Language of document : ECLI:EU:T:2011:371

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

13 juillet 2011 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises au regard de la situation en Côte d’Ivoire – Recours en annulation – Délai de recours – Tardiveté – Irrecevabilité manifeste »

Dans l’affaire T‑348/11,

Laurent Gbagbo, demeurant à Abidjan (Côte d’Ivoire), représenté par Mes L. Bourthoumieux, M. Ceccaldi, R. Dumas, et J. Vergès, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation, d’une part, de la décision 2011/221/PESC du Conseil, du 6 avril 2011, modifiant la décision 2010/656/PESC renouvelant les mesures restrictives instaurées à l’encontre de la Côte d’Ivoire (JO L 93, p. 20), et, d’autre part, du règlement (UE) n° 330/2011 du Conseil, du 6 avril 2011, modifiant le règlement (CE) n° 560/2005 infligeant certaines mesures restrictives spécifiques à l’encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Côte d’Ivoire (JO L 93, p. 10), pour autant qu’ils concernent le requérant,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas (rapporteur), président, V. Vadapalas et K. O’Higgins, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits à l’origine du litige

1        Le requérant, M. Laurent Gbagbo, est ressortissant de la République de Côte d’Ivoire.

2        La décision 2010/656/PESC du Conseil, du 29 octobre 2010, renouvelant les mesures restrictives instaurées à l’encontre de la Côte d’Ivoire (JO L 285, p. 28), telle que modifiée, et le règlement (CE) n° 560/2005 du Conseil, du 12 avril 2005, infligeant certaines mesures restrictives spécifiques à l’encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Côte d’Ivoire (JO L 95, p. 1), tel que modifié, prévoient, notamment, que les personnes et entités incluses dans les listes figurant aux annexes I et II de ladite décision et aux annexes I et I A dudit règlement sont soumises, dans les conditions prévues par ces actes, à des mesures restrictives.

3        Par la décision 2010/801/PESC, du 22 décembre 2010, amendant la décision 2010/656 (JO L 341, p. 45), le Conseil a, notamment, procédé à l’inscription du nom du requérant sur la liste figurant à l’annexe II de la décision 2010/656.

4        Par la décision 2011/18/PESC, du 14 janvier 2011, modifiant la décision 2010/656 (JO L 11, p. 36), et par le règlement (UE) n° 25/2011, du 14 janvier 2011, modifiant le règlement n° 560/2005 (JO L 11, p. 1), le Conseil a, notamment, maintenu le nom du requérant sur ladite liste et procédé à son inscription sur celle figurant à l’annexe I A du règlement n° 560/2005.

5        Par la décision 2011/221/PESC, du 6 avril 2011, modifiant la décision 2010/656 (JO L 93, p. 20), et le règlement (UE) n° 330/2011, du 6 avril 2011, modifiant le règlement (CE) n° 560/2005 (JO L 93, p. 10) (ci-après, pris ensemble, les « actes attaqués »), le Conseil a, notamment, supprimé le nom du requérant de la liste figurant à l’annexe II de la décision 2010/656 et à l’annexe I A du règlement n° 560/2005 et ajouté son nom à la liste figurant à l’annexe I de cette dernière décision et de ce dernier règlement.

 Procédure et conclusions du requérant

6        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 7 juillet 2011, le requérant a introduit le présent recours.

7        Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le même jour, il a introduit une demande de procédure accélérée, au titre de l’article 76 bis du règlement de procédure du Tribunal, ainsi qu’une demande de jugement par priorité, au titre de l’article 55, paragraphe 2, du même règlement.

8        Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les actes attaqués, pour autant qu’ils le concernent ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

 En droit

9        Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

10      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

11      Aux termes de l’article 263, sixième alinéa, TFUE, le recours en annulation doit être formé dans un délai de deux mois à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte attaqué, de sa notification au requérant ou, à défaut, du jour où celui-ci en a eu connaissance. Selon l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, lorsqu’un délai pour l’introduction d’un recours contre un acte d’une institution commence à courir à partir de la publication de l’acte, ce délai court à partir de la fin du quatorzième jour suivant la date de la publication de l’acte au Journal officiel de l’Union européenne. Conformément aux dispositions de l’article 102, paragraphe 2, du même règlement, ce délai doit, en outre, être augmenté d’un délai de distance forfaitaire de dix jours.

12      Selon une jurisprudence constante, ce délai de recours est d’ordre public, ayant été institué en vue d’assurer la clarté et la sécurité des situations juridiques et d’éviter toute discrimination ou traitement arbitraire dans l’administration de la justice. Il appartient au juge de l’Union de vérifier, d’office, s’il a été respecté (voir, notamment, arrêts de la Cour du 23 janvier 1997, Coen, C‑246/95, Rec. p. I‑403, point 21, et du Tribunal du 18 septembre 1997, Mutual Aid Administration Services/Commission, T‑121/96 et T‑151/96, Rec. p. II‑1355, points 38 et 39).

13      En l’espèce, il est constant que les actes attaqués ont été publiés au Journal officiel de l’Union européenne le 7 avril 2011.

14      Le délai de recours de deux mois a commencé à courir, conformément à l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, quatorze jours après cette publication et a expiré le 1er juillet 2011 à minuit, en application de l’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure.

15      Étant donné que la requête a été déposée au greffe du Tribunal le 7 juillet 2011, le présent recours a été introduit tardivement.

16      À cet égard, le requérant fait valoir, dans sa requête, que le délai de recours de deux mois lui est inopposable, étant donné que la décision 2010/656, telle que modifiée, et le règlement n° 560/2005, tel que modifié, ne lui ont pas été notifiés. Cette argumentation ne saurait être acceptée. En effet, compte tenu du fait que les délais de recours visent à sauvegarder la sécurité juridique, en évitant la remise en cause indéfinie des actes de l’Union entraînant des effets de droit, la date de la publication, s’il y en a une, est le critère décisif pour déterminer le point de départ du délai de recours (ordonnances de la Cour du 25 novembre 2008, TEA/Commission, C‑500/07 P, non publiée au Recueil, point 23, et S.A.BA.R./Commission, C‑501/07 P, non publiée au Recueil, point 22 ; du 9 juillet 2009, Fornaci Laterizi Danesi/Commission, C‑498/08 P, non publiée au Recueil, point 22 ; arrêt de la Cour du 11 novembre 2010, Transportes Evaristo Molina/Commission, C‑36/09 P, non encore publié au Recueil, point 37). Un requérant ne peut pas invoquer avoir pris connaissance de l’acte attaqué postérieurement à sa publication afin de retarder ce point de départ (ordonnances TEA/Commission, précitée, point 23 ; S.A.BA.R./Commission, précitée, point 22, et Fornaci Laterizi Danesi/Commission, précitée, point 22). Il s’ensuit que, dès lors que les actes attaqués ont été publiés, le délai de recours doit être calculé à partir de leur publication (voir, s’agissant du calcul du délai de recours contre une décision imposant des mesures restrictives à partir de la publication de celle-ci, ordonnance du Tribunal du 18 novembre 2005, Selmani/Conseil et Commission, T‑299/04, non publiée au Recueil, point 61), même s’ils n’ont pas été notifiés au requérant. À cet égard, il convient d’ailleurs de relever que le Conseil a publié, le 7 avril 2011, deux avis à l’attention des personnes auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues dans la décision 2010/656 et le règlement n° 560/2005 (JO C 108, p. 2 et 4), par lesquels il a, notamment, attiré l’attention des personnes concernées sur la possibilité de contester sa décision devant le Tribunal, dans les conditions prévues à l’article 275, deuxième alinéa, TFUE, et à l’article 263, quatrième et sixième alinéas, TFUE.

17      Enfin, il convient de relever que le requérant n’a ni établi ni même invoqué l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure permettant de déroger au délai en cause sur la base de l’article 45, second alinéa, du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53 dudit statut.

18      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable.

19      Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes de procédure accélérée et de jugement par priorité.

 Sur les dépens

20      La présente ordonnance ayant été adoptée avant que le Conseil n’ait pu exposer de dépens, il suffit de décider que le requérant supportera ses propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Laurent Gbagbo supportera ses propres dépens.

3)      Il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes de procédure accélérée et de jugement par priorité.

Fait à Luxembourg, le 13 juillet 2011.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       S. Papasavvas


* Langue de procédure : le français.