé aux collectivités locales concernées, d’une part, de suspendre immédiatement toute nouvelle action visant à l’exécution des marchés complémentaires en cause et, d’autre part, de retirer toutes les décisions des conseils municipaux concernant la fixation des rémunérations contractuelles des études concernées. Par ailleurs, elle aurait demandé au corps des contrôleurs inspecteurs de l’administration d’effectuer le contrôle-inspection requis des marchés complémentaires passés. Or, les rapports élaborés à cette occasion feraient ressortir que tant l’objet contractuel des études que la fixation des rémunérations contractuelles étaient illégaux. Les communes concernées refuseraient cependant de retirer les marchés publics litigieux au motif que ceux-ci ont été conclus en conformité avec la loi 716/1977.

27      Étant donné l’autonomie administrative et financière des collectivités locales, consacrée par la Constitution hellénique, et les limites étroites auxquelles se heurte une intervention en matière d’administration locale, ledit État membre estime qu’il a déployé tous les efforts possibles pour mettre fin au manquement reproché par la Commission. Il continuerait, par ailleurs, à exercer toutes les pressions possibles sur les organismes impliqués de manière à obtenir le retrait des marchés publics litigieux.

28      Il importe de rappeler que, dans le cadre d’un recours en manquement, introduit en vertu de l’article 258 TFUE par la Commission et dont celle-ci apprécie seule l’opportunité, il appartient à la Cour de constater si le manquement reproché existe ou non, même si l’État concerné ne conteste pas ce manquement (voir, notamment, arrêts du 22 juin 1993, Commission/Danemark, C‑243/89, Rec. p. I‑3353, point 30; du 15 janvier 2002, Commission/Italie, C‑439/99, Rec. p. I‑305, point 20, et du 8 septembre 2005, Commission/Italie, C‑462/04, point 7).

29      En l’espèce, il y a lieu, tout d’abord, de constater qu’il ressort du dossier soumis à la Cour que, tandis que les marchés publics litigieux attribués par la commune de Kassandra ont été conclus avant le 31 janvier 2006, ceux attribués par les communes de Vassilika, d’Egnatia et d’Arethousa ont été conclus après cette date. Il en résulte que, si les premiers marchés publics sont susceptibles de relever de la directive 92/50, les seconds sont, quant à eux, susceptibles d’être soumis aux dispositions de la directive 2004/18, cette dernière directive ayant abrogé et remplacé les dispositions pertinentes de la directive 92/50 à compter du 31 janvier 2006.

30      Par ailleurs, il est constant que les marchés publics litigieux relèvent du champ d’application des directives 92/50 et 2004/18. En effet, d’une part, ils ont été passés par des communes qui constituent, en tant que collectivités territoriales, des pouvoirs adjudicateurs au sens des articles 1er, sous b), de la directive 92/50 ainsi que 1er, paragraphe 9, de la directive 2004/18, qui sont visés à l’article 7 de ces directives. D’autre part, la valeur estimée de chacun desdits marchés excède les seuils prévus audit article 7.

31      Or, en vertu de l’article 11, paragraphe 3, sous e), de la directive 92/50 et de l’article 31, point 4, sous a), de la directive 2004/18, les marchés publics de services, tels que ceux en cause dans la présente affaire, relatifs à des services d’aménagement urbain au sens, respectivement, de l’annexe I A de la première directive et de l’annexe II A de la seconde, peuvent être conclus par les pouvoirs adjudicateurs selon une procédure négociée sans publication d’un avis préalable de marché lorsqu’ils portent sur des services complémentaires ne figurant pas dans le contrat initial, à condition, notamment, d’une part, que, à la suite d’une circonstance imprévue, ils soient devenus nécessaires à l’exécution du service tel qu’il y est décrit et, d’autre part, que la valeur cumulée estimée des marchés passés pour ces services complémentaires ne dépasse pas 50 % du marché initial.

32      Selon la jurisprudence de la Cour, en tant que dérogations aux règles visant à garantir l’effectivité des droits reconnus par le traité FUE dans le secteur des marchés publics de services, l’article 11, paragraphe 3, sous e), de la directive 92/50 et l’article 31, point 4, sous a), de la directive 2004/18 doivent faire l’objet d’une interprétation stricte, et c’est à celui qui entend s’en prévaloir qu’incombe la charge de la preuve que les circonstances exceptionnelles justifiant la dérogation existent effectivement (voir arrêts du 10 avril 2003, Commission/Allemagne, C‑20/01 et C‑28/01, Rec. p. I‑3609, point 58; du 18 novembre 2004, Commission/Allemagne, C‑126/03, Rec. p. I‑11197, point 23; du 11 janvier 2005, Stadt Halle et RPL Lochau, C‑26/03, Rec. p. I‑1, point 46, ainsi que du 8 avril 2008, Commission/Italie, C‑337/05, Rec. p. I‑2173, points 57 et 58).

33      Dans sa requête, la Commission soutient que rien n’indique en l’espèce qu’une circonstance imprévue soit ou puisse être intervenue après l’attribution des marchés publics litigieux, dès lors que les pouvoirs adjudicateurs en cause auraient pu, avant la passation des marchés initiaux, prévoir la nécessité d’inclure également les services complémentaires concernés, à savoir, en l’occurrence, l’extension des zones à urbaniser. Si le besoin d’une telle extension pour des raisons techniques ou économiques, ou liées à l’exécution des services prévus dans le marché initial, pouvait être considéré comme une circonstance imprévue, les pouvoirs adjudicateurs seraient en mesure d’invoquer leur propre échec à estimer et à déterminer précisément l’objet physique et la portée du marché initial pour procéder ensuite à l’attribution de services complémentaires par la conclusion de contrats distincts en violation des principes d’égalité de traitement et de transparence.

34      En tout état de cause, la Commission souligne que, selon les informations en sa possession, le montant des marchés complémentaires concernés dépasse, dans chaque cas, le seuil de 50 % du montant des marchés initiaux fixé par les directives 92/50 et 2004/18.

35      Force est de constater que la République hellénique, à laquelle incombe la charge de prouver que les conditions édictées par les articles 11, paragraphe 3, sous e), de la directive 92/50 et 31, point 4, sous a), de la directive 2004/18 sont remplies, n’a pas entrepris de réfuter ces affirmations.

36      Par ailleurs, cet État membre n’a pas davantage cherché à démontrer que les marchés publics litigieux étaient susceptibles de bénéficier des autres dérogations prévues à l’article 11, paragraphe 3, de la directive 92/50 et à l’article 31 de la directive 2004/18 quant au recours à la procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché.

37      La République hellénique fait certes valoir que la réglementation nationale en matière de marchés publics concernant la réalisation d’études est désormais conforme à la directive 2004/18, dès lors que la loi 3316/2005 et le décret présidentiel 60/2007 disposent que l’élaboration de telles études est attribuée sur la base de l’offre financièrement la plus intéressante et non plus sur la base de la rémunération estimée au préalable par l’expert, ainsi que le prévoyait la loi 716/1977.

38      Toutefois, ainsi que la Commission l’a observé à juste titre, une telle circonstance est sans pertinence dans le cadre du présent recours, dès lors que celui-ci porte sur la conformité des marchés publics litigieux avec les directives 92/50 et 2004/18 et non sur celle de la réglementation nationale en cause avec ces dernières.

39      En outre, il ne ressort en rien de la requête que le manquement allégué dans le cadre du présent recours, tiré de la violation de l’article 11, paragraphe 3, de la directive 92/50 et de l’article 31, point 4, de la directive 2004/18, viserait également le mode de fixation de la rémunération des experts en charge des études relatives aux marchés publics litigieux. En effet, la Commission ne fait nullement valoir, dans son recours, que l’extension des marchés initiaux à des services complémentaires de cadastrage et d’aménagement urbain par les communes concernées dans le cadre de procédures négociées sans publication préalable d’un avis de marché résulterait également du mode de fixation de la rémunération des experts, mais fait valoir uniquement que cette extension résulte de l’adjudication de services supplémentaires après la conclusion des marchés initiaux.

40      Quant aux prétendues difficultés rencontrées par la République hellénique, après l’envoi de sa réponse à l’avis motivé, aux fins d’obtenir le retrait effectif des marchés publics litigieux par les communes concernées, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêts du 30 novembre 2006, Commission/Luxembourg, C‑32/05, Rec. p. I‑11323, point 22, et du 17 janvier 2008, Commission/Allemagne, C‑152/05, Rec. p. I‑39, point 15).

41      Par ailleurs, et en tout état de cause, un État membre ne saurait exciper de dispositions, pratiques ou situations de son ordre juridique interne pour justifier l’inobservation des obligations résultant du droit de l’Union (voir, notamment, arrêts du 10 avril 2003, Commission/France, C‑114/02, Rec. p. I‑3783, point 11, et du 23 avril 2009, Commission/Espagne, C‑321/08, point 9).

42      Dans ces conditions, le recours introduit par la Commission doit être considéré comme fondé.

43      Par conséquent, il convient de constater que, en ayant passé, en recourant à une procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché, des marchés publics ayant pour objet des services complémentaires de cadastrage et d’aménagement urbain qui ne figuraient pas dans le contrat initial conclu par les communes de Vassilika, de Kassandra, d’Egnatia et d’Arethousa, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 8 et 11, paragraphe 3, de la directive 92/50 ainsi que des articles 20 et 31, point 4, de la directive 2004/18.

 Sur les dépens

44      Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République hellénique et celle‑ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) déclare et arrête:

1)      En ayant passé, en recourant à une procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché, des marchés publics ayant pour objet des services complémentaires de cadastrage et d’aménagement urbain qui ne figuraient pas dans le contrat initial conclu par les communes de Vassilika, de Kassandra, d’Egnatia et d’Arethousa, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 8 et 11, paragraphe 3, de la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services, telle que modifiée par la directive 97/52/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 1997, ainsi que des articles 20 et 31, point 4, de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services.

2)      La République hellénique est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: le grec.